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PLAINTE (article 26) - 1996 - MYANMAR - C029

1. M. E. Abou-Rizk, délégué travailleurs, Liban, 2. M. C. Agyei, délégué travailleurs, Ghana, 3. M. K. Ahmed, délégué travailleurs, Pakistan, 4. M. M. Blondel, délégué travailleurs, France, 5. M. W. Brett, délégué travailleurs, Royaume-Uni, 6. M. U. Edström, délégué travailleurs, Suède, 7. Mme U. Engelen-Kefer, déléguée travailleurs, Allemagne, 8. M. R. Falbr, délégué travailleurs, République tchèque, 9. M. C. Gray, délégué travailleurs, Etats-Unis, 10. M. S. Itoh, délégué travailleurs, Japon, 11. M. Y. Kara, délégué travailleurs, Israël, 12. M. A. Lettieri, délégué travailleurs, Italie, 13. M. I. Mayaki, délégué travailleurs, Niger, 14. M. S. Mookherjee, délégué travailleurs, Inde, 15. M. B.P. Mpangala, délégué travailleurs, République-Unie de Tanzanie, 16. M. J.-C. Parrot, délégué travailleurs, Canada, 17. Mme P. O'Donovan, déléguée travailleurs, Irlande, 18. M. Ramírez León, délégué travailleurs, Venezuela, 19. M. Z. Rampak, délégué travailleurs, Malaisie, 20. M. I. Sahbani, délégué travailleurs, Tunisie, 21. M. A. Sanchez Madariaga, délégué travailleurs, Mexique, 22. M. G. Sibanda, délégué travailleurs, Zimbabwe, 23. M. L. Sombes, délégué travailleurs, Cameroun, 24. M. L. Trotman, délégué travailleurs, Barbade, 25. M. T. Wojcik, délégué travailleurs, Pologne

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RAPPORT DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (no. 29) sur le travail forcé, 1930

RAPPORT DE LA COMMISSION D'ENQUÊTE instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (no. 29) sur le travail forcé, 1930
  1. Rapport de la Commission d'enquête en PDF (1998)

La procédure de plainte

La procédure de plainte
  1. Partie I
  2. Institution de la commission
  3. 1. Dépôt de la plainte et constitution de la commission
  4. 1) Dépôt de la plainte
  5. 1. Par une lettre datée du 20 juin 1996 adressée au Directeur général du BIT, 25 délégués travailleurs à la 83e session de la Conférence internationale du Travail (juin 1996) (Note 1), ont déposé une plainte en vertu de l'article 26 de la Constitution contre le gouvernement du Myanmar pour non-respect des dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, qu'il a ratifiée le 4 mars 1955 et qui est entrée en vigueur pour le Myanmar le 4 mars 1956. La plainte déclare en particulier que:
  6. Les violations grossières de la convention (no 29) par le Myanmar sont dénoncées depuis trente ans par les organes de contrôle de l'OIT. En 1995, et de nouveau en 1996, elles ont fait l'objet de paragraphes spéciaux dans le rapport de la Commission de la Conférence pour l'application des conventions et recommandations, et cette année le gouvernement a en plus été nommément mentionné par la commission pour son défaut continu d'assurer le respect effectif de la convention.
  7. En outre, en novembre 1994, le Conseil d'administration a adopté le rapport du comité qu'il avait créé pour examiner la réclamation présentée par la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) contre le gouvernement du Myanmar au motif que celui-ci n'avait pas assuré le respect effectif de la convention no 29.
  8. Le gouvernement a montré qu'il n'était pas disposé à donner suite aux appels répétés des organes de contrôle de l'OIT l'invitant à abroger et révoquer les textes législatifs autorisant le recours au travail forcé et à assurer que le travail forcé soit éliminé dans la pratique. Dans ces conditions, la commission pour l'application a de nouveau exprimé sa profonde préoccupation devant le recours systématique au travail forcé au Myanmar.
  9. En dépit de ses assurances selon lesquelles les pouvoirs conférés par la législation en cause -- la loi sur les villages (1908) et la loi sur les villes (1907) -- ne seraient plus en usage depuis 1967 et les lois susnommées seraient actuellement examinées en vue de leur abrogation, le gouvernement s'est manifestement gardé de fournir les informations demandées sur les mesures concrètes éventuellement prises pour modifier la législation.
  10. En fait, il est clair que le recours au travail forcé prend de plus en plus d'ampleur et que les autorités du Myanmar en sont directement responsables et qu'elles sont impliquées de manière active dans son exploitation.
  11. La réclamation présentée par la CISL en janvier 1993, en vertu de l'article 24 de la Constitution, portait sur le cas particulier du recrutement forcé et de l'utilisation abusive de porteurs par les militaires. C'était, à l'époque, le premier sujet de préoccupation.
  12. Depuis lors, cependant, le recours au travail forcé est devenu systématique; il est pratiqué à une échelle toujours plus large et s'étend à un nombre croissant de secteurs d'activités. Un grand nombre de travailleurs forcés est maintenant employé pour la réalisation de projets ferroviaires, routiers, de construction et d'autres projets d'infrastructure, dont beaucoup s'inscrivent dans le cadre des efforts déployés par le gouvernement pour promouvoir le tourisme au Myanmar. En outre, les militaires confisquent des terres aux villageois, qu'ils contraignent ensuite à les cultiver au profit des usurpateurs.
  13. La situation est aujourd'hui la suivante: le gouvernement du Myanmar, loin de prendre des mesures pour faire cesser la pratique du travail forcé, l'encourage activement, au point que nous sommes désormais en présence d'un abus endémique touchant des centaines de milliers de travailleurs soumis aux formes d'exploitation les plus extrêmes, qui se soldent trop souvent par des pertes en vies humaines.
  14. 2. Des éléments de preuve supplémentaires ont été adressés au BIT au nom des plaignants, par une lettre du 31 octobre 1996 annexée au présent rapport (Note 2).
  15. 2) Dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail concernant les plaintes relatives au non-respect des conventions ratifiées
  16. 3. La procédure selon laquelle les délégués travailleurs ont déposé leur plainte contre le gouvernement du Myanmar est établie par les articles 26 à 29 et 31 à 34 de la Constitution de l'OIT qui sont libellés dans les termes suivants:
  17. Article 26
  18. 1. Chacun des Membres pourra déposer une plainte au Bureau international du Travail contre un autre Membre qui, à son avis, n'assurerait pas d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention que l'un et l'autre auraient ratifiée en vertu des articles précédents.
  19. 2. Le Conseil d'administration peut, s'il le juge à propos, et avant de saisir une commission d'enquête selon la procédure indiquée ci-après, se mettre en rapport avec le gouvernement mis en cause de la manière indiquée à l'article 24.
  20. 3. Si le Conseil d'administration ne juge pas nécessaire de communiquer la plainte au gouvernement mis en cause ou si, cette communication ayant été faite, aucune réponse ayant satisfait le Conseil d'administration n'a été reçue dans un délai raisonnable, le Conseil pourra former une commission d'enquête qui aura pour mission d'étudier la question soulevée et de déposer un rapport à ce sujet.
  21. 4. La même procédure pourra être engagée par le Conseil soit d'office, soit sur la plainte d'un délégué à la Conférence.
  22. 5. Lorsqu'une question soulevée par l'application des articles 25 ou 26 viendra devant le Conseil d'administration, le gouvernement mis en cause, s'il n'a pas déjà un représentant au sein du Conseil d'administration, aura le droit de désigner un délégué pour prendre part aux délibérations du Conseil relatives à cette affaire. La date à laquelle ces discussions doivent avoir lieu sera notifiée en temps utile au gouvernement mis en cause.
  23. Article 27
  24. Dans le cas où une plainte serait renvoyée, en vertu de l'article 26, devant une commission d'enquête, chacun des Membres, qu'il soit ou non directement intéressé à la plainte, s'engage à mettre à la disposition de la commission toute information qui se trouverait en sa possession relativement à l'objet de la plainte.
  25. Article 28
  26. La commission d'enquête, après un examen approfondi de la plainte, rédigera un rapport dans lequel elle consignera ses constatations sur tous les points de fait permettant de préciser la portée de la contestation, ainsi que les recommandations qu'elle croira devoir formuler quant aux mesures à prendre pour donner satisfaction au gouvernement plaignant et quant aux délais dans lesquels ces mesures devraient être prises.
  27. Article 29
  28. 1. Le Directeur général du Bureau international du Travail communiquera le rapport de la commission d'enquête au Conseil d'administration et à chacun des gouvernements intéressés dans le différend, et en assurera la publication.
  29. 2. Chacun des gouvernements intéressés devra signifier au Directeur général du Bureau international du Travail, dans le délai de trois mois, s'il accepte ou non les recommandations contenues dans le rapport de la commission et, au cas où il ne les accepte pas, s'il désire soumettre le différend à la Cour internationale de Justice.
  30. Article 31
  31. La décision de la Cour internationale de Justice concernant une plainte ou une question qui lui aurait été soumise conformément à l'article 29 ne sera pas susceptible d'appel.
  32. Article 32
  33. Les conclusions ou recommandations éventuelles de la commission d'enquête pourront être confirmées, amendées ou annulées par la Cour internationale de Justice.
  34. Article 33
  35. Si un Membre quelconque ne se conforme pas dans le délai prescrit aux recommandations éventuellement contenues soit dans le rapport de la commission d'enquête, soit dans la décision de la Cour internationale de Justice, selon le cas, le Conseil d'administration pourra recommander à la Conférence telle mesure qui lui paraîtra opportune pour assurer l'exécution de ces recommandations.
  36. Article 34
  37. Le gouvernement en faute peut, à tout moment, informer le Conseil d'administration qu'il a pris les mesures nécessaires pour se conformer soit aux recommandations de la commission d'enquête, soit à celles contenues dans la décision de la Cour internationale de Justice, et peut lui demander de bien vouloir faire constituer une commission d'enquête chargée de vérifier ses dires. Dans ce cas, les stipulations des articles 27, 28, 29, 31 et 32 s'appliqueront, et si le rapport de la commission d'enquête ou la décision de la Cour internationale de Justice sont favorables au gouvernement qui était en faute, le Conseil d'administration devra aussitôt recommander que les mesures prises conformément à l'article 33 soient rapportées.
  38. 3) Résumé des mesures prises par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail à la suite du dépôt de la plainte et de l'institution de la commission
  39. 4. A sa 267e session (novembre 1996), le Conseil d'administration a été saisi d'un rapport de son bureau (GB.267/16/2) concernant l'objet de la plainte. Ce rapport rappelait, entre autres choses, les dates de ratification et d'entrée en vigueur de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (dénommée ci-après "convention no 29") pour le Myanmar. Il a également signalé que les 25 plaignants étaient, à la date du dépôt de la plainte, des délégués travailleurs de leur pays à la 83e session de la Conférence internationale du Travail. En conséquence, ils étaient en droit de déposer une plainte en vertu de l'article 26, paragraphe 4, de la Constitution s'ils estimaient que le gouvernement du Myanmar n'assurait pas d'une manière satisfaisante l'exécution de la convention no 29. En outre, le rapport indiquait ce qui suit:
  40. Une discussion sur le fond de la plainte ne saurait être envisagée au stade actuel. En effet, il serait incompatible avec le caractère judiciaire de la procédure prévue à l'article 26 et aux articles suivants de la Constitution qu'une discussion ait lieu, au Conseil d'administration, sur le fond d'une plainte alors que le Conseil ne dispose pas des considérations du gouvernement contre lequel cette plainte a été présentée, ni de l'appréciation objective de l'ensemble du cas de la part d'un organisme indépendant. En outre, une telle discussion serait inappropriée tant qu'une proposition de renvoyer la plainte devant une commission d'enquête est en attente devant le Conseil d'administration, ou tant que l'affaire est encore en instance devant une commission d'enquête. Si une commission d'enquête doit être instituée -- ce qu'il appartiendra au Conseil d'administration de décider en vertu de l'article 26, paragraphe 4, de la Constitution --, c'est lorsque celle-ci aura présenté son rapport sur le fond de la plainte que le Conseil pourra être appelé à prendre des mesures à son sujet.
  41. 5. A la même session, le Conseil d'administration a pris les décisions suivantes:
  42. a) le gouvernement du Myanmar devrait être invité par le Directeur général à lui communiquer ses observations sur la plainte pour le 31 janvier 1997 au plus tard;
  43. b) conformément au paragraphe 5 de l'article 26 de la Constitution, le Conseil d'administration devrait inviter le gouvernement du Myanmar à désigner un délégué pour prendre part aux délibérations du Conseil relatives à cette affaire lors de sessions ultérieures. En adressant cette invitation, le Directeur général devrait faire savoir au gouvernement du Myanmar que le Conseil d'administration envisageait de procéder à ces discussions à sa 268e session qui se tiendrait à Genève en mars 1997.
  44. 6. Par une lettre datée du 23 décembre 1996, le Directeur général a informé le gouvernement du Myanmar des décisions mentionnées ci-dessus.
  45. 7. Par une lettre datée du 5 février 1997, la Mission permanente de l'Union du Myanmar à Genève a transmis les observations du gouvernement du Myanmar sur la plainte et sur les éléments de preuve supplémentaires présentés. Ce document (sans ses annexes confidentielles) est joint au présent rapport (annexe II).
  46. 8. A sa 268e session (mars 1997), le Conseil d'administration a été saisi d'un autre rapport de son bureau (GB.268/15/1) qui relevait que:
  47. Il existe des contradictions entre la version des faits présentée dans les allégations et celle contenue dans les observations du gouvernement du Myanmar. Il n'y aurait cependant pas lieu pour le Conseil d'administration d'entrer dans un débat au fond s'il est envisagé d'établir une commission d'enquête en vertu de l'article 26, paragraphe 4, de la Constitution pour procéder dès que possible à une évaluation objective de la situation. Comme cela avait déjà été indiqué dans le rapport du bureau du Conseil à la 267e session, il serait en effet incompatible avec le caractère judiciaire de la procédure ainsi engagée d'ouvrir un tel débat avant que la commission d'enquête n'ait remis ses conclusions.
  48. A la lumière de ce qui précède, le Conseil d'administration a décidé que l'ensemble de la question devait être renvoyé sans autre discussion à une commission d'enquête nommée conformément à l'article 26 de la Constitution. Le Conseil d'administration a rappelé que les membres de la commission devaient être désignés conformément aux mêmes critères et siégeraient dans les mêmes conditions que les membres des commissions antérieurement nommés en vertu de l'article 26 de la Constitution. Ils siégeraient à titre individuel et personnel, seraient choisis pour leur impartialité, leur intégrité et leur éminence et devraient s'engager par une déclaration solennelle à exercer leurs fonctions et leurs attributions "en tout honneur et dévouement, en pleine et parfaite impartialité et en toute conscience". Le Conseil d'administration a ajouté que la commission devait fixer sa propre procédure conformément aux dispositions de la Constitution.
  49. 9. A la même session, le Conseil d'administration a décidé que la commission serait composée de la manière suivante, tel que proposé par le Directeur général (GB.268/14/8):
  50. Président:
  51. Sir William DOUGLAS, PC, KCMG (Barbade), ancien ambassadeur; ancien président de la Cour suprême de la Barbade; ancien président du Conseil du Commonwealth de l'enseignement juridique pour les Caraïbes; ancien président du Comité juridique interaméricain; ancien juge de la Haute Cour de la Jamaïque; président de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT.
  52. Membres:
  53. M. Prafullachandra Natvarlal BHAGWATI (Inde), ancien président de la Cour suprême de l'Inde; ancien premier président de la Haute Cour du Gujarat; ancien président de la Commission d'assistance juridique et de la Commission des réformes judiciaires du gouvernement du Gujarat; ancien président de la Commission sur l'assistance juridique du gouvernement de l'Inde; ancien président de la commission nommée par le gouvernement de l'Inde pour mettre en oeuvre les systèmes d'assistance judiciaire dans le pays; membre de la Commission internationale sur les droits de l'homme de l'Association du droit international; membre du Comité de rédaction des rapports du Commonwealth; président du Comité national du bien-être social et économique du gouvernement de l'Inde; ombudsman du journal "Times of India"; président du Conseil consultatif du Centre pour l'indépendance des juges et des avocats (Genève); vice-président de El Taller; président du Comité pour la vérification des comptes des services postaux et téléphoniques en Inde; membre du Comité des droits de l'homme des Nations Unies; membre de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT.
  54. Mme Robyn A. LAYTON, QC (Australie), avocate; directrice de la Société nationale des chemins de fer; ancien commissaire, membre de la Commission de l'assurance santé; ancienne présidente de la Commission australienne de déontologie médicale du Conseil national de la santé et de la recherche médicale; ancienne avocate du Conseil d'Australie-Méridionale pour les libertés civiles; ancienne avocate du Conseil central des terres aborigènes; ancienne présidente du Conseil d'Australie-Méridionale sur la discrimination sexuelle; ancien juge et vice-présidente du Tribunal et de la Commission du travail d'Australie-Méridionale; ancienne vice-présidente du Tribunal fédéral des appels administratifs; membre de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT.
  55. Partie II
  56. Procédure suivie par la commission
  57. 2. Première session de la commission
  58. 1) Déclaration solennelle faite par les membres de la commission
  59. 10. La commission a tenu sa première session à Genève les 9 et 10 juin 1997. A l'ouverture de sa première session, le 9 juin 1997, chacun des membres de la commission a fait une déclaration solennelle en présence du Directeur général du Bureau international du Travail. En invitant les membres de la commission à faire cette déclaration, le Directeur général a rappelé les circonstances qui ont conduit à la création de la commission et il a souligné que la tâche de la commission était "d'établir les faits et d'examiner les questions qui en découlent sans crainte ni préférence et dans une complète indépendance".
  60. 11. Les membres de la commission ont alors prononcé chacun la déclaration suivante:
  61. Je déclare solennellement que j'exercerai en tout honneur et dévouement, en pleine impartialité et en toute conscience, tous mes devoirs et attributions de membre de la commission instituée par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail, pour l'examen de la plainte concernant l'observation par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930.
  62. 2) Adoption de la procédure à suivre par la commission
  63. 12. La Constitution de l'OIT ne fixe pas de règles de procédure à suivre par une commission d'enquête désignée en vertu de l'article 26. Lorsque le Conseil d'administration a décidé, en mars 1997, de renvoyer la plainte à une commission d'enquête, il a également précisé qu'il appartenait à la commission de fixer sa propre procédure, conformément aux dispositions de la Constitution et de la pratique suivie par les précédentes commissions d'enquête.
  64. 13. En fixant sa procédure, la commission a rappelé certains éléments qui caractérisent la nature de son travail. Comme de précédentes commissions d'enquête l'ont souligné, la procédure prévue par les articles 26 à 29 et 31 à 34 de la Constitution a un caractère judiciaire (Note 3). C'est pourquoi les règles de procédure doivent préserver le droit des parties à une procédure équitable, telle que reconnue en droit international.
  65. 14. En outre, la commission a considéré que son rôle ne se limitait pas à un examen des informations communiquées par les parties elles-mêmes ou à l'appui de leurs affirmations. La commission prendrait toutes les mesures nécessaires pour obtenir des informations aussi complètes et objectives que possible sur les questions soulevées.
  66. 15. Enfin, la commission s'est déclarée consciente du fait que sa procédure devait faire en sorte que la plainte soit examinée rapidement, éviter tout délai injustifié et assurer ainsi une procédure équitable.
  67. 16. Compte tenu de ces considérations, la commission a adopté les règles de procédure qu'elle entendait suivre au cours de la deuxième session pour l'audition des témoins. Ces règles ont été portées à l'attention du gouvernement du Myanmar ainsi que des plaignants (Note 4).
  68. 3) Communication d'informations supplémentaires
  69. 17. La commission a examiné les informations soumises par les plaignants et par le gouvernement du Myanmar et a pris une série de décisions concernant les dispositions d'ordre procédural à observer pour l'examen des questions concernées.
  70. 18. Elle a décidé d'inviter les plaignants à lui communiquer, avant le 15 août 1997, toute information ou observation supplémentaire, et notamment toute information sur des développements postérieurs à la soumission de la plainte. La commission a également invité le gouvernement du Myanmar à fournir, avant le 30 septembre 1997, toute déclaration écrite qu'il souhaiterait lui soumettre. Le gouvernement et les plaignants ont été informés que la teneur de toute information soumise à la commission serait communiquée à l'autre partie à la procédure.
  71. 19. En vertu de l'article 27 de la Constitution de l'OIT et conformément à la pratique de précédentes commissions d'enquête, la commission a invité les gouvernements de pays situés dans la région du Sud-Est asiatique, ou ayant des relations économiques avec le Myanmar, à lui communiquer toute information en leur possession se rapportant aux questions soulevées dans la plainte (Note 5).
  72. 20. En outre, la possibilité de soumettre des informations concernant les questions soulevées dans la plainte a également été offerte à plusieurs organisations intergouvernementales (Note 6), à des organisations internationales et nationales de travailleurs et d'employeurs (Note 7), ainsi qu'à un certain nombre d'organisations non gouvernementales qui travaillent dans les domaines juridique et des droits de l'homme (Note 8). De plus, les sociétés mentionnées dans la plainte (Note 9) ont aussi eu la possibilité de soumettre des informations sur les questions sur lesquelles porte la plainte.
  73. 21. La commission a informé les gouvernements, les organisations et les sociétés concernés que la substance des informations qu'ils soumettront serait transmise au gouvernement du Myanmar et aux plaignants.
  74. 22. Enfin, en ce qui concerne toute autre documentation soumise par des gouvernements, des organisations ou des individus qui n'auraient pas été invités à le faire, la commission a demandé à son président de décider au cas par cas des mesures à prendre.
  75. 4) Mesures adoptées en vue de la deuxième session et des travaux ultérieurs de la commission
  76. 23. La commission a décidé de tenir sa deuxième session à Genève, du 17 au 20 et les 25 et 26 novembre 1997.
  77. 24. Par des communications datées des 13 et 16 juin 1997, la commission a invité le gouvernement du Myanmar ainsi que les plaignants à communiquer avant le 30 septembre 1997 les noms et qualités des témoins qu'ils souhaitaient faire entendre, avec une brève indication des points sur lesquels ils désiraient que chacune de ces personnes apporte son témoignage. La commission a indiqué qu'elle déciderait, sur la base de ces indications, si elle entendra les témoins en question.
  78. 25. En outre, la commission a attiré l'attention des plaignants et du gouvernement sur le fait que les informations relatives à chaque témoin seraient communiquées à l'autre partie à défaut d'une requête demandant la confidentialité, conformément à l'article 7 des Règles relatives à l'audition des témoins. Au cas où une telle requête serait soumise, elle serait considérée au début de l'audition des témoins par la commission. Entre-temps, les éléments de preuve fournis seraient néanmoins communiqués à l'autre partie. Le gouvernement du Myanmar a été prié d'assurer qu'il ne ferait pas obstacle à ce que toute personne vienne témoigner, et que les témoins ou leurs familles ne subiraient aucune sanction ni préjudice du fait de leur témoignage.
  79. 26. La commission a prié le gouvernement du Myanmar et les plaignants de désigner des représentants chargés d'agir en leur nom devant la commission. Les plaignants ont également été priés d'envisager la possibilité d'une représentation conjointe.
  80. 27. Enfin, la commission a autorisé son président à traiter et décider des questions de procédure qui surgiraient entre les sessions, avec la possibilité de consulter les autres membres s'il l'estimait nécessaire.
  81. 3. Communications reçues par la commission après sa première session
  82. 28. Suite aux requêtes adressées par la commission au gouvernement du Myanmar, les plaignants ainsi que les gouvernements, organisations et sociétés mentionnés aux paragraphes 19 et 20 ci-dessus, la commission a reçu plusieurs communications, telles qu'elles figurent dans le présent chapitre. L'analyse par la commission des informations factuelles qui lui ont été soumises figure à la partie IV du rapport (voir ci-après chapitre 12). On trouvera la liste des documents soumis à la commission après sa première session à l'annexe IV du présent rapport.
  83. 1) Communications reçues des parties
  84. a) Communications des plaignants
  85. 29. Par une communication reçue par le secrétariat de la commission au cours des mois de juillet à octobre 1997, tous les plaignants ont informé la commission de leur souhait de voir transférer tous les pouvoirs nécessaires à M. Bill Jordan, secrétaire général de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), et/ou à toute(s) personne ou personnes qu'il souhaiterait désigner pour le représenter à tout stade de la procédure devant la commission.
  86. 30. Par une communication datée du 11 août 1997, la CISL a soumis au nom des plaignants des informations supplémentaires sur l'existence du travail forcé au Myanmar (Note 10). Ces informations comprenaient deux rapports de la CISL intitulés respectivement Burma: SLORC's private slave camp (Note 11) et Forced labour in Burma: An international trade union briefing (Note 12); plusieurs documents concernant le retrait par la Communauté européenne des préférences tarifaires accordées au Myanmar (Note 13); deux rapports du Mon information Service intitulés, respectivement, Forced labour on the Ye-Tavoy railway et The situation of people living in the gas pipeline project region (Note 14); un rapport de Images Asia intitulé Nowhere to go (Note 15); et la copie d'une lettre adressée par la CISL aux plaignants en date du 14 juillet 1997 (Note 16).
  87. 31. Par une communication datée du 30 septembre 1997 concernant les auditions du mois de novembre, M. Bill Jordan, secrétaire général de la CISL, a soumis au nom des plaignants une liste préliminaire de 13 témoins qui pourraient être entendus. Cette lettre indiquait également qu'une demande visant à bénéficier des mesures de protection prévues par l'article 7 des Règles relatives à l'audition des témoins (Note 17) serait soumise au nom de plusieurs des témoins. La lettre indiquait en outre que la CISL souhaitait, d'ici le 31 octobre 1997, soumettre à la commission des informations complémentaires concernant les témoins et qu'elle demandait à la commission de bien vouloir prolonger le délai prévu pour soumettre des informations concernant des témoins.
  88. 32. Par une nouvelle communication datée du 14 novembre 1997, M. Bill Jordan a soumis au nom des plaignants une liste révisée de 13 témoins, ainsi que leurs noms et qualités. La lettre précisait également les mesures de protection souhaitées pour plusieurs de ces témoins.
  89. b) Communications du gouvernement du Myanmar
  90. 33. Par une communication datée du 10 novembre 1997, le gouvernement du Myanmar a indiqué qu'une commission de coordination de haut niveau comprenant des représentants de plusieurs ministères et organismes gouvernementaux avait été créée et que le ministère du Travail faisait office de secrétariat pour cette commission. Cette commission avait été créée pour examiner au fond les communications reçues par la commission des sources sollicitées, dont la majorité avait été communiquée au gouvernement au mois d'août. Le gouvernement a noté qu'étant donné l'ampleur et l'importance de ces éléments de preuve leur examen prendrait quelque temps et qu'il ne lui serait donc pas possible de fournir les noms de témoins dans les délais requis. Il a indiqué cependant que le ministère du Travail répondrait aux questions au cas par cas.
  91. 2) Communications reçues d'autres sources sollicitées
  92. a) Communications des Etats Membres au titre de l'article 27 de la Constitution
  93. 34. Les gouvernements du Canada (communication datée du 24 juillet 1997) (Note 18), de l'Inde (communication datée du 27 août 1997) (Note 19), de la Malaisie (communication datée du 18 août 1997) (Note 20), de la Nouvelle-Zélande (communication datée du 15 août 1997) (Note 21), de Singapour (communication datée du 5 juillet 1997) (Note 22) et de Sri Lanka (communication datée du 31 juillet 1997) (Note 23) ont indiqué qu'ils n'avaient aucune information à fournir à propos de la plainte dont était saisie la commission.
  94. 35. Par une communication reçue le 14 août 1997, le gouvernement des Etats-Unis a soumis un grand nombre de documents qui fournissent des informations sur les questions soulevées dans la plainte. La lettre indiquait que ces informations ont été rassemblées à partir des audiences publiques organisées conjointement le 27 juin 1997 par le Département du travail et le Département d'Etat des Etats-Unis sur la question du travail forcé au Myanmar. Ces informations comprennent la transcription de ces audiences, les déclarations préparées par les témoins ainsi que toutes les autres informations présentées pour inclusion au dossier, telles que témoignages écrits, photographies et bandes vidéo (Note 24).
  95. b) Communications d'organisations intergouvernementales
  96. 36. Par une communication datée du 30 juillet 1997, la Commission européenne a rappelé qu'un règlement du Conseil du 24 mars 1997 avait provisoirement retiré au Myanmar le bénéfice du Système généralisé de préférence de la Communauté pour des raisons relevant de la plainte dont la commission était saisie. Une copie de ce règlement du Conseil a été fournie (Note 25).
  97. 37. Par une communication datée du 6 août 1997, le bureau du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a fourni des commentaires et des observations sur la question du travail forcé dans l'Etat Rakhine au Myanmar (Note 26).
  98. c) Communications d'organisations non gouvernementales
  99. 38. Par une communication datée du 13 août 1997, Amnesty International a soumis des informations à la commission sur les questions concernant la plainte, et notamment 15 documents publiés par Amnesty International entre 1988 et 1997 (Note 27). Dans cette communication, Amnesty International note qu'elle enquête depuis dix ans sur la pratique du travail forcé et du portage forcé au Myanmar et que, cette organisation n'étant pas autorisée à entrer au Myanmar, ces informations ont été réunies grâce à des interviews auprès de personnes ayant quitté ce pays.
  100. 39. Par une communication datée du 14 août 1997, Anti-esclavage International a soumis une publication intitulée Ethnic groups in Burma (Note 28).
  101. 40. Par une communication datée du 13 août 1997, le Conseil australien de l'aide à l'étranger (Australian Council for Overseas Aid-ACFOA) a soumis un extrait du numéro de juillet 1996 du Country commercial guide publié par l'Ambassade des Etats-Unis sur le Myanmar (Note 29), une publication intitulée Holidays in Burma? (Note 30), un rapport de l'ACFOA intitulé Slave labour in Burma (Note 31) et plusieurs transparents considérés comme montrant du travail forcé au Myanmar (Note 32).
  102. 41. Par une communication datée du 30 juillet 1997, le Burma Action Group a soumis plusieurs documents concernant principalement l'utilisation du travail forcé en rapport avec le tourisme (Note 33).
  103. 42. Par une communication datée du 10 août 1997, le Burma Centrum Nederland a soumis 18 documents provenant de diverses sources à propos du travail forcé dans l'Etat Rakhine au Myanmar (Note 34).
  104. 43. Par une communication datée du 28 août 1997, Burma Issues a suggéré que la commission prenne contact avec la Burma Peace Foundation à laquelle l'organisation avait fourni des informations pertinentes en sa possession (Note 35).
  105. 44. Par deux communications datées du 7 juillet 1997 et du 14 août 1997, la Burma Peace Foundation a soumis plusieurs milliers de pages d'information provenant d'un grand nombre de sources et concernant tous les aspects de la plainte, y compris un grand nombre de photographies. La plupart de ces informations concernent la période allant de 1995 à août 1997 (Note 36).
  106. 45. Par une communication datée du 12 août 1997, le Burma UN Services Office a fourni deux rapports (intitulés Forced labor et Child labor) (Note 37) préparés par son unité de documentation sur les droits de l'homme et contenant des informations sur les questions concernant la plainte. Cette lettre indique que ces rapports sont fondés sur des informations fournies par des organisations qui ont suivi la situation des droits de l'homme au Myanmar par la frontière entre ce pays et la Thaïlande. La lettre indique également que cette unité de documentation sur les droits de l'homme allait publier le Human Rights Yearbook on Burma 1996 qui comprendrait un chapitre sur le travail forcé et qu'une copie de cet ouvrage serait envoyée à la commission (Note 38).
  107. 46. Par une communication datée du 10 août 1997, Earth Rights International a soumis deux rapports concernant le travail forcé dans la division Tanintharyi (Tenasserim) intitulés The Yadana gas pipeline project et The Ye-Tavoy railway (Note 39).
  108. 47. Par une communication datée du 26 août 1997, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a soumis un rapport concernant les violations des droits de l'homme perpétrées dans le cadre du projet du gazoduc de Yadana intitulé La Birmanie, TOTAL et les droits de l'homme: dissection d'un chantier (Note 40).
  109. 48. Par une communication datée du 16 juillet 1997, le Comité consultatif mondial des amis (Quakers) a soumis un rapport élaboré par Images Asia intitulé No childhood at all, concernant les enfants soldats au Myanmar (Note 41).
  110. 49. Par une communication datée du 15 août 1997, Human Rights Watch/Asia a soumis une copie de la déclaration préparée par son directeur de Washington et présentée lors des audiences des Etats-Unis mentionnées ci-dessus (voir paragr. 35 ci-dessus) (Note 42); un rapport récent sur la situation des droits de l'homme au Myanmar intitulé No safety in Burma, no sanctuary in Thailand (Note 43); et les transcriptions d'interviews réalisés en Thaïlande au mois de juin 1997 par Human Rights Watch auprès de cinq personnes du Myanmar (Note 44).
  111. 50. Par une communication datée du 13 août 1997, Images Asia a soumis quatre rapports et deux documentaires vidéos contenant des informations sur la question concernant la plainte (Note 45); un discours enregistré sur vidéo prononcé par Daw Aung San Suu Kyi devant l'Union européenne à propos des pratiques de travail au Myanmar et la transcription de ce discours (Note 46); les copies de plusieurs ordonnances, ayant trait pour la plupart à des réquisitions de main-d'oeuvre, obtenues par Images Asia, et datant des années 1992 à 1997 (Note 47); et plusieurs autres rapports contenant des informations concernant les Etats Chin, Kayah, Mon et Shan ainsi que la division de Tanintharyi (Tenasserim) (Note 48).
  112. 51. Par une communication datée du 10 août 1997, le Karen Human Rights Group a soumis un résumé détaillé des pratiques concernant la plainte intitulée Forced labour in Burma (Note 49), des analyses sur le portage et le travail des enfants au Myanmar (Note 50) ainsi que 15 rapports du Karen Human Rights Group sur la situation dans le pays (Note 51).
  113. 52. Par une communication datée du 17 juillet 1997, le projet Maje a soumis un rapport décrivant en détail les violations des droits de l'homme perpétrées par certaines unités militaires au Myanmar ainsi que plusieurs autres rapports récents de plusieurs organisations (Note 52).
  114. d) Communications des sociétés mentionnées dans la plainte
  115. 53. Par une communication datée du 19 juillet 1997, la compagnie Yukong Limited a indiqué qu'elle avait exploité un site de forage au Myanmar pendant trois ans et quelques mois à partir du mois d'octobre 1989. Selon les registres de la compagnie, elle n'avait pas foré de puits au village Htaw Tha, tel qu'allégué dans la plainte; en outre, la compagnie n'avait rien eu à voir avec la construction de routes au Myanmar et n'avait donc pas été impliquée dans la construction de la route allant de Monywa à Khamti, tel qu'allégué dans la plainte (Note 53)
  116. 54. Par une communication datée du 11 août 1997, la compagnie TOTAL a fourni des observations sur la plainte dont est saisie la commission (Note 54). En ce qui concerne les conditions de travail, elle note dans cette communication que le gazoduc était construit par des compagnies internationalement renommées employant autant de travailleurs locaux que possible et fournissant ainsi des ressources importantes aux communautés de la région. Elle indique également que ces entreprises offrent des conditions de travail équivalentes à celles octroyées par TOTAL dans le reste du monde; les salariés locaux reçoivent des salaires beaucoup plus élevés que le salaire moyen local et le versement de ces salaires est réalisé sous le contrôle de TOTAL. Il est également noté dans cette communication que TOTAL et ses partenaires ont décidé, en 1995, de lancer un vaste programme socio-économique à l'intention des communautés locales. En réponse à la plainte dont est saisie la commission, la communication déclare que le texte répète plusieurs allégations non fondées auxquelles TOTAL a déjà répondu ces dernières années. L'une de ces réponses, sous la forme d'une lettre adressée par TOTAL à la FIDH, est jointe en annexe. La communication indique également que le texte de la plainte contient un grand nombre d'erreurs factuelles mineures mais aussi d'autres plus graves. Elle souligne en particulier qu'il n'y a aucun rapport entre le gazoduc et le chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy), et qu'aucune communauté n'a été déplacée dans la région de ce gazoduc depuis la signature du contrat initial en 1992. Elle attire également l'attention de la commission sur les articles écrits par 15 journalistes, articles joints à la communication. Sont également jointes à cette communication une copie du code de conduite de TOTAL au Myanmar; les procédures d'indemnisation applicables à l'expropriation des terres; et une brochure intitulée The Yadana project. La communication indique encore que la compagnie TOTAL restait à la disposition de la commission pour toute information supplémentaire et qu'elle était prête à rencontrer les membres de la commission s'ils le souhaitaient.
  117. 4. Deuxième session de la commission
  118. 1) Audition des témoins
  119. 55. La commission a tenu à Genève du 17 au 20 et les 25-26 novembre 1997 sa deuxième session qui a été principalement consacrée à l'audition de témoins. Cette session a comporté 13 séances à huis clos auxquelles ont participé les représentants des plaignants, M. Janek Kuczkiewicz et M. Colin Fenwick, assistés de M. Maung Maung et M. David Arnott, ainsi que M. Guy Ryder et M. Dan Cunniah, respectivement directeur et directeur adjoint du bureau de la CISL à Genève.
  120. 56. Le gouvernement du Myanmar n'était pas représenté et n'a dès lors pas occupé les sièges qui lui étaient réservés. Notant l'absence du gouvernement, le président de la commission a rappelé les communications adressées au gouvernement du Myanmar dès la première session de la commission aux fins de lui transmettre les informations reçues des plaignants et des organisations sollicitées; de l'informer des dates auxquelles serait tenue la deuxième session et de l'inviter à désigner son représentant (Note 55).
  121. 57. La commission a requis son secrétariat in limine litis de contacter par téléphone la mission permanente du Myanmar à Genève. Elle fut alors informée que le gouvernement du Myanmar n'entendait pas être représenté lors de la deuxième session de la commission.
  122. 58. A la lumière de ces faits, la commission a estimé que le gouvernement du Myanmar avait été dûment informé des dates auxquelles la deuxième session serait tenue et avait eu l'opportunité d'y participer en tout temps. La commission a dès lors conclu que le gouvernement du Myanmar s'était abstenu en toute connaissance de cause de se prévaloir de son droit d'être présent aux audiences. Dans ces circonstances et considérant le temps déjà écoulé depuis le dépôt de la plainte, la commission a estimé qu'elle devait poursuivre ses travaux aux fins d'assurer que la plainte soit examinée promptement, évitant tout délai déraisonnable et assurant dès lors une procédure équitable (Note 56).
  123. 59. Avant de donner la parole aux représentants des plaignants, le président de la commission a rappelé que, conformément aux Règles relatives à l'audition des témoins adoptées lors de la première session et transmises aux parties, tous les témoins seraient entendus à huis clos à moins que la commission en décide autrement après consultation avec la partie concernée. L'information alors fournie par le témoin serait traitée comme confidentielle par toute personne dont la commission autoriserait la présence; notamment, aucune déclaration publique ne devait être prononcée sur cette information, à moins d'être expressément autorisée par la commission. Pour ce qui est de la présentation de la preuve, et en l'absence des représentants du gouvernement intéressé, les représentants des plaignants et les témoins seraient autorisés à faire des déclarations aux fins de fournir à la commission les données de fait pertinentes au cas qui relève de sa compétence. Chaque témoin serait interrogé par les représentants des plaignants et par la commission mais cette dernière conserverait son droit d'intervenir en tout temps, étant entendu que tout interrogatoire serait soumis à son contrôle (Note 57).
  124. 60. Par la suite, la commission a entendu les déclarations liminaires d'un plaignant et de représentants des plaignants (Note 58). Par la suite, elle a demandé aux représentants des plaignants de présenter leurs éléments de preuve. Ils ont fait entendre 14 témoins.
  125. 61. Le président de la commission a fait connaître à chacun des témoins avant qu'il ne présente sa déposition les conditions au regard desquelles ils apporteraient leurs témoignages, en précisant notamment que la fonction de la commission était d'établir les faits au sujet de l'application par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. En outre, le président a insisté sur le fait qu'une latitude raisonnable serait donnée aux témoins aux fins de leur permettre de fournir de telles informations de fait, mais que les déclarations de nature politique ou sortant de son mandat ne seraient pas acceptées. Toutes informations et éléments fournis à la commission à huis clos seraient traités comme confidentiels par toute personne dont la commission avait préalablement autorisé la présence. Le président de la commission a par la suite invité chaque témoin à faire une déclaration solennelle correspondant à celle prévue au Règlement de la Cour internationale de Justice aux termes de laquelle ils déclarent solennellement, en tout honneur et conscience, de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Dans les cas où l'interprétation était nécessaire, la commission a également requis les interprètes de faire une déclaration aux termes de laquelle ils s'engageaient à traduire fidèlement les propos du témoin.
  126. 62. Les témoins qui ont comparu dans le cadre des audiences de la commission se divisent en deux groupes. D'une part, 11 témoins ont été invités à faire une déposition en raison des connaissances qu'ils avaient acquises par des recherches, enquêtes ou entrevues sur la situation qui prévaut au Myanmar, en général, et sur les allégations de la plainte, en particulier. Deux de ces témoins ont également apporté la preuve qu'ils avaient assisté personnellement aux faits faisant l'objet de la plainte. Dans le cadre de leur témoignagne, ces témoins ont fourni des déclarations écrites et ont répondu aux questions qui leur étaient posées. Parmi ces témoins, Mme Donna Guest, représentante de l'organisation non gouvernementale Amnesty International, et Mme Edith Mirante, représentante de l'organisation non gouvernementale Project Maje, ont présenté différentes formes de travail forcé qu'elles ont identifiées au cours de leurs recherches sur le Myanmar. Par la suite, ont été entendus: M. Kevin Heppner, représentant de l'organisation non gouvernementale Karen Human Rights Group, qui a fait une présentation systématique du travail forcé, notamment dans la partie orientale du Myanmar, et Mme Zunetta Lizddell, représentante de l'organisation non gouvernementale Human Rights Watch/Asia, qui a traité notamment des questions relatives aux traditions culturelles et au travail pénitentiaire. Une représentante de l'organisation non gouvernementale Images Asia et un représentant de l'organisation non gouvernementale Burma Centrum Netherlands, qui ont demandé à ce que leurs noms et autres données d'identification ne soient pas divulgués, ont respectivement témoigné sur la situation dans différents Etats et divisions du Myanmar et sur la question délicate des Rohingyas dans l'Etat Rakhine. M. Terry Collingsworth, représentant de l'organisation non gouvernementale International Labour Rights Fund, et M. Doug Steele ont pour leur part précisé notamment l'état de la poursuite judiciaire devant le tribunal d'instance des Etats-Unis d'Amérique, instance centrale de la Californie (United States District Court, Central District of California), dans laquelle est impliquée notamment la Federation of Trade Unions of Burma et le Yadana Natural Gas Project ainsi que la société américaine UNOCAL et qui concerne le gazoduc qui traverse la division de Tanintharyi au sud du Myanmar; Mme Christine Habbard de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) s'est également référée à la question du gazoduc. Enfin, deux autres personnes ont présenté les témoignages qu'elles avaient recueillis au cours d'enquêtes menées sur le terrain.
  127. 63. D'autre part, trois témoins ont présenté des éléments de preuve concernant des faits vécus personnellement et relatifs à l'affaire. La commission a décidé que ces derniers témoins devaient bénéficier de mesures de protection et que, en conséquence, ni leurs véritables noms ni les données permettant de les identifier ne seraient divulgués. Leurs dépositions ainsi expurgées seraient toutefois rendues publiques.
  128. 64. En outre, les plaignants ont présenté une requête aux termes de laquelle, compte tenu du jeune âge d'un des témoins de faits, ils ont demandé qu'elle soit entendue dans un lieu gardé confidentiel et que la personne qui l'accompagne normalement soit présente au moment de la déposition. Après en avoir délibéré, la commission a décidé d'octroyer les mesures de protection demandées de manière à offrir autant que possible un climat favorable pour la prise de la déposition. La commission a dès lors décidé qu'elle se déplacerait dans un lieu qui serait gardé confidentiel, serait accompagnée d'un représentant des plaignants et de deux membres de son secrétariat. La personne accompagnant normalement le témoin pourrait être présente étant entendu qu'elle n'essaierait pas de communiquer avec le témoin ou d'intervenir de quelque manière. La commission s'est toutefois réservée le droit de demander à tout moment à cette personne de quitter la pièce si elle estime que sa présence nuit au témoignage (Note 59).
  129. 65. En outre, la commission a autorisé un autre témoin, incapable de se rendre à Genève pour la session, à faire sa déposition par voie de vidéoconférence (Note 60). Les mêmes mesures de protection en ce qui concerne la non-divulgation de son nom et autres données d'identification lui ont été octroyées.
  130. 66. Des conférences préparatoires entre la commission et les représentants des plaignants ont été tenues de temps à autre au sujet de la procédure afin d'en assurer le bon déroulement. Les membres de la commission se sont retirés à plusieurs reprises de manière à délibérer à huis clos et ex parte aux fins de trancher les questions de procédure soulevées au cours des audiences.
  131. 67. Différents documents ont été soumis par les témoins et les représentants des plaignants au cours de la deuxième session (Note 61). Enfin, à l'issue de la présentation de la preuve, les représentants des plaignants ont prononcé leurs déclarations finales.
  132. 68. Les informations recueillies au cours des audiences sont reflétées dans l'analyse figurant dans la partie IV du rapport. Les comptes rendus sténographiques d'audience ont été communiqués par le secrétariat de la commission au gouvernement du Myanmar. En outre, deux exemplaires des comptes rendus d'audience ont été déposés à la bibliothèque du Bureau international du Travail.
  133. 69. A l'issue de la deuxième session, la commission a estimé qu'il serait souhaitable qu'elle se rende au Myanmar pour compléter les informations en sa possession. La commission a dès lors demandé au gouvernement, dans une lettre en date du 28 novembre 1997, de lui donner la possibilité de se rendre au Myanmar pour une période de sept à dix jours; elle a exprimé l'espoir que le gouvernement offrirait sa coopération et son assistance à cet égard. Plus précisément, la commission a insisté sur l'importance d'obtenir sur place, sans restriction aucune, les informations nécessaires de toute personne dont les connaissances et l'expérience pouvaient s'avérer pertinentes, incluant des dirigeants gouvernementaux de haut niveau ou des personnes ou entités que la commission jugerait à propos de rencontrer. Elle a ajouté que les entrevues devaient être tenues dans des circonstances assurant pleine confidentialité aux personnes rencontrées et a rappelé que, conformément à l'article 8 des Règles relatives à l'audition des témoins, le gouvernement devait assurer que les témoins ou leurs familles ne subiront aucune sanction ni préjudice du fait d'être associés aux travaux de la commission.
  134. 2) Communications reçues par la commission après la deuxième session (Note 62)
  135. a) Communication du gouvernement du Myanmar
  136. 70. Par une communication en date du 12 décembre 1997, le directeur général du ministère du Travail du gouvernement du Myanmar a informé le Directeur général du BIT que son gouvernement ne pouvait autoriser la venue de la commission d'enquête au Myanmar, étant entendu "qu'une telle visite ne contribuerait pas vraiment à résoudre l'affaire" et "qu'elle constituerait une ingérence dans les affaires intérieures du pays".
  137. 71. Par une communication datée du 16 juin 1998, la Mission permanente de l'Union du Myanmar auprès des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève a transmis plusieurs articles, dossiers de presse, rapports, memoranda, correspondances et bandes vidéo au sujet d'activités et de projets impliquant de la main-d'oeuvre au Myanmar (Note 63). Ces informations faisaient état en particulier de l'utilisation de membres de la Tatmadaw pour la construction de projets de développement régionaux et pour le développement "des régions frontalières et des races nationales", ainsi que des documents sur la situation des femmes et des enfants et sur la participation des compagnies privées dans les secteurs des transports et du tourisme.
  138. b) Communications d'organisations non gouvernementales
  139. 72. Par une communication en date du 10 mars 1998, le Comité consultatif mondial des amis (Quakers) a demandé des précisions au secrétariat à propos de l'avancement des travaux de la commission.
  140. 73. Par une communication en date du 27 mars 1998, Images Asia a transmis copie d'un rapport sur la situation prévalant dans l'Etat Chin et dans la division de Sagaing intitulé All quiet on the Western Front? (Note 64).
  141. 74. Au cours des mois d'avril et juin, les documents suivants ont également été transmis à la commission: un rapport d'Amnesty International intitulé Atrocities in the Shan State (Note 65) transmis par la Burma Peace Foundation; plusieurs rapports du Karen Human Rights Group (Note 66) transmis par cette organisation; et un rapport de Earth Rights International intitulé School for Rape (Note 67) transmis par cette organisation.
  142. c) Communications d'une compagnie mentionnée dans la plainte
  143. 75. Par une lettre en date du 11 décembre 1997, la commission a donné l'opportunité à TOTAL de fournir des observations additionnelles sur une série d'allégations de faits, soulevées dans les documents reçus par la commission et les témoignages entendus et citant la société. Par une communication en date du 23 décembre, TOTAL a répondu à chacun des points soulevés en soulignant qu'il y avait peu d'éléments nouveaux auxquels la compagnie n'aurait pas déjà répondu et que les allégations étaient sans rapport avec la réalité connue sur le terrain (Note 68). Plus précisément, TOTAL a indiqué:
  144. -- qu'il était erroné d'affirmer que des travaux de nettoyage préalables aient pu être réalisés par des travailleurs forcés dans le but de faciliter l'accès aux équipes du projet. Au cours des années 1993 et 1994, l'enlèvement de la végétation avait été assuré, sous le contrôle de TOTAL, par la Compagnie générale de géophysique (CGG);
  145. -- que TOTAL n'avait aucune connaissance de travaux de nivellement de terrain à Phaungdaw, ni en 1994 ni depuis, à l'exception des travaux liés à l'emprise du gazoduc, lesquels avaient été effectués sous le contrôle de la société;
  146. -- que la sécurité des installations et du personnel travaillant sur le gazoduc relevait des autorités nationales du Myanmar, l'organisation des forces publiques dans cette région n'étant absolument pas du ressort de TOTAL;
  147. -- que, pour ce qui est des îles Heinze, aucune des personnes travaillant pour TOTAL n'avait ni mis les pieds sur ces îles ni les avait survolées. Il n'y avait aucune corrélation entre ces îles et le gazoduc mis en place par TOTAL;
  148. -- qu'en aucune manière et sous aucune forme TOTAL n'avait été associé, même indirectement, à des ouvrages de génie civil ou à une base militaire que l'armée avait fait réaliser à Kadaik (localité située dans l'estuaire de la rivière Heinze);
  149. -- qu'il était erroné de prétendre que TOTAL avait confié quelques travaux que ce soit à l'armée ou à la société nationale MOGE, ni en février 1996, ni avant, ni depuis;
  150. -- que TOTAL n'avait jamais versé d'argent à l'armée du Myanmar, ni à aucune de ses unités;
  151. -- que, de façon tout à fait catégorique, TOTAL pouvait assurer que l'armée n'avait jamais effectué de travaux de nettoyage à l'extrémité orientale de la route du gazoduc;
  152. -- que la plupart des hélipads situés sur le parcours même du gazoduc avaient été construits par TOTAL ou par des sociétés travaillant pour TOTAL et appliquant son code de conduite, TOTAL ignorant dans quelles conditions avaient été réalisés d'autres hélipads dans la région;
  153. -- que, contrairement à ce qui avait été indiqué à la commission, il n'existait pas de route spécifique au gazoduc dans la partie ouest de la zone où celui-ci a été construit. En 1995-96, pour les besoins du projet, des améliorations avaient été apportées au réseau routier existant dans cette zone côtière et avaient été effectuées par la société des travaux publics BEC-Frères (basée à Montpellier), travaillant sous le contrôle de TOTAL et respectant son code de conduite. Ces travaux avaient occasionné l'utilisation d'engins modernes de travaux publics, et en aucun cas le recours à des travailleurs forcés;
  154. -- que, bien que cela n'ait pas toujours été le cas, plus personne ne contestait aujourd'hui que TOTAL et ses contracteurs rémunèrent toutes les personnes travaillant dans le cadre du projet Yadana;
  155. -- qu'affirmer que le recours au chemin de fer pour les besoins du projet avait été sérieusement envisagé, puis abandonné en raison d'allégations de travail forcé, était tout simplement absurde. A cet égard, TOTAL a précisé que:
  156. -- -- le débarcadère (wharf) par lequel les matériels sont acheminés dans la région avait, dès l'origine, fait partie du projet;
  157. -- -- un train (surtout avec les spécifications techniques du futur chemin de fer Ye-Tavoy) n'aurait en aucun cas pu transporter les sections du gazoduc, longues de 12 mètres et pesant près de 5 tonnes chacune, pas plus que les 700 appareils et engins de travaux publics, parfois géants, mobilisés sur le chantier;
  158. -- -- que la simple chronologie des faits parlait par elle-même puisque, contrairement au gazoduc, le train était loin d'être opérationnel et n'avait toujours pas atteint la zone du pipeline;
  159. -- que, enfin, un gazoduc se pose sur un sol meuble et ne nécessite pas dès lors le concassage de pierres.
  160. 76. Par une communication en date du 4 mars 1998, la société TOTAL a transmis copie d'un rapport rédigé par deux membres de l'organisation non gouvernementale Commission for Justice and Peace (Note 69). Ce rapport a été préparé à la demande d'UNOCAL et avait pour but de vérifier les conditions de travail et les programmes socio-économiques existant sur le site du gazoduc Yadana au Myanmar. Bien que le rapport précise que la question de savoir si les investissements étrangers influent sur la viabilité du régime dirigeant le pays dépasse le cadre du mandat octroyé, il conclut que chaque village profite de retombées positives générées par le projet. Il ajoute que l'approche adoptée devrait servir de modèle aux autres sociétés internationales.
  161. 5. Visite de la commission dans la région
  162. 1) Procédure suivie par la commission
  163. 77. Les membres de la commission ont jugé nécessaire également de compléter les informations en leur possession en se rendant dans la région afin de rencontrer le plus grand nombre possible de personnes et entités susceptibles de les informer sur les pratiques mentionnées dans la plainte.
  164. 78. Cette visite était d'autant plus importante que le gouvernement du Myanmar avait refusé de recevoir les membres de la commission; elle allait leur permettre de se former une impression directe de la situation décrite dans la plainte, de prendre personnellement connaissance de faits relatés dans la masse de documents qui leur avaient été soumis et de vérifier la justesse des allégations figurant dans la plainte. Ce faisant, la commission a exercé ses pouvoirs d'investigation et d'enquête.
  165. 79. En vue d'assurer la meilleure utilisation de son temps et de déterminer par elle-même les lieux qu'elle entendait visiter, la commission a établi par avance un plan détaillé des déplacements qu'elle désirait faire et elle a informé les autorités compétentes de la nécessité de se rendre en Inde, au Bangladesh et en Thaïlande durant la période s'échelonnant du 18 janvier au 20 février 1998.
  166. 80. Lors de l'enquête qu'elle a menée dans la région, la commission a obtenu les témoignages personnels de près de 250 personnes. Ces témoignages ont été rendus possibles grâce à l'aide de personnes et d'organisations non gouvernementales oeuvrant dans les régions concernées. A la demande de la commission, ces personnes et ces organisations ont été priées d'identifier toute une série de personnes susceptibles d'être interrogées avec des directives explicites selon lesquelles ces témoins devaient être choisis au hasard et ne pas avoir été déjà interrogés sur les questions faisant l'objet de l'enquête, à l'exception de leurs noms et autres données d'identification. Cette demande avait pour but d'éviter les répétitions d'autres déclarations déjà fournies à la commission et de limiter le risque d'altérer les preuves tout en assurant la crédibilité des informations fournies. La commission a exprimé le désir de couvrir autant que faire se peut le maximum de territoire du Myanmar et, dans cet esprit, d'interroger des personnes provenant du plus grand nombre possible de régions et appartenant à toutes sortes de groupes ethniques sans distinction aucune. Compte tenu du très grand nombre d'interviews, priorité a été donnée aux témoins ayant les expériences les plus récentes. La commission a aussi estimé utile d'entendre les témoignages de personnes ayant servi dans les forces armées du Myanmar.
  167. 81. Etant donné le nombre considérable de personnes pouvant être entendues et afin d'en entendre un aussi grand nombre que possible, la commission s'est souvent scindée en trois équipes, dont chacune comprenait un membre de la commission et un membre du secrétariat. Chaque équipe a pu recueillir les déclarations de témoins. En une occasion, cette procédure a été modifiée lorsqu'en Thaïlande la commission n'a pu avoir accès aux témoins potentiels. La commission a alors autorisé une personne qui pouvait entrer en contact avec eux et qui a recueilli les déclarations de huit de ces témoins. Cette personne avait elle-même témoigné à Genève (Note 70), devant la commission, sur son expérience professionnelle et sur le fait qu'elle avait déjà recueilli les déclarations de personnes ayant été témoins de faits intéressant l'enquête ou les ayant elles-mêmes vécus. La commission a donné à cette personne des directives sur le type d'interrogatoires à mener et sur la façon dont ils devaient être conduits. Se fondant sur les références antérieures de cette personne et sur son expérience ainsi que sur le compte rendu qu'elle a fait de ces interrogatoires, la commission a pu se convaincre que les témoignages obtenus étaient volontaires et dignes de foi.
  168. 82. Lorsque ces diverses mesures ont été prises, il est apparu que les témoins avaient peur des représailles que pouvaient prendre les autorités; soucieuse d'obtenir des informations complètes et exactes, la commission a décidé qu'il convenait de prévoir des mesures de protection selon lesquelles les noms et autres données d'identification ne seraient pas divulgués. La commission a estimé essentiel toutefois que les résumés des témoignages ainsi expurgés soient rendus publics et fassent partie intégrante du présent rapport (Note 71).
  169. 83. La commission a recueilli les déclarations des témoins sur une base individuelle, sauf quelques rares occasions où les personnes provenaient de la même famille ou localité ou lorsque les conditions de l'entrevue ne permettaient pas une telle procédure. Dans ces cas, le témoignage d'une personne était pris et corroboré par la suite par d'autres dans un petit groupe. Dans les cas où l'interprétation était nécessaire, la commission a choisi à l'avance les interprètes et les a requis de faire une déclaration aux termes de laquelle ils s'engageaient à traduire fidèlement les propos des témoins. En outre, un membre du secrétariat parlant le birman couramment pouvait assurer que l'interprétation était véridique.
  170. 84. Hommes, femmes et enfants ont été interrogés. Dans ce dernier cas en particulier, la commission s'est assurée que le témoin comprenait le mandat de la commission et la nécessité de dire la vérité. Les entrevues ont été tenues dans des conditions assurant pleine confidentialité aux personnes rencontrées. Puisque plusieurs personnes interrogées habitaient des régions éloignées ou fermées aux membres de la commission, elles ont été déplacées et rencontrées dans des conditions assurant à tous sécurité et accessibilité. Pour chaque témoin, la commission a, dans un premier temps, obtenu les données d'identification nécessaires aux fins de vérifier, opposer et corroborer les différentes versions racontées. Elle a par la suite interrogé les témoins sur leur expérience personnelle pertinente aux pratiques mentionnées dans la plainte, vérifiant notamment l'année, la durée, l'endroit, le contexte et les conditions d'exécution. En outre, elle a questionné les témoins sur les expériences que d'autres auraient pu leur raconter, incluant leur famille, leurs proches ou toutes personnes. Chaque témoin a eu la possibilité de prononcer une déclaration personnelle. Lorsque approprié, la commission a aussi questionné les témoins sur leurs affiliations ou allégeances politiques.
  171. 85. L'enregistrement des informations a été faite sous forme de notes manuscrites prises par la commission; du fait de leur abondance, elles ont été ensuite résumées. La commission a renoncé à l'enregistrement sur bandes magnétiques en raison des difficultés pratiques qu'il présentait, en particulier avec les interprètes; en outre, les personnes interrogées étaient moins intimidées vu l'environnement dans lequel beaucoup d'entrevues se déroulaient: dans des huttes, à même le sol, en plein air et dans une usine.
  172. 2) Personnes et témoins rencontrés
  173. 86. La commission s'est déplacée en Inde, au Bangladesh et en Thaïlande pour rencontrer des personnes susceptibles de lui fournir des informations pertinentes relatives à la plainte. L'âge des personnes rencontrées varie entre 12 et 72 ans, et la grande majorité des expériences relatées se sont produites au cours de ces deux dernières années.
  174. a) Inde
  175. 87. La commission a procédé à des entrevues les 19, 20 et 22 janvier 1998 à Delhi. A cette occasion, elle a rencontré 17 personnes provenant des Etats Chin et Rakhine et appartenant respectivement aux groupes ethniques Chin et Rakhine (Note 72). Malgré ses demandes, la commission n'a toutefois pu obtenir en temps utile du gouvernement de l'Inde les autorisations nécessaires pour se rendre dans l'Etat Manipur, au nord-est de l'Inde où auraient trouvé refuge d'autres personnes provenant du Myanmar et en possession d'informations qui auraient pu intéresser la commission.
  176. 88. Le 22 janvier 1998, le président de la commission a rendu une visite de courtoisie au secrétaire du ministère du Travail du gouvernement indien aux fins de lui présenter les grandes lignes et l'importance du travail de la commission d'enquête en Inde.
  177. b) Bangladesh
  178. 89. La commission s'est par la suite déplacée au Bangladesh où elle a séjourné du 23 janvier au 3 février. Lors de son séjour à Dhaka, du 23 au 27 janvier, la commission a rencontré des représentants du Haut Commissariat pour les réfugiés des Nations Unies et d'organisations non gouvernementales susceptibles de lui fournir de l'information lui permettant d'identifier les endroits les plus propices pour rencontrer des personnes ayant une connaissance personnelle des questions faisant l'objet de la plainte.
  179. 90. Du 27 janvier au 3 février 1998, la commission s'est rendue à Cox's Bazar, ville située à quelques kilomètres de la frontière partagée par le Bangladesh et le Myanmar. Compte tenu du nombre considérable de personnes qui pouvaient être rencontrées, la commission s'est alors divisée en trois groupes de manière à conduire le plus d'entrevues possible. Au total, plus de 71 témoignages ont été recueillis, les rencontres ayant lieu dans la ville et ses environs (Note 73). La plupart des personnes rencontrées étaient d'origine Rohingya et provenaient du nord de l'Etat Rakhine qu'elles n'avaient quitté, pour certaines, que quelques jours auparavant. Plusieurs n'avaient pas d'abris et campaient sur des terrains vagues.
  180. 91. Le président de la commission a rendu visite au ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre du Bangladesh le 2 février 1998 à Dhaka. Au cours de cet entretien, le président a expliqué l'origine et le mandat de la commission ainsi que les raisons de sa présence dans la région.
  181. c) Thaïlande
  182. 92. La commission s'est déplacée en Thaïlande du 3 au 20 février 1998. Du 5 au 9 février, elle s'est rendue dans la localité de Mae Hong Song, ville située aux confins de la Thaïlande près de la frontière avec l'Etat Kayah au Myanmar. Elle a transité par les villes de Bangkok et Chiang Mai où elle a pu rencontrer des représentants d'organisations non gouvernementales qui ont été en mesure de lui fournir de l'information récente sur l'état de la situation au Myanmar.
  183. 93. A Mae Hong Song, la commission a rencontré 53 personnes provenant de différents Etats du Myanmar et appartenant aux groupes ethniques Karenni, Karen, Birman, Shan et Pa'o (Note 74). Les entrevues ont été tenues à trois endroits aux environs de la localité.
  184. 94. Du 10 au 16 février 1998, la commission s'est ensuite déplacée à Mae Sot, ville thaïlandaise située près de la frontière avec l'Etat Kayin où elle a rencontré 56 personnes des groupes ethniques Musulman, Karen, Birman, Shan et Pa'o (Note 75). L'un des membres de la commission, accompagné d'un membre du secrétariat, s'est rendu du 15 au 17 février à Kanchanaburi, province de la Thaïlande, partageant la frontière avec les Etats Karen et Mon ainsi qu'avec la division de Tanintharyi (Tenasserim). Elle y a tenu 12 entrevues avec des Mons et des Karens (Note 76).
  185. 95. Ayant quitté Mae Sot un peu plus tôt pour retourner à Bangkok, le président y a rencontré, le 15 février, des membres du gouvernement de coalition nationale du Myanmar (National Coalition Government of the Union of Burma -- NGBU).
  186. 96. Les membres de la commission ont été à nouveau réunis le 18 février à Bangkok. Ils ont profité de la journée suivante pour faire une visite de courtoisie au ministre du Travail de la Thaïlande et pour rencontrer un représentant d'une organisation non gouvernementale s'intéressant au travail forcé au Myanmar.
  187. 97. Deux membres de la commission devant quitter la Thaïlande en raison des horaires aériens, un seul membre est demeuré le 20 février pour conduire des entrevues dans un site à proximité de Bangkok. Trente-deux personnes des groupes Karen, Birman, Mon et Rakhine ont été rencontrées à cette occasion (Note 77).
  188. 98. A la fin de sa visite dans la région, la commission a décidé de se réunir une nouvelle fois à Genève, du 29 juin au 3 juillet 1998, afin d'établir et d'adopter son rapport final.
  189. 6. Troisième session de la commission
  190. 99. La commission a tenu sa troisième session à Genève du 29 juin au 3 juillet 1998. A cette occasion, la commission a parachevé la rédaction des chapitres du présent rapport. La commission a clos cette dernière session en signant le rapport qu'elle a déposé entre les mains du Directeur général du Bureau international du Travail.
  191. Partie III
  192. Allégations des parties et historique de l'affaire
  193. 7. Résumé de la plainte et des observations du gouvernement
  194. 100. Dans leur plainte et moyens de preuve supplémentaires, les plaignants se sont référés aux conclusions formulées précédemment par les organes de contrôle de l'OIT au sujet de l'inexécution par le Myanmar de la convention sur le travail forcé. Ils allèguent qu'actuellement la situation est telle que le gouvernement du Myanmar, loin de prendre des mesures pour faire cesser la pratique du travail forcé, l'encourage encore activement au point que l'on est aujourd'hui en présence d'un abus endémique touchant des centaines de milliers de travailleurs soumis aux formes d'exploitation les plus extrêmes. Les plaignants ont soumis des allégations de fait détaillées concernant à la fois le recours systématique, dans la pratique, au travail forcé et l'existence d'une législation nationale autorisant ou permettant d'imposer le travail forcé. Les plaignants ont également présenté des conclusions juridiques détaillées concernant ce qu'ils considèrent comme une incompatibilité de la loi et de la pratique nationales avec la convention. Les allégations de fait et les conclusions juridiques des plaignants sont résumées (Note 78) comme suit.
  195. 1) Allégations de fait soumises par les plaignants
  196. 101. Selon les plaignants, le Myanmar pratique et a pratiqué de façon généralisée le recours au travail forcé dans le pays. Cette pratique qui touche des centaines de milliers de résidents de Myanmar comporte le recours au travail forcé à des fins publiques ainsi que pour des bénéfices privés. Le travail est exigé d'hommes, de femmes et d'enfants de villages et de villes dans différentes parties du pays, ainsi que des prisonniers. En même temps, le gouvernement militaire commet de graves abus physiques et sexuels à l'encontre de nombreux travailleurs forcés, tels que passages à tabac, viols, exécutions et privations délibérées de nourriture, d'eau, de repos, d'abri et d'accès à des soins médicaux.
  197. 102. Les plaignants précisent que les pratiques de travail forcé à des fins publiques incluent les pratiques suivantes: 1) portage et services au combat, de déminage et d'ordre sexuel pour les troupes; 2) construction et autres lourds travaux pour des projets de développement et d'infrastructure qui ne bénéficient pas à la population à laquelle est imposé le travail forcé, et le plus souvent lui sont nuisibles; 3) lourds travaux sur des projets de construction militaire. Le recours au travail forcé est pratiqué à des fins privées pour: 1) promouvoir des opérations en association avec des entreprises étrangères, y compris pour l'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays; 2) encourager l'investissement privé dans le développement des infrastructures, les travaux publics et les projets touristiques; et 3) servir les intérêts commerciaux privés des membres des forces armées du Myanmar.
  198. 103. Les plaignants déclarent également que le gouvernement a fait valoir que désormais il n'aura recours qu'aux forces armées pour, selon ses termes, "les grands projets de développement communautaire"; de l'avis des plaignants, cette annonce ne fournit aucune assurance selon laquelle le gouvernement cessera d'avoir recours au travail forcé sur d'autres projets, y compris les services de portage et d'appui aux forces armées, ou que le travail forcé sur de "grands projets" ne sera pas repris à tout moment.
  199. 104. Les plaignants se réfèrent à deux lois actuellement en vigueur au Myanmar qui permettent d'exiger de la population un travail forcé ou obligatoire et prévoient des amendes et des peines d'emprisonnement pour ceux qui ne s'y soumettraient pas. Selon ces plaignants, ces lois, à savoir la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes, ne tombent pas dans le champ d'application d'une loi apparemment en vigueur aux termes de laquelle le recours "illégal" au travail forcé est un délit. D'autres directives militaires secrètes, récemment révélées, légitiment implicitement les pratiques de travail forcé sur les projets de développement en demandant que les travailleurs forcés soient payés et qu'il soit mis fin aux "misères et aux souffrances" associées à des "incidents indésirables" survenus pendant le travail forcé.
  200. 2) Conclusions juridiques soumises par les plaignants
  201. 105. Les plaignants allèguent que le gouvernement du Myanmar a totalement manqué à son obligation d'assurer le respect effectif de la convention no 29. Il pratique délibérément le recours au travail forcé au sens de cette convention et commet de graves violations des droits de l'homme dans le contexte de cette pratique. Il a refusé d'abroger les lois qui autorisent la pratique et d'assurer de manière adéquate que le fait d'exiger un travail forcé constitue un délit pénal. Il a également refusé de faire en sorte que les sanctions imposées par la loi soient réellement efficaces et strictement appliquées, comme l'exige la convention.
  202. 106. Selon les plaignants, le gouvernement s'est efforcé de caractériser la pratique du travail forcé sous la menace, les abus, amendes et emprisonnements comme constituant une contribution volontaire du peuple du Myanmar conforme à la tradition culturelle bouddhiste. Les éléments de preuve démontrent non seulement que les minorités non bouddhistes sont soumises parfois de façon disproportionnée aux exigences du travail forcé, mais également que cette pratique est imposée sous la menace de sanctions légales et avec recours à la force physique.
  203. 107. Les plaignants font valoir qu'aucune des formes de travail forcé pratiquées au Myanmar ne peut être considérée comme relevant d'une exception aux interdictions générales du recours au travail forcé ou obligatoire aux termes de la convention. Ces pratiques ne correspondent à aucune des cinq exceptions suivantes autorisées en des termes stricts par la convention: service militaire obligatoire; service faisant partie des obligations civiques normales; travail pénitentiaire exigé de prisonniers dûment condamnés; travail réalisé dans des cas de force majeure mettant en danger la population; et menus travaux de villages. En outre, le fait qu'un travailleur forcé reçoive un salaire ne fait pas de différence quant à la question de savoir si ce travail relève d'une de ces cinq exceptions, bien que le gouvernement ait cherché à défendre ses pratiques en alléguant que ses travailleurs forcés étaient payés.
  204. 108. Selon les plaignants, aucune période transitoire ne peut être invoquée par le Myanmar pour l'exempter de l'obligation qui lui est faite par la convention no 29 de supprimer le travail forcé sous toutes ses formes. Le comité créé par l'OIT pour examiner la réclamation présentée par la CISL au titre de l'article 24 sur le portage forcé au Myanmar a conclu qu'aucune période transitoire n'était applicable (Note 79). Les quarante années qui se sont écoulées depuis que le Myanmar a ratifié la convention constituent une durée plus qu'amplement suffisante pour qu'il procède aux modifications requises à la loi et à la pratique en vue de se conformer aux exigences de la convention. En outre, les plaignants déclarent que le gouvernement lui-même a admis qu'aucune période transitoire ne s'appliquait: ces admissions ont été faites dans le cadre de la procédure de l'article 24, et récemment dans les observations qu'il a présentées devant les Nations Unies à propos de rapports faisant état de pratiques de travail forcé.
  205. 109. Enfin, de l'avis des plaignants, même si une période transitoire était applicable dans ce cas les faits montrent qu'aucune des conditions et garanties requises pendant une telle période transitoire n'est satisfaite au Myanmar. Le travail forcé est utilisé au profit de particuliers; il est utilisé largement et systématiquement en tant que partie intégrante du budget régulier du gouvernement, et le recours au travail forcé n'est limité en aucune manière comme constituant une mesure exceptionnelle. Parmi d'autres violations des dispositions de la convention relatives aux conditions et garanties requises au titre de la période transitoire, ils mentionnent l'insuffisance ou l'inexistence d'une réglementation sur les pratiques du travail forcé; le fait que ce travail n'est pas d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter et qu'il n'est pas d'une nécessité éminente; que ce travail constitue un fardeau trop lourd pour la population, que le travail forcé est exigé comme un impôt sans être assorti des garanties requises par la convention, et notamment de permettre aux travailleurs forcés de rester sur leur lieu de résidence habituelle et de respecter la religion, la vie sociale et l'agriculture; l'assujettissement de femmes, d'enfants et d'hommes de plus de 45 ans au travail forcé; le fait de ne pas limiter la période de travail forcé à soixante jours par an; le fait de ne pas rémunérer en espèces ce travail à des taux équivalant au salaire accordé pour un travail volontaire équivalent et de ne pas respecter les heures normales de travail et le jour de repos hebdomadaire; le fait de ne pas appliquer à ces travailleurs la législation sur la réparation des accidents et, de toute manière, de ne pas respecter l'obligation d'assurer la subsistance de toute personne se trouvant dans l'incapacité de subvenir à ses besoins par suite de l'exécution du travail forcé; de ne pas veiller à ce que des personnes ne soient pas transférées dans d'autres régions du pays, lorsque ce transfert constitue un danger pour leur santé ou, le cas échéant, de veiller à assurer une adaptation progressive de ces personnes; lorsque le travail forcé est imposé pendant une période prolongée; de ne pas veiller à ce que des soins médicaux et une subsistance soient assurés aux familles des travailleurs et que soit couvert le coût de voyage des travailleurs pour aller au lieu de travail et pour en revenir; et de ne pas abolir le portage forcé "dans le plus bref délai possible" après la ratification.
  206. 3) Les observations du gouvernement (Note 80)
  207. 110. Avant de répondre aux allégations des plaignants, le gouvernement décrit les initiatives qu'il a prises en faveur d'une nation paisible, moderne et développée, ses objectifs économiques et sociaux et les avantages que la population locale et la nation dans son ensemble ont tirés de la construction d'infrastructures dans le pays, notamment de la construction de nouvelles voies de chemins de fer, mais également de routes carrossables, de réseaux d'irrigation, d'écoles, d'hôpitaux, de marchés, de parcs et de cités nouvelles grâce aux efforts collectifs de l'Etat, de la population et des membres des forces armées du Myanmar (hommes de la Tatmadaw).
  208. 111. En ce qui concerne les allégations présentées par les plaignants, le gouvernement a groupé sa réfutation sous trois titres principaux: i) fins publiques ou secteur public; ii) bénéfice privé ou secteur privé; iii) la loi.
  209. a) Fins publiques ou secteur public
  210. i) Portage
  211. 112. Depuis 1948, les gouvernements successifs du Myanmar ont eu à faire à des groupes insurrectionnels. C'est pourquoi, dans certaines circonstances, les forces armées du Myanmar ont dû employer des porteurs pour le transport de fournitures et de l'équipement sur terrain difficile vers des endroits éloignés et des montagnes proches de la frontière, où les campagnes militaires ont été menées contre les groupes armés. Le gouvernement déclare qu'il n'est pas vrai que les porteurs employés ont été traités brutalement et inhumainement par les forces armées du Myanmar. Le recrutement de ces porteurs a été basé sur certains critères exigeant qu'il s'agisse d'une main-d'oeuvre occasionnelle au chômage, qu'ils soient physiquement aptes au travail en tant que porteurs et qu'un salaire raisonnable soit fixé et agréé avant le recrutement. De même, ces porteurs n'ont jamais été appelés à accompagner les troupes sur le champ de bataille, ni exposés à des dangers. Dans l'éventualité malheureuse de la perte d'un membre sans rapport avec un conflit armé, eux-mêmes ou leurs familles ont été équitablement compensés en conformité avec la loi en vigueur. Les autorités ont souhaité souligner qu'à aucun moment il n'y a eu de recrutement de femmes, d'enfants ou de personnes âgées en tant que porteurs.
  212. 113. Le gouvernement déclare également que les hommes de la Tatmadaw (l'armée du Myanmar) sont régis par un code de conduite militaire très strict, sont hautement disciplinés et n'ont pas recours à des actions onéreuses ou oppressives contre le peuple. Toute aberration isolée est sévèrement punie par une cour martiale. Enfin, le gouvernement affirme que le recours aux porteurs a considérablement diminué du fait qu'il y a moins d'opérations militaires contre les groupes armés, dont la plupart sont revenus dans la légalité et prennent part au développement économique et social du pays. A cet égard, le gouvernement se réfère également aux extraits de la conférence de presse donnée par les envoyés présidentiels des Etats-Unis, l'Ambassadeur M. William Brown et le fonctionnaire supérieur du Conseil national de sécurité de la Maison blanche, M. Stanley Roth, le 15 juin 1996, au Club des correspondants étrangers de la Thaïlande, qui sont annexés à ses observations sous la sous-annexe I.
  213. ii) Construction de projets de développement et d'infrastructures par le gouvernement
  214. 114. Au nombre des projets de développement et d'infrastructure entrepris par le gouvernement, on compte la construction du chemin de fer Aungban-Loikaw, du chemin de fer Ye-Dawei (Tavoy), l'agrandissement du champ d'aviation de Pathein, la construction de digues et berges, etc. Pour tous ces projets ainsi que d'autres non mentionnés, le gouvernement affirme qu'aucun travail forcé n'a été impliqué. L'utilisation de main-d'oeuvre s'est faite sur une base purement volontaire et les travailleurs ont été rémunérés équitablement. Il n'y a eu aucune coercition dans le recrutement, qui s'est effectué selon les procédures de recrutement local des bureaux d'emploi établies par le Département du travail. Il y a en tout 78 bureaux d'emploi au niveau des municipalités dans tout le pays, qui fonctionnent en application de la loi sur l'emploi et la formation et de la loi sur la restriction de l'emploi. En vue d'étayer les faits ci-dessus, le gouvernement déclare qu'il avait envoyé des équipes d'enquêteurs dans les régions respectives pour vérifier que le recrutement de la main-d'oeuvre s'était effectué conformément à la procédure. Des déclarations détaillées et des photographies de quelques personnes locales interviewées sont annexées aux observations du gouvernement sous les sous-annexes (confidentielles) IIa-IIg.
  215. 115. Le gouvernement déclare qu'il avait pris des mesures concrètes concernant l'utilisation de main-d'oeuvre civile dans des projets d'infrastructures et de développement. Une démarche supplémentaire et sans précédent a été prise en utilisant des membres de la Tatmadaw dans ces projets. Il ne devrait plus y avoir de recrutement et de déploiement de populations locales dans aucun projet de développement. Des hommes de la Tatmadaw participent maintenant à ces travaux pour servir les intérêts et le bien-être général du peuple à côté de leur responsabilité première de défendre le pays. Un exemple concret est la participation récente d'hommes de la Tatmadaw à la construction de voies ferrées et à d'autres travaux publics dans les divisions de Mandalay, Magway et Tanintharyi. Des photographies d'hommes de la Tatmadaw sur les chantiers respectifs sont annexées aux observations du gouvernement sous la sous-annexe III. Le gouvernement a aussi signalé à ce propos que quelques prisonniers condamnés pour crimes de droit commun, tels que meurtres, viols, etc., sont parfois employés dans la construction des routes.
  216. iii) Industrie hôtelière au Myanmar
  217. 116. Le gouvernement déclare qu'à son invitation des investisseurs étrangers ont construit des hôtels à Yangon, Mandalay, Bagan, etc. selon un système connu sous le sigle BOT (Bâtir, opérer et transférer). Ces sociétés étrangères, qui sont propriétaires à 100 pour cent de leur investissement, ont utilisé leurs propres contractants qui, à leur tour, ont nommé des sous-traitants locaux. Ce sont ces sous-traitants locaux qui ont recruté des travailleurs locaux qualifiés, semi-qualifiés ou manoeuvres non qualifiés. La compétition pour obtenir de la main-d'oeuvre locale est très vive, et des incitations sous forme de salaires élevés ont été offertes par ces entreprises étrangères. Dans ces circonstances, la question de travail forcé ne s'est pas posée. En outre, les procédures et le droit du travail du pays veillent à ce que des salaires équitables et des conditions de travail correctes soient respectés par les entreprises. Dans la plupart des cas, ces sous-traitants sont passés par les bureaux d'emploi gérés par le Département du travail. Bien que ce soit le ministère de l'Hôtellerie et du Tourisme qui soit responsable de promouvoir la construction d'hôtels au Myanmar, le ministère n'a joué aucun rôle dans l'emploi des travailleurs du bâtiment.
  218. 117. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles le travail forcé aurait été utilisé pour la construction de "baraquements", le gouvernement déclare que des logements pour des unités de gardes frontière dans l'Etat Rakhine ont été construits par des entreprises du bâtiment privées employant de la main-d'oeuvre rémunérée volontaire. A cet égard, le gouvernement se réfère à deux "accords contractuels" conclus entre les fonctionnaires responsables de l'unité de gardes frontière et des entreprises de construction locales, qui sont joints en tant que sous-annexes IVa et IVb à ses observations.
  219. b) Bénéfice privé ou secteur privé
  220. i) Construction du gazoduc de Yadana
  221. 118. En ce qui concerne les allégations selon lesquelles du travail forcé était utilisé pour la construction de projets pour la mise en exploitation de gisements de pétrole et de gaz, en particulier le projet de gazoduc de Yadana, opération entreprise en association entre la compagnie pétrolière des Etats-Unis d'Amérique UNOCAL, la compagnie pétrolière française TOTAL et les entreprises de pétrole et du gaz du Myanmar MOGE, le gouvernement déclare que ces allégations sont totalement infondées. Le gouvernement cite les déclarations faites à ce propos par M. Roger Beach, président directeur général de UNOCAL, et par M. John Imle, président de UNOCAL, lors d'interviews télévisées conduites par CNN, interviews dont les textes sont joints en tant qu'annexes V et VI aux observations du gouvernement. En outre, les autorités du Myanmar ont mené des enquêtes sur le terrain dans quelques-unes des régions décrites dans les moyens de preuve supplémentaires. Des déclarations de quelques travailleurs sur les chantiers du chemin de fer Ye-Dawei et de quelques employés du projet du gazoduc de Yadanar sont annexées aux observations du gouvernement aux sous-annexes (confidentielles) VIIa et b, et VIIf.
  222. c) La loi
  223. 119. Le gouvernement indique qu'en vue d'adapter la loi de 1907 sur les villes et la loi de 1908 sur les villages aux changements actuels positifs dans le pays, les autorités concernées ont entrepris une action concernant l'entière législation nationale du Myanmar qui comprend un total de plus de 900 lois. Ces lois ont été réexaminées et reformulées, y compris la loi sur les villes et la loi sur les villages qui avaient été adoptées quand le Myanmar se trouvait sous régime colonial. Le gouvernement déclare que les nouvelles lois seront en harmonie avec les nouveaux systèmes des pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires, qui seront mis en place sous une nouvelle Constitution de l'Etat. La convention nationale qui est chargée de formuler les principes de base qui devront être consacrés dans cette nouvelle Constitution a déjà adopté 104 principes de base. Parmi ces principes figure celui-ci: "L'Etat doit adopter les lois nécessaires pour protéger les droits des travailleurs." Les autorités sont vivement conscientes des critiques faites par certains délégués à la Conférence au sujet des pouvoirs accordés par la loi sur les villes et sur la loi sur les villages. En conséquence, dans la version reformulée, qui est en cours de préparation, les dispositions qui ont attiré tant d'attention de la part des délégués ont été supprimées.
  224. d) Conclusion
  225. 120. En conclusion, le gouvernement indique que les autorités du Myanmar sont conscientes des critiques formulées par certains délégués travailleurs concernant le recours au travail forcé au Myanmar pour des projets de développement national, critiques dont une part considérable est malheureusement fondée sur des allégations partiales et spécieuses faites par des émigrés vivant hors du Myanmar qui souhaitent dénigrer les autorités du Myanmar à des fins qui leur sont propres. Les autorités du Myanmar ont fait un effort pour répondre en toute sincérité aux questions qui leur avaient été adressées.
  226. 8. Antécédents
  227. A. Rapports et déclarations antérieurs du gouvernement de Birmanie/Myanmar sur l'application de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, commentaires et réclamation d'organisations professionnelles et observations, conclusions et demandes des organes de contrôle de l'OIT
  228. 1) Rapports au titre de l'article 22 de la Constitution de l'OIT et déclarations à la Conférence internationale du Travail (CIT) présentées par le gouvernement de 1960 à 1992, et commentaires correspondants
  229. 121. Dans son premier rapport, reçu le 21 mai 1960, sur les mesures prises pour donner effet aux dispositions de la convention sur le travail forcé, dont la ratification a été enregistrée le 4 mars 1955, le gouvernement de l'Union de Birmanie avait indiqué au titre de l'article 1 de la convention que: "Etant donné que le travail forcé n'existe pas dans le pays, aucun recours au travail forcé ou obligatoire, sous quelque forme que ce soit, n'est autorisé dans ce pays (Note 81)." Ayant indiqué, à propos des articles 6 à 17 de la convention, que, vu la non-existence dans le pays de travail forcé (et de chefs du genre envisagé aux articles 7 et 10), la question du respect des obligations prévues par ces articles ne se posait pas, le gouvernement avait signalé à propos de l'article 18 que "les fonctionnaires de l'administration de ce pays, lorsqu'ils se trouvent en tournée officielle dans les zones rurales, utilisent les services de porteurs, bateliers, conducteurs de chars à boeufs, etc. Mais ces personnes ne sont pas employées au sens du travail forcé ou obligatoire tel qu'envisagé par cette convention." Enfin, en ce qui concerne l'article 25 de la convention, le gouvernement s'était référé à l'article 374 du Code pénal selon lequel "quiconque oblige illégalement une personne à travailler contre son gré sera puni d'une peine d'emprisonnement normal ou rigoureux, pour une année au plus, d'une amende ou de ces deux peines à la fois".
  230. 122. Dans une demande adressée au gouvernement en 1964 et réitérée en 1966 et 1967, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations s'est référée à l'article 11 (d) de la loi sur les villages selon lequel les personnes résidant dans un arrondissement rural sont tenues sur réquisition du chef de l'arrondissement, ou d'un policier rural, de l'aider pour l'exécution de ses devoirs définis aux articles 7 et 8 de la loi. Ces devoirs consistent, entre autres choses, dans l'obligation "de rassembler et fournir... des guides, des messagers, des porteurs, des approvisionnements en nourriture, des voitures et moyens de transport pour les troupes ou forces de police qui sont postées dans l'arrondissement rural ou à proximité, ou le traversent, ainsi que pour tout agent du gouvernement en déplacement officiel". La commission avait noté que des dispositions correspondantes concernant les personnes résidant dans les villes figurent à l'article 9 de la loi sur les villes (Note 82). Elle a demandé au gouvernement d'indiquer si ces dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes étaient toujours en vigueur, et dans ce cas quelles mesures le gouvernement envisageait de prendre pour que cette législation soit mise en conformité avec la convention.
