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Rapport définitif - Rapport No. 396, Octobre 2021

Cas no 3133 (Colombie) - Date de la plainte: 03-JUIN -15 - Clos

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Allégations: L’organisation plaignante dénonce l’annulation par voie judiciaire de l’enregistrement syndical de la sous-direction Sopo du syndicat HOCAR, qui serait le résultat d’actes antisyndicaux systématiques de la part de l’entreprise Golf and Tennis Country Club. L’organisation plaignante dénonce également le refus de l’entreprise de négocier collectivement avec la sous-direction précitée

  1. 189. La plainte figure dans une communication du 3 juin 2015 envoyée par le Syndicat national des travailleurs de la production, de la distribution et de la consommation d’aliments, de boissons et d’autres services fournis dans les clubs, hôtels, restaurants et similaires de Colombie (HOCAR).
  2. 190. Le gouvernement de la Colombie a fait part de ses observations concernant les allégations dans des communications datées du 16 mai 2016 et du 8 mai 2019.
  3. 191. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 192. Dans sa communication datée du 3 juin 2015, le syndicat HOCAR allègue que l’entreprise Golf and Tennis Country Club (ci-après «l’entreprise») a commis plusieurs actes antisyndicaux afin d’obtenir la disparition de sa sous-direction établie dans la municipalité de Sopo (ci-après «la sous-direction»), et que la décision du Tribunal supérieur du district judiciaire de Cundinamarca d’annuler l’enregistrement syndical de ladite sous-direction, ainsi que le refus de l’entreprise de négocier collectivement, violent les conventions nos 87, 98 et 154.
  2. 193. L’organisation plaignante indique être un syndicat d’industrie comptant plus de 4 000 membres dans toute la Colombie et être affiliée à la Confédération générale du travail (CGT). Elle indique que, le 9 novembre 2009, des travailleurs liés à l’entreprise se sont réunis à Sopo, dans le département de Cundinamarca, et que 27 d’entre eux ont signé le procès-verbal de l’assemblée qui a fondé la sous-direction.
  3. 194. Selon l’organisation plaignante, l’entreprise a adopté un comportement antisyndical prémédité et systématique depuis la création de la sous-direction à l’encontre de ses membres et de ses dirigeants. Elle affirme que l’entreprise, de mauvaise foi, a opposé de nombreux obstacles à la discussion du cahier de revendications qu’elle a présenté le 9 novembre 2012. L’organisation plaignante indique que, aucun accord n’ayant été obtenu concernant le cahier de revendications durant la phase de règlement direct, un tribunal d’arbitrage a été mis en place, lequel a rendu une sentence arbitrale le 26 mai 2014. Elle indique que l’entreprise a déposé un recours extraordinaire en annulation de la sentence arbitrale, qui est actuellement en instance devant la chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice.
  4. 195. L’organisation plaignante affirme que, depuis la présentation du cahier de revendications, l’entreprise s’est consacrée à la destruction de la sous-direction, suscitant la démission de ses membres par le biais de menaces, de dons et de promesses qui constituent une conduite antisyndicale interdite et sanctionnée par la loi no 27 de 1976, l’article 354 du Code du travail (CST) et l’article 200 du Code pénal.
  5. 196. L’organisation plaignante indique également que, par le biais d’une lettre datée du 17 février 2015, la directrice des ressources humaines de l’entreprise a indiqué aux travailleurs affiliés au syndicat HOCAR que l’organisation syndicale avait cessé d’exister légalement et qu’elle ne pouvait donc poursuivre ses activités qu’aux seules fins de sa liquidation et de sa dissolution.
  6. 197. L’organisation plaignante indique que l’entreprise a intenté deux actions en justice, demandant la dissolution, la liquidation et l’annulation de la personnalité juridique de la sous-direction au motif que le nombre de membres de la sous-direction était inférieur au minimum requis par le CST. Elle fait savoir que le premier procès a été tranché en faveur de la sous-direction dans un jugement du 27 novembre 2014 par le juge unique du travail du circuit de Girardot et que ce jugement n’a pas été frappé d’appel.
