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Rapport définitif - Rapport No. 400, Octobre 2022

Cas no 3306 (Pérou) - Date de la plainte: 08-SEPT.-17 - Clos

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Allégations: L’organisation plaignante allègue la violation du droit de négociation collective d’un syndicat de travailleurs de l’économie informelle, ainsi que la perpétration d’actes antisyndicaux par une entreprise du secteur de la pêche. Elle dénonce en outre l’arrestation de dirigeants syndicaux ayant participé à une manifestation et leur condamnation à des peines d’emprisonnement

  1. 593. La plainte figure dans des communications de la Centrale autonome des travailleurs du Pérou datées du 8 septembre 2017 et du 19 février 2018.
  2. 594. Le gouvernement a répondu aux allégations dans des communications datées du 23 août, du 2 octobre et du 22 novembre 2018, ainsi que du 22 janvier et du 5 avril 2019.
  3. 595. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 596. Dans sa communication du 8 septembre 2017, l’organisation plaignante indique qu’en novembre 2013 des dockers du secteur de l’économie informelle et travaillant sur le marché de Villa María del Triunfo ont fondé le Syndicat des travailleurs de la manutention, de la vente de produits de la mer et d’autres domaines d’activité connexes de Villa María Del Triunfo - Lima (ci-après «le syndicat») pour améliorer leur situation d’emploi précaire. L’organisation plaignante fait valoir que le syndicat a été reconnu et enregistré par le ministère du Travail et de la Promotion de l’emploi (ci-après «le MTPE») par voie d’inscription automatique en date du 13 janvier 2014.
  2. 597. L’organisation plaignante affirme que l’entreprise Servicios Industriales Pesqueros S.A. (ci après «l’entreprise»), propriétaire du marché susmentionné sur lequel plusieurs propriétaires de véhicules viennent vendre des produits de la mer en gros et au détail, a refusé de reconnaître le syndicat au motif que toutes les demandes étaient traitées individuellement.
  3. 598. L’organisation plaignante indique qu’en juillet 2014 le syndicat a soumis à l’entreprise un cahier de revendications dans lequel: i) il faisait essentiellement référence aux conditions de travail liées au fonctionnement du marché (par exemple, la gestion des situations d’urgence sur le marché, l’élaboration d’un règlement interne prévoyant une signalisation adéquate pour la circulation piétonne au sein du marché, le stationnement adéquat des camions afin qu’ils ne bloquent pas les accès d’entrée et de sortie, des installations sanitaires en bon état, etc.), dans le but de garantir le respect des normes minimales énoncées dans la loi no 29783 sur la sécurité et la santé au travail; et ii) il demandait que les travailleurs n’aient pas à s’acquitter d’une contribution journalière pour pouvoir accéder au marché.
  4. 599. L’organisation plaignante déclare que: i) en septembre 2014, l’entreprise a formé un recours devant le MTPE pour contester la recevabilité du cahier de revendications susmentionné; ii) en dépit de ce qui précède, le syndicat a pu engager des négociations directes avec les propriétaires de l’entreprise; et iii) le 1er octobre 2014, les parties n’ayant pas réussi à trouver un accord et l’entreprise ayant refusé de faire une contre-proposition, le syndicat a informé cette dernière, par lettre notariée, que s’il ne recevait pas ses propositions dans un délai de soixante-douze heures, il soumettrait une demande de conciliation au MTPE.
  5. 600. L’organisation plaignante affirme que l’entreprise, au lieu de chercher une solution par la voie du dialogue, a commencé à se livrer à des pratiques antisyndicales. Elle soutient que l’entreprise a fait pression sur les propriétaires des véhicules (qui sont ceux qui contractent directement les services d’arrimage et de désarrimage) afin qu’ils licencient les dirigeants du syndicat, et se réfère au cas de M. Anthony Ilasaca Zuasnabar, secrétaire général adjoint du syndicat, qui a dénoncé ces agissements auprès du MTPE et du commissariat de Villa María del Triunfo. L’organisation plaignante affirme en outre que l’entreprise a refusé aux propriétaires des camions le droit d’accéder au marché pour y décharger et y vendre leurs produits de la mer, et que la direction du syndicat a dû intervenir et insister pour que l’accès leur soit finalement accordé. Selon l’organisation plaignante, ces actes avaient pour but d’empêcher les syndicalistes de travailler et d’intimider non seulement les travailleurs mais aussi les propriétaires des produits, neutralisant ainsi toute tentative d’organisation.