  231. 123. Dans sa réponse reçue le 15 juin 1967, le gouvernement indiqua que "bien que les dispositions en question sur la loi sur les villages et sur la loi sur les villes, qui avaient été adoptées pendant le régime colonial, soient toujours en vigueur, les autorités concernées n'exercent plus le pouvoir qui leur avait été ainsi accordé. Et ces lois et règlements qui ne satisfont pas les normes et les besoins du nouvel ordre social du pays devront cesser d'exister. De nouvelles lois appropriées seront adoptées prochainement à leur place." En réponse à de nouvelles demandes formulées par la commission d'experts en vue d'obtenir des informations sur les mesures prises, le gouvernement répéta, dans un rapport reçu le 7 juin 1973, que "la loi sur les villages et la loi sur les villes ont été élaborées alors que la Birmanie était sous domination étrangère; il n'est pas fait recours à l'article 11 (d) de la loi sur les villages et à l'article 9 de la loi sur les villes bien que ces articles n'aient pas été abrogés officiellement".
  232. 124. Dans son rapport reçu le 19 février 1974, le gouvernement déclara de nouveau que les dispositions de la loi sur les villes et de la loi sur les villages étaient en cours de révision, en même temps que d'autres lois, en vue d'être rendues conformes à la nouvelle Constitution qui garantissait la liberté et le droit au travail.
  233. 125. En réponse à de nouveaux rappels de la commission d'experts, le gouvernement indiqua en 1978 qu'"Une nouvelle loi destinée à remplacer la loi sur les villages et la loi sur les villes est en cours de rédaction par les autorités concernées. Le texte de cette nouvelle loi sera transmis à la commission d'experts dès qu'elle sera adoptée."
  234. 126. En 1982, le gouvernement déclara qu'une nouvelle commission législative avait été constituée et que "de nouveaux projets de lois portant révision des anciennes (qui autorisaient les chefs de village et la police rurale à obliger les résidents de la classe des travailleurs à servir comme porteurs...) seraient prochainement examinés par la commission et soumis au Pyithu-Hluttaw (l'Assemblée du Peuple) afin de mettre la législation en conformité avec la convention".
  235. 127. En 1983, le gouvernement déclara de nouveau que "les dispositions de la loi sur les villes et sur les villages, qui autorisent les chefs et la police rurale à obliger les résidents de la classe des travailleurs à servir comme porteurs..., qui sont des héritages du régime colonial britannique, sont tombées en désuétude et ne sont plus appliquées". Dans la même réponse (reçue le 13 octobre 1983), le gouvernement ajouta qu'avec la promulgation de la loi de 1974 sur le Conseil du peuple le pouvoir administratif précédemment conféré au seul chef était confié à un groupe de représentants du peuple qui gérait collectivement les affaires du village et que, "parmi les obligations et fonctions des conseillers du peuple des arrondissements urbains et ruraux, telles que prescrites par la loi de 1974 relative au Conseil du peuple et par la législation ultérieure fixant les obligations et fonctions des conseils du peuple aux différents niveaux et celles des comités exécutifs de différents niveaux (1977), il n'y a rien qui prévoit l'imposition du portage aux résidents de la classe des travailleurs".
  236. 128. Dans son rapport reçu le 21 octobre 1985, le gouvernement répéta que la loi de 1974 relative au Conseil du peuple ne contenait aucune disposition autorisant les conseils du peuple aux différents niveaux à avoir recours au travail forcé ou obligatoire, et que "tout progrès significatif vers l'abrogation des dispositions incompatibles avec la convention sera immédiatement communiqué".
  237. 129. Dans une "réponse globale" annexée au rapport du gouvernement reçu le 16 novembre 1989, le gouvernement déclara que:
  238. ... la structure politique, sociale, économique et administrative de l'Union du Myanmar a profondément changé depuis le 18 septembre 1988. Le Myanmar évolue maintenant vers un système de démocratie à pluralisme de partis qui devrait remplacer la structure politique à parti unique. En conséquence, le système économique socialiste a été remplacé récemment par une nouvelle politique économique d'ouverture ainsi que par d'autres changements dans sa structure économique et sociale.
  239. Le gouvernement actuel s'efforce d'améliorer la qualité de la vie du peuple, notamment des travailleurs de tous les secteurs de l'économie. La législation du travail en vigueur fait de nouveau l'objet d'une révision afin d'être mise en conformité avec l'évolution de la situation. Le gouvernement a reconstitué en juillet 1989 le Comité de révision de la législation du travail. Ce faisant, tout point saillant relevé par la commission d'experts sera pris sérieusement en considération au cours de la procédure d'examen des lois du travail en vigueur.
  240. 130. Dans une observation formulée en 1991 sur l'application de la convention au Myanmar, la commission d'experts a pris note de commentaires du 17 janvier 1991 de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) sur l'application de la convention, ainsi que des informations contenues dans les documents annexés. Dans ses commentaires, la CISL indiqua que la pratique du portage obligatoire était largement répandue dans le pays et touchait des milliers et milliers de travailleurs: la majorité des porteurs utilisés par l'armée étaient recrutés par la force et durement exploités; rarement payés, s'ils l'étaient jamais; insuffisamment nourris et soignés; obligés à porter des charges excessives et exposés à des privations et à des dangers concrets. Selon les documents, il n'existait aucun règlement ou contrôle officiel des conditions de travail des porteurs, qui étaient déterminées en pratique à la discrétion des commandants militaires locaux. En conséquence, nombreux étaient les porteurs qui mouraient ou étaient tués pendant le travail forcé; certains étaient utilisés comme boucliers humains pendant les actions militaires, d'autres abattus quand ils cherchaient à s'enfuir, ou encore tués ou abandonnés lorsque, à la suite de malnutrition et d'épuisement, ils n'étaient plus capables de porter leur charge. La volumineuse documentation soumise par la CISL contenait des indications détaillées et précises à l'appui de ces allégations. La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement fournirait des commentaires détaillés sur ces allégations ainsi que des données complètes sur toutes mesures adoptées ou envisagées pour assurer le respect de la convention.
  241. 131. En l'absence d'un rapport reçu du gouvernement, la commission a réitéré son observation en 1992. A la CIT de juin 1992, le gouvernement a soumis les informations suivantes:
  242. Se référant aux commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), relatifs à la pratique du portage obligatoire, le gouvernement souhaite indiquer qu'il est exact que les forces armées sont amenées à employer des porteurs pour le transport d'équipements et d'objets à travers des terrains accidentés dans les jungles et les montagnes reculées proches de la frontière où sont menées les campagnes contre l'insurrection armée. Dans les endroits inaccessibles en voiture, ou autres véhicules à moteur, l'armée du Myanmar doit recourir à des porteurs pour le transport de fournitures et d'équipements. Toutefois, il n'est pas exact que les porteurs soient traités durement et de façon inhumaine par les forces armées du Myanmar. Toutes ces allégations sur le traitement des porteurs par les forces armées sont inexactes. Elles émanent principalement de sources extérieures motivées par des arrière-pensées politiques.
  243. En réalité, il existe des porteurs bénévoles et des porteurs professionnels qui proposent de travailler comme porteurs pour le compte de tiers afin de gagner leur vie. Les porteurs sont recrutés et employés par les forces armées après consultation des autorités locales, selon la pratique utilisée depuis que le Myanmar a recouvré son indépendance en 1948. Le recrutement et leur emploi sont conformes à l'article 8, paragraphe 1 (n), de la loi de 1908 sur les villages, et à l'article 7, paragraphe 1 (m), de la loi de 1907 sur les villes. Le recrutement est fondé sur les trois critères suivants:
  244. a) ils doivent être au chômage;
  245. b) ils doivent être physiquement aptes au travail de porteur;
  246. c) un salaire d'un montant raisonnable doit être fixé et agréé au préalable.
  247. Il n'est jamais exigé des porteurs ainsi recrutés qu'ils accompagnent les troupes sur le lieu proprement dit des affrontements; ils ne sont pas non plus exposés au danger. Ils sont renvoyés dès que leur tâche est terminée. Ils sont payés de façon équitable et, dans l'éventualité improbable où ils perdraient la vie ou un membre pour des raisons indépendantes d'un quelconque conflit armé, ils seraient indemnisés, eux-mêmes ou leurs familles, conformément à la loi de 1925 sur l'indemnisation des accidents du travail. Ils ont droit aux soins médicaux au même titre que les soldats en vertu de la loi sur les forces armées. Ils sont placés dans des endroits sûrs au cours des opérations.
  248. 132. En outre, un représentant gouvernemental du Myanmar à la CIT de juin 1992, se référant aux informations écrites fournies par son gouvernement, a souligné que dans son pays il n'y avait pas de coercition en ce qui concerne l'emploi des travailleurs. Des lois complètes et détaillées empêchaient le recours au travail forcé. En réponse aux allégations faites contre son gouvernement assimilant l'utilisation de porteurs par les forces armées du Myanmar au travail forcé, il a souligné que l'utilisation des porteurs différait du recours au travail forcé. Il a déclaré que, même si l'emploi de porteurs par les forces armées était considéré comme du travail forcé, ces porteurs avaient cessé d'être employés par les militaires étant donné que le gouvernement avait cessé de mener des campagnes militaires. Le gouvernement souhaitait établir l'unité nationale et la paix et éliminer toute différence par discussion amiable plutôt que par la lutte entre les différentes ethnies du pays.
  249. 133. Se référant à la question du portage obligatoire, la commission d'experts, dans une observation faite en 1993, a noté qu'une réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT avait été déclarée recevable par le Conseil d'administration et soumise à un comité constitué pour l'examiner. En conséquence, la commission d'experts suspendait l'examen de cette question.
  250. 134. Pour ce qui est du travail forcé autre que le portage, la commission d'experts a noté dans son observation de 1993 que dans son rapport soumis à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, à sa quarante-neuvième session, en février-mars 1993 (document des Nations Unies AGNU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993), le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar s'était référé aux témoignages de personnes prises comme main-d'oeuvre pour construire des voies ferrées (chemin de fer de Aungban-Loikaw) et des routes, ou pour défricher la jungle au profit de l'armée, que des centaines de personnes avaient été tuées par des militaires lorsque, comme pour les porteurs, elles ne pouvaient plus transporter de charges et continuer à travailler de force. D'après les informations recueillies, il s'agissait de deux grands projets de voies ferrées, d'autres projets gouvernementaux de développement de la zone frontalière, notamment le long de la frontière entre la Thaïlande et le Myanmar, et de travaux pour l'armée, en particulier dans les zones de conflits des régions Karen, Karenni, Shan et Mon. Il a été signalé que les travailleurs mouraient fréquemment des suites de passages à tabac constants, des mauvaises conditions d'hygiène, du manque de nourriture et de l'absence de soins médicaux lorsqu'ils tombaient malades ou lorsqu'ils étaient blessés et qu'ils ne pouvaient continuer à travailler. Des témoins ont aussi signalé que certains de leurs amis ou de leurs parents, de retour d'un travail dans les projets de développement à la frontière, étaient morts ensuite des conséquences des blessures et des maladies contractées durant leur travail. La commission a prié le gouvernement de formuler ses observations au sujet des témoignages détaillés dont faisait état le Rapporteur spécial des Nations Unies.
  251. 2) Réclamation de 1993 présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT
  252. a) Allégations présentées par l'organisation plaignante
  253. 135. Par une communication du 25 janvier 1993, la CISL a présenté une réclamation en vertu de l'article 24 (Note 83) de la Constitution de l'OIT alléguant que le gouvernement du Myanmar avait enfreint la convention sur le travail forcé en institutionnalisant le recours des commandants militaires au travail forcé par le recrutement forcé et l'exploitation des porteurs. Selon l'organisation plaignante, des femmes et des enfants, aussi bien que des hommes, sont pris au hasard dans des rafles organisées par la police locale ou l'armée dans les lieux publics, comme les gares ou les cinémas, ainsi que dans les maisons d'habitation et sur les lieux de travail. Souvent, les chefs des villages sont appelés à fournir un contingent de porteurs, à moins de verser à l'armée une forte somme en lieu et place. Il est demandé aux porteurs de transporter une lourde charge de munitions, de nourriture, ou autres fournitures entre les camps militaires, généralement dans des zones montagneuses escarpées et inaccessibles aux véhicules. Ils doivent fréquemment construire les camps pour l'armée à leur arrivée. Ils ne sont pas rémunérés pour leur travail et il ne leur est accordé que très peu de nourriture, d'eau et de repos. Dans bien des cas, ils sont attachés pour la nuit par groupe de 50 à 200. Ils ne reçoivent pas de soins médicaux. Ils sont exposés au feu de l'ennemi, et les soldats qu'ils servent leur font subir de mauvais traitements. Ils sont régulièrement battus par les soldats, et de nombreuses femmes sont violées de manière répétée. Alors qu'ils sont désarmés, on les place en tête de colonne pour faire sauter les mines et les pièges ainsi que pour déclencher des embuscades. Selon des sources fiables, nombre de ces porteurs meurent des suites des mauvais traitements, de la malnutrition, de la déshydratation ou des explosions de mines. Si la majorité des cas de portage relève de l'armée du Myanmar, la CISL mentionne aussi des allégations de diplomates, rejetées par les chefs des minorités ethniques, selon lesquelles les rebelles forcent eux aussi les villageois à faire du portage. La CISL mentionne des informations précises sur des cas de portage obligatoire qui ont été réunies par différentes organisations humanitaires réputées, qui ont mené des missions d'enquête dans les zones frontières du Myanmar. Des extraits de déclarations faites par les victimes alléguées sont inclus dans la réclamation.
  254. 136. En outre, la CISL propose des conclusions concernant la non-applicabilité des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention et de la clause transitoire de l'article 1, paragraphe 2, ainsi que la violation des articles 1, paragraphe 1, et 25, de même que de plusieurs des conditions spécifiées dans la convention (en particulier aux articles 8 à 16, 18, 23 et 24) pour la période "transitoire" (Note 84).
  255. 137. A sa 255e session (mars 1993), le Conseil d'administration a décidé que la réclamation présentée par la CISL était recevable, et il a créé un comité pour l'examiner.
  256. b) Observations du gouvernement sur les faits
  257. 138. Dans une déclaration écrite, communiquée en mai 1993 au comité créé par le Conseil d'administration pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, le gouvernement a indiqué que les allégations portées dans certains milieux, selon lesquelles les autorités du Myanmar employaient de la main-d'oeuvre forcée pour la construction de chemins de fer, de routes et de ponts, sont fausses et se fondent sur de fausses preuves fabriquées par des personnes qui veulent porter atteinte à l'image des autorités du Myanmar et ne comprennent pas les traditions et la culture de son peuple. Au Myanmar, la contribution volontaire de la main-d'oeuvre à la construction des sanctuaires, temples, routes et ponts, ainsi qu'au dégagement des sentiers est une tradition qui remonte à des millénaires. Selon une croyance répandue, cette contribution volontaire est un acte noble dont le mérite est source de bien-être personnel et de force spirituelle. Dans les villages et dans les zones frontalières, les membres de la Tatmadaw et les populations locales ont participé volontairement à la construction de routes et de ponts au cours des quatre dernières années. L'on ne fait pas appel à la coercition. Dans l'histoire du Myanmar, il n'y a jamais eu d'esclavage. Depuis l'époque des rois du Myanmar, de nombreux barrages, travaux d'irrigation, lacs et entreprises similaires ont été construits avec l'aide de tous les gens de la région. Ceux qui accusent les autorités du Myanmar de recourir au travail forcé révèlent donc une ignorance patente des traditions et de la culture du pays.
  258. 139. En ce qui concerne les allégations de recrutement forcé et d'exploitation des porteurs, le gouvernement, dans la même déclaration de mai 1993, a répété les indications données à la CIT en juin 1992 (Note 85). Le gouvernement a ajouté qu'il existe en fait des porteurs volontaires et des porteurs professionnels qui proposent de travailler pour le compte de tiers afin de gagner leur vie. Ainsi, seuls ceux qui ne connaissent pas la situation réelle peuvent prendre au sérieux les calomnies scandaleuses proférées à l'égard des forces armées du Myanmar. Le gouvernement a conclu que les allégations relatives aux mauvais traitements qui seraient infligés aux porteurs sont totalement infondées. Ces allégations sont d'autant moins défendables que l'on connaît le haut niveau de professionnalisme et de discipline des forces armées du Myanmar (Note 86).
  259. 140. Dans une déclaration complémentaire détaillée communiquée à ce même comité en octobre 1993, le gouvernement a indiqué que la réputation et la crédibilité des personnes qui ont mené les deux missions d'enquête de la CISL ne sauraient être mises en doute. Il a fait cependant remarquer que le travail de ces missions était mené unilatéralement dans les zones frontalières du Myanmar et de la Thaïlande sans que le gouvernement du Myanmar en soit informé. Le gouvernement a ajouté que ces zones servent de refuge aux groupes terroristes qui vivent de la contrebande et du trafic de drogue. Ces groupes terroristes se livrent en permanence à des activités atroces contre le gouvernement du Myanmar sur la base de mauvais mobiles politiques. Les personnes interrogées dans ces zones sont soumises à l'influence et à la contrainte des terroristes et fourniront donc immanquablement aux missions d'enquête des informations fausses et inventées. Le gouvernement s'est efforcé de retrouver les personnes citées dans les déclarations des missions d'enquête de la CISL. Mais les personnes dont on dit qu'elles ont été interrogées par ces missions n'ont pas pu être identifiées du fait que le nom de leurs parents, le numéro de la carte d'identité et leur adresse permanente n'étaient pas mentionnés. Selon les règles de l'état civil du Myanmar, le nom d'une personne n'indique pas son nom de famille. Le gouvernement en conclut que, l'existence de ces personnes n'ayant pu être établie, les allégations doivent être considérées comme infondées (Note 87).
  260. 141. Dans la même déclaration complémentaire d'octobre 1993, le gouvernement a indiqué que trois équipes indépendantes d'observateurs avaient été formées, constituées de membres de comités de surveillance des travailleurs de la circonscription et de notabilités locales. Ces équipes se sont rendues en août 1993 dans les zones mentionnées par les missions d'enquête situées dans l'Etat Mon, l'Etat Kayin et la division de Bago, où elles se sont entretenues avec les autorités administratives locales et les villageois afin de connaître les faits exacts. Les entretiens qui ont eu lieu avec les autorités administratives locales (conseils de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public et conseils des arrondissements urbains et ruraux pour le rétablissement de l'ordre public) ont permis d'établir que le recrutement local de porteurs n'a lieu qu'en cas de nécessité urgente et n'est pas une pratique fréquente. Aussi, la participation au service de portage est-elle volontaire. La sélection et le recrutement se font parmi ceux qui sont disposés à travailler comme porteurs. L'opération se fait habituellement de manière systématique, et les porteurs sont envoyés à l'utilisateur final avec les formulaires et documents prescrits. Une fois leur tâche achevée, ils sont tenus de se présenter de retour aux autorités locales selon les règles. Il n'a jamais été entendu dire qu'une femme ait travaillé comme porteur. Dans diverses régions du pays, de nombreux travailleurs gagnent leur vie en exerçant des tâches occasionnelles. Ces travailleurs sont disposés à effectuer tout type de travail manuel susceptible de leur fournir un revenu satisfaisant. Telle est la raison essentielle pour laquelle ils travaillent volontiers comme porteurs lorsque l'occasion se présente (Note 88).
  261. 142. Le gouvernement a ajouté que, comme les personnes citées dans les déclarations des missions d'enquête de la CISL ne pouvaient être retrouvées, même avec l'aide des autorités urbaines et rurales, les équipes d'observateurs ont décidé d'interroger des villageois qui avaient cherché à travailler volontairement comme porteurs pour gagner leur vie. Les réponses reçues contredisent les déclarations des missions d'enquête de la CISL. Selon elles, les porteurs ne sont tenus de transporter la nourriture et les fournitures que dans des limites acceptables et ne sont jamais surchargés. Ils sont bien traités et on leur fournit quatre produits de première nécessité: riz, huile de cuisine, haricots et sel. On leur permet de se reposer et on leur donne assez de temps pour dormir. Ils ont toujours des relations cordiales et amicales avec les soldats. Le fait qu'ils soient disposés à effectuer de nouveau ce travail montre à l'évidence qu'il n'y a aucun incident de mauvais traitements des porteurs de la part des soldats (Note 89).
  262. 143. Le gouvernement a encore ajouté que les opérations militaires sont suspendues depuis le 1er avril 1992 et que l'on ne recourt plus que rarement au portage. Cependant, lorsque les terroristes profitent de cette accalmie, les opérations de défense doivent reprendre pour garantir la sécurité et le bien-être de la communauté. Dans de telles circonstances de nécessité urgente et éminente, il est inévitable de recourir au portage. Mais il est rare que le service de portage dure plus de trente jours, et les porteurs ne doivent servir que sur une distance limitée, au bout de laquelle ils doivent transmettre leur charge à un autre groupe de porteurs qui transporteront la nourriture et le matériel en un point donné, où l'on considère que leur mission est achevée. Il convenait de mentionner en outre que le personnel des forces armées porte également une partie des charges. Les professeurs d'école, les élèves et en général les fonctionnaires de l'administration sont exemptés et n'ont jamais été utilisés comme porteurs dans la division de Bago. La traduction des déclarations faites par les intéressés figurait en annexe avec des photographies (Note 90). Enfin, le gouvernement a souligné que, par ailleurs, les porteurs ne doivent servir que pendant un certain temps et pour une tâche précise qui leur rapporte cependant un revenu considérable leur permettant de faire vivre leurs familles. Les porteurs ne sont jamais exposés à un danger quelconque. Avec les provisions, ils sont placés en lieu sûr durant les opérations contre les ennemis. Il y a toutefois eu de très rares cas où les porteurs ont été victimes d'accidents non directement liés aux opérations militaires. En cas d'accident ou de maladie, ils bénéficient des mêmes soins médicaux de première urgence que les soldats. Si jamais il y a des cas d'accidents ou de maladies graves, l'intéressé est transporté immédiatement à l'hôpital le plus proche par tous les moyens disponibles. Dans de tels cas, ainsi qu'en cas de décès, les porteurs et les personnes qui sont à leur charge ont droit à une indemnité conforme aux dispositions de la loi de 1923 sur l'indemnisation des travailleurs, qui est toujours en vigueur. Les porteurs sont des hommes célibataires ou mariés, qui sont suffisamment forts et bien portants pour effectuer un travail manuel et physique. On n'emploie jamais de femmes pour ce travail (Note 91).
  263. c) Observations du gouvernement concernant la convention (Note 92)
  264. 144. En réponse aux violations alléguées de la convention no 29, le gouvernement a indiqué, au sujet des articles 1 et 2 de la convention, que l'expression "travail forcé" ne s'applique pas au Myanmar du fait que le travail volontaire, consacré aux efforts du développement communautaire, ne représente pas nécessairement du "travail forcé". Le gouvernement n'a pas omis de supprimer le travail forcé, comme il est allégué, puisqu'il n'y a aucune pratique de ce genre au Myanmar. Lorsqu'on examine si un pays Membre respecte les dispositions de la convention, il est impératif de tenir compte de l'héritage culturel de ce pays. C'est ainsi que l'âme de la convention résistera au temps.
  265. 145. Se référant aux conditions et garanties énoncées aux articles 8 à 16, 18, 23 et 24 de la convention, ainsi qu'à l'article 25, le gouvernement a ajouté que:
  266. -- le recours au travail volontaire, dont on allègue qu'il s'agit de travail obligatoire ou forcé, est limité aux cas de nécessité urgente, conformément aux dispositions suivantes: a) article 8(1)(g)(n) et (o) de la loi de 1908 sur les villages; b) article 9(b) de la loi sur les villes. Selon ces dispositions, seules les plus hautes autorités civiles locales sont habilitées à recruter les travailleurs volontaires dont on a besoin, sous quelque forme que ce soit. Ce recrutement vise uniquement l'intérêt de la communauté elle-même et se fait sous le contrôle des autorités locales compétentes. L'on ne peut donc en pratique éloigner les travailleurs du lieu de leur résidence habituelle;
  267. -- les modalités du travail volontaire pratiqué au Myanmar, dont on allègue qu'il s'agit de travail forcé, satisfont aux conditions énoncées à l'article 9;
  268. -- il n'existe pas de "travail forcé ou obligatoire" imposé en tant qu'impôt. Par ailleurs, les allégations qui ont été faites ne s'appliquent à aucun cas lié aux dispositions de l'article 10;
  269. -- en ce qui concerne l'article 11, seuls les adultes physiquement aptes sont autorisés à contribuer volontairement par leur travail aux programmes de développement communautaire. Le travail forcé n'existe sous aucune forme dans le pays. Même pour les porteurs, le recrutement ne se fait qu'en cas de besoin urgent imprévu. Mais ce recrutement a toujours lieu à titre parfaitement volontaire. Les porteurs ne sont donc pas enrôlés. Au contraire, ils offrent leurs services de leur plein gré pour gagner leur vie. Par ailleurs, ils bénéficient d'une nourriture et de soins médicaux suffisants durant leur service et ils sont tous couverts par la loi de 1923 sur l'indemnisation des travailleurs (l'instrument international de référence étant la convention no 17);
  270. -- la contribution sous forme de travail volontaire susmentionnée ne dépasse jamais soixante jours. Si la tâche n'est pas achevée dans ce délai, d'autres volontaires assureront la relève. Ceux qui exercent les fonctions de porteur plus d'une fois ne sont acceptés qu'à titre strictement volontaire;
  271. -- dans les projets de développement communautaire et les travaux publics, les personnes qui offrent leur travail sont rémunérées à la pièce, si bien qu'elles sont libres de se reposer pendant les heures de travail;
  272. -- les travailleurs volontaires et les porteurs sont rémunérés aux taux gouvernementaux en vigueur;
  273. -- la loi de 1923 sur l'indemnisation des travailleurs et les autres dispositions législatives et réglementaires en la matière s'appliquent aussi bien aux travailleurs volontaires qu'aux porteurs;
  274. -- selon la pratique en vigueur, l'article 16 n'est pas applicable;
  275. -- on ne peut parler de travail forcé ou obligatoire pour le transport des personnes ou des biens, comme dans le cas du portage ou du pagayage, puisqu'il n'existe pas, et les allégations faites au titre de l'article 18 sont donc infondées;
  276. -- en ce qui concerne les articles 23, 24 et 25, des textes sont en vigueur qui réglementent le recours, sous une forme quelconque, au travail volontaire (dont il est allégué qu'il s'agit de travail forcé ou obligatoire) et les mesures visant à assurer une indemnité en cas d'accident ou de décès. Les travailleurs volontaires sont traités à l'égal des autres travailleurs, selon la législation et la réglementation respectivement applicables.
  277. d) Conclusions et recommandations du comité approuvées par le Conseil d'administration du BIT
  278. 146. Le comité a noté que la question du travail forcé autre que le portage au Myanmar, à laquelle se référait le gouvernement, avait été abordée par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans son observation de 1993 sur l'application de la convention no 29 dans ce pays, mais que la réclamation faite par la CISL en janvier 1993 traitait uniquement du recours au travail forcé par les commandants militaires, par le recrutement forcé et le maltraitement des porteurs. Le comité, créé pour examiner cette réclamation, a donc limité ses conclusions à cette question (Note 93).
  279. 147. Le comité a noté que les témoignages sur le portage donnés par les témoins cités par l'organisation plaignante étaient en contradiction avec d'autres témoignages cités par le gouvernement. Il a noté que le gouvernement avait cherché avec l'aide des autorités des arrondissements urbains et ruraux à trouver les témoins cités par l'organisation plaignante. Il a aussi noté l'allégation du gouvernement selon laquelle ces témoins avaient parlé sous la pression de groupes terroristes. Le comité a noté également l'opinion du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme qui, dans son rapport de février 1993 sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, indiquait qu'"une forte répression s'exerce dans ce pays où règne un climat de peur" (document des Nations Unies AGNU E/CN.4/1993/37, paragr. 241). Par ailleurs, le comité a pris note de la note verbale adressée le 26 février 1993 au Secrétaire général par le représentant permanent auprès du Myanmar auprès de l'Office des Nations Unies à Genève (document des Nations Unies AGNU E/CN.4/1993/105), qui s'oppose à un certain nombre d'indications faites par le Rapporteur spécial. Le comité a souligné que, à la différence d'une commission d'enquête, il n'était pas à même de mener sa propre investigation avec audition directe de témoins. De ce fait, il s'est abstenu d'utiliser les témoignages personnels cités par les deux parties lorsqu'il a évalué le respect de la convention par le gouvernement (Note 94).
  280. 148. La comité a noté l'indication du gouvernement selon laquelle le recrutement de porteurs se fait conformément à l'article 8, paragraphe 1(g) et (o), de la loi de 1908 sur les villages ainsi qu'à l'article 7, paragraphe 1(m), et à l'article 9(b) de la loi sur les villes. Se référant également aux articles 11(d) et 12 de la loi sur les villages et à l'article 9A de la loi sur les villes, le comité a noté que la loi sur les villages et la loi sur les villes prévoient la possibilité d'imposer, sous la menace de peines, du travail et des services, en particulier de portage, aux résidents qui ne se sont pas proposés volontairement; il s'agissait donc bien d'imposer du travail forcé ou obligatoire tel que défini dans l'article 2, paragraphe 1, de la convention. C'est pourquoi la modification ou l'abrogation de ces dispositions avaient été demandées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans les commentaires adressés régulièrement au gouvernement depuis 1964 (Note 95).
  281. 149. Les déclarations présentées par le gouvernement au comité ne contenaient pas d'éléments qui permettent d'aborder la question sous un autre angle. En particulier, tout en soulignant la nécessité "de tenir compte de l'héritage culturel" des Etats Membres dans l'application des articles 1 et 2 de la convention, le gouvernement n'avait pas fourni d'indications qui feraient entrer le portage obligatoire dans le champ d'application de l'une des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention (Note 96).
  282. 150. De même, la période transitoire prévue par l'article 1, paragraphe 2, de la convention et examinée à titre subsidiaire dans la réclamation présentée par l'organisation plaignante n'avait pas été invoquée par le gouvernement; le comité a noté que ceci était conforme à la position que le gouvernement avait adoptée dans les rapports soumis au titre de l'article 22 de la Constitution sur l'application de la convention, dans lesquels il a indiqué déjà depuis 1967 que les autorités n'exercent plus le pouvoir qui leur est conféré par les dispositions en cause de la loi sur les villages et de la loi sur les villes; selon le gouvernement ces lois avaient été adoptées à l'époque coloniale, ne correspondaient pas aux normes et aux nécessités du nouvel ordre social du pays, étaient obsolètes et devaient bientôt être abrogées. Le comité a considéré que cela devrait maintenant être fait (Note 97).
  283. 151. Comme il n'était plus question de période transitoire, il n'y avait pas lieu pour le comité d'examiner la question du portage obligatoire au Myanmar à la lumière des conditions et garanties prévues par les articles 8 à 16, 18, 23 et 24 de la convention pour le recours au travail forcé ou obligatoire pendant la période transitoire.
  284. 152. Aux termes de l'article 25 de la convention, le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire doit être passible de sanctions pénales, et le gouvernement doit s'assurer que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées. Le comité a souligné que l'abrogation formelle du pouvoir de recourir au travail obligatoire en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes devait être suivie dans la politique réelle de poursuites pénales à l'encontre de ceux qui recourent à la coercition. Ce point apparaissait d'autant plus important que l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risquait de marquer encore davantage le recrutement effectif par les responsables locaux ou militaires (Note 98).
  285. 153. A sa 261e session (novembre 1994), le Conseil d'administration du Bureau international du Travail a approuvé le rapport du comité créé pour examiner la réclamation et, en particulier, la conclusion selon laquelle l'imposition de travail et de services, en particulier de portage, en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, est contraire à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ratifiée par le gouvernement du Myanmar en 1955. Suivant les recommandations du comité, le Conseil d'administration a demandé instamment au gouvernement du Myanmar de prendre les mesures nécessaires pour assurer que les textes législatifs en question, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient rendus conformes à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, comme l'avait déjà demandé la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, et pour assurer que l'abrogation formelle du pouvoir de recourir au travail obligatoire soit respectée dans la pratique et que ceux qui font usage de la coercition dans le recrutement de la main-d'oeuvre soient punis. Le Conseil d'administration a demandé au gouvernement du Myanmar d'inclure dans les rapports qu'il soumet au titre de l'article 22 de la Constitution sur l'application de la convention no 29 des informations complètes sur les mesures prises, conformément aux recommandations ci-dessus, de façon à permettre à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de poursuivre l'examen de la question (Note 99).
  286. 3) Développements ultérieurs jusqu'au dépôt de la plainte en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT (juin 1996)
  287. 154. A sa session de février 1995, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a noté qu'aucun rapport n'avait été fourni par le gouvernement au titre de l'article 22 de la Constitution sur l'application de la convention. En ce qui concerne le portage obligatoire, la commission a pris note de la déclaration faite par le gouvernement à la 261e session du Conseil d'administration indiquant que le Myanmar connaissait actuellement une profonde transformation, puisqu'il passait d'un système politique et économique à un autre et que l'une des étapes fondamentales de cette transition était la modification de lois qui ne correspondaient plus aux circonstances et aux situations actuelles. Rappelant que, dans ses rapports sur l'application de la convention, le gouvernement indiquait depuis 1967 que les autorités n'exerçaient plus les pouvoirs qui leur étaient conférés en vertu des dispositions en question de la loi sur les villages et de la loi sur les villes adoptées sous le régime colonial, que cette législation ne satisfaisait plus aux critères et aux besoins du nouvel ordre social instauré et qu'elle était obsolète et serait prochainement abrogée, la commission exprima l'espoir que cela serait fait maintenant et que le gouvernement communiquerait des informations complètes sur les mesures prises en ce qui concerne tant l'abrogation formelle du pouvoir d'imposer un travail obligatoire que les nécessaires interventions complémentaires pour que ceux qui recourent à la coercition lors du recrutement des travailleurs soient strictement punis. Comme le signalait le comité établi par le Conseil d'administration, ce suivi apparaissait d'autant plus important que l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risquait de marquer encore davantage le recrutement effectif par les responsables locaux ou militaires.
  288. 155. Dans la même observation faite en février 1995, la commission d'experts, rappelant sa référence antérieure à des témoignages détaillés concernant l'imposition de travail forcé pour des travaux publics (Note 100), nota que le gouvernement avait abordé ces questions dans sa déclaration écrite présentée en mai 1993 (Note 101) et dans sa déclaration détaillée complémentaire présentée en octobre 1993 au comité créé par le Conseil d'administration pour examiner les questions relatives au respect de la convention no 29.
  289. 156. Dans sa déclaration détaillée complémentaire, le gouvernement précisa que les allégations de recours au travail forcé pour des projets de voies ferrées dans l'Etat méridional de Shan avaient trait à la construction de deux sections, de Aungban à Pinlaung et de Pinlaung à Loikaw. Le but de ce projet était de favoriser et de développer un moyen de transport confortable et rapide dans la région en vue de son développement économique et social. Les travailleurs qui avaient contribué à ce projet étaient tous des volontaires. Le personnel de la Tatmadaw, soit 18 637 personnes, provenant des unités militaires stationnées dans la zone, ainsi que 799 447 travailleurs venant de 33 arrondissements urbains et villages de la circonscription de Aungban et de 46 arrondissements urbains et villages de la circonscription de Pinlaung avaient volontairement offert leur travail. Quinze engins lourds appartenant au Département des travaux publics et de l'irrigation et aux entreprises de bois de construction du Myanmar avaient été utilisés. En outre, des techniciens et de la main-d'oeuvre des chemins de fer du Myanmar (organisme d'Etat) avaient également offert leurs services. En échange du travail volontairement fourni par la population de la région, le gouvernement avait versé une somme globale de 10 millions de kyats (1,6 million de dollars) pour le secteur Aungban-Pinlaung et de 10 millions de kyats également pour le secteur de Pinlaung-Loikaw.
  290. 157. Le gouvernement ajouta que les membres du Corps diplomatique à Yangon, qui avaient visité le chantier en janvier et en mai 1993, avaient été témoins de la contribution purement volontaire de main-d'oeuvre pour la construction de cette voie ferrée. Ils avaient rencontré des personnes qui avaient contribué à ces travaux et aucune réclamation ne leur avait été faite.
  291. 158. Le gouvernement estima, en outre, qu'aux termes de l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, la construction de la voie ferrée pouvait être considérée comme relevant des travaux de villages exécutés par et pour les membres de la collectivité dans l'intérêt direct de celle-ci. Avant la construction de ce projet, une consultation libre et spontanée avait été organisée avec les membres de la communauté, et le projet avait été réalisé avec un enthousiasme spontané de leur part.
  292. 159. Dans son observation de février 1995, la commission d'experts a pris bonne note de ces indications. En ce qui concerne l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, qui exclut du champ d'application de la convention les menus travaux de village, la commission s'est référée au paragraphe 37 de son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé où elle a rappelé les critères qui déterminent les limites de cette exception: il doit s'agir de menus travaux, c'est-à-dire essentiellement des travaux d'entretien, et de travaux de village effectués dans l'intérêt direct de la collectivité, et non pas de travaux destinés à une communauté plus large. La construction d'une voie ferrée ne semble répondre ni à l'un ni à l'autre de ces critères, même si la troisième condition est remplie, à savoir que les membres de la communauté ou leurs représentants directs ont le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux.
  293. 160. La commission a noté en outre que les dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes mentionnées à propos du portage obligatoire confèrent à tout chef de larges pouvoirs de réquisitionner les habitants pour l'assister dans l'exécution de ses obligations publiques. En présence de tels pouvoirs, il était difficile de dire que les résidents effectuant un travail à la demande des autorités le faisaient volontairement. La commission a donc espéré, en ce qui concerne tant les projets de travaux publics que les services de portage, que les pouvoirs conférés aux autorités aux termes de la loi sur les villages et de la loi sur les villes seraient abrogés et que le gouvernement communiquerait des informations complètes sur les mesures prises à cet effet, ainsi que sur le suivi mentionné à propos du portage obligatoire (Note 102).
  294. 161. A la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail (CIT) de juin 1995, un représentant du gouvernement du Myanmar a indiqué que, conformément à la demande du Conseil d'administration, "pour assurer que les textes législatifs en question, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient rendus conformes à la convention" et "pour assurer que l'abrogation formelle du pouvoir de recourir au travail obligatoire soit respectée dans la pratique et que ceux qui font usage de la coercition dans le recrutement de la main-d'oeuvre soient punis", le gouvernement avait engagé le processus de modification de ces législations.
  295. 162. En 1995, dans un paragraphe spécial de son rapport, la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement d'abroger de toute urgence les dispositions incriminées de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, afin de rendre ces lois conformes à la lettre et à l'esprit de la convention no 29, de mettre fin aux pratiques de travail forcé sur le terrain, de prévoir et de prendre des sanctions exemplaires contre ceux qui imposent un travail forcé et de fournir un rapport détaillé sur les mesures prises sur les plans législatif et pratique pour que la convention no 29 soit respectée.
  296. 163. Dans une observation faite en novembre 1995, la commission d'experts a noté qu'aucune précision de cette nature n'avait été fournie par le gouvernement. Dans son rapport succinct, reçu le 31 octobre 1995, le gouvernement, se référant aux dispositions de l'article 2, paragraphe 2 b) et d), de la convention, à propos des "obligations civiques normales" et du "travail ou service exigé dans les cas de force majeure", a déclaré une fois de plus qu'au Myanmar la conception était acceptée selon laquelle la prestation volontaire de travail pour le développement de la collectivité à des travaux tels que la construction de pagodes, de monastères, d'écoles, de ponts, de routes, de voies ferrées, etc., constituait une sorte d'offrande méritoire, qui était bonne non seulement pour la vie présente, mais aussi pour la vie future. Ainsi, dans l'optique du gouvernement, la notion de "travail forcé" n'était pas applicable aux dispositions de l'article 11(d) de la loi sur les villages et de l'article 9 de la loi sur les villes. En outre, la loi sur les villages et la loi sur les villes, administrées par le Département de l'administration générale, étaient "actuellement à l'examen pour être en conformité avec la situation actuelle au Myanmar".
  297. 164. La commission d'experts a noté ces indications avec préoccupation. Rappelant ses commentaires précédents (Note 103), elle a conclu que le dernier rapport du gouvernement persistait à effacer la distinction entre travail obligatoire et travail volontaire et qu'il ne contenait aucune indication sur la question de savoir si des mesures concrètes avaient été prises pour abolir, tant dans la législation que dans la pratique, le pouvoir d'imposer un travail obligatoire. La commission a demandé au gouvernement de fournir des informations détaillées à la Conférence lors de sa 83e session de juin 1996.
  298. 165. A la Commission de l'application des normes de la CIT en juin 1996, un représentant du gouvernement du Myanmar a indiqué qu'au cours de la première moitié de 1996 un conseil constitué pour suivre les progrès du réexamen de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes avait tenu trois réunions à l'issue desquelles le projet d'une nouvelle loi unifiée avait été soumis pour approbation à l'organe central de contrôle de la législation. En ce qui concerne l'application de la convention dans la pratique, il a déclaré que le recours à des porteurs était la conséquence d'un conflit armé de plusieurs décennies entre le gouvernement et des groupes d'insurgés. Toutefois, aujourd'hui, 15 des 16 groupes insurgés avaient abandonné la lutte armée pour se joindre à l'effort du gouvernement en faveur du développement national. Cette situation encourageante avait contribué à réduire considérablement les opérations militaires, ce qui permettait d'envisager la fin du recours à des porteurs. En fait, des mesures concrètes avaient été prises par le gouvernement à cette fin. Des instructions spécifiques avaient été données depuis 1995 aux autorités locales, aux gouverneurs régionaux et aux ministères compétents pour interdire le recrutement sans rémunération ou compensation appropriée et équitable de la population locale pour la réalisation de projets de développement national, tels que la construction de ponts, de route et de chemins de fer, de barrages et d'installations portuaires. En conséquence, les membres des forces armées participaient à ces projets pour servir les intérêts du peuple, en plus de leur attribution première, la défense du pays. Aussi estimait-il sincèrement que des progrès substantiels avaient été réalisés dans le sens du respect des dispositions de la convention no 29 (Note 104).
  299. 166. Au cours de la discussion qui a suivi, les membres travailleurs et employeurs de la Commission de la Conférence et plusieurs membres travailleurs et employeurs individuels ainsi que le membre gouvernemental des Etats-Unis ont allégué que le travail forcé était pratiqué au Myanmar dans les conditions les plus cruelles et sur une grande échelle, y compris dans des projets de construction liés au tourisme, pour construire des routes et servir de porteurs aux militaires et que le gouvernement n'avait fourni aucune indication selon laquelle des mesures concrètes auraient été prises pour mettre la loi et la pratique en conformité avec la convention (Note 105). Au contraire, il devenait de plus en plus manifeste, selon les termes employés par le membre gouvernemental des Etats-Unis, que le gouvernement du Myanmar "ne cherche qu'à soulever un écran de fumée pour dissimuler le fait que, peu à peu, la situation du Myanmar évolue vers un état d'illégalité absolue (Note 106)".
  300. 167. La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental du Myanmar et de la discussion qui a suivi. Elle s'est profondément préoccupée de la grave situation qui sévit au Myanmar depuis de très nombreuses années, où l'on recourt systématiquement au travail forcé. Une nouvelle fois, elle a fermement demandé au gouvernement d'abroger formellement et de toute urgence les dispositions légales et d'abandonner toutes les pratiques qui sont contraires à la convention. Elle a demandé au gouvernement de prescrire des sanctions véritablement dissuasives contre tous ceux qui recourent au travail forcé. Elle a exprimé le vif espoir que le gouvernement prendrait sans délai toutes les mesures nécessaires pour supprimer le recours au travail forcé et qu'il fournirait dès l'année suivante toutes les informations nécessaires et détaillées sur les mesures concrètes prises ou envisagées pour abolir dans la législation et supprimer dans la pratique le pouvoir d'imposer un travail obligatoire. La commission a décidé de mentionner ce cas dans son rapport comme un cas de défaut continu d'application de la convention no 29, étant donné que depuis de très nombreuses années il existe des divergences très sérieuses et continues en fait comme en droit (Note 107).
  301. 168. Par une lettre datée du 20 juin 1996, 25 délégués travailleurs à la Conférence internationale du Travail ont déposé une plainte en vertu de l'article 26 de la Constitution contre le gouvernement du Myanmar (Note 108), ce qui a conduit à l'établissement de la commission d'enquête.
  302. B. Examen par des organes des Nations Unies de la situation des droits de l'homme au Myanmar (en particulier pour ce qui touche au travail forcé)
  303. 169. Plusieurs organes des Nations Unies se préoccupent de la situation des droits de l'homme au Myanmar. A diverses occasions, ils ont invité le gouvernement du Myanmar à prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les violations qui relèvent de leur compétence et pour assurer que prévalent dans ce pays les droits et garanties liés à un régime démocratique.
  304. 170. La situation des droits de l'homme au Myanmar a été examinée pour la première fois par un organe des Nations Unies en 1990 lorsque la Commission des droits de l'homme a été saisie de la question conformément à la procédure établie par la résolution 1503 du Conseil économique et social (Note 109). A l'heure actuelle, l'Assemblée générale, la Commission des droits de l'homme et certains de ses organes, le Secrétaire général ainsi que le Comité des droits des enfants suivent de près la question du travail forcé dans ce pays. La présente section vise à présenter l'état de leurs travaux à cet égard.
  305. 1) Assemblée générale
  306. 171. L'Assemblée générale s'est pour la première fois penchée sur la situation des droits de l'homme au Myanmar en 1991 (Note 110). A cette occasion, elle s'est déclarée préoccupée par les "renseignements relatifs à la gravité de la situation des droits de l'homme" et a souligné qu'il convenait "d'y remédier sans tarder" (Note 111). L'Assemblée générale a par la suite examiné la situation prévalant au Myanmar à chacune de ses sessions annuelles. Depuis 1994, l'Assemblée générale exhorte le gouvernement du Myanmar "à assurer le plein respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales" (Note 112), "à mettre fin aux violations du droit à la vie et à l'intégrité de la personne, à la pratique de la torture, aux mauvais traitements infligés aux femmes, au travail forcé, aux déplacements forcés, aux disparitions forcées et aux exécutions sommaires" (Note 113) ainsi qu'à s'acquitter des "obligations qui lui incombent en tant qu'Etat partie à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930..." (Note 114).
  307. 2) Commission des droits de l'homme et rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (Note 115)
  308. 172. Notant avec préoccupation la gravité de la situation des droits de l'homme au Myanmar, la Commission des droits de l'homme a décidé, en 1992, de nommer le professeur Yozo Yokota à titre de rapporteur spécial "chargé d'établir directement des contacts avec le gouvernement comme avec le peuple du Myanmar (...) afin d'examiner la situation des droits de l'homme dans ce pays et de suivre tout progrès réalisé sur la voie du transfert du pouvoir à un gouvernement civil et de l'élaboration d'une nouvelle Constitution, de la levée des restrictions pesant sur les libertés personnelles et de la restauration des droits de l'homme au Myanmar" (Note 116). Le juge Rajsoomer Lallah a succédé au professeur Yokota en 1996; ces deux rapporteurs spéciaux ont soumis à l'Assemblée générale et à la Commission des droits de l'homme au total 11 rapports sur la situation des droits de l'homme au Myanmar dans lesquels ils ont spécifiquement abordé la question du travail et du portage forcés.
  309. 173. Dans son premier rapport préliminaire en date du 13 novembre 1992, le professeur Yokota a observé que le Centre des droits de l'homme avait été saisi de plus de 100 cas bien documentés alléguant des actes de torture ou d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants qui auraient été infligés par les forces armées dans le cadre d'activités ayant surtout pour but le recrutement forcé de soldats ou de travailleurs (Note 117). Les cas de torture mentionnés concerneraient des porteurs contraints de transporter des charges trop lourdes; malades ou trop faibles pour continuer de progresser, ils seraient battus, frappés, voire tués, et abandonnés par la suite en chemin (Note 118).
  310. 174. En février 1993, après avoir visité le pays, le rapporteur spécial a étayé ses observations en ce qui concerne la situation des droits de l'homme au Myanmar (Note 119). Il a notamment traité de la question du portage et du travail forcé dans son examen des allégations relatives au droit à la vie (Note 120) et à la protection contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants (Note 121). Pour ce qui est du portage, les témoignages entendus par le rapporteur spécial auraient révélé que, depuis 1988, les militaires auraient tué "sur tout le territoire du Myanmar des milliers de personnes qu'ils avaient assujetties à des travaux de portage", les groupes les plus touchés étant les musulmans de l'Etat Rakhine (Rohingyas), les Karen, les Shan et les Mon. D'après les témoignages qu'il a entendus, le rapporteur spécial a précisé les circonstances dans lesquelles s'effectuerait le portage. Des hommes, incluant des enfants, seraient périodiquement emmenés de force des villages pour servir de porteurs, certains étant utilisés comme démineurs. A la lumière d'une trentaine de témoignages recueillis, le rapporteur spécial a observé que le portage serait accompagné de manière systématique d'actes de torture et de mauvais traitements (Note 122). En outre, des centaines de personnes enrôlées de force pour servir de porteurs auraient disparu (Note 123). Les rigueurs du climat aggravant les effets des mauvais traitements infligés aux porteurs, nombre d'entre eux souffriraient de paludisme, de tuberculose et d'autres maladies de l'appareil respiratoire, de dysenterie, de parasitoses et d'infections causées par des blessures non soignées (Note 124). Le rapporteur spécial a observé que les malades ne recevraient aucun soin, plusieurs se faisant au contraire injurier sans arrêt et couvrir d'insultes racistes et ethniques.
  311. 175. Dans le cas des travaux forcés autres que le portage, des témoins auraient déclaré au rapporteur spécial que des personnes auraient été forcées de travailler sur des chantiers ferroviaires ou routiers ou d'exécuter des travaux de défrichage de la jungle dans le cadre de projets de construction de voies ferrées (Note 125), de mise en valeur de zones à proximité de la frontière thaïlandaise et de construction d'ouvrages militaires, en particulier dans les zones de conflit peuplées par les Karen, les Karenni, les Shan et les Mon. Des centaines de personnes auraient été exécutées lorsqu'incapables de "porter de lourds fardeaux ou d'exécuter de durs travaux" (Note 126).
  312. 176. En outre, le rapporteur spécial a consacré un chapitre complet sur la situation des musulmans de l'Etat Rakhine (Rohingyas). Au regard des informations qu'il a recueillies et "qu'il a soigneusement vérifiées", le rapporteur spécial a conclu qu'il aurait été porté atteinte à l'unité familiale de ce groupe et que son territoire aurait diminué sous l'effet des politiques arbitraires de déplacement de populations. Il a observé qu'une répression systématique ayant pour cause l'intolérance ethnique s'abattrait sur les Rohingyas, ceux-ci courant grandement le risque de se voir emmener par les militaires pour servir de force de porteurs ou de manoeuvres (Note 127). Enfin, les très nombreux témoignages directs recueillis par le rapporteur spécial ainsi que d'autres dépositions bien documentées révéleraient un recours systématique à la torture (y compris le viol), aux traitements cruels, inhumains et dégradants, aux disparitions forcées ou aux exécutions arbitraires de musulmans et de membres d'autres minorités ethniques de l'Arakan, dont les autorités du Myanmar seraient responsables (Note 128).
  313. 177. Au regard de "l'important dossier" qu'il a constitué, le rapporteur spécial a dès lors conclu qu'il y avait au Myanmar atteinte à l'intégrité physique de trois catégories de personnes, incluant les porteurs enrôlés de force et les personnes contraintes au travail forcé (Note 129).
  314. 178. Parmi les recommandations du rapporteur spécial, l'une vise spécifiquement le travail et le portage forcés aux termes de laquelle il invite le gouvernement à prendre "les mesures nécessaires pour s'acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la convention no 29 de l'OIT, en interdisant la pratique du portage forcé et autres travaux forcés impliquant des tortures et des traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants systématiques, des disparitions involontaires et des exécutions arbitraires à grande échelle" (Note 130). Le rapporteur spécial ajoute que "(é)tant donné l'ampleur des violations, le gouvernement devrait officiellement condamner tous les actes impliquant des violations des droits de l'homme dont sont responsables les autorités. De tels actes -- qu'il s'agisse d'intimidation, de menaces ou de représailles -- ne devraient pas, en effet, bénéficier de l'impunité que leur garantit l'attitude actuelle du gouvernement qui se borne à rejeter en bloc toutes accusations" (Note 131).
  315. 179. Depuis lors, les rapporteurs spéciaux doivent constater avec regret que des violations des droits de l'homme seraient commises de façon systématique et à grande échelle par les autorités du Myanmar contre des civils innocents sous forme, notamment, de travail et portage forcés (Note 132). En fait, depuis octobre 1994, les rapporteurs spéciaux consacrent des sections complètes de leurs rapports à cette pratique, fournissant différents exemples de cas visant à appuyer les conclusions et recommandations qu'ils formulent à cet égard.
  316. 180. Dans son rapport intérimaire présenté à l'Assemblée générale en octobre 1994 (Note 133), le rapporteur spécial a indiqué que des faits portés à sa connaissance révéleraient que des personnes âgées, des femmes et des enfants seraient enrôlés de force comme porteurs dans l'armée et seraient souvent utilisés comme boucliers humains pendant les opérations militaires (Note 134). Outre le portage, cette main-d'oeuvre civile serait forcée d'exécuter d'autres tâches au service de l'armée. Des habitants de villages situés près des camps militaires seraient obligés de fournir quotidiennement de la main-d'oeuvre pour aider à la construction de casernes et de clôtures, aux travaux de terrassement, ainsi qu'à l'abattage des arbres, à l'exécution de projets agricoles et à d'autres activités au service direct des camps militaires (Note 135).
  317. 181. Le rapporteur spécial s'est référé également à certains grands travaux de développement lancés par le gouvernement du Myanmar pour lesquels des civils auraient été forcés de travailler sans être rémunérés. Ces projets comprendraient notamment la construction d'hôpitaux, de routes, de voies ferrées, de gazoducs, de ponts et de pêcheries. Les habitants situés dans les zones de construction seraient fréquemment obligés de fournir leur travail et d'autres ressources (Note 136). Le rapporteur spécial aurait reçu de nombreuses informations très détaillées selon lesquelles un grand nombre de violations massives des droits de l'homme auraient été commises lors de la construction d'une voie ferrée commencée en 1993 et reliant Ye (Etat Mon) à Tavoy (division de Tanintharyi) (Note 137). En outre, le rapporteur spécial aurait été informé de l'utilisation d'autres formes de travail forcé liées à la construction d'une route entre Bokpyin et Lenya dans la division de Tanintharyi, d'un aéroport international à Pathein, d'un nouvel aérodrome militaire dans la circonscription de Labutta (division de Tanintharyi) ainsi qu'à la restauration de monuments historiques à Mandalay (Note 138). Enfin, des civils auraient eu à garder, pendant 24 heures d'affilée sans être indemnisés, routes et voies ferrées dans les régions où des soulèvements ont eu lieu. Ils auraient eu aussi à déminer la route en marchant ou en conduisant des charrettes devant les colonnes militaires (Note 139).
  318. 182. Dans son rapport intérimaire d'octobre 1995 (Note 140), précédé par le rapport soumis à la commission en janvier (Note 141), le rapporteur spécial a prié le gouvernement de lui fournir ses observations en ce qui concerne des allégations aux termes desquelles il est rapporté que le gouvernement aurait abondamment recouru, sous diverses formes, au travail forcé et non rémunéré pour de nombreux projets de développement visant à aménager l'infrastructure du pays (Note 142); qu'en vue de préparer le pays à l'Année du tourisme (1996), le gouvernement aurait recouru au travail forcé pour restaurer de nombreux sites touristiques et améliorer l'infrastructure; et qu'une aggravation du portage forcé au service de l'armée aurait été observée dans le contexte des conflits opposant l'armée du Myanmar à des groupes d'insurgés dans l'Etat Kayin.
  319. 183. Dans son rapport soumis à la Commission des droits de l'homme en février 1996 (Note 143), le rapporteur spécial a indiqué qu'il avait obtenu copie, lors de sa visite d'octobre 1995 au Myanmar, de deux ordonnances confidentielles aux termes desquelles instruction était donnée de mettre un terme au recours au travail sans rémunération dans le cadre de projets d'irrigation et de développement. Toutefois, il appert, à la lumière des plaintes reçues émanant de sources fiables, que ces ordonnances n'auraient pas été mises en oeuvre et qu'hommes, femmes et enfants seraient encore utilisés pour exécuter du travail forcé aux fins de construire chemins de fer, routes et ponts. Les travailleurs ne seraient pas payés et ne bénéficieraient que du strict minimum en termes de nourriture et de temps de repos (Note 144). Le rapporteur spécial a conclu dès lors que les rapports détaillés, les photographies, les bandes magnétoscopiques et les différents éléments physiques de preuve portés à sa connaissance révéleraient que les pratiques de travail et portage forcés, torture et exécutions arbitraires se produiraient à grande échelle, notamment dans le cadre de projets de développement ou d'opérations contre les forces rebelles dans les régions à minorités ethniques. Les victimes de ces actes appartiendraient souvent à des groupes minoritaires ethniques et seraient composées de paysans, de femmes, de travailleurs journaliers et d'autres citoyens pacifiques ne possédant pas les fonds nécessaires pour éviter, par le paiement de pots-de-vin, les mauvais traitements (Note 145). Dans ses recommandations, le rapporteur spécial a insisté sur le fait que le gouvernement du Myanmar devrait s'acquitter de ses obligations au titre de la convention no 29 interdisant la pratique du portage forcé et du travail forcé. A cet égard, il a invité le gouvernement à prendre de toute urgence des mesures appropriées pour abroger les dispositions correspondantes des lois légitimant le recours à une telle pratique de manière à y mettre un terme (Note 146).
  320. 184. A partir d'octobre 1996, le rapporteur spécial a déploré l'absence de coopération du gouvernement (Note 147). Dans son premier rapport intérimaire en date du 8 octobre 1996, le juge Lallah se dit préoccupé, comme son prédécesseur, par le nombre considérable de cas allégués de torture et de mauvais traitements attribués aux membres des forces armées du Myanmar. Ces pratiques seraient régulièrement utilisées contre les civils vivant dans les zones d'insurrection, contre les porteurs servant les forces armées et contre les travailleurs sur les sites de travail où les autorités ont recours au travail forcé (Note 148).
  321. 185. Pour ce qui est du travail forcé proprement dit, le rapporteur spécial a indiqué qu'il continuait à recevoir de nombreux rapports émanant de multiples sources indiquant que le recours au travail forcé serait utilisé à grande échelle (Note 149). Les civils continueraient à être forcés de travailler sur les projets de développement, incluant la construction de routes, de ponts, de chemins de fer et de gazoducs. Les personnes vivant près des sites de construction seraient forcées de travailler sous peine de sanctions. Personnes âgées et enfants auraient été aperçus travaillant sur ces sites (Note 150).
  322. 186. Le rapporteur spécial a également observé que le recrutement forcé de civils aux fins de portage demeurait une pratique utilisée au Myanmar (Note 151). Les conditions auxquelles seraient soumis les porteurs seraient brutales (Note 152). Les porteurs devant traverser des terrains montagneux avec de lourdes charges, ceux tentant de fuir étaient régulièrement abattus (Note 153).
  323. 187. A la lumière des faits portés à sa connaissance, le rapporteur spécial a dès lors prié instamment le gouvernement du Myanmar "de s'acquitter de toute urgence de ses obligations en vertu de la convention no 29 interdisant la pratique du portage forcé et du travail forcé" (Note 154). Le gouvernement a également été invité "à prendre des mesures pour que les militaires -- soldats ou officiers -- se comportent selon les normes internationales humanitaires et les normes internationales relatives aux droits de l'homme reconnues et s'abstiennent ainsi de procéder à des exécutions arbitraires, de commettre des viols, de confisquer des biens, de contraindre des personnes à travailler, à porter des charges et, d'une manière générale, de traiter les personnes sans le respect dû à leur dignité d'être humain. Lorsque les autorités ont besoin des services de villageois pour le portage ou pour d'autres travaux, le recrutement devrait se faire de gré à gré, moyennant un salaire adéquat. La nature du travail devrait être raisonnable et conforme aux normes internationales établies en la matière (Note 155)." Enfin, "(c)ompte tenu de l'ampleur des abus attestés, le gouvernement devrait imposer à tous les fonctionnaires commettant des abus et des violations des droits de l'homme un contrôle et des peines disciplinaires et mettre fin à la pratique d'immunité qui règne actuellement dans les secteurs militaire et public" (Note 156). Le rapporteur spécial a en outre encouragé le gouvernement à coopérer avec l'OIT à cette fin (Note 157).
  324. 188. Avant de soumettre son rapport à la commission en février 1997 (Note 158), le rapporteur spécial s'est rendu en Thaïlande en décembre 1996 aux fins d'évaluer la situation des personnes déplacées provenant du Myanmar et vivant dans les camps de réfugiés le long de la frontière. Dans son rapport, le rapporteur spécial a identifié le travail forcé comme étant une des causes obligeant ces personnes à quitter leur foyer (Note 159).
  325. 189. Le rapporteur spécial a fourni de nouvelles informations de faits sur le travail forcé dans son rapport intérimaire en date du 16 octobre 1997 (Note 160). Le recours à cette pratique serait en fait signalé dans l'ensemble du Myanmar, y compris dans des lieux pour lesquels un accord de cessez-le-feu aurait été conclu. Pour ce qui est des offensives, le rapporteur spécial a indiqué qu'on estimerait à 30 000 le nombre de porteurs qui auraient été recrutés pour les offensives contre l'Union nationale Karen lancées pendant la saison sèche de 1997 (Note 161). Un renforcement considérable de la présence de l'armée du Myanmar dans les régions frontalières aurait été observé, entraînant une recrudescence du travail forcé effectué pour les militaires à l'arrière de la ligne de front, incluant le portage et le fait de servir de messager, la construction, l'entretien et la garde de routes et de ponts militaires, le déminage de routes et la construction et l'entretien de camps et d'exploitations agricoles militaires (Note 162). Une autre forme de travail forcé identifiée consisterait en des projets commerciaux pour l'armée tels que rizières, étangs à pisciculture et plantations que les paysans locaux doivent aménager et exploiter (Note 163). Le travail forcé continuerait à être utilisé pour des travaux d'infrastructure et de développement (Note 164).
  326. 190. Dans son rapport à la Commission des droits de l'homme en janvier 1998 (Note 165), le rapporteur spécial s'est intéressé plus spécifiquement à la question des femmes victimes du travail forcé. A cet égard, il a observé qu'un nombre croissant de femmes, y compris de jeunes filles et de personnes âgées, auraient été forcées à travailler, sans être rémunérées ou nourries, sur des projets d'infrastructure et à servir de porteurs dans les zones de conflit, même lorsqu'elles étaient enceintes ou allaitaient des nourrissons (Note 166). Le rapporteur spécial a constaté que les femmes enrôlées comme porteurs étaient plus vulnérables que les hommes puisqu'elles étaient non seulement contraintes au portage mais aussi utilisées comme bouclier humain ou abusées sexuellement par les soldats (Note 167).
  327. 191. A la lumière des faits exposés par les rapporteurs spéciaux, la Commission des droits de l'homme a adopté, depuis 1992, des résolutions aux termes desquelles elle a manifesté une préoccupation croissante face à l'extrême gravité des violations persistantes des droits de l'homme au Myanmar, notamment celles portant sur la pratique de la torture et le travail forcé, incluant la fourniture de porteurs à l'armée (Note 168).
  328. 192. Depuis 1993, la Commission des droits de l'homme demande instamment au gouvernement de "rétablir le plein respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales" et de "mettre fin aux violations du droit à la vie et à l'intégrité de la personne, à la pratique de la torture, des mauvais traitements imposés aux femmes et du travail forcé, et aux disparitions forcées et exécutions sommaires" (Note 169); en outre, elle lance un appel au gouvernement pour qu'il "respecte les obligations qui lui incombent en tant que partie à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (Note 170). Depuis 1994, elle rappelle au gouvernement "qu'il doit mettre fin à l'impunité des auteurs de violations des droits de l'homme, y compris des militaires, et qu'il a la responsabilité d'enquêter sur les allégations de violations qui auraient été commises par ses agents sur son territoire, de poursuivre, juger et punir les coupables, en toutes circonstances" (Note 171). En 1997, elle a exprimé sa profonde inquiétude devant les "violations dont font l'objet les droits des enfants, au mépris de la Convention relative aux droits de l'enfant, en particulier du fait que le cadre juridique existant n'est pas conforme à la convention, que des enfants sont systématiquement recrutés pour exécuter un travail forcé et que la discrimination frappe des enfants qui appartiennent à des groupes ethniques et religieux minoritaires" (Note 172). En 1998, la Commission des droits de l'homme a exprimé sa profonde inquiétude devant "(l)e recours généralisé au travail forcé, notamment pour la réalisation de travaux d'infrastructure et pour fournir des porteurs à l'armée" (Note 173). Elle a dès lors décidé de proroger d'un an le mandat du rapporteur spécial et de poursuivre l'examen de cette question à sa cinquante-cinquième session (Note 174).
  329. 3) Secrétaire général
  330. 193. Prié par l'Assemblée générale de contribuer à la mise en oeuvre de la résolution sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (Note 175), le Secrétaire général a, depuis 1993, offert ses bons offices au gouvernement du Myanmar afin de l'aider à répondre aux préoccupations manifestées par les autres Etats membres des Nations Unies à cet égard (Note 176). Dans le cadre de ce mandat, les représentants du Secrétaire général se sont rendus à six occasions (Note 177) au Myanmar, puisque, pour bien s'acquitter de son mandat, le Secrétaire général se dit convaincu que ses représentants doivent rencontrer les autorités gouvernementales à l'échelon le plus élevé et les dirigeants d'autres grandes forces politiques (Note 178). Malgré le dialogue amorcé dont il s'est félicité, le Secrétaire général constate avec regret, depuis 1996, qu'aucun progrès n'est à constater dans les domaines à propos desquels l'Assemblée générale et la Commission des droits de l'homme ont à maintes reprises exprimé leurs préoccupations (Note 179).
  331. 4) Autres organes des Nations Unies
  332. 194. Le Comité des droits de l'enfant, établi aux termes de l'article 43 de la Convention relative aux droits de l'enfant, à laquelle le Myanmar a adhéré le 15 juillet 1997, a examiné en 1997 le rapport fourni par cet Etat conformément à ses obligations conventionnelles. Le comité s'est dit préoccupé par les informations provenant de diverses sources et faisant état de sévices et de violences infligés à des enfants, en particulier des nombreux cas de viols de jeunes filles par les soldats et d'enfants systématiquement contraints au travail forcé, notamment comme porteurs (Note 180). Il a noté avec inquiétude le recrutement forcé de jeunes enfants soldats (Note 181) et l'insuffisance de mesures prises pour assurer la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale des enfants victimes de toutes formes de négligence, de sévices et/ou d'exploitation (Note 182). Le comité a dès lors recommandé au gouvernement du Myanmar de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre pleinement en oeuvre les dispositions de la convention, et notamment pour que l'armée s'abstienne de recruter des enfants mineurs, tout recrutement forcé d'enfants devant être interdit (Note 183).
  333. 195. Enfin, d'autres organes de la Commission des droits de l'homme ont été saisis à un moment ou à un autre de questions concernant le travail forcé au Myanmar. A titre d'exemple, en 1993, le rapporteur spécial sur l'application de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction a examiné de façon détaillée des allégations d'actes de discrimination dirigés contre les musulmans de l'Etat Rakhine (Rohingyas) et liés au recours au travail forcé. A cette occasion, le rapporteur spécial a exprimé l'opinion que ces cas devraient donner lieu à une enquête qui n'a toujours pas été menée, permettant d'identifier les personnes, les lieux et les situations en cause (Note 184). En 1994, le rapporteur spécial a noté que la discrimination contre les membres des communautés religieuses bouddhiste, musulmane et chrétienne semblait persister (Note 185).
  334. 196. Pour leur part, les rapporteurs spéciaux sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ont été saisis depuis 1992 d'allégations d'actes de torture perpétrés par les militaires contre des personnes qui auraient été forcées de travailler ou d'exécuter du portage (Note 186).
  335. 197. Enfin, en 1993, le rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires s'est dit préoccupé des allégations portées à sa connaissance qui font état de l'utilisation excessive et arbitraire de la force par les membres des forces de sécurité qui bénéficieraient, du reste, d'une impunité presque totale (Note 187).
  336. Partie IV
  337. Examen de l'affaire par la commission
  338. 9. Droit international général et exigences posées par la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
  339. A. Droit international général -- esclavage, travail forcé et autres pratiques connexes
  340. 198. En droit international, la genèse de l'interdiction de recourir au travail forcé s'inscrit dans le contexte des efforts de la communauté internationale aux fins d'éradiquer l'esclavage ainsi que les institutions et pratiques analogues, étant entendu que le travail forcé a été classé parmi ces pratiques (Note 188). Nombre de conventions et traités internationaux proscrivent le recours à l'esclavage en temps de paix comme en période de conflits armés. Bien que certains instruments, surtout ceux qui ont été adoptés au début du XIXe siècle, définissent l'esclavage de manière restrictive, l'interdiction doit aujourd'hui être comprise comme couvrant l'ensemble des manifestations contemporaines de cette pratique.
  341. 199. Les premiers efforts en vue de supprimer la traite des esclaves remontent à 1815 lorsque les Puissances participant au Congrès de Vienne ont manifesté leur souhait, au nom des principes d'humanité et de moralité universelle, de "mettre un terme à un fléau qui (avait) si longtemps désolé l'Afrique, dégradé l'Europe et affligé l'humanité" (Note 189). Dans la foulée du Congrès de Vienne, des lois nationales ont été adoptées et des traités bilatéraux conclus portant engagement d'interdire la traite des esclaves et de la frapper de sanctions pénales (Note 190). En outre, des instruments multilatéraux ont été signés sous les auspices du concert des grandes puissances aux fins d'interdire et de coordonner les efforts pour réprimer cette pratique, notamment le Traité de Londres du 20 décembre 1841 sur la suppression de la traite d'esclaves (Note 191), l'Acte général de la Conférence de Berlin du 26 février 1885 interdisant la traite des esclaves dans le bassin du Congo (Note 192), l'Acte général de la Conférence anti-esclavagiste réunie à Bruxelles du 18 novembre 1889 au 2 juillet 1890 pour amener la suppression de la traite des esclaves (Note 193), l'Arrangement international du 18 mai 1904, la Convention internationale du 4 mai 1910 relative à la traite des Blanches (Note 194) et la Convention internationale de 1921 pour la répression de la traite des femmes et des enfants (Note 195).
  342. 200. Au lendemain de la première guerre mondiale, l'esclavage et les pratiques analogues font partie des premières questions traitées par la Société des Nations. Le travail de cette organisation a été déterminant à cet égard puisque, sous son impulsion, presque tous les Etats ont adopté des législations aux fins de prévenir l'esclavage sur leur territoire et l'importation d'esclaves. En outre, la Convention relative à l'esclavage conclue le 25 septembre 1926 (Note 196) a précisé pour la première fois les éléments constitutifs de l'esclavage en le définissant comme étant "l'état ou condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux" (Note 197). Aux termes de la convention de 1926, les Etats parties s'engagent à prévenir et réprimer la traite des esclaves, à poursuivre la suppression complète de l'esclavage sous toutes ses formes d'une manière progressive et aussitôt que possible et à prendre les mesures nécessaires pour que les infractions aux lois et aux règlements édictés en vue de donner effet aux dispositions de la convention soient punies de peines sévères (Note 198). Conscients des graves conséquences que peut avoir le recours au travail forcé, les Etats s'engagent "à prendre des mesures utiles pour éviter que le travail forcé ou obligatoire n'amène des conditions analogues à l'esclavage" (Note 199). La convention tente de limiter le plus possible les circonstances aux termes desquelles le travail forcé ou obligatoire peut être exigé, ce dernier ne devant être autorisé que dans les seuls cas où les autorités centrales compétentes en assument la responsabilité (Note 200). C'est du reste dans ce contexte que la convention no 29 sur le travail forcé de l'OIT, dont les dispositions sont examinées plus loin, a été adoptée par la Conférence internationale du Travail en 1930 (Note 201). Il y est expressément stipulé que "le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales" qui doivent être "réellement efficaces et strictement appliquées" (Note 202).
  343. 201. Trente ans plus tard, la Convention supplémentaire relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions analogues à l'esclavage, conclue à l'initiative du Conseil économique et social des Nations Unies le 7 septembre 1956, supplée la convention de 1926 en condamnant cette pratique de façon plus générale et en organisant de manière exhaustive l'incrimination de l'esclavage, de la traite et des pratiques connexes (Note 203); parmi ces dernières, la convention cite, entre autres, la servitude pour dettes, le servage et l'exploitation du travail d'un adolescent de moins de dix-huit ans par un tiers auquel il a été remis à cette fin par ses parents ou son tuteur (Note 204). Pour sa part, la convention no 29 sur le travail forcé a été complétée par la convention no 105 sur l'abolition du travail forcé adoptée par la Conférence internationale du Travail en 1957 (Note 205).
  344. 202. Depuis 1945, nombre d'Etats ont élevé au niveau constitutionnel l'interdiction de recourir au travail forcé (Note 206). De plus, plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme proscrivent expressément cet avilissement de la personne humaine (Note 207). Ces instruments ne définissent pas ce qu'est le travail forcé; il convient dès lors de se référer aux conventions et résolutions pertinentes de l'OIT (Note 208). L'interdiction de recourir au travail forcé, qui comprend le droit de choisir librement son emploi, est intimement liée à la protection d'autres droits fondamentaux de la personne humaine: le droit de ne pas être soumis à la torture ou à d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, voire le droit à la vie. Dans le cas de conflits armés, les civils et les prisonniers de guerre se voient aussi offrir une protection contre le travail forcé au regard des conventions applicables (Note 209).
  345. 203. La commission conclut qu'il existe aujourd'hui en droit international une norme qui interdit de manière impérative tout recours au travail forcé, le droit de ne pas être astreint à accomplir un travail ou service comptant parmi les droits fondamentaux de la personne humaine. L'Etat qui commandite, incite, accepte ou tolère le travail forcé sur son territoire commet un fait illicite et voit sa responsabilité internationale engagée; en outre, ce fait illicite résulte d'une violation d'une obligation internationale si essentielle pour la sauvegarde d'intérêts fondamentaux de la communauté internationale qu'il pourrait être qualifié, s'il est commis à grande échelle, de crime international aux termes de l'article 19 du projet d'articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats (Note 210). La Cour internationale de Justice a qualifié l'obligation de protéger la personne humaine contre la pratique de l'esclavage d'obligation erga omnes jugeant que, vu l'importance de ce droit, tous les Etats peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce qu'il soit protégé (Note 211).
  346. 204. Enfin, tout individu qui contrevient à cette norme se rend coupable d'une infraction au regard du droit international et engage de ce fait sa responsabilité pénale individuelle. Plus précisément, la réduction à l'esclavage, qui est définie par la Commission du droit international comme le "fait de placer ou de maintenir des personnes en état d'esclavage, de servitude ou de travail forcé, à l'encontre des normes établies et généralement reconnues du droit international" (Note 212) constitue, dans la mesure où elle est commise sur une grande échelle ou de manière systématique, un crime contre l'humanité et qui est punissable aux termes des statuts constitutifs des quatre tribunaux pénaux internationaux institués depuis la seconde guerre mondiale en vue de juger les responsables de violations graves du droit international humanitaire (Note 213), des projets de statut d'une cour criminelle internationale et de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité adoptés par la Commission du droit international, respectivement, en 1994 (Note 214) et 1996 (Note 215).
  347. B. Obligations au titre de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
  348. 1) Mesures prévues par les articles 1, paragraphe 1, et 25 de la convention
  349. 205. Les Etats qui ratifient la convention sur le travail forcé, 1930, prennent l'engagement fondamental de "supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, dans le plus bref délai possible" (Note 216). Cette obligation de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire, tel que défini dans la convention (Note 217), implique pour l'Etat à la fois une obligation de s'abstenir et une obligation d'agir. Tout d'abord, l'Etat doit s'abstenir d'imposer du travail forcé ou obligatoire et ne pas tolérer son imposition par d'autres, et il doit abroger toutes les lois et tous les textes réglementaires ou administratifs qui prévoient ou tolèrent le recours au travail forcé ou obligatoire, de sorte que tout recours à un tel travail, qu'il soit le fait de personnes privées ou de fonctionnaires publics, s'avère illégal en droit national. Deuxièmement, l'Etat doit assurer que "le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales" et "que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées" (Note 218).
  350. 2) Définition du travail forcé et obligatoire et portée des exceptions
  351. 206. Aux termes de la convention, le "travail forcé ou obligatoire" désigne "tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré" (Note 219). Comme l'a noté la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (Note 220), il a été précisé lors de l'examen du projet d'instrument par la Conférence que la peine dont il est question ici ne doit pas revêtir forcément la forme d'une sanction pénale, mais qu'il peut s'agir également de la privation de quelques droits ou avantages (Note 221). A propos du critère énoncé par les termes "ne s'est pas offert de son plein gré", la commission d'experts a relevé qu'en ce qui concerne le travail des enfants la question se pose de savoir si un mineur peut être considéré comme s'étant offert "de son plein gré" pour un travail ou un service et, dans l'affirmative, dans quelles conditions; si le consentement des parents est nécessaire à cet égard et s'il est suffisant, et quelles sont les sanctions en cas de refus. Dans ce contexte, la commission a également rappelé que, en réglementant le recours au travail forcé pendant une période transitoire suivant l'entrée en vigueur de la convention (le 1er mai 1932), la Conférence avait spécifiquement disposé, à l'article 11 de cet instrument, qu'aucune personne de moins de 18 ans ne pouvait être asujettie à un tel travail (Note 222).
  352. 207. La convention prévoit spécifiquement l'exclusion de certaines formes de service obligatoire (Note 223) qui seraient autrement tombées dans la définition générale du travail forcé ou obligatoire, mais qui sont ainsi exclues de la portée des obligations imposées aux Etats qui ratifient la convention, sous réserve du respect de certaines conditions qui seront examinées ci-dessous.
  353. a) Le service militaire obligatoire
  354. 208. La convention exclut de son champ d'application "tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux d'un caractère purement militaire" (Note 224). Comme l'a noté la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé (Note 225), les discussions qui ont eu lieu lors de l'examen du projet de convention par la Conférence aident à expliquer à la fois le but et la portée de cette exception. De l'avis général, le service militaire obligatoire, en tant que tel, devait rester en dehors des limites de la convention. Toutefois, une large discussion eut lieu au sujet des systèmes qui existaient alors dans plusieurs territoires et selon lesquels des personnes astreintes au service militaire, mais non incorporées effectivement dans les forces armées, pouvaient être requises pour l'exécution de travaux publics. On releva que le fait de sanctionner implicitement cette forme de travail en l'excluant du champ d'application de la convention équivaudrait à sanctionner un système incompatible avec le but déclaré de l'instrument, à savoir l'abolition du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, tant à des fins publiques qu'au profit d'employeurs privés. On fit valoir également que l'objet de la justification du service militaire obligatoire était la nécessité d'assurer la défense nationale, mais qu'il n'existait aucun motif ou justification analogue pour un service obligatoire destiné à l'exécution de travaux publics. La Conférence décida en conséquence que le service militaire obligatoire ne serait exclu du champ d'application de la convention que s'il était affecté à des travaux d'un caractère purement militaire (Note 226).
  355. 209. La commission d'experts a également rappelé que les dispositions de la convention de 1930 relative au service militaire obligatoire ne s'appliquent pas aux militaires de carrière. Ainsi, d'une part, la convention ne s'oppose pas à l'exécution de travaux non militaires par des soldats enrôlés volontairement; d'autre part, le fait que le service militaire obligatoire soit exempté du champ d'application de la convention ne saurait être invoqué pour priver des militaires de carrière du droit de quitter le service soit à des intervalles raisonnables, soit moyennement un préavis approprié (Note 227). Bien que, dans ces cas, l'emploi soit, à l'origine, le résultat d'un accord conclu librement, le droit d'un travailleur au libre choix de son emploi reste inaliénable (Note 228). En conséquence, la commission a estimé que les dispositions légales empêchant un travailleur engagé pour une durée indéterminée de mettre fin à son emploi moyennant un préavis raisonnable ont pour effet de transformer une relation contractuelle fondée sur la volonté des parties en un service imposé par la loi, et sont donc incompatibles avec les conventions concernant le travail forcé. Il en est de même lorsque le travailleur est tenu de servir au-delà de l'échéance d'un contrat de durée déterminée (Note 229).
  356. b) Obligations civiques normales
  357. 210. La convention sur le travail forcé exempte de ses dispositions "tout travail ou service faisant partie des obligations civiques normales des citoyens d'un pays se gouvernant pleinement lui-même" (Note 230). Comme l'a noté la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, trois exceptions spécifiquement prévues dans la convention concernent certaines formes de travail ou de service qui constituent également des obligations civiles normales: le service militaire obligatoire (Note 231), le travail ou service exigé dans des cas de force majeure (Note 232) et les menus travaux de village (Note 233). Les autres exemples d'obligations civiques normales mentionnés par la commission d'experts sont la participation obligatoire à un jury et le devoir d'assister une personne en danger ou d'aider à assurer le respect de la loi et de l'ordre public. La commission a relevé que ces exceptions doivent être interprétées à la lumière d'autres dispositions de la convention et ne sauraient être invoquées pour justifier le recours à des formes de service obligatoire qui sont contraires à ces autres dispositions (Note 234).
  358. c) Travail pénitentiaire
  359. 211. La convention exempte de son champ d'application "tout travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privés" (Note 235). A la différence des autres exceptions prévues dans la convention et qui concernent des cas où des personnes sont appelées pour exécuter des travaux ou des services particuliers, il s'agit en l'occurrence des conséquences d'une peine infligée en raison de la conduite des intéressés. Toutefois, comme l'a relevé la commission d'experts, deux des conditions fixées au sujet du travail pénitentiaire, à savoir que le travail pénitentiaire ne peut être imposé que comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire et que la personne condamnée ne soit pas mise à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées sont des garanties importantes contre le risque de voir le fonctionnement du système pénal s'écarter de son véritable rôle pour devenir un moyen de répondre aux besoins de main-d'oeuvre (Note 236).
  360. d) Cas de force majeure
  361. 212. La convention exempte de son champ d'application "tout travail ou service exigé dans les cas de force majeure, c'est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistre ou menaces de sinistres tels qu'incendies, inondations, famines, tremblements de terre, épidémies et épizooties violentes, invasions d'animaux, d'insectes ou de parasites végétaux nuisibles, et en général toute circonstance mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population" (Note 237). La commission d'experts a relevé que, comme l'indiquent les exemples énumérés dans la convention, la notion de force majeure implique un événement soudain et imprévu qui appelle une intervention immédiate (Note 238). Pour respecter les limites de l'exception prévues dans la convention, le pouvoir de mobiliser de la main-d'oeuvre devrait être restreint aux véritables cas de force majeure. En outre, la durée et l'importance du service imposé ainsi que des fins pour lesquelles il est utilisé devraient être limitées strictement en fonction des exigences de la situation (Note 239).
  362. e) Menus travaux de village
  363. 213. Sont également exemptés du champ d'application de la convention "les menus travaux de village, c'est-à-dire les travaux exécutés dans l'intérêt direct de la collectivité par les membres de celle-ci, travaux qui, de ce chef, peuvent être considérés comme des obligations civiques normales incombant aux membres de la collectivité, à condition que la population elle-même ou ses représentants directs ait le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux" (Note 240). La commission d'experts a attiré l'attention sur les critères qui déterminent les limites de cette exception et servent à la distinguer d'autres formes de services obligatoires qui, aux termes de la convention, devraient être abolies (comme le travail forcé pour des travaux publics d'intérêt général ou local). Ces critères sont les suivants:
  364. -- il doit s'agir de "menus travaux", c'est-à-dire essentiellement des travaux d'entretien et, exceptionnellement, des travaux relatifs à la construction de certains bâtiments destinés à améliorer les conditions sociales de la population du village elle-même (petites écoles, salles de consultations et de soins médicaux, etc.);
  365. -- il doit s'agir de "travaux de village" effectués "dans l'intérêt direct de la collectivité" et non pas de travaux destinés à une communauté plus large;
  366. -- la population "elle-même", c'est-à-dire celle qui doit effectuer les travaux, ou ses représentants "directs" (c'est-à-dire, par exemple, le conseil du village) doivent avoir "le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux" (Note 241).
  367. 3) Statut actuel de l'article 1, paragraphe 2, et des articles 4 et suivants de la convention
  368. 214. Les Etats qui ratifient la convention sont obligés "de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes (Note 242) dans le plus bref délai possible" (Note 243); toutefois, la convention, telle qu'adoptée en 1930, prévoit que "En vue de cette suppression totale, le travail forcé obligatoire pourra être employé, pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties stipulées par les articles qui suivent" (article 1, paragraphe 2). Il n'y a pas de définition de ce que l'on entend par période transitoire ni de sa durée éventuelle, encore que, aux termes de l'article 1, paragraphe 3, la "possibilité de supprimer sans nouveau délai le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes" et la décision de savoir "s'il y a lieu d'inscrire cette question à l'ordre du jour de la Conférence", devaient être examinées par le Conseil d'administration "à l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente convention" (Note 244). Le but essentiel de la période transitoire était de ménager une certaine marge de manoeuvre, en particulier aux Etats Membres colonisateurs, dans les limites de laquelle il fallait parvenir à l'abolition totale de tout travail forcé ou obligatoire.
  369. 215. L'article 1, paragraphe 2, qualifiait dans une mesure limitée l'obligation prévue à l'article 1, paragraphe 1, en permettant d'employer le travail forcé ou obligatoire pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties fixées par la convention (Note 245). Ces conditions et garanties visent à réserver le pouvoir d'imposer le travail ou le service en question à certaines autorités déterminées (Note 246), à s'assurer qu'il ne soit exigé que dans des cas de nécessité actuelle ou imminente et pour des travaux d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter (Note 247), à sauvegarder les conditions sociales et physiques de la population (Note 248) et à assurer le respect de certaines normes minima en ce qui concerne la durée du travail, le repos hebdomadaire, la rémunération, la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, la santé et le bien-être des travailleurs (Note 249). Des conditions spéciales sont fixées pour le portage et les cultures obligatoires (Note 250).