  7. 198. L’organisation plaignante explique que le second procès, qui visait à nouveau la dissolution de la sous-direction, a été jugé en sa faveur le 19 mars 2015 par le juge unique du travail du circuit de Girardot, mais que ce jugement a été frappé d’appel par l’entreprise. En deuxième instance, le Tribunal supérieur du district judiciaire de Cundinamarca, dans un jugement du 4 mai 2015, et de manière étrangement diligente, a annulé la décision du tribunal et ordonné en lieu et place l’annulation de l’enregistrement syndical de la sous-direction.
  8. 199. Selon l’organisation plaignante, le jugement du 4 mai 2015 est manifestement contraire à la législation du travail colombienne, entre autres, parce que la dissolution et la radiation du registre syndical ne peuvent être appliquées qu’aux syndicats, fédérations et confédérations conformément à l’article 401 du CST et en aucun cas aux syndicats d’industrie tels que le syndicat HOCAR. En outre, elle considère que ce jugement ne reconnaît pas le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix et de s’y affilier.
  9. 200. En ce qui concerne la composition de la sous-direction, l’organisation plaignante dénonce le fait que le jugement du 4 mai 2015 se fonde sur une déclaration hors contexte, faite devant un tribunal arbitral, pour établir que la sous-direction est passée de 30 à 13 travailleurs.
  10. 201. L’organisation plaignante affirme également que ce jugement ne tient pas compte du fait que, lorsque le syndicat a présenté le cahier de revendications et pendant le conflit collectif, l’entreprise a sanctionné les dirigeants syndicaux, licencié un membre du syndicat et obtenu la démission de 16 travailleurs du syndicat par des pressions. L’organisation plaignante indique que le jugement considère comme preuves complètes les passages de la sentence arbitrale du 26 mai 2014 qui sont défavorables à la sous direction, mais ignore les graves allégations de persécution syndicale de ses dirigeants et membres.
  11. 202. Selon l’organisation plaignante, il y a également une violation de la convention no 98 et du droit à la protection contre la discrimination antisyndicale. En particulier, l’organisation plaignante affirme que l’entreprise subordonne le maintien dans l’emploi à la condition que le travailleur n’adhère pas au syndicat ou s’en désaffilie, et qu’elle désavantage certains travailleurs en raison de leur appartenance au syndicat, abusant du ius variandi et modifiant les conditions au détriment du travailleur.
  12. 203. L’organisation plaignante affirme en outre que la convention no 154 et la loi no 411/1997 sont également constamment violées par l’entreprise en refusant de régler pacifiquement les différends qui surgissent en rapport avec la détermination des conditions d’emploi des travailleurs syndiqués, et en menant des procédures disciplinaires internes qui ne sont pas indépendantes et impartiales, et avec des personnes non qualifiées dont l’issue est déjà préparée à l’avance, en violant systématiquement le droit à la défense et à un procès équitable en accusant et en jugeant sans preuves.
  13. 204. À cet égard, l’organisation plaignante allègue spécifiquement que l’entreprise: i) a engagé des procédures disciplinaires infondées contre les membres et les dirigeants de la sous-direction, notamment M. Juan Domingo Casas, qui a été licencié, et M. Ricaute Ortiz, Mme Adriana Ballen et M. Carlos Augusto Segura, qui ont été suspendus respectivement pour trois, huit et soixante jours; ii) a refusé aux membres de la sous direction le droit de s’opposer au règlement intérieur du travail; iii) a émis des communiqués adressés aux membres nouvellement syndiqués leur reprochant l’exercice légitime de leur syndicalisation; iv) n’a pas cotisé en temps voulu au fonds de pension de Mme Helena Prieto et l’a obligée à démissionner du syndicat pour pouvoir verser au fonds de pension ce qu’elle lui devait (plus de trois ans de cotisations); et v) refuse à ses membres le droit à la mobilité salariale depuis deux ans et cinq mois tout en augmentant les salaires de deux travailleurs après trois mois de désaffiliation du syndicat.
  14. 205. L’organisation plaignante indique que, face aux actes de persécution syndicale précités, les travailleurs syndiqués ont déposé des plaintes administratives auprès de l’inspection du travail de la ville de Zipaquirá le 28 mai 2013 (dossier no 232-139) et auprès du ministère du Travail (Direction territoriale de Cundinamarca) le 3 septembre 2013. Elle indique également qu’une plainte pénale a été déposée contre l’entreprise le 13 mai 2013 auprès du bureau du Procureur général de la nation (no 0142123) pour des actes violant le droit d’association syndicale. L’organisation plaignante déclare que, à ce jour, elle n’a obtenu aucun résultat en rapport avec les actions susmentionnées.