  6. 601. L’organisation plaignante indique que le syndicat a tenu le 14 octobre 2014 une réunion d’information consacrée aux mesures qu’il convenait de prendre pour prévenir les pratiques abusives de l’entreprise, réunion qui a été suivie, le 15 octobre 2014, d’une manifestation publique et pacifique. Elle indique que cette manifestation a entraîné une interruption du travail d’une durée d’environ trois heures.
  7. 602. L’organisation plaignante affirme qu’à la suite de cette manifestation l’entreprise a porté plainte auprès du ministère public contre les sept dirigeants du syndicat (M. Ilasaca Zuasnabar, cité plus haut, et MM. Carlos López Ramírez, Carlos López Castillo, Hilmer López Pajares, Daniel Flores Ruesta, Carlos Minaya Panamá et John Zavala Panduro), les accusant d’avoir commis de multiples infractions (vandalisme, atteintes à la liberté individuelle, dégradation de biens, troubles à l’ordre public, etc.). Selon l’organisation plaignante, cette plainte fait partie d’une stratégie criminelle au moyen de laquelle l’entreprise cherche à décourager la syndicalisation par la peur et à éliminer les dirigeants.
  8. 603. L’organisation plaignante soutient que le minsitère public a statué sur la plainte avec une rapidité inhabituelle, concluant malencontreusement que l’affaire était complexe, et l’a transmise au premier parquet pénal de Villa María del Triunfo. Elle affirme en outre que M. Ilasaca Zuasnabar a été arrêté sans notification préalable adressée à son domicile puis conduit, menotté, dans une cellule pour faire une déposition.
  9. 604. L’organisation plaignante indique que le 13 mars 2017 le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo a condamné les dirigeants du syndicat à six ans d’emprisonnement effectif pour délits contre la paix et la tranquillité publiques, ainsi que pour troubles au détriment de l’entreprise. Elle signale que les dirigeants syndicaux ont dû entrer dans la clandestinité pour éviter de purger ces peines injustes.
  10. 605. L’organisation plaignante indique en outre que dans une décision du 26 décembre 2014 (arrêté directorial no 524-2014-MTPE/1/20.2), le MTPE a déclaré que le recours formé par l’entreprise pour contester la recevabilité du cahier de revendications présenté par le syndicat était fondé et a ordonné l’abandon de son projet de convention collective.
  11. 606. L’organisation plaignante souligne que la législation nationale contient des règles qui régissent le travail des débardeurs terrestres et protègent leurs droits. Elle indique que la loi no 25047 et son règlement d’application (décret suprême no 010-2011-TR), qui leur confèrent certains avantages, établissent une relation entre ces travailleurs et les entreprises qui gèrent les marchés, terminaux terrestres ou établissements analogues où ils travaillent, afin de faciliter leur application.
  12. 607. Selon l’organisation plaignante, l’État péruvien n’a pas pris les mesures appropriées pour assurer le respect de ses obligations en matière de négociation collective, en particulier dans le secteur de l’économie informelle, et que le gouvernement n’a pas appliqué les mesures préconisées à cet égard par la recommandation (no 204) sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, 2015.
  13. 608. Dans sa communication du 19 février 2018, l’organisation plaignante indique que le 18 septembre 2017 la Cour supérieure de justice de Lima Sud a déclaré fondé un recours en appel formé par les dirigeants syndicaux contre le jugement du 13 mars 2017. L’organisation plaignante signale que, suite à cette décision, M. Minaya Panamá, qui avait été incarcéré, a été libéré. Elle affirme toutefois que l’entreprise utilise la procédure pénale susmentionnée comme prétexte pour refuser l’accès au marché aux dirigeants syndicaux.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 609. Dans sa communication du 23 août 2018, le gouvernement transmet en premier lieu les observations de l’entreprise au sujet des allégations du présent cas. L’entreprise déclare qu’elle est propriétaire du marché de gros Terminal Pesquero de Villa María del Triunfo, où grossistes et détaillants vendent chaque jour des produits de la mer.
  2. 610. L’entreprise indique qu’en août 2014 le syndicat a demandé l’ouverture d’une négociation collective et qu’en septembre 2014 la sous-direction du MTPE chargée des négociations collectives a décidé de donner suite à la requête et en a informé les parties afin qu’elles lancent le processus de négociation. L’entreprise déclare qu’elle a contesté la recevabilité des revendications présentées par le syndicat, faisant valoir que le préalable à la négociation collective était qu’il existe un lien entre l’organisation syndicale et l’entreprise.