  370. 216. A la lumière de ces conditions et garanties, plusieurs formes de travail forcé ou obligatoire devaient être abolies immédiatement, sans aucune période transitoire. Tel est le cas du travail forcé ou obligatoire exécuté au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées (Note 251), du travail forcé imposé aux femmes ou aux hommes de moins de 18 ans ou de plus de 45 ans, ou invalides (Note 252), du recours aux cultures obligatoires à d'autres fins que pour prévenir la famine ou une disette de produits alimentaires (Note 253), du travail forcé ou obligatoire pour des travaux souterrains dans les mines (Note 254) et du travail forcé ou obligatoire exigé par des personnes ou des autorités auxquelles, aux termes de la convention, un tel pouvoir ne devrait pas être accordé (Note 255).
  371. 217. Comme la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations l'a fait observer en 1962, 1964 et 1968, en s'engageant "à supprimer le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible", les Etats qui ont ratifié la convention se sont interdit toute possibilité de recourir à de nouvelles formes de travail forcé ou obligatoire rentrant dans le champ d'application de la convention ou à des formes qui, si elles existaient au moment de l'entrée en vigueur de la convention pour le pays intéressé, ont été abolies dans l'intervalle (Note 256). En 1968, la commission a noté également que, compte tenu de cet effet de l'engagement découlant de la ratification, et aussi de la nature des formes de contrainte trouvées dans certaines lois existantes, relativement peu de pays liés par la convention étaient encore à même de se prévaloir des arrangements transitoires autorisés par cet instrument.
  372. 218. En 1997, la commission d'experts a observé que:
  373. Puisque la convention, adoptée en 1930, demande la suppression du travail forcé dans le plus bref délai possible, invoquer aujourd'hui (67 ans après l'adoption de la convention) qu'une certaine forme de travail forcé ou obligatoire est conforme à l'une des exigences de cet ensemble de dispositions revient à méconnaître la fonction transitoire de ces dispositions et n'est pas conforme à l'esprit de la convention.
  374. La commission estime que le recours à une forme de travail forcé ou obligatoire relevant, aux termes de l'article 2, du champ d'application de la convention ne saurait être justifié en invoquant le respect des articles 1, paragraphe 2, et 4 à 24, bien que les interdictions absolues figurant dans ces dispositions lient toujours les Etats ayant ratifié la convention (Note 257).
  375. La Commission d'enquête partage cet avis, compte tenu également du statut de l'abolition du travail forcé et obligatoire en droit international général (Note 258), en tant que norme impérative à laquelle aucune dérogation n'est admise.
  376. 10. Brève description du Myanmar
  377. 1) Présentation générale
  378. 219. Le Myanmar est situé en Asie du Sud-Est entre la Chine au nord et au nord-est, le Laos et la Thaïlande à l'est, la mer d'Andaman et la baie du Bengale au sud et le Bangladesh et l'Inde à l'ouest. Le pays est divisé en 14 régions administratives de premier ordre à savoir: sept Etats dont la population est en majorité non birmane, et sept divisions dont la majorité de la population est birmane (Note 259). Ces Etats et divisions sont eux-mêmes divisés en districts qui comprennent chacun plusieurs circonscriptions (en anglais: townships: régions administratives entourant une ville). Les circonscriptions sont subdivisées en arrondissement ruraux (en anglais: village tracts) et urbains (en anglais: wards) (Note 260). L'arrondissement rural comprend normalement plusieurs villages et il est désigné d'après le nom du principal de ces villages.
  379. 220. Selon une estimation du gouvernement portant sur les années 1996-97, le pays compte 47,6 millions d'habitants (Note 261), dont 26 pour cent seulement vivent dans les villes, et une population active de 18,8 millions de travailleurs (4,2 millions pour la main-d'oeuvre urbaine et 14,6 millions pour la main-d'oeuvre rurale). L'agriculture représente 63 pour cent de l'emploi total.
  380. 221. Le gouvernement reconnaît officiellement 135 groupes nationaux. Les Birmans représentent près des deux tiers de la population, les autres groupes principaux étant les Karen, les Shan, les Mon, les Rakhin, les Rohingya, les Chin, les Kachin et les Karenni (Note 262). L'importance numérique de ces différents groupes est controversée car aucun recensement détaillé n'a été fait depuis 1931 et les estimations actuelles varient considérablement (Note 263).
  381. 222. La principale religion du Myanmar est le bouddhisme. Il est pratiqué par la plupart des Birmans, mais il est également majoritaire chez plusieurs autres groupes ethniques (en particulier chez les Mon, les Rakhin, les Shan et chez de nombreux Karen). On trouve également des chrétiens et des animistes, la plupart du temps parmi les groupes ethniques non birmans; il y a aussi un nombre important de musulmans, notamment les Rohingyas et parmi d'autres populations le plus souvent originaires du sous-continent indien.
  382. 223. La monnaie du Myanmar est le kyat. Le taux de change officiel était en moyenne de 6,2 kyats pour un dollar en 1997 tandis que le taux le plus courant sur le marché libre était d'environ 250 kyats pour un dollar durant la même période (Note 264).
  383. 2) Aperçu historique
  384. 224. A l'issue des trois guerres anglo-birmanes qui se sont déroulées entre 1824 et 1885, les Britanniques ont pris le contrôle de la Birmanie. A partir de cette date et jusqu'en 1948, le pays a été administré comme faisant partie de l'Inde britannique, à l'exception d'une brève occupation par les Japonais au cours de la seconde guerre mondiale. En juillet 1947, Aung San, chef de la lutte pour l'indépendance de la Birmanie et Premier ministre présomptif de la Birmanie indépendante, a été assassiné. La première Constitution de la Birmanie a été adoptée en septembre 1947. Quelques mois plus tard, le 4 janvier 1948, la Birmanie a accédé à l'indépendance avec U Nu comme premier chef d'Etat.
  385. 225. Une brève période de gouvernement civil a suivi mais qui a été fortement perturbée par des insurrections ethniques et des désaccords au sein du gouvernement. En mars 1962, un coup d'Etat militaire a porté au pouvoir le Général Ne Win. Un conseil révolutionnaire a été constitué sous la présidence du Général Ne Win et a investi celui-ci des pleins pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif. Le Parti du programme socialiste birman (BSPP) est devenu le parti officiel du nouveau gouvernement. C'est en janvier 1974 qu'une nouvelle Constitution a été officiellement adoptée pour remplacer la gestion par décrets du Conseil révolutionnaire.
  386. 226. En 1988, le mécontentement général suscité par la stagnation économique et de la suppression de la liberté politique s'est développé en un mouvement national de masse. Aung San Suu Kyi, fille de l'ancien leader indépendantiste Aung San, a été portée à la tête de ce mouvement. En juillet 1988, le Général Ne Win a démissionné de ses fonctions de président du BSPP mais les protestations n'ont cessé de grandir. Le 8 août 1988, un ordre de grève générale a été lancé dans tout le pays par suite duquel la troupe a reçu l'ordre d'ouvrir le feu sur la foule des manifestants; des milliers d'entre eux ont été tués ou blessés. Les démonstrations se sont poursuivies malgré tout et, le 18 septembre 1988, un coup d'Etat militaire a aboli tous les organes de l'Etat et a constitué à leur place le Conseil d'Etat pour le rétablissement de l'ordre public (SLORC -- State Law and Order Restoration Council) (Note 265). La Constitution de 1974 a été suspendue. Les démonstrations ont été violemment réprimées mais le SLORC a promis que des élections auraient lieu et que des partis politiques seraient autorisés à s'enregistrer.
  387. 227. Des élections ont eu lieu en mai 1988. Plus de 200 partis ont été enregistrés dont les plus importants étaient la Ligue nationale pour la démocratie (NLD -- National League for Democracy), dont la secrétaire générale était Aung San Suu Kyi, et le Parti de l'unité nationale (NUP -- National Unity Party) des militaires. Les élections se sont déroulées dans des conditions très difficiles. Plusieurs leaders politiques ont été arrêtés, y compris Aung San Suu Kyi qui a été assignée à résidence au mois de juillet 1989. Malgré tout, la NLD a été très largement victorieuse avec 60 pour cent des votes populaires et plus de 80 pour cent des 485 sièges du Parlement. Le NUP n'a obtenu que 10 sièges.
  388. 228. Le SLORC n'a pas accepté ces résultats et a refusé de convoquer la nouvelle assemblée, déclarant que les élections n'avaient pour seul objectif que d'élire les représentants à une convention nationale chargée de rédiger une nouvelle Constitution. Cette convention nationale s'est réunie pour la première fois au mois de janvier 1993. Toutefois, 15 pour cent seulement de ses membres étaient des représentants élus. A la suite du boycott ordonné par la NLD et l'expulsion de ce parti qui a suivi, 3 pour cent seulement des membres de la convention ont été élus lors de l'élection de 1990. La convention ne s'est plus réunie depuis mars 1996 et le Myanmar n'a toujours pas de Constitution.
  389. 229. Le 15 novembre 1997, le SLORC s'est dissous lui-même et a désigné le nouveau Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC -- State Peace and Development Council), composé de 19 membres (Note 266). Les quatre membres principaux du SLORC ont conservé leur poste et les postes restants ont été donnés à d'autres officiers plus jeunes, et notamment aux chefs militaires des 12 commandements militaires régionaux (voir paragraphe 232 ci-dessous). Les anciens membres du SLORC ont été écartés et ont été faits membres d'un conseil consultatif qui a ensuite été dissous (Note 267).
  390. 3) Structure administrative
  391. 230. A son arrivée au pouvoir en 1988, le SLORC a créé des Conseils régionaux pour le rétablissement de l'ordre public (LORC) aux niveaux de l'Etat/Division, du district, de la circonscription administrative et de l'arrondissement urbain ou rural. Lorsque le SLORC a été remplacé par le SPDC, ces LORC régionaux ont été rebaptisés Conseils pour la paix et le développement (PDC) (Note 268).
  392. 231. Depuis 1988, le gouvernement du Myanmar a entrepris de développer et moderniser les forces armées (Tatmadaw) dont les effectifs sont passés de 186 000 hommes au milieu de 1988 (Note 269) à 429 000 au milieu de 1997 (Note 270). La majorité de ces forces armées sont des militaires et elles comptent un effectif de près de 400 000 hommes (Note 271).
  393. 232. L'armée du Myanmar est divisée en 12 commandements régionaux dont relèvent en tout 145 bataillons d'infanterie (les KaLaYa, ou BI) (Note 272); et 10 divisions mobiles d'infanterie légère dont relèvent encore, en tout, 100 bataillons d'infanterie (les KaMaYa, ou BIL) (Note 273). Il y a aussi un petit nombre de bataillons spécialisés et plusieurs unités de renseignement (Military Intelligence--MI) (Note 274).
  394. 233. En plus de la Tatmadaw, les forces militaires du gouvernement comprennent la milice du peuple et la NaSaKa, une force de sécurité des frontières créée en 1992 qui comprend le Département de l'immigration et de la main-d'oeuvre et des unités de la police, des Lone Htein (Troupes d'intervention anti-émeutes), des services de renseignement militaires et des douanes; elle n'existe que dans les circonscriptions de Buthidaung et de Maungdaw (bien que les organismes dont elle regroupe des unités fonctionnent dans tout le Myanmar); elle est placée sous les ordres du Commandement occidental de l'armée basé à Sittway (Akyab) (Note 275).
  395. 234. Une organisation ethnique armée, la Democratic Kayin Buddhist Army (DKBA), s'est alliée au gouvernement peu après sa constitution en décembre 1994 et fait office de milice gouvernementale dans sa zone d'influence de l'Etat Kayin.
  396. 235. Note à propos des noms. En juin 1989, le gouvernement a changé le nom du pays remplaçant "Union de Birmanie" par "Union du Myanmar". L'orthographe anglaise de plusieurs autres noms de lieux a aussi été modifiée ultérieurement (Note 276). Dans son rapport, la commission utilise les orthographes révisées mais elle donne également d'autres noms à la suite du nom officiel, lorsqu'elle le juge nécessaire pour éviter des confusions quant au lieu dont il est question. En ce qui concerne les noms utilisés pour les différents groupes ethniques du pays, la commission a décidé de suivre l'usage des personnes concernées avec lesquelles elle était en contact.
  397. 4) Les forces d'opposition
  398. 236. Depuis l'indépendance, de nombreux groupes armés se sont constitués pour s'opposer au gouvernement, dont certains ont réussi à plusieurs reprises à contrôler de vastes régions du territoire. Ainsi, des cessez-le-feu ont été acceptés en 1989 par l'Armée unie de l'Etat Wa (UWSA -- United Wa State Army) et l'Armée de l'Etat shan (SSA -- Shan State Army), en 1994 par l'Organisation pour l'indépendance Kachin (KIO -- Kachin Independance Organization), en 1995 par le Nouveau parti de l'Etat Mon (NMSP -- New Mon State Party), et en 1996 par l'armée Mon Tai du baron de la drogue Khun Sa. Parmi les groupes qui sont toujours actifs et n'ont pas encore conclu de cessez-le-feu, on peut citer l'Union nationale Karen (KNU -- Karen National Union) qui existe depuis 1940, le Front démocratique des étudiants de toute la Birmanie (ABSDF -- All Burma Students' Democratic Front), le Front national Chin (CNF -- Chin National Front) et l'Organisation de solidarité Rohingya (RSO -- Rohingya Solidarity Organization). En outre, il a été annoncé en janvier 1998 dans l'Etat Shan que, suite à un accord conclu en septembre 1997, l'Armée révolutionnaire unie Shan (SURA -- Shan United Revolutionary Army) s'était jointe à deux groupes ayant conclu des cessez-le-feu avec le gouvernement, l'armée de l'Etat Shan (SSA) et l'Armée nationale de l'Etat Shan (SSNA -- Shan State National Army), pour former une "nouvelle" armée de l'Etat Shan (encore désignée par le sigle SSA); cette nouvelle organisation se trouve actuellement en opposition armée au gouvernement (Note 277).
  399. 11. Législation du Myanmar intéressant l'affaire
  400. 1) Réquisition de main-d'oeuvre en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes ainsi que des ordonnances d'exécution et directives ultérieures
  401. 237. Après avoir déclaré pendant de nombreuses années que les dispositions de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, qui autorisent les chefs d'arrondissement et les policiers ruraux à imposer du travail obligatoire aux résidents de la classe laborieuse, étaient devenues obsolètes et n'étaient plus appliquées (Note 278), le gouvernement a indiqué, en octobre 1993, que "le recours au travail volontaire, dont on allègue qu'il s'agit de travail obligatoire ou forcé, est limité aux cas de nécessité urgente, conformément aux dispositions suivantes: a) article 8(1)(g)(n) et (o) de la loi de 1908 sur les villages; b) article 9(b) de la loi sur les villes" (Note 279).
  402. 238. Les dispositions pertinentes de l'article 8(1) de la loi de 1908 sur les villages, telles que soumises par le gouvernement (Note 280), sont rédigées comme suit:
  403. Chaque chef est tenu d'exécuter les obligations publiques suivantes:
  404. g) rassembler et fournir, sur réception du paiement correspondant aux taux fixés par le commissaire adjoint, des guides, des messagers, des porteurs, des approvisionnements en nourriture, des voitures et moyens de transport pour les troupes ou forces de police qui sont postées dans l'arrondissement rural ou à proximité ou qui le traversent ainsi que pour tout agent du gouvernement en déplacement officiel; il est entendu qu'aucun chef ne doit réquisitionner pour un service personnel les résidents de ces arrondissements qui ne font pas partie des classes laborieuses et ne sont pas habitués à faire le travail qu'il peut être nécessaire d'effectuer;
  405. n) aider généralement tous les agents gouvernementaux dans l'exécution de leurs obligations publiques; et
  406. o) prendre généralement toutes mesures et dispositions exigées par les besoins du village.
  407. L'article 7(1)(m) de la loi de 1907 sur les villes correspond à l'article 8(1)(n) de la loi de 1908 sur les villages et il est aussi précédé d'une réserve selon laquelle "aucun chef ne doit réquisitionner pour un service personnel les résidents de ces arrondissements qui ne font pas partie des classes laborieuses et ne sont pas habitués à faire le travail qu'il peut être nécessaire d'effectuer".
  408. 239. Aux termes de l'article 11(d) de la loi sur les villages:
  409. Toute personne résidant dans un arrondissement rural est tenue d'exécuter les obligations publiques suivantes:
  410. d) sur réquisition du chef ou d'un policier rural, aider celui-ci dans l'exécution de ses obligations prescrites par les articles 7 et 8 de la loi et ses règlements d'application.
  411. Explication: Une réquisition effectuée en vertu de l'alinéa d) peut être soit générale, soit adressée à une personne.
  412. En vertu de l'article 12 de la même loi:
  413. Si une personne résidant dans un arrondissement rural refuse ou néglige d'exécuter les obligations publiques qui lui sont imposées par la présente loi ou par tout règlement d'application, et en l'absence d'une excuse acceptable qu'il lui incombe de prouver, elle est passible:
  414. i) par décision du chef, d'un amende de...; ou
  415. ii) par décision du comité de village, au cas où l'affaire est renvoyée à celui-ci par le chef, d'une amende de..., ou d'une peine de prison d'un maximum de quarante-huit heures en un lieu fixé par le commissaire adjoint à cet effet, ou des deux; ou
  416. iii) sur condamnation par un magistrat, d'une amende de..., ou d'une peine de prison d'un maximum d'un mois, ou des deux.
  417. 240. De même, l'article 9(b) de la loi de 1907 sur les villes dispose que:
  418. Les personnes résidant dans un arrondissement rural sont tenues d'exécuter les obligations publiques suivantes: (b) sur réquisition générale ou individuelle du chef, aider celui-ci dans l'exécution de ses obligations publiques.
  419. L'article 9A de cette loi dispose que:
  420. Si une personne résidant dans un arrondissement urbain refuse ou néglige d'exécuter les obligations publiques qui lui sont imposées par la présente loi ou par tout règlement d'application, et en l'absence d'une excuse acceptable qu'il lui incombe de prouver, elle est passible, sur condamnation par un magistrat, d'une amende de...
  421. 241. La commission note l'indication donnée par Daw Aung San Suu Kyi (Note 281) selon laquelle des circonstances telles que d'avoir à moissonner, ou devoir travailler au champ, auraient été acceptées comme une "excuse acceptable" aux termes de l'article 12 de la loi sur les villages, dans sa version originale, telle que reproduite ci-dessus, mais qu'aujourd'hui cette disposition traduite en birman ne contient plus le membre de phrase "en l'absence d'une excuse acceptable", si bien que "en vertu de cette loi, les autorités ont le pouvoir de contraindre la population des villages à faire tout ce qu'il leur plaît d'imposer". La commission n'avait pas à sa disposition le texte birman de la loi sur les villages, ni celui de la loi sur les villes (dont le texte anglais faisait lui aussi référence à l'absence d'une excuse acceptable) (Note 282).
  422. 242. En ce qui concerne l'étendue des obligations que chaque chef est tenu de remplir et pour l'exécution desquelles les résidents sont tenus de l'assister sur réquisition de sa part (ou de celle d'un policier rural), l'article 8(1)(g) de la loi sur les villages se réfère expressément à l'obligation de fournir des guides, des messagers, des porteurs, etc., et l'article 8(1)(n) et (o) de la même loi ainsi que l'article 9(b) de la loi sur les villes, également invoqués par le gouvernement (Note 283) en 1993, contiennent des références générales à des "obligations publiques" et à "toutes mesures exigées par les besoins du village". A cet égard, l'attention de la commission a été attirée sur le fait que la disposition relative à la réquisition de "travailleurs pour la construction ou la réparation de routes, berges ou autres travaux publics", que prévoyait à l'origine l'article 8(1)(h) de la loi de 1908 sur les villages (Note 284), avait été expressément éliminée par la loi IV de 1924 de la Birmanie (Note 285).
  423. 243. Des instructions émises ultérieurement concernant l'application de la loi sur les villages indiquent, au paragraphe 76, que l'alinéa n) de l'article 8(1) de la loi sur les villages:
  424. ... est libellé dans des termes très larges et doit être appliqué avec modération. Cet alinéa ne couvre pas la réquisition de coolies pour l'exécution de travaux forestiers et d'autres travaux départementaux. Des services obtenus de façon légitime en vertu de l'alinéa n) pour ce qui constitue en fait des fins privées, par exemple la réparation du toit d'un zayat ou le nettoyage d'un terrain de campement ou le port d'une lettre (sauf d'un village à un autre conformément à la coutume du pays), devraient être rémunérés (Note 286).
  425. En vertu du paragraphe 78 des mêmes instructions (Note 287):
  426. Les commissaires adjoints doivent avoir présent à l'esprit que les larges pouvoirs qui leur sont conférés ainsi qu'aux fonctionnaires de circonscription et chefs par la loi sur les villages doivent être exercés avec jugement et considération; et que les populations de la Birmanie, et en particulier de la Haute Birmanie, sont portées à se soumettre sans trop se plaindre à des tracas et à des extorsions qui en réalité sont extrêmement pénibles. Ils doivent se souvenir qu'il est de leur devoir de protéger les populations contre ce genre de traitement, et de veiller à ce que leurs subordonnés sont contrôlés et n'abusent de leur position et du pouvoir qu'ils ont d'imposer harcèlements et désagréments aux résidents des arrondissements dont ils ont la charge.
  427. 244. Le paragraphe 70 des mêmes instructions (Note 288) souligne à propos de l'alinéa g) de l'article 8 de la loi sur les villages que "tous les approvisionnements qui impliquent un coût en argent ou en main-d'oeuvre et tous les transports doivent être payés à plein tarif".
  428. 245. Plus d'un demi-siècle plus tard, les "misères et souffrances causées à la population locale" et la non-rémunération du travail obtenu "des populations locales pour l'exécution de projets de développement national tels que la construction de routes, de ponts et de voies ferrées, ainsi que la construction de barrages et de remblais" (c'est-à-dire de projets pour lesquels la réquisition de main-d'oeuvre en vertu de l'ancien article 8(1)(h) de la loi sur les villages avait été totalement abolie par la loi IV de 1924 de la Birmanie) (Note 289) ont donné lieu à la préoccupation exprimée dans un décret daté du 2 juin 1995, adressé par le président du SLORC aux LORCs d'Etat et de division et portant "interdiction des contributions de travail non rémunéré dans les projets de développement national" (Note 290). Bien que marqué "secret", ce décret a, selon le gouvernement (Note 291), "la pleine force légale et déploie ses effets juridiques en droit administratif". Le décret ne fait pas référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. Il note, au paragraphe 1, qu'"il a été rapporté qu'en obtenant de la main-d'oeuvre auprès des populations locales dans l'exécution des projets de développement national, tels que la construction de routes, de ponts et de voies ferrées, ainsi que la construction de barrages et de digues, la pratique est qu'elles doivent fournir leur travail sans rémunération". Tout en observant (au paragraphe 3) que "causer misères et souffrances à la population des zones rurales en raison du travail dit forcé et non rémunéré est hautement contre-indiqué", le décret ne remet pas en question la réquisition de main-d'oeuvre pour les projets de développement national, mais souligne (au paragraphe 2) qu'"il est impératif qu'en obtenant la main-d'oeuvre nécessaire auprès de la population locale il faut lui payer sa juste part".
  429. 246. Une directive (no 82) du 27 avril 1995 émise par le président du SLORC à l'intention du ministère de l'Agriculture, du président du LORC de la division de Yangon et du commandant du quartier général de la division d'infanterie légère no 11, visant à "mettre un terme à l'obtention de travail non rémunéré de la population locale pour des projets d'irrigation", déclarait que:
  430. 1. Il a été rapporté que certains membres des populations locales sont extrêmement préoccupées par l'obligation imposée à chaque famille de participer au creusement d'un certain nombre de puits pour effectuer des fossés et des tranchées dans le cadre général de la construction de barrages dans la division de Yangon.
  431. 2. Il est ordonné par la présente directive d'engager des travailleurs rémunérés pour l'exécution de ces projets et de faire cesser la pratique consistant à se procurer de la main-d'oeuvre auprès de la population locale sans compensation monétaire.
  432. 3. Ce faisant, il appartient au ministère de l'Agriculture de supporter les dépenses qui en résultent.
  433. Egalement marquée "secret", cette directive a été soumise au Rapporteur spécial des Nations Unies (Note 292).
  434. 247. Aux termes du paragraphe 72 des instructions concernant l'application de la loi sur les villages:
  435. Au cas où de la main-d'oeuvre est réquisitionnée en vertu des dispositions de l'article 11(d) lu conjointement avec l'article 8(1)(g) de la loi sur les villages, le gouvernement accepte l'obligation de verser réparation pour toute blessure accidentelle ou toute maladie survenant à cause ou dans le cadre de l'emploi des travailleurs. Les conditions d'octroi de cette réparation seront semblables à celles que prévoit la loi sur l'indemnisation des travailleurs... (Note 293).
  436. 248. Bien que le gouvernement ait indiqué que la loi sur les villages et la loi sur les villes restent en vigueur, il n'a pas précisé le statut actuel des instructions concernant l'application de la loi sur les villages. Toutefois, il a déclaré à plusieurs reprises que les porteurs blessés étaient indemnisés conformément à la loi en vigueur (Note 294).
  437. 2) Restrictions à la liberté de mouvement et à la citoyenneté
  438. 249. Lorsque du travail obligatoire peut être imposé aux personnes résidant dans un arrondissement rural ou urbain (Note 295), les restrictions concernant la liberté de mouvement de ces habitants ont une incidence sur leur sujétion à ce travail obligatoire. La commission a reçu des indications selon lesquelles non seulement tous les mouvements sont soumis à des obligations de déclaration et chaque habitant est tenu de déclarer aux autorités locales les invités passant la nuit chez lui (Note 296), mais aussi, et qui plus est, la liberté de mouvement est limitée aux seuls habitants détenteurs de documents d'identité les identifiant comme citoyens.
  439. 250. En vertu de l'article 10 de la loi sur les étrangers, aucun étranger ne peut se déplacer à travers le Myanmar sans autorisation; en vertu de l'article 12, cette autorisation doit spécifier le nom de la personne à laquelle elle est délivrée, la nation à laquelle elle appartient, le ou les districts par lesquels elle est autorisée à passer ou les limites dans lesquelles elle est autorisée à se déplacer, ainsi que la période (le cas échéant) pendant laquelle cette autorisation doit produire son effet (Note 297). En vertu de l'article 13, l'autorisation peut être délivrée avec les réserves que le fonctionnaire qui la délivre juge nécessaires, et elle peut être révoquée à tout moment par ce fonctionnaire.
  440. 251. Dans l'Etat de Rakhine, un groupe important, les Rohingyas se sont vus progressivement dénier le statut de citoyen.
  441. 252. L'article 11 de la Constitution de l'Union birmane du 24 septembre 1947 disposait:
  442. "Est citoyen de l'Union:
  443. i) toute personne dont le père et la mère appartiennent ou ont appartenu à l'une des races autochtones de la Birmanie;
  444. ii) toute personne née dans un des territoires de l'Union et dont au moins un des grands-parents appartient ou a appartenu à l'une des races autochtones de la Birmanie;
  445. iii) toute personne née dans un des territoires faisant partie de l'Union et dont le père et la mère sont citoyens de l'Union ou l'auraient été s'ils n'étaient décédés avant l'entrée en vigueur de la présente Constitution;
  446. iv) toute personne née dans l'un des territoires qui, à l'époque de sa naissance, faisaient partie des dominions de Sa Majesté britannique, et qui a résidé dans l'un des territoires de l'Union pendant une période d'au moins huit ans au cours des dix années qui ont immédiatement précédé soit la date d'entrée en vigueur de la présente Constitution, soit le 1er janvier 1942, et qui, se proposant de résider dans l'Union de façon permanente, déclare opter pour la nationalité de l'Union dans les formes et les délais prescrits par la loi" (Note 298).
  447. Nonobstant les dispositions de l'article 11 de la Constitution de 1947, les Rohingyas n'ont pas été reconnus comme citoyens par le gouvernement, sauf ceux qui ont pu établir leur citoyenneté conformément à l'alinéa iv). Cependant, l'article 12 de la Constitution disposait:
  448. Aucune disposition de l'article 11 ne peut porter atteinte aux pouvoirs du Parlement d'adopter les lois qu'il juge appropriées en ce qui concerne la qualité de citoyen ou d'étranger; ces lois pourront prévoir l'admission de nouvelles catégories de citoyens ou le retrait de la nationalité à l'une quelconque des catégories existantes (Note 299).
  449. En 1948 a été adoptée une nouvelle loi sur la citoyenneté qui restreignait la portée de l'article 11, alinéa iv), de la Constitution à toute personne "dont les ancêtres, pendant deux générations au moins, ont tous fait de l'un des territoires faisant partie de l'Union leur résidence permanente et dont les parents, ainsi que la personne elle-même, sont nés dans l'un de ces territoires" (Note 300).
  450. 253. Une autre loi sur la citoyenneté a été adoptée en 1982, abrogeant celle de 1948 et définissant trois catégories de citoyens: les "citoyens", les "citoyens par association" et les "citoyens par naturalisation". Les "citoyens" se limitaient aux "nationaux tels que les Kachin, Kayah, Karen, Chin, Birman, Mon, Rakhine ou Shan ainsi qu'aux groupes ethniques qui se sont établis sur l'un des territoires faisant partie de l'Union pour y résider de manière permanente avant l'an 1185 de l'ère du Bouddha, c'est-à-dire l'an 1823 de l'ère chrétienne". Par la suite, une liste des groupes ethniques reconnus a été publiée, incluant les Kaman et les Zerbadee mais non les Rohingyas. Une personne ne pouvant faire la preuve de la résidence dans le pays de tous ses ancêtres avant l'an 1823 de notre ère pouvait être classée dans la catégorie des "citoyens par association" si l'un de ses grands-parents ou de ses ancêtres d'avant 1823 était citoyen d'un autre pays. Les personnes qui avaient satisfait aux conditions requises pour acquérir la citoyenneté en vertu de la loi de 1948 mais qui ne satisfaisaient plus aux conditions prévues par la nouvelle loi (c'est-à-dire les personnes dont les ancêtres sont venus en Birmanie deux générations avant 1948) ont été classées dans les "citoyens par association" dans la mesure où elles avaient demandé la citoyenneté en 1948. Cependant, en vertu de la nouvelle loi, la demande de statut de "citoyen par association" devait être faite dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, après quoi toutes les personnes ayant jusque-là le statut d'étranger ou d'apatride ne pouvaient que demander leur naturalisation (Note 301).
  451. 254. En vertu de la nouvelle loi, peu de Rohingyas peuvent prétendre au statut de "citoyen" et beaucoup ne peuvent prétendre ni à celui de "citoyen par association" ni à celui de "citoyen par naturalisation" en raison non seulement de leur histoire personnelle, mais encore de la difficulté de fournir des preuves de leur lignage. Ainsi, la plupart des Rohingyas n'ont que le statut de résidents étrangers (Note 302). Ceci a été confirmé par les témoignages donnés par des témoins Rohingyas à la commission, lesquels ont déclaré qu'ils avaient besoin de demander une autorisation chaque fois qu'ils devaient quitter leur village (Note 303).
  452. 3) Service militaire obligatoire et conscription forcée
  453. 255. Il existe une loi de 1959 sur la milice populaire, qui a été publiée au Journal officiel. Aux termes de cette loi (Note 304), les nationaux du Myanmar peuvent être appelés à un service à plein temps ou à temps partiel dans les forces armées. Aux termes de l'article 3 a), alinéas 1 et 2, tous les hommes de 18 à 35 ans et toutes les femmes de 18 à 27 ans peuvent être appelés à un service à plein temps dans les forces armées pour une période non inférieure à six mois et non supérieure à 24; aux termes des alinéas 4 et 5, les médecins, ingénieurs et personnes possédant toutes autres qualifications peuvent être appelés à un service militaire d'une durée de 24 mois entre l'âge de 27 et 35 ans dans le cas des femmes et de 18 mois entre l'âge de 35 et 56 ans dans le cas des hommes (Note 305). Aux termes de l'article 3 b), tous les hommes de 18 à 46 ans et toutes les femmes de 18 à 35 ans peuvent être appelés pour un service à temps partiel, c'est-à-dire pour un service n'excédant pas au total 30 jours par an, pouvant être majoré de sept jours dans certains cas.
  454. 256. La loi sur la milice populaire, telle qu'adoptée en 1959, ne contient aucune disposition en vertu de laquelle un travail ou service doit être imposé pour des tâches à caractère non militaire (Note 306).
  455. 257. Aux termes de l'article 1, alinéa 2), de la loi sur les milices populaires, "la présente loi entre en vigueur à une date devant être annoncée par le gouvernement". La commission ignore si une telle annonce a été faite et si la loi est entrée en vigueur (Note 307).
  456. 4) Sanctions pour imposition illégale de travail forcé ou obligatoire
  457. 258. Aux termes de l'article 374 du Code pénal (Note 308), celui qui contraint illégalement une personne de travailler contre son gré sera puni d'une peine d'emprisonnement simple ou rigoureux d'une durée pouvant atteindre un an, ou d'une amende, ou encore des deux peines.
  458. 12. Conclusions de la commission concernant les faits (Note 309)
  459. A. Recevabilité et valeur probante des éléments de preuve testimoniale et documentaire
  460. 259. Outre les témoignages entendus au cours des audiences de novembre 1997 et de la visite de la commission dans la région en janvier 1998, 274 documents, totalisant près de 10 000 pages dans les registres officiels, ont été communiqués à la commission depuis le début de la procédure. Ces informations documentaires ont été transmises par les parties et par d'autres sources sollicitées (Note 310) ainsi que par des témoins et d'autres personnes au cours des audiences (Note 311) ou pendant la visite de la commission dans la région (Note 312). Ces documents ont été soigneusement répertoriés par le secrétariat et indexés selon la date à laquelle ils ont été reçus par la commission; les listes des documents transmis à la commission figurent aux annexes IV, V et VI du présent rapport (Note 313).
  461. 260. La commission dispose ainsi d'éléments de preuve soumis aussi bien sous forme documentaire que testimoniale. Bien que la commission, dans son effort pour rassembler une information complète et détaillée, privilégie le contact direct avec un témoin qui dit avoir vécu ou observé le fait à prouver, elle estime néanmoins que la volumineuse documentation qui lui a été communiquée constitue une source importante d'informations qui peut aussi servir à appuyer ou réfuter d'une manière ou d'une autre les allégations contenues dans la plainte. La commission rappelle qu'il n'existe pas de règle en droit international qui restreigne l'admissibilité des moyens de preuve documentaire ou testimoniale. En fait, c'est la souplesse qui est de règle devant la Cour internationale de Justice; les tribunaux internationaux ne sont pas liés par des règles de preuve aussi strictes que celles des tribunaux nationaux dont beaucoup ne conviennent pas à des litiges internationaux (Note 314). Dans cet esprit, le règlement de la Cour internationale de Justice vise à rendre la procédure aussi simple et expéditive que possible et ses dispositions "ont trait au respect des délais et autres questions qui ont pour but "d'assurer une bonne administration de la justice, dans le respect de l'égalité des parties'. Elles ne concernent pas les types d'éléments de preuve qui peuvent être jugés recevables ni les principes sur la base desquels les éléments de preuve sont appréciés par la Cour" (Note 315).
  462. 261. De plus, le Conseil d'administration du BIT a laissé toute liberté à la commission de fixer ses propres règles en ce qui concerne l'admissibilité des éléments de preuve dans la mesure où elles sont conformes aux dispositions de la Constitution de l'OIT. Dès lors, en adoptant ses propres règles de procédure, la commission a suivi la coutume établie par les neuf commissions d'enquête qui l'ont précédée. Dans ces conditions, la commission considère que les modes écrit et oral de preuve doivent être admis.
  463. 262. Eléments de preuve testimoniale. La préférence de la commission va avant tout au témoignage oral direct d'un temoin qui dit avoir vécu ou constaté les faits. Pour elle, c'est ce type de témoignage qui a la valeur probante la plus élevée.
  464. 263. Au cours de l'enquête, des témoignages ont été donnés par des témoins à Genève, et plus tard dans les lieux respectivement décrits aux chapitres 2 et 5 du présent rapport.
  465. 264. En ce qui concerne les preuves recueillies par la commission avec l'aide décrite au paragraphe 81 ci-dessus, la commission les considère comme des témoignages oraux directs dotés d'une valeur probante élevée en raison des conditions dans lesquelles ils ont été reçus, mais évidemment moins élevée que ceux que la commission a elle-même entendus.
  466. 265. Eléments de preuve documentaire. Les éléments de preuve documentaire qui ont été soumis à la commission et qu'elle a admis peuvent être classés en plusieurs catégories:
  467. 1) les déclarations écrites de personnes qui ont elles-mêmes reçu les déclarations d'autres personnes qui ont vécu ou observé les faits en question ("témoignages secondaires") et qui ont été interrogées devant la commission. Les déclarations présentées comprennent tant des informations statistiques, historiques et des données de recherche que des analyses;
  468. 2) les communications écrites contenant les témoignages secondaires de personnes disant avoir vécu ou observé les faits en question, ainsi que celles qui contiennent des données statistiques ou des analyses historiques ou matérielles. Toutefois, les personnes ayant fourni cette documentation n'ont pas été entendues par la commission;
  469. 3) les communications écrites des parties, personnes ou organisations qui contiennent des affirmations, une documentation ou des analyses statistiques, historiques et de recherche, mais pas de témoignages secondaires. Certaines des personnes qui ont fourni cette documentation ont été entendues par la commission et d'autres pas;
  470. 4) d'autres documents tels que a) des originaux ou des copies d'ordres émanant des autorités militaires, b) des bandes vidéo et des photos, et c) des coupures de presse.
  471. 266. D'une façon générale, cette documentation a été considérée par la commission comme moins probante sur les faits consignés que les éléments de preuve testimoniale. Par ailleurs, certaines catégories de documents étaient, à première vue, eux-mêmes moins probants que d'autres.
  472. 267. Pour ce qui est de la documentation de la catégorie 1, elle était certainement admissible et avait, à première vue, une valeur probante plus grande que les autres catégories de documents, à l'exception de la catégorie 4 a). Les personnes ayant fourni les déclarations écrites ont également témoigné sur la façon dont elles ont recueilli les témoignages secondaires et les conditions dans lesquelles ces témoignages leur ont été donnés. En l'occurrence, ces documents auraient pu être décrits comme étant des éléments de preuve testimoniale mais, par commodité, ils ont été classés comme éléments de preuve documentaire.
  473. 268. En ce qui concerne la documentation de la catégorie 2, elle a aussi été considérée comme admissible mais comme ayant, à première vue, une valeur probante moins grande que celle de la catégorie 1 car la commission n'a pas eu la possibilité de s'assurer du caractère volontaire et véridique de ces déclarations.
  474. 269. Pour la documentation de la catégorie 3, elle est de nature plus générale que spécifique mais a fourni un contexte fort utile lorsqu'elle pouvait être corroborée par d'autres documents.
  475. 270. Quant à la documentation de la catégorie 4, les documents rassemblés sous a) étant les ordres des autorités militaires, ils ont une très grande valeur probante sur les questions considérées. Pour les documents groupés sous b), sauf lorsque leur contenu faisait l'objet de témoignages explicatifs, leur valeur probante est faible. Les documents classés sous c) consistent pour la plupart en publications du gouvernement telles que The New Light of Myanmar ou son prédécesseur, le Working People's Daily, et reflètent les positions du gouvernement.
  476. 271. Pour parvenir aux conclusions quant aux faits formulés à la partie B, la commission s'est fondée sur la documentation figurant dans les quatre catégories décrites ci-dessus. Ces documents font apparaître le contexte et les lignes de conduite générales.
  477. 272. Pour parvenir aux conclusions quant aux faits formulés à la partie C, la commission s'est de nouveau fondée sur les mêmes documents que pour la partie B et a signalé ceux de ces documents relevant de la partie C. Cette partie fait apparaître elle aussi les lignes de conduite générales. En outre, dans la partie C, la commission s'est fondée sur des éléments de preuve testimoniale et a identifié ces documents dans la partie C. Ces éléments de preuve testimoniale confirment les lignes de conduite qui se dégageaient des éléments de preuve documentaire.
  478. 273. Cette division de la documentation avait pour but de replacer les éléments de preuve testimoniale dans le contexte général des pratiques prévalant au Myanmar, mais aussi d'isoler ces preuves qui présentent pour la commission la plus grande valeur probatoire.
  479. B. Ligne de conduite générale des autorités du Myanmar
  480. 274. Les informations fournies à la commission montrent que les autorités du Myanmar, y compris l'administration locale et régionale, l'armée et les différentes milices, ont forcé la population du Myanmar à accomplir toute une série de tâches. Hommes, femmes et enfants, dont certains d'un très jeune âge, ont été mis de force au travail. Les travailleurs n'ont été ni payés ni indemnisés de quelque manière que ce soit pour ce travail, si ce n'est dans quelques cas exceptionnels, et ils ont très souvent été victimes de diverses formes de sévices verbaux et physiques pouvant aller jusqu'au viol ou à la mort. Dans leur grande majorité, les informations fournies portent sur la période qui s'est écoulée depuis 1988, année au cours de laquelle le Conseil pour le rétablissement de l'ordre public (SLORC) est arrivé au pouvoir. Bien que des informations indiquent que le recours au travail forcé à toutes les fins examinées, datent d'au moins de 1988, l'utilisation du travail forcé pour les travaux d'infrastructures paraît avoir été beaucoup moins fréquente avant 1992. Dans les paragraphes qui suivent, un certain nombre d'indications seront données sur la gamme des objectifs pour lesquels de la main-d'oeuvre a été réquisitionnée, tel qu'il ressort des différents documents et témoignages d'experts fournis à la commission.
  481. 275. Les informations fournies indiquent que les forces armées ainsi que les différentes milices du Myanmar ont fait appel à des civils de façon systématique et généralisée pour qu'ils leur fournissent un appui logistique. Le plus souvent, ces porteurs étaient utilisés pour transporter toute une variété de matériels et d'équipements. Par rapport aux autres formes de travail obligatoire, le traitement imposé aux porteurs, surtout durant les opérations militaires, a été particulièrement brutal. Ces porteurs ont également été exposés au danger en cas de combats (Note 316).
  482. 276. En plus des services de portage fournis aux forces armées, dans tout le pays, les habitants des villages et dans une moindre mesure les habitants des villes, ont été contraints d'ériger et de réparer des camps militaires et de fournir à ces camps une main-d'oeuvre en permanence. Un certain nombre de villageois ont dû rester de garde dans ces camps ou servir de messagers. Les villageois ont dû également fournir les matériaux nécessaires pour la construction et la réparation des camps, au nombre desquels il faut compter les camps de certaines milices, telles que l'Armée bouddhiste démocratique Kayind (DKBA) (Note 317).
  483. 277. La commission a également été informée de toute une variété d'autres tâches pour lesquelles, dans tout le Myanmar, les habitants ont été réquisitionnés par les militaires notamment pour servir de guides, monter la garde ou détecter les mines. Il semble que des personnes ont également été utilisées comme boucliers humains, en ce sens qu'elles étaient envoyées à l'avant des troupes pour attirer le feu ennemi, ou faire exploser les mines ou comme otages pour empêcher que l'on attaque les colonnes ou les camps militaires. Ceci a eu lieu le plus souvent dans le contexte du portage mais s'est également produit indépendamment. En outre, les propriétaires de véhicules ont été régulièrement tenus de les mettre à disposition des militaires (Note 318).
  484. 278. La question de la conscription forcée dans la Tatmadaw et dans différentes milices a également été portée à l'attention de la commission. Dans certains cas, il semble que ces recrues ont été réquisitionnées arbitrairement sans aucun lien avec la législation sur le service militaire obligatoire et que parmi elles, on comptait des mineurs (Note 319).
  485. 279. Des informations ont également été reçues sur l'utilisation de civils pour toute une série de projets entrepris par les autorités du Myanmar, et très souvent par les autorités militaires, apparemment à des fins de création de revenus. Ceci allait du recours au travail forcé pour des travaux d'agriculture ou de production de biens jusqu'à l'extorsion ou le vol de biens personnels (Note 320).
  486. 280. Il ressort des informations que, durant ces dix dernières années, le gouvernement du Myanmar a mis en oeuvre un grand nombre de projets nationaux et locaux d'infrastructures, en particulier pour la construction et l'amélioration de diverses routes et voies ferrées et d'infrastructures connexes telles que des ponts. Il semble que ces projets ont été construits en grande partie grâce au travail forcé, impliquant parfois des centaines de milliers de travailleurs (Note 321).
  487. 281. De même, il semble que le gouvernement a eu recours au travail forcé pour toute une série d'autres projets d'infrastructures et de travaux publics tels que barrages, travaux d'irrigation et aéroports (Note 322).
  488. 282. Pour leur part, les résidents des villes ont été réquisitionnés, une fois par semaine en général, pour le nettoyage et l'entretien des zones urbaines. Ce travail a été organisé par les autorités municipales mais souvent effectué sous la surveillance des militaires (Note 323).
  489. 283. Les informations fournies indiquent que le recours au travail forcé aux fins mentionnées ci-dessus a eu lieu dans tout le Myanmar et a affecté les Birmans et les autres groupes ethniques du pays. Il apparaît toutefois qu'il y avait sensiblement plus de travail forcé dans les zones rurales, en particulier dans les zones moins développées telles que celles des sept Etats. Puisque la majorité de la population de ces Etats n'est pas birmane, le fardeau de ce travail forcé a pesé de façon disproportionnée sur les groupes ethniques non birmans du Myanmar.
  490. 284. Il semble que les personnes qui ont exigé du travail forcé au Myanmar n'ont fait l'objet d'aucune sanction légale et qu'elles ont donc joui d'une totale impunité. Plusieurs témoins qui avaient entrepris des recherches générales et investigations ont informé la commission qu'à leur connaissance il n'y avait eu aucun cas où une personne aurait été punie pour en avoir forcé d'autres à fournir leur travail ou pour avoir commis des brutalités à l'égard des personnes ainsi contraintes au travail (Note 324).
  491. 285. Le nombre de personnes au Myanmar qui ont été contraintes d'effectuer du travail forcé paraît considérable. En 1995, Human Rights Watch/Asia a estimé que depuis 1992, ce sont au moins deux millions de personnes qui ont été forcées de travailler sans rémunération à la construction de routes, de voies ferrées et de ponts (Note 325). Les statistiques publiées par le gouvernement du Myanmar dans son organe de presse officiel, le New Light of Myanmar donnent une indication de l'importance de certains des projets pour lesquels il est affirmé qu'il a été fait usage de travail forcé (Note 326).
  492. 286. Dans les zones rurales, les ordres de réquisition étaient transmis aux villageois par l'intermédiaire de leur chef de village. Le chef de village recevait des instructions, parfois verbalement, mais le plus souvent sous forme écrite, soit de l'administration locale (au niveau de l'arrondissement rural et parfois de la circonscription), soit des militaires (le camp militaire local ou l'état-major du bataillon) (Note 327). Ces instructions précisaient généralement qu'un certain nombre de personnes devaient être fournies pour une date donnée et qu'une quantité donnée de travail devait être accomplie dans un délai donné. C'était ensuite au chef du village à prendre les mesures nécessaires. Souvent le chef du village demandait à un certain nombre de foyers du village de fournir une personne pour un certain temps, généralement pour une à deux semaines; à la fin de cette période, les travailleurs étaient remplacés par des villageois d'autres familles du même village. Dans certains cas, l'ordre donné au chef du village précisait que chaque foyer devait envoyer une personne, ce qui ne laissait aucune possibilité de rotation entre les foyers du village.
  493. 287. Dans les zones urbaines, les ordres de réquisition étaient transmis aux intéressés par les fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement urbain. Ces fonctionnaires recevaient des instructions de l'administration de la circonscription ou des autorités militaires locales. Ces instructions spécifiaient le nombre de travailleurs ou la quantité de travail à accomplir dans un délai donné. Les fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement prenaient alors les arrangements nécessaires. Souvent, ils faisaient arrêter des personnes arbitrairement ou envoyaient des gens travailler à titre de punition pour quelque contravention mineure, mais, fréquemment aussi, des loteries étaient organisées pour tirer au sort ceux des résidents de l'arrondissement qui devaient partir. La seule manière pour ceux-ci d'éviter de prendre part à la loterie ou d'éviter l'obligation de partir s'ils étaient choisis était de verser une somme d'argent leur permettant d'être exemptés.
  494. 288. Les réquisitions de main-d'oeuvre de faible importance provenaient en général des bataillons ou de la circonscription tandis que les demandes plus importantes venaient d'un niveau plus élevé de la hiérarchie administrative ou militaire. Pour la main-d'oeuvre à affecter aux grands projets d'infrastructure ou pour les porteurs appelés à participer à des opérations militaires importantes, l'ordre venait parfois du niveau national et était ensuite répercuté par l'intermédiaire des responsables aux niveaux de l'Etat ou de la division, du district et de la circonscription (Note 328). La commission a reçu copie d'un grand nombre de ces ordres (provenant la plupart du temps d'un camp militaire local, d'un bataillon, d'un arrondissement rural ou d'une circonscription) (Note 329).
  495. 289. Les ordres écrits visant à obtenir des porteurs ou des travailleurs qui étaient envoyés aux chefs de villages par les autorités militaires locales contenaient souvent quelque menace ouverte ou implicite. Parmi les exemples de menaces ouvertes figurent des déclarations telles que: "Quiconque refuse de venir construire la route sera passible des sanctions prévues par la loi", ou encore: "Si vous ne venez pas parce que vous avez peur des rebelles Mon, nous, l'armée, devons vous montrer que nous sommes pires qu'eux", ou encore: "Je vous préviens que si vous trouvez des excuses et que vous ne vous présentez pas, des mesures violentes seront prises contre vous" ou: "Si personne ne vient cette fois-ci (vous) serez détruits par une attaque d'artillerie" (Note 330). Un jour où deux villageois avaient fui alors qu'ils faisaient du portage pour l'armée, un ordre adressé par la colonne des militaires au chef du village pour exiger leur retour était libellé comme suit: "Si cela se reproduit à l'avenir, nous prendrons des mesures appropriées et vous serez accusés de perturber et de retarder les opérations militaires" (Note 331). Parmi les exemples de menaces implicites, on peut citer des déclarations telles que: "Si vous ne venez pas, c'est vous-mêmes qui en supporterez les conséquences" , ce dont les villageois savaient d'expérience que cela voulait dire qu'ils auraient à faire face à de graves sanctions, ou encore: "Si vous ne venez pas, nous déclinons toute responsabilité pour votre village" , ce que les villageois savaient être une menace de destruction de leur village) (Note 332). Une autre forme courante de menace était d'accompagner l'ordre de certains objets tels qu'une cartouche, un piment ou un morceau de charbon, ce qui signifiait que les destinataires seraient tués par balle, auraient des problèmes ou que leurs maisons ou leurs villages seraient incendiés s'ils n'obéissaient pas à l'ordre donné (Note 333).
  496. 290. Les autorités locales ont périodiquement demandé aux chefs de village de fournir des informations détaillées sur le nombre de foyers dans leur zone et sur leur composition. Ces listes pouvaient alors être utilisées pour décider combien de travailleurs pouvaient être demandés à un village ou la quantité de travail qu'un village était tenu de fournir (Note 334). Quand un travailleur était requis dans chaque foyer, il n'était pas tenu compte du nombre de personnes valides dans le foyer ni de combien il comptait d'hommes et de femmes, ce qui posait des problèmes particulièrement difficiles aux foyers ne comportant pas de personnes valides; dans de tels cas, c'était les enfants ou les vieillards qui devaient aller travailler s'ils ne parvenaient pas à trouver un substitut.
  497. 291. Il semble que, faute de coordination suffisante entre les unités militaires locales, les autorités locales et régionales et les divers organismes exigeant du travail forcé, les demandes de main-d'oeuvre étaient quelquefois impossibles à satisfaire. Cette accumulation de demandes ont forcé des femmes, des enfants et des vieillards à aller effectuer du travail forcé et ont parfois empêché les familles de gagner leur vie. L'une des manières de résoudre ce problème était de payer quelqu'un pour effectuer le travail forcé à leur place ou, lorsque c'était possible, de verser de l'argent aux autorités afin d'être exemptés. Mais la plupart des villageois des régions rurales qui gagnent à peine de quoi survivre n'avaient pas les moyens d'effectuer très souvent ou longtemps de tels versements. De plus, il était parfois très difficile de trouver quelqu'un qui accepte de travailler comme porteur pour des opérations militaires, parce que ce travail était particulièrement dangereux et parce que la demande de porteurs était très forte à ces moments-là (Note 335).
  498. 292. Il ressort des informations devant la commission que les sanctions infligées pour ne pas avoir répondu aux demandes de travail forcé étaient extrêmement dures. Il s'agit notamment de la détention, dans le camp militaire, souvent les fers aux pieds, ou dans un trou creusé dans la terre, généralement assortie de passages à tabac ou d'autres formes de tortures, telles que la privation de nourriture, d'eau, de soins médicaux ou d'autres droits fondamentaux. A ces occasions, les femmes étaient exposées à être violées ou victimes d'autres sévices sexuels. La première personne à être punie si un village n'obéissait pas aux demandes de travail forcé était généralement le chef du village. Aussi la position de chef du village était-elle peu prisée et était assumée par rotation entre les villageois capables d'assumer cette tâche, souvent au rythme d'à peine deux semaines chacun. Il a également été mentionné que les villages choisissaient souvent les femmes âgées pour être chefs du village, les villageois estimant qu'en tant que femmes elles seraient peut-être traitées moins brutalement, et qu'en raison de leur âge elles risquaient moins d'être violées ou de subir d'autres sévices sexuels (Note 336).
  499. 293. Il ressort des informations devant la commission que les populations qui avaient été déplacées et réinstallées de force risquaient de ce fait d'avoir à faire face à des demandes de fournir leur travail. Le déplacement et la réinstallation forcée de populations a été une stratégie couramment pratiquée par les militaires dans les zones d'insurrection active. Des villages éloignés ont souvent reçu l'ordre de se réinstaller dans des zones soumises à un contrôle gouvernemental plus ferme, généralement dans des villes plus importantes ou dans des régions rurales proches de camps militaires. Ces réinstallations pouvaient affecter des centaines de milliers de personnes. Il appert qu'étant donné la proximité des militaires ces populations déplacées étaient particulièrement vulnérables aux exigences de portage et d'autres types de travail forcé (Note 337). Dans certains cas, il semble que ces déplacements forcés de populations ont été utilisés pour constituer une source de main-d'oeuvre facilement accessible à côté d'un grand projet d'infrastructure, ou du moins que l'on a profité de la présence de vastes populations déplacées dans les zones de certains projets pour les contraindre à du travail forcé sur ces projets. Ce fut le cas dans l'Etat Kayah pour la construction du chemin de fer de Aungban à Loikaw, pour la construction de routes dans la division Tanintharyi (Tenasserim), et pour la construction de routes et de voies ferrées dans l'Etat Shan (Note 338).
  500. 294. Tout en fournissant du travail à des fins diverses, les habitants de tout le Myanmar devaient également verser différents impôts et taxes. Il a été indiqué à la commission que, dans certains cas, ces prélèvements étaient faits de façon arbitraire et discriminatoire. Il apparaît que ce type de discrimination a frappé tout particulièrement la population Rohingya de l'Etat Rakhine (Note 339).
  501. 295. Les taxes et impôts les plus couramment imposés aux habitants du Myanmar étaient les taxes de portage, soi-disant pour payer les porteurs; les contributions en espèces pour les projets d'infrastructure (taxes routières, taxes sur les voies ferrées, etc.) (Note 340); les taxes diverses à verser aux camps militaires locaux en espèces ou sous la forme de produits; et toute une série de taxes sur la production agricole telles que la vente obligatoire d'une partie de la récolte de riz aux autorités à un prix bien inférieur au prix du marché. En plus de tout cela, les gens devaient également payer régulièrement des sommes d'argent s'ils voulaient échapper aux assignations de travail forcé qui leur étaient adressées; en raison du caractère arbitraire de la taxation, il était souvent difficile de distinguer ces paiements des taxes et impôts véritables. Au cas où les gens n'étaient pas en mesure de payer ces taxes, ils étaient souvent tenus d'effectuer à la place du travail ou des services, ce qui augmentait d'autant la quantité de travail non indemnisé qu'ils devaient fournir (Note 341).
  502. 296. Les informations fournies à la commission indiquent que le système de réquisition forcée de main-d'oeuvre était plus ou moins le même dans tout le pays et que, de par la nature même de ce système, certains groupes étaient particulièrement affectés par ces réquisitions. Il apparaît en particulier qu'il était presque toujours possible d'éviter le travail forcé en versant une somme suffisamment importante, ce qui veut dire que la charge du travail forcé tombait de façon disproportionnée sur les couches de la population les plus pauvres. L'existence d'une économie monétaire dans les zones urbaines signifie aussi que les habitants des villes étaient plus à même de pouvoir payer pour éviter le travail forcé (Note 342). De plus, les populations non birmanes paraissent avoir été particulièrement visées par le travail forcé, notamment dans les zones rurales (voir également paragr. 283 ci-dessus) (Note 343). Les discriminations de ce genre ont frappé tout particulièrement la population musulmane du Myanmar, notamment la population Rohingya de l'Etat Rakhine et les populations musulmanes d'autres régions du pays (Note 344). Le traitement infligé à cette population paraît également avoir été spécialement dur (Note 345).
  503. 297. La commission a reçu des informations relatives à l'impact social et financier du travail forcé sur les personnes qui y étaient assujetties (Note 346). Il apparaît qu'en raison du travail forcé qui leur était imposé les couches les plus pauvres de la société qui en accomplissaient la majeure partie n'ont cessé de s'appauvrir. Les journaliers qui doivent travailler chaque jour s'ils veulent gagner assez pour survivre ne le pouvaient plus lorsqu'ils étaient contraints de fournir gratuitement leur travail. Les familles qui n'ont pour toute ressource que leurs cultures de subsistance ont, elles aussi, besoin que chacun des membres de la famille participe à ce travail qui exige une forte intensité de main-d'oeuvre, particulièrement à certains moments de l'année. L'exigence de travail forcé affecte donc gravement ces familles. Des familles qui ne pouvaient plus subvenir à leurs propres besoins déménageaient souvent dans une région dont elles pensaient que les obligations de travail forcé seraient moins lourdes; si elles ne le pouvaient pas, il était fréquent qu'elles fuient le Myanmar comme réfugiés. Les informations fournies à la commission indiquent que le travail forcé a été l'un des principaux motifs pour lesquels des personnes ont quitté le Myanmar et sont devenues des réfugiés (Note 347).
  504. 298. Enfin, la commission a reçu des informations portant sur le rapport entre les valeurs bouddhistes et la contribution de travail. Il ressort de ces informations que, s'il est vrai que diverses actions, y compris la contribution de travail à certaines fins, sont considérées comme nobles et méritoires au regard des valeurs que chérissent les bouddhistes du Myanmar, le travail effectué sur des routes ou sur des ponts ou le travail forcé de quelque nature que ce soit ne saurait être considéré comme noble et méritoire à ce titre. Selon les informations reçues, le bouddhisme est clair quant aux catégories d'actes qui sont méritoires, et des activités telles que la construction de routes et de ponts ne peuvent pas être considérées comme en faisant partie; il est également clair, selon la tradition bouddhiste, que le mérite ne vient pas de l'acte lui-même mais des intentions de la personne qui l'effectue, si bien qu'un acte que l'on est contraint d'accomplir ne peut être considéré comme méritoire. Qui plus est, étant donné que le travail forcé effectué dans le pays était en bonne partie exigé de groupes ethniques non bouddhistes, des considérations de cet ordre étaient sans pertinence dans de tels cas (Note 348).
  505. C. Analyse thématique des formes de travail et de services réquisitionnées par certaines autorités
  506. 299. Cette partie du chapitre présente une analyse thématique des formes de travail et de services forcés réquisitionnées par certaines autorités du Myanmar. Les quatre premières sections traitent du travail directement lié aux forces armées et aux milices (portage, travail pour les camps militaires, autre travail d'appui aux forces armées et conscription forcée). Les quatre dernières sections ont trait à du travail qui, bien qu'il implique généralement ces groupes, revêt un caractère plus général (travail sur des projets agricoles, forestiers et d'autres projets de production, construction et entretien des routes, des voies ferrées et des ponts, autres travaux d'infrastructure et travaux généraux urbains).
  507. 1) Portage
  508. a) Eléments de preuve documentaire
  509. 300. Type et conditions de travail. En raison du relief accidenté et du manque de routes et d'autres infrastructures qui caractérisent de nombreuses régions du Myanmar, le déplacement de troupes et le transport de fournitures de l'armée se fait le plus souvent à pied (Note 349). D'une façon générale, l'armée utilise des civils pour les tâches de portage, normalement contre leur gré. Les offensives régulièrement conduites par la Tatmadaw contre les groupes insurgés nécessitaient de grandes quantités de fournitures et d'équipements et pouvaient impliquer l'utilisation de milliers ou même de dizaines de milliers de porteurs civils pendant des périodes d'une durée de plusieurs mois (Note 350). A part cette utilisation de porteurs pour des offensives majeures, la commission a été informée que, tant dans les zones de conflits que dans les zones sans conflits, les troupes exigeaient régulièrement des porteurs pour effectuer toute une série de tâches telles que le transport d'équipements et de fournitures pour les patrouilles de routine, le transport de provisions jusqu'aux camps militaires locaux, l'accomplissement de différentes tâches dans les camps militaires ou l'obligation de rester consignés au camp au cas où on aurait besoin d'eux pour un service ou un autre. Les porteurs étaient souvent placés à l'avant des troupes, dans des situations potentiellement dangereuses, afin d'attirer le feu de l'ennemi ou dans l'espoir que les insurgés n'attaqueraient pas lorsque des porteurs risquaient d'être tués. Ils étaient également envoyés au devant des colonnes lorsque l'on suspectait le terrain d'être miné afin de faire exploser les mines sur leur passage. De nombreux porteurs ont ainsi été blessés ou tués (Note 351).
  510. 301. D'une façon générale, les soldats préféraient faire appel, pour le portage, à des hommes valides, capables de se déplacer plus rapidement et de transporter des chargements plus lourds. Lorsque des femmes étaient prises comme porteurs, elles étaient généralement relâchées dès que l'on avait pu trouver des hommes pour les remplacer, mais dans certains cas elles devaient attendre très longtemps pour cela (Note 352).
  511. 302. Les méthodes utilisées pour se procurer des porteurs variaient. Pour les opérations majeures nécessitant un très grand nombre de porteurs, plusieurs méthodes ont été utilisées. Les ordres demandant de fournir des porteurs provenaient des rangs les plus élevés de la hiérarchie militaire (Note 353). Selon le nombre de porteurs requis, le contingent à recruter pouvait être réparti entre plusieurs districts ou même plusieurs Etats et divisions (Note 354). L'ordre était transmis du haut en bas de la structure administrative, de sorte qu'une circonscription donnée était tenue d'envoyer un certain nombre de porteurs à un certain point de rassemblement à une certaine date. Pour remplir ce contingent, des ordres étaient envoyés à chaque arrondissement urbain et village exigeant qu'ils fournissent un nombre précis de personnes. Lorsqu'il s'avérait difficile d'obtenir le contingent demandé de cette manière, les autorités procédaient à des rafles de civils dans les zones urbaines, dans des lieux tels que les cinémas, les salles de vidéo, les maisons de thé, les gares, dans les autobus et les trains, ou dans tous autres endroits où il y avait de grands rassemblements de personnes, tels que marchés, fêtes religieuses, noces ou funérailles (Note 355). Dans les zones rurales, les soldats se rendaient dans les villages où ils arrêtaient et saisissaient de force tous les gens qu'ils pouvaient attraper. Si le nombre d'hommes valides était insuffisant, les autorités prenaient femmes, enfants, personnes âgées et personnes autrement inaptes au travail (Note 356). La seule façon d'éviter d'être pris était de verser une grosse somme d'argent (de l'ordre de plusieurs milliers de kyats) aux autorités (Note 357) pour être exempté de ce travail. Ayant relâché les personnes qui avaient versé cette somme, les autorités devaient en arrêter d'autres pour les remplacer. Très souvent, les autorités prenaient dans une rafle beaucoup plus de gens qu'elles n'en avaient besoin, sachant que certaines d'entre elles verseraient de l'argent pour être relâchées; la quantité d'argent demandée dépendait du nombre de personnes "surnuméraires" dont elles avaient pu se saisir (Note 358).
  512. 303. Des prisonniers étaient aussi régulièrement tirés de leur prison ou des camps de travail répartis dans tout le pays afin d'être utilisés par l'armée durant les grandes offensives. Ils continuaient de porter leur uniforme de détenus et ils étaient généralement séparés des autres porteurs. Dans certains cas, les prisonniers étaient forcés de continuer à travailler dans ces conditions au-delà de la date à laquelle ils auraient normalement été libérés (Note 359).
  513. 304. Dans les régions rurales, les ordres visant à obtenir des porteurs donnaient habituellement quelque indication générale sur la tâche pour laquelle ils étaient requis: pour des travaux généraux dans le camp militaire, pour un travail particulier tel que le transport de matériel jusqu'au camp, ou encore pour une opération militaire. Il appartenait alors au chef du village de décider lesquels des villageois devaient partir. De plus, les villages devaient fournir en permanence un nombre déterminé de porteurs pour chacun des camps militaires de leur région; ceci était normalement organisé selon un système de rotation d'équipes affectées pour quelques jours. La seule façon d'éviter cette corvée était de payer un substitut ou, dans certains cas, de verser une somme d'argent pour être exempté.
  514. 305. Les populations urbaines n'étaient généralement tenues de fournir des porteurs que lors des grandes opérations militaires, encore que les troupes pouvaient aussi se saisir de force de personnes dans les rues de zones urbaines pour qu'elles effectuent d'autres tâches plus limitées. La seule façon d'éviter ces corvées était de verser une somme d'argent pour en être exempté ou d'engager un substitut.
  515. 306. Lorsque les gens recevaient l'ordre d'aller travailler comme porteurs, soit du chef du village ou des autorités locales, soit directement des militaires, aucune indication ne leur était normalement donnée sur la durée de cette assignation et, même lorsqu'elle leur était donnée, il est rare qu'elle fut exacte ou respectée (Note 360).
  516. 307. En plus des rafles de personnes effectuées de manière organisée et des ordres donnés aux autorités locales pour qu'elles fournissent de la main-d'oeuvre, les unités militaires attrapaient aussi les gens au hasard dans les villages et les campagnes qu'elles traversaient (Note 361) (Note 362).
  517. 308. Lorsque les troupes arrivaient dans un village, les hommes avaient souvent déjà fui, de crainte d'être arrêtés ou tués par l'armée, notamment dans les zones de conflits où ils risquaient d'être accusés de rébellion. En général, les femmes restaient au village car elles risquaient un traitement moins violent. Dans de tels cas, les femmes risquaient toutefois d'être prises comme porteurs si les troupes ne trouvaient pas d'hommes (Note 363). Dans certains cas, des femmes enceintes ou allaitant encore leurs enfants ont été emmenées de force pour travailler comme porteurs (Note 364).
  518. 309. Au vu des grandes variations dans la quantité de travail de portage requise de différents villages à différents moments, il semble que peu d'efforts aient été faits pour observer quelques limites à ces exigences. Dans certains cas, un foyer villageois devait fournir un porteur jusqu'à deux fois par mois pour une durée indéterminée, en plus des autres contributions de main-d'oeuvre qui lui étaient demandées (Note 365).
  519. 310. La durée des affectations au portage variait considérablement et dépendait d'un certain nombre de facteurs. Les porteurs pris pour des patrouilles de routine étaient généralement remplacés à intervalles réguliers d'environ deux semaines par d'autres personnes du même village. C'est au chef de village qu'il incombait de savoir où se trouvaient les troupes et de leur envoyer des remplaçants. Les porteurs n'étaient normalement relâchés qu'au moment où leurs remplaçants arrivaient. Parfois, il était difficile d'envoyer ces remplaçants soit parce que les troupes se trouvaient à une grande distance du village, soit parce que l'on ignorait où elles se trouvaient. Dans de tels cas, les porteurs étaient contraints de travailler pendant des périodes beaucoup plus longues.
  520. 311. Les porteurs pris pour des offensives militaires devaient généralement travailler pendant de beaucoup plus longues périodes, car il leur était bien plus difficile de se faire remplacer et la demande de porteurs était très forte à ces moments-là. Compte tenu des risques de maladie, de blessure et de sévices de la part des soldats dont ils étaient menacés, beaucoup de porteurs préféraient fuir plutôt que d'attendre d'être relâchés. Les porteurs qui cherchaient à s'échapper étaient normalement abattus et, s'ils étaient repris, ils étaient passés à tabac ou tués devant les autres porteurs à titre d'exemple (Note 366). Ce sont les porteurs ayant tenté de s'échapper dans les zones de conflits qui semblent avoir subi les représailles les plus sévères.
  521. 312. Les villageois et les habitants des villes dans tout le Myanmar devaient payer toutes sortes d'impôts et de taxes, y compris la "taxe de portage" (Note 367). Cette taxe s'ajoutait à l'argent qui devait être versé pour éviter le travail de porteur, car le paiement de taxes de portage ne semble pas avoir réduit les exigences imposées au village en matière de portage; toutefois, si une communauté ne s'acquittait pas des taxes de portage, une sanction prévisible consistait en une augmentation de la demande de porteurs, car quiconque omettait de payer ces taxes était le plus souvent arrêté et utilisé comme porteur. Bien que ces taxes soient prélevées soi-disant pour payer les porteurs, il semble qu'en fait les porteurs n'étaient jamais payés, à l'exception de ceux qui étaient engagés par une autre personne pour aller faire le portage à leur place (Note 368).
  522. 313. Or il était souvent très difficile ou en tout cas très onéreux d'engager un substitut pour certains types de portage, particulièrement s'agissant des portages effectués pendant les opérations militaires qui duraient très longtemps et qui étaient particulièrement dangereux et épuisants (Note 369).
  523. 314. La commission a reçu un grand nombre d'informations détaillant la situation des porteurs pendant leur affectation. Selon ces informations, les porteurs devaient généralement transporter des charges de 30 à 40 kg pour les hommes et de 20 à 30 kg pour les femmes, encore que des charges de 50 kg ne soient pas rares (Note 370). Il s'agissait en général de porter la nourriture, les munitions, les paquetages des soldats ou d'autres objets, généralement dans des paniers d'osier ou de bambou, munis de courroies passant sur les épaules et sur le front. Quand la charge était excessive et qu'elle devait être transportée pendant très longtemps, les courroies du panier et le panier lui-même rentraient dans la chair des épaules et du dos et causaient de graves blessures (Note 371). Les blessures aux pieds étaient aussi fréquentes (Note 372). Les charges imposées aux femmes et aux enfants étaient généralement plus légères, mais autrement la charge était attribuée sans tenir compte de l'âge, de l'aptitude physique ou de la force de la personne (Note 373).
  524. 315. Les porteurs étaient obligés de transporter ces charges sur de longues distances, n'ayant le droit de se reposer que lorsque les soldats faisaient eux-mêmes une pause. Souvent, les porteurs devaient transporter ces charges pendant plus de douze heures par jour avec très peu de repos, et ceci pendant des périodes pouvant s'échelonner sur plusieurs jours, semaines ou mois. Il n'était pas rare, en particulier au cours des offensives, que les porteurs aient à transporter leur charge pendant 24 ou 36 heures d'affilée sans pouvoir dormir (Note 374). En général, les porteurs, et en particulier ceux qui avaient été saisis de force et contraints à travailler sans être prévenus, n'avaient que très peu d'affaires personnelles, le plus souvent les seuls vêtements qu'ils portaient au moment où ils avaient été arrêtés. Aucun vêtement supplémentaire, ni couvertures ou chaussures adéquates ne leur étaient fournis.
  525. 316. Les rations de nourriture données aux porteurs étaient le plus souvent minimales, se limitant à l'équivalent d'une demi-boîte ou une boîte de riz par jour (Note 375), accompagnée parfois d'un peu de sel, de quelques piments ou d'un peu de curry de pois jaunes très délayé (Note 376). Nombre d'anciens porteurs ont déclaré que cette ration était bien inférieure à celle qui était donnée aux soldats et lorsque ceux-ci recevaient une nourriture de meilleure qualité, telle que de la viande, les porteurs n'en avaient jamais. Contrairement aux soldats, les porteurs n'avaient pas de gourde à eau et on les empêchait généralement de boire dans les cours d'eau qu'ils longeaient, les soldats prétextant que cela les ralentirait (Note 377). Les porteurs qui demandaient de partager la gourde des soldats étaient battus (Note 378).
  526. 317. Les femmes recrutées comme porteurs étaient parfois violées ou faisaient l'objet d'autres sévices sexuels de la part des soldats (Note 379). Les porteurs qui marchaient trop lentement étaient régulièrement frappés à coups de bâton, de poing, de pied, ou à coups de crosse de fusils ou poussés à la pointe des baïonnettes (Note 380). Ceux qui continuaient à ne pas marcher assez vite ou qui étaient incapables de continuer à transporter leur charge pour cause d'épuisement, de maladie ou de blessure étaient souvent roués de coups et forcés de continuer et, s'ils ne le pouvaient pas, ils étaient abandonnés ou tués (Note 381). Le meurtre des porteurs qui ne pouvaient poursuivre leur chemin semble avoir été très fréquent dans les zones de conflit potentiel (Note 382). Dans ces zones, les porteurs n'étaient généralement pas tués par balle mais battus à mort, ou on leur coupait la gorge, ou ils étaient précipités dans les ravins, ou jetés dans les rivières les mains liées dans le dos, ou encore brûlés vifs (Note 383). Les porteurs qui parvenaient à transporter leur charge au rythme voulu, qui ne trébuchaient pas et ne tombaient pas et qui obéissaient consciencieusement aux ordres, n'étaient généralement pas battus.
  527. 318. A part ceux qui étaient exécutés, bon nombre de porteurs décédaient par maladie, en particulier de malaria ou d'infections gastro-intestinales. La malaria était particulièrement endémique dans les régions montagneuses à forêt dense, loin des plaines centrales du Myanmar où étaient situées la plupart des forces armées opposées au régime. De plus, aucune forme de prophylaxie n'était donnée à ces porteurs ni aucune forme de traitement médical (Note 384).
  528. 319. Les porteurs étaient aussi exposés à des situations de combat dangereuses (Note 385), comportant le risque de mines et divers types de pièges, embuscades et batailles majeures ou mineures. Aucun effort ne semble avoir été fait par les unités militaires utilisant des porteurs pour minimiser les risques qu'ils couraient dans de telles situations. Au contraire, les soldats forçaient parfois les porteurs à marcher devant eux lorsqu'ils soupçonnaient que la région était minée ou truffée de pièges ou qu'ils craignaient une embuscade afin de limiter les risques pour les troupes; s'ils transportaient des munitions, les porteurs devaient aussi les apporter aux soldats qui le demandaient pendant la bataille (Note 386). On cite également le cas de soldats ayant forcé des porteurs à échanger leurs vêtements avec eux afin d'attirer sur eux le feu de l'ennemi (Note 387). Beaucoup de porteurs ont été tués ou blessés de cette manière (Note 388). L'indemnisation accordée en cas de décès ou de blessure et les traitements médicaux donnés en cas de blessures ont été extrêmement limités (Note 389). En cas de décès, il est rare que la famille du porteur en ait été informée.
  529. 320. Pour éviter qu'ils ne s'enfuient, les porteurs étaient surveillés à tout moment. Pendant la journée, ils étaient souvent attachés les uns aux autres, ou à leur chargement, et la nuit ils étaient enfermés sous bonne garde dans des bunkers ou attachés les uns aux autres par groupes (Note 390). La nuit, ils devaient souvent dormir dehors, sans abri, ni couverture, même lorsqu'il faisait froid ou qu'il pleuvait. Pendant les combats, où ils auraient pu profiter de la confusion pour s'enfuir, les porteurs étaient souvent placés au milieu des soldats afin de rendre leur fuite plus difficile (Note 391). D'anciens porteurs ont fait savoir qu'il leur était plus difficile d'essayer de s'échapper lorsqu'ils avaient été envoyés par le chef du village sur ordre des militaires, car leur identité, ou au moins l'identité de leur village, était connue des troupes, si bien que leurs familles ou le village tout entier pouvaient subir des représailles. Les porteurs qui avaient été arrêtés directement par des troupes de passage ne pouvaient pas être identifiés aussi facilement et risquaient moins de problèmes s'ils arrivaient à s'échapper.
  530. 321. Lorsqu'il fallait un grand nombre de porteurs et que le recrutement s'étendait sur une vaste région, les gens pouvaient être emmenés très loin de leur foyer. Il n'était pas rare que des gens soient pris de la capitale, Yangon (Rangoon), ou même de l'Etat Rakhine (Arakan), pour servir de porteurs dans des opérations se déroulant près de la frontière thaïlandaise. Certains ont pensé que c'était là une stratégie délibérée destinée à limiter les possibilités de fuite des porteurs se trouvant dans une région qui ne leur était pas familière (Note 392).
  531. 322. Lorsque ces porteurs parvenaient à s'échapper ou s'ils étaient relâchés après un certain temps, ils se retrouvaient dans des lieux qui leur étaient étrangers sans argent et dans un total dénuement. Aucune disposition n'était prévue pour le rapatriement des porteurs libérés mais, dans certains cas, on leur accordait des laissez-passer leur permettant de traverser les points de contrôle militaires dans la région. Bien souvent, les porteurs en fuite ou simplement libérés se trouvaient ainsi à l'intérieur du pays sans aucun moyen de rentrer chez eux. Ils risquaient d'être de nouveau arrêtés et obligés de faire du portage pour d'autres unités militaires lorsqu'ils passaient les points de contrôle ou s'ils rencontraient des patrouilles (Note 393).
  532. 323. Exemples spécifiques. La commission a reçu des informations relatives à la réquisition et à l'utilisation de porteurs dans la plupart des régions du Myanmar, couvrant les Etats Chin, Kachin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan ainsi que les divisions Ayeyarwady, Bago, Sagaing, Tanintharyi et Yangon. Les personnes forcées à servir de porteurs comprenaient des femmes, des mineurs, des personnes de plus de 45 ans, ainsi que des personnes autrement inaptes au travail (Note 394).
  533. 324. Le recours à des porteurs dans les régions de l'est et du centre du Myanmar était très courant, notamment lors des opérations militaires de grande envergure lancées contre les groupes d'opposition dans les régions proches de la frontière orientale avec la Thaïlande. Le cas de cette partie du pays sera examiné dans les paragraphes qui suivent.
  534. 325. Dans l'Etat Shan, des civils ont été réquisitionnés par des unités militaires dans plusieurs régions (Note 395) et utilisés comme porteurs (Note 396). Ces informations concernent une période s'étendant de 1992 à 1997. On rapporte également qu'en 1995 des civils ont été contraints de monter la garde sur la voie de chemin de fer de Namhsam à Mongnai (Note 397).
  535. 326. La commission a reçu un très grand nombre d'informations relatives à l'Etat Kayah (Note 398). Des porteurs ont été réquisitionnés par différentes unités militaires stationnées dans plusieurs circonscriptions (Note 399), particulièrement dans des sites de réinstallation tels que Demawso, Shadaw et Ywathit. Les informations reçues couvrent la période s'étendant entre 1992 et 1997 et comprennent les copies de plusieurs ordres donnés en 1995 par le LORC de la circonscription de Demawso, demandant aux villages de fournir des porteurs pour une opération militaire.
  536. 327. Une très grande quantité d'informations ont été reçues à propos de la réquisition et de l'utilisation de porteurs dans toutes les parties de l'Etat Kayin (Note 400), impliquant un grand nombre d'unités militaires ainsi que la milice de l'Armée bouddhiste démocratique Kayin (DKBA) (Note 401). Dans l'Etat Kayin, les porteurs ont été également astreints régulièrement à d'autres tâches telles que faire office de sentinelles et de guides pour les troupes, pratiques dont il est question plus loin aux paragraphes 374 à 388 ci-dessous. Il est rapporté également que des civils, et notamment des femmes, ont été contraints de jouer le rôle de démineurs humains alors qu'ils avaient été enrôlés de force comme porteurs (Note 402). Les porteurs ont aussi été utilisés par les soldats pour rapporter jusqu'à leur camp le produit des pillages effectués dans les villages (Note 403). Ces informations couvrent une période s'étendant de 1988 à 1997 et comprennent les copies des ordres émis par les autorités pour demander aux villages de fournir des porteurs ainsi que des informations provenant de soldats déserteurs.
  537. 328. Dans la division de Bago, les porteurs ont la plupart du temps été pris par les militaires dans les régions proches de la frontière avec l'Etat Kayin dont la population est en majorité formée de Karen, y compris les circonscriptions de Shwegyin et de Kyaukkyi, différentes parties du district de Toungoo, et notamment la ville de Toungoo elle-même, et certaines parties du district de Nyaunglebin. Un certain nombre de porteurs ont également été enrôlés lors de rafles dans d'autres parties de la division (Note 404). Ces informations concernent une période s'étendant de 1992 à 1997. Certains des porteurs, notamment des femmes, ont été contraints de marcher devant les troupes comme démineurs humains; plusieurs ont été blessés ou tués par des mines. Les porteurs ont également été utilisés pour monter la garde (Note 405).
  538. 329. Dans la division de Yangon, des personnes ont aussi été enrôlées au moyen de rafles pour être utilisées comme porteurs dans des opérations militaires dans d'autres régions du pays; les musulmans semblent avoir été particulièrement visés. En octobre 1988, un grand nombre de personnes ont été saisies de force par les militaires dans la capitale de Yangon et forcées à travailler comme porteurs dans l'Etat Kayin (Karen) (Note 406). Il en a été de même en 1994 et 1995 lors d'une autre offensive dans la même région (Note 407).
  539. 330. Une grande quantité d'informations ont également été reçues à propos de l'Etat Mon (Note 408). Des porteurs ont été enrôlés au moyen de rafles ou utilisés par diverses unités militaires dans un certain nombre de régions différentes (Note 409). Comme on le verra plus loin (Note 410), des civils ont aussi été contraints d'accomplir un certain nombre d'autres tâches, généralement dans le contexte du portage, telles que de servir de guides aux troupes, de servir de démineurs humains ou de sentinelles; des civils ont aussi été utilisés par les troupes comme boucliers humains (Note 411). Ces informations couvrent une période s'étendant de 1990 à 1997 et comprennent des copies d'ordres émanant des autorités pour demander que l'on fournisse des porteurs.
  540. 331. La commission a reçu une très grande quantité d'informations concernant le portage dans la division de Tanintharyi. Le portage forcé semble avoir été particulièrement fréquent dans la circonscription de Yebyu (Note 412), mais les informations disponibles indiquent que des personnes ont été réquisitionnées par diverses unités militaires (Note 413) dans la plus grande partie de la division et contraintes de travailler comme porteurs (Note 414). Ces informations portent sur une période s'étendant de 1991 à 1997 et comprennent des informations données par des soldats déserteurs ainsi que des copies d'ordres émanant des autorités pour demander qu'on leur fournisse des porteurs.
  541. 332. Dans la partie occidentale du pays, les porteurs ont été le plus souvent utilisés pour des patrouilles de routine et diverses tâches de plus courte durée. Il en a été ainsi dans différentes parties de l'Etat Chin (Note 415), du moins pendant la période allant de 1994 à 1997. Les informations comprennent des interviews de déserteurs de la Tatmadaw ainsi qu'un certain nombre d'ordres des autorités demandant que des porteurs soient fournis (Note 416). Des porteurs ont aussi été utilisés pour monter la garde ou comme boucliers humains dans l'Etat Chin. Par exemple, 30 villageois ont dû monter la garde dans six postes de garde à Thantlang (Note 417). De même, des porteurs ont été utilisés pour différentes tâches de portage dans l'Etat Kachin (Note 418) dans la division Sagaing (Note 419) et dans la division de Ayeyarwady (Note 420). Ces pratiques sont examinées plus loin aux paragraphes 374 à 388.
  542. 333. Dans l'Etat Rakhine, des porteurs ont été enrôlés au moyen de rafles et utilisés aussi bien par l'armée que par la NaSaKa. Des rafles ont eu lieu dans plusieurs régions telles que la ville de Sittway (Akyab) et les circonscriptions de Maungdaw et de Buthidaung, et des personnes ont été arrêtées parmi les populations aussi bien Rohingya que Rakhine (Note 421) pour servir de porteurs. Des civils ont été aussi forcés de monter la garde, par exemple en 1992 dans un camp de la NaSaKa dans la circonscription de Maungdaw (Note 422).
  543. b) Eléments de preuve testimoniale
  544. 334. Plus de 186 témoins ont déclaré qu'ils ont fait l'expérience du portage, soit parce qu'ils ont été eux-mêmes forcés de transporter nourriture, matériel et munitions pour les militaires, soit parce que leurs proches -- femme, mari ou parents -- y avaient été contraints. Les témoignages recueillis par la commission relatent des faits qui se sont produits dans les Etats Chin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan et dans les Divisions Magway, Sagaing, Tanintharyi et Yangon. Ils couvrent abondamment la période de 1993 à nos jours, bien que nombre de témoins se soient également référés à des événements d'une époque antérieure.
  545. 335. Le portage est clairement une forme de travail forcé courante au Myanmar, dont la plupart des témoins rencontrés par la commission ont fait l'expérience. C'est aussi la forme la plus pénible et avilissante de travail exigé. Plusieurs témoins ont insisté sur le fait que le portage s'ajoute à d'autres formes de travaux ou services imposés par les militaires; en conséquence, bien peu de temps est laissé aux travailleurs pour pourvoir à leurs propres besoins et à leur subsistance (Note 423).
  546. 336. Afin d'élucider les variantes de la pratique du portage dans les différentes régions du Myanmar, la commission a regroupé les éléments de preuve pertinents en fonction de l'endroit où l'événement en question s'est produit, tout en mettant en exergue les similitudes existant dans les régions. La commission présentera dès lors dans cette section les éléments de preuve relatifs à la pratique du portage tel qu'exécuté dans les régions orientale et centrale du Myanmar, d'une part, et ceux concernant la région occidentale, de l'autre. Compte tenu de la nature de la preuve recueillie par la commission pour la région occidentale, l'emphase sera principalement mise sur la situation des Rohingyas du nord de l'Etat Rakhine.
  547. 337. Les éléments de preuve concernant le portage dans les parties orientale et centrale du Myanmar couvrent les Etats Kayah, Kayin, Mon et Shan ainsi que les Divisions Bago, Tanintharyi et Yangon. De façon spécifique, pour l'Etat Kayah, la preuve se réfère principalement à des événements qui se seraient produits durant la période s'échelonnant entre 1990 et 1993, c'est-à-dire celle qui a précédé le déplacement de nombreux villages en 1996 aux sites de Mawchi, Ywathit et Shadaw. Pour des raisons de survie, les témoins interrogés ont en effet rapidement quitté ces sites. Toutefois deux témoins, dont un déserteur de l'armée qui était en poste à Demawso entre 1990 et 1996, ont affirmé que le système lié au portage dans cet Etat n'avait aucunement été modifié dans les mois ou années postérieurs (Note 424).