  15. 206. L’organisation plaignante affirme que les travailleurs et les dirigeants de la sous direction ont épuisé toutes les voies de recours administratifs et judiciaires en Colombie, sans obtenir une décision ou une sentence favorable qui les rétablirait dans leur droit à la liberté syndicale. Elle affirme que, en Colombie, il n’existe pas de garanties administratives ou judiciaires adéquates contre les actes de discrimination antisyndicale et que cela a pour effet de faire disparaître les organisations de travailleurs.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 207. Dans sa communication du 16 mai 2016, le gouvernement se réfère d’abord à la réponse de l’entreprise, qui souligne qu’aujourd’hui le syndicat HOCAR ne représente aucun de ses travailleurs, y compris ceux qui appartenaient auparavant à la sous-direction, et que, par conséquent, l’organisation plaignante ne peut pas porter plainte ou mentionner des violations alléguées de la liberté syndicale, du droit d’association et de négociation collective en particulier.
  2. 208. En ce qui concerne le cahier de revendications présenté par l’organisation plaignante, l’entreprise nie les allégations et indique qu’elle n’a jamais agi de mauvaise foi et qu’elle pouvait difficilement faire obstacle à un cahier de revendications qui a été élaboré directement par les membres de l’organisation syndicale et qui a été discuté entre les dirigeants de l’organisation syndicale et la commission de négociation que l’entreprise a désignée dans les termes et étapes prévus par la loi sur le travail.
  3. 209. L’entreprise rejette également les allégations de comportement antisyndical qui auraient conduit à de prétendues démissions de membres de la sous-direction et dénonce les nombreuses plaintes déposées par le syndicat devant les autorités administratives, toutes téméraires et sans aucun élément de preuve.
  4. 210. En ce qui concerne la lettre du 17 février 2015 envoyée par sa directrice des ressources humaines, l’entreprise indique qu’il est vrai que par tous les moyens les dirigeants de l’organisation syndicale ont été informés que, conformément à l’article 359 du CST qui établit le nombre minimum de membres que doit avoir toute organisation syndicale en Colombie, la sous-direction avait moins de 25 travailleurs affiliés, raison pour laquelle elle ne pouvait pas subsister, et sa seule fonction serait de procéder à sa liquidation et dissolution.
  5. 211. L’entreprise affirme également qu’il est vrai que le Tribunal supérieur de Cundinamarca a annulé le jugement de première instance, qui avait ignoré la législation colombienne sur le nombre minimum de membres qu’une organisation syndicale doit avoir en Colombie et n’avait pas pris en compte les preuves présentées par l’entreprise. Au lieu de cela, le jugement de deuxième instance a ordonné, conformément à la loi, l’annulation de l’enregistrement syndical de la sous-division du syndicat HOCAR.
  6. 212. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles elle aurait sanctionné des dirigeants syndicaux, licencié un membre du syndicat et fait pression sur 16 travailleurs pour qu’ils démissionnent du syndicat, l’entreprise déclare qu’il s’agit simplement d’appréciations subjectives de l’organisation plaignante, qui sont non seulement téméraires mais également erronées, car l’entreprise n’a jamais sanctionné ou licencié injustement un travailleur. L’entreprise soutient que toutes les procédures disciplinaires qu’elle a engagées à l’encontre de ses travailleurs ont été menées conformément à toutes les exigences légales et constitutionnelles et dans le respect des procédures. Elle affirme que, s’il y a eu des démissions de certains travailleurs de cette organisation syndicale, celles-ci ont été le résultat des mauvaises politiques et des mauvaises orientations syndicales qui ont été inculquées à ses travailleurs affiliés et que, en désaccord avec les orientations reçues, ils ont librement et volontairement décidé de se retirer de cette organisation syndicale. En ce qui concerne les allégations relatives aux plaintes pour persécution syndicale, l’entreprise soutient également que le juge de deuxième instance ne pouvait pas se prononcer sur des faits qui lui étaient totalement inconnus et qui n’avaient rien à voir avec le procès que l’entreprise a intenté à l’organisation syndicale en vue de l’annulation de l’enregistrement syndical de la sous-direction. En ce qui concerne la composition de la sous-direction, l’entreprise indique que le jugement du 4 mai 2015 n’a retenu aucune déclaration hors contexte et a effectivement conclu que l’organisation syndicale comptait 13 travailleurs, ce qui signifie qu’elle ne pouvait pas exister légalement.