  3. 611. L’entreprise indique que le 26 décembre 2014 le MTPE, par arrêté directorial no 524 2014 MTPE/1/20.2: i) a conclu que son recours en irrecevabilité était fondé, en raison du fait qu’aucun travailleur de l’entreprise n’était membre du syndicat; ii) a noté que les membres du syndicat s’acquittaient d’une contribution journalière pour pouvoir travailler dans le terminal; et iii) a confirmé le droit des parties de recourir à d’autres mécanismes pour régler leur différend de manière mutuellement satisfaisante.
  4. 612. L’entreprise souligne en outre que: i) le syndicat n’a formé aucun recours contre la décision susmentionnée; ii) l’arrêté directorial no 007-2012-MTPE/2/14 du MTPE prévoit que les syndicats de branche doivent obligatoirement prouver qu’ils sont suffisamment représentés au sein d’une entreprise pour engager une négociation collective au niveau de cette entreprise; et iii) il ressort de l’article 41 de la loi sur les relations collectives du travail qu’une négociation collective ne peut être engagée que si l’organisation syndicale concernée est légitime.
  5. 613. Pour ce qui est des pratiques antisyndicales auxquelles elle se serait livrée, l’entreprise rejette l’allégation selon laquelle elle aurait fait pression sur les propriétaires des véhicules pour qu’ils licencient les dirigeants syndicaux, et fait valoir que l’organisation plaignante n’a apporté aucune preuve à ce sujet. Elle rejette également l’allégation selon laquelle elle n’aurait pas permis aux propriétaires des camions d’accéder au marché. L’entreprise affirme que, puisque le syndicat n’affilie aucun de ses travailleurs, il n’y a aucune raison ou justification pour une quelconque conduite ou pratique antisyndicale.
  6. 614. En ce qui concerne l’arrestation et la condamnation de dirigeants syndicaux, l’entreprise nie avoir planifié une stratégie criminelle visant à décourager la syndicalisation et à éliminer les dirigeants. Elle affirme qu’elle a porté plainte contre seulement deux dirigeants du syndicat (MM. Ilasaca Zuasnabar et López Pajares) en lien avec les faits survenus le 15 octobre 2014 et que, ce faisant, elle a exercé légitimement son droit d’informer le ministère public qu’une infraction pénale avait été commise.
  7. 615. Dans des communications du 23 août, du 2 octobre et du 22 novembre 2018, ainsi que du 22 janvier et du 5 avril 2019, le gouvernement a fait parvenir ses propres observations concernant la plainte. Pour ce qui est du cahier de revendications présenté par le syndicat, le gouvernement confirme que l’arrêté directorial no 524-2014-MTPE/1/20.02 du 26 décembre 2014 a déclaré fondé le recours en irrecevabilité formé par l’entreprise contre ledit cahier car le syndicat n’avait pas la légitimité pour solliciter l’ouverture d’une négociation collective. Le gouvernement indique que l’arrêté susmentionné est un acte administratif définitif, puisqu’il n’est pas noté que le syndicat l’ait contesté devant le pouvoir judiciaire. Par conséquent, le projet de négociation collective correspondant a été abandonné.
  8. 616. En ce qui concerne les allégations relatives à la procédure pénale engagée à la suite de la plainte déposée par l’entreprise, le gouvernement confirme que le 13 mars 2017, le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo a condamné les dirigeants syndicaux à des peines effectives pour délit contre la tranquillité publique, délits contre la paix publique, ainsi que pour troubles contre l’entreprise, et que, le 18 septembre 2017, ce jugement a été annulé par la Cour supérieure de justice de Lima Sud.
  9. 617. Le gouvernement indique en outre qu’un recours en nullité formé par l’entreprise contre le jugement du 18 septembre 2017 a été déclaré irrecevable par décision du 17 octobre 2017, et qu’une plainte exceptionnelle présentée par l’entreprise contre cette décision a été déclarée sans fondement par la Cour suprême de la République le 2 octobre 2018. Par conséquent, en l’absence de violation des droits du syndicat, le gouvernement demande au comité de procéder, s’il le juge approprié, à la clôture définitive du présent cas.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 618. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante allègue qu’il y a eu violation du droit de négociation collective d’un syndicat de dockers de l’économie informelle, et que l’entreprise propriétaire du marché de produits de la mer de la ville concernée a commis des actes antisyndicaux afin d’obtenir le licenciement des dirigeants dudit syndicat. Il note que l’organisation plaignante dénonce en outre l’arrestation de dirigeants syndicaux et leur condamnation à des peines d’emprisonnement à la suite d’une plainte déposée par l’entreprise susmentionnée après une manifestation du syndicat. Le comité note que l’entreprise rejette ces allégations et que le gouvernement affirme qu’il n’y a pas eu de violation des droits du syndicat.