  548. 338. Les éléments de preuve recueillis par la commission en ce qui concerne le portage exécuté dans la partie occidentale du Myanmar couvrent les Etats Chin et Rakhine ainsi que la Division Sagaing. Pour ce qui est spécifiquement de l'Etat Rakhine, la majorité des éléments de preuve examinés par la commission se réfèrent à la situation des Rohingyas bien qu'un témoin d'origine Rakhine ait toutefois affirmé avoir eu à exécuter du portage entre les années 1992 et 1996, une ou deux fois par année. A ces occasions, il était ni payé ni nourri et devait transporter sa propre nourriture (Note 425).
  549. 339. De plus, il faut placer le portage requis des Rohingyas de l'Etat Rakhine dans le contexte général dans lequel il s'inscrit. En effet, tous les Rohingyas rencontrés ont affirmé avoir quitté le Myanmar en raison de la charge de travail forcé qui leur incombait et qui les empêchait de pourvoir même à leurs besoins essentiels (Note 426). Plusieurs témoins Rohingyas ont affirmé avoir fait tant de fois du portage pour les militaires qu'ils n'étaient pas en mesure d'en estimer le nombre exact (Note 427). Le portage s'ajoute en fait à une quantité d'autres exactions dont sont l'objet les Rohingyas, en termes notamment de taxation arbitraire, de confiscation ou de saisie de leurs biens et propriétés, qui ont pour conséquence des les priver de tous moyens de subsistance.
  550. 340. Il ressort des témoignages que deux méthodes sont suivies par les militaires pour l'ensemble du Myanmar pour recruter les porteurs. Ils peuvent soit utiliser les services d'un chef de village, soit agir proprio motu. Dans le premier cas, les ordres sont adressés à l'autorité civile (Note 428) lui intimant de fournir un nombre donné de porteurs dans un délai imparti souvent très court (Note 429). Chefs de village et de section interrogés ont indiqué qu'ils devaient obligatoirement se plier à l'ordre des militaires sous peine de sanctions physiques (Note 430); ces menaces sont parfois exprimées par l'adjonction d'une cartouche, d'un morceau de charbon ou d'un piment (Note 431), ajouts signifiant que des représailles violentes peuvent être prises contre le chef ou son village en cas de non-respect. Une personne par famille est généralement requise. Il appert de la preuve que la pression exercée par la suite sur les villageois d'obéir aux exigences des réquisitions qui se succèdent est telle que plusieurs préfèrent fuir plutôt que d'avoir à accompagner les militaires lors de leurs patrouilles ou opérations (Note 432).
  551. 341. La deuxième manière veut que les militaires arrêtent directement ou saisissent par la force les personnes dont ils ont besoin (Note 433). Ils interviennent ainsi au rythme de leurs besoins et notamment lorsque l'ordre transmis à l'autorité locale n'a pas été respecté ou l'a été de manière insatisfaisante ou que le chef de village ne réunit pas le nombre de porteurs demandés dans le délais imparti. La situation des Rohingyas au nord de l'Etat Rakhine est aggravée par le fait que différentes autorités peuvent requérir de manière non coordonnée leurs services à savoir notamment, la Tatmadaw, la NaSaKa ou la police (Note 434).
  552. 342. Hommes, femmes et enfants, parfois âgés seulement d'une dizaine d'années, ont témoigné avoir été forcés de porter pour les militaires (Note 435). Seuls les témoins Rohingyas du nord de l'Etat Rakhine ont indiqué que le portage était presque exclusivement réservé aux hommes.
  553. 343. Bien que, de manière générale, les hommes soient préférés pour exécuter le portage, ils réussissent parfois à prendre la fuite évitant ainsi de suivre les militaires. Ces derniers se rabattent dès lors sur les femmes et les enfants. De plus, la preuve révèle que les femmes sont encore plus vulnérables que les hommes dans ce contexte puisqu'au travail de portage s'ajoutent les sévices sexuels perpétrés par les militaires (Note 436). Un refus d'exécuter le portage requis n'est absolument pas envisageable puisqu'il est systématiquement salué par des sanctions corporelles (Note 437) ou des amendes (Note 438).
  554. 344. Les porteurs doivent transporter munitions, équipements et nourriture qui totalisent, pour les hommes, une charge de plus d'une trentaine de kilos (Note 439). A la lumière des témoignages entendus, le portage peut en fait prendre différentes formes. D'une part, les porteurs peuvent être appelés à accompagner les militaires dans leurs déplacements d'un camp à l'autre, lors des patrouilles régulières ou au cours des opérations militaires. La preuve révèle que toutes ces formes se combinent dans les Etats de l'est du pays, notamment dans les Etats Shan, Kayin, Kayah et Mon. Il appert des témoignages entendus que la forme la plus courante de portage au nord de l'Etat Rakhine consiste à transporter munitions, équipements et rations pour les militaires d'un camp à l'autre ou lors de leurs patrouilles (Note 440). La preuve indique que, dans cette partie du territoire du Myanmar, le nombre d'opérations militaires offensives est nettement moins important que dans la région est du pays où les affrontements se sont multipliés au cours des dernières années contre les groupes d'opposition Karen, Karenni, Mon (Note 441) et Shan (Note 442). En plus des portages requis pour des déplacements spécifiques, des témoins ont indiqué qu'ils ont dû demeurer disponibles avec d'autres villageois, pendant une période de temps donnée pour répondre aux besoins éventuels des militaires dont les camps étaient situés à proximité de leur village (Note 443).
  555. 345. Lors de tout portage, les porteurs sont astreints à marcher du matin jusqu'au soir bien souvent sans avoir le droit de bénéficier d'un moment de repos (Note 444). Un déserteur a estimé que 20 à 30 porteurs sont requis pour 30 soldats lors des déplacements courants (Note 445). Toutefois, le nombre de porteurs augmente en fonction de l'importance de l'opération militaire dans laquelle la division, le bataillon ou la compagnie sont impliqués (Note 446).
  556. 346. Lors des portages entre les camps ou des patrouilles ou opérations militaires, les porteurs sont souvent placés au devant des colonne puisqu'ils servent de guides (Note 447); en les mettant devant, les militaires les utilisent aussi pour détecter les mines qui pourraient exploser sur leur passage (Note 448). Au cours des affrontements, que les porteurs servent de boucliers humains (Note 449), plusieurs ayant ainsi trouvé la mort (Note 450). Lorsque pris dans un tel affrontement, les porteurs doivent rester avec les soldats, de manière à les approvisionner en munitions, sous peine d'être abattus s'ils tentent de s'enfuir (Note 451).
  557. 347. La durée des portages imposés dans l'est du pays varie et peut s'étendre sur plusieurs mois (Note 452) alors que ceux qui ont été exécutés par les Rohingyas du nord de l'Etat Rakhine requièrent des déplacements durant généralement moins d'une semaine mais pouvant se répéter plusieurs fois par mois (Note 453). La durée qui a parfois été indiquée à l'origine est en fait de peu d'importance puisque les porteurs ne sont jamais relâchés avant que l'opération pour laquelle ils ont été réquisitionnés ou arrêtés ne soit terminée ou que les militaires n'aient obtenu ou arrêté des remplaçants (Note 454). En outre, il est courant qu'un porteur qui a terminé un portage soit arrêté sur le chemin du retour par un autre groupe de militaires aux fins de transporter leur matériel (Note 455).
  558. 348. Les éléments de preuve recueillis par la commission sont particulièrement accablants pour ce qui est des conditions générales dans lesquelles s'exécute le portage d'un camp à l'autre ou lors des patrouilles ou opérations militaires et pour ce qui est des mauvais traitements auxquels les porteurs sont systématiquement soumis. D'abord, les personnes réquisitionnées ne sont pas payées (Note 456) et lorsque nourris, elles le sont toujours en quantité et qualité insuffisantes (Note 457). A cet égard, les témoins se sont référés souvent à une quantité minime de riz avarié pouvant tenir dans le creux d'une main. Afin d'éviter que les porteurs ne s'évadent, ils sont parfois enchaînés ou étroitement surveillés (Note 458). Si blessés ou malades, tous les porteurs interrogés affirment ne pas avoir reçu les soins médicaux nécessaires, certains ayant même été laissés derrière seuls dans la jungle (Note 459).
  559. 349. Si les porteurs ne peuvent suivre la colonne ou qu'ils montrent un signe de faiblesse, les militaires n'hésitent pas à les passer à tabac, les rouer de coups entraînant ainsi des blessures ayant des conséquences graves voire mortelles (Note 460). A d'autres occasions, les militaires n'ont pas hésité à abattre les porteurs (Note 461) soit parce qu'ils étaient trop faibles, qu'ils avaient tenté de s'enfuir ou simplement en vue d'inspirer la terreur et la crainte aux autres porteurs (Note 462).
  560. 350. Plusieurs témoins ont indiqué qu'il est souvent possible d'être soustrait au portage dans la mesure où une certaine somme est versée aux militaires ou aux autorités. Les montants indiqués à la commission à cet égard varient substantiellement (Note 463). A titre d'exemple, un témoin aurait payé mensuellement 600 kyats durant près de 15 ans afin d'éviter de faire du portage pour les militaires (Note 464). D'autres ont indiqué qu'il était possible d'envoyer un substitut pour faire le portage à leur place (Note 465).
  561. 2) Travail pour les camps militaires
  562. a) Eléments de preuve documentaire
  563. 351. Type et conditions de travail. La commission a reçu des informations détaillées sur différents aspects du travail forcé lié aux camps militaires. Ces informations montrent que lorsqu'un nouveau camp militaire était établi, le terrain nécessaire était souvent confisqué et pris sur le territoire des villages environnants. Aucune indemnisation n'était versée.
  564. 352. Tous les villages de la région étaient alors contraints d'envoyer au moins une personne par foyer pour construire le camp. Ces travailleurs devaient commencer par défricher et niveler la terre pour, ensuite, construire les bâtiments du camp selon les spécifications exigées. Ils devaient également creuser des tranchées et des bunkers et construire d'autres fortifications telles que des clôtures et pointes de bambou défensives. Normalement, ils devaient continuer à travailler tous les jours jusqu'à ce que la construction du camp soit terminée. De plus, les villages étaient normalement tenus de fournir tous les matériaux de construction nécessaires tels que bois, bambou et chaume pour les toitures (Note 466). Après la construction du camp, ces villages devaient également assurer à intervalles réguliers les travaux de réparation et d'entretien, au moins une fois par an (généralement après la saison des pluies pendant laquelle se produit la plupart des dommages).
  565. 353. Outre la construction et la réparation des camps, les villages devaient aussi fournir en permanence à ces camps un certain nombre de travailleurs pour effectuer certains services tels que le nettoyage et l'entretien, la cuisine, la collecte de l'eau ou le ramassage du bois, le lavage des vêtements et pour servir de messagers. Ce sont ces messagers qui normalement portaient les ordres écrits ou les sommations du camp aux chefs de villages, en plus des différentes tâches qu'ils devaient effectuer pour le camp militaire ou ses officiers (Note 467). Ces travailleurs étaient souvent des femmes, parfois parce que le camp demandait expressément des femmes, mais souvent parce qu'il s'agissait généralement d'une forme de travail forcé moins pénible que les autres tels que le portage qui était généralement réservé aux hommes dans le ménage. Les travailleurs occupés dans les camps militaires pouvaient avoir la possibilité de retourner chez eux le soir, dans certaines circonstances, mais cela n'était pas toujours possible, soit parce qu'ils n'y étaient pas autorisés, soit parce que le village était trop éloigné du camp. Les travailleurs devaient alors rester dans le camp pendant plusieurs jours tant que leurs remplaçants n'étaient pas arrivés, conformément au système mis en place par le chef du village. Dans ces circonstances, les femmes étaient particulièrement exposées au risque de viol ou autres sévices sexuels, et il semble que ces sévices ont été relativement fréquents. Néanmoins, les brutalités autres que les sévices sexuels à l'encontre des femmes paraissent avoir été plus rares que dans le cas de portage et de certaines autres formes de travail forcé (Note 468).
  566. 354. Exemples spécifiques. Les informations fournies à la commission contiennent des détails sur le travail forcé utilisé pour la construction, la réparation et l'entretien des camps et autres installations militaires dans la plupart des régions du pays, notamment dans les régions frontalières et autres lieux d'insurrection active. La commission a reçu des informations spécifiques provenant des Etats Chin, Kachin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan ainsi que des divisions de Ayeyarwady, Bago, Sagaing et Tanintharyi.
  567. 355. Le recours au travail forcé pour la construction, la réparation et l'entretien d'installations militaires situées dans les parties orientales du Myanmar est très fréquent, en particulier dans les zones proches de la frontière orientale avec la Thaïlande. Cette région, qui couvre les Etats Shan, Kayah, Kayin et Mon ainsi que les divisions de Bago et Tanintharyi sera considérée, en premier lieu, dans les paragraphes qui suivent.
  568. 356. Dans l'Etat Shan, du travail forcé a été utilisé pour la construction, la réparation et l'entretien de plusieurs camps dans différentes circonscriptions (Note 469) y compris des camps à des sites de réinstallation des populations (Note 470). Ces informations portent sur une période allant de 1992 à 1998 (Note 471).
  569. 357. Un grand nombre d'informations ont été fournies à la commission en ce qui concerne la construction, la réparation et l'entretien de camps militaires dans l'Etat Kayah (Note 472). Des populations déplacées et réinstallées de force dans des sites sous contrôle militaire ont souvent été utilisées pour ce travail. Les informations concernent la construction et la rénovation de plusieurs camps entre 1996 et 1997 (Note 473). D'autres villageois ont été forcés de travailler dans ces camps en qualité de messagers ou pour effectuer divers autres services (Note 474).
  570. 358. De très nombreuses informations ont été fournies concernant l'Etat Kayin et les parties de la division de Bago avoisinant l'Etat Kayin (Note 475). Des civils ont été contraints de construire, de réparer ou de servir un grand nombre d'installations militaires au cours de la période allant de 1992 à 1997 (Note 476). Les informations comprennent des copies de plusieurs ordres émanant des autorités et demandant aux villages de fournir de la main-d'oeuvre pour ce type de travail (Note 477).
  571. 359. Dans l'Etat Mon, des civils ont été forcé d'effectuer des travaux de construction, de réparation et d'entretien de plusieurs camps entre 1994 et 1997 (Note 478). Les informations comprennent des copies d'ordres émanant des autorités pour demander que de la main-d'oeuvre soit fournie pour ces travaux (Note 479).
  572. 360. L'abondante information disponible sur les installations militaires situées dans la division de Tanintharyi montre que l'on a eu recours à du travail forcé pour la construction, la réparation et l'entretien d'un grand nombre de ces installations (Note 480) dans plusieurs circonscriptions (Note 481) couvrant une grande partie de la division (Note 482). La demande de travail forcé semble avoir été particulièrement grande à cette fin dans la circonscription de Yebyu. Les informations comprennent plusieurs copies d'ordres émanant des autorités pour demander que leur soit fournie de la main-d'oeuvre pour effectuer ce travail.
  573. 361. La commission a reçu un peu moins d'informations sur la partie occidentale du Myanmar. Elle a néanmoins reçu certaines informations pertinentes sur cette région, notamment en provenance de l'Etat Rakhine et de l'Etat Chin.
  574. 362. Dans l'Etat Rakhine, le travail forcé a été utilisé pour la construction, la réparation et l'entretien de baraquements et de camps de la NaSaKa dans les circonscriptions de Maungdaw et de Buthidaung ainsi que pour des camps de plusieurs bataillons (Note 483) à Sittway (Akyab) (Note 484). Dans plusieurs régions telles que les circonscriptions de Maungdaw, Buthidaung et Mrauk-U, la population musulmane a été forcée par les militaires d'effectuer différents travaux pour des villageois Rakhine et Birmans, et notamment des travaux agricoles (Note 485) et la construction de logements (dits "villages modèles") (Note 486).
  575. 363. On a eu recours à du travail forcé pour la construction de camps et autres installations militaires dans l'Etat Chin. Il s'agit notamment d'un poste de police en avril 1996, de postes de garde en juin 1996 (Note 487), ainsi que d'un camp militaire à Thantlang. Les informations comprennent copie de plusieurs ordres émis en 1996 par les autorités demandant aux villages de la circonscription de Thantlang de couper du bois et des bambous et de fabriquer des toits de chaume pour la construction du camp militaire (Note 488).
  576. 364. En outre, la commission a reçu des informations pertinentes provenant de plusieurs autres régions. Des terres ont été confisquées à des villageois dans l'Etat Kachin pour y construire une installation militaire (Note 489). Dans la division d'Ayeyarwady, des gens ont été forcé de construire des camps militaires, notamment des baraquements pour les troupes chargées de surveiller la construction d'une route en 1995-96 (Note 490). Le travail forcé a aussi été utilisé pour la construction et l'entretien de camps dans la division de Sagaing, notamment pour la construction d'un camp pour un bataillon (Note 491) dans la circonscription de Monywa en 1995 ainsi que pour l'entretien permanent du camp jusqu'en 1997 au moins, et pour la construction et la réparation de camps pour plusieurs bataillons situés dans la ville de Kalaymyo et dans d'autres régions de la circonscription de Kalaymyo durant ces dernières années (Note 492).
  577. b) Eléments de preuve testimoniale
  578. 365. Les témoignages relatifs aux camps militaires recueillis par la commission se réfèrent à des camps situés dans les Etats Chin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan et dans la division Tanintaryi. Plus des deux tiers des personnes rencontrées (Note 493) ont affirmé avoir eu à construire ou rénover des camps militaires ou à leur fournir des services, ou avoir vu d'autres personnes exécuter ces tâches. La commission a interrogé des témoins directs des faits pertinents, des travailleurs ayant été forcés de participer à ces travaux, des chefs de section ou de villages et des anciens soldats de la Tatmadaw; tous ces témoignages se confirment et permettent de saisir les caractéristiques et l'étendue du travail requis par les autorités à cet égard. De plus, la plupart des témoignages couvrent une période récente qui s'étend de l'année 1993 au début de l'année 1998.
  579. 366. Les éléments de preuve révèlent que les civils peuvent être forcés de travailler à la construction, à la rénovation ou à l'entretien des camps de différentes autorités publiques au Myanmar (Note 494) à savoir notamment la Tatmadaw, la police, les autorités douanières ainsi que la NaSaKa et la DKBA dans les territoires où ces dernières forces opèrent. Les réquisitions provenant de ces différentes forces publiques n'étant aucunement coordonnées et pouvant dès lors se juxtaposer, la charge relative aux travaux de camps est directement proportionnelle au nombre de camps à proximité d'un village donné. A titre d'exemple, plusieurs témoins ont indiqué avoir été obligés de servir au moins trois camps.
  580. 367. Les militaires recrutent la main-d'oeuvre en utilisant généralement les services des chefs de village ou de section auxquels ils transmettent un ordre écrit précisant le travail à exécuter et le délai imparti pour trouver la main-d'oeuvre requise (Note 495); les chefs n'ont pas d'autres choix que de respecter les conditions stipulées sous peine d'amendes, voire de sanctions physiques (Note 496). Dans le cas où l'ordre n'est pas observé à la satisfaction des militaires, ces derniers peuvent intervenir directement et saisir par la force les travailleurs dont ils ont besoin (Note 497).
  581. 368. En règle générale, une personne par famille est requise pour les travaux liés aux camps militaires (Note 498). Hommes, femmes et enfants, aussi jeunes que sept ans, ont témoigné avoir été obligés de se rendre dans un camp à un moment ou à un autre afin d'y exécuter les tâches imposées par les autorités (Note 499). A la demande de leurs parents, les enfants doivent parfois abandonner l'école pour ce faire (Note 500).
  582. 369. Pour ce qui est des travaux relatifs aux camps militaires, les villageois peuvent être forcés de participer à leur érection, à leur rénovation ou à leur entretien. La construction des camps implique bien souvent la confiscation de terres par les militaires (Note 501). Les travaux de construction proprement dits consistent tant au défrichage et nivellement des terrains qu'à l'édification des bâtiments obligeant aussi les travailleurs à fournir sans indemnisation les matériaux nécessaires, tels que bois, bambous, plâtre et ciment (Note 502). Les travailleurs doivent aussi se charger de la fortification des camps en creusant les tranchées (Note 503) ou installant piques de bambous (Note 504), pièges (booby traps) et autres installations défensives (Note 505).
  583. 370. Pour leur part, les travaux d'entretien ou de rénovation sont multiples. Les travailleurs peuvent être appelés à rénover les bâtiments et à refaire les clôtures (Note 506). Ils peuvent également devoir fournir leurs charrettes pour le transport de matériaux ou rations (Note 507), approvisionner le camp en bois, bambous (Note 508) et eau (Note 509) ou offrir certains services, tels que nettoyage (Note 510), cuisine (Note 511), messagerie (Note 512) ou désherbage (Note 513).
  584. 371. La durée des travaux aux camps dépend de leur nature. II appert de la preuve que les assignations relatives à la construction des camps se prolongent pendant une plus longue période alors que celles propres à l'entretien sont plus courtes mais exécutées de manière récurrente selon une rotation préétablie entre les familles d'un village ou d'un groupe désigné.
  585. 372. Pour ce qui est des conditions générales dans lesquelles s'exécutent les tâches, les travailleurs ne sont pas nourris (Note 514) et doivent même parfois apporter de la nourriture pour les militaires (Note 515). Les travailleurs ne sont ni payés (Note 516) ni indemnisés pour les matériaux qu'ils ont dû fournir (Note 517). Ils peuvent être soumis à des mauvais traitements entraînant de graves blessures (Note 518) et font continuellement l'objet d'injures et d'insultes (Note 519). Des exactions à caractère sexuel auraient aussi été perpétrées par les militaires (Note 520).
  586. 373. Les témoins ont affirmé qu'il était possible d'être exempté du travail à exécuter dans la mesure où une certaine somme d'argent est versée aux autorités requérant le travail (Note 521) ou qu'un substitut est envoyé (Note 522). Dans un cas, le village entier a préféré payé 26 000 kyats aux fins d'engager quatre substituts pour exécuter le travail d'entretien requis par les militaires d'un camp voisin (Note 523).
  587. 3) Autres travaux d'appui aux forces armées
  588. a) Eléments de preuve documentaire
  589. 374. Type et conditions de travail. En plus du travail de portage et des travaux effectués dans des camps militaires, d'autres tâches ont dû être accomplies pour les forces armées ou pour d'autres autorités. Par exemple, les informations indiquent que des villageois ont été forcés de jouer le rôle de guide pour les militaires dans les régions que les soldats connaissaient mal. Il en est ainsi en particulier des régions que les soldats occupaient depuis peu. Etant donné qu'il s'agissait de zones de conflits, les villageois pris comme guides, ont dû également servir d'otages pour les soldats: si la colonne était attaquée, c'est le guide qui était puni ou abattu sous l'accusation d'avoir conduit la colonne dans une embuscade. Dans certains cas, c'est tout le village qui subissait des représailles si la colonne était attaquée, sous l'accusation d'avoir fourni des informations aux groupes d'opposition sur les mouvements de la colonne militaire.
  590. 375. Des civils, y compris des femmes et des enfants, ont aussi été utilisés comme boucliers humains et pour des tâches de déminage. Courantes dans le contexte du portage, comme on l'a vu aux paragraphes 300 et 319 ci-dessus, ces tâches ont aussi été demandées à des civils dans des contextes autres que le portage. Dans des zones où l'on pouvait craindre des conflits, des civils, comprenant des femmes et des enfants, ont souvent été contraints de balayer les routes avec des branches d'arbres ou des balais afin de détecter ou de faire exploser des mines. Selon certaines sources, il semble que les militaires espéraient ainsi que les insurgés, sachant les dangers courus par les civils, hésiteraient à miner ces routes (Note 524). Lorsque les villageois trouvaient des mines, le village subissait souvent des représailles (Note 525).
  591. 376. Des villageois ont aussi été forcés de monter la garde, particulièrement de nuit et dans des zones de conflits, de garder des camps militaires, des routes, des voies ferrées et d'autres sites importants. Ils n'étaient pas armés et devaient alerter les soldats s'ils voyaient quelqu'un. Il n'était pas rare, lorsqu'ils étaient ainsi alertés, que les soldats ne rouent de coups la personne qui les avait prévenus, soit sous prétexte qu'elle avait donné une fausse alerte, soit parce qu'elle n'avait pas retenu le suspect; si le site qu'ils étaient supposés garder était attaqué ou si des mines étaient posées, les personnes qui étaient de faction ou le village tout entier pouvaient subir des représailles. Si les sentinelles étaient prises en train de dormir alors qu'elles étaient en faction, elles étaient punies et généralement passées à tabac (Note 526). Les villageois étaient souvent réquisitionnés aussi pour construire des clôtures le long de certaines routes afin qu'ils soit plus difficile aux groupes d'opposition d'y poser des mines ou d'y organiser des embuscades (Note 527).
  592. 377. Des propriétaires de chars à boeufs, de bateaux, de véhicules à moteur ou d'autres moyens de transport ont été régulièrement obligés de mettre leurs services à la disposition des militaires pour le transport de personnes, d'équipements et de fournitures pour le camp, pour transporter les travailleurs soumis aux travail forcé jusque sur les lieux de travail et dans le cadre de projets à caractère lucratif entrepris par les militaires (Note 528).
  593. 378. Exemples. Les éléments de preuve documentaire fournis à la commission renseignent sur d'autres types de travaux effectués pour des militaires, notamment les tâches de déminage et de garde. Des informations à ce sujet proviennent des Etats Chin, Kayah, Kayin, Mon et Shan, et des divisions de Bago, Sagaing et Tannintharyi. Il convient de se référer également à la partie concernant le portage (Note 529) pour plus de détails sur le déminage et sur les autres travaux exigés dans le contexte du portage.
  594. 379. L'utilisation de civils pour des travaux de déminage, notamment pour "balayer" les routes à la recherche de mines au moyen d'objets pesants, paraît avoir été fréquente dans les zones de conflits potentiels, notamment dans l'Etat Kayin (Note 530), dans certaines parties de la division de Bago près de la frontière avec l'Etat Kayin (Note 531) et dans l'Etat Mon (Note 532). Le recours à des civils comme guides, boucliers humains ou otages a également eu lieu dans ces zones, notamment dans des parties récemment reprises par les forces armées sur les groupes d'opposition (Note 533). Ces informations portent sur une période allant de 1992 à 1997.
  595. 380. Le travail de sentinelle était également courant dans de nombreuses parties du Myanmar, souvent le long des routes et des voies ferrées récemment construites. Des informations sur ce point proviennent de la partie orientale du pays, dans les Etats Shan (Note 534), Kayah (Note 535), Kayin (Note 536), Mon (Note 537) et dans la division de Tanintharyi (Note 538) ainsi que de la partie occidentale du pays dans la division de Sagaing (Note 539) et dans l'Etat Chin (Note 540). Ces informations portent sur une période allant de 1994 à 1997.
  596. 381. La réquisition de véhicules pour usage militaire a été courante dans la plupart du pays et les demandes de véhicules allaient souvent de pair avec des demandes de porteurs ou de travailleurs pour les camps militaires. La commission a reçu des informations spécifiques à cet égard en provenance de l'Etat Kayin (Note 541), de la division de Bago (Note 542) et de la division de Sagaing (Note 543). Les informations portent sur une période allant de 1994 à 1996.
  597. b) Eléments de preuve testimoniale
  598. 382. Au portage et aux travaux liés aux camps militaires s'ajoutent nombre de tâches que les témoins ont identifiées et qui doivent être exécutées au profit des militaires ou autres forces publiques. Vingt-deux témoins (Note 544) provenant des Etats Chin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan et des divisions de Bago et Tanintharyi ont donné des précisions à cet égard. Les éléments de preuve pertinents s'étendent de 1986 au début de l'année 1998 bien que la majorité se réfère à des événements qui se sont produits entre les années 1996 et 1998.
  599. 383. Des personnes de toutes les parties du pays ont affirmé avoir été obligées ou avoir vu d'autres personnes requises de monter la garde le long des routes (Note 545) ou voies ferrées (Note 546), à l'entrée des villages (Note 547) ou à proximité de camps militaires qu'elles avaient bien souvent préalablement dû construire (Note 548). D'autres devaient se tenir à des endroits spécifiques de manière à informer les militaires des mouvements suspects provenant de la mer ou de la frontière voisine (Note 549).
  600. 384. Les militaires utilisent généralement les services des chefs de village ou de section pour transmettre l'ordre qui précise la nature de la garde à exécuter (Note 550). En règle générale, une personnes par famille est requise (Note 551), hommes, femmes et enfants pouvant exécuter cette tâche (Note 552).
  601. 385. Les personnes montant la garde travaillent en groupe (Note 553) pendant une durée qui peut varier d'un à sept jours (Note 554). Elles doivent rester permanence à leur site de guet, doivent y passer la nuit et répartir la garde de telle sorte qu'il y ait une personne en faction nuit et jour. Un assoupissement peut être réprimé par une sanction physique (Note 555), voire des représailles contre le village entier (Note 556).
  602. 386. La garde implique parfois la pose de clôture le long de la route ou le balayage des routes, le matin et le soir, aux fins de vérifier si des mines y auraient été posées (Note 557). Ce contrôle se fait à l'aide d'un bâton ou d'un rondin attaché à une charrette et peut aussi être exigé aux environs des villages et camps militaires (Note 558). Il s'agit d'un travail dangereux; les témoins ont déclaré avoir vu des personnes blessées, voire décédées à la suite de l'explosion d'une de ces mines (Note 559).
  603. 387. Les personnes qui montent la garde ne sont ni rémunérées (Note 560) ni nourries (Note 561) et font régulièrement l'objet d'insultes (Note 562). Il est toutefois possible d'éviter de faire ce travail en payant les militaires qui le requièrent (Note 563) ou en envoyant un substitut (Note 564).
  604. 388. Enfin, d'autres témoins ont déclaré avoir eu à tenir en permanence charrettes, tracteurs, pousse-pousse, canoës et bateaux à disposition, aux fins de satisfaire les besoins en transport des militaires (Note 565).
  605. 4) Recrutement forcé
  606. a) Eléments de preuve documentaire
  607. 389. Les informations fournies à la commission indiquent qu'il a été fait régulièrement appel au recrutement forcé dans tout le Myanmar, y compris de mineurs, pour incorporation dans la Tatmadaw et dans différentes milices. Il semble que ce recrutement n'obéissait à aucune législation sur le service militaire obligatoire (Note 566) mais qu'il était effectué de façon essentiellement arbitraire (Note 567).
  608. 390. Lorsqu'on avait besoin d'un assez grand nombre de recrues, il n'était pas rare que les autorités du village ou de l'arrondissement organisent une "loterie" pour tirer au sort ceux qui devaient effectuer du service militaire. Ceux qui étaient choisis étaient alors engagés de force et il s'agissait fréquemment de mineurs (Note 568). Des méthodes moins directement coercitives étaient également utilisées: dans beaucoup de régions, les familles de soldats étaient exemptées de travail forcé, d'imposition arbitraire ou de déplacement forcé (Note 569).
  609. 391. Des informations ont été reçues à propos d'enrôlements forcés dans la Tatmadaw effectués dans diverses régions du pays. Dans la division de Tanintharyi, le Commandement de la région côtière aurait exigé de chaque bataillon qu'il obtienne cinq recrues par mois en 1996 et trois recrues par mois en 1997, sous peine d'une amende de 25 000 kyats pour chaque recrue manquante mais avec une récompense du même montant pour chaque recrue supplémentaire. C'est la raison pour laquelle de nombreux hommes et adolescents de la région furent recrutés de force et que beaucoup d'autres prirent la fuite pour éviter la conscription (Note 570). Dans un document fourni à la commission, un jeune karen de 22 ans originaire de la division de Ayeyarwady a décrit comment les soldats du gouvernement se rendaient au moins une fois par an dans son village et exigeaient 10 recrues pour l'armée. Le seul moyen dont disposait un foyer pour ne pas être contraint de fournir une recrue était de verser 200 kyats (Note 571). Des informations analogues ont été reçues à propos d'autres régions du pays, y compris la division de Bago, l'Etat Kayah, l'Etat Kayin, l'Etat Rakhine, la division de Sagaing et l'Etat Shan (Note 572).
  610. 392. La commission a également reçu des informations faisant état de conscription forcée dans différentes milices, dont un certain nombre d'ordres des autorités demandant aux villages de fournir des recrues à la fois à temps complet et en tant que réservistes pour la Milice du peuple de l'Etat Chin (Note 573). Ces ordres étaient datés de 1995 et 1996. L'un d'entre eux contenait la menace d'une "action décisive" contre les villages qui omettraient de fournir le nombre de recrues demandé. Du texte de l'un de ces ordres, il ressort que les villages étaient également tenus de verser le coût de la nourriture des recrues durant leur formation militaire (Note 574). En 1996 et 1997, 30 villages des circonscriptions de Dawei (Tavoy) et de Thayetchaung ont également été contraints de fournir des recrues pour la Milice du peuple et ont été menacés d'être déplacés s'ils se soustrayaient à cette demande (Note 575). A partir d'au moins 1995, des villages des circonscriptions de Hlaingbwe et Myawady dans l'Etat Kayin ont été forcés par la DKBA de lui fournir des recrues sous peine d'amendes ou de mort (Note 576).
  611. b) Eléments de preuve testimoniale
  612. 393. Huit témoins ayant déserté la Tatmadaw entre le début des années quatre-vingt et l'année 1996 ont témoigné devant la commission (Note 577). Aucun d'entre eux n'a donné de précision sur la manière dont ils avaient été recrutés, à l'exception d'un témoin qui a précisé que, lorsqu'il avait rejoint l'armée, il avait dû signer un engagement de dix années minimum (Note 578). S'ils sont retrouvés, les déserteurs sont généralement jetés en prison ou, s'ils avaient déserté avec des armes, exécutés (Note 579). La commission ne dispose pas d'élément de preuve testimoniale pouvant confirmer les éléments de preuve documentaire qui lui ont été soumis à propos des conditions de recrutement dans la Tatmadaw et dans les différentes milices.
  613. 5) Travail sur des projets agricoles, forestiers et d'autres projets de production
  614. a) Eléments de preuve documentaire
  615. 394. Type et conditions de travail. Les informations fournies à la commission indiquent que des villageois et, dans une moindre mesure, des citadins, ont été forcés de travailler sur toute une série de projets menés par les autorités, en particulier les autorités militaires. Ces projets comprenaient la culture de riz et autres cultures vivrières, des cultures de rapport telles que le caoutchouc, les élevages de crevettes, les fours pour la production de briques et la foresterie. Parfois, le produit de ces projets était utilisé par les militaires mais, dans la plupart des cas, il était tout simplement vendu. Le revenu ainsi obtenu n'allait pas aux villageois mais alimentait les fonds de l'unité militaire qui exigeait ce travail ou allait dans la poche de certains membres de cette unité. Une certaine partie de cet argent était parfois versée à des officiers n'appartenant pas à l'unité elle-même. La plupart du temps, l'unité intéressée était le bataillon ou le camp militaire local (notamment les unités de la NaSaKa dans les régions où celles-ci opéraient) mais des projets de plus grande ampleur pouvaient être réalisés au niveau de la division d'infanterie légère ou du commandement régional (Note 580).
  616. 395. Pour les projets d'agriculture, le travail forcé des villageois était utilisé pour la totalité du processus, depuis le défrichage de la terre jusqu'à la récolte. Pour l'abattage du bois, les villageois devaient abattre les arbres et les scier en grumes. Pour la fabrication de briques, ils devaient fournir en plus de leur travail la matière première et le combustible nécessaires. Ils n'étaient pas payés et devaient apporter leurs propres outils et équipement. Souvent, la terre servant aux projets d'agriculture était confisquée aux villageois sans indemnisation. Dans certains cas, des champs déjà porteurs d'une récolte étaient confisqués sans indemnisation, leurs propriétaires étant tenus d'en poursuivre la culture et d'en donner la récolte aux militaires. Parfois encore, le processus se ramenait à une véritable extorsion: un village recevait tout simplement l'ordre de livrer une certaine quantité de récolte aux forces armées à la fin de la saison et c'était à ce village à trouver la terre, les semences ou les plants nécessaires et à assurer la récolte. Les villageois ne recevaient aucune rémunération sous quelque forme que ce soit. Dans certains cas extrêmes, les militaires se saisissaient tout simplement des récoltes lorsqu'elles étaient faites, ainsi que de la volaille, du bétail et d'autres biens. Les vols de ce type étaient les plus courants dans les zones occupées depuis peu de temps par les militaires ou dans des zones d'insurrection (Note 581).
  617. 396. Exemples spécifiques. Les informations reçues par la commission à ce propos concernent la plupart des régions du Myanmar, et notamment les Etats Kachin, Kayah, Kayin, Mon, Shan et Rakhine, ainsi que les divisions de Bago, Sagaing et Tanintharyi. Ce type de travail était le plus fréquent dans les zones où la présence militaire était la mieux établie. Des informations ont été reçues selon lesquelles plusieurs bataillons stationnés dans la division de Tanintharyi (Note 582) auraient utilisé du travail forcé pour des projets réalisés à leur propre profit ou pour celui de leurs officiers (Note 583).
  618. 397. La plupart des informations reçues ont trait à des cultures vivrières et de rapport effectuées pour les forces armées. Il s'agit notamment de cultures de riz, de légumes tels que haricots et maïs, de canne à sucre et de caoutchouc pour un certain nombre de bataillons stationnés dans les Etats de Kachin (Note 584), Kayah (Note 585), Kayin (Note 586), Mon (Note 587), Rakhine (Note 588) et Shan (Note 589), ainsi que dans les divisions de Bago (Note 590), Sagaing (Note 591) et Tanintharyi (Note 592). Dans l'Etat Rakhine, des musulmans ont aussi été forcés par les militaires d'effectuer des travaux agricoles pour les villageois birmans et rakhines (Note 593). Ces informations portent sur une période allant d'avant 1994 à au moins 1997.
  619. 398. Des informations ont été reçues concernant l'utilisation de travail forcé pour l'abattage de bois et la coupe de bambou à des fins apparemment commerciales. Ces informations portent sur les Etats Kayin (Note 594), Mon (Note 595) et Shan (Note 596) ainsi que sur les divisions de Sagaing (Note 597) et Tanintharyi (Note 598) pendant une période allant de 1992 à nos jours.
  620. 399. Des informations ont été reçues concernant le recours au travail forcé pour l'élevage d'animaux, le plus souvent des élevages de crevettes. Ces informations proviennent de l'Etat Rakhine (Note 599) et de la division Sagaing (Note 600). Elles portent sur une période allant de 1989 à au moins 1995.
  621. 400. Des informations ont été reçues concernant les fours que faisaient fonctionner les unités militaires pour la production de briques. Selon ces informations, il semble que du travail forcé a été exigé pour la collecte de combustible pour alimenter ces fours et pour le travail sur les fours eux-mêmes, dans l'Etat Kayin (Note 601), l'Etat Rakhine (Note 602) et la division de Tanintharyi (Note 603). Ces informations portent sur une période allant au moins de 1994 à 1996.
  622. b) Eléments de preuve testimoniale
  623. 401. Différents éléments de preuve ont révélé que les militaires mènent à travers le pays des activités agricole, piscicole, forestière et manufacturière qui sont susceptibles de leur permettre soit de répondre à leurs besoins en nature, soit de générer des profits. La preuve indique aussi qu'ils mobilisent pour ces activités la population du Myanmar qui doit les exécuter dans des conditions difficiles.
  624. 402. Cinquante-huit témoins ont fourni des éléments de preuve pertinents à cet égard (Note 604) et ont ainsi permis à la commission d'identifier quelques pratiques courantes des militaires.
  625. 403. D'abord, des témoins ont indiqué avoir été forcés de couper bois et bambous qui ont été par la suite vendus par les militaires (Note 605). D'autres ont été obligés de faire de l'élevage de poissons (Note 606) ou de crevettes (Note 607) pour les militaires, incluant toutes les activités afférentes qui doivent être entreprises du début du projet jusqu'à son suivi.
  626. 404. Plusieurs témoins ont été impliqués de force dans des activités agricoles qui sont organisées de différentes façons. Dans certains cas les militaires s'approprient sans indemnisation les terres des paysans et les forcent à les cultiver pour leur profit (Note 608). Des témoins ont indiqué avoir eu à quitter le Myanmar puisqu'ils n'avaient plus assez de terre pour assurer leur subsistance (Note 609). Dans d'autres cas, les militaires obligent les travailleurs à cultiver les terrains localisés dans le camp militaire (Note 610) ou à défricher la forêt ou la jungle à proximité du camp de manière à rendre ces terrains propres à la culture (Note 611). Les militaires indiquent souvent la quantité de culture qui doit être produite. Dans le cas où elle ne serait pas atteinte, les villageois doivent combler la différence sous peine de sanction (Note 612).
  627. 405. Les témoins qui ont apporté des éléments de faits pertinents se sont référés à des cultures de piments (Note 613), maïs (Note 614), riz (Note 615), caoutchouc (Note 616), noix (Note 617), canne à sucre (Note 618) et ananas (Note 619).
  628. 406. Une personne par famille est généralement requise pour exécuter le travail agricole (Note 620), l'ordre précisant les tâches à exécuter étant transmis par l'intermédiaire du chef de village (Note 621). Les témoins ont indiqué n'avoir reçu aucune rémunération pour le travail exécuté et avoir eu à apporter leur propre nourriture, outils ou boeufs pour le labour (Note 622).
  629. 407. Enfin, la preuve révèle que les militaires pénètrent parfois dans les villages et s'emparent sans indemnisation aucune des animaux et des cultures qui tombent sous leur main (Note 623).
  630. 6) Construction et entretien de routes, de voies ferrées et de ponts
  631. a) Eléments de preuve documentaire
  632. 408. Type et conditions de travail. La commission a reçu un très grand nombre d'informations détaillées au sujet du recours au travail forcé pour la construction de routes et de voies ferrées. Ces ouvrages étaient d'importance différente allant de petits projets nécessitant le travail de quelques villages situés à proximité, tels que le dégagement d'un chemin de terre allant jusqu'à un nouveau camp militaire (Note 624) jusqu'à des projets utilisant des dizaines ou des centaines de milliers de travailleurs. Par exemple, le gouvernement a déclaré dans les commentaires présentés au BIT que "799 447 travailleurs ... ont donné volontairement leur travail" (Note 625) pour la construction de la voie ferrée allant de Aungban à Loikaw qui relie les Etats Shan et Kayah; ailleurs, il a déclaré que 921 753 personnes ont participé à la construction d'une partie de la voie ferrée allant de Pakokku à Monywa dans les divisions de Magway et Sagaing, voie ferrée qui relie Chaung-U à Kalaymyo via Pakokku (Note 626), et qu'en janvier 1994 plus de 44 000 personnes ont le même jour "donné volontairement leur travail" pour la construction de trois sections de la voie ferrée allant de Ye à Dawei (Tavoy) entre l'Etat Mon et la division de Tanintharyi (Note 627).
  633. 409. Les témoins ont informé la commission que les personnes dont ils avaient obtenu des déclarations leur avaient toutes affirmé que les projets pour lesquels elles avaient été forcées de travailler ne leur étaient d'aucun profit. La raison en est en partie parce que les moyens de transport locaux (dont le plus fréquent est le char à boeufs) ne sont pas autorisés sur ces routes; en général, seuls des véhicules à moteur peuvent les emprunter alors que la très grande majorité des villageois ne possèdent pas ce type de véhicule (Note 628).
  634. 410. La fin du projet de construction ne signifie pas nécessairement la fin du travail forcé qui lui est lié. Souvent, lorsqu'une route ou une voie ferrée est achevée, surtout si elle se trouve dans des zones de conflits, les travailleurs sont contraints de rester en faction, à titre de sentinelle non armée, pour garder ces ouvrages la nuit, et de faire office de démineurs avant le passage des troupes, comme indiqué aux paragraphes 374 à 388 ci-dessus. Ces travailleurs doivent également assurer l'entretien du projet et procéder aux réparations nécessaires en cas de dommage. Au cours de la saison des pluies, les routes et d'autres infrastructures sont souvent emportées si bien que l'on a recours au travail forcé pour les réparer au cours des mois suivants (de novembre à janvier en général). En particulier parce qu'elles ont été hâtivement construites et traversent souvent des rizières, elles sont facilement endommagées et la plupart doivent être reconstruites chaque année (Note 629).
  635. 411. Dans les campagnes, une famille peut être appelée à fournir un travailleur jusqu'à deux semaines par mois et même parfois davantage, en particulier lorsque plusieurs projets doivent être exécutés simultanément. Ce travail s'ajoute à toutes les autres demandes de travail forcé tel que le portage ou le travail pour les camps militaires. Dans certains cas, lorsqu'un projet est particulièrement urgent ou important, toutes les personnes valides d'un village sont tenues d'y participer. Il convient de noter que le recours au travail forcé pour ce type de projet est beaucoup moins fréquent dans les zones urbaines que dans les villages ruraux.
  636. 412. Au travail forcé des populations civiles s'ajoutent un certain nombre de camps de travail répartis dans tout le pays où des prisonniers (Note 630) sont utilisés pour la construction de routes, voies ferrées et autres infrastructures ou pour travailler dans les carrières afin de produire les matériaux nécessaires à ces constructions. Ces prisonniers travaillent fréquemment chargés de lourdes chaînes. Des membres de la Tatmadaw sont aussi tenus de travailler sur ce type de projets (Note 631).
  637. 413. La commission a reçu des informations détaillées sur les conditions de travail des travailleurs forcés. Souvent, ces travailleurs devaient franchir des distances considérables pour se rendre sur les lieux de travail, en particulier pour les projets les plus importants exigeant un grand nombre de travailleurs. Selon certaines informations, des personnes résidant à plus de 100 kilomètres de là ont été contraintes de travailler à la construction de la voie ferrée de Ye à Dawei (Tavoy) (Note 632). D'une façon générale, il semble que les travailleurs devaient souvent marcher plusieurs heures pour parvenir aux chantiers considérés (Note 633). Lorsqu'un village, une famille ou un travailleur étaient appelés à achever une certaine quantité de travail (une longueur donnée d'accotement de route, une quantité donnée de kyin (Note 634), de déblai ou de pierres concassées), ils n'étaient pas autorisés à quitter le chantier avant d'avoir achevé cette tâche. Souvent, un délai leur était donné pour effectuer ce travail. Si le travail n'était pas achevé à la satisfaction des soldats chargés de la surveillance du chantier (si le travail était fait trop lentement ou qu'il était mal fait, par exemple), ce village, cette famille ou ce travailleur n'étaient pas autorisés à retourner chez eux, et les intéressés risquaient d'être battus ou punis de toute autre manière.
  638. 414. En général, il appartenait aux travailleurs d'organiser leur transport jusqu'au chantier mais, dans certains cas, les propriétaires d'un moyen de transport pouvaient être tenus de transporter gratuitement les travailleurs à leurs propres frais (Note 635). Les travailleurs devaient la plupart du temps apporter leur propre nourriture ainsi que les outils nécessaires, encore que, dans certains cas, ces outils étaient fournis (lorsque la population n'en disposait pas soit parce qu'il s'agissait d'une population urbaine, soit parce que le travail nécessitait des outils spéciaux). S'ils tombaient malades, ces travailleurs ne recevaient aucun traitement médical et ils devaient généralement verser une amende ou organiser leur remplacement s'ils voulaient pouvoir rentrer dans leur village pour y être soignés (Note 636). S'ils étaient blessés, la plupart du temps, ils n'étaient ni soignés ni indemnisés (Note 637). Les décès pour cause de maladie ou d'accident du travail semblent avoir été fréquents dans certains projets (Note 638).
  639. 415. A de rares exceptions près, les personnes forcées de travailler sur ces projets n'étaient pas payées (Note 639). La commission a reçu des informations selon lesquelles les travailleurs forcés ont parfois été payés pour le travail effectué sur la voie ferrée de Ye à Dawei (Tavoy), mais c'est là le seul projet pour lequel la commission a reçu ce type d'information et, même pour ce projet, les rémunérations étaient rares et souvent calculées à des taux bien inférieurs à ceux du marché (Note 640); il semble que ces rémunérations ont cessé car plusieurs informations ont été reçues selon lesquelles les travailleurs contraints de travailler sur ce projet n'avaient pas été payés en 1997 (Note 641).
  640. 416. Lorsqu'il était demandé à chaque foyer de fournir un travailleur, cette demande ne tenait généralement pas compte du nombre de personnes valides que comportait le foyer, si bien que, lorsqu'il ne consistait qu'en une veuve et son enfant, cette veuve devait aller travailler soit en prenant son enfant avec elle, soit en trouvant quelqu'un pour garder son enfant (Note 642). Si le foyer ne comportait qu'un homme adulte et que celui-ci devait travailler pour assurer la subsistance de sa famille, un autre membre du ménage devait aller travailler si l'on ne voulait pas que la famille meure de faim. Il en était ainsi en particulier au cours de la saison des pluies qui est la période la plus laborieuse pour les paysans, mais également la plus dangereuse sur les chantiers en raison des maladies plus fréquentes en cette saison et du risque accru de blessures ou d'accidents mortels dus aux glissements de terrains ou à l'effondrement des accotements (Note 643). C'est la raison pour laquelle on trouvait une grande proportion de femmes, d'enfants et de travailleurs âgés sur les chantiers où ils risquaient plus que d'autres d'être victimes des maladies et des accidents (Note 644). Plus que d'autres également ils couraient le risque de brutalités de la part des soldats (Note 645).
  641. 417. Une fois arrivés sur le chantier, les travailleurs devaient généralement s'occuper eux-mêmes de leur logement. En général, cela signifiait d'avoir à trouver un logement dans le village le plus proche ou de construire un abri sur le lieu de travail. Souvent, les travailleurs en étaient réduits à dormir sur le chantier sans aucun abri (Note 646). En général, le chantier ne comportait aucune installation sanitaire ou autres commodités de quelque nature que ce soit. Toutefois, pour certains projets plus importants, dont les chantiers devaient durer un certain temps, il existait parfois des installations sanitaires et des abris, encore que ceux-ci aient été construits grâce au travail forcé d'autres villageois.
  642. 418. Les travailleurs étaient généralement placés sous la surveillance de militaires, encore que sur certains projets cette surveillance ne fut pas constante. Etant donné que les soldats savaient à qui avait été assignée telle ou telle section du chantier, il leur était possible de prendre des mesures si une certaine partie du travail n'était pas achevée, et ils n'avaient donc pas nécessairement à être présents pendant que le travail était effectué (bien qu'ils le fussent souvent). Les travailleurs étaient généralement contraints d'effectuer de longues journées de travail, normalement de huit à douze heures par jour (Note 647), avec une pause d'une heure seulement pour le déjeuner au milieu de la journée. Aucun autre moment de repos ne leur était autorisé (Note 648). Les travailleurs étaient victimes de brutalités verbales et physiques de la part des soldats surveillant le projet, notamment s'ils ne travaillaient pas à la satisfaction de ces soldats; certains travailleurs sont morts par suite de ces brutalités (Note 649). Il n'était pas rare que des travailleuses soient violées par les soldats (Note 650). Les punitions infligées aux travailleurs considérés comme travaillant mal ou qui refusaient d'effectuer du travail forcé pouvaient être des coups de pied, des coups de poing, des coups de canne, de bâton ou autres tiges de bambou, l'arrestation et la détention dans les camps militaires, le carcan, ou dans certains cas la torture ou l'exécution (Note 651).
  643. 419. Exemples spécifiques. La commission a reçu des informations nombreuses et détaillées au sujet de l'utilisation du travail forcé pour des projets de construction, de réparation et d'amélioration des routes. Ces informations concernent les quatorze Etats et divisions du Myanmar.
  644. 420. Il y a des informations concernant l'utilisation du travail forcé pour les principaux projets de construction et d'amélioration des routes dans de nombreuses parties du pays. Il s'agit notamment d'une route allant de Myityina à Putao (par Sumprabum) dans l'Etat Kachin, en 1994 et 1995 (Note 652); de la ceinture routière de Mandalay en 1994 et 1995 (Note 653); de certaines parties de la route nationale allant de Yangon à Mandalay (par Toungoo) de 1994 à au moins 1996 (Note 654); d'une route allant de Haka dans l'Etat Chin à Gangaw dans la division de Magway en 1996 et 1997 (Note 655) et de Gangaw à Kalaymyo dans la division de Sagaing en 1995 (Note 656); de la route nationale allant de Yangon à Sittway (Etat Rakhine) depuis 1988 et d'une route à quatre voies qui continue depuis Sittway jusqu'à Taungpyo, à la frontière du Bangladesh, en 1991 et 1992 (Note 657); de la route de Labutta à Yangon (par Myaungmya, Pantanaw et Nyaungdone) qui relie les divisions de Yangon à Ayeyarwady, durant ces dernières années (Note 658); et d'une route reliant Ye dans l'Etat Mon à Kawthaung dans l'extrême sud de la division de Tanintharyi par Dawei (Tavoy) et Myeik (Mergui) depuis 1994 (Note 659).
  645. 421. En plus de ces grands projets routiers, les informations fournies à la commission indiquent que, dans différentes régions du pays, des réseaux extensifs de routes ont été construits en ayant recours au travail forcé, en particulier dans les zones récemment occupées par les militaires à la suite des offensives menées contre les groupes d'opposition. Une très grande quantité d'informations lui ont été adressées qui concernent la construction d'un grand réseau routier couvrant tout l'Etat Kayin ainsi que les zones frontalières de la division de Bago (Note 660) entre 1993 et 1998, et l'amélioration de certaines routes existantes dans la même région (Note 661). On a eu également recours de façon régulière au travail forcé pour le concassage de pierres dans la circonscription de Kyaukkyi en vue de la construction routière (Note 662). Le réseau routier de l'Etat Chin (Note 663) a également été amélioré et étendu au cours de ces quelques dernières années au moyen de travail forcé (Note 664) et, dans l'Etat Shan, le réseau routier de certaines régions du sud de l'Etat (Note 665) a été amélioré grâce au travail forcé depuis au moins 1992, mais plus particulièrement depuis 1996 (Note 666). Dans la division de Tanintharyi, outre la route allant de Ye à Kawthaung mentionnée au paragraphe 420 ci-dessus, il semble que dans deux régions particulières de cette division des réseaux routiers ont été développés en faisant appel au travail forcé: dans la région de la ville de Tanintharyi depuis 1994, et plus particulièrement depuis 1996 (Note 667), et dans la région située autour de Kanbauk dans la circonscription de Yebyu en 1995 (Note 668).
  646. 422. Il y a également des informations concernant la construction et la rénovation de routes dans l'Etat Kayah, en particulier des routes conduisant aux sites de réinstallation (Note 669); dans l'Etat Mon (Note 670); la division de Sagaing (Note 671); l'Etat Rakhine (Note 672); et la division de Ayeyarwady (Note 673).
  647. 423. En plus des projets de construction de routes, la commission a reçu des informations concernant l'utilisation de travail forcé pour des projets de construction de voies ferrées dans différentes régions du Myanmar. Un grand nombre d'informations portant sur une période allant de 1992 à 1997 parmi lesquelles figurent les copies d'ordres émanant des autorités et exigeant une main-d'oeuvre pour le projet montrent que des milliers de personnes (Note 674) ont été contraintes de travailler à la construction d'une voie ferrée allant de Ye dans l'Etat Mon à Dawei (Tavoy) dans la division de Tanintharyi (Note 675).
  648. 424. Dans l'Etat Shan, des personnes ont été forcées de travailler sur plusieurs projets de construction de voies ferrées, y compris une voie ferrée allant de Shwenyaung à Namhsam à partir de 1993, une section de la voie ferrée allant de Namhsam à Mongmai à partir de 1992 et une section de la voie ferrée allant de Laikha à Mongkaing en 1996 (Note 676).
  649. 425. Des informations ont été reçues concernant l'utilisation de travail forcé pour la construction d'une voie ferrée allant de Aungban dans l'Etat Shan à Loikaw dans l'Etat Kayah, en 1992 et 1993 (Note 677). Pour la construction de cette voie ferrée, les travailleurs ont été pris, entre autres lieux, dans la ville de Loikaw et dans des camps de réinstallation tels que le camp de réinstallation proche de Demawso.
  650. 426. Des informations ont également été reçues au sujet de l'utilisation du travail forcé sur une voie ferrée reliant Chaung-U et Pakokku à Kalaymyo, en particulier la section allant de Pakokku à Myine dans la division de Magway et la section allant de Gangaw, dans la division de Magway, à Kalaymyo, dans la division de Sagaing (Note 678). Une grande partie des personnes forcées de travailler sur cette section étaient originaires de l'Etat Chin. Ces informations portent sur une période allant de 1993 à 1995 (Note 679).
  651. b) Eléments de preuve testimoniale
  652. 427. Routes, ponts et autres infrastructures routières connexes. Près de 100 témoins, appartenant à différents groupes ethniques (Note 680), ont déclaré avoir eu à travailler ou avoir vu des personnes obligées par les autorités à travailler sur des routes ou infrastructures routières connexes. Ces témoignages couvrent une bonne partie du territoire du Myanmar; ils concernent des routes faisant partie d'un réseau entre villes et villages, ou des routes reliant des camps militaires à ce réseau ou entre eux (Note 681), et décrivent principalement des faits qui se seraient produits au cours des dernières années, voire des derniers mois (Note 682). Un témoin, qui est retourné au Myanmar au début de l'année 1998 après six ans d'absence, a observé que le travail exigé de la population pour ce qui est de la construction et de l'entretien des routes avait substantiellement augmenté (Note 683).
  653. 428. Pour ce qui est de l'organisation du travail et des conditions d'exécution, les témoignages des personnes qui ont dû travailler corroborent ceux des autorités, qu'il s'agisse de chefs de villages (Note 684), de chefs de section (Note 685) ou d'un déserteur de la Tatmadaw qui avait été impliqué dans l'organisation du travail (Note 686).
  654. 429. Dans l'ensemble du territoire du Myanmar, les autorités recrutent la main d'oeuvre nécessaire pour les travaux de routes suivant une méthode analogue. Les militaires transmettent un ordre écrit à une autorité civile locale, généralement un chef de village (Note 687); cet ordre précise la tâche à exécuter et il est parfois accompagné de menaces qui sont exprimées par une cartouche ou un morceau de charbon joints en annexe; ces symboles signifient que des représailles peuvent être prises par les autorités contre la personne ou le village défaillants (Note 688). A l'exception de la situation qui prévaut au nord de l'Etat Rakhine, sur laquelle nous reviendrons, les militaires n'interviennent généralement pas directement (Note 689).
  655. 430. Une section déterminée de route à construire ou à réparer est assignée à chaque groupe, section ou village. Le chef de village doit trouver la main-d'oeuvre nécessaire (Note 690). Une personne par famille est généralement requise pour exécuter le travail mais les autorités peuvent, au gré de leurs besoins, en réclamer d'autres (Note 691). Les témoins entendus par la commission ont déclaré que hommes, femmes et enfants, dont les âges varient entre 12 et 72 ans, accomplissaient du travail obligatoire sur les projets routiers (Note 692). Même les membres des familles susceptibles d'exercer une certaine influence sur les autorités sont obligés de travailler à la construction ou à la réfection de routes (Note 693). On trouve des enfants en grand nombre sur ces chantiers car, dès qu'ils sont en mesure de travailler, les parents les envoient exécuter la tâche exigée de manière à ce que, pour leur part, ils puissent continuer à pourvoir aux besoins de la famille en cultivant leurs terres ou en occupant un emploi ou une tâche rémunérés (Note 694).
  656. 431. Les travaux de construction de route consistent, de manière générale, à niveler le terrain, couper les arbres, briser la pierre, transporter la terre pour les remblais et étendre le bitume (Note 695). Pour ce qui est de la réfection, les travailleurs doivent entretenir les routes et sont même contraints à les refaire complètement, dans certaines régions, après chaque saison des pluies. Plusieurs témoins ont déclaré que les routes construites ou rénovées sont réservées à l'usage exclusif des autorités (Note 696).
  657. 432. Les conditions d'exécution sont dures (Note 697); les journées sont longues, variant entre 8 à 12 heures de travail (Note 698). Le travail est parfois accompagné de mauvais traitements, incluant passages à tabac, coups de bottes ou de bâtons (Note 699). Les actes de torture ou de violence extrêmes, incluant le viol, ne sont pas exclus (Note 700). Certains travailleurs sont décédés à la suite de complications dues à la faim, à la malaria, à d'autres maladies infectieuses et à l'absence de soins dispensés en temps opportun (Note 701).
  658. 433. Sauf en de rares et exceptionnelles occasions, les personnes recrutées ne sont ni payées ni nourries (Note 702). Lorsque interrogés à cet égard, les témoins ont tous affirmé ne pas pouvoir refuser d'exécuter la besogne puisqu'ils craignent les sanctions physiques ou les amendes que les autorités peuvent imposer (Note 703). Les outils ne sont généralement pas fournis (Note 704) et, lorsque les travailleurs doivent demeurer sur le site d'exécution, ils doivent eux-mêmes construire les abris de fortune nécessaires pour passer la nuit (Note 705).
  659. 434. Dans plusieurs cas, les témoins ont indiqué qu'il est possible de bénéficier d'une exemption de travail en échange d'un montant d'argent qui varie substantiellement d'un cas à l'autre (Note 706). Un témoin a observé que cette pratique a pour conséquence de faire porter le fardeau du travail requis par les autorités sur les personnes les moins bien nanties puisqu'elles ne possèdent pas les fonds nécessaires pour être exemptées (Note 707).
  660. 435. Enfin, la situation qui prévaut dans le nord de l'Etat Rakhine semble aggravée en tous points par rapport au reste du pays en général. La plupart des personnes interrogées à cet égard, qui proviennent du groupe ethnique Rohingyas et qui ont très récemment quitté le pays, ont affirmé faire l'objet d'une discrimination systématique de la part des autorités qui se traduit, pour ce qui est du travail sur les routes, par une charge de travail écrasante (Note 708). En fait, le travail n'est pas vraiment organisé de manière systématique (Note 709); les Rohingyas peuvent être requis de travailler par toutes autorités, qu'il s'agisse de l'armée, de la NaSaKa ou de la police locale. L'ordre peut en fait provenir tant du chef de village que de toutes autres autorités qui ont besoin de main d'oeuvre pour un travail donné. Les conditions de travail sont excessivement pénibles; les tâches devant être exécutées dans un climat où insultes, injures, mauvais traitements et actes de torture sont monnaie courante (Note 710).
  661. 436. Les chemins de fer. Sur la base des éléments de preuve testimoniale, la commission conclut que, depuis au moins 1990, les autorités du Myanmar auraient eu recours au travail forcé pour la construction et l'entretien de différentes voies ferrées à travers le pays. Quarante et un témoins (Note 711) ont fourni à la commission des informations pertinentes sur les voies ferrées qui ont été réalisées ou qui sont en cours de construction dans les Etats Kachin (Note 712), Kayah (Note 713), Mon (Note 714), Shan et dans les divisions de Bago (Note 715), Tanintharyi et Yangon.
  662. 437. Les travailleurs requis pour les travaux ferroviaires sont recrutés suivant la même méthode que pour les routes, les militaires utilisant les services des chefs de village (Note 716). Une personne par famille étant requise (Note 717), chaque famille, groupe ou village se voient assigner un tronçon de la voie à exécuter (Note 718). Des hommes, femmes et enfants ont déclaré avoir travaillé sur ces chantiers ferroviaires ou avoir vu des personnes contraintes de le faire (Note 719); il est courant de rencontrer des enfants désignés par leur famille pour réaliser le travail requis (Note 720).
  663. 438. Se côtoient aussi sur ces chantiers soldats et prisonniers. Le travail réalisé par ceux-ci n'est pas différent de celui qui est exigé des civils, aux seules exceptions près que les soldats ne doivent travailler qu'un nombre fixe d'heures sans avoir à terminer obligatoirement la tâche assignée (Note 721) et que le travail le plus dur est réservé aux prisonniers (Note 722).
  664. 439. Le travail relatif aux voies ferrées consiste, dans un premier temps, à réaliser les travaux préparatoires de terrain, incluant le nivellement (Note 723). Par la suite, les travailleurs doivent concasser la pierre nécessaire (Note 724), épandre les gravillons, couper le bois pour faire des traverses (Note 725) et poser les traverses et les rails (Note 726). Suivent les travaux d'entretien comprenant l'enlèvement des herbes et buissons nuisibles (Note 727). Le travail commence tôt le matin pour se terminer à la fin de la journée, voire en cours de soirée, et dans certains cas sans que les travailleurs puissent bénéficier d'un moment de répit à la mi-journée (Note 728).
  665. 440. Les travailleurs ne sont pas nourris (Note 729), doivent dormir sur le chantier s'il est trop éloigné de leur domicile (Note 730) et généralement fournir les outils nécessaires à l'exécution de la tâche (Note 731). Ils ne sont pas payés (Note 732) bien que certains se seraient vu promettre une indemnisation qu'ils n'ont du reste jamais reçue (Note 733).
  666. 441. Les travailleurs sont soumis à des mauvais traitements lorsque les militaires qui supervisent le travail estiment que le travail ne progresse pas de manière satisfaisante (Note 734).
  667. 442. Il est possible d'être exempté du travail forcé dans la mesure où une certaine somme d'argent est versée aux autorités (Note 735) ou qu'un substitut est proposé (Note 736).
  668. 443. Enfin, un témoin a mentionné que les militaires lui réclament, outre le travail à exécuter, une taxe en raison du fait que le chemin de fer passe désormais à proximité de son village (Note 737).
  669. 7) Autres travaux d'infrastructure
  670. a) Eléments de preuve documentaire
  671. 444. Type et conditions de travail. En plus des informations concernant l'utilisation du travail forcé pour la construction de routes, de voies ferrées et d'infrastructures connexes, la commission a également reçu des informations selon lesquelles, dans la plupart des régions du Myanmar, des personnes ont été forcées de travailler à la construction et à l'entretien d'autres projets d'infrastructure. Il s'agit notamment de travaux d'irrigation, de barrages, de canaux, de centrales électriques, d'un gazéoduc, d'aéroports, d'aires d'atterrissage pour hélicoptères, d'écoles, d'hôtels et d'un musée, ainsi que d'infrastructures liées à des événements tels que le Festival de sport estudiantin qui a lieu chaque année dans la capitale d'un Etat ou d'une division différents (Note 738).
  672. 445. D'une façon générale, la nature de ce travail et son organisation sont les mêmes que celles qui ont été décrites pour les infrastructures routières et ferroviaires (Note 739).
  673. 446. Exemples spécifiques. Les informations fournies à la commission contiennent des détails sur l'utilisation du travail forcé pour l'exécution d'un très grand nombre d'autres projets d'infrastructure dans la plupart des régions du pays.
  674. 447. Il a été fait appel au travail forcé pour construire des barrages et autres travaux d'irrigation et d'énergie hydroélectrique. Il s'agit notamment de barrages dans la division de Bago (Note 740) et dans l'Etat Rakhine (Note 741), de barrages et de travaux d'irrigation dans la division de Sagaing (Note 742), d'un grand barrage dans l'Etat Shan (Note 743), d'un barrage dans la division de Tanintharyi (Note 744) et d'un canal dans la division de Yangon (Note 745). La plupart de ces projets sont des projets importants impliquant des centaines ou même des milliers de travailleurs.
  675. 448. Des éléments de preuve présentés à la commission sous la forme de témoignages secondaires montrent qu'il a été fait appel à du travail forcé pour la construction d'hélipads dans la circonscription de Yebyu dans la division de Tanintharyi, d'un hélipad dans le village de Byu Gyi, d'un autre entre Kadaik et Ohnbinkwin, et d'un troisième entre Migyaunglaung et Mayan Chaung, tous construits en 1995 (Note 746). Il y a également un élément de preuve sous la forme d'un témoignage secondaire concernant un hélipad construit dans la même région en 1996 (Note 747). Dans une communication adressée à la commission, la compagnie TOTAL a déclaré que la plupart des hélipads situés sur le trajet de l'oléoduc avaient été construits par TOTAL ou par des sociétés travaillant pour TOTAL et appliquant son code de conduite, mais que TOTAL ne savait pas dans quelles conditions d'autres hélipads dans la région avaient été construits (Note 748).
  676. 449. Selon les informations, il a été fait appel à du travail forcé, entre autres auprès de populations non bouddhistes, pour la construction et la rénovation de pagodes dans l'Etat Chin (Note 749), dans l'Etat Shan (Note 750), dans la division de Tanintharyi (Note 751), pour la construction d'un monastère dans la division de Sagaing (Note 752), ainsi que pour travailler sur le chantier du Palais de Bayintnaung à Toungoo dans la division de Bago (Note 753), du Palais de Mandalay (Note 754), et à la construction d'un musée du Bouddha à Sittway dans l'Etat Rakhine (Note 755).
  677. 450. Des informations ont été fournies à propos de l'utilisation de travail forcé pour la construction d'écoles dans l'Etat Chin, dans l'Etat Kayin et dans la division de Sagaing, ainsi que de cliniques dans les divisions de Sagaing et de Tanintharyi (Note 756).
  678. 451. Il a été fait appel à du travail forcé pour d'autres projets tels que le Festival de sport estudiantin dans les Etats Chin et Rakhine (Note 757), pour des projets hôteliers dans l'Etat Rakhine (Note 758), pour la construction de toilettes pour un village dans l'Etat Kayin (Note 759) et pour la construction d'une clôture de 30 miles dans l'Etat Kachin (Note 760).
  679. 452. Selon les éléments de preuve soumis à la commission sous la forme de témoignages secondaires, il aurait été fait appel à du travail forcé jusqu'au mois de mai 1995 pour des travaux de nettoyage en vue de faciliter l'accès aux équipes du projet d'oléoduc de Yadana dans la circonscription de Yebyu, division de Tanintharyi (Note 761). Dans une communication adressée à la commission, la compagnie TOTAL a déclaré qu'il était faux de prétendre que ces travaux de nettoyage aient pu être réalisés par des travailleurs forcés dans le but de faciliter l'accès aux équipes du projet. Au cours des années 1993-94, le travail de nettoyage aurait été réalisé sous le contrôle de TOTAL par la Compagnie générale de géophysique (CGG) (Note 762). Etant donné les contradictions relevées entre les faits présentés et puisque la commission s'est vu refuser l'accès au Myanmar pour compléter ses éléments de preuve, aucune conclusion n'a pu être établie sur cette question.
  680. b) Eléments de preuve testimoniale
  681. 453. Vingt-deux témoins ont présenté des éléments de preuve portant sur la période 1993 à 1998 (Note 763) et qui concernent des travaux d'infrastructure réalisés dans les Etats Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan ainsi que dans les divisions de Ayeyarwady, de Bago et de Sagaing (Note 764).
  682. 454. Ces travaux d'infrastructure consistent notamment dans la construction de canaux d'irrigation (Note 765) ou de drainage (Note 766), d'aéroports (Note 767), d'une centrale hydroélectrique (Note 768), de villages (Note 769), de musées (Note 770) ou d'écoles (Note 771), dans la pose de lignes électriques (Note 772) et téléphoniques (Note 773) et dans des travaux généraux d'infrastructure préalables à la tenue d'un festival étudiant, incluant des travaux de nivellement et de préparation d'un terrain de sport (Note 774). Les travaux d'irrigation faisaient en général appel à des centaines de personnes venant de douzaines de villages qui se trouvaient souvent éloignés du chantier. Quant aux lignes téléphoniques, un témoin a indiqué qu'il a dû couper des billots pour la ligne entre Panglong et Laikha (Note 775).
  683. 455. L'organisation du travail et les conditions d'exécution sont similaires à celles décrites pour les travaux d'infrastructure routière ou ferroviaire (Note 776). L'ordre précisant le travail à être exécuté est généralement transmis par une autorité civile locale (Note 777) responsable de trouver la main d'oeuvre pour exécuter le travail requis. Toutefois, les militaires peuvent intervenir directement et saisir par la force les personnes dont ils estiment avoir besoin (Note 778).
  684. 456. Les villages ou groupes désignés (Note 779) se voient attribuer une section du projet qui doit être exécuté (Note 780). Pour ce faire, une personne par famille est généralement requise (Note 781) et la besogne est distribuée aux termes d'une rotation préétablie entre les familles du village ou groupe impliqué. Hommes, femmes et enfants -- pouvant n'avoir qu'une dizaine d'années (Note 782) -- travaillent sur ces chantiers.
  685. 457. Les travailleurs ne sont ni rémunérés (Note 783) ni nourris (Note 784) et doivent parfois passer de nombreuses nuits sur le site auquel ils sont affectés (Note 785). Plusieurs témoins ont indiqué qu'ils peuvent éviter de faire le travail dans la mesure où un substitut est trouvé (Note 786). Enfin, les conditions dans lesquelles le travail doit être exécuté sont pénibles et les travailleurs font souvent l'objet de mauvais traitements ou d'autres violations des droits fondamentaux de la personne humaine, incluant des actes de torture (Note 787).
  686. 8) Travaux à caractère général
  687. a) Type et conditions de travail
  688. 458. Des informations ont également été fournies à la commission selon lesquelles dans tout le pays des personnes ont été forcées d'effectuer diverses tâches de façon régulière telles que le nettoyage et la décoration de lieux publics, notamment en prévision de la visite de fonctionnaires de haut rang. Ce travail se déroulant par nature dans les zones urbaines, ce sont les résidents des villes qui ont été le plus souvent appelés à l'effectuer. Des employés du gouvernement, en particulier, ont été contraints d'effectuer ce travail pendant les week-ends (Note 788).
  689. 459. Il appartenait en général aux autorités de la circonscription d'organiser ce travail. Le plus souvent, une personne par famille était tenue de donner une journée de travail par week-end pour accomplir ces tâches. Parfois, ce travail s'effectuait sous la surveillance de soldats (Note 789).
  690. 460. Les résidents des villes étaient également tenus d'entretenir leurs maisons conformément à certaines exigences, sous peine d'expulsion. Ces exigences consistaient par exemple à veiller à ce que la peinture de la maison soit en bon état ou à remplacer les toits de chaume par un toit de tôle ondulée (Note 790).
  691. b) Exemples spécifiques tirés des éléments de preuve documentaire et testimoniale
  692. 461. La commission a recueilli des preuves sur cette question en provenance de différentes parties du pays. A Myaungmya, dans la division de Ayeyarwady, les autorités locales ont exigé qu'une personne par foyer travaille tous les samedis au nettoyage des routes et des ensembles scolaires et hospitaliers (Note 791). De même, une personne par famille devait effectuer différents travaux dans la ville de Mandalay (Note 792). Il a également été fait appel régulièrement à du travail forcé pour le nettoyage des abords du lac Hpa-an dans l'Etat Kayin (Note 793) et une demi-journée de travail a été exigée tous les samedis à Loikaw dans l'Etat Kayah, tant autour de la ville (Note 794) que pour un camp militaire (Note 795). Des travaux généraux de nettoyage et d'entretien ont dû aussi être effectués par un membre de chaque foyer tous les samedis dans la ville de Kawthaung dans la division de Tanintharyi (Note 796). Enfin, on a eu recours à du travail forcé pour le nettoyage de la ville de Mrauk-U dans l'Etat Rakhine en 1996 en prévision d'une visite d'un fonctionnaire de haut rang du gouvernement (Note 797).
  693. 462. Lorsqu'elle est arrivée à ces conclusions concernant les faits telles qu'elles figurent dans la partie C, la commission a été frappée par la véracité des comptes rendus faits par les personnes dont elle a entendu les témoignages directs. La commission a posé à ces témoins certaines questions pour sonder certains aspects de leurs témoignages en vue d'en établir la véracité, notamment en ce qui concerne leur éventuelle affiliation politique ou leur appartenance à un groupe d'opposition. Dans de nombreux cas, les témoins n'étaient pas des gens instruits et la commission a été frappée par le fait que, d'une façon générale, ils prenaient soin d'établir une distinction entre les choses qu'ils avaient vues ou vécues et celles dont ils avaient simplement entendu parler par des tiers. La commission a également été frappée par leur bonne foi et leur absence d'exagération. Pour ces diverses raisons, la commission n'a pas hésité à s'appuyer sur leurs témoignages.
  694. 463. Lorsqu'elle est parvenue aux conclusions concernant les faits qui figurent aux parties B et C, où ces conclusions se fondent sur des témoignages écrits tels que décrits précédemment, la commission a tenu compte de la relative probité des témoignages écrits tel qu'indiqué. La commission a été aidée dans cette tâche par sa confiance dans les témoignages oraux des témoins et par le fait que, dans une très large mesure, les témoignages oraux corroboraient de très nombreux aspects des témoignages écrits, tant en ce qui concerne les circonstances générales que les détails spécifiques.
  695. 464. Compte tenu de l'abondance des documents écrits dont elle disposait, la commission a pris en compte ce qu'elle considérait comme les informations les plus fiables et, bien que beaucoup de ses conclusions puissent être étayées par d'autres documents, elle n'a indiqué en note de bas de page que les principales de ses sources et non la totalité. Là encore, la commission est sûre de ces conclusions.
  696. 465. La commission tient à souligner que son enquête et ses conclusions n'auraient pas été possibles sans l'aide de nombreuses personnes. Même s'il est inhabituel de rendre hommage aux témoins d'une enquête, dans ce cas, les personnes qui ont apporté leur témoignage oral l'ont fait dans des conditions extrêmement difficiles et dans l'angoisse des représailles que pourraient prendre les autorités envers eux-mêmes ou leurs familles si leur identité venait à être connue. Certains témoins, par exemple, et en particulier l'un d'entre eux qui était souffrant, ont voyagé pendant plus de vingt jours pour venir apporter leur témoignage à la commission d'enquête.
  697. 466. La commission tient également à remercier plusieurs personnes et plusieurs organisations non gouvernementales qui l'ont aidée à identifier un certain nombre de témoins et qui ont pris les mesures parfois très complexes nécessaires pour que la commission puisse les rencontrer. C'est au dévouement de ces personnes que la commission doit d'avoir pu entendre un aussi vaste éventail de témoins et recueillir des informations récentes sur la situation au Myanmar.
  698. 467. Enfin, à cet égard, la commission tient à rendre hommage au personnel qui non seulement a bravé des situations parfois difficiles physiquement pour aider les membres de la commission à trouver des preuves sur le terrain mais qui a eu également la tâche de trier et contrôler soigneusement les très nombreux témoignages écrits permettant d'identifier les informations auxquelles se réfère le présent chapitre. La relative simplicité avec laquelle sont présentés les faits dans ce chapitre ne saurait dissimuler la complexité de cette tâche, encore que les notes de bas de page donnent un bon aperçu de leur inestimable travail.
  699. 13. Examen du respect de la convention
  700. 468. Obligations découlant de la convention. Comme indiqué ci-dessus, en ce qui concerne les Etats ayant ratifié la convention (Note 798), en vertu de l'article 1, paragraphe 1, de la convention, le gouvernement du Myanmar ne doit ni imposer du travail forcé ou obligatoire ni tolérer son imposition par d'autres et il doit abroger toute loi et tout texte réglementaire ou administratif prévoyant ou tolérant l'imposition de travail forcé ou obligatoire, de sorte que tout recours à un tel travail, qu'il soit le fait de personnes privées ou de fonctionnaires publics, s'avère illégal en droit national.
  701. 469. Dans le présent chapitre, la commission énonce ses conclusions quant au respect, par le gouvernement du Myanmar, de ses obligations en vertu de la convention, sur le plan des lois nationales, des textes réglementaires et administratifs et de la pratique. Ce faisant, la commission prend en considération les exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention (Note 799), de même que le statut actuel de l'article 1, paragraphe 2, et des articles 4 et suivants de la convention (Note 800). De plus, en énonçant ses conclusions quant au respect de la convention dans le droit et la pratique nationales, la commission aborde la question de l'imposition effective de sanctions efficaces pour faire respecter l'interdiction du travail forcé, conformément à l'article 25 de la convention (Note 801).
  702. A. Lois nationales et textes normatifs de caractère réglementaire ou administratif examinés à la lumière de la convention
  703. 1) Dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes et de décrets et directives subséquents traitant de la réquisition de main-d'oeuvre
  704. a) Applicabilité de la définition du travail forcé
  705. 470. La commission note qu'aux termes de l'article 11(d), lu conjointement avec l'article 8(1)(g), (n) et (o) de la loi sur les villages (Note 802), ainsi que de l'article 9(b) de la loi sur les villes (Note 803), du travail ou des services peuvent être imposés à toute personne résidant dans un arrondissement rural ou urbain, c'est-à-dire un travail ou des services pour lesquels l'intéressé ne s'est pas offert de plein gré et que la non-obtempération à une réquisition faite en application de l'article 11(d) de la loi sur les villages ou de l'article 9(b) de la loi sur les villes est passible des sanctions pénales prévues à l'article 12 de la loi sur les villages ou de l'article 9A de la loi sur les villes (Note 804). Ainsi, ces lois prévoient l'imposition d'un "travail forcé ou obligatoire" relevant de la définition de l'article 2, paragraphe 1, de la convention (Note 805).
  706. b) Non-applicabilité des exceptions définies à l'article 2, paragraphe 2, de la convention
  707. 471. La commission note que les dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes en vertu desquelles des habitants peuvent être tenus d'accomplir du travail forcé ou obligatoire sur réquisition générale ou individuelle du chef d'arrondissement sont "libellées dans des termes très larges", comme cela a par ailleurs été noté dans des instructions concernant l'application de la loi sur les villages (Note 806); le fait est que les habitants sont tenus d'assister le chef dans l'exécution de ses obligations publiques (Note 807), qui comprennent à leur tour l'obligation de fournir des guides, des messagers, des porteurs, etc., à toute troupe ou force de police postée à proximité de l'arrondissement ou le traversant et, d'une manière générale, l'obligation d'assister tous les agents du gouvernement dans l'exécution de leurs obligations publiques. De ce fait, le travail et les services qui peuvent être imposés en vertu de la loi sur les villages et de la loi sur les villes sont aussi indéfinis que les besoins du gouvernement; ils ne sont limités ni aux cas de force majeure ni aux menus travaux de village tels que définis à l'article 2, paragraphe 2 d) et e), de la convention (Note 808), et, de manière plus générale, ne rentrent dans aucune des exceptions énumérées à l'article 2, paragraphe 2.
  708. c) Expiration de la période transitoire
  709. 472. Dans ses observations concernant la plainte, le gouvernement n'a pas invoqué l'article 1, paragraphe 2, de la convention, qui permettait de recourir au travail forcé ou obligatoire pendant une période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans des conditions et avec les garanties stipulées par la convention; il ne l'a pas fait non plus lorsque l'occasion s'en était présentée antérieurement (Note 809). Pour les raisons précisées plus haut (Note 810), la commission considère que le recours à une forme de travail forcé ou obligatoire rentrant dans le champ d'application de la convention tel que défini à l'article 2 ne peut plus être justifié en invoquant le respect des dispositions de l'article 1, paragraphe 2, et des articles 4 à 24, bien que les interdictions absolues figurant dans ces dispositions lient toujours les Etats ayant ratifié la convention. De plus, en l'espèce, l'engagement pris en vertu de l'article 1, paragraphe 1, de la convention de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible interdit au gouvernement de recourir à une législation dont il avait déclaré pendant de nombreuses années qu'elle était obsolète et non appliquée (Note 811). La commission note néanmoins que les larges pouvoirs de réquisition de main-d'oeuvre pour du travail et des services énoncés dans la loi sur les villages et dans la loi sur les villes sont incompatibles non seulement avec l'obligation de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire, en vertu de l'article 1, paragraphe 1, de la convention, lu conjointement avec l'article 2, mais aussi avec les conditions et garanties prévues aux articles 9 à 14 et 17 à 19 de la convention pour restreindre et réglementer le recours au travail obligatoire en attendant son élimination (Note 812).
  710. d) Rôle de directives secrètes et du paiement de salaires
  711. 473. L'article 8(1)(g) de la loi sur les villages prévoit le versement de certaines sommes au chef pour rassembler et fournir des guides, des messagers, des porteurs, etc., mais aucune disposition de cette loi ni de la loi sur les villes ne prévoit de paiement aux habitants réquisitionnés pour le travail ou les services. Le décret (secret) daté du 2 juin 1995 portant "interdiction des contributions de travail non rémunéré dans les projets de développement national" souligne qu'"il est impératif qu'en obtenant la main-d'oeuvre nécessaire auprès de la population locale, il faut lui payer sa juste part" (Note 813). Si l'article 14 de la convention prévoit une rémunération du travail forcé ou obligatoire imposé au cours de la période transitoire, le simple paiement d'un salaire pour le travail obtenu par la réquisition d'habitants ne suffit pas à soustraire ce travail du champ d'application de la définition du travail forcé ou obligatoire donnée à l'article 2, paragraphe 1, de la convention. La rémunération ne change pas le caractère du travail imposé en tant qu'obligation ou par la force; ce travail devient simplement du travail forcé ou obligatoire rémunéré. Ceci résulte non seulement de la définition contenue à l'article 2, paragraphe 1, lui-même (qui n'aborde pas la question de la rémunération), mais aussi de la logique même de l'article 14, qui traite de la rémunération d'un travail défini comme travail forcé ou obligatoire. Aussi les "projets de développement national" auxquels le décret secret se réfère ne rentrent-ils dans aucune des exceptions prévues par l'article 2, paragraphe 2, de la convention, de sorte que le recours au travail obligatoire dans le cadre de tels projets, même si ce travail est pleinement rémunéré, doit être éliminé en vertu de l'article 1, paragraphe 1, de la convention. En résumé, le décret (secret) daté du 2 juin 1995 n'exonère pas le gouvernement de ses obligations en vertu de la convention.
  712. 474. Comme exposé plus haut (Note 814), la directive (également secrète) (no 82) datée du 27 avril 1995 visant à "mettre un terme à l'obtention de travail non rémunéré de la population locale pour des projets d'irrigation" dans la division de Yangon semble aller plus loin vers l'élimination du recours au travail forcé que le décret secret mentionné au paragraphe précédent, dans la mesure où cette directive mentionne, dans la traduction anglaise non officielle, l'"embauche" de travailleurs rémunérés. Cependant, cette directive reste équivoque lorsqu'elle parle de mettre un terme aux "pratiques consistant à obtenir du travail de la population locale sans compensation financière", ce qui peut ménager la poursuite de la pratique de l'"obtention" de travail de la population locale sous condition d'une rémunération. En tout état de cause, l'un et l'autre texte sont marqués secrets et semblent ainsi ne pas être accessibles à ceux qui sont supposés en bénéficier.
  713. 475. Plus importants, les éléments de preuve devant la commission quant à la pratique elle-même (Note 815) qui sont exposés au chapitre 12 et qui sont examinés dans la partie B du présent chapitre (Note 816) montrent que les populations locales continuent de faire l'objet de réquisitions pour fournir travail et services (sans aucune compensation).