  7. 213. En ce qui concerne l’allégation relative au cas de Mme Prieto, l’entreprise déclare que l’organisation plaignante n’a aucune légitimité pour se prononcer à propos de cette personne, et que les faits allégués sont totalement inexistants et faux. Elle indique que, à ce jour, elle n’a reçu aucune demande verbale ou écrite de Mme Prieto concernant des contributions pour la reconnaissance de sa pension.
  8. 214. L’entreprise indique également que, en ce qui concerne le prétendu déni aux membres du syndicat du droit à la mobilité salariale, si les salaires des travailleurs syndiqués n’ont pas été augmentés, c’est parce que le syndicat a choisi de soumettre le conflit collectif à un tribunal d’arbitrage, qui est actuellement examiné par la Cour suprême de justice.
  9. 215. Après avoir communiqué la position de l’entreprise, le gouvernement fournit ses propres observations sur la plainte. Le gouvernement se réfère d’abord aux actions de l’inspection du travail de Zipaquirá, qui: i) a reçu le 28 mai 2013 une plainte de Mme Ballen, présidente de la sous-direction, pour violation alléguée du droit à l’égalité, persécution syndicale alléguée et violation alléguée de la convention collective (dossier no 232-139); ii) a reçu le 7 janvier 2015 une plainte de M. Manuel Bayona Espinosa, président du syndicat HOCAR, pour comportement antisyndical allégué (dossier no 25-273); iii) a joint les deux plaintes le 18 juin 2015 à la demande des plaignants; iv) a reçu le 26 mai 2015 une plainte de M. David Polo Aguas, dirigeant du syndicat HOCAR, pour comportement antisyndical présumé (dossier no 359-313), et a envoyé une réponse au plaignant pour qu’il se présente dans les cinq jours ouvrables suivants pour notification de la décision d’ouvrir une enquête administrative préliminaire, mais il ne s’est pas présenté; et v) a reçu d’autres plaintes de Mme Ballen le 28 avril 2015 pour des allégations de persécution syndicale (dossier no 263-301) et le 12 mai 2015 pour des allégations de harcèlement au travail (dossier no 317-307). Le gouvernement complète ces informations dans sa communication du 8 mai 2019, dans laquelle il indique que: i) concernant le dossier no 232-139, il a été décidé d’acquitter l’entreprise, et la procédure administrative a été close le 10 octobre 2018; ii) concernant le dossier no 263-301, la procédure administrative a été close le 9 octobre 2018, car il n’y avait pas lieu d’ouvrir un processus de sanction administrative à l’encontre de l’entreprise; et iii) en ce qui concerne le dossier no 317-307, l’enquête n’a pas été poursuivie, car la plaignante a signalé le 14 octobre 2015 qu’elle avait mis fin à son contrat avec l’entreprise d’un commun accord et qu’elle n’était pas intéressée par la poursuite de la plainte.
  10. 216. En ce qui concerne le recours extraordinaire en annulation de la sentence arbitrale introduit par l’entreprise, le gouvernement, se référant à la décision de la Cour constitutionnelle dans l’arrêt T-248 de 2014, indique que la protection du droit de négociation collective n’implique pas en soi la conclusion d’un accord ou l’obligation pour l’une des parties d’accepter des conditions qu’elle ne partage pas, le but de la Constitution étant de garantir l’ouverture des pourparlers correspondants. Selon le gouvernement, il n’y a pas eu de violation de la négociation collective, et encore moins de refus de négocier de la part de l’entreprise, étant donné que toutes les étapes légalement établies aux articles 433 et 434 du CST pour le traitement d’une négociation collective ont été suivies, y compris la sentence arbitrale. S’il est vrai que l’entreprise a fait valoir son droit d’introduire un recours extraordinaire en annulation, cela ne signifie pas qu’elle viole les conventions nos 98 et 154.