  2. 619. Le comité prend note de la chronologie des événements fournie par l’organisation plaignante, le gouvernement et l’entreprise, à savoir: i) en novembre 2013, les dockers du secteur de l’économie informelle du marché de Villa María del Triunfo ont fondé le syndicat; ii) le 13 janvier 2014, le syndicat a été reconnu et enregistré par le MTPE; iii) en juillet 2014, le syndicat a présenté un cahier de revendications à l’entreprise; iv) en août 2014, le syndicat a saisi le MTPE d’une demande visant à ce que soit ouverte une négociation collective entre les parties; v) en septembre 2014, l’entreprise a contesté la recevabilité du cahier de revendications du syndicat auprès du MTPE, ce qui n’a pas empêché l’ouverture de négociations directes entre les parties; vi) le 1er octobre 2014, après l’échec de ces négociations, le syndicat a informé l’entreprise de son intention de soumettre une demande de conciliation au MTPE; vii) le 14 octobre 2014, le syndicat a tenu une réunion d’information consacrée aux mesures à prendre pour prévenir les pratiques abusives de l’entreprise; viii) le 15 octobre 2014, faisant suite à la réunion d’information tenue la veille, le syndicat a organisé une manifestation qui a entraîné une interruption du travail d’une durée d’environ trois heures; ix) à la suite de cette manifestation, l’entreprise a déposé une plainte pénale auprès du ministère public contre les sept dirigeants du syndicat; x) le 26 décembre 2014, le MTPE a déclaré que le recours en irrecevabilité formé par l’entreprise contre les revendications présentées par le syndicat était fondé (arrêté directorial no 524-2014 MTPE/1/20.2); xi) le 13 mars 2017, le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo a condamné les dirigeants du syndicat à six ans d’emprisonnement pour délit contre la tranquillité publique, délits contre la paix publique et troubles au détriment de l’entreprise; xii) le 18 septembre 2017, ce jugement a été annulé par une décision de la Cour supérieure de justice de Lima Sud; et xiii) le 17 octobre 2017, un recours en nullité formé par l’entreprise contre la décision susmentionnée a été déclaré irrecevable par résolution, et le 2 octobre 2018, une plainte exceptionnelle déposée par l’entreprise contre ladite résolution a été déclarée sans fondement par la Cour suprême de la République.
  3. 620. En ce qui concerne la violation alléguée du droit de négociation collective du syndicat, le comité observe que, dans l’arrêté directorial no 524-2014-MTPE/1/20.2, dont l’organisation plaignante et le gouvernement ont fourni des copies, le MTPE: i) a déclaré que le recours en irrecevabilité formé par l’entreprise contre les revendications du syndicat était fondé, sur la base, entre autres, des affirmations de l’entreprise qu’elle n’a pas d’emplois de manutention et que le syndicat n’affilie aucun de ses travailleurs, ainsi que sur le fait que les membres du syndicat s’acquittent d’une contribution journalière pour pouvoir travailler au terminal; et ii) a confirmé le droit des parties de recourir à d’autres mécanismes pour régler leur différend de manière mutuellement satisfaisante. Par ailleurs, le comité comprend que le syndicat a considéré que l’entreprise était l’interlocuteur approprié pour engager une négociation collective car: i) le cahier de revendications portait principalement sur les conditions de travail liées au fonctionnement du marché, qui appartient à l’entreprise, et demandait l’élimination de la contribution journalière pour y accéder; et ii) la loi no 25047 et son règlement d’application, qui confèrent certains avantages aux dockers, établissent une relation entre ces travailleurs et les entreprises qui gèrent les marchés. Le comité prend note du fait que les dockers sont employés directement par les propriétaires des véhicules qui opèrent sur le marché susmentionné. Le comité rappelle avoir prié un gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que les travailleurs indépendants peuvent jouir pleinement de leurs droits syndicaux pour promouvoir et défendre leurs intérêts, y compris par le biais de la négociation collective, et de déterminer, en consultation avec les partenaires sociaux concernés, les particularités des travailleurs indépendants qui ont une incidence sur la négociation collective afin d’établir des mécanismes spécifiques de négociation collective pour les travailleurs indépendants, le cas échéant. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, paragr. 1285.] Eu égard à ce qui précède, le comité prie le gouvernement de créer un environnement propice pour que les travailleurs de l’économie informelle, y compris les travailleurs portuaires du marché de Villa María del Triunfo, puissent exercer leurs droits d’organisation et de négociation collective ainsi que celui de participer au dialogue social dans le cadre de la transition vers l’économie formelle. Le comité invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