  714. 2) Législation concernant la citoyenneté et autres textes ayant une incidence sur la liberté de mouvement
  715. 476. La commission note que la série de textes législatifs et administratifs déniant progressivement le statut de citoyen aux Rohingyas (Note 817), lus conjointement avec les restrictions concernant la liberté de mouvement des étrangers (Note 818), ainsi que les dispositions plus générales visant à contrôler tous les mouvements de la population (Note 819), ne rentrent pas, en eux-mêmes, dans le champ de la convention. Toutes ces dispositions restrictives ont néanmoins une incidence directe sur la faculté, pour la population, d'éviter d'être réquisitionnée en tant qu'"habitants" pour du travail forcé ou obligatoire, aux termes de la loi sur les villages et de la loi sur les villes ainsi que dans la pratique elle-même. Ceci touche en particulier la population Rohingya dans la partie septentrionale de l'Etat Rakhine.
  716. 3) Législation concernant le service militaire obligatoire
  717. 477. La commission note que les dispositions de la loi sur la milice populaire, telle qu'adoptée en 1959, semblent couvertes par l'exception prévue à l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention (Note 820). La commission n'a pas connaissance de modifications ultérieures de cette loi et ignore de même si cette loi est entrée en vigueur (Note 821). Lorsque des soldats ont été employés dans le cadre de projets civils de développement, comme le déclare le gouvernement (Note 822), la participation de conscrits n'aurait pas été compatible avec les termes de l'exception définie à l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention et aurait donc été contraire à l'obligation énoncée à l'article 1, paragraphe 1, de la convention, tandis que l'emploi à de telles fins de militaires de carrière engagés dans les forces armées sur une base volontaire ne relève pas de la convention.
  718. 4) Sanctions pour imposition illégale de travail forcé ou obligatoire
  719. 478. L'article 374 du Code pénal, cité au paragraphe 258 ci-dessus, satisfait à la première exigence de l'article 25 de la convention, à savoir que "le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales". Quant à savoir si les sanctions prévues par cet article 374, qui vont de l'amende à l'emprisonnement jusqu'à un an, satisfont à la deuxième exigence de l'article 25 de la convention, à savoir si elles "sont réellement efficaces", cela ne pourrait être apprécié que si elles étaient "strictement appliquées", comme le prévoit encore l'article 25. En l'absence de tout élément indiquant que l'article 374 du Code pénal ait jamais été appliqué (Note 823), la commission doit faire observer qu'aux termes de cette disposition, de même que de l'article 25 de la convention, les sanctions doivent être imposées pour le fait d'avoir exigé un travail forcé ou obligatoire qui est jugé illégal. Ainsi, seule une réquisition de travail ou de services qui ne serait pas couverte par les très larges dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes serait en théorie passible, au stade actuel, des sanctions prévues à l'article 374 du Code pénal, tandis que le travail forcé imposé en violation de la convention mais en conformité avec la loi sur les villages ou la loi sur les villes pourrait ne pas être punissable au niveau national. toutefois, comme il a été exposé au paragraphe 204, toute personne qui viole l'interdiction du recours au travail forcé en droit international se rend coupable d'un crime international et engage de ce fait sa responsabilité pénale individuelle. En vertu du Principe II des principes de droit international reconnus par le statut du Tribunal de Nuremberg et par le jugement prononcé par ce tribunal (Note 824), "le fait que le droit interne ne punit pas un acte qui constitue un crime de droit international ne dégage pas la responsabilité en droit international de celui qui l'a commis" (Note 825).
  720. B. La pratique nationale considérée à la lumière de la convention
  721. 479. Dans la présente partie de ce chapitre, la commission examine la conformité de la pratique nationale, telle qu'établie au chapitre 12, avec la convention. La commission analyse l'applicabilité de la définition donnée à l'article 2, paragraphe 1, de la convention et celle des exceptions énumérées à l'article 2, paragraphe 2, aux diverses formes de travail et de services décrites au chapitre 12, la pertinence des conditions et garanties énoncées aux articles 4 à 24 de la convention et, le plus important, les obligations du gouvernement, en vertu des articles 1 et 25 de la convention, par rapport à la pratique nationale.
  722. 1) Réquisition de main-d'oeuvre
  723. 480. Le système de réquisition et ses variantes. Comme indiqué dans la partie B du chapitre 12 (Note 826) et comme le confirment les éléments présentés dans la partie C du chapitre 12 (Note 827), il se dégage une ligne de conduite générale dans les procédés employés par les autorités dans l'ensemble du pays pour réquisitionner de la main-d'oeuvre, à savoir:
  724. -- des ordres écrits et parfois oraux émanant d'autorités administratives supérieures ou des militaires sont reçus par le chef de village ou par les fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement urbain;
  725. -- ces ordres précisent soit le nombre de personnes à fournir, soit la quantité de travail devant être accompli par les habitants;
  726. -- le travail peut consister en: portage, travail pour les camps militaires, autres travaux d'appui aux forces armées, travail dans le cadre de projets agricoles, forestiers et d'autres projets de production entrepris par les autorités, construction et entretien de routes, voies ferrées et ponts, autres travaux d'infrastructure ou autres travaux urbains de caractère général;
  727. -- c'est au chef de village ou aux fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement urbain de prendre les dispositions nécessaires en ordonnant à un certain nombre de foyers de fournir la main-d'oeuvre requise ou en allant trouver directement les personnes, en les envoyant à titre de sanction pour quelque contravention mineure ou encore en procédant à une "loterie" pour désigner les habitants qui seront astreints (Note 828). Dans des cas s'écartant de cette ligne générale, les personnes sont saisies directement par la troupe, sans l'intermédiaire du chef de village ou des fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement (Note 829). Quelle que soit la méthode employée, la commission constate sur la base des éléments de preuve qu'à l'exception des remplaçants qui sont occasionnellement loués par des foyers ou des individus requis pour le travail, les personnes auxquelles un travail ou service est demandé ne se sont pas proposées de leur plein gré pour ce travail ou service.
  728. 481. Les copies de plusieurs centaines d'ordres adressés aux chefs de village ou aux fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement ont été soumises à la commission (Note 830); aucun de ces ordres ne se réfère aux pouvoirs conférés par la loi sur les villages ou la loi sur les villes (Note 831) ou par quelque autre législation. Cependant, les méthodes employées pour la réquisition des habitants pour le travail et les services, telles que décrites au chapitre 12 et mentionnées ci-dessus, suivent d'une manière générale la marche à suivre prévue par la loi sur les villages et la loi sur les villes -- à l'exception des cas dans lesquels, notamment pour le portage, les civils sont saisis lors d'une rafle directement effectuée par la troupe, que ce soit de manière organisée ou improvisée (Note 832).
  729. 482. "Sous la menace d'une peine" (Note 833). Comme indiqué ci-dessus (Note 834), les ordres de réquisition pour du travail ou des services ne se réfèrent pas aux pouvoirs conférés par la loi sur les villages ou la loi sur les villes ou quelque autre législation. Ils ne se réfèrent pas non plus spécifiquement aux peines prévues à l'article 12 de la loi sur les villages et à l'article 9A de la loi sur les villes en cas de refus d'obtempérer à une réquisition (Note 835), bien que quelques-uns des ordres qui ont été soumis à la commission mentionnent dans des termes généraux une punition prévue par la législation en vigueur (Note 836). Cependant, comme indiqué dans la partie B du chapitre 12 (Note 837) et comme confirmé par les éléments présentés dans la partie C du chapitre 12 (Note 838), les ordres écrits de réquisition de porteurs et de travailleurs adressés aux chefs de village par l'administration militaire ou civile locale contiennent en général des menaces ouvertes ou implicites à l'égard de ceux qui refuseraient d'obtempérer (Note 839). Dans la pratique, les sanctions et représailles en cas de refus de se conformer aux exigences sont très dures, incluant violences physiques (Note 840), passages à tabac (Note 841), tortures (Note 842), viols (Note 843) et meurtres (Note 844). En outre, pour être exemptés des travaux qui leur sont assignés, les intéressés doivent acquitter certaines sommes (Note 845), de même que les personnes saisies directement par la troupe pour le portage ne peuvent obtenir leur libération qu'en versant une importante somme d'argent (Note 846). Ainsi, le travail et les services imposés dans la pratique à la population civile par réquisition formelle ou directement au moyen d'une rafle, tels que décrits au chapitre 12, rentrent dans la définition de l'article 2, paragraphe 1, de la convention, qui se réfère à "tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine (Note 847) quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré" -- la seule exception étant le travail ou les services accomplis par des remplaçants loués par certaines des personnes appelées pour ce travail ou ces services.
  730. 483. Main-d'oeuvre pénitentiaire. Outre la réquisition ou mobilisation directe d'habitants de villages et d'arrondissements urbains, les éléments présentés au chapitre 12 font également ressortir le recours à la main-d'oeuvre pénitentiaire pour le portage (Note 848) ainsi que dans le cadre des projets de travaux publics (Note 849). La convention exclut de son champ "tout travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à la condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées" (Note 850). A première vue, ces conditions semblent réunies lorsque la main-d'oeuvre pénitentiaire est employée par les autorités (Note 851). Cependant, la commission a constaté que, dans certains cas, les prisonniers étaient affectés, peu avant la date prévue de leur libération, à des travaux se prolongeant au-delà du terme de leur peine (Note 852). Dans de tels cas, le travail ou le service imposé à ces personnes ne résulte plus d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire et devient du travail forcé au sens de la convention (Note 853) du fait que ces personnes ne se sont pas portées volontaires pour la mission et ne peuvent s'y soustraire, sous la menace d'une peine non inférieure à celle prévue pour la population en général (Note 854).
  731. 2) Réquisition de main-d'oeuvre pour des fins diverses, examinée à la lumière des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2 a), b), d) et e), de la convention
  732. 484. Dans la partie qui suit, la commission examine l'applicabilité des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2 a), b), d) et e), de la convention aux différents types de travail ou de services décrits au chapitre 12 pour lesquels la population est réquisitionnée ou recrutée au moyen de rafles.
  733. a) Portage
  734. 485. Le portage, accompli par des civils pour les militaires, n'est pas "exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire" et ne fait pas non plus partie "des obligations civiques normales des citoyens d'un pays se gouvernant pleinement lui-même"; il ne rentre donc pas dans les exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2 a) ou b), de la convention.
  735. 486. Pour ce qui est de l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention, qui concerne le travail ou service exigé dans les cas de force majeure, y compris les cas de guerre, la commission a fait observer (Note 855) que la notion de force majeure au sens de la convention implique un événement soudain et imprévu mettant en danger la vie ou les conditions normales d'existence de la population et appelant une intervention immédiate, laquelle doit être, quant à sa durée et à son importance, strictement limitée à ce qui est nécessaire pour faire face au danger. Si les conflits entre le gouvernement du Myanmar et un certain nombre de minorités nationales et autres groupes, au fil des ans, peuvent être considérés comme revêtant la forme de conflits armés, le gouvernement lui-même a déclaré en 1992 devant la Conférence internationale du Travail qu'il "avait cessé de mener des campagnes militaires" (Note 856). Même lorsque le gouvernement menait des campagnes militaires, la réquisition et l'arrestation de civils pour le portage, telles qu'attestées par de nombreux témoignages fournis à la commission, n'avaient pas été suscitées par un cas de force majeure tel que décrit ci-dessus, mais étaient simplement la manière habituelle pour les forces armées et les unités paramilitaires de se délester, sur le dos de la population civile, du fardeau de tout labeur que ces unités souhaitaient voir accompli et qui, autrement, aurait dû être entrepris par du personnel militaire. Aucun des témoins entendus par la commission au sujet du portage n'a fait état d'une situation répondant aux critères de la force majeure au sens de l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention. Comme le portage pour les militaires ne correspond pas non plus aux "menus travaux de village" visés à l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, cette pratique généralisée se situe entièrement en dehors de ce qu'admet l'article 2, paragraphe 2, de la convention, à la seule exception du cas où il est demandé à des personnes condamnées par une décision judiciaire de servir de porteurs pendant la durée de leur peine (article 2, paragraphe 2 c), de la convention).
  736. b) Travail pour les camps militaires et autres travaux d'appui aux forces armées
  737. 487. Les travaux exigés de civils pour la construction, l'entretien, la réparation et le nettoyage de camps militaires, la cuisine, la collecte d'eau ou de bois de chauffage, le lavage de vêtements ou les missions de messagerie pour les camps sont décrits aux paragraphes 351 à 373. D'autres tâches que des civils sont contraints d'accomplir, telles que servir de guides pour les militaires, de boucliers humains, de démineurs et de sentinelles, sont décrites aux paragraphes 374 à 388. Aucun de ces travaux et services n'est exigé "en vertu des lois sur le service militaire ou obligatoire", et aucun ne relève "des obligations civiques normales des citoyens d'un pays se gouvernant pleinement lui-même". Les exceptions prévues par l'article 2, paragraphe 2 a) et b), ne sont donc pas applicables; l'article 2, paragraphe 2 e), relatif aux "menus travaux de village" ne l'est pas non plus.
  738. 488. Ce qui a été indiqué plus haut (Note 857) pour expliquer pourquoi le portage forcé ne relève pas de l'article 2, paragraphe 2 d), de la convention, qui concerne le travail ou service exigé dans les cas de force majeure, s'applique à plus forte raison au travail exigé de civils pour la construction et l'entretien de camps militaires -- travail qui est sans aucun rapport avec un cas de force majeure au sens d'un événement soudain et imprévu mettant en danger la vie ou les conditions normales d'existence de la population et appelant une intervention immédiate. De même, la plupart des services consistant à servir de guides, de boucliers humains, de démineurs et de sentinelles sont imposés de manière courante aux habitants et n'ont aucun rapport avec un événement soudain et imprévu appelant une intervention immédiate. De plus, lorsque les civils sont forcés de servir de guides, de boucliers humains, de démineurs ou de sentinelles pour l'armée, il peut y avoir un danger réel pour la vie ou les conditions normales d'existence de la population, mais il s'agit là du genre de danger pour lequel la situation exigerait qu'il soit fait appel à l'armée pour qu'elle protège la population civile, alors que le travail forcé exigé au Myanmar dans de tels cas reporte les missions dangereuses des militaires sur les civils. Cela est contraire à la notion de "force majeure" reflétée dans la convention. Au Myanmar, c'est la population civile qui est contrainte de protéger les militaires. Ainsi, le travail imposé aux habitants pour les camps militaires et pour assister l'armée ne rentre dans aucune des exceptions prévues par l'article 2, paragraphe 2, de la convention.
  739. c) Conscription forcée
  740. 489. Les éléments présentés par la commission au chapitre 12 (Note 858) indiquent que, dans l'ensemble du Myanmar, un recrutement forcé a cours, y compris de mineurs, dans la Tatmadaw et dans plusieurs groupes de milice, et que ce recrutement ne s'effectue pas en vertu de la législation sur le service militaire obligatoire mais arbitrairement.
  741. 490. Comme indiqué ci-dessus (Note 859), les dispositions de la loi sur la milice populaire, telle qu'adoptée en 1959, qui prévoient un service militaire obligatoire (Note 860), semblent couvertes par l'exception prévue à l'article 2, paragraphe 2 a), de la convention, mais la commission ignore si la loi a été modifiée ultérieurement et ne sait pas non plus si elle a été mise en vigueur.
  742. 491. Faute de connaissances suffisantes sur l'état de la législation applicable, et en l'absence d'éléments de preuve significatifs recueillis directement par la commission quant aux faits pour confirmer les informations soumises à propos du recrutement forcé, la commission n'a pas formulé de conclusion sur la compatibilité -- ou non -- de toute conscription militaire avec la convention.
  743. d) Travail sur des projets agricoles, forestiers et d'autres projets de production
  744. 492. Selon les éléments présentés au chapitre 12, des villageois et, dans une moindre mesure, des citadins sont contraints de travailler dans le cadre de divers projets entrepris par les autorités, en particulier les autorités militaires, sur l'ensemble du territoire. Ces projets incluent la culture du riz, d'autres cultures vivrières, des cultures de rapport comme le caoutchouc, la pisciculture et l'élevage de crevettes, des briqueteries, l'exploitation forestière et des activités manufacturières, toutes ces activités étant destinées à satisfaire les besoins matériels des militaires ou à générer des profits pour eux. Les militaires mobilisent la population du Myanmar, forçant les gens à accomplir ce travail pour l'armée dans des conditions pénibles sans obtenir aucune part des résultats (Note 861). Ce travail forcé ne relève d'aucune des cinq exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention (Note 862). En particulier, il ne correspond pas à des "menus travaux de village", entre autres parce qu'il n'est pas "accompli par les membres d'une collectivité dans l'intérêt direct de celle-ci (Note 863); ce travail n'a, d'autre part, aucun rapport avec un quelconque cas de force majeure, c'est-à-dire avec des "circonstances mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population" (Note 864).
  745. e) Construction et entretien de routes, voies ferrées et ponts
  746. 493. Comme la commission l'expose en détail au chapitre 12, il est recouru sur une grande échelle au travail forcé de personnes appelées parmi toute la population pour la construction de routes et de voies ferrées (Note 865). Pour ce qui est des cas dans lesquels des prisonniers ou des membres des forces armées ont été mis au travail sur de tels projets (Note 866), la commission renvoie aux explications données ci-dessus concernant la compatibilité ou non de telles affectations avec la convention (Note 867). Pour ce qui est de la population civile normale, qui fournit la très grande majorité de la main-d'oeuvre réquisitionnée pour la construction et l'entretien des routes, des voies ferrées et des ponts, et abstraction faite des cas dans lesquels des travailleurs librement engagés ont été employés à de tels travaux (Note 868), leur réquisition pour ce travail rentre dans la définition du travail forcé ou obligatoire donnée dans la convention (Note 869) et doit être examinée à la lumière des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention (Note 870).
  747. 494. La réquisition de la population pour la construction et l'entretien de routes, voies ferrées et ponts ne relève pas des exceptions concernant le service militaire obligatoire (article 2, paragraphe 2 a), de la convention), les obligations civiques normales des citoyens d'un pays se gouvernant pleinement lui-même (article 2, paragraphe 2 b)), le travail pénitentiaire (article 2, paragraphe 2 c)) ou le travail en cas de force majeure, c'est-à-dire un travail exigé par un événement mettant en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population (article 2, paragraphe 2 d)). On ne peut considérer non plus que la construction ou l'entretien de voies ferrées correspondent à de "menus travaux de village" (article 2, paragraphe 2 e), de la convention) (Note 871). Cela découle de l'ampleur même des projets (Note 872), lesquels sont axés sur des besoins nationaux ou régionaux plutôt que sur les intérêts d'une collectivité locale, du nombre de travailleurs et de journées de travail en cause (Note 873), de la distance entre le chantier et les villages des travailleurs (Note 874) ainsi que de l'absence de toute consultation (Note 875).
  748. 495. De même, s'agissant de la construction et de l'entretien des routes et des ponts, la commission, appréciant les éléments devant elle à la lumière des critères de l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention, qui fixe les limites de l'exception concernant les "menus travaux de village" (Note 876), est parvenue aux conclusions suivantes. Comme expliqué au chapitre 12, elle constate que le travail forcé a été employé pour la construction ou l'amélioration de grands axes routiers reliant les villes de nombreuses parties du pays ainsi que pour la construction de réseaux extensifs de routes entre villes et villages, notamment dans les régions récemment occupées par l'armée après les offensives lancées contre les groupes d'opposition, ainsi que pour la construction de routes reliant des camps militaires à ces réseaux ou l'un à l'autre, et pour la construction de routes menant à des lieux de transfert (forcé) (Note 877). La réquisition de main-d'oeuvre pour ces travaux fait peser sur la population un lourd fardeau, d'autant plus que ces routes doivent souvent être réparées ou complètement reconstruites après chaque saison des pluies (Note 878).
  749. 496. Ainsi, le constat des faits présentés au chapitre 12 à propos de la construction et de l'entretien de routes et de l'infrastructure connexe démontre que ces travaux ne sont ni "menus" ni axés sur l'intérêt d'une collectivité locale, mais qu'ils sont imposés soit dans l'intérêt plus large d'un développement national ou régional, soit en fonction des besoins spécifiques de l'armée. De plus, les routes construites ou rénovées sont réservées à l'usage exclusif des autorités (Note 879), et, de l'avis des personnes contraintes de travailler sur ces chantiers, elles ne pourront pas tirer parti de leur travail, notamment parce que les moyens de transport locaux (tels que chars à boeufs) ne sont pas autorisés sur ces routes, réservées aux véhicules à moteur, que l'immense majorité des villageois ne possèdent pas (Note 880). Enfin, les travaux sont imposés par l'armée, sans consultation des membres de la collectivité quant à leur bien-fondé (Note 881), telle qu'exigée par l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention. La commission conclut que, sur la base de tous les critères retenus par la convention, l'imposition de travail à travers tout le Myanmar pour la construction et l'entretien de routes et de ponts, ainsi que de voies ferrées, ne relève d'aucune des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention.
  750. f) Autres travaux d'infrastructure
  751. 497. Dans la section 7 du chapitre 12 du présent rapport, la commission énonce ses conclusions (Note 882) concernant une série de projets d'infrastructure (outre la construction de routes, voies ferrées et ponts) pour lesquels la population du Myanmar a été contrainte de fournir son travail. Ce qui a été dit à propos des routes, voies ferrées et infrastructures connexes (Note 883) s'applique également à ces projets. Il n'y a pas de base pour les rattacher aux exceptions prévues par la convention en ce qui concerne le service militaire, les obligations civiques normales, le travail pénitentiaire ou les cas de force majeure (article 2, paragraphe 2 a) à d)). La question de l'applicabilité de l'exception concernant les menus travaux de village visée à l'article 2, paragraphe 2 e) (Note 884), sera examinée dans les paragraphes qui suivent pour chacun des différents types de travaux concernés.
  752. 498. En ce qui concerne l'utilisation d'un grand nombre de travailleurs forcés pour de grands projets concernant la construction et la réparation de barrages (Note 885), d'installations hydroélectriques (Note 886), le creusement d'un canal reliant deux circonscriptions (Note 887), ou pour des projets d'irrigation (Note 888), la construction d'aéroports (Note 889) ou le travail sur des lignes électriques reliant un grand village à une ville (Note 890), l'ampleur de ces chantiers ou le grand nombre de personnes réquisitionnées ou l'aire géographique couverte par les réquisitions ou une combinaison de ces éléments signifie que tous ces projets dépassent largement la portée des "menus travaux de village", tels que définis à l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention.
  753. 499. Aussi, la mobilisation d'un grand nombre de travailleurs (y compris de non-bouddhistes) pendant quatre ans pour construire un musée du Bouddha dans la capitale de l'Etat Rakhine (Note 891), ainsi que le recours au travail forcé pour l'excavation et la restauration d'un palais constituant un site historique important, ou le nettoyage d'un autre grand palais d'importance nationale et le curage de ses douves (Note 892), ou encore la construction d'une clôture de 30 miles (environ 50 km) dans l'Etat Kachin (Note 893), ainsi que la construction d'un stade et de routes de desserte pour un festival national de sport estudiantin se tenant chaque année dans une ville différente (Note 894) dépassent le cadre de menus travaux de village et sont axés sur les intérêts d'une collectivité qui est différente de, et plus large que, celle à laquelle appartiennent les personnes appelées à faire le travail.
  754. 500. De même, le travail forcé de la population de différents villages pour le transport de poteaux destinés à des lignes téléphoniques jusqu'à une rivière et à partir de celle-ci (Note 895), la construction d'aires d'atterrissage d'hélicoptères (Note 896) et d'hôtels (Note 897), la mobilisation de Rohingyas pour la construction de nouveaux villages destinés à des Rakhines bouddhistes (Note 898), la mobilisation de main-d'oeuvre, y compris de main-d'oeuvre non bouddhiste, pour la construction et la rénovation de pagodes et la construction d'un monastère (Note 899) sont autant de travaux accomplis dans l'intérêt direct de personnes, d'entités ou de communautés plus larges qui ne sauraient être confondues avec les collectivités dont les membres font le travail.
  755. 501. Enfin, la construction d'une nouvelle école primaire ou d'une clinique dans un village (Note 900), le creusement de tranchées de drainage dans une ville (Note 901) ou la construction de toilettes publiques dans un village (Note 902) semblent avoir été réalisés par les membres de la collectivité dans l'intérêt direct de celle-ci. Mais la mobilisation de personnes une fois par semaine ou trois fois par mois, pendant un jour ou deux, pour le creusement de tranchées de drainage (Note 903) dépasse largement le cadre des "menus travaux de village", lesquels doivent avoir trait essentiellement à des travaux d'entretien et, seulement dans des cas d'exception, à la construction d'infrastructures nouvelles (Note 904) et ne devraient pas normalement excéder quelques jours par an. Ces critères ne sont pas respectés non plus lorsque des personnes astreintes à la construction d'une nouvelle école sont simultanément mobilisées pour d'autres tâches forcées (Note 905). S'agissant de la construction de toilettes publiques dans un village, qui semblerait indéniablement rentrer dans les "menus travaux de village", la procédure autoritaire selon laquelle les villageois ont été contraints au travail (Note 906) relève de la pratique d'autorités militaires, laquelle ne prévoit aucune consultation des membres de la collectivité ou de ses représentants directs quant au bien-fondé des travaux en question, et de ce fait viole les dispositions de l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention.
  756. g) Travaux à caractère général
  757. 502. Dans les cas où des citadins sont mobilisés pour accomplir régulièrement des tâches comme le nettoyage ou l'embellissement de lieux publics, de routes, d'écoles et d'hôpitaux, du pourtour d'un lac ou bien d'un camp militaire (Note 907), les critères énoncés dans la section f) qui précède s'appliquent également: si le nettoyage d'un camp militaire ne sert pas l'intérêt direct de ceux qui sont appelés à l'effectuer, la plupart des autres tâches mentionnées pourraient, par leur nature et leur objet, rentrer dans le cadre des "menus travaux de village". Cependant, la mobilisation d'une personne par foyer une journée par week-end pour de tels travaux (Note 908) dépasse largement les limites des "menus travaux de village", lesquels ne devraient pas normalement comporter plus de quelques journées de travail par an (Note 909), et l'absence manifeste de toute consultation des membres de la collectivité concernée ou de ses représentants directs constitue de même un manquement aux normes de l'article 2, paragraphe 2 e), de la convention.
  758. 3) Réquisition de main-d'oeuvre, à la lumière des interdictions prévues aux articles 4 et suivants de la convention
  759. a) Pertinence résiduelle des articles 4 et suivants de la convention
  760. 503. Dans ses observations concernant la plainte, le gouvernement n'a pas invoqué l'article 1, paragraphe 2, de la convention, qui permettait de recourir au travail forcé ou obligatoire pendant une période transitoire, dans les conditions et avec les garanties stipulées par la convention (Note 910). Comme indiqué ci-dessus (Note 911), le recours à une forme de travail forcé ou obligatoire rentrant dans le champ d'application de la convention, tel que défini à l'article 2, ne peut plus être justifié en invoquant le respect des dispositions de l'article 1, paragraphe 2, et des articles 4 à 24, bien que les interdictions absolues figurant dans ces dispositions lient toujours les Etats ayant ratifié la convention. A cet égard, la commission a noté que les larges pouvoirs de réquisitionner main-d'oeuvre et services énoncés dans la loi sur les villages et la loi sur les villes sont incompatibles non seulement avec l'obligation de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire, en vertu de l'article 1, paragraphe 1, lu conjointement avec l'article 2 de la convention, mais même avec les dispositions des articles 9 à 14 et 17 à 19 de la convention (Note 912). Les informations communiquées à la commission et les éléments recueillis par elle démontrent que la pratique nationale telle que décrite au chapitre 12 viole également tant l'obligation de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire (Note 913) que les interdictions spécifiques figurant aux articles 4 et suivants de la convention.
  761. b) Violation d'interdictions spécifiques
  762. i) Imposition de travail forcé ou obligatoire au profit d'intérêts privés
  763. 504. Dans la mesure où le produit du travail forcé ou le revenu généré par le travail forcé dans le cadre de projets entrepris par les militaires pour la culture du riz, d'autres cultures vivrières ou des cultures de rapport telles que le caoutchouc, les élevages de crevettes, les briqueteries ou l'exploitation forestière va à des individus appartenant ou non à l'unité militaire concernée (Note 914), ou bien dans la mesure où le travail forcé est utilisé par des entrepreneurs privés (Note 915) ou pour la construction d'hôtels appartenant à des intérêts privés (Note 916), l'imposition du travail forcé non seulement viole l'obligation de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire (Note 917) mais aussi l'interdiction spécifique d'imposer ou de laisser imposer le travail forcé ou obligatoire au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées, figurant à l'article 4, paragraphe 1, de la convention.
  764. 505. Dans les éléments supplémentaires d'appréciation communiqués par lettre datée du 31 octobre 1996, les plaignants allèguent que "la population vivant au voisinage du tracé du gazoduc (de Yadana) est régulièrement réquisitionnée pour la réalisation du passage de ce gazoduc ainsi que des infrastructures associées", expliquant que "la réalisation du tracé du gazoduc a consisté essentiellement à défricher la jungle à la main. Les travaux d'infrastructure associés incluent la réalisation de casernes dans le voisinage pour loger les bataillons du SLORC affectés à la région pour assurer la sécurité du gazoduc (Note 918)."
  765. 506. Quant aux allégations concernant les travaux de défrichage évoquées au paragraphe 505, la commission se réfère à ses conclusions concernant les faits figurant au paragraphe 452, dans lequel elle indique que, n'ayant pas eu accès au Myanmar pour compléter ses éléments de preuve, elle n'a pu parvenir à aucune conclusion sur cette question.
  766. 507. S'agissant de la construction de casernements pour les bataillons de l'armée stationnés dans la région du gazoduc, la commission considère que, même si ces bataillons ont été postés dans la région pour garder le gazoduc, en l'absence de plus amples informations concernant les dispositions de sécurité prises entre le gouvernement et la société ou les sociétés privées associées au projet, le travail forcé utilisé pour la construction de casernements militaires ne peut, à première vue, être considéré comme imposé au profit d'intérêts privés au sens strict de l'article 4 de la convention.
  767. 508. La construction de la ligne de chemin de fer Ye-Dawei (Tavoy) est elle aussi mentionnée par les plaignants en rapport avec l'installation du gazoduc de Yadana (Note 919), alors qu'un tel lien est nié par TOTAL (Note 920). La commission considère que le recours au travail forcé pour la construction de la ligne de chemin de fer Ye-Dawei (Tavoy) (Note 921) ne rentre pas dans le champ de l'article 4 de la convention, étant entendu que cette ligne de chemin de fer est une une entreprise d'Etat, que les sociétés privées associées au projet de Yadana figurent ou non parmi ses clients éventuels (Note 922).
  768. 509. Enfin, comme elle l'indique dans ses conclusions concernant les faits, la commission, n'ayant pas eu accès au Myanmar, n'a pas pu établir, en ce qui la concerne, si la compagnie TOTAL, les sociétés travaillant pour TOTAL ou le projet de gazoduc de Yadana sont les bénéficiaires de celles des aires d'atterrissage d'hélicoptères construites dans la région pour lesquelles il y a des indications selon lesquelles elles ont été construites avec du travail forcé (Note 923).
  769. 510. Que le travail forcé auquel il a été recouru sur différents chantiers évoqués aux paragraphes 505 à 509 ait été ou non imposé au profit d'intérêts privés au sens de l'article 4 de la convention, le recours au travail forcé constitue un manquement à l'obligation du gouvernement de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes (Note 924).
  770. ii) Imposition de travail forcé ou obligatoire à des femmes, des enfants, des personnes âgées et des personnes non valides
  771. 511. En violation de l'interdiction absolue figurant à l'article 11, paragraphe 1, de la convention, le travail forcé ou obligatoire est couramment imposé à des femmes (Note 925), y compris des femmes enceintes et des femmes allaitantes (Note 926), à des mineurs de moins de 18 ans (Note 927), pouvant même avoir entre 12 (Note 928) et 10 ans (Note 929) et qui autrement seraient scolarisés (Note 930), ainsi qu'à des personnes de plus de 45 ans (Note 931) et à des personnes par ailleurs inaptes au travail (Note 932), pour le portage (Note 933), l'acheminement de messages (Note 934), la construction de camps (Note 935), le balayage des routes pour détecter les mines (Note 936), des missions de sentinelles (Note 937), la construction de routes et de lignes de chemin de fer (Note 938) et d'autres travaux d'infrastructure (Note 939).
  772. iii) Déni de rémunération et d'indemnisation
  773. 512. Alors que l'article 14, paragraphe 1, de la convention prévoit une rémunération "en espèces et à des taux qui, pour le même genre de travail, ne devront pas être inférieurs à ceux en vigueur", au Myanmar, les travailleurs forcés ne sont payés que dans des circonstances exceptionnelles (Note 940) et alors en deçà des taux du marché (Note 941). Les personnes servant de porteurs ne sont en fait jamais rémunérées (Note 942), sauf lorsque leurs services sont loués en remplacement par ceux qui étaient mobilisés (Note 943), et, plutôt que d'être payés, certains payent pour être exemptés de service (Note 944). Ceux qui sont soumis au travail forcé pour la construction ou l'entretien de campements militaires non seulement ne sont pas payés, que ce soit pour leur travail ou pour les terres qui peuvent leur avoir été confisquées (Note 945), mais doivent en outre fournir les matériaux nécessaires, tels que le bois, le plâtre ou le ciment (Note 946), et, à nouveau, certains de ceux qui ont été mobilisés paient pour être exemptés ou pour louer les services de remplaçants (Note 947). Les personnes mobilisées pour monter la garde (Note 948) et les villageois contraints de travailler dans le cadre de projets agricoles, de foresterie ou d'autres projets de production (Note 949) ne sont aucunement rémunérés; les personnes contraintes de travailler pour les routes et les lignes de chemin de fer ne sont normalement pas rémunérées, sauf dans des circonstances exceptionnelles et, dans ce cas, en deçà des taux du marché (Note 950), et les travailleurs appelés à d'autres projets d'infrastructure ne sont pas rémunérés non plus (Note 951). De même, l'indemnisation en cas de décès ou de lésions corporelles, exigée par l'article 15 de la convention, semble être minime dans le cas des porteurs (dont les familles ne sont normalement pas avisées) (Note 952) et ne pas être versée dans la plupart des cas lorsque des travailleurs sont blessés dans le cadre de projets de construction de routes ou de lignes de chemin de fer (Note 953).
  774. iv) Cultures obligatoires
  775. 513. L'article 19, paragraphe 1, de la convention interdit le recours aux cultures obligatoires autrement que "dans le but de prévenir la famine ou une disette de produits alimentaires et toujours sous la réserve que les denrées ou les produits ainsi obtenus devront rester la propriété des individus ou de la collectivité qui les auront produits". Au Myanmar, les villageois sont non seulement contraints par l'armée de cultiver du riz et d'autres cultures vivrières en l'absence d'un risque de famine, mais aussi de cultiver et récolter des cultures de rapport, les produits étant, dans l'un et l'autre cas, utilisés ou vendus par l'armée et ne demeurant jamais la propriété des individus ou de la collectivité qui les ont produits (Note 954).
  776. 4) Punition de l'imposition illégale de travail forcé ou obligatoire
  777. 514. Aux termes de l'article 25 de la convention, "le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales et tout Membre ratifiant la présente convention aura l'obligation de s'assurer que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées". Comme indiqué précédemment, il appert que l'article 374 du Code pénal qui prévoit la punition de celui qui contraint illégalement une personne de travailler contre son gré (Note 955) n'est pas appliqué dans la pratique, et les personnes imposant du travail forcé au Myanmar ne sont pas punies (Note 956). Dans la mesure où le travail forcé ou obligatoire imposé en violation de la convention peut dans certains cas être conforme aux dispositions de la loi sur les villages ou de la loi sur les villes qui sont elles-mêmes contraires à la convention (Note 957), les modifications nécessaires de ces dispositions de la loi sur les villages ou de la loi sur les villes pourraient devoir entrer en vigueur avant que l'imposition correspondante d'un travail forcé ou obligatoire devienne "illégale" en droit national et punissable en vertu de l'article 374 du Code pénal (Note 958). Toutefois, les dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes autorisant le recours au travail obligatoire ont, à un certain stade, été déclarées obsolètes (Note 959) et ne sont, en pratique, jamais invoquées lorsque du travail forcé ou obligatoire est imposé (Note 960). De plus, il existe un certain nombre de cas d'imposition de travail forcé, en particulier lorsque des personnes sont arrêtées au moyen d'une rafle organisée directement par les militaires pour être soumises à un service obligatoire sans que le chef de village ou les autorités de l'arrondissement n'aient procédé à une réquisition (Note 961), ce qui, même aux termes des dispositions très larges de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, semble illégal en droit national et devrait donc avoir déjà donné lieu à des poursuites en vertu de l'article 374 du Code pénal. La non-application, dans la pratique, de l'article 374 du Code pénal constitue une violation des obligations du Myanmar au titre de l'article 25 de la convention.
  778. Partie V
  779. Conclusions et recommandations
  780. 14. Conclusions et recommandations
  781. 515. Avant de formuler ses conclusions et recommandations, la commission souhaite traiter deux questions préliminaires qui se réfèrent, d'une part, à la non-participation partielle du gouvernement du Myanmar à la procédure et, d'autre part, à la prétention du gouvernement aux termes de laquelle le travail de la commission, et notamment la visite envisagée au Myanmar, constituerait une ingérence dans les affaires intérieures du pays (Note 962).
  782. 1) Questions préliminaires
  783. 516. Après avoir examiné les informations soumises par les parties au cours de sa première session tenue en juin 1997 (Note 963), la commission a invité le gouvernement du Myanmar à fournir avant le 30 septembre 1997 toute déclaration écrite qu'il souhaitait lui soumettre ainsi que les noms et qualités des témoins qu'il souhaitait faire entendre au cours des audiences fixées du 17 au 20 et les 25 et 26 novembre 1997. La commission a également prié le gouvernement du Myanmar d'assurer qu'il ne ferait pas obstacle à ce que les témoins cités par les parties se présentent devant la commission, et que ces témoins ou leurs familles ne subiraient aucune sanction ni préjudice du fait de leur participation aux travaux de la commission. Enfin, le gouvernement était aussi requis de désigner le ou les représentants chargés d'agir en son nom devant la commission et de traiter toute question pertinente durant les différents stades de ses travaux.
  784. 517. Par une communication en date du 10 novembre 1997, le gouvernement du Myanmar a informé la commission qu'il n'était pas en mesure de désigner dans le délai imparti les témoins qu'il désirait faire entendre. D'autre part, le gouvernement s'est abstenu de désigner son représentant habilité à agir devant la commission; il n'a pas non plus donné l'assurance qui lui avait été demandée par la commission pour ce qui est de la protection des témoins et de leurs familles contre les représailles dont ils pourraient faire l'objet.
  785. 518. Les auditions de la commission ont eu lieu sans le bénéfice de la présence du gouvernement du Myanmar bien qu'il ait été dûment informé des dates auxquelles elles seraient tenues et que les informations reçues des plaignants et des autres sources lui aient été transmises en temps opportun (Note 964). A cet égard, la commission a conclu que le gouvernement du Myanmar s'était abstenu, en toute connaissance de cause, de se prévaloir de son droit d'être présent aux audiences. Dans ces circonstances et considérant le temps déjà écoulé depuis le dépôt de la plainte, la commission a estimé qu'elle devait poursuivre ses travaux aux fins d'assurer que la plainte soit examinée promptement, évitant tout délai déraisonnable et assurant dès lors une procédure équitable (Note 965).
  786. 519. A l'issue de cette session, la commission a estimé qu'il serait utile qu'elle ait la possibilité de se rendre au Myanmar pour compléter les informations en sa possession et a dès lors adressé en date du 28 novembre 1997 une communication au gouvernement du Myanmar à cet égard. Or, en date du 12 décembre, le gouvernement du Myanmar a informé le Directeur général du BIT qu'il ne pouvait accéder à cette demande et autoriser la venue de la commission d'enquête, étant entendu qu'à ses yeux une telle visite ne contribuerait pas vraiment à résoudre l'affaire et serait une ingérence dans les affaires intérieures du pays.
  787. 520. Pour ce qui est de l'argument du gouvernement s'appuyant sur l'ingérence dans les affaires intérieures du pays, la commission doit rappeler, comme l'a du reste déjà observé une précédente commission d'enquête (Note 966), qu'au regard même de sa Constitution l'OIT a été créée en vue d'améliorer les conditions de travail, et qu'il en résulte que les matières traitées par l'Organisation ne relèvent plus du domaine réservé des Etats. Ainsi, les mesures prises par l'Organisation dans la présente affaire, à savoir l'institution d'une commission avec pleins pouvoirs d'investigation et d'enquête, ne sauraient être considérées comme une intervention indue dans les affaires intérieures puisqu'elles rentrent précisément dans le cadre du mandat que l'OIT a reçu de ses Membres en vue d'atteindre les objectifs qui lui ont été assignés. Qui plus est, l'établissement d'une telle commission d'enquête par l'OIT est expressément prévu par la Constitution de l'OIT et n'est possible que dans les cas où la convention en question a été ratifiée par l'Etat faisant l'objet de la plainte (Note 967). En fait, une fois qu'un Etat, par une décision libre et souveraine, est non seulement devenu Membre de l'OIT, mais a également ratifié une convention internationale du travail, ni l'établissement de la commission d'enquête ni le fonctionnement de celle-ci ne sont subordonnés à l'accord ou à la coopération de l'Etat en cause.
  788. 521. L'objection fondée sur l'ingérence indue dans les affaires intérieures du Myanmar est donc dénuée de fondement juridique d'autant que l'article 27 de la Constitution de l'OIT comporte l'engagement de chacun des Etats Membres de "mettre à la disposition de la commission toute information qui se trouverait en sa possession relativement à l'objet de la plainte". Cette disposition montre clairement que les Etats Membres, a fortiori l'Etat faisant l'objet de la plainte, ont l'obligation de coopérer à la procédure et ne peuvent, par leur refus de coopérer, faire obstacle au déroulement de celle-ci.
  789. 522. Il faut toutefois se demander si la non-coopération du gouvernement du Myanmar entraîne des conséquences pratiques pour ce qui est de la capacité de la commission à établir les faits de la présente affaire.
  790. 523. La commission a envoyé au gouvernement pour commentaires la volumineuse documentation qu'elle a reçue depuis le début de la procédure. Elle s'attendait donc à ce que le gouvernement du Myanmar participe à la procédure, notamment en plaçant à sa disposition les éléments de fait et de droit qui auraient facilité l'évaluation de la situation et en lui donnant la possibilité de se rendre au Myanmar pour rencontrer tant des fonctionnaires du gouvernement que d'autres personnes susceptibles de lui fournir de l'information pertinente. Toutefois, faute d'une telle coopération, la commission a tenu compte aussi rigoureusement que possible de toutes informations que le gouvernement du Myanmar a fournies à la commission, ainsi que des positions qu'il a adoptées jusqu'en juin 1996 devant d'autres instances de l'OIT, notamment la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, la Commission de l'application des normes de la Conférence internationale du Travail et le comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération internationale des syndicats libres en 1993 (CISL) en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant l'inexécution de la convention par le Myanmar (Note 968). La commission a également tenu compte des renseignements ressortant des communications très substantielles qu'elle a reçues et des nombreux témoignages de personnes qui ont une expérience directe et récente de la situation prévalant au Myanmar pour ce qui est du travail forcé. Dans ce contexte, la commission estime avoir disposé d'éléments de fait amplement suffisants pour lui permettre d'évaluer, de manière exacte, la situation dans son ensemble et de formuler les recommandations que cette dernière exige au regard des allégations de la plainte et des dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930.
  791. 2) Mandat de la commission
  792. 524. Par une lettre en date du 20 juin 1996, 25 délégués travailleurs ont présenté une plainte au titre de l'article 26 de la Constitution contre le gouvernement du Myanmar pour non-respect des dispositions de la convention (no 29 ) sur le travail forcé, 1930, ratifiée par le pays le 4 mars 1955 et entrée en vigueur une année plus tard.
  793. 525. En mars 1997, le Conseil d'administration institua la commission d'enquête pour qu'elle procède à une évaluation objective de la situation faisant l'objet de la plainte; à la même occasion, il nomma ses membres qui, choisis pour leur impartialité et leur intégrité, se sont engagés par déclaration solennelle, équivalant à celle prononcée par les juges de la Cour internationale de justice, à exercer leurs fonctions et leurs attributions "en tout honneur et dévouement, en pleine impartialité et en toute conscience" (Note 969).
  794. 526. Aux termes de l'article 28 de la Constitution de l'OIT, la commission doit rédiger un rapport dans lequel elle consignera ses constatations sur tous les points de fait permettant de préciser la portée de la contestation ainsi que les recommandations qu'elle croira devoir formuler quant aux mesures à prendre et quant aux délais dans lesquels ces mesures devraient être prises. Pour remplir pleinement son mandat, la commission a estimé que son rôle ne devait pas se limiter à un examen des informations communiquées par les parties elles-mêmes ou à l'appui de leurs affirmations, mais qu'elle devait prendre toutes mesures nécessaires pour disposer d'informations aussi complètes et objectives que possible sur les questions soulevées (Note 970).
  795. 527. C'est dès lors dans cet esprit d'indépendance et d'impartialité que la commission formule ses conclusions et que, sur les points pour lesquels elle ne considère pas la situation comme satisfaisante, elle présente des recommandations relatives aux mesures à prendre pour y remédier.
  796. 3) Conclusions quant au fond
  797. 528. De très nombreux éléments de preuve soumis à la commission montrent que les autorités civiles et militaires pratiquent de façon très généralisée le recours au travail forcé qui est imposé à la population civile dans tout le Myanmar pour le portage (Note 971), la construction, l'entretien et les services des camps militaires (Note 972), d'autres travaux à l'appui des forces armées (Note 973), le travail sur des projets agricoles et forestiers et d'autres projets de production réalisés par les autorités civiles ou militaires (Note 974), parfois au profit de particuliers (Note 975), pour la construction et l'entretien de routes, de voies ferrées et de ponts (Note 976), pour d'autres travaux d'infrastructure (Note 977) et pour toute une série d'autres tâches (Note 978), dont aucune ne relève des exceptions énumérées à l'article 2, paragraphe 2, de la convention (Note 979).
  798. 529. La réquisition de main-d'oeuvre est prévue en termes très larges par les articles 8 (1)(g), (n) et (o), 11(d) et 12 de la loi sur les villages ainsi que par les articles 9(b) et 9A de la loi sur les villes, qui sont incompatibles avec la convention (Note 980). La procédure utilisée dans la pratique suit souvent la marche à suivre prévue par ces dispositions, à savoir qu'il incombe au chef du village ou aux autorités de l'arrondissement urbain de réquisitionner la main-d'oeuvre que tout officier militaire ou fonctionnaire du gouvernement peut leur ordonner de fournir (Note 981); toutefois, aucun des ordres de réquisition de main-d'oeuvre qui ont été soumis à la commission ne fait référence aux dispositions de la loi dans les villages et de la loi sur les villes (Note 982); il semble donc tenu pour acquis que les officiers des forces armées et les fonctionnaires du gouvernement ont tout pouvoir pour exiger du travail forcé de la population civile, sans qu'aucun effort ne soit fait pour coordonner les différentes demandes faites à cette même population (Note 983), et des personnes sont aussi fréquemment arrêtées directement lors de rafles organisées par les militaires pour les mettre au travail forcé, sans passer par les autorités locales (Note 984).
  799. 530. Le fait de ne pas obéir à une réquisition de main-d'oeuvre est passible, en vertu de la loi sur les villages, d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement d'une durée d'un mois au plus, ou des deux à la fois, et d'une amende en vertu de la loi sur les villes (Note 985). En réalité, les multiples exactions de travail forcé donnent souvent lieu à une extorsion d'argent en échange d'un allègement temporaire de la charge (Note 986), mais également à des menaces contre la vie et la sécurité (Note 987) ainsi qu'à des sanctions extrajudiciaires à l'égard de ceux qui se montrent indisposés, lents ou incapables de donner suite à une demande de fournir du travail forcé; ces sanctions ou représailles vont de demandes d'argent (Note 988) à des brutalités physiques (Note 989), des passages à tabac (Note 990), à la torture (Note 991), au viol (Note 992) et au meurtre (Note 993).
  800. 531. Le travail forcé au Myanmar est fréquemment accompli par des femmes (Note 994), des enfants (Note 995) et des personnes âgées (Note 996) ainsi que par des personnes autrement inaptes au travail (Note 997).
  801. 532. Le travail forcé au Myanmar n'est presque jamais rémunéré (Note 998) ni indemnisé (Note 999), directives secrètes nonobstant (Note 1000), mais, au contraire, va souvent de pair avec l'extorsion d'argent (Note 1001), de nourriture (Note 1002) et d'autres fournitures (Note 1003) de la population civile.
  802. 533. Le travail forcé est une lourde charge pour l'ensemble de la population du Myanmar; il empêche les paysans de travailler sur leurs terres et les enfants d'aller à l'école. Il pèse le plus lourdement sur les ouvriers sans terre et les catégories les plus pauvres de la population (Note 1004), qui dépendent pour leur subsistance de pouvoir louer leurs bras et qui n'ont généralement pas les moyens de verser les diverses sommes demandées par les autorités en remplacement ou en sus du travail forcé (Note 1005). L'impossibilité de gagner de quoi vivre en raison de la quantité de travail forcé exigée est une raison fréquente pour fuir le pays (Note 1006).
  803. 534. Le fardeau du travail forcé semble aussi peser tout particulièrement sur les groupes ethniques non birmans (Note 1007), notamment dans les régions où la présence militaire est forte (Note 1008) et sur la minorité musulmane, y compris les Rohingyas (Note 1009).
  804. 535. Toutes les informations et les preuves devant la commission montrent le total mépris que manifestent les autorités pour la sécurité et la santé ainsi que pour les besoins essentiels des personnes qui effectuent du travail forcé ou obligatoire. Les porteurs, y compris les femmes, sont souvent envoyés en tête des troupes dans des situations particulièrement dangereuses -- par exemple lorsque l'on soupçonne que le terrain peut être miné --, et beaucoup sont ainsi blessés ou y laissent la vie (Note 1010). Il est rare que les porteurs reçoivent un traitement médical quelconque (Note 1011); les blessures aux épaules, au dos et aux pieds sont fréquentes (Note 1012) mais sont généralement peu (Note 1013) ou pas soignées (Note 1014), et les porteurs malades ou blessés sont parfois abandonnés dans la jungle (Note 1015). De même, sur les projets de construction de routes, la plupart du temps les blessures ne sont pas soignées et, sur certains de ces projets, les morts par maladie et accidents du travail sont fréquentes (Note 1016). Les travailleurs forcés, y compris ceux qui sont malades ou blessés, sont fréquemment battus ou brutalisés par les soldats, leur causant de graves blessures (Note 1017); certains sont tués (Note 1018), et des femmes exécutant un travail forcé sont violées ou victimes d'autres abus sexuels de la part des soldats (Note 1019). Dans la plupart des cas, les travailleurs forcés ne reçoivent aucune nourriture (Note 1020) --, parfois ils doivent même apporter nourriture, eau, bambous et bois aux militaires (Note 1021); les porteurs peuvent recevoir de faibles rations de riz avarié (Note 1022), mais être privés d'eau potable (Note 1023). Vêtements et chaussures adéquates ne sont pas fournis aux porteurs, même lorsqu'ils ont été saisis lors d'une rafle sans aucun préavis (Note 1024). La nuit, les porteurs sont enfermés dans des bunkers ou doivent dormir en plein air, sans qu'on leur fournisse ni abri ni couverture, même lorsqu'il fait froid ou qu'il pleut, et souvent enchaînés les uns aux autres (Note 1025). Les travailleurs forcés qui travaillent sur les projets de construction de routes ou de voies ferrées doivent s'arranger eux-mêmes pour trouver un abri et assurer tous leurs autres besoins essentiels (Note 1026).
  805. 536. En conclusion, l'obligation aux termes de l'article 1, paragraphe 1, de la convention de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire est violée au Myanmar dans la législation nationale, en particulier par la loi sur les villages et la loi sur les villes, ainsi que dans la pratique, de façon généralisée et systématique, avec un mépris total de la dignité humaine, de la sécurité, de la santé et des besoins essentiels du peuple du Myanmar.
  806. 537. De même, le gouvernement viole son obligation au titre de l'article 25 de la convention de s'assurer que les sanctions imposées par la loi pour le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sont réellement efficaces et strictement appliquées (Note 1027). Bien que l'article 374 du Code pénal prévoie des sanctions à l'égard de celui qui contraint illégalement une personne à travailler contre son gré (Note 1028), cette disposition ne semble jamais être appliquée dans la pratique (Note 1029), même lorsque les méthodes utilisées pour enrôler de force des travailleurs ne sont pas conformes aux dispositions de la loi sur les villages et de la loi sur les villes, auxquelles il n'est d'ailleurs jamais fait référence dans la pratique (Note 1030).
  807. 538. L'Etat qui commandite, incite, accepte ou tolère le travail forcé sur son territoire commet un fait illicite et engage sa responsabilité pour la violation d'une norme impérative du droit international (Note 1031). Quelle que soit la position en droit national en ce qui concerne l'imposition de travail forcé ou obligatoire et la punition de ceux qui en sont responsables, toute personne qui viole l'interdiction du recours au travail forcé aux termes de la convention commet un crime international qui constitue également, s'il est commis à grande échelle ou de manière systématique, un crime contre l'humanité (Note 1032).
  808. 4) Recommandations
  809. 539. Au vu du manquement flagrant et persistant du gouvernement aux dispositions de la convention, la commission exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour assurer:
  810. a) que les textes législatifs pertinents, en particulier la loi sur les villages et la loi sur les villes, soient mis en conformité avec la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, comme l'a déjà demandé la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations et comme le gouvernement le promet depuis plus de trente ans (Note 1033) et l'annonce de nouveau dans ses observations sur la plainte (Note 1034). Ceci devrait être effectué sans délai et achevé au plus tard le 1er mai 1999;
  811. b) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités, et notamment par les militaires. Ceci est d'autant plus important que le pouvoir d'imposer du travail obligatoire paraît être tenu pour acquis, sans aucune référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes (Note 1035). En conséquence, au-delà des modifications législatives, des mesures concrètes doivent être prises immédiatement pour chacun des nombreux domaines dans lesquels du travail forcé a été relevé aux chapitres 12 et 13 ci-dessus, afin d'arrêter la pratique actuelle. Ceci ne doit pas être fait au moyen de directives secrètes, qui sont contraires à un Etat de droit et ont été inefficaces, mais par des actes publics du pouvoir exécutif promulgués et diffusés à tous les niveaux de la hiérarchie militaire et dans l'ensemble de la population. Aussi, les mesures à prendre ne doivent pas se limiter à la question du versement d'un salaire; elles doivent assurer que personne ne soit contraint de travailler contre son gré. Néanmoins, il faudra également prévoir au budget les moyens financiers nécessaires pour engager une main-d'oeuvre salariée travaillant librement aux activités relevant du domaine public qui sont actuellement exécutées au moyen de travail forcé et non rémunéré;
  812. c) que les sanctions qui peuvent être imposées en vertu de l'article 374 du Code pénal pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire (Note 1036) soient strictement appliquées, conformément à l'article 25 de la convention. Ceci demande de la rigueur dans les enquêtes et poursuites et l'application de sanctions efficaces à ceux reconnus coupables. Comme l'a relevé en 1994 le comité du Conseil d'administration créé pour examiner la plainte présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (Note 1037), les poursuites pénales engagées à l'encontre de ceux qui recourent à la coercition paraissent d'autant plus importantes que l'absence de délimitations nettes entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaissait tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque encore de marquer le recrutement effectué par les responsables locaux ou militaires. Le pouvoir d'imposer du travail obligatoire ne cessera d'être tenu pour acquis que lorsque ceux qui sont habitués à exercer ce pouvoir seront réellement confrontés avec leur responsabilité pénale.
  813. 540. Les recommandations formulées par la commission demandent une action immédiate de la part du gouvernement du Myanmar. La tâche de la commission d'enquête s'achève avec la signature du présent rapport, mais il est souhaitable que l'Organisation internationale du Travail reste informée des progrès réalisés pour donner effet aux recommandations de la commission. La commission recommande par conséquent que le gouvernement du Myanmar indique régulièrement dans ses rapports au titre de l'article 22 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail concernant les mesures prises pour donner effet aux dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, les mesures qu'il a prises au cours de la période de rapport pour donner effet aux recommandations contenues dans le présent rapport. En outre, le gouvernement souhaitera peut-être inclure dans ses rapports des informations sur l'état de la législation et de la pratique nationales en ce qui concerne le service militaire obligatoire (Note 1038).
  814. 5) Observations finales
  815. 541. La commission note que, dans sa résolution 52/137 du 12 décembre 1997, l'Assemblée générale des Nations Unies "exhorte le gouvernement du Myanmar, conformément aux assurances données à diverses reprises, à prendre toutes les mesures nécessaires pour restaurer la démocratie en accord avec la volonté du peuple telle qu'exprimée à l'occasion des élections démocratiques tenues en mai 1990 et à veiller à ce que les partis politiques et les organisations non gouvernementales fonctionnent librement" (Note 1039). La commission note en outre que, dans son rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar soumis le 15 juillet 1998, le Rapporteur spécial, M. Rajsoomer Lallah, a recommandé que "des mesures soient prises également pour rétablir l'indépendance du pouvoir judiciaire et soumettre le pouvoir exécutif à la règle de droit et rendre justiciables les actions injustes et injustifiables" (Note 1040).
  816. 542. La commission estime que l'impunité avec laquelle les fonctionnaires du gouvernement, et en particulier les membres des forces armées, traitent la population civile comme une réserve illimitée de travailleurs forcés non rémunérés et de serviteurs à leur disposition fait partie d'un système politique fondé sur l'utilisation de la force et de l'intimidation pour dénier au peuple du Myanmar la démocratie et le respect du droit. L'expérience de ces dernières années tend à prouver que l'établissement d'un gouvernement librement choisi par le peuple et la soumission de toute autorité publique au droit sont, en pratique, des conditions indispensables à l'élimination du travail forcé au Myanmar.
  817. 543. Le présent rapport met en lumière une longue saga de misères et de souffrances inouïes, d'oppression et d'exploitation de vastes catégories de la population du Myanmar perpétrées par le gouvernement, les membres des forces armées et d'autres fonctionnaires publics. C'est l'histoire de violations grossières des droits de l'homme dont ont été victimes les habitants du Myanmar, en particulier depuis 1988, et à laquelle ils ne peuvent échapper si ce n'est en fuyant le pays. Le gouvernement, les militaires et l'administration semblent indifférents aux droits de l'homme et les bafouent en toute impunité. Leurs actions constituent de graves offenses à la dignité humaine et ont un effet avilissant sur la société civile. L'histoire montre que, lorsque les droits de l'homme sont niés ou violés dans quelque partie du monde, cela affecte inexorablement les autres parties du monde et il y a donc un intérêt vital pour la communauté internationale à ce que déni et violation des droits de l'homme soient effacés partout où ils se produisent. Tout homme, toute femme et tout enfant doit pouvoir vivre dans la dignité et jouir sur un pied d'égalité des fruits de l'indépendance, de la liberté et du développement. La commission espère et veut croire que dans un proche avenir la situation actuelle changera, laissant la place à un ordre nouveau où toute personne au Myanmar aura la possibilité de vivre dans la dignité et de développer pleinement son potentiel en toute liberté et que personne n'y sera asservi par d'autres. Ce changement ne pourra se produire que si la démocratie est rétablie et que le peuple dans son ensemble pourra exercer le pouvoir pour le bien de tous.
  818. Genève, 2 juillet 1998.
  819. (Signé) W. Douglas, Président.
  820. P.N. Bhagwati. R.A. Layton.
  821. Ayant signé ce rapport, les membres de la commission tiennent à remercier M. Michel Hansenne, Directeur général du BIT, et son personnel pour l'aide qu'ils ont généreusement apportée à la commission dans l'accomplissement de son mandat.
  822. La commission est particulièrement reconnaissante à M. André Zenger, chef du Service de l'application des normes, qui a participé à toutes ses réunions et a accompagné la commission lors de sa visite dans la région, ainsi qu'à M. Max Kern, fonctionnaire principal, dont la grande expérience dans le domaine des normes du travail a été un apport essentiel au travail de la commission. La commission souhaite également remercier Mme Anne-Marie La Rosa dont la maîtrise des principes du droit international est alliée à une rare clarté d'esprit et d'expression, ainsi que M. Richard Horsey dont la connaissance de la région et de ses langues et la lucidité d'expression ont été une aide précieuse pour la commission.
  823. Annexe I
  824. Eléments supplémentaires d'appréciation soumis par les plaignants en octobre 1996
  825. Eléments supplémentaires d'appréciation présentés en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail le 20 juin 1996 par les délégués travailleurs à la Conférence internationale du Travail de 1996 contre le gouvernement du Myanmar pour non-respect de la convention no 29 de l'OIT (31 octobre 1996)
  826. Table des matières
  827. Liste récapitulative des sources
  828. I. RESUME
  829. A. Constatations de faits
  830. B. Conclusions juridiques
  831. II. ACTION MENEE ANTERIEUREMENT DANS LE CADRE DE L'OIT
  832. A. Suivi mené par la commission d'experts et la
  833. Commission de la Conférence
  834. 1. La commission d'experts
  835. 2. La Commission de la Conférence
  836. B. La réclamation présentée en vertu de l'article 24
  837. III. CONSTATS DES FAITS
  838. A. Travail forcé à des fins publiques
  839. 1. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour
  840. le portage, le combat, le déminage et les prestations
  841. sexuelles pour les militaires
  842. 2. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé dans
  843. le cadre de projets de développement et de travaux publics
  844. qui, non seulement ne servent pas les intérêts directs de
  845. la communauté chargée de leur exécution, mais en fait
  846. portent atteinte à l'existence de cette communauté
  847. a) Les pratiques de travail forcé dans le cadre de projets
  848. de développement sont largement répandues et touchent
  849. des centaines de milliers de civils
  850. b) Le travail forcé dans le cadre de projets de
  851. développement est systématique et organisé
  852. c) Les conditions de travail inhumaines et les atteintes
  853. aux droits de l'homme sont monnaie courante dans le
  854. cadre des projets de développement
  855. d) La pratique du travail forcé dans le cadre de projets
  856. publics de développement et d'infrastructure porte
  857. préjudice à la vie économique et sociale de la
  858. population du Myanmar
  859. e) Les projets de développement et d'infrastructure pour
  860. lesquels le gouvernement recourt au travail forcé ne
  861. bénéficient pas à la collectivité fournissant ce
  862. travail
  863. 3. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour la
  864. réalisation d'ouvrages militaires
  865. B. Recours au travail forcé à des fins privées
  866. 1. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour
  867. promouvoir le développement des entreprises à risques
  868. communs, notamment pour l'exploitation des réserves de
  869. pétrole et de gaz naturel du pays
  870. 2. Recours au travail forcé pour le profit d'investisseurs
  871. privés dans des travaux de développement, des travaux
  872. publics et des projets touristiques
  873. 3. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour
  874. servir les intérêts commerciaux particuliers de membres
  875. des forces armées
  876. C. La législation sur le travail forcé au Myanmar
  877. 1. La législation du Myanmar permet d'imposer un travail forcé
  878. ou obligatoire sous la menace de sanctions
  879. 2. Le gouvernement du Myanmar a pris des directives qui
  880. légitiment la pratique du travail forcé dans le cadre
  881. de projets de développement
  882. 3. Les lois autorisant le travail forcé au Myanmar ne rentrent
  883. pas dans le champ d'application d'un instrument pénal
  884. réprimant l'imposition "illégale" d'un travail forcé ou
  885. obligatoire
  886. IV. CONCLUSIONS DE DROIT
  887. A. La pratique du travail forcé au Myanmar constitue une
  888. infraction de ce pays à ses obligations internationales
  889. en vertu de la convention no 29
  890. 1. Le recours au travail forcé par le Myanmar constitue
  891. une infraction à ses obligations en vertu de la
  892. convention no 29
  893. 2. Le Myanmar viole la convention no 29 par le fait qu'il n'a
  894. pas totalement supprimé le recours au travail forcé à des
  895. fins privées
  896. 3. Le fait que le Myanmar ne poursuive ni ne punisse dans la
  897. pratique ceux qui imposent le travail forcé constitue une
  898. violation, par ce pays, de ses obligations en vertu de la
  899. convention no 29
  900. B. La législation du Myanmar n'est pas conforme à la
  901. convention no 29
  902. 1. Le gouvernement du Myanmar enfreint ses obligations en
  903. vertu de la convention no 29 du fait qu'il n'a ni modifié
  904. ni abrogé sa législation permettant d'imposer le travail
  905. forcé
  906. 2. Le gouvernement du Myanmar ne respecte pas ses obligations
  907. au titre de la convention no 29 du fait qu'il ne respecte
  908. pas entièrement l'article 25
  909. C. Aucune des exceptions prévues à l'article 2 de la convention
  910. ne s'applique
  911. 1. Les pratiques de travail forcé ne constituent pas un
  912. travail ou un service "exigé en vertu des lois sur le
  913. service militaire obligatoire et affecté à des travaux
  914. d'un caractère purement militaire" conformément à
  915. l'article 2 2) a)
  916. 2. Le travail forcé ou obligatoire au Myanmar ne rentre pas
  917. dans les obligations civiques normales des citoyens, au
  918. sens de l'article 2 2) b) de la convention
  919. 3. Le travail imposé aux prisonniers ne satisfait pas aux
  920. strictes prescriptions de l'article 2 2) c)
  921. 4. Il n'existe pas de force majeure, au sens de l'article
  922. 2 2) d), qui permettrait le recours au travail forcé et
  923. obligatoire tel qu'il se pratique actuellement au Myanmar
  924. 5. Le travail forcé ou obligatoire au Myanmar excède largement
  925. la notion de "menus travaux de village" visés à
  926. l'article 2 2) e)
  927. D. La notion de période de transition n'est pas applicable en
  928. l'espèce et, quand bien même elle le serait, le gouvernement
  929. du Myanmar ne pourrait prétendre respecter les garanties dont
  930. une telle période doit être assortie
  931. 1. Le BIT a constaté que la notion de période transitoire ne
  932. saurait être invoquée pour exonérer le gouvernement du
  933. Myanmar de son obligation, en vertu de la convention no 29,
  934. d'éliminer le travail forcé sous toutes ses formes
  935. 2. La notion de période transitoire ne s'applique dans le cas
  936. du Myanmar ni en fait ni en droit
  937. 3. Le Myanmar est lié par sa déclaration à l'effet qu'il ne
  938. s'applique pas de période transitoire
  939. 4. En tout état de cause, aucune des conditions ou garanties
  940. prescrites dans le cadre d'une période transitoire n'est
  941. satisfaite par le Myanmar
  942. V. CONCLUSIONS
  943. Liste récapitulative des sources
  944. Instruments de l'OIT
  945. Constitution de l'Organisation internationale du Travail (1919).
  946. Convention (no 29) sur le travail forcé ou obligatoire, 1930
  947. Documents de la Commission de la Conférence: Comptes rendus des débats
  948. Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996).
  949. Conférence internationale du Travail, 82e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1995).
  950. Conférence internationale du Travail, 79e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1992).
  951. Rapports de la commission d'experts
  952. Conférence internationale du Travail, 83e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1996).
  953. Conférence internationale du Travail, 82e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1995).
  954. Conférence internationale du Travail, 81e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1994).
  955. Conférence internationale du Travail, 80e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1993).
  956. Conférence internationale du Travail, 79e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1992).
  957. Conférence internationale du Travail, 78e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1991).
  958. Conférence internationale du Travail, 75e session, rapport III (partie 4A), rapport de la commission d'experts (Genève, 1988).
  959. Etudes d'ensemble de la Commission d'experts sur le travail forcé
  960. Conférence internationale du Travail, 65e session, rapport III (partie 4B), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (Genève, 1979).
  961. Conférence internationale du Travail, 52e session, rapport III (partie 4), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. Etude d'ensemble sur les rapports relatifs à la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (Genève, 1968).
  962. Rapports du Conseil d'administration
  963. "Le travail des enfants", dans le document de l'OIT GB.265/2 (Genève, mars 1996).
  964. Rapport du Directeur général, deuxième rapport supplémentaire, rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, par le Myanmar (Genève, nov. 1994) document OIT GB.261/13/7.
  965. Procès-verbaux de la 261e session, document de l'OIT GB.261/PV(Rév.) (Genève, nov. 1994).
  966. Autres documents de l'OIT
  967. Conférence internationale du Travail, 82e session, rapport III (partie 5), liste des ratifications par convention et par pays (Genève, 1995).
  968. Conférence internationale du Travail, 52e session, rapport III (partie 1), résumé des rapports sur les conventions ratifiées (Genève, 1968).
  969. Conférence internationale du Travail, 48e session, rapport III (partie 1), résumé des rapports sur les conventions ratifiées (Genève, 1964).
  970. Conférence internationale du Travail, Compte rendu des débats, 14e session (Genève, 1930).
  971. Documents des Nations Unies
  972. Rapports du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar
  973. Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1996, document des Nations Unies E/CN.4/1996/65 (5 fév. 1996).
  974. Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1995, document des Nations Unies E/CN.4/1995/65 (12 janv. 1995).
  975. Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1995, document des Nations Unies E/CN.4/1994/57 (16 fév. 1994).
  976. Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1995, document des Nations Unies E/CN.4/1993/37 (17 fév. 1993).
  977. Autres documents des Nations Unies
  978. Déclaration universelle des droits de l'homme, résolution 217A de l'Assemblée générale des Nations Unies, document des Nations Unies A/810 (1948).
  979. Pacte international relatif aux droits civils et politiques, résolution 2200 de l'Assemblée générale des Nations Unies, adoptée le 16 décembre 1966 et entrée en vigueur le 23 mars 1976, 21e session ordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies, supplément no 16, document des Nations Unies A/6316.
  980. Rapport du Rapporteur spécial sur la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/31 (6 janv. 1994).
  981. Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/7 (7 déc. 1993).
  982. Législation et réglementation du Myanmar
  983. Loi de 1908 sur les villages, in Burma Code, vol. VI (1979) (versions anglaise et birmane).
  984. Loi de 1907 sur les villes, in Burma Code, vol. VI (1979) (versions anglaise et birmane).
  985. Code pénal, in Burma Code, vol. VIII (1979).
  986. Loi du SLORC no 4/93.
  987. Loi du SLORC no 1/92.
  988. Directive secrète du SLORC no 125.
  989. Directive secrète du SLORC no 82.
  990. Déclarations du gouvernement aux Nations Unies
  991. Déclaration de Son Excellence U Ohn Gyaw, chef de la délégation de l'Union du Myanmar aux Nations Unies, New York (3 oct. 1995).
  992. Lettre du représentant permanent de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève en date du 18 mars 1996, mémorandum d'observations et de commentaires concernant le document E/CN.4/1996/65 du 5 février 1996 ayant trait à l'Union du Myanmar, document des Nations Unies E/CN.4/1996/139 (21 mars 1996).
  993. Mémorandum d'observations et de commentaires présenté par l'Ambassadeur de l'Union du Myanmar aux Nations Unies, document des Nations Unies E/CN.4/1996/139 (21 mars 1996).
  994. Note verbale de la Mission permanente de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève en date du 4 novembre 1994 contenant la réponse au rapport du Rapporteur spécial, 1994, reproduite dans le rapport provisoire du Rapporteur spécial contenu dans le document des Nations Unies A/49/594/Add.1 (28 oct. 1994).
  995. Décisions internationales
  996. Essais nucléaires (Australie contre France) (Nouvelle-Zélande contre France). Arrêt du 20 décembre 1976, rapports de la CIJ.
  997. Conflits de frontière, arrêt, rapports de la CIJ, 1986.
  998. Traités
  999. Nicolas Valticos, Le droit international du travail (1979).
  1000. Rapports de missions d'enquête
  1001. Amnesty International
  1002. Portering and forced labour: Amnesty International's concerns, AI: ASA 16/42/96 (sept. 1996).
  1003. Myanmar: Human rights after seven years of military rule, AI: ASA 16/23/95 (oct. 1995).
  1004. Conditions in prisons and labour camps, AI: ASA 16/22/95 (sept. 1995).
  1005. Myanmar: "No place to hide": Killings, abductions against ethnic Karen villagers and refugees, AI: ASA 16/13/95 (juin 1995).
  1006. Human rights still denied, AI: ASA 16/18/94 (nov. 1994).
  1007. Myanmar: The climate of fear continues -- Members of ethnic minorities and political prisoners still targeted, AI: ASA 16/06/93.
  1008. Myanmar: Human rights violations against Muslims in the Rakhine (Arakan) State, AI: ASA 16/06/92 (oct. 1992).
  1009. Anti-Slavery International
  1010. Ethnic groups in Burma (1994).
  1011. Article 19
  1012. Burma: Beyond the law (août 1996).
  1013. Fatal silence? Freedom of expression and the right to health in Burma (juillet 1996).
  1014. Paradise lost? The suppression of environmental rights and freedom of expression in Burma (sept. 1994).
  1015. Australian Council for Overseas Aid
  1016. Slave labour in Burma: An examination of the SLORC's forced labour policies (mai 1996).
  1017. Asia Watch
  1018. Burma: Rape, forced labour and religious persecution in North Arakan State (mai 1992).
  1019. Burma Action Group
  1020. Burma, the alternative guide (janv. 1996).
  1021. EarthRights International and Southeast Asian Information Network
  1022. Total denial (juillet 1996).
  1023. Human Rights Watch/Asia
  1024. Burma: The Rohingya Muslims, ending a cycle of exodus?, vol. 8, no 9 (C) (sept. 1996).
  1025. Entrenchment or reform? Human rights developments and the need for continued pressure, vol. 7, no 10 (juillet 1995).
  1026. Abuses linked to the fall of Manerplaw, vol. 7, no 5 (mars 1995).
  1027. Images Asia
  1028. No childhood at all: A report on child soldiers in Burma (mai 1996).
  1029. Commissions internationale de juristes
  1030. The Burmese way: To where? Report of a mission to Burma (déc. 1991).
  1031. Comité de juristes pour les droits de l'homme
  1032. Summary injustice, military tribunals in Burma (avril 1991).
  1033. US Committee for Refugees
  1034. USCR site visit to Bangladesh (20 juin -- 1er juillet 1996).
  1035. United States Department of State
  1036. Foreign economic trends report: Burma (juin 1996).
  1037. Autres sources
  1038. John Doe I., etc. et coll., contre Unocal Corp. et coll. Docket no 96-6959 LGB (CD Cal.), plainte portée devant la Cour fédérale des Etats-Unis le 3 octobre 1996.
  1039. Le gouvernement de coalition nationale de l'Union birmane et la Fédération des syndicats de la Birmanie contre Unocal Inc.
  1040. Réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Myanmar (anciennement la Birmanie), par la Confédération internationale des syndicats libres le 25 janvier 1993 au Directeur général du Bureau international du Travail pour violations de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ratifiée par la Birmanie en 1955.
  1041. Lettre de Beth Stephens, Center for Constitutional Rights, datée du 21 mars 1995 à M. Roger Beach, CEO, Unocal Corporation.
  1042. "More information construction of Yangon-Mandalay Union Highway", Myanmar News Agency, 23 Jan. 1996.
  1043. Jeremy Mark, "Western firms remain hesitant about investing in Burma, in contrast to Asians' enthusiasm". Asian Wall Street Journal, semaine du 4 septembre 1995.
  1044. David Ivanovich, "Protesters crash Unocal meeting", Houston Chronicle, 23 mai 1995.
  1045. "Burma using forced labour on tourist projects", New York Times, 17 juillet 1994.
  1046. I. RESUME
  1047. Sont réunies dans le présent document les éléments supplémentaires d'appréciation à l'appui de la plainte présentée le 20 juin 1996 par les délégués travailleurs à la Conférence internationale du Travail de 1996 contre le gouvernement du Myanmar en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour non-exécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ratifiée par ce pays en 1955. Les travaux que l'OIT a consacrés jusque-là à cette question recouvrent plus de trente années de suivi par la commission d'experts, deux paragraphes spéciaux de la Commission de la Conférence, les constats d'inexécution de la convention établis par un comité constitué pour examiner une réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT ("Comité de l'article 24"), suivis de l'adoption, par le Conseil d'administration de l'OIT, des conclusions de ce comité.
  1048. A. Constatations de faits
  1049. Le Myanmar a, de longue date, une pratique diffuse d'imposition de travail forcé sur son territoire. Cette pratique, qui touche des centaines de milliers d'habitants du pays, se traduit l'utilisation d'une main-d'oeuvre forcée à des fins publiques tout autant que pour des intérêts privés. Le travail est imposé à des hommes, à des femmes et à des enfants de villages et de villes de différentes parties du pays ainsi qu'à des prisonniers. Parallèlement au travail forcé, le gouvernement militaire du Myanmar ("le gouvernement" ou SLORC (Conseil d'Etat pour la restauration de la loi et de l'ordre publics)) fait subir à nombre de travailleurs forcés de graves préjudices corporels, y compris à caractère sexuel, en l'espèce de voies de fait, de viols, d'exécutions et de privation délibérée du minimum nécessaire en matière d'alimentation, d'eau, de repos, d'hébergement et d'accès à des soins médicaux.
  1050. Le Myanmar recourt à des pratiques de travail forcé à des fins publiques sous les formes suivants: 1) portage, déminage, prestations sexuelles pour les militaires; 2) ouvrages de construction et autres ouvrages de développement et d'infrastructure à forte intensité de main-d'oeuvre ne bénéficiant et, le plus souvent, se révélant préjudiciables pour les populations dont le travail est exigé; et 3) travaux lourds dans le cadre d'ouvrages militaires. Le Myanmar a également recours à la pratique du travail forcé pour des intérêts privés, dans les objectifs suivants: 1) promouvoir le développement des entreprises à risque commun, notamment pour l'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays; 2) encourager l'investissement privé dans le développement des infrastructures, les travaux publics et les projets touristiques; et 3) servir les intérêts commerciaux particuliers de membres de l'armée du Myanmar.
  1051. Deux lois actuellement en vigueur au Myanmar autorisent l'imposition d'un travail forcé ou obligatoire à la population et prévoient des amendes et des peines d'emprisonnement à l'encontre de ceux qui s'y soustraient. Ces deux instruments, qui sont la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes, ne rentrent pas dans le champ d'application d'une loi apparemment en vigueur qualifiant de délit au pénal l'exigence "illégale" d'un travail. D'autres directives militaires secrètes récemment révélées légitiment implicitement les pratiques de travail forcé dans le cadre de projets de développement du fait qu'elles demandent instamment que la main-d'oeuvre forcée perçoive un salaire et qu'il soit mis un terme aux "tourments et souffrances" liés à des "incidents regrettables" dans le cadre du travail forcé.
  1052. B. Conclusions juridiques
  1053. Sur le plan de l'application effective de la convention no 29, le Myanmar est totalement défaillant. Il recourt délibérément à la pratique du travail forcé au sens de la convention et commet, dans ce contexte, de graves atteintes aux droits de l'homme. Il a refusé d'abroger les lois autorisant la pratique du travail forcé, de même qu'il a refusé de qualifier de manière satisfaisante de délit au pénal l'imposition de travail forcé. Il a en outre refusé de veiller à ce que les sanctions prévues par la législation soient, d'une part, réellement adaptées et, d'autre part, strictement appliquées, comme le prévoit la convention.
  1054. Le gouvernement a cherché à présenter les arrestations et l'imposition d'un travail forcé sous la menace de représailles, pratiques attentatoires, amendes et peines d'emprisonnement comme une contribution volontaire de la part de la population du Myanmar, qui serait conforme à la tradition culturelle bouddhiste. Les faits prouvent que, d'une part, des minorités non bouddhistes sont parfois soumises de manière disproportionnée à des obligations de travail forcé et, d'autre part, que la pratique du travail forcé se fonde sur la menace de sanctions légales et sur le recours à la contrainte physique.
  1055. Le gouvernement a déclaré son intention de ne recourir, désormais, qu'aux forces armées dans le cadre de ce qu'il qualifie selon ses propres termes de "grands projets de développement collectif". Cette déclaration n'apporte aucune garantie à l'effet que le gouvernement cessera de recourir au travail forcé dans le cadre d'autres ouvrages, y compris pour les services auxiliaires et de portage pour l'armée, ni que le travail forcé dans le cadre de "grands ouvrages" ne risque pas de reprendre à tout moment.
  1056. Aucune des pratiques de travail forcé du Myanmar ne rentre dans la définition de l'une quelconque des dérogations à l'interdiction générale du recours au travail forcé ou obligatoire stipulée par la convention. De fait, les pratiques du Myanmar ne correspondent à aucune des cinq exceptions -- assez strictes -- que prévoit la convention: service militaire obligatoire; obligations civiques normales; travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation judiciaire; travail ou service exigé dans les cas de force majeure; et menus travaux de villages. De plus, qu'un travailleur forcé soit rémunéré ou non n'a aucune incidence quant à déterminer si la pratique en cause rentre dans l'un des cinq exceptions envisageables, même si le gouvernement a voulu défendre ses pratiques en alléguant que les travailleurs forcés sont rémunérés.
  1057. Il n'y a pas de période transitoire qui dispenserait le Myanmar de satisfaire à l'obligation que lui prescrit la convention no 29 de supprimer le travail forcé sous toutes ses formes. La commission constituée par l'OIT pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution au sujet du portage obligatoire au Myanmar a établi qu'aucune période transitoire de cette nature ne s'applique. Ce constat est largement appuyé en fait comme en droit. Les quarante années écoulées depuis la ratification de la convention par le Myanmar constituent un délai plus que suffisant pour procéder aux modifications requises de la législation et de la pratique afin de rendre l'une et l'autre conformes à la convention. De plus, le gouvernement admet lui-même qu'aucune période transitoire ne s'applique, cette reconnaissance ayant été exprimée dans le cadre de la procédure exercée sur le fondement de l'article 24 et, récemment, dans les observations qu'il a adressées aux Nations Unies à propos de rapports sur les pratiques de travail forcé.
  1058. Enfin, même dans le cas où une telle période transitoire s'appliquerait, les faits démontreraient qu'aucune des conditions ou garanties à respecter au cours d'une telle période ne l'ont été par le Myanmar. Le travail forcé est utilisé à des fins privées; il est recouru à une main-d'oeuvre forcée de manière large et systématique, comme composante ordinaire du budget de l'Etat; et les pratiques de travail forcé ne se limitent aucunement à des mesures d'exception. Les autres manquements par rapport aux conditions et garanties prévues par les dispositions transitoires de la convention sont la réglementation inadéquate ou inexistante des pratiques de travail forcé; le fait que le travail ne serve pas les intérêts directs et majeurs de la collectivité à laquelle il est imposé et qu'il n'a pas non plus un caractère de nécessité urgente; le fait que ce travail constitue une contrainte trop lourde pour la population; le fait que le travail forcé est pratiqué à titre d'impôt sans aucune des sauvegardes prévues par la convention, notamment la faculté, pour les travailleurs forcés, de demeurer sur leur lieu de résidence habituelle et de préserver leur religion, leur vie sociale et leur agriculture; l'enrôlement de femmes, d'enfants et d'hommes de plus de 45 ans; le fait que le travail forcé ne soit pas limité à 60 jours par an; l'absence de taux de rémunération en espèces correspondant aux taux en vigueur pour le travail libre et le non-respect du nombre d'heures de travail hebdomadaire et du repos hebdomadaire; la non-application de la législation en matière d'indemnisation des travailleurs et, en tout état de cause, le non-respect de l'obligation d'assurer la subsistance d'un travailleur devenu invalide dans le cadre d'un travail forcé; le fait de ne pas garantir que les personnes soumises au travail forcé ne soient pas transférées dans des régions où les conditions de nourriture et de climat sont tellement différentes que leur santé peut en être affectée ou bien, dans le cas où un tel transfert est nécessaire, sans assurer l'adaptation progressive des travailleurs aux nouvelles conditions; le fait de ne pas garantir, pour les périodes prolongées de travail forcé, des soins médicaux et des moyens de subsistance appropriés pour les familles des travailleurs ni de prévoir la prise en charge du coût du transport des travailleurs jusqu'au lieu de travail et retour; le fait de ne pas avoir aboli le portage obligatoire "dans le plus bref délai possible" après la ratification.
  1059. Sur la base des faits tels qu'ils ont été présentés et de la discussion de la législation évoquée dans le cadre de cette plainte, les plaignants prient instamment le Conseil d'administration de constituer une commission d'enquête, qui sera chargée d'examiner cette plainte et de faire rapport sur la situation au Myanmar. Les plaignants recommandent en outre que, si une telle commission d'enquête est établie, elle insiste sur une procédure propre à garantir la sécurité des témoins et de leurs familles. Les plaignants demandent que la commission d'enquête dresse un constat des faits et en tire des conclusions juridiques allant dans le sens de la plainte et recommandent que le Myanmar prenne des mesures correctrices immédiates afin de se conformer à la convention no 29 et en respecter les termes.
  1060. II. ACTION MENEE ANTERIEUREMENT DANS LE CADRE DE L'OIT
  1061. Le Myanmar a ratifié la convention (no 29) sur le travail forcé ou obligatoire, 1930 (ci-après désignée la "convention no 29"), le 4 mars 1955 (Note 1041). Le non-respect par le Myanmar de ses obligations par rapport à la convention no 29 fait depuis longtemps l'objet de commentaires de la part de la Commission d'experts sur l'application des conventions et recommandations (ci-après désignée la "commission d'experts") et de la Commission de la Conférence internationale du Travail sur l'application des normes (ci-après désignée la "Commission de la Conférence") (Note 1042).
  1062. A. Suivi mené par la commission d'experts et la Commission de la Conférence
  1063. 1. La commission d'experts
  1064. Depuis plus de 30 ans, la commission d'experts examine le respect, par le Myanmar, de ses obligations au titre de la convention no 29. Dans les années soixante, elle a abordé les pratiques suivies par le gouvernement en vertu de la loi no 9 de 1894 sur les prisons, de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes (Note 1043). En 1968, le gouvernement a déclaré que les lois sur les villages et sur les villes n'étaient plus en vigueur et qu'il envisageait l'adoption d'une nouvelle législation interdisant le travail forcé ou obligatoire. Il a précisé en outre que le travail forcé n'était pas utilisé à des fins publiques dans le pays (Note 1044). Par la suite, l'examen périodique de la situation du pays n'a fait apparaître aucun changement substantiel, que ce soit en droit ou en pratique. En 1991, la commission d'experts a été saisie d'un rapport de la CISL contenant des allégations précises sur les pratiques de portage forcé, allégations auxquelles le gouvernement n'a pas répondu (Note 1045).
  1065. En 1993, la CISL a engagé une procédure de réclamation sur le fondement de l'article 24 de la Constitution de l'OIT à propos de la pratique de portage forcé au Myanmar ("réclamation en vertu de l'article 24") (Note 1046). La commission d'experts a, en conséquence, suspendu l'examen de cet aspect des pratiques de travail forcé au Myanmar. Elle a également prié le gouvernement de faire ses commentaires sur les pratiques de travail forcé autres que les pratiques de portage alléguées dans le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar désigné par la Commission des droits de l'homme des Nations Unies (Note 1047).