  11. 217. D’autre part, en ce qui concerne le prétendu comportement antisyndical de la part de l’entreprise qui aurait conduit à la démission des membres de la sous-direction, le gouvernement souligne que les copies des démissions fournies par l’organisation plaignante montrent qu’elles ont été présentées volontairement par les membres et qu’elles s’échelonnent de 2009 à 2013, et qu’aucune autre preuve n’est fournie pour démontrer qu’il y a eu coercition, pression ou tout autre type de comportement de la part de l’entreprise qui aurait conduit aux démissions en question. Le gouvernement réaffirme que la liberté syndicale inclue à la fois la liberté d’adhérer et la liberté de ne pas adhérer ou de se retirer d’un syndicat, sinon le droit d’association lui-même serait nul et non avenu.
  12. 218. Concernant le jugement du 4 mai 2015, le gouvernement se réfère à l’article 391-1 du CST, selon lequel tout syndicat peut prévoir dans ses statuts la création de sous directions de section comptant au moins 25 membres. S’appuyant à nouveau sur la jurisprudence de la Cour constitutionnelle, le gouvernement indique que l’entreprise pouvait s’adresser aux tribunaux ordinaires pour demander la dissolution de la sous direction et qu’elle ne violait pas les droits syndicaux, puisqu’elle ne limitait pas le droit des travailleurs d’appartenir à un syndicat et que la disparition de la sous-direction ne signifiait pas que les travailleurs affiliés n’appartenaient plus au syndicat, en l’occurrence le syndicat HOCAR.
  13. 219. Le gouvernement affirme également que le Tribunal supérieur du district judiciaire de Cundinamarca ne limite pas le droit d’association; il exerce simplement l’une de ses fonctions, qui consiste à statuer sur les appels interjetés par les tribunaux du travail du circuit. Le gouvernement rappelle que les décisions prises dans ce cas ont été adoptées dans le cadre de processus judiciaires réalisés conformément aux exigences de la Constitution et de la loi.
  14. 220. Le gouvernement déclare en outre qu’il a pris toutes les mesures nécessaires lorsqu’il a été appelé à protéger les droits syndicaux par le biais d’inspections et de contrôles et d’enquêtes administratives. Il prie donc le comité d’inviter le Conseil d’administration à ne pas poursuivre l’examen de ce cas.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 221. Le comité note que, dans le cas présent, l’organisation plaignante dénonce: i) l’existence d’actes antisyndicaux systématiques de la part de l’entreprise en vue d’obtenir la disparition d’une de ses sous-directions de section, et la non-prise en compte de ces actes dans la décision du Tribunal supérieur du district judiciaire de Cundinamarca d’annuler l’enregistrement syndical de la sous-direction; et ii) le refus de l’entreprise de négocier collectivement.
  2. 222. Le comité prend note de la chronologie des événements fournie tant par l’organisation plaignante que par le gouvernement, à savoir: le 9 novembre 2009, 27 travailleurs de l’entreprise ont fondé la sous-direction qui fait l’objet du présent cas. Entre 2009 et 2013, plusieurs travailleurs affiliés à la sous-direction ont démissionné du syndicat. Le 9 novembre 2012, l’organisation plaignante a présenté un cahier de revendications, qui n’a pas permis de trouver un accord lors de la phase de règlement direct. En 2013, les travailleurs syndiqués ont déposé plusieurs plaintes administratives pour persécution syndicale auprès de l’administration du travail, ainsi qu’une plainte pénale pour actes violant le droit d’association syndicale auprès du bureau du Procureur général de la nation. Un tribunal arbitral a été mis en place pour régler la question du cahier de revendications et, le 26 mai 2014, une sentence arbitrale a été rendue. L’entreprise a formé un recours extraordinaire en annulation contre la sentence arbitrale, qui est toujours en instance devant la chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice. Pour sa part, l’entreprise a intenté deux actions en justice visant à obtenir la dissolution, la liquidation et l’annulation de la personnalité juridique de la sous direction, alléguant qu’elle ne disposait pas du nombre minimum de travailleurs affiliés requis par la loi. Le 27 novembre 2014, le premier procès a été tranché en faveur de l’organisation plaignante et la décision n’a pas fait l’objet d’un appel. Le 19 mars 2015, le deuxième procès a été tranché en faveur de l’organisation plaignante et cette décision a fait l’objet d’un appel de la part de l’entreprise. Le 4 mai 2015, le Tribunal supérieur du district judiciaire de Cundinamarca a annulé le jugement de première instance et ordonné en lieu et place l’annulation de l’enregistrement syndical de la sous-direction. En 2015, trois plaintes supplémentaires ont été déposées par des travailleurs affiliés à l’organisation plaignante. Entre 2015 et 2018, deux des plaintes déposées auprès de l’inspection du travail ont été archivées et une a été classée sans suite.