  4. 621. En ce qui concerne les allégations imputant à l’entreprise des pratiques antisyndicales, le comité note que l’organisation plaignante allègue que: i) à la suite de négociations infructueuses entre les parties, l’entreprise a fait pression sur les propriétaires des véhicules (qui contractent les services d’arrimage et de désarrimage) afin qu’ils licencient les dirigeants du syndicat, ce qui a conduit M. Ilasaca Zuasnabar à porter plainte auprès du MTPE et du commissariat de Villa María del Triunfo; et ii) l’entreprise a refusé l’accès au marché aux propriétaires qui continuaient à contracter les services des membres du syndicat, et la direction du syndicat a dû intervenir pour remédier à cette situation. Par ailleurs, le comité prend note de la réponse de l’entreprise communiquée par le gouvernement, dans laquelle celle-ci: i) rejette les allégations; ii) indique que le syndicat n’a fourni aucune preuve des pressions alléguées; et iii) affirme qu’elle n’a aucune raison de commettre de tels actes étant donné qu’aucun de ses travailleurs n’est membre du syndicat. Tout en prenant dûment note des positions divergentes de l’organisation plaignante et de l’entreprise, le comité rappelle que nul ne doit faire l’objet de mesures préjudiciables en raison de l’exercice d’activités syndicales légitimes et que les affaires de discrimination antisyndicale devraient être traitées de manière rapide et efficace par les institutions compétentes. [Voir Compilation, paragr. 1077.] Eu égard à ce qui précède, le comité veut croire que le gouvernement s’est assuré qu’aucun membre du syndicat n’a vu son accès à l’emploi entravé par ses activités syndicales légitimes et que les enquêtes pertinentes ont été menées sur les plaintes déposées par M. Ilasaca Zuasnabar auprès du MTPE et du commissariat de Villa María del Triunfo.
  5. 622. Pour ce qui est des allégations relatives à l’arrestation et à la condamnation des dirigeants syndicaux, le comité note que l’organisation plaignante affirme que: i) la plainte déposée par l’entreprise à la suite de la manifestation du syndicat fait partie d’une stratégie criminelle par laquelle l’entreprise cherche à décourager la syndicalisation et à éliminer les dirigeants; ii) à la suite du jugement rendu le 13 mars 2017 par le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo, M. Minaya Panamá a été incarcéré et les autres dirigeants syndicaux ont dû entrer dans la clandestinité pour éviter de purger leurs peines respectives; et iii) après l’annulation de ce jugement, l’entreprise a utilisé la procédure pénale contre les dirigeants syndicaux comme prétexte pour les empêcher d’accéder au marché. Le comité note en outre que l’entreprise affirme qu’elle a porté plainte contre seulement deux dirigeants syndicaux en lien avec la manifestation du syndicat, et qu’elle a ce faisant exercé légitimement son droit d’informer le ministère public qu’une infraction pénale avait été commise. Le comité observe que: i) aux termes du jugement du 13 mars 2017, les dirigeants syndicaux avaient été initialement condamnés à six ans d’emprisonnement pour «délit contre la tranquillité publique», «délits contre la paix publique» et «troubles» contre l’entreprise; et ii) ce jugement a été annulé par la Cour supérieure de justice de Lima Sud, qui a considéré qu’il n’avait pas été établi que les travailleurs avaient fait usage de la violence contre des personnes ou des biens publics ou privés en profitant de la formation d’un rassemblement émeutier. Le comité prend dûment note de cette décision et de sa confirmation par la Cour suprême. Le comité rappelle à cet égard que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels. [Voir Compilation, paragr. 208.] Le comité espère que le gouvernement sera en mesure d’accorder des indemnisations adéquates aux travailleurs qui ont été emprisonnés et qui ont été libérés à la suite des jugements de la Cour supérieure de justice de Lima et de la Cour suprême.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 623. Compte tenu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité prie le gouvernement de créer un environnement propice pour que les travailleurs de l’économie informelle, y compris les travailleurs portuaires du marché de Villa María del Triunfo, puissent exercer leurs droits d’organisation et de négociation collective ainsi que celui de participer au dialogue social dans le cadre de la transition vers l’économie formelle. Le comité invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
    • b) Le comité invite le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
    • c) Le comité espère que le gouvernement sera en mesure d’accorder des indemnisations adéquates aux travailleurs qui ont été emprisonnés et qui ont été libérés à la suite des jugements de la Cour supérieure de justice de Lima et de la Cour suprême.
    • d) Le comité considère que ce cas est clos et ne requiert pas un examen plus approfondi.
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