  1066. En 1995, le comité constitué en vertu de l'article 24 a recommandé que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes soient modifiées ou abrogées et que l'action de suivi nécessaire soit assurée, en prévoyant notamment une répression stricte à l'égard de ceux qui auraient encore recours au travail forcé. La commission d'experts a exprimé l'espoir que le gouvernement prendrait des mesures correctives; elle a noté en outre que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes permettaient d'imposer du travail forcé.
  1067. Le gouvernement du Myanmar n'ayant pas soumis de rapport conformément à l'article 22 de la Constitution de l'OIT, la commission d'experts s'est saisie de la réponse du gouvernement au comité constitué en vertu de l'article 24. Dans cette réponse, le gouvernement déclare qu'il n'y a pas de travail forcé au Myanmar, mais qu'une tradition culturelle solidement ancrée veut que chacun offre volontairement son travail dans les conditions prévues à l'article 2 2) e) de la convention no 29 (Note 1048). La commission a fait observer que les travaux en question doivent être de "menus travaux" et qu'ils doivent être accomplis "dans l'intérêt direct de la collectivité" et non se rapporter à des ouvrages "destinés à une communauté plus large". Elle a ajouté que "la construction d'une voie ferrée ne semble répondre ni à l'un ni à l'autre de ces critères" et que la persistance "des dispositions de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes permettent difficilement de dire que les résidents effectuant un travail à la demande des autorités le font volontairement" (Note 1049).
  1068. En 1996, la commission d'experts réitérait ses précédentes constatations concernant la loi sur les villages et la loi sur les villes, réaffirmant qu'à son avis ces instruments permettent d'imposer un travail forcé au sens prévu par la convention no 29. Elle prenait note avec préoccupation de la réponse faite par le gouvernement à la demande que la Commission de la Conférence lui avait adressée en 1995, en le priant de prendre des mesures correctives et de fournir un rapport détaillé (Note 1050). La commission faisait observer en outre que, depuis 1967, le gouvernement déclare que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes sont tombées en désuétude et qu'il est question de les modifier ou de les abroger. La commission faisait en outre observer que: "dans son dernier rapport, le gouvernement persiste à entretenir la confusion entre travail obligatoire et travail volontaire et ne donne aucune indication, quelle qu'elle soit, quant à des mesures concrètes qui auraient été prises pour abolir, tant dans la législation que dans la pratique, le pouvoir d'imposer un travail obligatoire" (Note 1051). Elle priait le gouvernement du Myanmar de fournir des précisions complètes à la Conférence internationale du Travail à sa 83e session, en juin 1996.
  1069. 2. La Commission de la Conférence
  1070. Au cours des cinq dernières années, le gouvernement du Myanmar a été invité trois fois à s'exprimer devant la Commission de la Conférence au sujet de ses obligations au titre de la convention no 29. A deux reprises, le non-respect de ses obligations a fait l'objet de paragraphes spéciaux dans le rapport de la Commission de la Conférence.
  1071. En 1992, la Commission de la Conférence a noté que le gouvernement n'avait pas fait parvenir à temps son rapport dû en vertu de l'article 22 et le priait de faire rapport au Bureau dans les meilleurs délais (Note 1052). Un représentant gouvernemental a déclaré devant cette commission que: 1) il n'y avait pas de coercition en ce qui concerne l'emploi des travailleurs au Myanmar; 2) que les porteurs travaillant pour l'armée le faisaient librement; 3) que leur recrutement et leur emploi étaient conformes à l'article 8, paragraphe 1 n), de la loi de 1908 sur les villages et à l'article 7, paragraphe 1 m), de la loi de 1907 sur les villes; 4) que leur recrutement obéissait à certains critères; 5) que les porteurs n'étaient pas maltraités ni affectés à des tâches militaires; 6) qu'ils avaient droit, entre autres choses, au même traitement médical que les militaires en cas de lésions corporelles; et 7) qu'une législation exhaustive et complexe s'opposait de manière effective à la pratique du travail forcé sur le terrain.
  1072. En 1995, la Commission de la Conférence a "prié le gouvernement d'abroger sans délai les dispositions juridiques de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes afin de rendre ces instruments conformes, tant à la lettre qu'à l'esprit de la convention no 29, de mettre un terme aux pratiques de travail forcé sur le terrain, de prévoir et appliquer des sanctions exemplaires contre le recours à cette pratique et de fournir un rapport détaillé à la commission d'experts sur les mesures législatives et pratiques adoptées dans un souci de conformité avec la convention no 29". Ce cas a fait l'objet d'un paragraphe spécial dans le rapport de la Commission de la Conférence (Note 1053).
  1073. En 1996, la Commission de la Conférence a adopté à nouveau un paragraphe spécial dans lequel "elle demande, une nouvelle fois, fermement au gouvernement d'abroger formellement et de toute urgence les dispositions légales et d'abandonner toutes les pratiques qui sont contraires à la convention. Elle demande au gouvernement de prescrire des sanctions véritablement dissuasives contre tous ceux qui recourent au travail forcé" (Note 1054). Dans un paragraphe spécial distinct, la Commission de la Conférence "a constaté avec une grande préoccupation" un défaut continu d'éliminer de sérieuses carences (Note 1055).
  1074. B. La réclamation présentée en vertu de l'article 24
  1075. Par lettre du 25 janvier 1993, la CISL a présenté une réclamation en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, par le Myanmar (Note 1056). Le Conseil d'administration a constitué un comité chargé d'examiner cette réclamation, lequel a rendu son rapport le 7 novembre 1994 (Note 1057). Les recommandations du comité chargé d'examiner la réclamation ont ensuite été adoptées par le Conseil d'administration en novembre 1994 (Note 1058).
  1076. La CISL allègue que le gouvernement du Myanmar a enfreint la convention no 29 en institutionnalisant "le recours des commandants militaires au travail forcé par le recrutement forcé et l'exploitation de porteurs" (Note 1059). Se fondant sur des rapports dignes de foi, la CISL déclare que des hommes, des femmes et des enfants sont couramment raflés par la police et l'armée pour accomplir des services de portage dans des conditions pénibles et attentatoires: alimentation insuffisante, absence de soins médicaux, affectation au déminage, soumission à des viols ainsi qu'à des exécutions extrajudiciaires. La CISL allègue en outre que: 1) la pratique du portage forcé au Myanmar correspond bien au travail forcé ou obligatoire tel que le définit la convention no 29; 2) aucune des exceptions prévues par la convention n'est applicable en la matière; 3) le Myanmar ne se trouve pas dans une période transitoire envisagée par la convention no 29; 4) aucune des garanties ou conditions devant assortir le recours au travail forcé pendant une période transitoire n'est satisfaite par le gouvernement du Myanmar; et 5) le gouvernement du Myanmar a fait défaut à l'obligation que lui impose l'article 25 de la convention no 29 de sanctionner ceux qui imposent à autrui du travail forcé (Note 1060).
  1077. Le gouvernement du Myanmar a adressé au comité constitué en vertu de l'article 24 (Note 1061) deux communications affirmant que: 1) il n'est pas question de pratiques de travail forcé ou d'esclavage, mais d'une contribution volontaire de la main-d'oeuvre, conformément à une tradition millénaire; 2) les militaires recrutent et emploient des porteurs dans le cadre de leurs campagnes contre des groupes insurrectionnels près des frontières, conformément aux dispositions pertinentes de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes; 3) les diverses allégations relatives au caractère abusif du travail de portage et des conditions dans lesquelles ce travail s'effectue sont dénuées de tout fondement et les soins médicaux sont assurés en cas de nécessité; et 4) les conditions et garanties prévues aux articles 8 à 16, 18, 23 et 24 de la convention no 29 sont pleinement satisfaites (Note 1062).
  1078. Le comité constitué en vertu de l'article 24 a formulé les constatations et recommandations suivantes:
  1079. a) la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes ménagent la possibilité d'imposer un travail forcé sous la menace, en violation de la convention no 29 (Note 1063);
  1080. b) le gouvernement du Myanmar n'a pas "fourni d'indications qui feraient entrer le portage obligatoire dans le champ de l'une des exceptions prévues à l'article 2, paragraphe 2, de la convention" (Note 1064);
  1081. c) le gouvernement du Myanmar n'invoque pas, dans ses réponses à la réclamation présentée en vertu de l'article 24, la notion de période transitoire. Cette ligne de conduite est conforme à la position qu'il a prise dans ses rapports soumis en application de l'article 22 de la Constitution de l'OIT concernant le respect de ses obligations telles qu'elles découlent de la convention no 29. Dans ces rapports, le gouvernement affirme constamment que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes sont des instruments tombés en désuétude datant de l'époque coloniale et que les pouvoirs qu'elles confèrent ne sont plus exercés depuis longtemps (Note 1065);
  1082. d) le respect des obligations découlant de l'article 25 de la convention no 29 prescrirait d'abroger immédiatement les dispositions en cause de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes et, de même, d'instituer des poursuites pénales à l'encontre de ceux qui recourent au travail forcé par la coercition. Le comité constitué en vertu de l'article 24 a fait observer que "ce point paraît d'autant plus important que l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaît tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque de marquer encore davantage le recrutement effectif par les responsables locaux ou militaires" (Note 1066).
  1083. III. CONSTATS DES FAITS
  1084. L'Union du Myanmar recourt de manière largement étendue à la pratique du travail forcé à des fins publiques ainsi que pour des intérêts privés. Rentrent dans les fins publiques documentées dans la présente section: 1) le portage, le combat, le déminage et les prestations sexuelles pour les militaires; 2) les projets de développement et d'infrastructure réalisés au détriment de la population en général; et 3) les ouvrages militaires. Comme on le démontre ci-après, le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé à des fins privées afin de: 1) promouvoir le développement des entreprises à risque commun, notamment pour l'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays; 2) encourager l'investissement privé dans l'industrie du tourisme; et 3) servir les intérêts commerciaux particuliers de membres de l'armée du Myanmar. Comme examiné dans la présente partie, la législation actuelle du Myanmar autorise l'imposition d'un travail forcé ou obligatoire sous peine de sanctions. Cette législation prime sur toute directive gouvernementale qui tendrait à réprimer des pratiques attentatoires liées au travail forcé dans le cadre de projets de développement ainsi que toute législation qualifiant de délit pouvant être poursuivi au pénal l'imposition du travail forcé.
  1085. A. Travail forcé à des fins publiques
  1086. 1. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour le portage, le combat, le déminage et les prestations sexuelles pour les militaires
  1087. Les opérations militaires du Myanmar se caractérisent par une utilisation continuelle, largement répandue et systématique de la population civile pour des tâches de portage. Parallèlement au portage, le travail forcé concerne également le déminage, le combat et les prestations sexuelles pour les militaires. Dans une étude solidement documentée, il est constaté que "la réquisition de centaines de milliers de porteurs (y compris appartenant à la majorité birmane) a été signalée dans chaque Etat ou circonscription administrative de la Birmanie peuplée par des minorités ethniques" (Note 1067).
  1088. La pratique actuelle du portage forcé au service de l'armée du Myanmar (appelée en birman "Tatmedaw") a des liens historiques avec l'époque de l'occupation japonaise et du régime colonial britannique (Note 1068). Le gouvernement du Myanmar a nié de diverses manières l'existence de la pratique et a prétendu que, lorsque des opérations de portage ont lieu, elles s'effectuent selon des conditions strictes, conformément à la législation, les personnes concernées s'étant librement offertes pour cette tâche (Note 1069). Malgré ces affirmations, "il est indéniable que, en l'absence de routes ou moyens de transport appropriés, des milliers de villageois sont contraints de transporter les armes et les équipements destinés à toutes les opérations militaires majeures" (Note 1070). Depuis 1988, d'anciens cadres de l'armée ont confirmé que "pour la plupart des opérations militaires menées dans les zones de conflit, il est réquisitionné en moyenne un porteur par soldat en mission" (Note 1071).
  1089. La plupart des personnes mobilisées comme porteurs ont été contraintes de le faire par divers procédés établis et corroborés par des sources indépendantes et fiables (Note 1072). Les chefs de village sont couramment avisés du contingent de porteurs à fournir et ont juridiquement l'obligation de fournir ce contingent (Note 1073). La seule échappatoire consiste à acquitter auprès du commandement militaire local des sommes importantes appelées "taxes de portage". La rafle est un moyen courant d'obtenir des porteurs et, à moins d'avoir assez d'argent pour pouvoir être relâché par les soldats, il est impossible de se soustraire à la mission de portage. A côté de ces formes plus officielles ou organisées de mobilisation de civils pour des missions de portage, la population est couramment victime de rafles opérées par la police locale ou l'armée dans des lieux publics tels que les cinémas, les cafés, les salles de diffusion de vidéos et les gares. Les victimes sont chargées dans des camions et emmenées pour servir de porteurs. Dans certains cas, ces personnes sont amenées loin de leur lieu de capture afin de les dissuader de s'enfuir. Comme le note le Rapporteur spécial des Nations Unies: "nombre de victimes de telles opérations ... sont des paysans, des femmes, des travailleurs journaliers ou d'autres civils sans défense n'ayant pas assez d'argent pour s'épargner de mauvais traitements par des libéralités" (Note 1074).
  1090. Les réquisitions pour service semblent être arbitraires et largement répandues. Un homme explique avoir été arrêté souvent pour travailler comme porteur, ce qui lui interdisait d'accomplir son travail ordinaire de transporteur de marchandises: "en une année, j'ai été réquisitionné comme porteur peut-être dix fois, parfois pendant dix jours, parfois pendant deux mois..." (Note 1075). Si le SLORC entreprend une opération de grande envergure, les chefs militaires réquisitionnent des centaines de milliers de personnes comme porteurs, sur la base des besoins prévus. Ces besoins sont calculés en tenant compte du fait avéré que nombre de porteurs s'échapperont dès qu'ils le pourront et devront donc être remplacés.
  1091. Une somme considérable de témoignages montrent qu'hommes, femmes, enfants et vieillards sont réquisitionnés comme porteurs, même si le SLORC prétend qu'il existe des restrictions et des conditions selon lesquelles les personnes sont admises à travailler comme porteurs (Note 1076). "L'armée réquisitionne régulièrement des porteurs sans discrimination ... lorsque les troupes ont besoin d'un grand nombre de porteurs, on réquisitionne également les femmes âgées de 15 à 60 ans" (Note 1077).
  1092. Parmi les civils contraints de servir comme porteurs pour les troupes du SLORC figurent également des condamnés. Les condamnés sont contraints de travailler les fers aux pieds et un traitement particulièrement dur leur est réservé (Note 1078). De nombreux détenus qui ont été réquisitionnés comme porteurs sont morts sur les lignes de front, souvent en conséquence des mauvais traitements infligés par les troupes du SLORC (Note 1079).
  1093. Des informations solidement étayées et des témoignages individuels démontrent le caractère attentatoire des conditions "de travail" auxquelles sont soumis les civils réquisitionnés comme porteurs. Ces porteurs acheminent, sous surveillance militaire, des charges de denrées alimentaires, de munitions et d'armes qui peuvent peser de 30 à 60 kilos. Ils accomplissent chaque jour de longues journées sans recevoir suffisamment de nourriture ou d'eau ni bénéficier de suffisamment de repos (Note 1080). Ils ont rarement accès à des soins médicaux, même si les maladies, dont la malaria, et les lésions corporelles résultant du travail forcé sont nombreuses. Les porteurs sont victimes non seulement de maladies, mais aussi de blessures subies au cours des combats ou des opérations de déminage (Note 1081), ainsi que de lésions résultant des charges excessives qu'ils doivent transporter. Lorsque, pour l'une de ces raisons, les porteurs ne sont plus en mesure de remplir leur office, les troupes du SLORC les abandonnent quand ils tombent d'épuisement, sans leur apporter le moindre soin médical ou toute autre forme d'assistance (Note 1082).
  1094. De nombreux porteurs sont battus ou subissent d'autres formes de sévices corporels de la part des troupes du SLORC, qui les abandonnent souvent avec des lésions graves. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le Myanmar a estimé que certaines des plus graves violations des droits de l'homme dont il ait eu connaissance se sont produites dans le cadre du portage forcé (Note 1083), les sévices subis revêtant la forme de coups (Note 1084), d'exécutions extrajudiciaires et sommaires (Note 1085), ainsi que de viols, y compris de viols collectifs de femmes réquisitionnées pour des missions de portage (Note 1086).
  1095. Il est de pratique courante chez les militaires d'infliger des coups de baguette ou de crosse de fusil à un porteur qui ne peut plus continuer (Note 1087). Des porteurs qui ont pu être entendu après s'être échappés déclarent avoir subi eux-mêmes et vu commettre des voies de fait. Ils décrivent des "sévices corporels et traitements inhumains depuis le moment de leur capture" ..., précisant que (la plupart) étaient roués de coups ... lorsqu'ils trébuchaient ou tombaient d'épuisement et que tous (ceux qui ont été entendus) ont "vu mourir des compagnons de peine" (Note 1088). De nuit, hommes et femmes étaient séparés. Beaucoup de femmes ont été violées de manière répétée par des soldats du SLORC, qui procédaient parfois de manière collective (Note 1089).
  1096. Les porteurs sont couramment utilisés à des fins militaires, nombre d'entre eux ayant péri du fait qu'ils étaient "mêlés aux soldats en tant que portefaix pour chaque colonne de marche et ont ainsi été amenés directement sur la ligne de front des combats" (Note 1090). Une fois parvenus sur la ligne de front, les porteurs sont souvent tenus d'accomplir un certain nombre de tâches militaires. C'est ainsi que, sans être eux-mêmes armés, ils sont placés en tête de colonne pour déclencher les mines et autres pièges explosifs ainsi que les embuscades. Comme l'a constaté un groupe d'investigation, "un aspect particulièrement révoltant du phénomène ... est la pratique suivie parfois par les militaires, qui consiste à utiliser des porteurs civils comme "boucliers humains' dans le cadre d'opérations de première ligne" (Note 1091).
  1097. Assez souvent, les porteurs sont envoyés pour déminer les chemins et les champs où des mines ont été posées (Note 1092). Si, en soi, le recours à des enfants comme porteurs est déjà condamnable, il est encore plus révoltant de constater que le SLORC ne prémunit pas les enfants contre l'obligation d'accomplir des fonctions militaires après avoir été enrôlés comme porteurs (Note 1093).
  1098. 2. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé dans le cadre de projets de développement et de travaux publics qui, non seulement ne servent pas les intérêts directs de la communauté chargée de leur exécution, mais en fait portent atteinte à l'existence de cette communauté (Note 1094)
  1099. a) Les pratiques de travail forcé dans le cadre de projets de développement sont largement répandues et touchent des centaines de milliers de civils
  1100. L'utilisation largement répandue du travail forcé au Myanmar dans le cadre de projets de développement et de construction affecte l'existence d'un grand nombre de personnes -- hommes, femmes, enfants et vieillards. Le total des effectifs réquisitionnés pour les différents projets atteint plusieurs centaines de milliers (Note 1095). Le travail forcé est pratiqué au Myanmar dans le cadre d'un grand nombre de projets, y compris de développement des infrastructures et du tourisme (Note 1096). Les ouvrages généralement accomplis de cette manière recouvrent la construction de routes, de lignes de chemin de fer et d'aéroports (Note 1097). Le gouvernement militaire a contraint des milliers de personnes à "fournir le concours" de leur travail dans le cadre de projets de développement du tourisme conçus en vue de faire de l'année 1996 l'"année du tourisme au Myanmar" (Note 1098).
  1101. Des prisonniers de tout le pays sont aussi couramment réquisitionnés pour des ouvrages d'infrastructure (Note 1099). Ils sont employés pour la construction de routes, de même que pour casser des pierres à cette même fin. En général, ils sont établis dans des camps de travail situés aux abords du chantier. Les conditions d'existence dans ces camps sont dures, à quoi s'ajoute un travail pénible. De nombreux prisonniers meurent à la tâche. Selon certaines informations, des prisonniers politiques se trouveraient dans ces camps (Note 1100).
  1102. b) Le travail forcé dans le cadre de projets de développement est systématique et organisé
  1103. Le travail forcé dans le cadre de projets de développement au Myanmar obéit à un schéma systématique et organisé; les éléments recueillis révèlent une intensification marquée du travail forcé ces derniers temps (Note 1101). S'il est vrai que des personnes ont été acheminées jusqu'à d'autres parties du pays pour des projets de réalisation basés sur un travail forcé, "en règle générale, les chantiers sont organisés sur la base d'un village ou d'une localité. Pour les chantiers locaux, chaque famille (ou bien chaque rue ou chaque quartier) reçoit du LORC de district (Conseil de restauration de la loi et de l'ordre public) l'ordre de fournir un certain nombre de travailleurs pour accomplir une certaine tâche, comme le concassage d'une certaine quantité de pierres ou le terrassement d'un tronçon de route" (Note 1102). Comme a pu le constater un membre d'une organisation s'occupant des droits de l'homme, "c'est en général ... au chef qu'il incombe de désigner telles familles pour travailler à telles périodes, selon un principe de rotation. Nul ne peut se soustraire à cette obligation; la seule échappatoire étant d'acquitter une amende élevée ("taxe de portage') ou bien fuir la zone" (Note 1103). Les fonds destinés à payer les travailleurs sont rarement disponibles et ne parviennent pratiquement jamais à ceux qui accomplissent le travail (Note 1104). Dans les cas où les villageois ne se sont pas enfuis et n'ont pas non plus obtempéré aux ordres, ils ont subi de dures représailles de la part des troupes locales du SLORC. Un chef de village a ainsi été roué de coups et soumis à la torture et des récalcitrants ont été menacés de mort (Note 1105).
  1104. c) Les conditions de travail inhumaines et les atteintes aux droits de l'homme sont monnaie courante dans le cadre des projets de développement
  1105. Le travail forcé accompli dans le cadre de projets est en soi pénible et épuisant, puisqu'il consiste en un travail manuel de creusement de fossés ou canaux, d'établissement de berges et de réalisation de routes, barrages et lignes de chemin de fer. Les journées sont longues, avec peu de repos et l'approvisionnement en eau et en nourriture est minime voire inexistant. Selon certaines informations, ces personnes auraient été contraintes de passer la nuit sur le chantier et de dormir couramment sur les routes en construction, par tous les temps (Note 1106). L'absence de soins médicaux est un facteur de maladies et autres problèmes sanitaires. Beaucoup de camps de travail forcé sont établis dans les zones où la malaria est endémique (Note 1107). Dans d'autres cas, le changement de climat a des conséquences funestes pour les populations montagnardes extraites de leur cadre habituel (Note 1108).
  1106. Comme pour les personnes réquisitionnées par le Tatmadaw pour servir de porteur, les atteintes flagrantes aux droits de l'homme dans le cadre du travail forcé imposé pour les projets de développement sont monnaie courante (Note 1109). Le Rapporteur spécial sur la situation au Myanmar indique que les pires atteintes aux droits de l'homme dont il ait eu connaissance se produisent dans le cadre de projets de développement basés sur le travail forcé ainsi que dans le cadre du portage forcé (Note 1110). Il a été signalé à de multiples reprises que les personnes contraintes de travailler dans le cadre de projets de constructions sont couramment victimes de voies de fait, tortures, enlèvements ou exécutions sommaires (Note 1111). Les femmes et les enfants sont soumis à ces mauvais traitements, au même titre que les hommes (Note 1112), et certaines travailleuses sont en outre victimes de viol, de nuit, par les soldats (Note 1113).
  1107. d) La pratique du travail forcé dans le cadre de projets publics de développement et d'infrastructure porte préjudice à la vie économique et sociale de la population du Myanmar
  1108. La pratique du travail forcé se révèle destructrice pour la vie économique et sociale de la population qui en est victime. Comme le fait observer l'un des principaux organismes d'investigation, "la réquisition par la force de civils soumis obligatoirement à des tâches pour le compte des autorités militaires ... dissout la vie familiale et accule de nombreuses familles à une pauvreté encore plus profonde." (Note 1114) dans un pays qui est déjà l'un des plus pauvres du monde. Dans l'Etat d'Arakan, par exemple, beaucoup de personnes sont des journaliers, pour qui le travail forcé non rémunéré auquel le SLORC les soumet vient aggraver le manque à gagner subit du fait du maigre travail rémunérateur qu'ils n'ont pas pu prendre (Note 1115). La vie familiale est anéantie en outre par le fait que les enfants sont contraints de satisfaire au contingent familial de travail forcé dans le cadre des projets, tandis que leurs parents recherchent du travail libre et rémunéré (Note 1116). Ainsi, les enfants sont privés d'éducation et n'ont pas d'enfance.
  1109. La contrainte des prestations à fournir par certains membres de la famille déplace de manière disproportionnée la charge de l'activité rémunératrice nécessaire à celle-ci; elle a une incidence négative sur l'économie rurale et, en conséquence, sur l'alimentation et la santé. Lorsque les hommes sont absents, réquisitionnés dans le cadre de projets basés sur le travail forcé, "les travaux agricoles doivent être accomplis par les femmes. Avec des effectifs éclaircis, il devient difficile pour la communauté de continuer de planter, entretenir les cultures et faire les récoltes. Les mauvaises récoltes, la malnutrition et la maladie en sont les conséquences." (Note 1117). L'impact des pratiques de travail forcé sur la situation sanitaire des femmes et des enfants est considérable (Note 1118). Le fait est que, "la réquisition forcée de femmes, y compris de jeunes filles, de femmes enceintes et de femmes âgées pour des travaux obligatoires dans le cadre de projets gouvernementaux de construction ou même comme porteurs dans les zones de conflit ... a des incidences majeures pour l'ensemble de la société birmane sur le plan de la santé et sur le plan humanitaire puisque non seulement le travail forcé en soi a des conséquences extrêmement néfastes pour la santé, mais que c'est dans le cadre de l'accomplissement de ce travail forcé que sont commises les pires violations des droits de l'homme à l'égard des femmes, dont les viols et les atteintes à la vie." (Note 1119). La pratique généralisée du viol anéantit la vie de l'individu, de la famille ainsi que du village (Note 1120).
  1110. e) Les projets de développement et d'infrastructure pour lesquels le gouvernement recourt au travail forcé ne bénéficient pas à la collectivité fournissant ce travail
  1111. Les bénéfices des projets de développement pour la collectivité à laquelle a été imposé le travail forcé sont illusoires voire inexistants (Note 1121). Dans bien des cas, des villages entiers sont déplacés de force pour que les chantiers puissent continuer (Note 1122). La plupart du temps, les routes et lignes de chemin de fer ainsi construites doivent bénéficier aux SLORC plutôt qu'à une communauté du Myanmar. Les routes et les lignes de chemin de fer sont destinées à l'acheminement des troupes vers les zones où le SLORC cherche à renforcer son emprise, ainsi qu'à faciliter le développement du tourisme (Note 1123). En tout état de cause, il est improbable que la construction de certaines parties de grands axes routiers puisse apporter quelque avantage que ce soit aux petites communautés; la pauvreté est telle que les populations locales n'ont pas les moyens financiers de se déplacer par la route ou le chemin de fer (Note 1124). Il existe un certain nombre de sources d'estimation de la valeur économique du travail forcé. Il s'agit des chiffres du gouvernement lui-même, tels qu'ils sont publiés dans son bulletin statistique intitulé Annual Review, ainsi que les données provenant des rapports de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. De plus, le gouvernement des Etats-Unis a publié un décompte précis de ce qu'il appelle "la valeur sur le marché d'une main-d'oeuvre non rémunérée et essentiellement non volontaire employée ... dans le cadre de projets de travaux publics", essentiellement à la construction de routes et d'ouvrages d'art pour des projets locaux de développement. Selon le document intitulé Foreign economic trends report: Burma, publié par le Département d'Etat des Etats-Unis en juin 1996 et basé essentiellement sur la publication du gouvernement intitulé Annual Review, pour l'exercice financier 1994-95, la valeur sur le marché de ce travail a représenté approximativement 3,1 pour cent du produit intérieur brut, sur la base du taux de change officiel du kiat, la monnaie nationale (Note 1125). Au cours de cette même période, la part représentée par les "contributions de la population" au coût des projets de l'Etat a représenté 53,9 pour cent de la valeur totale des dépenses réalisées (Note 1126). En outre, les données économiques du SLORC font apparaître que les crédits économisés par ces programmes de travail forcé sont détournés vers le renforcement de dépenses militaires et autres, qui ne bénéficient pas à la population et ne répondent pas non plus à ses besoins essentiels. En fait, les données disponibles pour ces années révèlent que les dépenses publiques en acquisitions militaires se sont accrues en conséquence de la manne qu'a constitué pour le budget de l'Etat l'économie réalisée grâce au travail forcé dans les ouvrages publics (Note 1127).
  1112. 3. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour la réalisation d'ouvrages militaires
  1113. Le travail forcé imposé à la population du Myanmar sert à la construction d'ouvrages militaires. On signale que des civils ont été contraints de travailler pour la construction de casernes pour l'armée et la police des frontières (Note 1128). Les autres types de travaux accomplis pour le compte de l'armée incluent la construction et l'entretien de routes militaires, de même que la construction de camps militaires et l'appui nécessaire à ces camps (Note 1129).
  1114. B. Recours au travail forcé à des fins privées
  1115. 1. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour promouvoir le développement des entreprises à risques communs, notamment pour l'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du pays
  1116. Le gouvernement du Myanmar s'est efforcé d'attirer les investissements étrangers pour mettre en valeur ce que l'on présume être d'importantes réserves de gaz naturel et de pétrole dans le pays. Depuis 1992, des informations provenant de sources diverses corroborent uniformément le recours du gouvernement au travail forcé sur une vaste échelle dans les régions du Myanmar où s'effectue la prospection des ressources de pétrole et de gaz naturel, avec les ouvrages d'infrastructure que nécessitent ces opérations (Note 1130). La mise en valeur des réserves de pétrole et de gaz naturel inclut la réalisation du gazoduc de Yadana, au large de l'Etat de Mon ainsi que les forages de prospection dans la circonscription de Sagaing.
  1117. Le gazoduc de Yadana constitue le projet le plus ambitieux de développement et d'exploitation des réserves de pétrole et de gaz naturel du Myanmar. Sa réalisation s'effectue dans le cadre d'une entreprise à risques communs associant Total, compagnie pétrolière française, Unocal, compagnie pétrolière américaine et MOGE (Myanmar Oil and Gas Enterprises), société entièrement contrôlée par le SLORC (Note 1131). Selon des informations répandues et persistantes, la population vivant au voisinage du tracé du gazoduc est régulièrement réquisitionnée pour la réalisation du passage de ce gazoduc ainsi que des infrastructures associées (Note 1132). Des informations fiables faisant état d'atteintes aux droits de l'homme, notamment de tortures, de viols, d'exécutions sommaires et arbitraires et de déplacements forcés en raison du travail forcé ont été documentées et récemment confirmées en ce qui concerne 11 villages de la région (Note 1133). Ces éléments ne sont contestés ni par le gouvernement du Myanmar (Note 1134) ni par les compagnies pétrolières associées au projet (Note 1135).
  1118. La réalisation des 160 kilomètres de la ligne de chemin de fer de Ye à Tavoy, en rapport, y a-t-il lieu de croire, avec la mise en valeur des réserves de gaz naturel et l'installation du gazoduc, a eu pour conséquences un déplacement de population Mon et Karen ayant fui le travail forcé (Note 1136). Dans cette mesure, tout au moins, la ligne de chemin de fer semble avoir un rapport avec la construction du gazoduc, et sa réalisation profite aux compagnies pétrolières privées participant à cette entreprise à risques communs.
  1119. Par ailleurs, une compagnie coréenne, la Yukong Oil Company, a procédé à des forages exploratoires près du village de Htaw Tha, dans la circonscription de Sagaing. Les personnes qui ont été réquisitionnées pour la construction d'une route entre Manywa et Khamti ont signalé qu'un poste de police a été constitué dans la zone et que des hommes, des femmes et des enfants travaillant dans cette zone y apportent jour et nuit des provisions pour la garde policière et pour les travailleurs (Note 1137).
  1120. 2. Recours au travail forcé pour le profit d'investisseurs privés dans des travaux de développement, des travaux publics et des projets touristiques
  1121. Comme indiqué antérieurement, le recours généralisé au travail forcé sur une échelle importante contribue au développement de l'infrastructure touristique (Note 1138). De plus, le gouvernement a, depuis peu, pour pratique d'inviter des investisseurs locaux à participer à la réalisation d'axes routiers et de lignes de chemin de fer avec, comme argument le retour sur les investissements, l'instauration éventuelle d'un péage sur l'utilisation des routes (Note 1139). Le gouvernement a annoncé que la privatisation du développement des infrastructures "s'inscrit dans les projets de création d'emplois pour la population" (Note 1140), stratégie qui inclut apparemment la réalisation de projets de développement "par le gouvernement, comptant sur la participation de la population locale sous la forme d'une contribution en travail..." (Note 1141). Au Myanmar, l'essentiel des profits réalisés dans l'industrie du tourisme sont dégagés par les lignes aériennes et l'hôtellerie, secteurs qui appartiennent partiellement à des sociétés étrangères de Hong-kong, de la Malaisie, de Singapour et de la Thaïlande (Note 1142). Ces sociétés ont annoncé des bénéfices en conséquence des profits réalisés en 1996, à l'occasion de l'année du tourisme au Myanmar, en partie grâce au travail accompli par des travailleurs forcés dans le cadre des projets destinés à attirer le tourisme (Note 1143).
  1122. 3. Le gouvernement du Myanmar recourt au travail forcé pour servir les intérêts commerciaux particuliers de membres des forces armées
  1123. Il est couramment signalé que les officiers du Tatmadaw ont des intérêts dans diverses entreprises commerciales qui leur appartiennent, notamment dans l'élevage des crevettes, la riziculture et la pisciculture, la sylviculture et la foresterie. En observant la diversité des formes que revêt le travail forcé dans le cadre de travaux publics, on constate que les militaires réquisitionnent couramment des populations civiles pour des services répondant à leurs intérêts commerciaux propres. Par exemple, dans le district de Mergui-Tavoy, on a signalé que des populations Karen ont été contraintes de travailler sans rémunération sur une grande plantation de caoutchouc, de même qu'à la réalisation de digues pour des bassins d'élevage de crevettes; non moins de 13 000 personnes auraient été contraintes de travailler dans le cadre de tels projets (Note 1144).
  1124. C. La législation sur le travail forcé au Myanmar
  1125. 1. La législation du Myanmar permet d'imposer un travail forcé ou obligatoire sous la menace de sanctions
  1126. Deux lois actuellement en vigueur au Myanmar, la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes, permettent d'imposer sous la menace de sanctions du travail forcé ou obligatoire. Ces lois autorisent la réquisition pour le portage, le transport ou d'autres services par les troupes gouvernementales, la police et les fonctionnaires "dans l'accomplissement de leur mission d'intérêt public". Elles prévoient des amendes et, dans le cas de la première, une peine d'emprisonnement allant jusqu'à un mois en cas de défaillance. Elles permettent en outre une discrimination fondée sur les classes dans la sélection des "classes laborieuses" destinées à de tels travaux. A la différence de la version anglaise citée ci-après, la version explicative en birman de ces lois ne ménagerait aucune "excuse raisonnable" pouvant soustraire l'intéressé aux sanctions encourues (Note 1145).
  1127. La version anglaise des passages pertinents de la loi 1908 sur les villages a la teneur suivante:
  1128. 8(1) Chaque chef est tenu de s'acquitter de sa mission d'intérêt public, à savoir:
  1129. ...
  1130. g) rassembler et fournir, à réception du paiement de ceux-ci conformément au barème que le Deputy Commissioner aura fixé, des guides, des messagers, des porteurs, des réserves de nourriture, du transport et des moyens de transport pour toute troupe ou force de police postée sur ou à proximité de la piste du village ou empruntant celle-ci ainsi qu'à tout fonctionnaire gouvernemental en déplacement officiel; étant entendu qu'aucun chef ne réquisitionnera pour des services personnels un résident d'un tel village qui n'appartiendrait pas à la classe laborieuse et qui ne serait pas accoutumé au travail que les tâches peuvent nécessiter;
  1131. ...
  1132. n) assister d'une manière générale tous les fonctionnaires du gouvernement dans l'accomplissement de leur mission d'intérêt public; et
  1133. o) adopter d'une manière générale telles mesures et prendre telles décisions que les intérêts du village peuvent nécessiter.
  1134. ...
  1135. 10. Un chef ou un agent de police rurale qui négligerait d'accomplir l'une quelconque des missions d'intérêt public lui étant conférées par la présente loi ou par un règlement pris en son application, ou qui abuserait de l'un des pouvoirs lui étant conféré par la présente loi ou par tout règlement précité, sera passible, sur décision du Deputy Commissioner, d'une peine d'amende n'excédant pas 50 roupies.
  1136. 11. Toute personne résidant dans le périmètre d'un village est tenu d'accomplir toutes prestations publiques, à savoir:
  1137. ...
  1138. d) sur réquisition du chef de village ou d'un policier rural, assister celui-ci dans l'exécution de sa mission, telle que prescrite aux articles 7 et 8 de la présente loi et des règlements pris en son application.
  1139. Explication: La réquisition visée à l'alinéa d) peut être soit générale soit individuelle.
  1140. 12. La personne résidant dans le périmètre d'un village, qui refuserait ou négligerait d'accomplir l'une quelconque des prestations qui lui incombent en vertu de la présente loi ou de tout règlement pris en son application sera passible, en l'absence d'une excuse dont il lui appartient de prouver la recevabilité:
  1141. i) sur décision du chef de village, d'une amende n'excédant pas 5 roupies;
  1142. ii) sur décision du comité de village, qui aura été saisi de la question par le chef de village, d'une amende n'excédant pas 10 roupies ou d'une peine de prison n'excédant pas 48 heures en tel lieu que le Deputy Commissioner aura désigné, ou des deux peines; ou
  1143. iii) sur décision d'un magistrat, d'une amende n'excédant pas 50 roupies ou d'une peine d'emprisonnement n'excédant pas un mois, ou les deux (Note 1146).
  1144. La version anglaise des parties pertinentes de la loi de 1907 sur les villes dispose:
  1145. 7(1) Le chef d'un quartier est tenu de s'acquitter de sa mission d'intérêt public, à savoir:
  1146. ...
  1147. (1) réunir et fournir, à réception du paiement anticipé selon les taux que le Deputy Commissioner, avec l'aval du Commissioner, détermine périodiquement, des guides, des provisions de nourriture, du transport et des moyens de transport pour toute troupe ou force de police postée dans ou à proximité de la ville, traversant celle-ci ou passant à proximité;
  1148. Etant entendu qu'aucun chef n'est tenu de réquisitionner des fournitures hors du périmètre du quartier dont il est le chef, ni de fournir du transport ou des moyens de transport pour des déplacements supérieurs à 12 heures à partir de cette ville, à moins que le Deputy Commissioner ne certifie par écrit qu'il est nécessaire et conforme aux intérêts publics que le transport ou les moyens de transport soient fournis pour une période plus longue, auquel cas le Deputy Commissioner détermine des taux de rémunération plus élevés que les taux prévus pour les déplacements de 12 heures ou moins;
  1149. Etant entendu également qu'aucun chef ne réquisitionnera pour un tel service un résident de ce quartier qui n'appartiendrait pas à la classe laborieuse et ne serait pas accoutumé à accomplir les tâches requises; et
  1150. m) assister d'une manière générale tous les fonctionnaires gouvernementaux et officiers municipaux dans l'exécution de leur mission d'intérêt public.
  1151. ...
  1152. 9. Toute personne résidant dans le périmètre du quartier est tenu de s'acquitter des obligations d'intérêt public suivantes:
  1153. ...
  1154. b) sur réquisition générale ou individuelle du chef, assister celui-ci dans l'exécution de sa mission d'intérêt public.
  1155. 9A. Toute personne résidant dans le quartier, qui refuse ou néglige de s'acquitter de l'un quelconque des devoirs d'intérêt public que lui prescrit la présente loi ou toute réglementation prise en son application est passible, en l'absence d'un motif dont il lui appartient de prouver la recevabilité, sur décision d'un magistrat, d'une amende pouvant s'élever à 50 roupies.
  1156. En 1995, le gouvernement du Myanmar a admis que "les deux lois ne sont plus conformes aux conditions en vigueur dans le pays, outre qu'elles ne sont pas conformes non plus aux dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé de 1930" (Note 1147). Cette déclaration semblait être l'acceptation des conclusions et recommandations de l'OIT tendant à ce que, cette situation étant constatée depuis quelque 34 ans, ces lois soient abrogées (Note 1148). Or même s'il a abrogé, ces dernières années, quelque 150 lois (Note 1149), le gouvernement du Myanmar n'a pas encore abrogé ces deux instruments, qui autorisent le travail forcé (Note 1150).
  1157. 2. Le gouvernement du Myanmar a pris des directives qui légitiment la pratique du travail forcé dans le cadre de projets de développement
  1158. Deux récentes directives gouvernementales entérinent l'extension de la pratique du travail forcé dans le cadre de projets de développement et tendent à maintenir cette pratique dans des circonstances spécifiques (Note 1151). La directive no 125, datée du 2 juin 1995, correspond à une instruction émanant du président du SLORC, junte militaire exerçant son emprise sur le pays, à tous les conseils d'Etat/de division pour la restauration de la loi et de l'ordre public. Cette directive devait donc avoir une diffusion nationale. Selon le Rapporteur spécial, par cette directive, le SLORC interdit, dans le cadre de projets nationaux de développement, les contributions de travail qui ne seraient rémunérées et précise que "pour obtenir les prestations nécessaires de la part de la population locale, celle-ci doit percevoir son juste dû". En outre, cette directive prescrit aux autorités concernées d'"éviter les incidents regrettables", mention qui apparaît dans le contexte des "tourments et souffrances infligés aux populations des zones rurales...".
  1159. L'autre directive, no 82, se présente comme étant d'application plus étroite. Datée du 27 avril 1995 et adressée par le président du SLORC aux présidents du LORC de la division de Yangon et au ministère de l'Agriculture, elle enjoint ses destinataires de "mettre un terme à la pratique consistant à obtenir du travail de la population locale sans compensation financière" telle qu'elle a cours dans le cadre de la réalisation des barrages de la division de Yangon.
  1160. Ni l'une ni l'autre des directives n'abroge, de par sa teneur, l'une quelconque des dispositions de la loi de 1908 sur les villages ou de la loi de 1907 sur les villes autorisant le travail forcé et, assurément, ces deux directives servent à légitimer la pratique du travail forcé en permettant d'y recourir moyennant rémunération et en évitant les "incidents regrettables". Aucune de ces deux directives ne prévoit de sanctions en cas d'infraction à leurs dispositions. En outre, comme le constatait le Rapporteur spécial plusieurs mois après leur publication, elles n'ont "toujours pas été rendues publiques et ne sont donc pas accessibles à ceux auxquels elles s'appliqueraient ni à ceux qui protègent les droits des personnes accusées d'avoir enfreint la législation" (Note 1152).
  1161. 3. Les lois autorisant le travail forcé au Myanmar ne rentrent pas dans le champ d'application d'un instrument pénal réprimant l'imposition "illégale" d'un travail forcé ou obligatoire
  1162. Il se peut qu'un instrument pénal soit en vigueur au Myanmar, qui qualifie d'"illégal" le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire et punit ce fait comme un délit pénal. L'article 374 du code pénal dispose:
  1163. "374. Quiconque contraint illégalement toute personne à travailler contre sa volonté sera puni d'une peine d'emprisonnement (ou bien d'une peine dont la durée pourra atteindre un an, ou bien d'une amende, ou encore des deux peines)." (Note 1153).
  1164. Dans leur teneur, la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes peuvent être lues comme une autorisation légale de contraindre au travail, ce qui placent ces deux instruments hors du champ d'application de cet instrument pénal.
  1165. IV. CONCLUSIONS DE DROIT
  1166. A. La pratique du travail forcé au Myanmar constitue une infraction de ce pays à ses obligations internationales en vertu de la convention no 29
  1167. 1. Le recours au travail forcé par le Myanmar constitue une infraction à ses obligations en vertu de la convention no 29
  1168. Les faits démontrent qu'"un travail ou des services" sont exigés d'individus, au Myanmar, "sous la menace d'une peine", ce qu'interdit la convention no 29. On doit entendre par peine à la fois les sanctions prévues par la législation et celles qui sont infligées dans la réalité. Ce terme recouvre la menace réelle ou le fait lui-même de faire subir une perte pécuniaire, un préjudice individuel ou une souffrance physique, par décision administrative ou par décision judiciaire, ou par tout autre exercice d'un pouvoir officiel manifeste. La peine n'est pas limitée aux sanctions pénales, elle inclut toute perte de droits ou de privilèges (Note 1154). Ceci indique qu'une interprétation large et poussée est appropriée, de manière à mieux parvenir à l'objectif de la convention consistant à supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible (Note 1155).
  1169. Les pratiques susvisées ayant cours au Myanmar s'effectuent toutes "sous la menace d'une peine", au sens de la convention. Comme le gouvernement l'admet lui-même, les services de portage sont imposés en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, lesquelles prévoient des sanctions pénales en cas de non-prestation de ce travail ou de ces services, selon des modalités qu'elles définissent elles-mêmes (Note 1156). De plus, le travail ou les services autres que le portage sont imposés par la contrainte ou la menace de la contrainte, y compris en ce qui concerne les projets de développement, les projets touristiques, les prestations sexuelles et le travail pour des intérêts privés. Les faits prouvent que, pour l'essentiel, ce travail s'assortit d'une détention, de voies de fait, de tortures et autres atteintes physiques. Les services sexuels imposés aux femmes birmanes en l'espèce du viol sont obtenus par la contrainte ou la menace de la contrainte (Note 1157). En outre, un travail accompli dans des circonstances telles que la seule échappatoire à son accomplissement soit le paiement d'une amende ou bien d'une somme destinée à couvrir l'engagement d'un travailleur de remplacement s'accomplit sous la menace d'une peine.
  1170. Les faits prouvent en outre que, dans les cas d'espèce, les individus accomplissant le travail ou les services ne se sont pas offerts de leur plein gré. Sur un plan juridique, un travail obtenu par la contrainte juridique ne peut pas être considéré comme ayant été fourni de plein gré. Les prestations sexuelles imposées aux femmes birmanes par le fait du viol et qui a pour conséquence une perte, un préjudice et une souffrance physique n'est pas, ex hypothesi, assurée de leur plein gré par les personnes concernées. On ne peut pas considérer non plus que le travail accompli par des condamnés, ou par des enfants (en particulier l'exploitation la plus caractérisée du travail d'enfants) (Note 1158), soit accompli de leur plein gré par les intéressés.
  1171. Aucune rémunération perçue par les personnes accomplissant le travail ou les services en question ne peut être prise en considération pour trancher la question de savoir si le travail ou les services ont été accomplis par les intéressés de leur plein gré. Il appert que la convention prévoit que paiement et contrainte peuvent survenir simultanément. En définissant les garanties et conditions dont le recours au travail forcé devait s'entourer, dans le cadre du régime de transition désormais échu (Note 1159), la convention prévoit à son article 14 des taux et des modes de rémunération stricts en espèces, sauf dans le cas où le travail forcé ou obligatoire est demandé à titre d'impôt, dans les conditions spécifiées à l'article 10, désormais révolues (Note 1160).
  1172. Contrairement à ce qu'affirme le gouvernement du Myanmar, le travail n'est pas fourni à titre de contribution volontaire par la population, conformément aux traditions culturelles bouddhistes. Les faits démontrent que les individus sont contraints de travailler, sous la menace de peines, et qu'ils sont couramment réquisitionnés pour accomplir ce travail. Les faits prouvent également que les musulmans Rohingyas, les chrétiens Karen et les autres ethnies essentiellement non bouddhistes sont appelés à fournir du travail forcé (Note 1161). L'extension de la pratique coloniale par la junte militaire a altéré le tissu économique et social des villages, faisant ainsi violence aux traditions culturelles.
  1173. Le gouvernement du Myanmar a récemment déclaré devant la Commission de la Conférence que, étant parvenu à des cessez-le-feu avec 15 des 16 groupes insurrectionnels, désormais seuls des membres des forces armées seront utilisés dans le cadre des "grands projets de développement" (Note 1162). Or cette affirmation ne suffit aucunement à démontrer que la convention no 29 est respectée. Le qualificatif restrictif de "principaux" précédant l'expression "projets de développement collectif" implique que le travail forcé continuera d'avoir cours dans le cadre d'autres projets. En outre, les faits prouvent que, lorsqu'il s'agit de services pour l'armée, il est encore recouru au travail forcé de la population pour la construction de casernement de même que pour des services tels que le portage, l'approvisionnement en nourriture et les missions de messagerie (Note 1163). De plus, le Tatmadaw, qui doit conserver ses prérogatives militaires tout en recevant de nouvelles attributions en matière de développement (Note 1164), ne semble pas disposer des effectifs nécessaires pour assumer des tâches de l'ampleur apparemment requise par les projets de développement du SLORC; les chiffres disponibles permettent d'établir que, jusqu'à présent, plus de 800 000 personnes ont été soumises à du travail forcé (Note 1165). Enfin, la position du gouvernement n'offre aucune garantie durable du respect de la convention no 29 non plus que de l'exemption de la population du Myanmar du travail forcé. La législation et les directives autorisant le travail forcé restent en vigueur, et ceux qui tentent de s'y soustraire peuvent, à tout moment, être ramenés pour combattre ou assumer d'autres tâches.
  1174. Que la loi de 1908 sur les villages ou la loi de 1907 sur les villes soient expressément invoquées ou non, le seul fait qu'elles restent en vigueur permet difficilement de se persuader que toute contribution sous forme de travail est consentie, en fait, de plein gré (Note 1166). En fait, le comité constitué en vertu de l'article 24 a fait observer à cet égard que "l'absence de délimitation nette entre travail obligatoire et travail volontaire, qui apparaît tout au long des déclarations du gouvernement au comité, risque de marquer encore davantage le recrutement effectif par des responsables locaux ou militaires" (Note 1167). Les directives secrètes émises dans le courant de l'année 1995 (Note 1168) d'une manière implicite reconnaissent et continuent d'autoriser le travail forcé au Myanmar. Les statistiques économiques et les chiffres du budget publiés par le gouvernement du Myanmar lui-même attestent du rôle considérable et sans cesse croissant des "contributions de la population" dans ses plans de développement (Note 1169). En l'absence de tout élément convaincant permettant d'établir que les "contributions de la population" constituent effectivement un travail fourni de plein gré, ou convenablement rémunéré, ces chiffres doivent être considérés comme l'aveu que le travail forcé a cours au Myanmar sur une vaste échelle.
  1175. 2. Le Myanmar viole la convention no 29 par le fait qu'il n'a pas totalement supprimé le recours au travail forcé à des fins privées
  1176. Les faits prouvent que le Myanmar viole de manière flagrante son obligation immédiate d'éliminer complètement le travail forcé à des fins privées. Il impose du travail forcé à la population dans le cadre de sa mise en valeur, par entreprise à risques communs, les ressources pétrolières et de gaz naturel (Note 1170), et de ses projets de développement des infrastructures (routes et lignes de chemin de fer) (Note 1171) et de l'industrie du tourisme (Note 1172). D'autres éléments prouvent que des membres des forces armées recourent en toute impunité au travail forcé pour servir leurs intérêts commerciaux propres (Note 1173). Or si une forme de travail forcé ou obligatoire au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées existe, le Membre est tenu de supprimer "complètement" ledit travail forcé ou obligatoire dès la date de l'entrée en vigueur de la convention no 29 (Note 1174), et ne devra pas imposer ou laisser imposer un tel travail forcé ou obligatoire (Note 1175).
  1177. 3. Le fait que le Myanmar ne poursuive ni ne punisse dans la pratique ceux qui imposent le travail forcé constitue une violation, par ce pays, de ses obligations en vertu de la convention no 29
  1178. Aucun élément convaincant n'atteste de mesures décisives que le gouvernement du Myanmar aurait prises pour mettre un terme à la pratique du travail forcé. Les poursuites qui seraient engagées sur le fondement du Code pénal, en s'appuyant sur ses termes mêmes, ne pourraient s'étendre au travail forcé imposé en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes. L'émission de directives secrètes, quant à elle, a pour effet non pas de mettre un terme à cette pratique comme on le prétend, mais de légitimer celle-ci en traitant des conditions dans lesquelles un tel travail forcé peut être imposé (Note 1176). Aucun élément disponible n'atteste d'une tentative quelconque d'exercer des poursuites à l'encontre d'une personne ou d'un organisme coupable d'avoir imposé du travail forcé.
  1179. B. La législation du Myanmar n'est pas conforme à la convention no 29
  1180. 1. Le gouvernement du Myanmar enfreint ses obligations en vertu de la convention no 29 du fait qu'il n'a ni modifié ni abrogé sa législation permettant d'imposer le travail forcé
  1181. Le gouvernement du Myanmar a admis que la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes (Note 1177) "ne sont pas ... conformes aux dispositions de la convention de l'OIT" (Note 1178), et qu'il n'a toujours pas abrogé ou modifié ces instruments. Rien n'indique non plus que cette situation ait changé depuis que le gouvernement a fait une déclaration dans ce sens, dans le "Memorandum of Observations" adressé aux Nations Unies en mars 1996 (Note 1179).
  1182. Depuis 1967, le gouvernement du Myanmar déclare dans ses rapports dus au titre de l'article 22 de la Constitution de l'OIT que ces lois sont tombées en désuétude et doivent être abrogées. Plus récemment, cependant, le gouvernement indique qu'il s'appuie sur ces instruments pour autoriser au moins la pratique du portage (Note 1180). Ce faisant, il prétend s'appuyer sur une législation dont le BIT a condamné à de nombreuses reprises le caractère contraire aux obligations du Myanmar en vertu de la convention no 29 (Note 1181), et qui devrait être rendue conforme à cette convention no 29 et suivie de mesures propres "à garantir que l'abrogation formelle de la faculté d'imposer le travail obligatoire soit effectivement respectée dans la pratique et que ceux qui recourent au recrutement de main-d'oeuvre par la contrainte soient punis" (Note 1182).
  1183. 2. Le gouvernement du Myanmar ne respecte pas ses obligations au titre de la convention no 29 du fait qu'il ne respecte pas entièrement l'article 25
  1184. Le gouvernement du Myanmar n'a ni qualifié convenablement au pénal le recours au travail forcé ni prévu de sanctions adéquates à cet égard, comme le prévoit la convention. L'article 25 de cet instrument prescrit à tout Etat partie de rendre punissable, en tant que délit pénal, le recours au travail forcé, de prévoir des sanctions "réellement efficaces" et de veiller à ce qu'elles soient strictement appliquées. La commission d'experts a établi clairement que le respect de l'article 25 de la convention no 29 nécessite que la législation soit rendue publique (Note 1183), dans le cadre d'une démarche systématique (Note 1184), énonçant des objectifs clairs ainsi qu'une stratégie bien définie et s'inscrivant dans un cadre juridique exhaustif (Note 1185). La législation visée à l'article 25 de la convention doit s'appliquer à tous les secteurs de production économique et d'activité industrielle (Note 1186).
  1185. Les directives secrètes émises par le SLORC au cours de l'année 1995 (Note 1187) concernant le recours au travail obligatoire ne satisfont pas aux obligations découlant de l'article 25. De par leur teneur, ces directives secrètes ne qualifient pas de délit pénal l'imposition du portage ou de toute autre forme de travail forcé ou obligatoire, non plus qu'elles ne tendent à abroger la loi de 1908 sur les villages ou la loi de 1907 sur les villes. Elles tendent simplement à légitimer la pratique du travail forcé ou obligatoire en définissant les conditions dans lesquelles celui-ci peut être imposé. Aucune de ces conditions ne répond d'ailleurs aux exceptions prévues par la convention, sous son article 2 (Note 1188). La directive no 82 (Note 1189) ne concerne que l'irrigation et ne s'applique apparemment qu'à la division de Yangon. Enfin, ces directives secrètes ne prévoient aucune sanction en cas de non-respect de leurs dispositions et, de toute façon, se veulent secrètes, de sorte qu'il n'est pas concevable qu'elles soient portées à la connaissance de la population qu'elles sont réputées protéger.
  1186. L'article 347 du Code pénal, qui semble avoir été abrogé, ne satisfait pas non plus à l'article 25 de la convention no 29 du fait qu'il limite expressément le délit qu'il caractérise à la seule imposition illégale du travail forcé. De ce fait, les décisions prises en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes et, pour autant qu'on puisse l'établir, en application des récentes directives secrètes ou autres textes de cette nature, ne rentreraient pas dans le champ d'application de cet article.
  1187. C. Aucune des exceptions prévues à l'article 2 de la convention ne s'applique
  1188. Aucune des pratiques de travail forcé au Myanmar ne correspond à l'une des exceptions prévues à l'article 2 à l'interdiction générale du recours au travail forcé ou obligatoire qu'impose la convention. Cet article prévoit en effet cinq cas d'exceptions rigoureusement définis, discutés ci-après: a) le service militaire obligatoire; b) les obligations civiques normales des citoyens; c) le travail exigé en conséquence d'une condamnation prononcée par décision judiciaire; d) les cas de force majeure dans lesquels la population est en danger; et e) les menus travaux de village. En outre, le gouvernement prétend que ces pratiques relèvent de telles exceptions du fait que les travailleurs forcés sont -- ou ont le droit d'être -- rémunérés. Or, selon l'article 2 2) de la convention, qu'un travailleur forcé soit rémunéré ne fait aucune différence quant à déterminer si la pratique relève ou non de l'une des exceptions prévues (Note 1190).
  1189. 1. Les pratiques de travail forcé ne constituent pas un travail ou un service "exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux d'un caractère purement militaire" conformément à l'article 2 2) a)
  1190. La pratique du travail forcé au Myanmar ne correspond pas à l'exception prévue à l'article 2 2) a) concernant les "travaux d'un caractère purement militaire". Le gouvernement du Myanmar a toujours affirmé que le recrutement dans l'armée revêt un caractère absolument volontaire (Note 1191). Par conséquent, il paraît douteux qu'il s'agisse de "travaux d'un caractère purement militaire" au sens de cet article de la convention no 29, de sorte que "tout travail ou service exigé ... pour des travaux d'un caractère purement militaire" de la part de personnes qui ne se sont pas offertes volontairement ne rentre pas dans cette exception. Les civils contraints de servir de porteurs et accomplissant des tâches militaires en application de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, sous la menace ou par l'usage de la force, sont ipso facto des non-volontaires (Note 1192).
  1191. 2. Le travail forcé ou obligatoire au Myanmar ne rentre pas dans les obligations civiques normales des citoyens, au sens de l'article 2 2) b) de la convention
  1192. Le travail forcé au Myanmar ne saurait être assimilé à l'exception prévue à l'article 2 2) b) relative aux "obligations civiques normales des citoyens". Cette exception vise des aspects tels que l'obligation de siéger dans un jury, le devoir d'assister une personne en danger ou d'aider à assurer le respect de la loi et de l'ordre public (Note 1193). La nature et l'extension du travail forcé ou obligatoire au Myanmar n'ont absolument rien à voir avec de telles exceptions, compte tenu des efforts individuels, des dangers, des préjudices et autres atteintes qu'implique le travail forcé au Myanmar (Note 1194).
  1193. 3. Le travail imposé aux prisonniers ne satisfait pas aux strictes prescriptions de l'article 2 2) c)
  1194. Le travail forcé des prisonniers au Myanmar ne satisfait pas aux prescriptions strictes de l'article 2 2) c). Selon cet article, le travail imposé aux prisonniers en conséquence de leur condamnation ne peut être concédé ou mis à disposition de particuliers sans le libre consentement du prisonnier lui-même (Note 1195). Cet article prévoit en outre que ce travail résulte d'une "condamnation prononcée par décision judiciaire" et vise "à ne permettre l'imposition du travail pénitentiaire que sous réserve de l'observation des garanties prescrites par les principes généraux du droit reconnu par la communauté des nations, tels que la présomption d'innocence, l'égalité devant la loi, la régularité et l'impartialité de la procédure, l'indépendance et l'impartialité des tribunaux, les garanties nécessaires à la défense, la non-rétroactivité et la spécialité de la loi pénale" (Note 1196).
  1195. Des informations confirmées montrent que les procédures de condamnation pénale au Myanmar sont loin de satisfaire aux normes admises en la matière, tant en ce qui concerne les tribunaux militaires que les tribunaux "civils" institués par l'administration du SLORC (Note 1197). Dans bien des cas, les condamnations sont prononcées à l'issue de procédures sommaires ou de procès qui sont loin de satisfaire aux normes internationalement reconnues de respect des procédures, notamment de la présomption d'innocence, du droit de l'accusé à la défense et aux autres garanties nécessaires à une défense adéquate (Note 1198). Dans certains cas, les condamnations sont prononcées sans même qu'il y ait un procès (Note 1199). Les personnes condamnées par des tribunaux militaires ou par des tribunaux civils de ce type ne peuvent être considérées comme étant sous le coup d'une "condamnation prononcée par une décision judiciaire" au sens de l'article 2 2) c), et toute imposition de travail forcé à ces personnes ne répond pas aux prescriptions de cette exception.
  1196. En outre, aucun élément ne démontre qu'un prisonnier travaillant dans un camp de travail au Myanmar ait le choix de travailler ou non, sans considération de l'entité pour laquelle ce travail est effectué. De plus, le travail accompli dans le cadre de projets d'infrastructure en rapport avec des investissements privés, comme le gazoduc de Yadana, ne peut être admis comme une exception prévue dans ces circonstances.
  1197. 4. Il n'existe pas de force majeure, au sens de l'article 2 2) d), qui permettrait le recours au travail forcé et obligatoire tel qu'il se pratique actuellement au Myanmar
  1198. Les circonstances dans le cadre desquelles le travail se pratique au Myanmar ne satisfont pas au critère d'exception visé à l'article 2 2) d). Dans cet article, la notion de force majeure implique "un événement soudain et imprévu qui appelle une intervention immédiate" (Note 1200), "mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population". Il n'existe pas, non plus qu'il n'a existé, au Myanmar, une telle force majeure rentrant dans le cadre de l'article 2 2) d). La nature des insurrections armées n'est pas "soudaine" ni "imprévue", mais plutôt la conséquence d'une guerre civile qui perdure depuis plus de 40 ans. Les insurrections en soi n'ont pas pour conséquence de mettre en danger la population elle-même, mais plutôt de menacer l'emprise politique de la junte dans les zones de conflit (Note 1201).
  1199. Même si l'on admettait que la nature des conflits armés dans les régions périphériques rentre dans les termes de l'article 2 2) d), il n'en resterait pas moins que le travail forcé et obligatoire tel qu'il se pratique au Myanmar n'est pas conforme aux conditions prévues par cet article. Cet article prévoit en effet que ce travail doit se limiter à "ce qui est strictement nécessaire" pour faire face aux événements et pendant la seule durée de ceux-ci (Note 1202). Or, bien au contraire, le caractère généralisé et systématique du travail forcé ou obligatoire au Myanmar est sans commune mesure avec les insurrections, et il dure depuis des décennies. De plus, le travail forcé au Myanmar va bien au-delà de ce que les circonstances rendraient strictement nécessaire. Par exemple, les travaux d'infrastructure et de développement du tourisme n'ont rien à voir avec un état d'urgence répondant à une insurrection armée, non plus que les prestations sexuelles imposées par le fait du viol n'ont de rapport avec une réaction admissible en cas de guerre.
  1200. 5. Le travail forcé ou obligatoire au Myanmar excède largement la notion de "menus travaux de village" visés à l'article 2 2) e)
  1201. Le travail forcé et obligatoire au Myanmar ne correspond pas non plus à ce que vise l'article 2 2) e). En effet, comme cet article le prévoit, les menus travaux de village doivent effectivement être "menus" et consister, par exemple, en travaux d'entretien ou en construction d'écoles, et servir les intérêts directs de la collectivité qui les accomplit et non une entité plus vaste; Ils doivent être entrepris après consultation de cette collectivité ou de ses représentants sur le bien-fondé de ces travaux (Note 1203). Au Myanmar, par contre, ces travaux sont généralement de grande envergure plutôt que mineurs. Il s'agit de chantiers de construction de routes, de berges et de barrages, étalés sur des jours et parfois des semaines entières. Le travail forcé s'effectue généralement pour le compte d'entités autres que le public, c'est-à-dire l'armée ou les intérêts privés. Lorsque ce travail a des objectifs d'intérêts publics, comme le développement d'infrastructures, les avantages pour la communauté locale en sont diffus et, au mieux, hypothétiques, du fait que les retombées concernent une collectivité beaucoup plus vaste que celle qui accomplit les travaux (Note 1204). Le fait est que la commission d'experts n'a pas voulu admettre que des ouvrages d'une envergure telle que la réalisation de lignes de chemin de fer se conçoivent comme satisfaisant aux critères de cet article (Note 1205). Ni les membres de la collectivité concernée ni ses représentants ne sont consultés sur le bien-fondé des travaux en question. Bien au contraire, les faits démontrent que lorsque les représentants de la collectivité entrent en jeu, il s'agit, pour des chefs de village, de réquisitionner sur ordre des membres de cette collectivité pour le travail, les personnes concernées étant littéralement forcées de travailler puisqu'elles sont capturées et enlevées à leur milieu pour être soumises au travail.
  1202. D. La notion de période de transition n'est pas applicable en l'espèce et, quand bien même elle le serait, le gouvernement du Myanmar ne pourrait prétendre respecter les garanties dont une telle période doit être assortie
  1203. 1. Le BIT a constaté que la notion de période transitoire ne saurait être invoquée pour exonérer le gouvernement du Myanmar de son obligation, en vertu de la convention no 29, d'éliminer le travail forcé sous toutes ses formes
  1204. Il a été établi par le comité constitué en vertu de l'article 24 de la Constitution qu'il n'était pas question dans ce cas, de période transitoire (Note 1206). Si la commission d'enquête est libre de procéder de novo à ses propres constats des faits et du droit, les conclusions du comité constitué en vertu de l'article 24 devraient acquérir un poids considérable et être suivies (Note 1207).
  1205. 2. La notion de période transitoire ne s'applique dans le cas du Myanmar ni en fait ni en droit
  1206. Les quarante années écoulées depuis la ratification de la convention no 29 par le Myanmar, en 1955 (Note 1208), constituent un délai plus que suffisant pour procéder aux modifications de législation et aux changements de pratiques qui peuvent être nécessaires au cours d'une période de transition. La brièveté de la période de transition, telle que l'entend la convention, ressort de l'obligation de supprimer immédiatement certaines formes de travail forcé ainsi que des conditions et limitations strictes s'appliquant à toute forme de travail forcé imposée au cours d'une telle période de transition; elle ressort également des termes eux-mêmes (Note 1209) de la convention no 29, qui prévoient, à l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de son entrée en vigueur, que soit examinée la possibilité de supprimer sans nouveau délai le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes.
  1207. La notion de période transitoire, ainsi que les garanties entourant les conditions dans lesquelles le travail forcé ou obligatoire pourra encore être employé pendant cette période transitoire (Note 1210) "visait particulièrement certaines pratiques coloniales" (Note 1211). D'ores et déjà, en 1968, "ceux des pays liés par la convention qui sont toujours à même d'invoquer les dispositions transitoires de l'instrument sont relativement peu nombreux" (Note 1212). En 1979, il était rare que les dispositions transitoires soient invoquées "pour justifier le maintien de contraintes au travail" (Note 1213). La loi 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes sont des lois coloniales qui n'ont jamais été abolies après l'accession de la Birmanie à l'indépendance. La jurisprudence et les études d'ensemble de la commission d'experts étayent l'avis selon lequel ces lois ne sont pas conformes à la conception ou à l'interprétation de la convention no 29 par la majorité des Etats qui l'ont ratifiée.
  1208. 3. Le Myanmar est lié par sa déclaration à l'effet qu'il ne s'applique pas de période transitoire
  1209. Le gouvernement du Myanmar a, devant le comité constitué en vertu de l'article 24, pris pour position que la période transitoire ne s'applique pas (Note 1214). Cette position peut être considérée comme une déclaration créant une obligation qui s'y attache. Dans l'affaire des essais nucléaires, la Cour internationale de justice a considéré qu'une déclaration concernant une situation de droit ou de fait, en l'espèce d'un acte unilatéral d'un Etat, peut créer des obligations qui sont contraignantes à l'égard de cet Etat vis-à-vis de la communauté internationale erga omnes, sans qu'il soit nécessaire qu'aucun autre Etat n'ait accepté cet acte (Note 1215). Qu'un tel acte ait, ou non, cet effet, dépend des circonstances dans lesquelles il survient ainsi que de l'intention de l'auteur de la déclaration. Dans l'affaire dont la Cour internationale de justice a été saisie, la déclaration unilatérale par la France de ne plus procéder à des essais atmosphériques, prononcée non loin de la Cour internationale de justice et dans des circonstances litigieuses, a donné naissance à l'obligation de se tenir à cette déclaration: le gouvernement français devait forcément supposer que les autres Etats prendraient note de cette déclaration et s'attendraient à ce qu'elle soit suivie d'effet (Note 1216). En appréciant l'intention de l'Etat qui fait la déclaration, une interprétation restrictive s'impose lorsque le contenu de cette déclaration tend à limiter la liberté d'action future de cet Etat (Note 1217). De plus, il est plus vraisemblable qu'un Etat souhaite se lier par une déclaration lorsqu'il ne peut se lier par le moyen ordinaire d'un accord formel (Note 1218).
  1210. Dans le cas d'espèce, on peut considérer que le gouvernement du Myanmar est lié par ses actes unilatéraux de confirmation de l'application de la convention no 29, dont les autres Etats ont pris note. Le gouvernement n'a pas invoqué la période transitoire comme justification de la pratique du portage forcé, objet de la réclamation présentée par la CISL sur le fondement de l'article 24 de la Constitution de l'OIT. Subséquemment, le comité constitué en vertu de l'article 24 (Note 1219) a établi qu'il n'est plus question de périodes transitoires en ce qui concerne le Myanmar. Ceci est conforme à la position prise par le gouvernement du Myanmar dans les rapports qu'il fournit à la commission d'experts en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT à propos des obligations que lui prescrit la convention no 29 depuis l'année 1967 (Note 1220). Ces actes du gouvernement du Myanmar sont des actes unilatéraux, ayant pour effet de limiter, pour l'avenir, sa liberté par rapport à la convention no 29; ils concernent une question qui ne se prêterait pas à un accord formel avec un autre Etat ou un groupe d'Etats. En conséquence, le Myanmar, ayant fait une déclaration devant la communauté internationale, à travers sa réponse au comité constitué en vertu de l'article 24, peut désormais être tenu comptable de cette déclaration par la communauté internationale à travers le BIT.
  1211. 4. En tout état de cause, aucune des conditions ou garanties prescrites dans le cadre d'une période transitoire n'est satisfaite par le Myanmar
  1212. Les faits sur lesquels cette affaire repose prouve que, même si une période transitoire avait cours, les pratiques de travail forcé au Myanmar ne satisfont pas aux conditions et garanties prescrites par la convention. L'article 1 2) prévoit que, pendant la période transitoire, il peut être recouru au travail obligatoire uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties stipulées aux articles qui suivent (Note 1221). La pratique du travail forcé au Myanmar fait violence aux principes fondamentaux de l'article 1 2): les faits prouvent que le travail forcé est imposé au profit de particuliers, de compagnies et de personnes morales privées (Note 1222); que le travail forcé est pratiqué de manière extensive et systématique et rentre en fait dans les aspects budgétaires du programme de développement du gouvernement; que le recours au travail forcé ne se limite aucunement à une mesure exceptionnelle (Note 1223). En outre, aucune des conditions et garanties énoncées subséquemment n'est satisfaite.
  1213. Articles 8, 23 et 24 de la convention (Note 1224). En tant qu'administration militaire, le SLORC et ses délégations locales ne satisfont pas à la définition prescrite des "autorités civiles supérieures". Parmi les textes promulgués concernant l'utilisation du travail forcé, ceux qui sont accessibles publiquement, comme la loi sur les villages, la loi sur les villes et les directives "secrètes" révélées, ne prévoient aucun moyen de réclamation pour les personnes assujetties au travail forcé et n'expriment non plus aucune garantie que de telles réclamations seraient prises en considération (Note 1225). En outre, aucun élément n'atteste d'une volonté de faire respecter les normes régissant les conditions dans lesquelles le travail forcé est imposé.
  1214. Article 9 de la convention (Note 1226). Aucun élément ne permet de penser qu'une autorité, civile ou autre, n'ait pris les assurances ou n'ait eu pour mission de prendre les assurances visées dans la partie préliminaire de cet article avant que le travail forcé ne soit imposé. En réalité, les faits prouvent que le travail forcé a été imposé dans des circonstances contraires. Le travail effectué n'est pas "d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter". Plutôt, le travail forcé imposé à la population (routes, lignes de chemin de fer) sert des intérêts publics très généraux; ou bien des intérêts purement personnels (prestations sexuelles) ou encore les intérêts de personnes morales privées (exploitation du gaz naturel et du pétrole en entreprise à risque commun, projets touristiques); il sert enfin à l'armée, pour ses opérations propres de lutte contre l'insurrection ou pour ses intérêts commerciaux privés (Note 1227). Aucune des formes de travail forcé imposée à la population du Myanmar ne répond à une nécessité imminente (Note 1228). Aucun élément ne prouve que le SLORC ou le Tatmadaw, que ce soit l'un ou l'autre, n'ait jamais cherché à se procurer une main-d'oeuvre volontaire pour l'accomplissement des tâches qu'ils ont fait assurer par travail forcé, et rien n'atteste non plus qu'il y ait eu rémunération. Les travaux et services imposés constituent injustement un lourd fardeau pour la population du Myanmar. Des droits sont exigés de personnes pauvres pour éviter le travail forcé; des agriculteurs et des pêcheurs sont contraints de laisser leur métier pendant de longues périodes, ce qui perturbe les cycles de semailles et de récoltes et désorganise la vie de la famille tandis que ses membres en sont éloignés pour accomplir ce travail. Les enfants n'ont plus ni éducation ni enfance. En ce qui concerne les viols, le préjudice physique et psychologique, de même que le préjudice social, est incommensurable (Note 1229).
  1215. Article 10 de la convention (Note 1230). Du fait que, pour échapper au travail forcé, la population doit payer des redevances, on peut considérer que le travail forcé est imposé à titre d'impôt, en violation de l'article 10 2). Comme les stipulations de l'article 10 2) a)-c) sont identiques à celles de l'article 9 a)-c), les arguments développés à propos de l'un sont valables pour l'autre. De nombreux travailleurs sont contraints de se déplacer sur de longues distances pour se rendre à des camps de travail ou bien pour faire du portage. Aucune concession n'est faite, non plus, quant aux exigences de la religion, de la vie sociale et de l'agriculture.
  1216. Article 11 (Note 1231). Les faits prouvent que l'article 11 1) est régulièrement enfreint (Note 1232). Beaucoup d'enfants, de femmes et de personnes âgées sont réquisitionnés dans le cadre de chantiers ou pour le portage. A l'évidence, il n'est procédé à aucun examen médical préalable; aucune catégorie n'est exemptée, non plus qu'il n'est veillé à maintenir un certain nombre d'adultes valides dans la collectivité, ni au respect des liens conjugaux et familiaux.
  1217. Article 12 (Note 1233). Les faits démontrent que, loin de chercher à réglementer la durée pour laquelle les personnes sont assujetties au travail forcé, c'est plutôt le contraire (Note 1234). Selon des informations fiables, dans certaines régions, la population est soumise au travail forcé deux semaines par mois. De nombreuses personnes sont assujetties de manière répétée au travail forcé bien qu'elles aient acquitté leur taxe de portage et satisfait aux autres exigences. Assurément, aucune attestation de service n'est délivrée, et il n'apparaît pas non plus que l'on s'efforce de répartir le fardeau que constitue le travail forcé.
  1218. Articles 13 et 14 (Note 1235). Les faits prouvent que la pratique du travail forcé au Myanmar constitue une violation régulière des articles 13 et 14 de la convention. Le nombre d'heures exigé est excessif, la rémunération est minime quand elle n'est pas inexistante, de même que les périodes de repos.
  1219. Article 15 (Note 1236). Alors que le gouvernement du Myanmar a affirmé périodiquement que la législation concernant l'indemnisation des travailleurs s'applique au travail fourni par la population "à titre de contribution" (Note 1237), des informations fiables et corroborées par des sources indépendantes, de même que des constats de médecine légale et d'autres preuves matérielles prouvent que les personnes assujetties sont abandonnées à la mort à la suite de lésions subies au cours du travail, qu'il n'y a pas d'assistance en cas de maladie et que les coups, les viols et les exécutions sommaires sont monnaie courante (Note 1238).
  1220. Article 16 (Note 1239). Contrairement aux dispositions de l'article 16, il est accordé bien peu d'importance au maintien de la population assujettie au travail forcé dans la zone de résidence habituelle, et encore bien moins à une acclimatation progressive à d'autres régions.
  1221. Article 17 (Note 1240). Comme nous l'avons vu ci-dessus, il n'est prévu aucun contrôle médical préalable non plus qu'une couverture médicale pendant les travaux; dans la plupart des cas, les travailleurs se déplacent à leurs propres frais et doivent faire face eux -mêmes aux conséquences de toute lésion subie en cours d'emploi. Rien n'est fait non plus pour assurer la subsistance des autres membres de la famille des travailleurs.
  1222. Article 18 (Note 1241). La pratique du portage forcé au Myanmar constitue l'une des violations les plus flagrantes des obligations prescrites par la convention no 29. Le portage est accompli sans aucun égard pour la santé ou le bien-être des travailleurs qui y sont assujettis, non plus que pour la collectivité d'origine de ces porteurs; aucune des autres sauvegardes prévues par l'article 18 n'est observée non plus (Note 1242).
  1223. V. CONCLUSIONS
  1224. Sur la base des constatations de faits et des arguments de droit développés ci-avant, les plaignants considèrent que:
  1225. 1. Les faits démontrent amplement que le travail forcé au Myanmar est très étendu, prévu par la législation et pratiqué sans aucune perspective de prévention ou de répression à l'égard de ceux qui imposent du travail forcé aux citoyens du Myanmar. Le gouvernement du Myanmar viole donc de manière flagrante la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930.
  1226. 2. Les multiples constatations antérieures faites par les différents organes du mécanisme de contrôle de l'OIT n'ont pas amené d'amélioration quant au respect de la convention. La question du non-respect, par le gouvernement du Myanmar, de ses obligations au titre de la convention no 29 a été abondamment discutée par la commission d'experts, la Commission de la Conférence ainsi que le Comité constitué pour examiner la réclamation présentée en vertu de l'article 29 de la Constitution de l'OIT. En dépit des avis exprimés par ces organes, le gouvernement du Myanmar persiste à entretenir la confusion entre travail forcé et travail volontaire et à ne pas éliminer les graves lacunes qui ont été constatées dans sa législation et dans sa pratique.
  1227. 3. Compte tenu de ces éléments, les plaignants considèrent que la constitution d'une commission d'enquête est appropriée et justifiée.
  1228. 4. Les plaignants considèrent que la sécurité des personnes témoignant devant la commission d'enquête est de la plus haute importance. Il doit donc être veillé à ce que toute personne témoignant de sa propre initiative ou à la demande de l'une quelconque des parties soit protégée contre toute atteinte, représailles ou discrimination à raison de ses déclarations devant la commission d'enquête. Les mêmes sauvegardes doivent être prévues en ce qui concerne les familles et les proches des témoins.
  1229. 5. Les plaignants expriment l'espoir que, dans le cadre de toute audition ou visite sur les lieux, la commission d'enquête aura accès sans obstacle et de manière confidentielle aux témoins, pourra garantir leur anonymat lorsque cela sera nécessaire et garantir le caractère privé et confidentiel de toute audition de témoins ou de toute communication avec ceux-ci. Pour toutes les activités que la commission d'enquête mènera au Myanmar même, les sauvegardes consisteront à obtenir et contrôler que le gouvernement du Myanmar veille à ce que des assurances crédibles soient données par les niveaux élevés ou locaux de commandement quant à l'abstention de toutes représailles à l'égard des témoins.
  1230. 6. Les plaignants demandent que la commission d'enquête considère, en tant que de besoin, la nécessité que le gouvernement prenne des mesures correctrices immédiates et, à cette fin:
  1231. i) abroge ou modifie immédiatement la loi de 1908 sur les villages et la loi de 1907 sur les villes;
  1232. ii) applique immédiatement des dispositions pénales contre toutes les pratiques de travail forcé contraires à la convention no 29;
  1233. iii) procède avec diligence aux enquêtes et poursuites pénales conformément aux normes internationalement reconnues à l'encontre de quiconque, membres de l'armée compris, recourt au travail forcé en violation de la convention no 29, notamment en ce qui concerne tous les délits mis au jour au cours de l'enquête de l'OIT;
  1234. iv) prévoit une réparation adéquate à l'égard des villages et des familles ayant subi des pertes en vies humaines et d'autres préjudices sur le plan de la santé, de la propriété et de l'activité économique au cours de l'imposition du travail forcé;
  1235. v) applique une législation ou une réglementation permettant que les plaintes de personnes alléguant un assujettissement au travail forcé puissent être formulées, examinées et traitées par les autorités compétentes.
  1236. Annexe II
  1237. Observations du gouvernement du Myanmar sur la plainte initiale et les moyens de preuve supplémentaires présentés par 25 délégués travailleurs à la 83e session de la Conférence internationale du Travail au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT
  1238. Première partie. Introduction
  1239. 1. Un groupe de 25 délégués de travailleurs à la 83e session de la Conférence internationale du Travail, tenue en juin 1966, a présenté une plainte contre le gouvernement de l'Union du Myanmar au titre de l'article 26 de la Constitution de l'OIT alléguant le non-respect des dispositions de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930; les plaignants se sont réservés le droit de fournir des informations et moyens de preuve supplémentaires à ce sujet.
  1240. 2. Le gouvernement de l'Union du Myanmar a donc fourni une réponse immédiate en octobre 1996 au Directeur général du BIT sur les mesures concrètes prises par le gouvernement du Myanmar pour abolir le recours au travail forcé en tant que geste de réponse à la plainte susmentionnée.
  1241. 3. Néanmoins, les délégués travailleurs ont à nouveau soumis des moyens de preuve supplémentaires le 31 octobre 1996 au Directeur général à l'appui de leur plainte initiale, à l'attention de la prochaine session du Conseil d'administration en mars 1997.
  1242. 4. En conséquence, l'information a été transmise au gouvernement du Myanmar par le directeur du Département des normes internationales du travail au nom du Directeur général du Bureau international du Travail, de sorte que les autorités du Myanmar puissent formuler les observations nécessaires sur les allégations des plaignants.
  1243. 5. Le gouvernement du Myanmar souhaite donc fournir une réponse détaillée et les informations portant sur les conclusions et allégations des délégués travailleurs.
  1244. Les initiatives du gouvernement en faveur d'une nation paisible, moderne et développée
  1245. 6. Avant de répondre aux allégations, les autorités du Myanmar souhaitent attirer l'attention sur les efforts sincères accomplis par le gouvernement pour maintenir l'intégrité et la souveraineté nationale et assurer l'intérêt national à long terme.
  1246. 7. Le Myanmar a subi en peu de temps des revers affreux dans la vie politique, économique et sociale de la nation, avant que le gouvernement présent ait assumé la responsabilité de l'Etat en 1988. Il est indéniable que le gouvernement du Conseil pour le rétablissement de la loi et de l'ordre de l'Etat a sauvé la nation qui était au bord de la désintégration.
  1247. 8. Depuis lors, des mesures systématiques et prudentes ont été prises pour diriger la nation de manière à éviter des conséquences indésirables et néfastes. Le gouvernement a atteint son objectif avec succès par la restauration de la loi et de l'ordre à travers le pays.
  1248. 9. Il est à souligner que c'est le gouvernement actuel qui a ouvert le pays politiquement et économiquement. Une économie de marché a été adoptée à la place d'un système socialiste à planification centrale. Des mesures concrètes sont prises pour mettre en place un système de démocratie basé sur le pluralisme des partis. Grâce aux efforts du gouvernement, le système d'économie de marché a maintenant commencé à fleurir au Myanmar et, en conséquence, il a attiré de plus en plus d'investissements étrangers.
  1249. 10. Conscient de la nécessité d'une nouvelle Constitution durable qui assurera le développement d'un système à partis multiples véritablement démocratique, le Conseil pour le rétablissement de la loi et de l'ordre de l'Etat a créé une commission pour la convocation d'une convention nationale. Une convention nationale est tenue afin d'établir les principes de base pour la rédaction d'une nouvelle Constitution de l'Etat avec le consensus des délégués participants représentant tous les milieux de la société, différentes nationalités de l'Union et différents groupes ethniques minoritaires.
  1250. 11. Avec l'introduction d'une nouvelle Constitution de l'Etat, le système politique et administratif prendra une nouvelle forme dans le cadre du système de démocratie à pluralisme de partis dans un proche avenir. En d'autres termes, le gouvernement actuel est en train de poser concrètement des fondations solides pour un nouveau gouvernement démocratique qui gouvernera le Myanmar aux termes de la nouvelle Constitution de l'Etat.
  1251. 12. Malheureusement, les mesures sincères prises par le gouvernement pour le maintien de la loi et de l'ordre ont été présentées dans certains milieux comme des actes de répression. De même, les efforts tendant à un développement complet de la nation ont été soumis à un regard cynique. Il faut garder à l'esprit que c'est le gouvernement actuel qui a ouvert le pays économiquement et, dans une large mesure, politiquement.
  1252. 13. En outre, il est indéniable que les efforts incessants du gouvernement ont abouti à la paix et à la stabilité qui règnent à travers le pays. La reconsolidation nationale a été rétablie à la suite de négociations, de la confiance mutuelle et de la compréhension entre les frères nationaux. Il s'agit là d'accomplissements significatifs dans nos efforts pour établir la paix et l'unité nationale qui conduiront à la rédaction d'une nouvelle Constitution de l'Etat.
  1253. 14. Depuis que le gouvernement actuel est en place, les dirigeants ont pris toutes les mesures nécessaires pour construire le Myanmar comme une nation paisible, moderne et développée. Pour atteindre ce but, des objectifs clairs, politiques, économiques et sociaux ont été définis qui doivent être respectés par tous les milieux de la société.
  1254. Les quatre objectifs politiques sont:
  1255. -- stabilité de l'Etat, paix et tranquillité de la communauté, règne de la loi et de l'ordre;
  1256. -- reconsolidation nationale;
  1257. -- introduction d'une nouvelle Constitution de l'Etat durable;
  1258. -- construction d'une nouvelle nation moderne développée en conformité avec la nouvelle Constitution de l'Etat.
  1259. Les quatre objectifs économiques sont:
  1260. -- le développement de l'agriculture en tant que base, de même le développement complet des autres secteurs de l'économie;
  1261. -- l'évolution correcte du système économique de marché;
  1262. -- le développement de l'économie, en invitant la participation du point de vue du savoir-faire technique et des investissements de source à l'intérieur du pays et de l'étranger;
  1263. -- l'initiative pour donner la forme à l'économie nationale doit rester entre les mains de l'Etat et des peuples de la nation.