  3. 223. En ce qui concerne les actes antisyndicaux présumés commis par l’entreprise, le comité note que l’organisation plaignante allègue que l’entreprise a obtenu la désaffiliation de 16 travailleurs par une série de suggestions, de pressions et de menaces qui, entre autres, auraient inclus: i) l’abus du ius variandi et la modification des conditions de travail des travailleurs affiliés; ii) des procédures disciplinaires et des sanctions infondées à l’encontre de membres et de dirigeants de la sous-direction, y compris le licenciement de M. Juan Domingo Casas; iii) le défaut de cotisations au fonds de pension de Mme Helena Prieto jusqu’à ce qu’elle démissionne du syndicat; et iv) le refus aux membres du syndicat du droit à la mobilité salariale. En ce qui concerne le jugement du Tribunal supérieur du district judiciaire de Cundinamarca du 4 mai 2015, qui a annulé la décision de première instance et ordonné l’annulation de l’enregistrement de la sous-direction pour non-respect du nombre minimum de travailleurs enregistrés prévu par le CST, le comité note que l’organisation plaignante allègue que: i) le jugement a établi sur la base d’une déclaration hors contexte (un document du tribunal d’arbitrage) que la composition de la sous-direction était passée de 30 à 13 travailleurs; et ii) il n’a pas tenu compte du fait que l’entreprise a sanctionné des dirigeants syndicaux, licencié injustement un membre et fait pression pour que 16 travailleurs démissionnent du syndicat.
  4. 224. Le comité prend note également de la réponse de l’entreprise communiquée par le gouvernement, dans laquelle elle nie catégoriquement la commission de tout acte antisyndical et déclare en particulier que: i) les nombreuses plaintes déposées par le syndicat auprès des autorités administratives sont fondées sur de fausses accusations, sont téméraires et sans aucun élément de preuve; ii) les démissions de membres sont la conséquence des mauvaises orientations de l’organisation syndicale qui, à l’heure actuelle, ne représente plus aucun travailleur de l’entreprise; iii) aucun travailleur n’a été sanctionné ou licencié injustement et toutes les procédures disciplinaires ont été menées conformément à toutes les exigences légales et constitutionnelles; iv) l’entreprise nie les allégations relatives à Mme Prieto, au sujet de laquelle elle n’a connaissance d’aucune plainte; et v) les salaires des travailleurs syndiqués n’ont pas été augmentés parce que le syndicat a soumis le conflit collectif à un tribunal d’arbitrage dont la sentence a été contestée devant la Cour suprême de justice. En ce qui concerne l’annulation judiciaire de l’enregistrement de la sous-direction, le comité note que l’entreprise déclare que le jugement, sur la base des preuves, a conclu que le syndicat comptait 13 travailleurs et qu’il ne pouvait pas exister légalement.
  5. 225. Le comité note également que, pour sa part, le gouvernement déclare que: i) l’inspection du travail a mené toutes les actions nécessaires lorsqu’il lui a été demandé d’intervenir; ii) les membres ont volontairement démissionné du syndicat, sans qu’il y ait de preuve de coercition, de pression ou de tout autre type de comportement de la part de l’entreprise ayant conduit aux démissions susmentionnées; iii) l’entreprise pouvait s’adresser aux tribunaux ordinaires pour demander la dissolution de la sous-direction sans violer le droit des travailleurs d’appartenir au syndicat HOCAR; et iv) les jugements rendus par le pouvoir judiciaire en l’espèce étaient conformes à toutes les exigences énoncées dans la Constitution et la loi.