  1264. Les quatre objectifs sociaux sont:
  1265. -- l'élévation du moral et de la moralité de la nation entière;
  1266. -- l'élévation du prestige et de l'intégrité nationale et la préservation et protection de l'héritage culturel et du caractère national;
  1267. -- l'élévation du dynamisme de l'esprit patriotique;
  1268. -- l'élévation des normes de santé, d'aptitude physique et d'éducation de la nation entière.
  1269. Construction d'infrastructure dans toute la nation
  1270. 15. Pour entreprendre effectivement les tâches d'assurer la stabilité de l'Etat, le règne de la loi et de l'ordre, de même que la paix et la tranquillité de l'Etat, et pour forger la reconsolidation nationale, les transports dans le pays doivent être souples, rapides et sûrs. Cela va aussi faciliter et accélérer le commerce et les transports publics. Il s'agit en fait d'une composante cruciale dans les efforts pour construire la nation.
  1271. 16. Pour répondre à ce besoin, des chemins de fer et des routes carrossables sont construits dans tout le pays. Ces travaux de développement visent non seulement le développement régional, mais également le développement complet de la nation. La vie économique et sociale des communautés ne peut être améliorée que lorsque des services de transport efficaces existent.
  1272. 17. Aujourd'hui, 12 Etats et divisions ont été reliés par chemins de fer. En tout, 544,79 miles de chemin de fer ont été construits durant la période du gouvernement du Conseil pour le rétablissement de la loi et de l'ordre de l'Etat. Grâce à ces nouveaux chemins de fer, les conditions économiques et sociales d'éducation et de santé des habitants des régions en cause, qui sont en retard de plusieurs décennies dans leur développement, bénéficient actuellement d'améliorations sans précédent. Ces liens de transport et de communication se sont créés par les efforts collectifs de l'Etat, du peuple et des membres des forces armées du Myanmar (hommes du Tatmadaw). Les personnes vivant dans les Etats et les divisions bénéficient aujourd'hui des fruits de ces efforts collectifs. Il est assez évident que ces lignes de chemin de fer servent les intérêts de la population locale. Il y a des régions telles que Zeebya dans la municipalité de Pakokku, où les déplacements autres qu'à pied sont impossibles durant la saison des pluies qui dure cinq mois, et qui, maintenant, peuvent être parcourus en train tout au long de l'année. De même, la plupart des sections entre Kalimyo et Gangaw, qui restent isolées durant la saison des pluies en raison d'inondations et de boue bourbeuse, sont maintenant accessibles par train tout au long de l'année. En outre, les gens peuvent maintenant bénéficier de l'avantage de dépenser moins pour voyager par train, étant donné que le coût du trajet est bien inférieur à celui du trajet en bus.
  1273. 18. Il s'agit là d'exemples éloquents de l'importance de la participation active du peuple pour une nation en voie de formation. De la construction de routes, de systèmes d'irrigation, d'écoles, d'hôpitaux, de marchés, de parcs et d'autres, jusqu'à la construction de nouvelles villes et toutes les sphères du bâtiment, les gens au travail et les membres des forces armées du Myanmar ont peiné avec vigueur et enthousiasme non seulement pour le bénéfice d'une communauté au sens strict, mais pour le bénéfice de la nation entière.
  1274. Une nation possède ses propres caractéristiques significatives
  1275. 19. Toute nation a ses propres caractéristiques de signification et éthique spéciales. Les traditions et moeurs d'un pays peuvent être totalement différentes d'un autre pays. Chaque pays a son propre arrière-plan historique et des conditions différentes. Ces différences viennent en grande mesure de l'histoire, de la géographie, du climat et de l'environnement, etc. Il est naturel que ces caractéristiques jouent un rôle dominant en influençant l'élaboration de politiques et l'adoption d'objectifs nationaux qui doivent être atteints. Il est donc nécessaire de comprendre et connaître l'histoire, la culture et les traditions qui sont à la base, de même que les conditions objectives et l'attitude du peuple du pays concerné. Le cas du Myanmar n'est pas une exception. En fait, les observations qui précèdent s'appliquent particulièrement au Myanmar.
  1276. Deuxième partie. Réfutation des allégations
  1277. 20. Ayant exposé l'arrière-plan et la situation de fait au Myanmar, les autorités désirent maintenant se tourner vers les allégations présentées par les délégués travailleurs et, ce faisant, les autorités du Myanmar souhaitent grouper cette réfutation sous trois titres principaux: fins publiques (ou) secteur public; bénéfice privé (ou) secteur privé et la loi.
  1278. A. Fins publiques (ou) secteur public
  1279. a) Portage
  1280. -- Depuis qu'il a retrouvé son indépendance politique en 1948, le Myanmar s'est vu confronter à des mouvements insurrectionnels animés de vues politiques différentes, allant des communistes à d'autres groupes minoritaires ethniques différents.
  1281. -- Depuis lors, des gouvernements successifs du Myanmar ont eu à faire à ces groupes insurrectionnels. A un moment donné, il y avait 16 groupes armés qui exerçaient la terreur contre la population civile, de même que le gouvernement central. Heureusement, à l'heure actuelle, 15 sur 16 groupes armés sont revenus à la légalité et prennent part au développement économique et social du pays dans son ensemble, de même que dans leurs régions respectives.
  1282. -- Il est donc vrai que, dans certaines circonstances, les forces armées du Myanmar devaient employer des porteurs pour le transport de fournitures et de l'équipement sur du terrain difficile vers des endroits éloignés et des montagnes proches de la frontière où les campagnes militaires ont été menées contre les groupes armés. Toutefois, il n'est pas vrai que les porteurs employés étaient traités brutalement et inhumainement par les forces armées du Myanmar.
  1283. -- Il convient de souligner que le recrutement de ces porteurs était basé sur certains critères parmi lesquels figurent les suivants:
  1284. a) il doit s'agir de main-d'oeuvre occasionnelle au chômage;
  1285. b) ils doivent être physiquement aptes au travail en tant que porteurs;
  1286. c) un salaire raisonnable doit être fixé et agréé avant le recrutement.
  1287. -- Il convient également de souligner ici que ces porteurs n'ont jamais été appelés à accompagner les troupes sur le champ de bataille et qu'ils ne sont jamais exposés à des dangers.
  1288. -- Dans l'éventualité malheureuse de la perte d'un membre sans rapport avec un conflit armé, eux-mêmes ou leurs familles sont équitablement compensés en conformité avec la loi en vigueur.
  1289. -- Les autorités souhaitent souligner qu'à aucun moment il n'y a eu de recrutement de femmes, d'enfants et de personnes âgées en tant que porteurs.
  1290. -- Les forces armées du Myanmar (hommes du Tatmadaw) se sont formées sur la base du nationalisme et du patriotisme et se composent de fils de nationaux de l'Union. C'est une armée véritablement nationale régie par la loi de 1959 sur les services de défense et administrée sous un code de conduite militaire strict. En conséquence, ces militaires sont hautement disciplinés et n'ont pas recours à des actions onéreuses ou oppressives contre le peuple.
  1291. -- Toute aberration isolée est sévèrement punie par une cour martiale. Comme mentionné plus haut, le recours aux porteurs a considérablement diminué, du fait qu'il y a moins d'opérations militaires contre les groupes armés.
  1292. -- En ce qui concerne les allégations de recours aux porteurs, les autorités du Myanmar ont déjà réfuté les allégations faites par la CISL en novembre 1993 au titre de l'article 24 de la Constitution de l'OIT.
  1293. -- Bien qu'il y ait eu des critiques formulées par les délégués travailleurs en relation avec le portage militaire et des pratiques de travail forcé au Myanmar, il y a aussi quelques opinions et observations formulées par quelques personnalités à cet égard. Les extraits de la conférence de presse donnée par les envoyés présidentiels des Etats-Unis, l'ambassadeur M. William Brown, et le fonctionnaire supérieur du Conseil national de sécurité de la Maison-Blanche, M. Stanley Roth, le 15 juin 1996, au club des correspondants étrangers de la Thaïlande, sont annexés (voir annexe I).
  1294. b) Construction de projets de développement et d'infrastructure par le gouvernement
  1295. -- Parmi le développement de projets d'infrastructure entrepris par le gouvernement du Conseil de rétablissement de la loi et de l'ordre de l'Etat, il y a la construction du chemin de fer Aungban-Loïkaw, le chemin de fer Ye-Dawei, l'agrandissement du champ d'aviation de Pathein, la construction de digues et berges, etc. Dans tous ces projets, aucun travail forcé n'a été impliqué.
  1296. -- Pour la construction des projets et d'autres projets non mentionnés ci-dessus, l'utilisation de travail était purement volontaire et il a été rémunéré équitablement. Il n'y a eu aucune coercition dans le recrutement. Le recrutement de cette main-d'oeuvre s'est effectué selon des procédures de recrutement local des bureaux d'emploi établis par le Département du travail. Il y a en tout 78 bureaux d'emploi au niveau des municipalités dans tout le pays qui fonctionnent en application de la loi sur l'emploi et la formation et de la loi sur la restriction de l'emploi.
  1297. -- En vue d'étayer les faits ci-dessus, des équipes d'enquêteurs ont été envoyées dans les régions respectives pour vérifier que le recrutement du travail s'est effectué conformément à la procédure. Des déclarations détaillées et des photographies de quelques personnes locales interviewées sont annexées (voir annexe IIa-IIg).
  1298. -- Le gouvernement de l'Union du Myanmar a pris des mesures concrètes concernant l'utilisation de main-d'oeuvre civile dans des projets de construction d'infrastructure et de développement. Une démarche supplémentaire et sans précédent a été prise en utilisant des membres des forces armées (hommes du Tatmadaw) dans ces projets. Il n'y aura plus de recrutement et de déploiement de populations locales dans aucun projet de développement. Des hommes du Tatmadaw participent maintenant à ces travaux pour servir les intérêts et le bien-être général du peuple à côté de leur responsabilité première de défendre le pays. Un exemple concret est la participation d'hommes du Tatmadaw dans la construction de chemins de fer et d'autres travaux publics dans la division de Mandalay, Magway et Tanintharyi. Des photographies d'hommes du Tatmadaw sur les chantiers respectifs sont annexées (voir annexe III).
  1299. -- Il convient de relever ici que quelques prisonniers condamnés pour délits de droit commun tels que meurtre, viol, etc., sont parfois employés dans la construction des routes.
  1300. c) Industrie hôtelière au Myanmar
  1301. -- En vue de promouvoir l'industrie touristique, le gouvernement a invité les investisseurs étrangers à construire des hôtels au Myanmar. En réponse à cette invitation, des investisseurs de Singapour, Thaïlande, Malaisie, Japon et Hong-kong, etc., sont venus au Myanmar investir à 100 pour cent dans la construction d'hôtels à Yangon, Mandalay, Bagan, etc. Le système adopté est connu sous le sigle BOT (Bâtir, opérer et transférer).
  1302. -- Ces sociétés étrangères, qui sont propriétaires à 100 pour cent de leur investissement, ont leurs propres contractants, qui à leur tour nomment des sous-traitants locaux. Ce sont ces sous-traitants locaux qui recrutent des travailleurs locaux qualifiés, semi-qualifiés ou manoeuvres non qualifiés. On peut dire que la compétition ou la demande pour obtenir de la main-d'oeuvre locale est très vive. En d'autres termes, des incitations sous forme de salaire élevé sont offertes par les entreprises étrangères. Dans ces circonstances, la question de travail forcé ne se pose pas. En outre, les procédures et le droit du travail local veillent à ce que des salaires équitables et des conditions de travail correctes soient respectés par les entreprises. Dans la plupart des cas, ces sous-traitants passent par les bureaux d'emploi gérés par le département du travail.
  1303. -- Bien que ce soit le ministère de l'Hôtellerie et du Tourisme qui réponde à la promotion de la construction d'hôtels au Myanmar, le ministère ne joue aucun rôle dans l'emploi des travailleurs du bâtiment.
  1304. -- En ce qui concerne les allégations que le travail forcé est utilisé dans la construction de "baraques", on peut dire que des logements pour des unités de garde-frontière dans l'Etat de Rakhine ont été construits par des entreprises du bâtiment privées employant de la main-d'oeuvre rémunérée volontaire (voir annexe IVa-IVb).
  1305. B. Bénéfice privé (ou) secteur privé
  1306. Construction du gazoduc de Yadanar
  1307. -- Il a été allégué que du travail forcé est utilisé pour la construction de projets pour la mise en exploitation de gisements de pétrole et de gaz. Plus particulièrement, le projet de gazoduc de Yadanar a été mentionné comme un de ces projets. Ce projet est une opération en association entre la compagnie pétrolière des Etats-Unis d'Amérique UNOCAL, la compagnie pétrolière française TOTAL et les entreprises du pétrole et du gaz du Myanmar MOGE. Les allégations que du travail forcé est utilisé sont totalement non fondées.
  1308. -- M. Roger Beach, président directeur général de UNOCAL, a dit dans une interview, en réponse aux questions de Patricia Chew de CNN, que les allégations sont "absolument non véridiques". Il ajoutait: "nous n'avons absolument pas de travail forcé sur ce projet au Myanmar" et "aucun village n'a été transféré depuis le début du projet en 1992", et il était très fier de faire partie d'UNOCAL et qu'UNOCAL fasse partie de ce projet.
  1309. -- M. Beach ajoutait que le projet a fourni des bâtiments d'écoles, des cliniques de santé, la rénovation d'un hôpital, la mise en oeuvre de projets agricoles et d'élevage de crustacés et d'autres pour améliorer la vie économique de la région concernée. Il disait que le projet a établi des comités de communication représentant les Kayin, Mon et Bama dans les villages, et que ces comités fournissent une assistance aux personnes souhaitant travailler sur le projet. Le texte intégral de cette interview est annexé (voir annexe V).
  1310. -- En outre, M. John Imle, président d'UNOCAL, a dit dans une interview conduite par Casey White de CNN, le 15 janvier 1997, que, entre autres, pour autant qu'il sache, il n'y avait pas de violation des droits de l'homme ou abus concernant la mise en oeuvre du gazoduc de Yadanar.
  1311. -- En réponse aux questions du journaliste selon lesquelles ce projet ne profiterait qu'au gouvernement du Conseil pour le rétablissement de la loi et de l'ordre de l'Etat, M. Imle a répondu que les revenus gouvernementaux du projet ne deviendraient positifs qu'en l'an 2000, 2001, 2002 ou 2003. Il a ajouté que la compagnie a surveillé avec soin la conduite des entreprises contractantes et du gouvernement dans cette région. Les allégations d'abus concernant les droits de l'homme sont absolument non fondées en ce qui concerne le projet. Cela a été surveillé très attentivement. Une copie du manuscrit de l'interview est annexée (voir annexe VI).
  1312. -- En outre, les autorités du Myanmar ont mené des enquêtes sur le terrain dans quelques-unes des régions décrites dans les moyens de preuve supplémentaires. Des déclarations de quelques travailleurs sur les chantiers du chemin de fer Ye-Dawei et de quelques employés du projet de gazoduc de Yadanar sont annexées (voir annexe VIIa-VIIf).
  1313. C. La loi
  1314. -- Les autorités du Myanmar souhaitent faire rapport sur les mesures qu'ils ont prises au sujet de la loi de 1907 sur les villes et la loi de 1908 sur les villages.
  1315. -- En vue d'une adaptation aux changements actuels positifs dans le pays, les autorités concernées ont entrepris une action concernant l'entière législation nationale du Myanmar qui comprend un total de plus de 900 lois. Ces lois ont été réexaminées et reformulées. Parmi ces vieilles lois se trouvent la loi sur les villes et la loi sur les villages en question, qui ont été adoptées quand le Myanmar se trouvait sous régime colonial.
  1316. -- Il va de soi que ces nouvelles lois seront en harmonie avec les nouveaux systèmes des pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires qui seront mis en place sous une nouvelle Constitution de l'Etat.
  1317. -- La convention nationale, qui est appelée à formuler les principes de base, qui devront être consacrés dans la nouvelle Constitution de l'Etat, a déjà adopté 104 principes de base. Parmi ces principes figure celui-ci: "L'Etat doit adopter les lois nécessaires pour protéger les droits des travailleurs."
  1318. -- Les autorités sont vivement conscientes des critiques formulées par quelques délégués à la Conférence au sujet des pouvoirs accordés par les lois sur les villes et sur les villages. En conséquence, dans la version reformulée, qui est en cours de préparation, les dispositions qui ont attiré tant d'attention de la part des délégués ont été radiées.
  1319. Troisième partie. Conclusion
  1320. 21. Les autorités du Myanmar souhaitent réitérer qu'elles sont conscientes des critiques formulées par quelques délégués travailleurs concernant le recours au travail au Myanmar pour des projets de développement national. Honnêtement, elles souhaitent souligner qu'une part considérable des critiques concernant le Myanmar est malheureusement fondée sur des allégations partiales et spécieuses faites par des émigrés vivant hors du Myanmar. Ces émigrés sont des personnes qui souhaitent dénigrer les autorités du Myanmar à des fins qui leur sont propres. Les autorités du Myanmar ont fait un effort pour répondre en toute sincérité aux questions qui leur ont été adressées. Une présentation sincère, franche et respectueuse a été faite dans ces observations destinées à être soumises aux membres du Conseil d'administration. Les autorités du Myanmar espèrent sincèrement que les membres du Conseil d'administration, y compris les signataires de la lettre adressée au Directeur général du BIT, comprendront et accepteront dans leur sagesse les explications ou réfutations faites dans ces observations.
  1321. 22. Les autorités du Myanmar espèrent sérieusement qu'une décision sera prise par les membres du Conseil d'administration selon laquelle il n'est pas nécessaire de constituer une commission d'enquête concernant le Myanmar. De leur côté, les autorités du Myanmar s'engagent à continuer et à développer leur coopération pour maintenir la lettre et l'esprit de la Constitution de l'OIT avec l'assistance inestimable du Bureau international du Travail.
  1322. Annexe III
  1323. Règles relatives à l'audition des témoins
  1324. 1. La commission entend, sauf exception motivée, les témoins suggérés par les parties; elle invite également les autres témoins qu'elle juge utiles.
  1325. 2. La commission entend tous les témoins à huis clos, sauf demande conjointe des parties, dont la commission dispose. En cas de huis clos, les informations et les éléments de preuve fournis à cette occasion à la commission sont traités comme confidentiels par toute personne dont la commission autorise la présence.
  1326. 3. Le gouvernement du Myanmar et les plaignants sont respectivement invités à désigner un représentant agissant en leur nom devant la commission. Ces représentants sont présents pendant toute la durée des auditions et sont responsables de la présentation de leurs témoins. Les représentants des parties avisent la commission 48 heures à l'avance de la langue dans laquelle sera délivré le témoignage, de façon à ce que l'interprétation soit, le cas échéant, assurée par les soins de la commission.
  1327. 4. Chaque témoin ne peut être présent que lorsqu'il est appelé à fournir son témoignage.
  1328. 5. La commission se réserve le droit de consulter les représentants au cours des auditions, ou après ces dernières, au sujet de toutes questions pour lesquelles elle estime que leur collaboration est nécessaire.
  1329. 6. La possibilité offerte aux parties et aux témoins de présenter des informations et de faire des déclarations vise à fournir à la commission des données de fait portant sur les points qu'elle est chargée d'examiner. La commission leur donne toute latitude raisonnable pour leur permettre de fournir de telles informations de fait; toutefois, elle n'accepte aucune communication ou déclaration sortant du cadre de son mandat.
  1330. 7. La commission se réserve le droit d'autoriser un témoin, à sa demande ou celle de son représentant, de faire une déclaration devant la commission sans avoir à divulguer son nom, adresse ou autres données d'identification. Ces informations doivent toutefois être fournies à la commission qui les traitera de façon confidentielle.
  1331. 8. Pour pouvoir exercer ses fonctions efficacement, la commission exige, et le gouvernement du Myanmar assurera qu'il ne fera pas obstacle à ce que toute personne vienne témoigner, et que les témoins ou leurs familles ne subiront aucune sanction ni préjudice du fait de leur témoignage.
  1332. 9. La commission demande à chaque témoin de faire une déclaration préalable ainsi conçue:
  1333. "Je déclare solennellement, en tout honneur et en toute conscience, que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité."
  1334. 10. Sous réserve de l'article 6, chaque témoin a la possibilité de faire une déclaration avant d'être interrogé. Si un témoin lit sa déclaration, le texte en est remis à la commission en six exemplaires.
  1335. 11. a) Tout interrogatoire de témoins est soumis au contrôle de la commission.
  1336. b) La commission ou tout membre de celle-ci peut à tout moment poser des questions aux témoins.
  1337. c) Sous réserve de l'alinéa a) ci-dessus, les représentants assistant aux audiences sont autorisés à poser aux témoins des questions qui relèvent du mandat de la commission, dans un ordre qui est déterminé par celle-ci.
  1338. 12. La commission se réserve le droit de rappeler des témoins.
  1339. Annexe IV
  1340. Liste des documents reçus par la commission à sa première session
  1341. -----------------------------------------------------------------
  1342. 1 Forced labour in Burma (1995-96)7
  1343. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 0001
  1344. 2 Réponse à la commission, 5 juillet 1997
  1345. Soumis par: Gouvernement de Singapour, page 2037
  1346. 3 Images Asia: "No childhood at Friends World all"
  1347. (nov.-déc. 19957
  1348. Soumis par: Committee for Consultation, page 2038
  1349. 4 Réponse à la commission (19 juillet 1997)
  1350. Soumis par: Yukong Limited, page 2039
  1351. 5 Témoignage: Audiences SPG de la Commission européenne sur
  1352. le travail forcé en Birmanie (2 oct. 1996)
  1353. Soumis par: Projet Maje, page 2040
  1354. 6 Dacoits Inc. (juin 1996)
  1355. Soumis par: Projet Maje, page 2041
  1356. 7 Forced labor logging in Burma (Rainforest relief, juin 1997)
  1357. Soumis par: Projet Maje, page 2042
  1358. 8 Forced labour on infrastructure development projects in
  1359. Burma's Tenasserim division (MIS, mars 1997)
  1360. Soumis par: Projet Maje, page 2052
  1361. 9 ABSDF Report (8 fév. 1997)
  1362. Soumis par: Projet Maje, page 2064
  1363. 10 RSO Newsletter (15 janv. 1995)
  1364. Soumis par: Projet Maje, page 2065
  1365. 11 Directive (CE) no 552/97 (24 mars 1997)
  1366. Soumis par: CE, page 2069
  1367. 12 Burma: The alternative guide (2e éd., 1996)
  1368. Soumis par: Burma Action Group, page 2071
  1369. 13 Burma News (printemps 1997)
  1370. Soumis par: Burma Action Group, page 2099
  1371. 14 Burma News (été 1997)
  1372. Soumis par: Burma Action Group, page 2107
  1373. 15 KHRG no 95-01 "SLORC orders to villages: Set 95-A"
  1374. (5 janv. 1995)
  1375. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2115
  1376. 16 KHRG no 95-13 "Summary of types of forced portering"
  1377. (11 avril 1995)
  1378. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2146
  1379. 17 KHRG no 95-14 "SLORC orders to villages: Set 95-B"
  1380. (1er mai 1995)
  1381. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2152
  1382. 18 KHRG no 95-15 "SLORC orders to villages: Set 95-C"
  1383. (2 mai 1995)
  1384. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2164
  1385. 19 KHRG no 95-17 "SLORC orders to villages: Set 95-D"
  1386. (22 mai 1995)
  1387. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2232
  1388. 20 KHRG no 95-22 "SLORC orders to villages: Set 95-E"
  1389. (2 juillet 1995)
  1390. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2233
  1391. 21 The situation of children in Burma (1er mai 1996)
  1392. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2271
  1393. 22 KHRG no 96-08 "SLORC orders to villages: Set 96-A"
  1394. (20 fév. 1996)
  1395. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2272
  1396. 23 KHRG no 96-09 "SLORC orders to villages: Set 96-B"
  1397. (23 fév. 1996)
  1398. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2273
  1399. 24 KHRG no 96-22 "SLORC orders to villages: Set 96-C"
  1400. (27 mai 1996)
  1401. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2274
  1402. 25 KHRG no 96-29 "SLORC orders to villages: Set 96-D"
  1403. (29 juillet 1996)
  1404. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2275
  1405. 26 KHRG no 96-30 "SLORC orders to villages: Set 96-E"
  1406. (31 juillet 1996)
  1407. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2276
  1408. 27 KHRG no 96-35 "SLORC orders to villages: Set 96-F"
  1409. (10 déc. 1996)
  1410. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2277
  1411. 28 KHRG no 97-04 "SLORC orders to villages: Set 97-A"
  1412. (16 mars 1997)
  1413. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2337
  1414. 29 KHRG no 97-06 "Relocations in the gas pipeline area"
  1415. (20 avril 1997)
  1416. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2365
  1417. 30 KHRG no 97-C1 "Commentary" (28 juillet 1997)
  1418. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2375
  1419. 31 KHRG no 97-08 "Abuses and relocations in Pa'an district"
  1420. (1er août 1997)
  1421. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2389
  1422. 32 Forced labour in Burma: soumission à la commission d'enquête
  1423. de l'Organisation internationale du Travail 7 août 1997)
  1424. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 2421
  1425. 33 Réponse à la commission (6 août 1997)
  1426. Soumis par: HCR, page 2433
  1427. 34 Réponse à la commission (24 juillet 1997)
  1428. Soumis par: Gouvernement du Canada, page 2437
  1429. 35 Additional information submitted on behalf of
  1430. complainants (11 août 1997)
  1431. Soumis par: CISL, page 2438
  1432. 36 Burma: SLORC's private slave camp (and executive summary)
  1433. (juin 1995)
  1434. Soumis par: CISL, page 2442
  1435. 37 Commission européenne SPG/4/96 (6 mai 1996)
  1436. Soumis par: CISL, page 2536
  1437. 38 Rapport présenté au Comité des préférences généralisées
  1438. Soumis par: CISL, page 2564
  1439. 39 Proposal for a Council Regulation (European Council,
  1440. 8 December 1996)
  1441. Soumis par: CISL, page 2580
  1442. 40 EC Economic and Social Committee "Opinion" (26 fév. 1997)
  1443. Soumis par: CISL, page 2587
  1444. 41 European Parliament Report (10 mars 1997)
  1445. Soumis par: CISL, page 2594
  1446. 42 Forced labour on the Ye-Tavoy railway
  1447. (Mon Information Service, déc. 1996)
  1448. Soumis par: CISL, page 2615
  1449. 43 The situation of the people living in the gas pipeline
  1450. project region (Mon Information Service, mars 1997)
  1451. Soumis par: CISL, page 2645
  1452. 44 Nowhere to go (Images Asia, avril 1997)
  1453. Soumis par: CISL, page 2657
  1454. 45 Forced labour in Burma: An international trade union
  1455. briefing
  1456. Soumis par: CISL, page 2658
  1457. 46 Lettre de la CISL aux plaignants (14 juillet 1997)
  1458. Soumis par: CISL, page 2666
  1459. 47 Soumission à la commission d'enquête de l'OIT
  1460. Soumis par: Australian Council for Overseas Aid, page 2668
  1461. 48 Réponse à la commission (11 août 1997)
  1462. Soumis par: TOTAL, page 2674
  1463. 49 Traduction anglaise du document 48
  1464. Soumis par: TOTAL, page 2681
  1465. 50 Lettre de TOTAL à la FIDH (26 nov. 1996)
  1466. Soumis par: TOTAL, page 2686
  1467. 51 Procédures compensatoires du MGTC
  1468. Soumis par: TOTAL, page 2695
  1469. 52 Code de conduite
  1470. Soumis par: TOTAL, page 2703
  1471. 53 Le projet Yadana
  1472. Soumis par: TOTAL, page 2706
  1473. 54 The Yadana Gas Development Project
  1474. (version anglaise du document 53)
  1475. Soumis par: TOTAL, page 2745
  1476. 55 Projet Yadana. Voyages de presse
  1477. Soumis par: TOTAL, page 2784
  1478. 56 Réponse à la commission (31 juillet 1997)
  1479. Soumis par: Gouvernement de Sri Lanka, page 2840
  1480. 57 Lettre du Département d'Etat américain au Directeur
  1481. général du BIT (16 juillet 1997)
  1482. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2841
  1483. 58 Notice du registre fédéral des audiences du Département
  1484. du travail sur le travail forcé en Birmanie
  1485. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2844
  1486. 59 Transcription des audiences du Département du travail
  1487. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2845
  1488. 60 Discours écrit d'ouverture de Andrew J. Samet
  1489. (Département du travail)
  1490. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2945
  1491. 61 Témoignage écrit de Bo Hla-Tint (NCGUB)
  1492. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2946
  1493. 62 Témoignage écrit de Win Naing (FTUB)
  1494. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2950
  1495. 63 Témoignage écrit de Phil Fishman (AFL-CIO)
  1496. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2955
  1497. 64 Témoignage écrit d'Amnesty International
  1498. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2957
  1499. 65 Témoignage écrit de Mike Jendrzejczyk (Human Rights Watch)
  1500. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2964
  1501. 66 Témoignage écrit de International Labor Rights Fund
  1502. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 2982
  1503. 67 Témoignage écrit de EarthRights International
  1504. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3015
  1505. 68 Documents soumis dans le cadre de l'affaire juridique Unocal
  1506. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3059
  1507. 69 Soumission écrite de Dana Dean Doering, spécialiste de
  1508. la santé mentale des enfants et adolescents
  1509. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3241
  1510. 70 Soumission pour le compte rendu d'audience soumis par Unocal
  1511. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3263
  1512. 71 Soumission de Ernest Z. Bower, US-ASEAN Business Council
  1513. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3311
  1514. 72 Forced labor in Chinland (Chin National Council)
  1515. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3315
  1516. 73 Forced labor (NCGUB)
  1517. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3327
  1518. 74 Child labor (NCGUB)
  1519. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3361
  1520. 75 No childhood at all (Images Asia)
  1521. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3371
  1522. 76 Total denial (Earth Rights International & Southeast
  1523. Asian Information Network) (juillet 1996)
  1524. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3372
  1525. 77 Report the facts (KNU M-T)
  1526. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3482
  1527. 78 French TOTAL Co's and American Unocal Corp's Disastrous
  1528. Gas Pipeline Project (Mon Information Service)
  1529. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3483
  1530. 79 Conditions in the gas pipeline area (KHRG)
  1531. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3484
  1532. 80 Forced labour in Mon areas (KHRG)
  1533. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3485
  1534. 81 Effects of the Gas Pipeline Project (KHRG)
  1535. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3486
  1536. 82 The situation of children in Burma (KHRG)
  1537. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3487
  1538. 83 Endless nightmares in the black area (Mon Information
  1539. Service)
  1540. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis, page 3488
  1541. 84 (Vidéo) Extraits de "No childhood at all" (Images Asia)
  1542. Soumis par: Gouvernement des Etats-Unis
  1543. 85 Réponse à la commission (13 août 1997)
  1544. Soumis par: Amnesty International, page 3489
  1545. 86 Extrajudicial execution and torture of members of
  1546. ethnic minorities (mai 1988)
  1547. Soumis par: Amnesty International, page 3494
  1548. 87 Allegations of ill-treatment and unlawful killings
  1549. of suspected political opponents and porters...
  1550. (sept. 1988)
  1551. Soumis par: Amnesty International, page 3574
  1552. 88 Continued killings and ill-treatment of minority peoples
  1553. (août 1991)
  1554. Soumis par: Amnesty International, page 3582
  1555. 89 Human rights violations against Muslims in the Rakhine
  1556. (Arakan) State (mai 1992)
  1557. Soumis par: Amnesty International, page 3598
  1558. 90 "No law at all" (oct. 1992)
  1559. Soumis par: Amnesty International, page 3628
  1560. 91 The climate of fear continues (oct. 1993)
  1561. Soumis par: Amnesty International, page 3674
  1562. 92 Human rights developments (juillet-déc. 1993)
  1563. Soumis par: Amnesty International, page 3704
  1564. 93 Human rights still denied (nov. 1994)
  1565. Soumis par: Amnesty International, page 3726
  1566. 94 "No place to hide" (juin 1995)
  1567. Soumis par: Amnesty International, page 3756
  1568. 95 Conditions in prisons and labour camps (sept. 1995)
  1569. Soumis par: Amnesty International, page 3800
  1570. 96 Human rights after seven years of military rule (oct. 1995)
  1571. Soumis par: Amnesty International, page 3812
  1572. 97 Kayin (Karen) State: The killings continue (avril 1996)
  1573. Soumis par: Amnesty International, page 3848
  1574. 98 Beautiful country, brutalised people (1996)
  1575. Soumis par: Amnesty International, page 3870
  1576. 99 Ethnic minority rights under attack (juillet 1997)
  1577. Soumis par: Amnesty International, page 3878
  1578. 100 Burmese Muslim asylum seekers fleeing to Bangladesh could
  1579. face forced labour and other hardships if returned
  1580. (juillet 1997)
  1581. Soumis par: Amnesty International, page 3904
  1582. 101 Extraits du document de l'ambassade des Etats-Unis
  1583. "Country commercial guide -- Burma" (juillet 1996)
  1584. Soumis par: Australian Council for Overseas Aid (ACFOA),
  1585. page 3905
  1586. 102 Holidays in Burma? (1996)
  1587. Soumis par: ACFOA, page 3912
  1588. 103 Slave labour in Burma (mai 1996)
  1589. Soumis par: ACFOA, page 3920
  1590. 104 Onze diapositives noir et blanc censées faire état
  1591. de travail forcé
  1592. Soumis par: ACFOA, page 3921
  1593. 105 Réponse à la commission (15 août 1997)
  1594. Soumis par: Gouvernement de la Nouvelle-Zélande, page 3932
  1595. 106 Présentation du Burma Centrum Nederland à la commission
  1596. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3933
  1597. 107 Extraits de "Rape, forced labor and religious persecution
  1598. in Northern Arakan" (HRW, mai 1992)
  1599. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3939
  1600. 108 "UN helps return Burmese to forced labor"
  1601. (The Gazette, Montréal, 29 déc. 1994)
  1602. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3945
  1603. 109 MSF's concerns on the repatriation of Rohingya refugees
  1604. from Bangladesh to Burma (mai 1995)
  1605. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3946
  1606. 110 Bulletin d'information du HCR (juin 1995)
  1607. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3953
  1608. 111 The situation in northwestern Burma (KHRG no 96-06)
  1609. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3963
  1610. 112 Extraits de "Repatriation of Burmese refugees from
  1611. Thailand and Bangladesh" (Australian Council for
  1612. Overseas Aid, mars 1996)
  1613. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3976
  1614. 113 Rapport de mission du HCR, Myanmar (27 fév.-28 mars 1996)
  1615. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3979
  1616. 114 Article publié dans "The Mustard Seed" (mai 1996)
  1617. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3986
  1618. 115 Burma Centrum Nederland News (mai 1996)
  1619. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3989
  1620. 116 New Burmese refugees pose dilemma for UN agency ...
  1621. (Reuter, juin 1996)
  1622. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3990
  1623. 117 Extraits de "Voluntary repatriation and reintegration:
  1624. Bangladesh/Myanmar" (HCR, sept. 1996)
  1625. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3992
  1626. 118 Extraits de "The Rohingya Muslims: Ending a cycle
  1627. of exodus?" (HRW, sept. 1996)
  1628. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3994
  1629. 119 Portering and forced labour (Amnesty International,
  1630. sept. 1996)
  1631. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 3997
  1632. 120 Update on the Rohingya situation in Bangladesh and
  1633. Burma (Human Rights Watch, oct. 1996)
  1634. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 4000
  1635. 121 Burmese Muslims allege torture and forced labor in Myanmar
  1636. (United States Information Agency, juillet 1997)
  1637. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 4001
  1638. 122 Burmese refugees (Voice of America, juillet 1997)
  1639. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 4002
  1640. 123 Burmese Muslim asylum-seekers fleeing to Bangladesh
  1641. (Amnesty International, juillet 1997)
  1642. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 4004
  1643. 124 Forced labour in Arakan (Rakhine) State (août 1997)
  1644. Soumis par: Burma Centrum Nederland, page 4005
  1645. 125 Nowhere to go (avril 1997)
  1646. Soumis par: Images Asia, page 4008
  1647. 126 The situation for Muslims in Burma (mai 1997)
  1648. Soumis par: Images Asia, page 4027
  1649. 127 No childhood at all (édition révisée, juin 1997)
  1650. Soumis par: Images Asia, page 4140
  1651. 128 Migrating with hope (juillet 1997)
  1652. Soumis par: Images Asia, page 4224
  1653. 129 Transcription du message de Daw Aung San Suu Kyi's
  1654. aux audiences SPG de l'Union européenne
  1655. Soumis par: Images Asia, page 4282
  1656. 130 Copies diverses de directives du SLORC obtenues
  1657. par Images Asia (1992-1997)
  1658. Soumis par: Images Asia, page 4286
  1659. 131 (Vidéo) No childhood at all
  1660. Soumis par: Images Asia
  1661. 132 (Vidéo) Caught in the crossfire
  1662. Soumis par: Images Asia
  1663. 133 (Vidéo) Message vidéo de Daw Aung San Suu Kyi's aux
  1664. audiences SPG de l'Union européenne
  1665. Soumis par: Images Asia
  1666. 134 Forced Labor (Chin Human Rights Organisation)
  1667. Soumis par: Images Asia, page 4335
  1668. 135 Refugee Case No. 1 (Chin Human Rights Organisation)
  1669. Soumis par: Images Asia, page 4343
  1670. 136 The Chin refugee conditions in India
  1671. (Chin Refugee Committee, avril 1997)
  1672. Soumis par: Images Asia, page 4350
  1673. 137 Forced relocation and human rights abuses in Karenni State,
  1674. Burma (ABSDF, mai 1997)
  1675. Soumis par: Images Asia, page 4385
  1676. 138 Forced labour on infrastructure development projects
  1677. in Burma's Tenasserim division (Mon Information Service,
  1678. mars 1997)
  1679. Soumis par: Images Asia, page 4419
  1680. 139 Life in the country (Mon Information Service, juillet 1997)
  1681. Soumis par: Images Asia, page 4420
  1682. 140 Forced portering after NMSP-SLORC ceasefire agreement
  1683. (Human Rights Foundation of Monland, sept. 1996)
  1684. Soumis par: Images Asia, page 4478
  1685. 141 Human rights abuses related to TOTAL Co. and UNOCAL's Gas
  1686. Pipeline Project (Human Rights Foundation of Monland,
  1687. nov. 1996)
  1688. Soumis par: Images Asia, page 4496
  1689. 142 The forced relocation in the southern part of Burma and
  1690. accompanying human rights abuses (Human Rights Foundation
  1691. of Monland, déc. 1996)
  1692. Soumis par: Images Asia, page 4514
  1693. 143 Témoignages de réfugiés shan (Shan Human Rights Foundation,
  1694. juillet 1996)
  1695. Soumis par: Images Asia, page 4533
  1696. 144 Témoignages de réfugiés shan (Shan Human Rights Foundation,
  1697. août 1996)
  1698. Soumis par: Images Asia, page 4535
  1699. 145 Monthly reports (Shan Human Rights Foundation, janv.-mai
  1700. et juillet 1997)
  1701. Soumis par: Images Asia, page 4539
  1702. 146 Shan refugee updates (Shan Human Rights Foundation, mai
  1703. et juillet 1997)
  1704. Soumis par: Images Asia, page 4589
  1705. 147 Uprooting the Shan (Shan Human Rights Foundation, déc. 1996)
  1706. Soumis par: Images Asia, page 4601
  1707. 148 Lahu, Wa and Palaung Human Rights Committee Report on
  1708. Forced Labour (juin 1997)
  1709. Soumis par: Images Asia, page 4679
  1710. 149 Témoignage écrit de Mike Jendrzejczyk (Human Rights Watch)
  1711. Soumis par: Human Rights Watch/Asia, page 4680
  1712. 150 No safety in Burma, no sanctuary in Thailand (juillet 1997)
  1713. Soumis par: Human Rights Watch/Asia, page 4681
  1714. 151 Transcriptions de cinq témoignages pris en juin 1997
  1715. Soumis par: Human Rights Watch/Asia, page 4711
  1716. 152 Réponse à la commission (18 août 1997)
  1717. Soumis par: Gouvernement de Malaisie, page 4727
  1718. 153 Ethnic groups in Burma (1994)
  1719. Soumis par: Anti-Slavery International, page 4728
  1720. 154 Forced labour in Burma: Additional documents 1996-97
  1721. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 4802
  1722. 155 Description de photocopies de photos: Set 94-B
  1723. (KHRG, sept. 1994)
  1724. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 5448
  1725. 156 Liste de descriptions de photos: Set 95-A (KHRG, mai 1995)
  1726. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 5496
  1727. 157 Liste de descriptions de photos : Set 96-A (KHRG, fév. 1996)
  1728. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 5529
  1729. 158 Photos diverses avec description (KHRG)
  1730. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 5567
  1731. 159 Réponse à la commission (27 août 1997)
  1732. Soumis par: Gouvernement de l'Inde, page 5576
  1733. 160 La Birmanie, TOTAL et les droits de l'homme: dissection
  1734. d'un chantier (version anglaise incluse dans le document
  1735. 154, pp. 4962 à 4997)
  1736. Soumis par: Fédération internationale des ligues des droits
  1737. de l'homme, page 5577
  1738. 161 Réponse à la commission (28 août 1997)
  1739. Soumis par: Burma Issues, page 5631
  1740. 162 Forced labor in Burma: The Yadana Gas Pipeline Project
  1741. Soumis par: EarthRights International, page 5632
  1742. 163 Forced labor in Burma: The Ye-Tavoy railway
  1743. Soumis par: EarthRights International, page 5633
  1744. -----------------------------------------------------------------
  1745. Annexe V
  1746. Liste des documents reçus par la commission à sa seconde session
  1747. -----------------------------------------------------------------
  1748. 164 Human Rights Yearbook 1996, Burma (Human Rights
  1749. Documentation Unit of NCGUB, juillet 1997)
  1750. Soumis par: Soumis par la CISL à la suite des audiences,
  1751. page 7606
  1752. 165 Communication de TOTAL (23 déc. 1997)
  1753. Soumis par: TOTAL, page 8277
  1754. 166 Communication de TOTAL (4 mars 1998), avec un rapport sur
  1755. la région du gazoduc par la Commission pour la justice et
  1756. la paix
  1757. Soumis par: TOTAL, page 8280
  1758. 167 All quiet on the western front? (fév. 1998)
  1759. Soumis par: Images Asia, page 8288
  1760. 168 Atrocities in the Shan State (Amnesty International,
  1761. 15 avril 1998)
  1762. Soumis par: Burma Peace Foundation, page 8380
  1763. 169 KHRG no 98-02 "SLORC orders to villages: Set 98-A"
  1764. (1er mars 1998)
  1765. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 8404
  1766. 170 Wholesale destruction: The SLORC/SPDC campaign to obliterate
  1767. all hill villages in Papun and Eastern Nyaunglebin district
  1768. (avril 1998)
  1769. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 8436
  1770. 171 KHRG no 98-C1 "Commentary" (19 avril 1998)
  1771. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 8508
  1772. 172 Human rights in rural Burma (30 avril 1998)
  1773. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 8530
  1774. 173 School for rape (fév. 1998)
  1775. Soumis par: EarthRights International, page 8536
  1776. 174 KHRG no 98-03 "Killing the Shan" (23 mai 1998)
  1777. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 8598
  1778. 175 KHRG no 98-04 "Attacks on Karen Refugee Camps" (29 mai 1998)
  1779. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 8657
  1780. 176 Documents et cassettes vidéo
  1781. Soumis par: Mission permanente du Myanmar, page 8706
  1782. -----------------------------------------------------------------
  1783. Annexe VI
  1784. Liste des soumissions faites durant les audiences
  1785. -----------------------------------------------------------------
  1786. H1 The announcement of State Peace and Development Council's
  1787. notifications (and other related items) (15 nov. 1997)
  1788. Soumis par: Edith Mirante (projet Maje), page 5652
  1789. H2 A Chin compendium (Project Maje, sept. 1997)
  1790. Soumis par: Edith Mirante (projet Maje), page 5665
  1791. H3 Extrajudicial execution, torture and political imprisonment
  1792. of members of the Shan and other ethnic minorities
  1793. (Amnesty International, août 1988)
  1794. Soumis par: Donna Guest (Amnesty International), page 5699
  1795. H4 Human rights violations against ethnic minorities
  1796. (Amnesty International, août 1996)
  1797. Soumis par: Donna Guest (Amnesty International), page 5729
  1798. H5 Rohingyas -- The search for safety (Amnesty International,
  1799. sept. 1997)
  1800. Soumis par: Donna Guest (Amnesty International), page 5747
  1801. H6 SLORC orders (1997) (originaux vus par la commission, et
  1802. photocopies et traductions certifiées comme fidèles)
  1803. Soumis par: Min Lwin, page 5767
  1804. H7 Soumission à la commission d'enquête de l'OIT
  1805. (Human Rights Watch/Asia, nov. 1997)
  1806. Soumis par: Zunetta Liddell (Human Rights Watch/Asia),
  1807. page 5795
  1808. H8 No safety in Burma, no sanctuary in Thailand
  1809. (Human Rights Watch/Asia, juillet 1997)
  1810. Soumis par: Zunetta Liddell (Human Rights Watch/Asia),
  1811. page 5811
  1812. H9 Burma Acts VI and III of 1907
  1813. Soumis par: Zunetta Liddell (Human Rights Watch/Asia),
  1814. page 5841
  1815. H10 The Burma Village Act 1907 and Executive Orders
  1816. Soumis par: Zunetta Liddell (Human Rights Watch/Asia),
  1817. page 5855
  1818. H11 All quiet on the western front? (Images Asia, nov. 1997)
  1819. Soumis par: Représentant de Images Asia, page 5876
  1820. H12 Cartes accompagnant H11 (Images Asia, nov. 1997)
  1821. Soumis par: Représentant de Images Asia, page 5926
  1822. H13 Foreign economic trends report: Burma, 1997
  1823. (ambassade des Etats-Unis, Rangoon)
  1824. Soumis par: Douglas Steele, page 5929
  1825. H14 Forced labor acknowledged by the regime in Burma (nov. 1997)
  1826. Soumis par: Douglas Steele, page 6084
  1827. H15 Vidéo, avec traduction indépendante des extraits pertinents,
  1828. et extraits écrits des archives de la télévision hollandaise
  1829. identifiant le matériel vidéo (5 juin 1996)
  1830. Soumis par: Représentant de Burma Centrum Nederland,
  1831. page 6187
  1832. H16 Carte du Myanmar indiquant la route du gazoduc et les
  1833. alternatives
  1834. Soumis par: Douglas Steele, page 6189
  1835. H17 Carte d'IGN de la région du gazoduc
  1836. Soumis par: Douglas Steele, page 6190
  1837. H18 Carte des opérations conjointes de la région de Ye-Tavoy
  1838. Soumis par: Douglas Steele, page 6191
  1839. H19 Paiements en argent à des villageois engagés par l'armée,
  1840. avec effet du 2/12/95 au 17/1/96
  1841. Soumis par: Douglas Steele, page 6192
  1842. H20 Témoignage de Terry Collingsworth, avec annexes (nov. 1997)
  1843. Soumis par: Terry Collingsworth (International Labor Rights
  1844. Fund), page 6193
  1845. H21 SLORC orders to villages: Set 97-B (KHRG no 97-10)
  1846. (KHRG, 14 sept. 1997)
  1847. Soumis par: Kevin Heppner (Karen Human Rights Group),
  1848. page 6349
  1849. H22 KHRG commentary (KHRG no 97-C2) (KHRG, 20 sept. 1997)
  1850. Soumis par: Kevin Heppner (Karen Human Rights Group),
  1851. page 6373
  1852. H23 Clampdown in southern Dooplaya (KHRG no 97-11)
  1853. (KHRG, 18 sept. 1997)
  1854. Soumis par: Kevin Heppner (Karen Human Rights Group),
  1855. page 6383
  1856. H24 Zones hors conflit dans le sud du Tenasserim, avec annexe
  1857. (KHRG no 97-09) (KHRG, 20 août 1997)
  1858. Soumis par: Kevin Heppner (Karen Human Rights Group),
  1859. page 6409
  1860. H25 SLORC orders to villages: Set 94-D (KHRG, 24 août 1994)
  1861. Soumis par: Kevin Heppner (Karen Human Rights Group),
  1862. page 6493
  1863. H26 Lettre de TOTAL Exploration Production à la FIDH
  1864. (26 nov. 1996)
  1865. Soumis par: Christine Habbard, page 6517
  1866. H27 Lettre de la FIDH à TOTAL Exploration Production
  1867. (24 déc. 1996)
  1868. Soumis par: Christine Habbard, page 6526
  1869. H28 Lettre de TOTAL à la FIDH (28 juillet 1997)
  1870. Soumis par: Christine Habbard, page 6529
  1871. H29 Extraits du bulletin d'information de la FIDH "La Lettre"
  1872. (mai-juin 1997)
  1873. Soumis par: Christine Habbard, page 6532
  1874. H30 Annexe A du "projet Yadana": caractéristiques de la
  1875. population et questionnaires par village (TOTAL)
  1876. Soumis par: Christine Habbard, page 6536
  1877. H31 Extraits de "Télérama" (5 mars 1997)
  1878. Soumis par: Christine Habbard, page 6571
  1879. H32 Extraits de "DS" (déc. 1997-janv. 1998)
  1880. Soumis par: Christine Habbard, page 6577
  1881. -----------------------------------------------------------------
  1882. Annexe VII
  1883. Résumés de témoignages
  1884. 1
  1885. Ethnie: Chin
  1886. Age/sexe: 20 avril 1960, masculin
  1887. Situation familiale: Aîné d'une famille de quatre
  1888. Education: Huitième année
  1889. Activité professionnelle: Fermier et par la suite chauffeur (transport de marchandises)
  1890. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Haka, Etat Chin (a vécu à Kalaymyo, division Sagaing, pendant quinze ans avant son arrestation)
  1891. Il a été arrêté à Mung Zwa le 18 avril 1994 et accusé d'avoir en sa possession et de transporter des publications illégales à caractère politique. Il a été jugé (tribunal de Division) et condamné à une peine de douze ans d'emprisonnement. Il n'a pu avoir recours au conseil de son choix, mais s'est vu assigner un avocat par l'Etat. Après son arrestation, il a été transféré à un camp militaire dont il ignore le nom. Il a par la suite été incarcéré dans un camp de travail pénitentiaire jusqu'au moment où il a réussi à s'échapper en octobre 1997. Après son évasion, il a dû fuir le Myanmar en passant par Mandelay, Kalaymyo, Tiddim et Champhai. Depuis lors, il n'a pas revu sa famille qui serait à Haka. Lors de son séjour en prison (1994-1997), il a dû pendant deux ans, à partir de mars 1995, effectuer des travaux de concassage de la pierre pour la construction de routes. Les conditions de travail étaient excessivement difficiles: peu de nourriture (une tasse de riz), pas d'abri pour dormir. La journée commençait généralement aux environs de 7 heures pour se terminer vers 22 heures, sans interruption, sous une température souvent accablante. Plus de 700 autres prisonniers travaillaient avec lui. Tous portaient chaînes à la taille et aux pieds. Les prisonniers faisaient régulièrement l'objet de sévices assénés par les gardiens: passages à tabac, coups de pieds ou d'armes. Les chaînes et la déshydratation rendaient la plupart des prisonniers malades. Aucun traitement médical ou médicament n'était octroyé aux prisonniers en cas de maladie. Seuls les prisonniers qui n'étaient plus en mesure de se lever étaient exempts de travail. Les mauvaises conditions qui prévalaient dans ce camp de travail pénitentiaire ont entraîné le décès de plus de 200 prisonniers. Plusieurs de ses amis ont été battus par les gardes, ces derniers se plaisant à répéter ce faisant qu'ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient aux prisonniers. Il a été battu personnellement, sans qu'il ne sache la raison justifiant cette sanction corporelle. Le témoin insiste sur le fait que les prisonniers se voient dénier tout droit. Au moment de son arrestation, il faisait partie de la Ligue nationale pour la démocratie (National League for Democracy) (NLD) et appuyait Aung San Suu Kyi. Plusieurs prisonniers faisaient partie de la Ligue nationale pour la démocratie.
  1892. 2
  1893. Ethnie: Chin
  1894. Age/sexe: 19 ans, masculin
  1895. Situation familiale: Six enfants (parents très âgés)
  1896. Education: Cinquième année
  1897. Activité professionnelle: Famille de fermiers
  1898. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Thantlang, Etat Chin
  1899. Il est arrivé en Inde le 11 avril 1997. Ses parents lui ont dit de quitter le Myanmar en raison de la situation qui y prévaut: conscription forcée, obligation de travailler et de porter pour les militaires. Il est en contact de façon sporadique avec sa famille qui est restée au Myanmar et qui lui confirme que la situation n'a pas changé et qu'elle est tout à fait intolérable en raison de la dictature militaire qui dirige le pays. Il est impossible pour les membres de sa famille de vaquer à leurs occupations personnelles. Travail forcé. Il a dû travailler pour les militaires dès l'âge de 14 ans (1993). De façon générale, les assignations de travail étaient transmises par écrit, bien que les militaires pouvaient réquisitionner directement les travailleurs dont ils avaient besoin. 1) Portage. Il a dû faire du portage pour les militaires à six reprises. A ces occasions, les militaires sont venus directement au village et ont ordonné aux personnes qui s'y trouvaient de porter leur matériel. Ils se sont également tout approprié: nourriture, bambous, médicaments, animaux, etc. Lorsque les militaires se présentent ainsi dans un village, les jeunes personnes tentent généralement de fuir, mais sont pourchassées dans la jungle. Pas une seule personne à sa connaissance n'exécute ce travail volontairement. 2) Route. Il a dû, à deux reprises, participer à la construction de la route entre Haka et Thantlang. Cette route se situe à environ 60 miles de son village. En fait, tout son village a reçu ordre d'y participer à raison d'une personne par famille. Chaque assignation a duré douze jours auxquels se sont ajoutés trois jours de voyage pour s'y rendre et trois autres pour revenir. Les soldats assuraient la surveillance sur le site de travail. La journée commençait à 6 heures et se terminait aux environs de 16 heures. Il n'y avait pas d'abris pour dormir, les travailleurs devant dormir près de la route ou dans la jungle. Pour ce qui est de la nourriture, les travailleurs devaient tout apporter et demander aux femmes présentes de la préparer. Ils pouvaient se rassasier à la fin de la journée de travail vers 22 heures. Les travailleurs faisaient régulièrement l'objet de mauvais traitements infligés par les soldats. Les personnes qui tentaient de fuir étaient menacées d'être exécutées ou emprisonnées. Il n'était pas rémunéré. Il était toujours possible de verser des pots-de-vin aux soldats afin d'être exempté. Il a dû travailler pour un camp militaire situé à proximité de son village à trois reprises en 1993, 1995 et 1997. A chaque fois, il y est resté une journée. Sa soeur de 16 ans a dû également y monter la garde et creuser la terre. Pour lui, les souvenirs les plus pénibles sont liés au portage et à la construction de route. Il fait partie de la Ligue nationale chin pour la démocratie (Chin National League for Democracy) (CNLD).
  1900. 3
  1901. Ethnie: Chin
  1902. Age/sexe: 15 avril 1972, masculin
  1903. Situation familiale: Deux soeurs. Père décédé (était fonctionnaire)
  1904. Education: Septième année
  1905. Activité professionnelle: Chauffeur de camion
  1906. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kalaymyo, division Sagaing
  1907. Il a été arrêté par les militaires, avec quatre autres personnes, le 23 janvier 1994 et a été accusé d'avoir transporté illégalement des médicaments requérant une ordonnance médicale. Il a été condamné à dix ans d'emprisonnement par un tribunal civil devant lequel il a pu présenter une défense. Il a interjeté appel et a été libéré le 21 septembre 1995. Lors de son incarcération, il a été transféré dans différentes prisons dans lesquelles il a dû exécuter du travail dans des conditions excessivement pénibles. Après avoir été remis en liberté, le témoin a eu l'impression que la police intérieure (CID) le surveillait. Trouvant la situation invivable, il s'est rendu au Mizoram en septembre 1997. Il a quitté le Myanmar en raison de la situation générale qui y prévaut. Le peuple n'a aucun droit. Il n'a pas de contact avec sa famille. Il ne fait partie d'aucun groupe politique. Il s'intéresse néanmoins à la littérature produite par les groupes d'opposition. Travail forcé. De façon générale, son village entier, incluant tous les membres de sa famille, a dû faire du travail pour les militaires. Les ordres provenant des militaires étaient transmis par l'intermédiaire du chef du village. Il était toujours possible, pour les personnes possédant quelques deniers, de verser des pots-de-vin aux militaires. Personnellement, le témoin n'a pas exécuté de travail forcé. Toutefois, depuis 1988, ses soeurs ont dû exécuter en rotation (quatre semaines) certains travaux à la centrale hydroélectrique de Kalaymyo et sur la route de Thantlang. En 1988, sa plus jeune soeur avait 12 ans et la plus âgée 24. Il ne connaît pas la nature des travaux qu'elles devaient exécuter. Il sait toutefois qu'elles ne pouvaient pas se reposer et qu'elle n'étaient pas nourries ou rémunérées.
  1908. 4
  1909. Ethnie: Chin
  1910. Age/sexe: 28 février 1968, masculin
  1911. Situation familiale: Mère vivante; fait partie d'une famille de sept enfants; frère plus âgé avocat; les autres sont fermiers
  1912. Education: Quatrième année
  1913. Activité professionnelle: Fermier
  1914. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Thantlang (Etat Chin)
  1915. Il a été arrêté le 5 juin 1996, les autorités le soupçonnant de faire partie du Front national chin (CNF) (Chin National Front). Lors de l'interrogatoire qui a suivi son appréhension, il a été torturé. Lorsqu'il a été relâché, il a quitté le Myanmar pour se rendre en Inde au milieu de 1996. Il souffre de troubles de mémoire. Tous les membres de sa famille ont quitté le Myanmar pour le Mizoram, incluant son frère juge, puisqu'ils étaient devenus suspects aux yeux des autorités à la suite de son départ. De façon générale, sa famille n'a pas eu à accomplir de travail pour les militaires puisque son père était juge. Toutefois, de façon exceptionnelle, à deux reprises, il a dû personnellement travailler pour les militaires. La première fois s'est déroulée entre le 4 et le 15 janvier 1995. Il a dû participer à la construction de la route entre Haka et Thantlang. A cette époque, tout son village avait été requis d'y travailler, incluant les membres des familles privilégiées comme celles de juges. Ces familles, qui regroupaient une quinzaine de personnes, se sont vu assigner une section définie de la route qu'elles devaient terminer dans un délai imparti. Dans le cas où ces personnes ne réussissaient pas à terminer le travail, elles étaient menacées de perdre leurs emplois ou forcées de payer une amende (2 000 kyats). Le travail qui consistait principalement à niveler le terrain était difficile. Ils devaient dormir près de la route ou chez des amis. La seconde occasion s'est déroulée en novembre 1995 pendant une journée lorsqu'il a été requis de faire du portage pour les militaires. A cette fin, il a été appréhendé par les militaires, avec 13 autres personnes, lorsqu'il se trouvait à Gu Kya, un petit village près de Thantlang. Il a dû se rendre de Gu Kya à Thantlang. Il a dû marcher sans moment de répit sur une distance d'environ 12 miles.
  1916. 5
  1917. Age/sexe: 1973, masculin
  1918. Situation familiale: Fait partie d'une famille de sept enfants; parents encore vivants
  1919. Education: Sixième année
  1920. Activité professionnelle: Soldat depuis 1993
  1921. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Falam, Etat Chin
  1922. Il est entré dans l'armée en 1993 à la fin de son apprentissage scolaire, puisqu'il n'avait pas d'autres choix pour gagner sa vie. Le quartier général de son bataillon était dans l'Etat Kachin. Il était le seul d'origine Chin dans sa compagnie. Son bataillon comptait toutefois 16 soldats d'origine Chin. Ses chefs étaient birmans de Mandalay (compagnie) ou de Yangon (bataillon). Il a quitté l'armée en raison des conditions prévalant en son sein: mauvaise rémunération, piètre nourriture, moral des troupes très bas. Travail forcé. Il se souvient que, depuis son très jeune âge, tout son village a toujours dû travailler pour les militaires qui avaient un camp à proximité. L'assignation pour travailler provenait des militaires, mais était transmise par le chef du village. Il a personnellement dû couper le bois et monter la garde. Il exécutait ce travail en rotation avec son frère. Il ne voulait pas faire ce travail et n'était pas rémunéré. Au commencement de sa carrière de militaire il a été gardien, pendant un mois, dans un camp de prisonniers à Namati, Etat Kachin. Il devait surveiller les prisonniers qui devaient briser la pierre nécessaire aux routes. Les conditions de travail étaient excessivement difficiles. Les prisonniers faisaient régulièrement l'objet de graves sévices corporels. Les prisonniers étaient des militaires ou des civils qui avaient été préalablement condamnés par des tribunaux militaires (cours martiales) ou civils (juridiction pénale). Ils étaient d'âges variés, incluant des enfants et des vieillards. Il n'y avait pas, à sa connaissance, de prisonniers politiques. Il a par la suite été envoyé au front à deux reprises. Le front se déployait surtout dans le nord de l'Etat Shan. Près de 4 000 soldats formaient le front. Les porteurs qui étaient nécessaires aux militaires étaient recrutés dans chaque village. Sa compagnie, qui comptait 30 à 40 hommes, avait recours aux services de 17 à 18 porteurs. Hommes, femmes et enfants (8-9 ans) pouvaient être réquisitionnés pour faire ce travail. Plusieurs femmes agissaient à titre de porteurs puisque les hommes réussissaient à s'enfuir les laissant seules comme main-d'oeuvre disponible. Lorsque les combats éclataient, les porteurs étaient poussés au-devant des troupes permettant ainsi de détecter les mines antipersonnel dissimulées par les rebelles Shan. Plusieurs porteurs ont trouvé la mort dans de telles conditions. Les personnes réquisitionnées étaient soumises à un traitement cruel. Si elles n'avançaient pas assez rapidement, elles étaient poussées, bousculées. Elles devaient porter d'un village à l'autre (rotation par village). Il a personnellement battu des porteurs conformément aux ordres reçus de ses supérieurs. Il n'a pas été témoin d'abus sexuels, mais en a entendu parler. Des plaintes auraient été portées, mais aucune mesure sérieuse entreprise. Lorsqu'il n'était pas au front, il était assigné à différents camps militaires ou restait au quartier général de son bataillon où il pouvait vaquer à ses occupations personnelles. Dans les camps militaires, il a été témoin de personnes qui étaient forcées de travailler pour la construction de ces camps. Son expérience couvre quatre camps: 1 -- Namati, Etat Kachin - camp de prisonniers (déjà discuté voir supra) 2 -- Nan Ya, Etat Kachin. Le camp était déjà construit lorsqu'il y a été assigné. 3 -- Phaungh Sai et Mong Ko, Etat Shan. Dans ces camps, des personnes (civils et militaires) ont dû participer à leur construction. Les villageois étaient informés du travail à exécuter par le chef du village. Les ordres étaient oraux pour ce qui est des villages près du camp et donnés par écrit pour ceux qui étaient plus éloignés. Le travail s'échelonnait sur deux ou trois semaines. Le travail consistait à ériger les constructions, couper le bois et monter la garde. Les conditions de travail étaient excessivement difficiles. Les travailleurs n'avaient pas de nourriture et devaient travailler sans répit. Ils faisaient régulièrement l'objet de sévices corporels: coups de bottes, passages à tabac. Même à titre de militaire il a dû, à quelques reprises, travailler sans être rémunéré. Entre 1994 et 1996, il a personnellement travaillé, dans ces conditions, sur quatre tronçons de la voie ferrée entre Mogaung (Etat Kachin) et Mandalay, toutes ces sections étant situées dans l'Etat Kachin: 1 -- Nan Ya (y a travaillé pendant trois mois); 2 -- Mogaung (y a travaillé pendant deux mois); 3 -- Myitkyina (capitale de l'Etat Kachin) (y a travaillé pendant un mois et demi); 4 -- Sarhmaw (y a travaillé pendant trois mois). Environ 250 à 300 soldats non rémunérés travaillaient avec lui en plus des prisonniers qui étaient présents. A sa connaissance, il n'y avait pas de civils. Le plus mauvais souvenir pour lui est la situation au front. Zone de trafic de drogue. Le témoin a parlé de la culture de l'opium dans l'Etat Shan et du fait que l'armée a ordonné à la population de cet Etat de le cultiver. La drogue est par la suite vendue à des intérêts chinois. Le témoin est venu en Inde en 1996.
  1923. 6
  1924. Ethnie: Rakhine
  1925. Age/sexe: 1951, masculin
  1926. Situation familiale: Huit enfants
  1927. Activité professionnelle: Culture de tabac en collines
  1928. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sai Pai Pra, Paletwa (Arakam Yoma) (le village comptait 60 maisons) (Note 1243)
  1929. Il a quitté le Myanmar en 1994 en raison des conditions qui y prévalaient, et notamment en raison du travail qui devait être exécuté pour les militaires. Toute sa famille est venue avec lui en Inde. Travail forcé. Il a dû faire du portage pour les militaires et participer aux travaux relatifs à la construction d'une route. 1) Portage. Il a dû faire du portage pour l'armée tant de fois qu'il ne peut se rappeler le nombre. Toutes ses assignations se sont déroulées dans l'Etat Rakhine. La première fois fut en 1982. Il a été amené par l'armée à Pi Chaung (à la frontière avec le Bangladesh). Soixante autres villageois se trouvaient avec lui. Trente soldats étaient présents. Le portage a duré sept jours. Les porteurs devaient aussi construire les campements aux endroits où les troupes étaient stationnées. Le travail consistait notamment à mettre des pieux de bambous, creuser des tranchées, apporter l'eau, etc. Le travail n'était pas volontaire et n'était pas rémunéré. Toutes personnes en âge de porter étaient susceptibles d'être réquisitionnées. En l'absence d'hommes, les femmes devaient le faire. Seuls les adultes ont travaillé dans sa famille. Les porteurs étaient l'objet de traitements cruels de la part des militaires. Il n'y avait pas de nourriture, les soldats se plaisant à dire aux travailleurs de manger du sable. Si les porteurs prenaient du retard, ils étaient battus (notamment ceux souffrant de polio). Il a souffert de la fièvre et de la faim. Pour ce qui est des autres expériences de portage, il estime avoir été réquisitionné par l'armée au moins trois fois par mois jusqu'à son départ. Les assignations duraient entre un et sept jours. Chaque famille devait fournir une personne pour exécuter ce travail. En outre, quatre personnes dans son village devaient être en permanence disponibles pour les besoins urgents des militaires et pour le travail au camp militaire. Lors de ses absences, sa famille devait se nourrir avec ce qu'elle trouvait dans la jungle. Dans son village, une jeune fille a fait l'objet de sévices sexuels perpétrés par des soldats ivres qui avaient au préalable offert de la boisson à son père. Malgré la plainte qui a été présentée au supérieur, aucune mesure sérieuse n'a été entreprise. Ses pires souvenirs sont liés à des voyage nocturnes qu'il a dû effectuer à titre de porteur. Il a dû faire l'ascension difficile de collines et montagnes sans repère et dans la totale obscurité. Il était toujours possible de verser des pots-de-vin aux soldats. Dans son cas, à défaut d'avoir l'argent nécessaire pour ce faire, il a dû exécuter le travail. Route. En 1992, il a dû, à deux reprises, participer à la construction de la route entre Matupi et Chaung Lawa. Le travail commençait à six heures pour se terminer à 17 heures. La première assignation a duré sept jours, alors que la seconde s'est échelonnée sur quatre jours. Chaque famille devait fournir une personne pour exécuter ce travail. L'ordre de travailler était transmis par le chef du village, mais ne provenait pas des mêmes militaires qui requéraient le portage.
  1930. 7
  1931. Ethnie/religion: Rakhine, bouddhiste
  1932. Age/sexe: 1966, 31 ans, masculin
  1933. Situation familiale: Marié, deux enfants
  1934. Education: Deuxième année
  1935. Activité professionnelle: Culture en collines
  1936. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Taryn, Paletwa Arakan Yoma (Note 1244) (le village comptait plus de 100 familles)
  1937. Il a dû faire du travail pour les militaires jusqu'à son départ en 1995. Sa femme et ses enfants s'occupaient de ses terres lors de ses absences. Pendant ces périodes, ils devaient se nourrir avec ce qu'ils pouvaient trouver dans la jungle. Il a fait du portage, participer à la construction d'un camp militaire et à celle de route. Il a quitté le Myanmar avec son épouse et ses enfants. Portage. Il a été réquisitionné pour faire du portage un nombre incalculable de fois par année. Il estime le nombre par mois à 3-4 reprises. La période pendant laquelle il a dû faire le plus grand nombre de portages remonte à 1988. Ce sont les soldats qui réquisitionnaient les villageois pour le portage en transmettant leurs ordres au chef du village. Chaque famille du village devait fournir une personne pour exécuter ce travail. Chaque assignation durait entre trois et cinq jours. Il devait transporter nourriture et munitions pour les militaires. Les charges étaient lourdes. Il ne bénéficiait d'aucun moment de répit. Il devait apporter sa propre nourriture, mais n'avait pas toujours le temps de la préparer. Les abris pour dormir devaient être construits sur place, dans la jungle. Il a dû également monter la garde lorsque les soldats dormaient. Hommes, femmes et enfants pouvaient être réquisitionnés. Le traitement infligé est cruel: passages à tabac avec des bâtons de bambous étaient chose courante. Si le porteur était incapable de suivre, il était battu et abandonné dans la jungle. Il a entendu dire que certains étaient décédés à la suite de ces sévices. Il était possible de refuser dans le seul cas de maladie grave. Toutefois, les militaires acceptaient les pots-de-vin. Les membres de l'armée s'appropriaient tout: animaux (poulet, porc), nourriture, etc. Il a dû faire du portage jusqu'à son départ pour l'Inde en 1995. Camp militaire. Les militaires avaient un camp dans son village. Il a dès lors dû y travailler un nombre incalculable de fois jusqu'à son départ. Il a dû notamment construire les baraques et les lits de camp pour les militaires, couper et cueillir les bambous, poser les clôtures et creuser les tranchées. Les assignations avaient des durées variables qui pouvaient durer jusqu'à un mois. Route. Il a dû travailler à deux reprises en 1991 sur la route entre Kaladan River et Matupi. La première assignation a duré sept jours alors que la seconde en a duré quatre. La moitié des familles du village ont dû faire ce travail. D'autres villages ont également été requis. Deux cents à trois cents personnes ont travaillé en même temps que lui. Les travailleurs faisaient l'objet de traitements cruels. Coups de bambous ou de poings étaient fréquents. Il a personnellement été battu à deux reprises puisqu'il ne savait pas nager. Ses pires souvenirs sont liés au portage et au fait qu'il était très difficile de se déplacer pendant la saison des pluies sans avoir les chaussures adéquates.
  1938. 8
  1939. Ethnie/religion: Rakhine, bouddhiste
  1940. Age/sexe: 22 ans, masculin
  1941. Situation familiale: Célibataire. Membre d'une famille de sept enfants, un frère et cinq soeurs plus âgés
  1942. Activité professionnelle: Fermier (rizière) et, en hiver, piments
  1943. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Thazegone, Minbya, Etat Rakhine (le village comptait 90 familles)
  1944. Il a dû faire du travail pour les militaires dès l'âge de 14 ans (1990). La première fois où il a dû travailler pour les militaires consistait en des travaux de culture. Par la suite, il a dû faire du portage, participer à la construction de routes et exécuter d'autres travaux pour les militaires. Il était impossible de refuser de faire le travail. Il n'était pas rémunéré. Culture. Il s'agissait de rizières et de culture de piment pour les militaires qui s'étaient appropriés des terres de culture localisées à une heure de son village. Dix personnes de son village ont dû s'y rendre. Il a dû travailler sur ces terres pendant la saison des pluies, jusqu'à très tard dans la nuit. Portage. Il a dû porter pour la première fois pour les militaires à l'âge de 16 ans. Par la suite, il a dû le faire à une ou deux reprises par année. Il devait transporter la nourriture. Son beau-frère aurait été pendu à un arbre par les mains pendant une heure puisqu'il était absent lors d'un portage où les militaires l'avaient réquisitionné. Il n'a pu marcher pendant une à deux semaines. Route. Il a dû participer à la construction de trois routes dès l'âge de 15 ans: Minbya-Ann (100 miles), Minbya-Myebon (60 miles) et Minbya-Sunye (route locale). Il devait faire ce travail pendant la saison sèche à raison d'une à deux fois par année. Tout son village était en fait réquisitionné pour faire ce travail. Il était divisé en deux groupes qui se remplaçaient selon une rotation hebdomadaire pré-établie. Chaque famille devait fournir une personne. Personnellement, il partageait le travail avec son frère aîné. Il avait à faire deux jours de marche pour se rendre à son lieu de travail. Le travail était difficile et consistait principalement à creuser la terre. Il devait apporter leurs outils. Trois cents à quatre cents personnes travaillaient avec lui sur ces routes. Les militaires supervisaient le travail. Ces routes sont principalement pour l'usage des militaires. Il a travaillé sur ces routes la dernière fois juste avant son départ en 1996. Les travailleurs faisaient régulièrement l'objet de mauvais traitements. Dans les cas de retard, ils étaient battus par les militaires. Les militaires les enchaînaient parfois et utilisaient des carcans pour immobiliser leurs jambes. Les militaires pouvaient aussi les forcer à rester sous le soleil ardent pendant trois ou quatre heures. De façon générale, les soldats brusquaient les travailleurs. Il a vu des personnes gravement blessées, souffrant notamment de profondes coupures dues à des coups de bâton de bois. Personnellement il n'a pas été blessé. Il a toutefois souffert de la faim, de la fièvre et de douleurs aux jambes. Autres travaux. Il a dû à quelques reprises ramasser le bois (palmiers, bambous) qui servait à alimenter le feu nécessaire à la fabrication de la brique et à la construction des toits (feuilles). Il a aussi participé à la construction de remblais pour une rivière. Il a également été témoin du fait que des villageois devaient travailler, sans être rémunérés, sur des élevages de crevettes. L'armée avait en effet pris possession de certains élevages. Les crevettes étaient élevées pour l'exportation. Toute personne civile qui tentait de prendre ces crevettes pour ses fins personnelles était battue. Pour lui, le travail le plus difficile qu'il a dû exécuter en raison de son jeune âge était le coupage de feuilles et de bambous. Il aimerait améliorer son éducation.
  1945. 9
  1946. Ethnie/religion: Rakhine, bouddhiste
  1947. Age/sexe: 25 ans, masculin
  1948. Situation familiale: Parents âgés, vivant amis; famille de cinq enfants. A deux frères et deux soeurs plus âgés
  1949. Education: Quatrième année
  1950. Activité professionnelle: Culture en collines. Entreprise familiale: rizière (superficie: deux sacs de grains de riz)
  1951. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kyaukke, Paletwa, Arakan Yoma (Note 1245)
  1952. Il a dû quitter le Myanmar en 1995 puisqu'il craignait le portage et n'avait pas la force requise pour exécuter le travail. Lui et son frère ont dû exécuter du travail pour les militaires. Ses soeurs toutefois n'en ont pas fait. Il a dû faire du portage et travailler pour un camp militaire. Portage. Il a dû faire du portage pour les militaires dès l'âge de 14 ans (1986) à raison de trois fois par année. Il devait transporter la nourriture et se rendre d'un village à l'autre. L'assignation durait généralement une journée. Les porteurs n'étaient pas nourris et, s'ils n'apportaient pas leur propre riz, ils devaient tenter de se rassasier avec ce qu'ils pouvaient trouver dans la jungle. Il s'est blessé à une jambe lors d'un déplacement et n'a pu pendant trois ans faire du portage. Les militaires lui ont dès lors demandé de poser les clôtures pour le camp militaire (voir camp militaire infra). Son frère, qui a aujourd'hui 20 ans, a également fait du portage pour les militaires un nombre incalculable de fois. Il estime que son frère devait porter pour les militaires en moyenne à trois reprises par mois. Ils auraient tous deux porté pour la première fois à peu près à la même période. Son frère aurait fait l'objet de mauvais traitements de la part des militaires. Camp militaire. Il a dû travailler pour le camp militaire à trois reprises. Il devait notamment poser les clôtures, creuser des tranchées et construire des baraques. Son frère a également dû participer à la construction de baraques militaires, en moyenne trois fois par mois. Le travail s'exécutait pour le même camp. De façon générale, le travail consistait à poser des clôtures, creuser des tranchées et construire des baraques. Outre ces formes de travail, quatre personnes de son village devaient être disponibles sur appel pour les besoins urgents de l'armée. Enfin, sa famille qui possédait des animaux (poulets, cochons, etc.) se voyait obligée de les garder pour les militaires qui se les appropriaient de temps à autre sans indemnisation.
  1953. 10
  1954. Ethnie: Rakhine
  1955. Age/sexe: 1951 (46 ans), masculin
  1956. Activité professionnelle: Fermier
  1957. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Ra Pauk Chaung, Ponnagyun, Etat Rakhine (il y avait un camp militaire près de son village à Ponnagyun)
  1958. Il a dû exécuter du travail pour les militaires dès l'âge de 14 ans (1964). Portage. Il a dû à une occasion transporter des marchandises pour l'armée (riz ou autres rations) d'un village à l'autre. Route. La construction de routes a commencé en 1995, chaque village se voyant assigner une section de route à exécuter. Il s'agissait de la route entre Sittway (Akyab) et Kyauktaw d'une longueur d'environ 100 miles. Cette route était construite durant la saison sèche mais était endommagée à chaque saison des pluies. Encore aujourd'hui, il est impossible de l'utiliser puisqu'elle n'a jamais été terminée. Les militaires précisaient au Conseil de division le travail qui devait être exécuté. Il était à cette époque le clerc du Conseil de division. A ce titre, il a dû superviser les travaux et y participer personnellement. Il a toutefois perdu son emploi en 1988. Les travailleurs devaient apporter leurs outils. Ils n'étaient pas rémunérés. Ils devaient également apporter leur propre nourriture. Lorsqu'ils ne pouvaient se rendre au travail, notamment en raison de maladie, ils devaient obligatoirement trouver un remplaçant. Les abus verbaux de la part des militaires étaient fréquents. Camp militaire. Il y a travaillé pendant une année. D'autres membres de sa famille (frère plus âgé, beau-frère) ont travaillé pendant une longue période une fois par année. Les villages étaient regroupés en groupe de dix, chaque village devant travailler au camp une journée définie. Le travail consistait à ramasser des fagots, construire des remblais. Outre ces différents travaux, des personnes devaient rester en permanence sur appel pour les besoins urgents de l'armée. Festival étudiant Sittway (Akyab) (14-17 décembre 1997). Il a dû travailler pendant deux-trois mois, comme le reste de son village, à la préparation de ce festival. Sa division a été en fait particulièrement touchée par ce festival puisqu'il avait lieu dans ce secteur. Le travail consistait à couper les bambous et le bois et à transporter les tiges et bûches sur le site du festival. Il estime que le régime militaire du SLORC est la plus brutale dictature militaire que le pays ait jamais connu. Il est impossible pour les citoyens de vendre librement leurs produits.
  1959. 11
  1960. Ethnie: Chin
  1961. Age/sexe: 49 ans, masculin
  1962. Situation familiale: Marié, sept enfants
  1963. Education: Maîtrise (physique)
  1964. Activité professionnelle: Enseignant (physique) lorsqu'il était au Myanmar; participation au mouvement contre le gouvernement
  1965. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Matupi, Etat Chin (a vécu à Yangon avant de quitter le Myanmar)
  1966. Le témoin est l'ancien président de la Corporation birmane chrétienne de Delhi (ex-Chairman Delhi Burmese Christian Fellowship), ancien secrétaire général du Conseil national chin (ex-Secretary General Chin National Council), secrétaire général de l'Association chin téologique d'outre-mer (Secretary General Ovrsea Chin Teological Association). En 1969, lorsqu'il complétait sa deuxième année universitaire à l'université de Yangon, il a participé au mouvement étudiant contre le gouvernement militaire. A la suite de ses actions, il a été expulsé de l'université pendant deux ans. Il est par la suite retourné à l'université pour terminer son diplôme (Bsa) en 1972. Il a poursuivi au niveau de la maîtrise (Mse). En 1974, il a participé aux événements entourant les funérailles de U Thant. Il a été arrêté, incarcéré et condamné à sept ans d'emprisonnement. Il n'a pas eu droit au conseil de son choix et la procédure a été sommaire. Il a établi, avec un compagnon de cellule, une organisation étudiante de lutte contre la junte militaire qui avait pour principal mandat le renversement de la junte militaire. Il a été libéré le 20 juillet 1980 et est retourné à Matupi. Il y a enseigné jusqu'en 1985. Il est par la suite retourné à Yangon en 1985-86. Il est revenu à Matupi en 1986 et a été transféré à l'école de Sabaungte. Il a par la suite été transféré à nouveau à Matupi en 1988. En mars 1988, son camarade de cellule l'a contacté pour l'informer que le mouvement étudiant contre le gouvernement avait repris à Yangon. Il s'est alors rendu à Yangon. Il a fait partie des dirigeants qui ont organisé le mouvement de grève nationale qui a été déclarée le 8 août 1988. La situation est devenue alors très tendue. Les militaires étaient convaincus que le mouvement de grève avait été lancé par les étudiants de dernière année. Ils les ont menacés de mort. Il a dès lors organisé la fuite de ces étudiants vers la Thaïlande. Il a personnellement quitté le pays le 11 novembre 1988 avec deux autres personnes. L'une est retournée au Myanmar et serait éventuellement en prison à ce jour et l'autre est en Inde. Après avoir quitté le Myanmar, il s'est rendu au Mizoram dans un camp de réfugiés (qui n'existe plus) pendant deux mois. Le 2 février 1989, il est arrivé à Aizawl, capitale du Mizoram. Il y a fondé le Front national chin (Chin National Front) le 25 mars 1989. De mars 1989 à 1992, il a travaillé de façon clandestine dans la jungle le long de la frontière Bangladesh-Inde-Myanmar. Il s'est finalement installé à Delhi en 1992 en raison de son état de santé. Travail forcé. Il a personnellement fait du travail forcé à Matupi à quelques reprises en 1982 et 1984 lorsqu'il était enseignant. En 1982, les habitants du village ont été forcés de participer à la construction d'une route entre Matupi et Paletwa, à plusieurs reprises durant l'année. Il a personnellement dû payer 2 500 kyats pour employer les services d'un substitut (à plusieurs reprises). Le chef du conseil public U Thang Gwo supervisait les travaux. En 1984, il a participé à la construction d'une route vers la centrale hydraulique située à environ deux miles de son village. Egalement, entre 1982 et 1985, il a participé au prolongement de la route de Matupi, à deux reprises. Ses soeurs y auraient aussi participé. Lorsqu'il enseignait à l'école Sabaungte, il a dû participer à la construction d'une route pendant une semaine. Il devait dormir dans la jungle. Ce sont les autorités de la division qui ont ordonné ce travail. Il ne pouvait refuser. Pendant toutes ces années, il a vu de façon régulière les habitants des villages où il se trouvait forcés de travailler pour les militaires. Il n'y a pas constaté de changement avant et après 1988 pour ce qui est de la manière dont les militaires avaient recours aux civils pour exécuter des travaux divers.
  1967. 12
  1968. Ethnie: Chin
  1969. Age/sexe: 33-34 ans, masculin
  1970. Situation familiale: Marié
  1971. Education: Economie
  1972. Activité professionnelle: Etudiant, Institut de sciences économiques
  1973. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Lungler, Thantlang, Etat Chin (a vécu à Yangon avant le quitter le Myanmar le 10 octobre 1988)
  1974. (Le témoin a des notes personnelles.)
  1975. Ex-vice-président du Syndicat étudiant chin (Chin Student Union). Responsable du Comité chin des droits de l'homme (Chin Human Rights Committee), du Conseil national chin (Chin National Council). Rédacteur en chef du journal Phuntungtu. Il a été impliqué dans le mouvement étudiant dès sa première année à l'université en 1984-85. Il a participé à la démonstration étudiante le 6 septembre 1987 à la suite de l'annulation par les autorités, en mai, de certains billets de banque (25 et 75 kyats). Les universités sont restées fermées jusqu'au 26 octobre 1987. Il a également participé à la démonstration en mars 1988. Les universités ont été à nouveau fermées. A cette époque, il est retourné à Haka. En juin 1988, les universités ont été réouvertes. Il a participé aux démonstrations estudiantines. Il est retourné à Haka où il a fondé le Syndicat étudiant de Haka (Haka Student Union). Il a été impliqué dans les démonstrations qui ont eu lieu à Haka et Yangon à titre d'organisateur. Le 25 octobre 1988, le Mouvement chin étudiant (Chin Student Movement) est créé à Falam. Il était alors à Haka. Il s'est rendu à Falam un peu plus tard. Il s'y est rendu une seconde fois au moment où les autorités militaires exigeaient le retrait de l'enseigne du syndicat. Les autorités l'ont retirée elles-mêmes, tôt le lendemain matin, après avoir essuyé un refus. Il a dû vivre clandestinement par la suite. Il a quitté le pays à sa dernière année universitaire. Il craignait d'être arrêté à la suite de l'arrestation de cinq de ses amis à Haka le 5 octobre 1988. Il a quitté le Myanmar et s'est rendu en Inde le 10 octobre 1989 au camp de réfugiés de Chanphai. Il est retourné par la suite au Myanmar dans la région près de la frontière avec la Thaïlande. Travail forcé. Le travail pour les militaires doit être exécuté partout dans l'Etat Chin, mais la région Haka-Thantlang est particulièrement touchée compte tenu de la tenue du festival étudiant dans cette localité. Il y avait un camp militaire dans son village. Il a donc vu, dès son enfance, des personnes qui se voyaient obligées de travailler pour les militaires, notamment en exécutant différents travaux au camp. Il a également vu du portage. Dans son village, le travail pour les militaires a principalement été exécuté entre 1988 et 1995. Les 150 familles formant son village devaient chacune fournir une personne pour exécuter ce travail. Route. 1) Entre Haka et Thantlang. Le travail s'est étendu sur deux semaines. 2) Entre Haka et Gangaw. Le travail aurait commencé au début 1986. Il a fourni des photos, prises en 1997, qui montrent les conditions dans lesquelles le travail est exécuté sur cette route (pièce M-10). Un professeur de collège les lui aurait envoyées. Les notes au côté des photos ont été écrites par lui à la suite des indications données par le professeur qui les a prises. Il n'a pas personnellement exécuté du travail pour les militaires puisqu'il n'était pas dans son village. Les étudiants universitaires n'étaient pas généralement réquisitionnés pour ce type de travail. Les étudiants au collège ainsi que les fonctionnaires pouvaient l'être toutefois. Le frère de son cousin aurait exécuté du travail pour les militaires. Ce proche aurait également quitté le Myanmar pour le Mizoram afin de fuir le travail forcé. Les femmes devaient également exécuter du travail pour les militaires. Le travail n'était pas rémunéré. A remis différents documents (M-10 à M-18). Plusieurs concernent le Mizoram.