  6. 226. Le comité prend note des différents éléments fournis par les parties. Il constate que la première allégation du cas concerne la dissolution judiciaire d’une sous-division de l’organisation plaignante au motif qu’elle ne dispose plus du nombre minimum de membres spécifié dans le CST. Le comité note que l’organisation syndicale affirme que la réduction du nombre de membres est le résultat d’une série de pressions et d’actes antisyndicaux menés par l’entreprise, éléments qui n’auraient pas été pris en considération par le tribunal de deuxième instance dans son jugement, alors que l’entreprise et le gouvernement nient l’existence d’actes antisyndicaux et soulignent la validité de la décision judiciaire de dissolution.
  7. 227. Le comité rappelle que, dans un cas où il a conclu que la diminution du nombre des travailleurs affiliés au syndicat, jusqu’à ce qu’il ne compte plus le minimum requis de 25 membres, était la conséquence de menaces et de licenciements antisyndicaux, il a demandé au gouvernement de vérifier si ces licenciements étaient de nature antisyndicale et si les démissions des dirigeants syndicaux étaient le résultat de pressions ou de menaces de la part de l’employeur, d’appliquer les sanctions prévues par la législation, de réintégrer dans leur poste de travail les travailleurs congédiés et de permettre la reconstitution du syndicat dissous. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 985.] Le comité note que, dans le cas présent, plusieurs plaintes administratives pour actes antisyndicaux ont été déposées auprès de l’administration du travail par des travailleurs affiliés à l’organisation plaignante, dont deux ont été archivées par l’inspection du travail et une n’a pas été poursuivie par la plaignante , suite à l’expiration de son contrat avec l’entreprise. Le comité note en même temps qu’aucune information spécifique n’a été fournie sur l’issue de la plainte pénale pour actes portant atteinte au droit d’association syndicale devant le bureau du Procureur général de la nation et de la plainte administrative pour persécution syndicale devant le ministère du Travail déposées par des travailleurs syndiqués de l’entreprise le 13 mai et le 3 septembre 2013, respectivement.
  8. 228. Rappelant que, lorsqu’elles sont saisies de plaintes en discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatés [voir Compilation, paragr. 1159], le comité veut croire que le gouvernement s’assurera que toutes les plaintes administratives et pénales liées au présent cas ont été dûment examinées en temps voulu par les autorités en vue de garantir le plein respect de la liberté syndicale dans l’entreprise concernée.
  9. 229. En ce qui concerne les allégations relatives au refus de l’entreprise de négocier collectivement, le comité note que l’organisation plaignante soutient que l’entreprise a agi de mauvaise foi, en plaçant de nombreux obstacles sur la voie de la discussion de son cahier de revendications et en refusant d’accepter la sentence rendue par le tribunal d’arbitrage. Le comité note en outre la position concordante de l’entreprise et du gouvernement, qui nient les allégations et affirment que le cahier de revendications a été discuté entre l’organisation plaignante et la commission de négociation nommée par l’entreprise et que toutes les étapes prévues par le CST pour la conduite d’une négociation collective ont été suivies. Le comité note qu’une sentence arbitrale a été rendue le 26 mai 2014 et que l’entreprise a introduit un recours extraordinaire en annulation, qui est toujours en cours, contre la sentence arbitrale devant la Cour suprême de justice. À cet égard, le comité prend note en particulier de l’indication de l’entreprise selon laquelle la modification des salaires des travailleurs syndiqués ne pouvait pas avoir lieu avant le prononcé du jugement de la Cour suprême. Le comité regrette le retard excessif de ce processus et l’impossibilité prolongée pour les travailleurs syndiqués d’avoir accès aux augmentations salariales. Le comité observe que la situation décrite dans le présent cas peut avoir un effet dissuasif sur l’exercice de la liberté syndicale et souligne en outre l’importance de disposer de mécanismes efficaces de règlement volontaire des conflits collectifs pour la promotion effective de la négociation collective. Le comité veut donc croire que la Cour suprême de justice se prononcera très prochainement sur ce recours.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 230. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité veut croire que le gouvernement s’assurera que toutes les plaintes administratives et pénales liées au présent cas ont été dûment examinées en temps voulu par les autorités en vue de garantir le plein respect de la liberté syndicale dans l’entreprise concernée.
    • b) Le comité veut croire que la Cour suprême de justice se prononcera très prochainement sur le recours en annulation de la sentence arbitrale du 26 mai 2014 introduit par l’entreprise.
    • c) Le comité considère que le présent cas n’appelle pas un examen plus approfondi et qu’il est clos.
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