  1976. 13
  1977. Age/sexe: 63 ans, masculin
  1978. Situation familiale: Marié depuis 26 ans, sept enfants
  1979. Activité professionnelle: Ministre des Affaires sociales, gouvernement de coalition nationale (NCGUB), en exil. (Elu membre du Parlement en 1990, ancien ministre du Travail du NCGUB)
  1980. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sittway (Akyab), Etat Rakhine
  1981. En 1993-94, en prévision d'une fête sportive d'étudiants organisée à Sittway (Akyab), la population a été obligée d'effectuer une grande quantité de travail forcé. Pour la construction d'un terrain de sport, la population de 31 quartiers de l'agglomération urbaine de Sittway et de 26 autres agglomérations a dû se relayer pendant six mois à raison d'une journée par semaine de 6 heures du matin à 1 heure de l'après-midi en apportant sa propre nourriture. L'ordre avait été donné par écrit par le commandant militaire de la région au Conseil pour le rétablissement de l'ordre et de la loi (LORC) de la ville et transmis au président des LORC de quartier. Personne n'a été payé. Ceux qui refusaient de travailler devaient payer 150 kyats au président du LORC, même s'ils étaient malades. A chaque croisement de routes, une grande pancarte avait été dressée, qui déclarait que ceux qui tentaient d'échapper à ce travail seraient arrêtés. Le propre fils du témoin, alors âgé de 15 ans, le seul qui ne fréquentait pas l'école et était libre d'effectuer du travail forcé, avait été frappé avec un tuyau en plastique pour être revenu en retard au travail après la pause du déjeuner. Une grande partie du travail forcé était affecté à la construction et à l'élargissement des routes. Le témoin a vu personnellement (en décembre 1993) à Sittway de 3 000 à 4 000 personnes travaillant chaque jour sur la route pendant les six à sept mois qui ont précédé la fête sportive des étudiants. Les membres de sa famille devaient régulièrement payer le LORC du quartier pour engager des tiers pour travailler à leur place. Même les femmes âgées et les jeunes filles étaient battues si elles ne travaillaient pas correctement. Lorsqu'ils étaient malades, ils devaient apporter leurs propres médicaments. Les grands arbres qui bordaient toutes les routes de l'agglomération avaient été élagués par les prisonniers et coupés, et le bois a dû être mis sur des camions afin d'être utilisé comme combustible par l'armée. Chaque arbre était charrié par quatre hommes, les femmes ne transportant que des pierres. Quiconque ne se présentait pas au travail était privé de sa carte d'identité et de sa carte de rationnement. Egalement pour la fête sportive des étudiants, à part la construction de routes et de ponts, toutes les petites huttes qui étaient situées le long de la route menant au festival ont dû être détruites et les grandes maisons devaient être rénovées en changeant les toits de tôle et en refaisant la peinture extérieure. Les propriétaires ont dû réparer eux-mêmes le trottoir, construire un caniveau le long de la route (ou payer le conseil municipal pour le faire) et payer pour la pose des briques. Les propriétaires de bateaux ont dû transporter les pierres et le bois nécessaires à la construction d'un pont routier de trois miles de long et pour la construction d'une route de 180 miles, de Kyaukphyu à Sittway. En outre, chaque agglomération urbaine a dû fournir tous les jours, pendant un mois et demi, 1 000 oeufs, 100 poulets, chèvres et porcs à un entrepôt du gouvernement qui était censé être destiné à la fête sportive des étudiants mais dont l'armée a pris la moitié. A Sittway (Akyab), en 1993-94, s'est effectuée la construction simultanée d'un musée bouddhiste et d'un musée archéologique, et toute la population de la municipalité a été tenue d'apporter des pierres, etc. Chaque samedi, pour l'un ou l'autre bâtiment, 500 personnes ont dû transporter des briques, des pierres, du ciment et du sable. Ces personnes n'étaient pas payées et devaient apporter leur propre nourriture. Dans l'ensemble de l'Etat Rakhine, des routes et des ponts ont été construits à l'aide de travail forcé. Le témoin l'a constaté personnellement à Kyaukphyu, Rathedaung et dans d'autres lieux. Dans l'agglomération urbaine de Rathedaung, en 1993-94, toute la population a dû construire des baraquements militaires pendant treize à quatorze mois. Cette construction impliquait chaque jour entre 300 et 500 personnes. L'ordre avait été donné par le commandant militaire aux LORC des circonscriptions urbaines et rurales. Les arbres plantés au haut d'une colline ont dû être coupés et la terre nivelée. Chaque famille a dû ensuite donner 100 troncs de bambou, chaque maison cinq poutres de bois et 100 feuilles de palmier Nipa. Ils ont dû construire la clôture, creuser les toilettes pour le camp. Pour que les familles des soldats aient de la nourriture, les villageois ont dû créer un jardin potager et construire une clôture autour de ce jardin. Les paysans ont dû préparer une rizière, planter les plants de riz, moissonner, battre et apporter le riz à un entrepôt qu'ils ont dû construire eux-mêmes pour l'armée. Hommes et femmes de tous âges devaient travailler. S'ils étaient trop lents, ils étaient battus par des soldats. Il a assisté lui-même à cela. Dans les champs de riz, les femmes plantaient le riz et les hommes labouraient. Les jeunes femmes devaient aussi transporter de l'eau jusqu'en haut de la colline où se trouvait la maison du commandant et laver son linge. Discrimination contre les familles d'hommes politiques. Lorsque sept membres du Parlement en exil (y compris le témoin lui-même) ont signé une pétition pour la libération de Aung San Suu Kyi, la fille aînée du témoin et son mari ont perdu leur emploi de sous-directeur et directeur des pêcheries du gouvernement et son fils s'est vu retirer la patente pour l'exploitation d'un petit traversier, pour laquelle il avait versé 720 000 kyats par an. Sa femme et son fils ont été arrêtés pendant plusieurs jours et sa famille est maintenant en résidence surveillée. Sa femme et son fils devaient se présenter deux fois par jour à la police et faire rapport au LORC de la circonscription sur tous leurs déplacements, en indiquant leur motif, leur date et leur durée.
  1982. 14
  1983. Ethnie: Rakhine
  1984. Age/sexe: 24 ans, masculin
  1985. Situation familiale: Célibataire, pas d'enfant
  1986. Activité professionnelle: Electricien (TV)
  1987. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mrauk-U, Etat Rakhine
  1988. Il a quitté le Myanmar en juin 1993. Il n'a pas personnellement fait de travail pour les militaires. Il était étudiant. Il a toutefois été témoin de plusieurs incidents. Route. Il a vu des villageois travaillant sur les routes lorsqu'il se rendait au marché de Kyauktaw. Le travail consistait à creuser les remblais de la route. Les côtés du fossé creusé formaient une pente de telle sorte que la largeur au fond du fossé était d'environ quatre pieds et celle au niveau de la route d'environ huit pieds. La profondeur était d'environ quatre pieds et demi. Une personne par groupe de dix maisons devait travailler sur cette route. Chaque village qui participait à la construction comptait environ 200-300 maisons. Chaque maison devait fournir une personne. Aucun membre de sa famille proche aurait travaillé sur cette route, mais des parents plus éloignés auraient toutefois été réquisitionnés. Hommes, femmes et enfants pouvaient travailler. Si l'homme était absent pour quelque raison que ce soit, il devait être remplacé de façon à ce que la règle d'une personne par maison puisse être respectée. Pour certains villages, le lieu d'exécution était proche alors que pour d'autres il pouvait se trouver à une journée de marche. Dans le cas des premiers, les travailleurs pouvaient retourner chez eux. Dans le cas des seconds, ils devaient construire des abris pour y dormir. Les travailleurs devaient apporter leur propre nourriture. Le travail de construction de route était exécuté durant la saison froide qui correspond aussi à celle de la récolte du riz. Il était impossible de refuser (crainte des armes que les soldats possèdent). Il était néanmoins possible pour les personnes possédant les deniers nécessaires de verser des pots-de-vin aux militaires ou de payer un substitut. Mais même en donnant de l'argent à l'armée, il n'y avait aucune garantie que la personne qui payait ne soit jamais réquisitionnée puisque l'argent versé était généralement gardé par le soldat qui l'avait reçu. Les militaires étaient présents partout. L'assignation de travail était donnée par le commandement central, Etat Rakhine. Il était transmis au commandement central de la division. Les chefs de village étaient par la suite contactés afin d'organiser le travail. L'armée contrôlait et assurait la discipline. Les soldats vérifiaient tout le monde. En outre du travail de construction que les personnes recrutées devaient exécuter, ces dernières devaient aussi subvenir à tous les besoins des militaires: nourriture, eau, etc. Il n'a pas été le témoin de traitements violents. Toutefois, les militaires utilisaient un langage abusif lorsqu'ils s'adressaient aux travailleurs. Les routes étaient mal exécutées. Elles étaient souvent construites sur des rizières et des passages de bétail. Elles étaient dès lors toujours endommagées. A sa connaissance, elles n'ont jamais pu être utilisées. Camp militaire de Taung Taung U. Il s'agit d'un camp militaire près de Kyauktaw. Le travail aurait été exécuté au cours des années 1992-93. On lui aurait raconté que les personnes travaillant sur les routes devaient également se rendre à ce camp pour exécuter différentes besognes. De façon générale, les villageois devaient garder des animaux pour l'usage de l'armée qui se les appropriait lors des patrouilles. Les hommes plus âgés devaient couper des tiges de bambou de façon à en faire des cordes pour l'usage de l'armée. Les femmes plus âgées, pour leur part, devaient aller chercher l'eau pour le camp qui était situé au sommet d'une montagne et n'était pas desservi en eau. Canal entre les rivières Tu Myauk (tributaire de la rivière Kaladah) et Yo Shaung. Le travail a été exécuté au cours des années 1992-93. Yo Shaung devait être élargie. Le canal avait une profondeur de 15 pieds et une largeur de 40 pieds. Chaque village avait une portion à creuser. Le travail a été exécuté en dix jours. Il a pu être exécuté rapidement en raison du nombre important de villages qui y ont participé. Il se rappelle les noms de 17 villages qui auraient été sollicités: Bo Me Yo, Barawa Yo, Kwa Sone, Palaung Shaung, Aung Zaya, Bone Za, Kin Swin Shaung, Kauk Kyaik, Pale Shaung, Ouk Ta Bra, Na Prauk Se, Ohn Pati, Tin Braun, Wa Tawn, Kan Sank, Ma Rwet Taung, Tu Myauk. Il y en aurait d'autres. Le premier village compterait environ 300 familles.
  1989. 15
  1990. Ethnie: Rakhine
  1991. Age/sexe: 34 ans, masculin
  1992. Situation familiale: Célibataire
  1993. Activité professionnelle: Représentant du comité au camp de réfugiés, Mizoram
  1994. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sittway (Akyab), Etat Rakhine
  1995. Il a relaté deux événements récents liés au portage qui se seraient produits dans l'Etat Rakhine. 1) Le 16 novembre 1996, Shwe Thin, chef du bataillon 376, se serait rendu à Kyak Ku Zu, Kyauktaw avec deux autres soldats. Il était environ 16 heures. Il désirait recruter des porteurs. Le village comptait 150 maisons et chacune d'elles devait fournir un porteur. Shwe Thin aurait organisé une réunion à cette fin et aurait donné une heure pour recruter les porteurs nécessaires en menaçant d'exterminer les habitants du village si l'ordre n'était pas exécuté dans le délai imparti. Il serait revenu après une heure et aurait commencé à tirer. Cinq personnes seraient mortes sur le coup: U Sein Hla Maung, chef de village, 45 ans; U Tha Sin, chef, 38 ans; U Sein Thwin Aung, chef, 42 ans; U Twee Sein Aung, chef, 50 ans; Maung Nge, fils de U Sein Hla Maung, 7 ans. Dix autres personnes auraient été blessées. Shwe Thin aurait continué sa route, aurait pénétré dans une résidence, y aurait tué le riche propriétaire et les personnes qui s'y trouvaient: U Way Phu Aung, riche homme, 60 ans; Daw Sein Ma She, épouse, 58 ans; Ko Thein Twin Aung, beau-fils, 37 ans; Maung Than Htay, fils de U Way Phu Aung, 10 ans; U Thein Twin, 38 ans; Maung Lay Win, commerçant, 38 ans; U Tha Htway Phyu, visiteur d'un autre village, 45 ans. La fille de U Way Phu Aung aurait été blessée, ainsi que son fils de 2 ans et dix autres personnes. Certaines seraient décédées depuis lors. Finalement, aucun porteur n'aurait été recruté. Il connaît bien la personne qui lui a rapporté cette histoire. 2) Deuxième semaine de décembre 1996 vers 20 h 30 à Sittway (Akyab). Un chef militaire aurait requis un conducteur de pousse-pousse à bicyclette de le conduire à un endroit éloigné (sept miles). Le conducteur aurait refusé. Aurait été tué sur le coup. Sa femme était enceinte. Il connaît bien la personne qui lui a rapporté cette histoire.
  1996. 16
  1997. Ethnie: Rakhine
  1998. Age/sexe: 32 ans, masculin
  1999. Activité professionnelle: Moine
  2000. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kyawkphyu, Etat Rakhine
  2001. Responsable de la section indienne du Syndicat des moines de la Birmanie/section Arakan (All Burma Monks Union/Arakan), organisation qui a commencé au Bangladesh en 1992 et dont la section indienne a été créée à Delhi en mai 1995. Travail forcé. Il a relaté quelques événements dont il a une connaissance personnelle et qui se rapportent au travail forcé. 1) Octobre 1991. Au village de Ngaloun Kyone, au sud de la Division de Kyawkphyu. Les habitants devaient fournir des pièces de bois aux militaires (bataillon 34). Chaque maison devait fournir 200 pièces de bois de 18 pouces. Il a vu personnellement les habitants couper le bois. Ils devaient se rendre dans la forêt. Le travail a duré un mois. Les travailleurs n'étaient pas rémunérés. Il était toujours possible de verser des pots-de-vin (paniers de riz, tabac, feuilles, pâte de poisson fermentée, piments séchés, poissons, etc.). Le bois servait à construire des baraques militaires près de la frontière avec le Bangladesh. 2) Dans le village de Nga Oune Su, un homme était malade (43 ans). Il a demandé à un soldat d'être exempté du travail (couper le bois). Le soldat a refusé et a ordonné qu'il exécute le travail. L'homme a refusé et a été battu si fort par le soldat avec un bâton de marche en métal que sa hanche a été fracturée. Il a hurlé. Un attroupement s'est formé. Une personne, affirmant que l'homme blessé devait être envoyé à l'hôpital, a également été frappée. Finalement, un médecin serait venu et aurait conclu que des soins importants devaient être administrés à cet homme. Le soldat lui aurait ordonné de prendre soin de lui. 3) Dans le village de Go Du. 1991. Un soldat aurait forcé une vieille femme de 71 ans à aller ramasser du bois dans la jungle. Elle lui aurait dit qu'elle était trop âgée. Le soldat aurait insisté pour avoir du bois. La vieille femme se serait pliée à l'ordre et serait décédée en l'exécutant. 4) Dans le village de Wa Bone Kyi. A vu à deux reprises des villageois couper du bois pour les fins de la construction de baraques militaires. Lors de la première occasion, les villageois devaient fournir chacun 200 pièces de bois, alors que lors de la seconde le quota était fixé à 700 pièces. Un villageois lui aurait dit que le village était malchanceux puisque ses habitants devaient toujours travailler pour l'armée. 5) A Sittway (Akyab). Première semaine d'avril. Il y a une jetée au centre de la ville. Un soldat s'y tenait avec un anneau de métal (quatre pouces de diamètre). Des pièces de bois de différentes dimensions s'y trouvaient aussi. Seules les pièces de bois qui avaient exactement la dimension de l'anneau étaient gardées. Celles qui étaient ou de diamètre trop petit ou de diamètre trop grand étaient rejetées. Il s'agissait de pièces de bois obtenues par le travail forcé mentionné supra (point 4). 6) 1986. Kyawkphyu. Travail de prisonniers. Ils étaient enchaînés, les autorités craignant qu'elles ne s'échappassent. Le témoin estime ce traitement cruel même s'il s'agissait de prisonniers. Ces prisonniers étaient affairés à couper du bois. 7) Mandalay 1988. Une route devait être construite. Une ligne a été tracée afin d'indiquer à quels endroits la route devait passer. Toutes les façades des maisons qui empiétaient sur la ligne devaient être "coupées" sans indemnisation.
  2002. 17
  2003. Ethnie: Birman
  2004. Age/sexe: 36 ans, masculin
  2005. Situation familiale: Marié
  2006. Activité professionnelle: Président de la Ligue des étudiants de la Birmanie (All Burma Student League)
  2007. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yangon
  2008. Il est le président de la Ligue des étudiants de la Birmanie (All Burma Student League). Il a de nombreuses entrevues de villageois du haut Myanmar (upper Burma). Travail forcé. Il a relaté trois événements liés au travail forcé. 1) Construction de route Pakokku-Kalagnyo-Htoma, division Magwe et division Sagaing. Le travail n'est pas rémunéré. Il s'agissait du premier travail qu'il a traité l'année dernière. 2) Décembre 1997. Construction à l'aide du travail forcé d'un nouvel aéroport dans le village (converti en ville) Htoma, près de Kalaymyo. 3) Infrastructure que les autorités construisent près de la frontière avec l'Inde, du côté du Myanmar, notamment une route entre Tamu et Kalaymyo. Les travailleurs seraient forcés d'y contribuer.
  2009. 18
  2010. Ethnie: Rohingya
  2011. Age/sexe: 48 ans, masculin
  2012. Situation familiale: Marié (famille de 10 personnes: épouse, six filles, deux fils)
  2013. Activité professionnelle: Cultivateur. Possède des terres de 16 khani (superficie substantielle; un khani correspond à 2,67 acres)
  2014. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chit Chapandaw, Maungdaw, Etat Rakhine (25 000-30 000 habitants) (son village est situé près d'un camp de NaSaKa, peuplé surtout de Rohingyas)
  2015. Il a quitté le Myanmar puisque 1) le gouvernement avait saisi ses terres et 2) a été soumis au travail forcé. Il est venu au Bangladesh en janvier 1998 puisqu'il n'y avait pas d'autre alternative. Il était devenu de plus en plus difficile pour un Rohingya de se déplacer librement au Myanmar (ne pouvait pas, par exemple, aller à Yangon). Pour ce qui est de l'expropriation de ses terres, NaSaKa aurait saisi ses terres il y a cinq ans pour les distribuer aux autres habitants qui étaient Rakhines. Il n'a reçu aucune indemnisation. Privé de terres, il a été engagé comme travailleur journalier dans le même village. Travail forcé. Son village est situé près d'un camp NaSaKa. Les ordres pour l'exécution du travail sont oraux. Ils proviennent des membres de NaSaKa qui utilisent l'intermédiaire du chef de village. Ils informent en fait le chef du village de leurs besoins et ce dernier doit réunir la main-d'oeuvre nécessaire. Tous les hommes Rohingyas devaient exécuter du travail pour NaSaKa. Il n'a pas vu de Rakhines exécuter ce type de travail. Il y a de cela trois ans (à 45 ans), il a dû 1) transporter du bois pour la construction, 2) aider aux travaux de culture et 3) faire du portage. Pour ce qui est du transport de bois (1), il a dû le faire un nombre incalculable de fois. Difficile de préciser le nombre de fois: lorsque les membres de NaSaKa en avaient besoin, ils l'appelaient. Tous les hommes (les femmes n'étant pas réquisitionnées pour le travail forcé) devaient exécuter ce travail. Deux hommes étaient requis pour transporter le bois. Le nombre total de travailleurs dépendait des besoins de NaSaKa, mais pouvait aller jusqu'à 200. Une journée complète était requise pour un seul arbre (trois heures nécessaires pour couper un arbre). La forêt est assez éloignée de son village. Il était toujours possible de verser des pots-de-vin pour être exempté. Pour ce qui est des travaux de culture (2), il a dû aider à la culture de riz sur les terres détenues par des Rakhines un nombre incalculable de fois. Ce travail était requis pour les deux saisons annuelles de culture et devait être exécuté trois jours par semaine pendant les récoltes qui duraient deux mois. Il n'était pas rémunéré. Il n'était pas nourri. Il devait apporter son riz. Les mêmes personnes que pour (1) étaient requises pour faire ce travail. Il n'y avait pas d'enfant. Il a également fait du portage (3) pour NaSaKa et a dû transporter de la nourriture d'un endroit à un autre un nombre incalculable de fois. Il a commencé à l'âge de 43 ans (il y a cinq ans). Distance: 3 à 6 km de sa résidence. L'assignation durait généralement une journée. Les mêmes personnes que pour (1) étaient requises pour faire ce travail. Enfin, il a dû monter la garde pour NaSaKa de façon à intercepter les personnes venant de la mer. Il devait monter la garde douze nuits par mois. Les mêmes personnes que pour (1) étaient requises pour faire ce travail. Traitement. Il a été menacé par des membres de NaSaKa. Il a été battu au moins 25 fois et a eu les cheveux coupés puisqu'il s'était assoupi sur le lieu de travail. Deux personnes auraient été tuées, l'année dernière, par NaSaKa dans son village. Il estime que NaSaKa utilise les personnes comme des animaux de trait. Taxes. NaSaKa informait le chef de village du montant des taxes et ce dernier devait assurer la collecte. Les personnes avaient un délai de dix jours pour payer. Il s'agissait de taxes mensuelles. Le montant a augmenté avec les années et fluctuait de façon considérable en fonction des constructions entreprises par NaSaKa. Il a dû payer ces taxes depuis son enfance. Seuls les Rohingyas devaient payer ces taxes. Si l'argent venait à manquer, les personnes taxées devaient vendre leurs propriété pour assurer le paiement.
  2016. 19
  2017. Ethnie: Rohingya
  2018. Age/sexe: 28 ans, masculin
  2019. Situation familiale: Marié, deux enfants, et ses parents
  2020. Activité professionnelle: Cultivateur
  2021. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chit Chapandaw, Maungdaw, Etat Rakhine (25 000-30 000 habitants)
  2022. Le témoin a quitté le Myanmar au début de janvier 1998. Lorsqu'il était requis de faire du travail, l'ordre provenait de NaSaKa qui utilisait l'intermédiaire du chef de village. Le chef envoyait un messager pour informer les personnes sélectionnées du travail qu'elles devaient réaliser. Camp de NaSaKa. Il a dû exécuter du travail pour un camp NaSaKa la première fois à l'âge de 18 ans. Il s'agissait de travaux de coupe de bois et de construction d'un camp. Il devait réaliser les travaux de menuiserie. A chaque fois l'assignation durait de dix à quinze jours. Chaque année, depuis, il a été forcé d'exécuter ce travail puisque les constructions devaient être rénovées. Il devait également réparer les clôtures. Il a travaillé pour la dernière fois au camp un mois et demi avant son départ. Portage. Il a dû faire du portage dès l'âge de 12 ans. Hommes et enfants étaient réquisitionnés lorsque NaSaKa devait transporter du matériel ou des munitions d'un camp à l'autre. Il estime avoir porté en moyenne deux à trois fois par mois. Il ne portait pas toujours pour le même camp. La durée de la réquisition dépendait de la longueur du voyage, mais était généralement de deux jours pour couvrir entre 16 et 20 kilomètres. Il a porté pour la dernière fois il y a environ vingt-cinq jours. Culture. Depuis l'âge de 12 ans, il a dû travailler sur un projet de culture de crevettes qui appartenait à NaSaKa. Il a dû y travailler deux fois par mois, chaque année, pendant les deux saisons de culture. Il a dû répéter ce travail chaque année. Depuis 1991, il a également dû aider les Rakhines au moment des deux périodes annuelles de culture. Monter la garde. Enfin, il devait de temps à autre monter la garde. Il s'agissait alors d'une tâche s'échelonnant sur 24 heures consécutives. Traitement. Les travailleurs étaient battus s'ils ne travaillaient pas selon les ordres reçus et à une cadence satisfaisante. Personnellement, il aurait été battu cinq à six fois, la raison alléguée à chaque fois étant son retard. Taxes. Le montant des taxes variait de façon substantielle. Dès qu'un haut dirigeant de NaSaKa venait en visite au camp, les habitants du village devaient payer. Le montant des taxes variait dès lors en fonction du nombre de visites.
  2023. 20
  2024. Ethnie: Rohingya
  2025. Age/sexe: 45 ans, féminin
  2026. Situation familiale: Veuve, deux fils (dont un décédé), quatre petits-enfants, une bru
  2027. Activité professionnelle: Cultivatrice
  2028. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kulung, Maungdaw, Etat Rakhine (1 300 familles)
  2029. Le témoin a quitté le Myanmar à la fin de décembre 1997. Son fils a été requis de travailler pour la première fois à l'âge de 12 ans. Il a dû faire du travail forcé jusqu'à son décès à 30 ans. Il devait notamment 1) nettoyer les camps, 2) construire des maisons et 3) transporter bois et sacs de riz. Son fils devait travailler en moyenne quatorze jours par mois (séquence alternative). L'horaire n'était toutefois pas fixe puisque les hommes étaient requis selon les besoins de NaSaKa. Les autres hommes dans le village étaient soumis au même traitement. Traitement. Des membres de NaSaKa l'auraient personnellement menacée lorsqu'elle se serait opposée à ce qu'ils s'approprient les fruits d'un arbre qu'elle avait sur ses terres. Elle a entendu dire que des membres de NaSaKa avaient violenté des femmes lorsque les familles s'opposaient à ce qu'ils prennent leurs avoirs.
  2030. 21
  2031. Ethnie: Rohingya
  2032. Age/sexe: 50 ans, masculin
  2033. Situation familiale: Marié, épouse, trois enfants (un fils, deux filles) et un gendre
  2034. Activité professionnelle: Cultivateur (terres de 7 khani) et pêcheur
  2035. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chit Chapandaw, Maungdaw, Etat Rakhine (25 000-30 000 habitants)
  2036. Le témoin a quitté le Myanmar au début de janvier 1998. Il a été forcé de travailler pour les militaires au Myanmar. Culture de terres. Il a dû le faire pour les Rakhines. Il s'agissait de riz et d'arachides. La saison des cultures s'échelonnait sur trois mois. Il ne pouvait rien faire d'autre durant cette période. Il a dû également, durant la saison sèche, nettoyer les terres et poser les clôtures. Il n'était pas rémunéré. Portage. Il a dû le faire deux fois par semaine (séquence alternative). Le reste du temps il pouvait travailler sur ses terres. Monter la garde. Il s'agissait d'un travail de nuit. Traitement. Il a été témoin à de nombreuses occasions d'actes de violence perpétrés par les membres de NaSaKa. Il y aurait une chambre des tortures au camp de NaSaKa. NaSaKa utiliserait des carcans (stocks). Ils étaient utilisés à titre de châtiment pour les travailleurs qui étaient malades ou refusaient de travailler. Il aurait personnellement été utilisé comme un animal de trait à quelques reprises. A une occasion, 100 autres personnes auraient reçu le même châtiment en raison de leur retard. La journée aurait duré six heures. Taxes. Vingt-cinq pour cent de ses cultures devaient être donnés à NaSaKa. Il ne recevait aucune indemnisation à cet égard.
  2037. 22
  2038. Ethnie: Rohingya
  2039. Age/sexe: 66 ans, masculin
  2040. Situation familiale: Marié, quatre enfants (trois fils, une fille)
  2041. Activité professionnelle: Cultivateur (7 khani)
  2042. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mehru, Maungdaw, Etat Rakhine
  2043. Le témoin a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Il y a un camp de NaSaKa près de son village. Le camp aurait du reste été construit par les hommes de son village. NaSaKa l'aurait réquisitionné pour travailler. Son fils (le plus âgé) lui aurait donné de l'argent afin de payer un substitut. Chaque fois, son fils devait débourser 50 kyats. Il a dû payer un nombre incalculable de fois. Il estime qu'il a dû débourser ce montant en moyenne cinq à sept fois/mois. Le fils a dû utiliser ses économies ou vendre ses possessions (poulets, piments) pour pouvoir donner cet argent à son père. Son fils (le plus âgé, les autres étant trop jeunes) aurait exécuté du travail pour NaSaKa, notamment en ayant à transporter du bois de la forêt jusqu'au camp. En fait, depuis vingt ans, son fils doit apporter au moins dix fois/mois du bois au camp. Le fils aurait été battu par les membres de NaSaKa à trois reprises avec un bâton puisqu'il était en retard. Taxes. Il a dû payer des taxes à de nombreuses occasions. Pour payer, ils devaient utiliser leurs économies. S'ils manquaient d'argent, ils devaient vendre leurs possessions (bétail, poulets, etc.). Le montant des taxes fluctuait. Le témoin indique son désespoir: sans travail, sans pays, sans avenir.
  2044. 23 à 28
  2045. Ethnie: Tous Rohingyas
  2046. Age/sexe: Témoin 23: 65 ans, masculin; témoin 24: 30 ans, masculin; témoin 25: 58 ans, masculin; témoin 26: 35 ans, masculin; témoin 27: féminin; témoin 28: 24 ans, masculin
  2047. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Villages divers dans le canton de Maungdaw, Etat Rakhine
  2048. (Les témoins 23 à 28 ont été interviewés ensemble.)
  2049. Les témoins ont quitté le Myanmar il y a un ou deux mois. Ils ont dû exécuter du travail pour NaSaKa à plusieurs occasions. Certains d'entre eux ont dû travailler environ dix fois par mois (par exemple: culture du riz: témoin 24). Au début de janvier 1998, le témoin 25 a vu son fils se faire battre parce qu'il s'était endormi durant la garde pour NaSaKa. Son fils a eu la jambe fracturée. Il n'a pas été traité. Le témoin 23 a été utilisé à trois reprises comme animal de trait à titre de châtiment.
  2050. 29
  2051. Ethnie: Rohingya
  2052. Age/sexe: 45 ans, masculin
  2053. Situation familiale: Marié, un fils, trois filles
  2054. Activité professionnelle: Cultivateur (ses propres terres) -- 9 khani
  2055. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Lamarpara, Rathedaung, Etat Rakhine, camp militaire à un kilomètre de son village
  2056. Il a quitté le Myanmar au début de 1998 en raison du travail forcé qui l'empêchait de subvenir aux besoins de sa famille. De façon générale, l'ordre provenait des militaires qui le transmettaient par l'intermédiaire du chef de village. Tous les hommes, à partir de 12 ans, devaient exécuter du travail forcé. Il n'était pas rémunéré. Il devait généralement apporter sa propre nourriture. Il ne pouvait refuser. Chaque famille devait fournir un homme. Il était possible de payer un substitut ou de verser des pots-de-vin. Dans son cas, il n'avait pas l'argent nécessaire. Il a fait l'objet de mauvais traitements à plusieurs reprises. Aucun médicament ou traitement médical ne lui était accordé. 1) Construction de remblais. Il devait le faire environ deux fois par semaine, tous les deux mois. Environ 500 personnes travaillaient avec lui. Le travail était exécuté sous la supervision d'un Rakhine. Il s'agissait d'un élevage appartenant au gouvernement. Il était ni rémunéré ni indemnisé de quelque façon que ce soit. Il a fait l'objet de mauvais traitement. Il a été battu à au moins six reprises avec un bâton de bois lorsqu'il se reposait. Il a fait ce genre de travail quatre mois avant son départ. 2) Culture. Il devait apporter sa propre charrue. Il a dû le faire pendant six ans, un mois par année. Un secteur était assigné à 10 familles. Le travail commençait généralement vers 6 h 30 pour se terminer à la tombée de la nuit. Il avait droit à une heure de répit à l'heure du déjeuner. Il n'était pas rémunéré. Il ne recevait pas de riz en indemnisation. Il a fait l'objet de mauvais traitement. 3) Portage. Il a dû faire du portage deux mois par année pendant six ans et demi. Les assignations duraient de un à quatre jours chaque fois. Environ 120 autres porteurs étaient requis en même temps que lui. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'y avait pas d'abris pour dormir. Il devait transporter les marchandises et les munitions pour les militaires d'un camp à un autre. Il n'a pas vu de conflits armés. Les charges pesaient environ 40 kg. Il a fait l'objet de mauvais traitements qui étaient généralement infligés parce qu'il n'avait pas compris l'ordre donné (problème de langue). Il a été battu au moins une vingtaine de fois (coups de bâton et coups de pieds). Il aurait des douleurs dans le dos qui seraient le résultat de ces coups. 4) Coupage de bois. Il a dû couper le bois nécessaire pour la construction des maisons des militaires ou pour être envoyé dans d'autres districts. Il a dû faire ce travail une semaine par mois pendant six ans et demi. Il pouvait s'absenter pendant plus d'une semaine pour ce travail. Il dormait dans les champs. A chaque fois, il a travaillé avec au moins une vingtaine d'autres hommes. Taxes. Il n'a pas eu à payer de taxes.
  2057. 30
  2058. Ethnie: Rohingya
  2059. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2060. Situation familiale: Marié, épouse, mère, deux frères, quatre soeurs
  2061. Activité professionnelle: Propriétaire d'une petite épicerie
  2062. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Nasil Para, Sittway (Akyab), Etat Rakhine (4 000-5 000 personnes y habitent; le village aurait été relocalisé il y a environ quatre ans; il était initialement situé près d'une route principale; il est maintenant près de la mer.)
  2063. Il a quitté le Myanmar au début de 1998. Il a dû exécuter du travail pour les militaires. Il n'était pas rémunéré. Personne ne pouvait s'occuper de son commerce lors de son absence. Tous les Rohingyas devaient exécuter du travail forcé. Ses frères et son père ont aussi dû faire du travail forcé. Il n'avait pas de transport ou de coupage de bois dans son secteur puisqu'il n'y avait pas de forêt. Tout le travail était réalisé pour le bénéfice des militaires. Il a fait l'objet de mauvais traitements. Cinq jours avant son départ pour le Bangladesh, il aurait été battu puisqu'il était incapable de porter la charge qui lui avait été assignée. Il souffre de douleur au dos à la suite de ce passage à tabac. Il était possible de verser des pots-de-vin: 1 000 kyats permettaient d'acheter un repos d'une semaine. Pour sa part, il n'avait pas les moyens de payer un substitut. Les ordres provenaient des militaires qui utilisaient les services du chef de village. Les militaires venaient parfois directement aux résidences. 1) Sur le portage de pierres. Il a dû le faire trois mois par année pendant quinze ans. Chaque journée de travail impliquait 10 voyages de pierres. Il a dû se rendre dans l'Etat Shan pour exécuter ce travail. Il a dû le faire pour la dernière fois une quinzaine de jours avant son départ. Les outils étaient fournis par les militaires. Les pierres servaient notamment à la construction de routes. Elles devaient être concassées. La route sur laquelle il a travaillé est une route de 7 km dans le district de Sittway. Il aurait aussi construit des ponts. 2) Camps militaires. Il a participé à la construction de camps militaires. Taxes. Chaque famille devait payer 50 kyats si un nouveau groupe militaire s'installait dans la région.
  2064. 31
  2065. Ethnie: Rohingya
  2066. Age/sexe: 45 ans, masculin
  2067. Situation familiale: Marié, quatre filles, quatre fils, deux petits-enfants
  2068. Activité professionnelle: Cultivateur. Rizière -- 12 khani
  2069. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kulung, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 300 familles; plusieurs familles auraient quitté le village)
  2070. Il est arrivé au Bangladesh avec sa famille au début de 1998. De façon générale, les ordres venaient des militaires qui utilisaient les services du chef de village. Si le chef de village ne fournissait pas la main-d'oeuvre requise, les militaires venaient directement aux résidences. Lors de ses absences, personne ne pouvait s'occuper de ses terres. Pour cette raison, il voulait que ses fils fassent le travail pour les militaires. Toutefois, les militaires le préféraient à ces derniers puisqu'ils étaient moins robustes (environ 15 ans). Tous les hommes de son village ont dû faire du travail pour les militaires. Son frère a été assassiné après avoir dénoncé au HCR (avait rudiments d'anglais) les pratiques de NaSaKa. Il a été pendu. 1) Construction de camps militaires. Pendant six-sept ans, il a dû travailler à la construction de camps environ dix jours par mois. Il devait faire les structures de bois et de bambous. Cent cinquante personnes étaient requises à chaque fois. Il devait également construire des maisons pour les Rakhines. Il a fait ce travail cinq jours avant son départ pour le Bangladesh. Il était rémunéré. Il pouvait faire l'objet de mauvais traitements. Un homme de son village aurait été tué cinq jours avant son départ pour le Bangladesh puisqu'il avait refusé de faire le travail qu'on lui avait demandé. La famille du défunt aurait aussi quitté le village. 2) Portage. Il a fait du portage pour les militaires plus d'une centaine de fois sur trois ans. Entre Kulung et Akyorata (24 km). Les assignations duraient généralement une journée. Il devait le faire quatre fois par mois. Entre 100-150 personnes étaient requises à chaque fois. Elles provenaient toutes de son village. Il était rémunéré 15 kyats par NaSaKa à chaque assignation (montant négligeable). S'il prenait du retard, il pouvait être battu. La dernière fois où il a dû agir à titre de porteur une journée avant son départ pour le Bangladesh. 3) Nettoyage du sol. Il devait le faire cinq fois par mois pendant six-sept ans. Il était non rémunéré. Taxes. Il devait payer 100 kyats par mois à NaSaKa.
  2071. 32
  2072. Ethnie: Rohingya
  2073. Age/sexe: 25 ans, masculin
  2074. Situation familiale: Célibataire, parents (père décédé en juillet 1991), deux frères (un décédé), trois soeurs
  2075. Activité professionnelle: Cultivateur (rizières et légumes) -- 16 khani
  2076. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Lawadok Pranshi, Buthidaung, Etat Rakhine (le village comptait 1 700 familles; 21 camps militaires à proximité)
  2077. Il a quitté le Myanmar en janvier 1998 puisqu'il ne pouvait plus tolérer les abus des autorités. NaSaKa s'est appropriée ses terres en 1995 en ne laissant à sa famille que la parcelle de terre sur laquelle se trouvait sa maison. Son père aurait été abattu par NaSaKa après être entré en contact avec le HCR puisque l'un des fils n'était pas revenu à la suite d'une assignation. 1) Travail pour les camps militaires. Il a dû exécuter différentes tâches pour les vingt et un camps: nettoyage de la forêt et portage des rations entre la route principale et le camp (1 km). Il a dû le faire deux fois par jour depuis 1995. Comme il n'avait plus de terres, il travaillait pour les militaires pendant la soirée et était un travailleur journalier durant le jour. Il recevait de façon occasionnelle, deux kilos de riz et un kilo de dal. Il a fait l'objet de mauvais traitements. Comme le camp militaire était adjacent à sa maison, les militaires venaient le chercher directement ou utilisaient un haut-parleur pour l'appeler lorsqu'il était requis. Il a déjà été battu car son rythme de travail n'était pas satisfaisant. Deux mille personnes auraient été réquisitionnées pour construire un camp militaire. 2) Portage pour des opérations militaires. Avril 1991. Il aurait fait du portage pour des opérations militaires dans les collines contre les forces révolutionnaires. Il devait porter les bagages. Il a dû le faire à deux reprises. A chaque fois, 400 personnes auraient travaillé avec lui. Il n'a pas été payé mais était nourri. Les porteurs faisaient fréquemment l'objet de mauvais traitements. Cinquante et 25 porteurs seraient décédés lors de ces deux assignations. Certains porteurs qui ne réussissaient pas à suivre le rythme de marche étaient poussés en bas des collines. Les militaires agressaient fréquemment les jeunes filles la nuit. Les viols étaient chose courante depuis environ deux ans. Les jeunes filles étaient regroupées et offertes aux soldats. Il a personnellement vu cette pratique. Sa propre soeur aurait été agressée il y a moins d'un mois. Il était présent. Il a résisté mais a été battu et a été transféré de force dans une autre pièce.
  2078. 33
  2079. Ethnie: Rohingya
  2080. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2081. Situation familiale: Marié, épouse, une fille, deux fils
  2082. Activité professionnelle: Cultivateur. Terres de 9 khani. Rizières. Il s'agit d'une zone où il n'y a qu'une seule récolte.
  2083. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Lamarpara, Rathedaung, Etat Rakhine (village côtier très reculé)
  2084. Il a quitté le Myanmar au début de janvier 1998 puisqu'il n'était plus en mesure de subvenir aux besoins de sa famille. Il s'est rendu pour la première fois au Bangladesh. Le gouvernement avait en effet saisi la moitié de ses terres en 1996 et le reste en 1997, lui laissant seulement 1 khani. NaSaKa s'est installée dans son village en 1996-97. Avant cette période, il n'avait pas été soumis au travail forcé (village très reculé). Sur le travail forcé. Il a travaillé sur les remblais des étangs d'élevage de crevettes. Il a dû le faire quinze jours par mois pendant sept mois; 90 à 150 personnes travaillaient en même temps que lui. Il recevait deux kilos de riz. Il ne pouvait refuser. Il a connu des hommes de son village qui avaient été torturés puisqu'ils avaient refusé de faire le travail. Ils ont été gardés dans une chambre noire. Cet événement se serait produit il y a environ une année. Il ne pouvait pas payer pour être remplacé ou verser des pots-de-vin aux militaires. Il a fait ce travail pour la dernière fois 12 jours avant son départ. Il a dû accompagner l'armée en avril 1997. Il s'agissait d'une opération contre le RSO. L'armée déployait en première ligne les porteurs de manière à ce que RSO les atteignît en premier s'il ouvrait le feu. Il devait porter le matériel, la nourriture et les munitions. Il a dû rester quarante et un jours dans la forêt profonde avec les militaires. Quatre-vingt-dix autres porteurs l'accompagnaient. Personne ne serait décédé. Il n'était pas rémunéré. Pour se nourrir, il recevait une ration quotidienne. Il a été battu à trois occasions avec un bâton de bois. Il devait payer des taxes à NaSaKa qui totalisaient 150 à 200 kyats par mois. NaSaKa ou le chef de village venaient chercher le paiement directement à sa résidence.
  2085. 34
  2086. Ethnie: Rohingya
  2087. Age/sexe: 50 ans, féminin
  2088. Situation familiale: Mariée, trois filles, un petit-fils
  2089. Activité professionnelle: L'époux était un petit commerçant (épicerie)
  2090. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chin Taung, Buthidaung, Etat Rakhine
  2091. Elle a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Son mari est décédé il y a quatre ans. Elle a vendu le commerce. Elle a travaillé dans son village comme travailleur journalier pour des voisins. Elle a vu des personnes forcées de travailler à la construction de routes (transport de terre) et à la construction de camps militaires. Son mari aurait travaillé à la construction de la route entre son village et Bauthidaung il y a quatre ans et demi. Elle a vu du travail forcé pour la dernière fois deux mois avant son arrivée au Bangladesh. Il s'agissait de réparation à la route et de construction de camp militaire. Dans le premier cas, 50 personnes transportaient la terre. Un Rohingya assurait la supervision des travaux. Elle a vu des soldats maltraiter des villageois. Elle a dû payer des taxes aux militaires juste avant son départ qui totalisaient 30 kyats. Elle ne connaît pas la raison justifiant ce paiement. Ces taxes étaient collectées par le chef de village.
  2092. 35 et 36
  2093. Ethnie: Rohingya
  2094. Age/sexe: 30 ans, féminin (témoin 35); 45 ans, féminin (témoin 36)
  2095. Situation familiale: Veuve avec un fils (témoin 35); mariée avec deux fils et une fille (témoin 36)
  2096. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chit Chapandori Maungdaw, Etat Rakhine (il y aurait un camp NaSaKa dans le village)
  2097. (Les deux ont témoigné ensemble.)
  2098. Elles sont arrivées à la fin de 1997. Elles ont vu du travail forcé pour NaSaKa. Les membres de NaSaKa sont venus chez le voisin du témoin 36 juste avant son départ pour le Bangladesh. Douze à 20 personnes avaient été requises à cette occasion pour transporter des bagages. Le même scénario s'est produit à plusieurs reprises antérieurement. L'assignation pouvait varier et durer une demie ou une journée. L'opération pouvait toutefois être répétée deux à quatre fois par jour. Les villageois étaient aussi requis pour nettoyer le camp militaire de NaSaKa.
  2099. 37
  2100. Ethnie: Rohingya
  2101. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2102. Situation familiale: Marié, épouse, trois fils, deux filles
  2103. Activité professionnelle: Cultivateur (rizière) -- 10 khani
  2104. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Dumsofara, Rathedaung, Etat Rakhine (camp NaSaKa dans le village)
  2105. Il a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Il a dû exécuter différentes formes de travail: 1) construction de camps militaires; 2) creusage de la terre pour les étangs à élevage; 3) coupage de bois; 4) construction de routes. Il a eu à creuser la terre pour les étangs, moins d'un mois avant son départ. Pour ce qui est du coupage de bois, environ 50 à 60 personnes auraient travaillé avec lui. Il devait transporter le bois coupé et participer à la construction des camps. Il a dû faire ce travail quinze jours par mois, six mois par année pendant environ cinq ans. Il a participé à la construction de la route entre son village et Chilkali. La route était pour l'usage exclusif de NaSaKa. Pendant cinq-six ans, quatorze à quinze jours par mois étaient occupés par le travail forcé qui devait être réalisé pour NaSaKa. Il aurait été battu puisqu'il aurait refusé de travailler. Il a quitté le Bangladesh en raison du travail forcé et du manque d'emplois.
  2106. 38
  2107. Ethnie: Rohingya
  2108. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2109. Situation familiale: Marié, épouse, trois fils, trois filles
  2110. Activité professionnelle: Cultivateur (rizière)
  2111. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Dumsofara, Rathedaung, Etat Rakhine (camp NaSaKa dans le village)
  2112. Il a quitté le Myanmar au début de 1998 puisque la vie y était rendue intolérable en raison des abus des militaires. Il a eu à exécuter les mêmes formes de travail forcé que le témoin 37. S'y référer. Pendant cinq à six ans, quatorze à quinze jours par mois étaient occupés par le travail forcé qui devait être réalisé pour NaSaKa. En outre, même si l'assignation était pour un nombre de jours donné, les hommes devaient attendre leurs remplaçants avant de quitter le travail. Ils restaient dès lors toujours plus longtemps que le nombre de jours initialement prévu. Les ordres venaient de NaSaKa qui utilisait l'intermédiaire du chef de village. Il était possible d'être exempté en payant à NaSaKa la somme de 200 kyats à chaque fois. Il aurait payé ce montant à quatre reprises. Il ne pouvait refuser. Il a été battu par les militaires puisqu'il se serait présenté en retard au lieu de travail et puisqu'il avait refusé de travailler. Il a été payé de temps à autre par NaSaKa: 10 kyats.
  2113. 39 et 40
  2114. Ethnie: Rohingya
  2115. Age/sexe: 30 ans, masculin (témoin 39); 45 ans, masculin (témoin 40)
  2116. Situation familiale: Marié avec deux fils et une fille (témoin 39); marié avec deux fils et deux filles (témoin 40)
  2117. Activité professionnelle: Travailleur journalier (témoin 39); cultivateur (témoin 40)
  2118. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Barachara, Rathedaung, Etat Rakhine (camp NaSaKa à proximité)
  2119. Ils ont quitté le Myanmar au début de 1998. Le témoin 40 a dû exécuter différentes formes de travail forcé: 1) monter la garde; 2) couper le bois; 3) porter les rations. Il était non rémunéré. Pendant quatre ans, le témoin 39 a perdu treize jours en moyenne par mois pour exécuter le travail des militaires. Entre 40 à 50 personnes travaillaient en même temps que lui. La dernière fois où il a dû faire du travail forcé: le jour qui a précédé son départ. Pour ce qui est du portage, les assignations duraient généralement une journée. Il a dû à une occasion se rendre dans la forêt profonde pour une durée de sept jours. Il devait suivre les troupes dans une opération contre les rebelles. Il n'a pas vu de combats. Deux rebelles auraient toutefois été arrêtés dans l'Etat Rakhine. Il ne pouvait pas refuser. Il a été battu il y a environ un an et demi puisqu'il a tenté de s'enfuir du site de travail où il avait été assigné. Il a été gardé dans une chambre noire et battu avec un bâton de bois.
  2120. 41
  2121. Ethnie: Rohingya
  2122. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2123. Situation familiale: Marié, trois fils, quatre filles
  2124. Activité professionnelle: Cultivateur. Légume et irrigation (ce qui signifie qu'il peut bénéficier de deux saisons de récoltes). 7 khani
  2125. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Rajal, Rathedaung, Etat Rakhine (la plupart des habitants du village sont Rakhines; tous les Rohingyas auraient quitté le village il y a environ trois mois; il y aurait à proximité un camp militaire (15 km de sa résidence, juste à l'extérieur du village) et un camp NaSaKa (plus près du village que le camp militaire))
  2126. Il a dû quitter le Myanmar à la fin de 1997 puisque, depuis cinq ans, les militaires saisissaient annuellement 50 pour cent de ses récoltes (50 pour cent de 2 800 kilos de riz). Même en louant des terres voisines, il n'était plus en mesure de subvenir aux besoins de sa famille. Sur le travail forcé. Il a participé à la construction du camp NaSaKa et y a effectué certains travaux par la suite: couper l'herbe, entretien, etc. Trois mois avant son arrivée, il a participé à la réfection du camp NaSaKa qui avait commencé deux ans auparavant. Il a travaillé comme journalier pour le camp NaSaKa. En moyenne quatre jours par semaine sur cinq mois pendant cinq ans. Dix à 12 personnes travaillaient avec lui. Il s'agissait de porter des bâtons de bambous, de s'occuper du système de drainage du camp et de poser les pointes de protection. Toute réticence à exécuter le travail pouvait entraîner un passage à tabac. Il a été battu à plusieurs occasions par NaSaKa. A une occasion, les habitants se seraient plaints de la situation auprès des représentants du HCR qui auraient fait une enquête. A titre de représailles, lui et quelques autres villageois auraient été sévèrement battus avec des bâtons de bois. De façon générale, il n'était pas rémunéré. Il n'y avait pas non plus de nourriture. Ses fils étaient trop jeunes pour être réquisitionnés pour le travail forcé. Toutefois, tous les Rohingyas devaient faire du travail pour les militaires. Pas les Rakhines.
  2127. 42
  2128. Ethnie: Rohingya
  2129. Age/sexe: 20 ans, féminin
  2130. Situation familiale: Mariée, un fils, une fille
  2131. Activité professionnelle: Propriétaire d'une charrette
  2132. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Koalong, Sittway (Akyab), Etat Rakhine
  2133. Il y avait plus de 1 000 familles dans le village du témoin. Le village entier aurait disparu il y a quatre ans. Les militaires auraient poussé ses habitants vers Maungdaw. Les familles auraient été disséminées de manière à empêcher toute communication entre elles. Elle serait retournée onze mois plus tard dans la région où son village se trouvait initialement jusqu'à ce que les militaires les forcent à nouveau à partir. Elle a fait l'objet d'importants abus de la part des militaires tant dans la région de Sittway que dans celle de Maungdaw. Tous les hommes rohingyas devaient faire du travail forcé. Le travail consistait surtout à travailler pour les camps: nettoyage des installations sanitaires, portage du matériel et des marchandises, réparation des maisons. Chaque famille devait fournir un membre. Le travail n'était pas rémunéré. Tout refus pouvait entraîner un passage à tabac.
  2134. 43
  2135. Ethnie: Rohingya
  2136. Age/sexe: 38 ans, masculin
  2137. Situation familiale: Marié, un fils, trois filles
  2138. Activité professionnelle: Commerçant, échanges commerciaux, bétail
  2139. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Gediporaung, Rathedaung, Etat Rakhine
  2140. Il a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Il pêchait dans une rivière et des membres de NaSaKa lui ont demandé de la leur faire traverser. Une fois la rivière traversée, ils l'ont amené au camp et l'ont battu prétextant qu'il n'avait pas le droit de pêcher dans cette rivière. Il a été emprisonné. Il a réussi à s'enfuir. Sa famille l'a rejoint un mois plus tard. Sur le portage. Il a dû faire du portage pour l'armée dans une opération militaire contre les Karennis un an avant son départ pour le Bangladesh. Il est resté six mois avec l'armée à la frontière avec la Thaïlande. Environ 3 500 porteurs avaient été recrutés pour 7 000 soldats. Il a été pris dans cinq-six combats contre les Karennis. Dans ces cas, les militaires ordonnaient aux porteurs de se coucher au sol. Lorsqu'un militaire était tué, les porteurs récupéraient son arme qu'ils remettaient par la suite aux militaires. Il n'était pas rémunéré. Il n'était pas toujours nourri. Il n'y avait pas d'abris pour dormir. Autres formes de travail forcé. NaSaKa, l'armée, la police et les autorités douanières avaient un camp à proximité de son village. Il était dès lors continuellement recruté, tout au cours de l'année, par l'une ou l'autre de ces autorités. Pour NaSaKa, il s'agissait de travailler pour le camp: installer les pointes de défense, couper l'herbe, etc. Il a travaillé en moyenne quinze jours par mois pendant dix à douze ans. La torture était fréquente. Chaque camp possédait en fait sa chambre de torture. Les ordres étaient donnés par le chef de village. Il a dû payer des taxes un nombre incalculable de fois. A une occasion, il a refusé et a été battu.
  2141. 44
  2142. Ethnie: Rohingya
  2143. Age/sexe: 60 ans, féminin
  2144. Situation familiale: Mariée, deux fils, deux brus, quatre petits-fils
  2145. Activité professionnelle: Cultivatrice -- 21 khani
  2146. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Eindaung, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 500 familles)
  2147. Elle a quitté le Myanmar au début de 1998 puisqu'elle ne pouvait plus tolérer la torture perpétrée par les forces de l'ordre. Pas moins de 100 familles auraient quitté le Myanmar pour venir au Bangladesh. Les militaires auraient saisi une grande partie de ses terres (14/21 khani), ne leur laissant pas assez de terres pour pouvoir subvenir à leurs besoins. Sur le travail forcé. 1) Portage. Tous les hommes adultes devaient le faire. Il s'agissait de porter les marchandises d'un camp à l'autre pour les militaires quatre jours par mois. Jamais rémunéré. 2) Travail pour les camps. Ils devaient travailler pour les familles des militaires: laver leurs vêtements, apporter l'eau, couper l'herbe. Son fils et son petit-fils ont été tués par NaSaKa puisqu'ils étaient soupçonnés d'être des informateurs pour les internationaux, notamment le HCR. Elle n'a jamais reçu le corps de son fils. Les ordres étaient généralement donnés par le chef de village. Les militaires venaient parfois directement aux maisons pour recruter les hommes. La torture était courante. Ces pratiques ont commencé avec l'arrivée des militaires, sept ans auparavant. Tout refus pouvait être puni par un passage à tabac. Les militaires utilisaient un fer rouge pour torturer (ou brûlaient le menton avec un briquet). Si une famille ne fournissait pas ce que NaSaKa requérait, les femmes faisaient alors l'objet de menaces.
  2148. 45
  2149. Ethnie: Rohingya
  2150. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2151. Situation familiale: Marié, un fils, deux filles
  2152. Activité professionnelle: Cultivateur
  2153. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Fatur Kila, Sittway (Akyab), Etat Rakhine (village d'environ 1 200 maisons)
  2154. Il a quitté le Myanmar au début de 1997 puisque la vie y était rendue intolérable. Trois ans auparavant, son village avait fait l'objet d'une relocalisation à Maungdaw. Le gouvernement avait alors distribué un nombre insuffisant de terres pour les 1 200 familles de son village. Il était devenu impossible de survivre. Sur le travail forcé .Il a dû exécuter du travail forcé à Kawalaung et à Maungdaw. Dans le premier cas, il n'y avait pas de camp NaSaKa. Seuls les militaires et la police étaient présents. Ses terres auraient été saisies par les autorités afin de les distribuer aux Rakhines. Il devait les aider à les cultiver. Il a dû travailler à la construction de routes pendant six ans. A Maungdaw, il a dû travailler à la construction de route et dans les camps militaires (nettoyage, coupage de l'herbe, installation de drainage). Il a fait ces travaux en moyenne quatre fois par semaine. L'ordre venait des militaires qui le transmettaient par l'intermédiaire du chef de village, suivant leurs besoins. Il n'y avait pas d'horaire véritable. Les passages à tabac étaient fréquents. Les repos n'étaient pas tolérés. Il a été battu personnellement trois-quatre fois par NaSaKa. Il a vu plusieurs personnes être battues. Certaines seraient décédées. Taxes. Il devait payer des taxes à NaSaKa. Le montant pouvait varier. Approximativement: 1 000 kyats. Il devait travailler à titre de travailleur journalier pour pouvoir ramasser l'argent nécessaire pour payer ces taxes. Le refus de payer pouvait entraîner la torture. Il y avait en fait, dans le camp NaSaKa, une chambre de torture. Un carcan était utilisé. Les jambes étaient enchaînées et les bras immobilisés. La personne ne pouvait plus bouger.
  2155. 44
  2156. Ethnie: Rohingya
  2157. Age/sexe: 40 ans, féminin
  2158. Situation familiale: Mariée, quatre fils, deux filles
  2159. Activité professionnelle: Cultivatrice (légumes et riz) (pouvait dès lors bénéficier de deux saisons de récoltes. 10 khani)
  2160. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kulung, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 200 familles)
  2161. Le gouvernement aurait saisi 50 pour cent de leurs terres. Ce processus aurait commencé six ans auparavant. La famille a dû quitter le Myanmar puisqu'elle n'était plus en mesure avec les terres restantes de produire le riz suffisant pour se nourrir ou pour payer les taxes au gouvernement. Sur le travail forcé. Le travail forcé est courant. Les Rohingyas devaient construire les maisons, porter les bagages, fournir les bâtons de bois et aider les Rakhines. Ils devaient également monter la garde le long de la frontière. Trois jours par semaine en moyenne au cours des six dernières années étaient perdus pour exécuter ce travail. Le nombre de jours pouvait parfois atteindre 10-20. Les ordres étaient donnés par le chef de village. Tout refus pouvait entraîner un passage à tabac. Son mari a été battu par NaSaKa (coups de bâtons sur les genoux et sur les coudes. Il n'a pu travailler par la suite). Raison: il était absent puisqu'il avait été requis sur un autre site de travail. Elle a vu d'autres hommes battus par NaSaKa (coups sur la tête, cheveux coupés). Les jeunes femmes qui plaisaient aux militaires étaient amenées au camp. Elle a personnellement été amenée au camp où elle a passé quatre nuits. Elle n'a pas fait l'objet d'abus sexuels. Elle a toutefois été battue puisqu'étant malade, elle a refusé d'aller travailler dans les champs. Après avoir versé un pot-de-vin à NaSaKa, elle a pu retourner chez elle. Depuis les six dernières années (c'est-à-dire depuis la construction du nouveau camp), elle doit payer un montant d'environ 50 kyats par mois à NaSaKa. Si les villageois n'étaient pas en mesure de payer, ils étaient arrêtés et détenus dans le camp, ce qui s'est produit à de nombreuses reprises dans son village.
  2162. 47
  2163. Ethnie: Rohingya
  2164. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2165. Situation familiale: Marié, trois fils, une fille
  2166. Activité professionnelle: Cultivateur -- 8 khani
  2167. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Hiderya, Maungdaw, Etat Rakhine (village d'environ 50 familles)
  2168. Il a dû quitter le Myanmar à la fin de 1997 avec 50 autres familles puisqu'il ne réussissait plus à subvenir aux besoins de sa famille, le gouvernement ayant saisi, une année auparavant, ses terres. Il a dû travailler à titre de journalier. Sur le travail forcé. Il a dû travailler aux camps militaires et couper le bois. Il pouvait travailler pendant un mois sans interruption. Cette assignation pouvait se répéter en moyenne à quatre reprises par année. Il n'était pas rémunéré. Les ordres étaient donnés par le chef de village. Les personnes qui refusaient de travailler étaient amenées dans une salle de torture au camp militaire. Elles étaient généralement battues. Il a été personnellement torturé vingt jours avant son arrivée au Bangladesh. Ses jambes et ses bras avaient été fixés à une pièce de bois. Il a été maintenu dans cette position pendant deux jours. Il a dû payer, pendant les six dernières années, 200 kyats à NaSaKa. Le montant pouvait varier. Tout refus pouvait être puni par un passage à tabac ou des actes de torture.
  2169. 48
  2170. Ethnie: Rohingya
  2171. Age/sexe: 22 ans, féminin
  2172. Situation familiale: Mariée, un fils, une fille
  2173. Activité professionnelle: Pêcheur
  2174. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Borosola, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 3 000 personnes)
  2175. Elle a quitté le Myanmar en raison du travail forcé et des abus qui y étaient perpétrés par les autorités. Elle était accompagnée par 20 autres familles provenant toutes de son village. Cinquante-soixante familles de son village seraient arrivées deux mois auparavant. Sur le travail forcé. Elle a dû exécuter du travail forcé: 1) construction et réparation au camp; 2) construction de maisons rakhines; 3) portage; 4) couper le bois. Elle a dû le faire depuis les six dernières année, quinze jours par mois. Elle était non rémunérée. Elle ne recevait pas de nourriture. L'ordre était donné par le chef de village. Les ordres étaient transmis par le chef de village. Tout refus pouvait entraîner un passage à tabac par NaSaKa. Son mari aurait été battu à plusieurs reprises par NaSaKa, puisqu'il refusait d'obéir aux ordres transmis. Il aurait été blessé gravement au dos. Elle connaît plusieurs autres personnes qui auraient été battues. Elle aurait personnellement été menacée par NaSaKa lorsqu'elle a refusé de donner son poulet. Elle a dû payer des taxes à NaSaKa: 100 kyats par mois pendant six ans. Le montant a augmenté avec les années (au début, aux environs de 50 kyats). Elle a dû aussi donné une partie de ses possessions (poulets ou autres choses, etc).
  2176. 49
  2177. Ethnie: Rohingya
  2178. Age/sexe: 25 ans, masculin
  2179. Situation familiale: Marié, deux filles
  2180. Activité professionnelle: Commerçant
  2181. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Fatur Kila, Sittway (Akyab), Etat Rakhine
  2182. Il a quitté le Myanmar en 1997 avec 100 autres familles de son village. Il y avait auparavant dans ce village 1 200 familles. Toutes ces familles seraient parties au cours des dernières années. Le gouvernement les aurait transférées à Maungdaw. Il aurait été transféré à nouveau à son village huit mois plus tard avec environ 275 autres familles pour aider aux constructions militaires. Il s'est ensuite rendu à Bauthidaug (collines). Il y est resté cinq jours. Il aurait fait du travail forcé pour les militaires après son transfert à Maungdaw. Il devait notamment transporter l'eau, faire les réparations nécessaires au camp, couper les bâtons de bois pour la construction et les réparations, porter d'un camp à l'autre. Il a dû travailler pour le camp 10 à 15 fois par mois. Il a dû faire le même genre de travail, le même nombre de fois par mois (10 à 15 fois par mois), lorsqu'il est retourné dans son village. Le travail était pour NaSaKa et la police. A Bathedaung, il a dû faire du travail pour NaSaKa. Il s'agissait principalement de couper du bois. Il a dû faire ce type de travail pour la dernière fois quatre jours avant son arrivée au Bangladesh. Il avait un petit revenu à Maungdaw en vendant du bois. Il a été battu à deux reprises puisqu'il n'était pas en mesure de porter la charge qui lui avait été assignée (une table). Il a désormais des douleurs au bas du dos qui seraient le résultat des charges qu'il a eu à transporter.
  2183. 50
  2184. Ethnie: Rohingya
  2185. Age/sexe: 22 ans, masculin
  2186. Situation familiale: Mère, père, trois frères plus âgés (leurs femmes et leurs enfants)
  2187. Activité professionnelle: Etudiant (paysan)
  2188. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Taungpyo, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 800 familles)
  2189. Ne pouvant plus supporter les injures et les coups qu'il recevait de NaSaKa, le témoin a quitté le Myanmar en 1992. Il a été pris comme porteur par NaSaKa pour la première fois lorsqu'il avait environ 13 ans. Il revenait de l'école vers 16 heures et NaSaKa l'a enlevé sous la menace d'un fusil. Il a dit qu'il était écolier mais ils l'ont battu et lui ont déclaré qu'ils ne le croyaient pas. Il a dû transporter des armes et de la nourriture sur une distance de 12 miles. NaSaKa brutalise les porteurs et ne leur donne pas assez à manger (une seule cuillerée, et seulement du riz ou du curry, mais jamais les deux à la fois). Ils étaient entre 200 à 300 porteurs. Les autres membres de sa famille ont aussi dû effectuer du travail forcé (son père et ses deux frères plus âgés). Une fois, ils ont dû creuser des fossés au camp NaSaKa. Ils ont aussi été contraints de cultiver la terre pour NaSaKa. Une personne de chaque famille y était astreinte une journée à la fois. En général, ils devaient faire douze jours de travail forcé par mois. Si les villageois travaillaient lentement lorsqu'ils étaient fatigués, NaSaKa les appelait "sales indiens" et les battait. Ils étaient battus avec des tiges de bambou qui leur entamaient la peau comme une lame de couteau. Une fois, son petit doigt a été brisé par les coups. Tout le village devait faire le même type de travail forcé; les villageois devaient aussi donner des provisions telles que poulets, chèvres, noix de coco et piments au camp NaSaKa. Après son arrivée au Bangladesh, d'autres familles de son village l'y ont rejoint; ils sont maintenant dans des camps. Un ou deux seulement sont rentrés au pays.
  2190. 51
  2191. Ethnie: Rohingya
  2192. Age/sexe: 25 ans, masculin
  2193. Situation familiale: 20 personnes, comprenant mère, père, frères, soeurs et leurs familles (il est le plus jeune de ses frères et soeurs)
  2194. Activité professionnelle: Culture de la terre et pêche
  2195. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Taungpyo, Maungdaw, Etat Rakhine
  2196. Il a quitté le Myanmar en 1992. NaSaKa les a forcés à travailler, notamment pour la construction de routes et le nettoyage du camp. Parfois, NaSaKa leur créait volontairement du travail en salissant le camp juste quand ils venaient de le nettoyer. Lorsque les militaires de NaSaKa partaient en patrouille, ils emmenaient les étudiants rohingyas avec eux comme porteurs (mais pas les étudiants rakhines). Il a été emmené très souvent, parfois pour un seul jour, mais parfois pour trois à quatre jours d'affilée. NaSaKa prenait ces étudiants comme porteurs parce que, lorsque ses militaires partaient en patrouille, les villageois travaillaient dans les champs et avaient donc déserté le village, si bien qu'il était plus facile de trouver des étudiants et des écoliers. Les hommes de NaSaKa partaient en général par groupes de 25 à 35 et ils emmenaient un nombre équivalent d'étudiants. Ces étudiants étaient nourris et, s'ils obéissaient aux ordres ils n'étaient pas maltraités mais, s'ils discutaient ou s'ils n'étaient pas capables de faire ce qui leur était ordonné, les soldats les brutalisaient. Lui-même n'a jamais été battu, mais il en a vu d'autres recevoir des coups. Si les Rohingyas faisaient leur prière ou tout autre devoir religieux, NaSaKa n'aimait pas ça et essayait de les en empêcher. Ils devaient également se rendre dans la forêt et couper du bois de construction. Il a dû faire cela très souvent lorsqu'il était étudiant. Ses frères plus jeunes et plus âgés ont dû, eux aussi, effectuer du travail forcé, mais l'on n'en parlait pas dans sa famille parce qu'ils venaient d'une famille aristocratique. Il sait que d'autres membres de son village ont dû faire toutes sortes de travail forcé mais n'en a pas été témoin lui-même. NaSaKa ne se souciait pas de donner des ordres par écrit ou d'informer le chef de village; NaSaKa se saisissait tout simplement des personnes dont elle avait besoin. Il sait que certaines personnes sont mortes alors qu'elles effectuaient du travail forcé. Il connaît le cas d'un jeune homme de 16 à 17 ans qui, n'ayant pas pu transporter un tronc d'arbre comme on le lui en avait donné l'ordre, est tombé et a été frappé à mort par NaSaKa. Il a lui-même vu son cadavre. Le travail forcé était une lourde charge pour la population parce que cela signifiait qu'ils ne pouvaient pas travailler pour gagner leur vie. Ils devaient également payer des taxes à NaSaKa -- 25 tin par acre de terre (qui ne donne qu'une seule récolte de riz par an). Ils avaient également reçu des ordres des camps NaSaKa de donner de l'argent ou de la nourriture. Ces taxes n'étaient perçues que sur les Musulmans, par sur les Rakhines. A la fin de sa huitième année d'école, il a déménagé à Maungdaw (il avait alors 18 ou 19 ans) et y a séjourné avec son frère. Il a réussi à éviter le travail forcé lorsqu'ils étaient à Maungdaw en s'enfuyant lorsque les troupes étaient venues réquisitionner de force la population. Lorsqu'il se trouvait à Maungdaw, on a prétendu que certains étudiants musulmans (lui y compris) appartenaient au RSO, alors que cela était faux. C'est la raison pour laquelle il a fui au Bangladesh.
  2197. 52
  2198. Ethnie: Rohingya
  2199. Age/sexe: 21 ans, masculin
  2200. Activité professionnelle: Commerçant
  2201. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Taungpyo, Maungdaw, Etat Rakhine
  2202. Le témoin a quitté le Myanmar en 1990. Il était commerçant et possédait une boutique relativement grande et une bonne clientèle. Sa boutique se trouvait dans le marché, et NaSaKa avait l'habitude de venir acheter des marchandises au marché et de le forcer à transporter ces marchandises jusqu'à leur camp, si bien qu'il perdait des affaires parce qu'il devait fermer sa boutique pour effectuer ce transport. Il ne pouvait y échapper car, en tant que commerçant, il devait rester au marché, alors que les autres personnes fuyaient dès que NaSaKa venait au marché pour éviter d'être pris comme porteurs; NaSaKa ne lui permettait pas d'essayer de trouver des remplaçants qu'il aurait pu engager pour aller à sa place. Il devait normalement transporter ces marchandises au camp NaSaKa à environ 16 heures et, si le camp était proche, il pouvait revenir le même jour. Parfois, on l'empêchait de partir après qu'il ait transporté les marchandises au camp et il était forcé de rester au camp pendant près de quatre jours. Une fois, il avait essayé de demander à NaSaKa de trouver quelqu'un d'autre pour faire le porteur, étant donné qu'il avait une boutique, mais l'un d'entre eux lui avait lancé un couteau qui l'avait coupé au genou. D'autres fois, il était battu et brutalisé mais n'avait jamais été victime de blessures durables. Il avait aussi été pris comme porteur lorsqu'il voyageait sur la route.
  2203. 53
  2204. Ethnie: Rohingya
  2205. Age/sexe: 20 ans, masculin
  2206. Situation familiale: Neuf personnes (comprenant mère, père, jeune soeur, jeune frère, épouse et enfants)
  2207. Activité professionnelle: Travailleur occasionnel, ramassage de bois de chauffage et de bambou pour la vente et la culture de ses 8 khani (3 acres) de terre
  2208. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chin Taung, Buthidaung, Etat Rakhine (le village comptait 8 000 familles)
  2209. Le témoin a quitté le Myanmar à la fin de 1997 avec les neuf membres de sa famille et beaucoup d'autres membres de son village. Cinq cent autres familles de son village sont arrivées au Bangladesh au cours des deux dernières années. A Chin Taung, les habitants du village ne pouvaient pas vaquer à leurs occupations à cause du travail forcé. Parfois, ils devaient faire de douze à quatorze jours de travail forcé d'affilée et ils devaient se nourrir eux-mêmes; parfois, ils n'avaient pas assez de nourriture pour toute la durée du travail forcé et devaient rester sans manger. Parfois, ils n'avaient que cinq jours d'intervalle avant d'être de nouveau appelés à effectuer du travail forcé. Ils devaient faire entre quinze à dix-huit jours de travail forcé par mois, si bien qu'ils n'avaient plus le temps de gagner leur vie. Parfois, NaSaKa volait la nourriture que les villageois avaient prise avec eux soit pour la manger ou pour la jeter afin de créer des problèmes à ces gens. Il a été battu à de nombreuses occasions, parfois sans aucune raison particulière; une fois, le soldat qui l'avait roué de coups de poing dans la poitrine portait une bague. Il devait également verser une taxe de 50 kyats et de 20 poulets par quinzaine mais il était incapable, en général, de payer ces 50 kyats. Lorsque tel était le cas, la punition était le pilori bloquant la tête, les bras et les jambes. Cela ne lui est jamais arrivé à lui mais son frère y a été condamné à deux reprises pendant près de huit heures à chaque fois. Seuls les Rohingyas étaient astreints à l'impôt et au travail forcé. Il a voulu partir au village de Olafe (à cause de la charge excessive de la taxe et du travail forcé qui leur étaient imposés à Chin Taung), mais pour cela il devait obtenir la permission du président du LORC du village, ce qui signifiait d'avoir à lui verser 500 kyats. Il n'avait pas assez d'argent et il est donc parti dans ce village sans permission. Huit jours après son arrivée à Olafe, il a été arrêté puis battu par le président du LORC pour ne pas avoir obtenu cette permission et il a dû payer 1 000 kyats. Cinq jours avant sa fuite au Bangladesh, il avait dû effectuer dix-sept nuits de travail forcé pour le transport de sacs de riz pour les militaires. A son retour chez lui, il n'avait plus de nourriture, si bien qu'il a vendu sa vache pour 6 000 kyats (dont 1 000 kyats ont été prélevés par NaSaKa à titre d'impôt) et il a quitté le pays.
  2210. 54
  2211. Ethnie: Rohingya
  2212. Age/sexe: 27 ans, féminin
  2213. Situation familiale: Sept personnes (le mari plus cinq enfants)
  2214. Activité professionnelle: La famille cultivait une terre lui appartenant
  2215. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Khandong, Buthidaung, Etat Rakhine (le village comptait 900 familles)
  2216. Le témoin a quitté le Myanmar en 1997 il y a neuf mois avec les membres de sa famille; ils avaient déjà fui du même village vers le Bangladesh en 1992 mais y étaient retournés. Quinze jours avant sa fuite, un ministre du SLORC arriva dans le village par hélicoptère et annonça qu'une pagode allait être construite dans le village. Plus tard, d'autres hauts responsables du SLORC se rendirent au village et annoncèrent que 60 familles devaient quitter les lieux pour faire place à cette pagode et qu'elles devaient être parties dans les quinze jours. Une autre zone plus vaste encore (300 familles) devait être libérée dans les trois mois. Puisqu'il y avait une pagode, cette zone serait donnée à des Rakhines car les responsables du SLORC voulaient faire de ce village un village bouddhiste. Les gens de son village étaient contraints à du travail forcé. Des groupes de 20 à 40 personnes étaient emmenés pour des périodes pouvant aller de sept jours à trois mois. Ils devaient construire des routes, débroussailler la jungle, niveler le sol. Ce travail forcé était imposé chaque mois; son fils de 12 ans y était également astreint. Ces pratiques se sont poursuivies depuis sa première fuite au Bangladesh. La seule chose qui avait changé après son retour au Myanmar était que les gens devaient aussi effectuer du portage pour les patrouilles NaSaKa ainsi que d'autres types de travail forcé. Ils devaient faire sept jours de travail forcé à chaque fois avec un intervalle de sept jours de repos, mais le travail forcé durait souvent plus de sept jours et pouvait aller jusqu'à un mois. Seuls les Rohingyas étaient astreints à ce travail forcé. A son retour au Myanmar, en 1995, l'impôt et le travail se poursuivaient mais la durée du travail forcé avait augmenté, allant jusqu'à quatorze jours d'affilée au lieu de trois jours auparavant. L'impôt qui devait être payé était proportionnel à la récolte de riz. Il fallait également payer des taxes pour rénover sa maison ou pour chaque bête qui naissait ou chaque vente de bétail (700 à 1 000 kyats); un jour, la maison de son beau-frère a brûlé et il a dû payer un impôt à NaSaKa pour avoir le droit de la reconstruire. Elle connaît un homme qui a été tué pendant qu'il effectuait du travail forcé. Il était parti pour sept jours de travail forcé et a été tué parce qu'il travaillait trop lentement. Prié de nettoyer la cour, il s'était mis au travail lentement et avait essayé de refuser de faire ce travail. Battu à coups de bâton, un coup l'a frappé au-dessus de l'oreille et il en est mort. Il avait 30 ans. Le corps n'a pas été rendu. Elle connaît également un autre villageois dont la hanche a été fracturée. Elle a également entendu dire que huit personnes avaient été tuées dans un autre village, mais comme les Musulmans n'avaient pas l'autorisation de voyager (en particulier les femmes) les gens de son village n'avaient pas assisté à cette tuerie mais ils avaient trouvé un corps dans un canal. Elle s'insurge contre les déclarations du HCR selon lesquelles la situation se serait améliorée; or, à leur retour au pays, quinze jours ne s'étaient pas passés avant qu'ils ne soient contraints d'effectuer de nouveau du travail forcé. Elle n'a pas trouvé que la situation se soit améliorée.
  2217. 55
  2218. Ethnie: Bengali
  2219. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2220. Activité professionnelle: Journaliste pour un journal d'Ajker Kagoj, depuis 1990
  2221. Ce ressortissant du Bangladesh se rend fréquemment au Myanmar (mais pas en qualité de journaliste puisque les journalistes étrangers ne sont pas admis dans le pays). Il a déclaré qu'actuellement les autorités du Myanmar accusent le RSO d'utiliser la région frontalière du Bangladesh comme base de lancement d'attaques transfrontalières contre NaSaKa. A son avis, cette accusation est fondée. NaSaKa recrute maintenant de force les villageois pour garder la frontière la nuit afin d'éviter que les membres du RSO ne la franchissent. Il a été témoin lui-même de ceci dans les villages du Myanmar. Les villageois du Myanmar sont également forcés de donner 40 kg de riz par hectare comme impôt quelle que soit la récolte faite sur la terre considérée (si tant est qu'il y ait une récolte). Il a rassemblé de nombreuses informations sur des cas d'oppression et de travail forcé et, à son avis, la situation ne s'est pas améliorée depuis la dernière vague de départs en 1991-92; elle se serait même aggravée. Il a vu des Rohingyas être traités comme des animaux par les autorités. Il a vu des Rohingyas effectuer du travail forcé comme porteurs pour NaSaKa; il a constaté tout cela très souvent lorsqu'il s'est rendu au Myanmar. Comme de plus en plus de gens quittent la région ou le pays, le travail forcé exigé de ceux qui restent ne cesse de croître, ce qui explique pourquoi la situation n'a fait qu'empirer. De jeunes Rohingyas sont maintenant accusés d'être des RSO et ils doivent fuir. Il a également eu la preuve des mauvais traitements infligés aux Rohingyas par les traces d'ecchymoses et de blessures. Il estime que le nombre de Rohingyas qui sont arrivés au Bangladesh depuis 1978 est d'au moins 1,5 million, dont au moins 25 000 la dernière année. A son avis, on devrait bientôt assister à une nouvelle grande vague d'émigration. En effet, l'activité des forces RSO semble avoir augmenté au cours des deux derniers mois. En général, cela se traduit toujours par des représailles exercées par NaSaKa contre la population civile rohingya, ce qui force celle-ci à fuir. C'est ce qui est arrivé avant la vague d'émigration de 1991-92. Il est au courant du fait que, dans les projets HCR de Bawli Bazar et de Shahad Bazar, au nord de Maungdaw, les gens qui travaillent sur ces projets sont censés être payés mais, en fait, le HCR paie NaSaKa qui exécute le projet sans verser de salaire aux Rohingyas.
  2222. 56
  2223. Ethnie: Rohingya
  2224. Age/sexe: 19 ans, féminin
  2225. Activité professionnelle: Sa famille cultivait la terre (légumes et bétel)
  2226. Domicile (avant de quitter le Myanmar: Dub Ru Chaung (300 familles), Buthidaung, Etat Rakhine
  2227. Déjà réfugiée en 1991-92, elle a été rapatriée et est revenue dans son village, mais le travail forcé n'a pas diminué. Elle est revenue une fois de plus au Myanmar au début de 1998. Le travail forcé pouvait durer de un mois à six semaines à chaque fois, si bien qu'ils n'avaient plus la possibilité de gagner leur vie. Ils devaient défricher la jungle, couper des bambous pour la construction, nettoyer les latrines et travailler dans les rizières de NaSaKa. Toutes les familles étaient astreintes à ce travail, mais seulement les familles Rohingyas. Après son rapatriement, son mari allait souvent dans la forêt pour ramasser du bois pour la vente. Un jour, alors qu'il était occupé à cela au lieu du travail forcé qu'il devait accomplir, il a été pris et battu par NaSaKa, ce qui lui a valu une blessure à la jambe. A partir de là, il a commencé à se plaindre amèrement du pays et a déclaré qu'il voulait le quitter. Ceci a été rapporté aux services secrets militaires qui l'ont accusé de contrebande et il a dû s'enfuir. Les travailleurs étaient raflés sur la route ou sur les marchés; parfois, des ordres étaient donnés au chef du village, parfois les gens étaient pris directement chez eux; parfois, des jeunes filles étaient enlevées dans la rue pour être amenées au camp militaire. Elle connaît le cas de quatre jeunes filles de son village qui ont été violées de cette manière (ceci après son rapatriement). Des taxes sont prélevées sous forme d'argent ou de riz et ne sont imposées qu'aux seuls Rohingyas.
  2228. 57
  2229. Ethnie: Rakhine, bouddhiste
  2230. Sexe: Masculin
  2231. Situation familiale: Marié avec deux enfants aux Etats-Unis et un en Australie
  2232. Activité professionnelle: Lieutenant-colonel à la retraite
  2233. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pas applicable.
  2234. Le témoin a effectué toute sa carrière dans les forces militaires du Bangladesh et a fait trois guerres (deuxième guerre mondiale, conflit indo-pakistanais de 1947, guerre d'indépendance du Bangladesh de 1971). Ce témoin n'a jamais été au Myanmar car les gens là-bas considèrent qu'il est l'un des leurs et qu'il aurait dû servir dans les forces armées du Myanmar plutôt que dans celles du Bangladesh. Depuis que la rive du fleuve du côté du Bangladesh est fermée, la plupart des gens pêchent du côté du Myanmar et les pêcheurs viennent au Bangladesh pour vendre leurs poissons. Les contrôles frontaliers ne sont pas très stricts.
  2235. 58
  2236. Ethnie: Rohingya
  2237. Age/sexe: 27 ans, masculin
  2238. Situation familiale: Marié, deux enfants. A trois frères et deux soeurs
  2239. Education: Deuxième primaire
  2240. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2241. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sabbi Taung, Buthidaung, Etat Rakhine
  2242. Le témoin a quitté Buthidaung pour le Bangladesh en juillet 1992, a été rapatrié en 1996 et est revenu au Bangladesh au début de 1997. Construction et entretien des camps. Après son rapatriement en 1996, le témoin a dû faire différents types de travail forcé pour les forces armées dans la circonscription de Buthidaung: fabriquer des clôtures pour les quartiers militaires, construire des baraques, creuser la terre, aller chercher du bois pour le feu. Il n'était pas payé et devait même apporter sa propre nourriture. Ce travail lui était imposé trois à quatre fois par mois, parfois pendant une semaine à la fois, parfois pendant quatre à cinq jours. Le chef du village de Sabbi Taung recevait un ordre écrit du cantonnement militaire qu'il transmettait au témoin; si le chef du village s'abstenait d'envoyer ce témoin, il devait y aller lui-même. Sabbi Taung comptait près de 350 familles, et le chef de village demandait une personne par famille pour effectuer le travail forcé. Toute femme qui n'avait pas de mari devait, en principe, y aller elle-même, mais elle pouvait payer une autre personne pour y aller à sa place. Il a vu lui-même des femmes effectuer du travail forcé. Quant aux enfants, les militaires s'abstenaient de les prendre trop jeunes (au-dessous de 10 ans) parce qu'ils ne pouvaient pas travailler. Naikangtaung était le camp principal. Les travailleurs forcés provenant de divers villages y étaient rassemblés et répartis où on avait besoin d'eux. Le témoin a dû marcher plus de 10 miles depuis Sabbi Taung jusqu'à Naikangtaung et, le cas échéant, depuis Naikangtaung jusqu'à Sindi Prang ou Poimali, c'est-à-dire 6 à 7 miles supplémentaires. Il devait dormir sur place et apporter ses rations alimentaires. Après le rapatriement du témoin en 1996, le HCR a fourni de la nourriture (rations de riz) pour la construction d'une réserve d'eau potable pour le village de Sabbi Taung. A la demande du HCR, le chef de village a sollicité des volontaires. Si quelqu'un ne voulait pas effectuer ce travail, il n'y allait pas. Lui-même a fait office de sous-traitant. Les quarante personnes qui ont travaillé à la construction de cette réserve pendant quinze jours ont reçu un certain nombre de sacs de riz à se répartir entre elles. Il a travaillé sur ce projet pendant vingt jours mais a dû quitter ce travail pour aller faire du travail forcé exigé par les autorités. Il a dû faire ce travail forcé à deux reprises, une fois pendant quatre jours, une fois pendant cinq jours. Ceci s'est passé quinze jours après son rapatriement. Portage. Le témoin a dû également faire du portage pour les soldats en patrouille. En une occasion, avant son exil de 1992, cette obligation de portage a duré deux mois d'affilée. Après son rapatriement, il a dû faire du portage à deux reprises pendant dix jours chaque fois. Avant son exil de 1992, il a été blessé (il montre une cicatrice au-dessous du genou) lorsqu'il transportait de lourdes charges près d'un trou dans lequel il est tombé. Les blessures causées par cette chute (et non pas par des coups) ont mis très longtemps à cicatriser. Il n'a reçu aucun traitement médical. Le témoin a vu des travailleurs forcés brutalisés par les soldats: s'ils ne pouvaient pas obéir aux ordres en temps voulu, s'ils ne comprenaient pas la langue dans laquelle était donné un ordre, s'ils prenaient trop de temps pour leur repas ou s'ils étaient incapables de transporter les bagages des soldats (qui ne se souciaient pas de leur poids). En outre, quiconque ne répondait pas à l'appel du chef de village pour effectuer du travail forcé était signalé aux militaires qui l'arrêtaient et le rouaient de coups. Après son rapatriement, le témoin a vu des gens de son village être battus par les soldats dans une vingtaine de cas. Il sait que, parfois, des gens ont été tués à coups de fusil, mais il n'a pas assisté lui-même à ces exécutions bien qu'il ait vu, avant 1992, un homme de 30 à 35 ans de son village, dont il ne se souvient pas du nom, être battu si durement qu'il en est mort. Il n'a assisté à aucun cas de viol des femmes de son village. Dans d'autres villages, où les hommes ont fui lorsque les soldats sont venus chercher des travailleurs, ces soldats ont emmené les femmes dans leur camp. Cela, il l'a entendu dire par des villageois du village de Poimali avant 1992. Construction de routes. En 1996 (avant son rapatriement et sa seconde fuite), à part les travaux effectués dans les camps militaires, le témoin n'a pas dû travailler à la construction de routes mais, avant qu'il ne quitte le pays en 1992, il a dû travailler à la construction de la route de Buthidaung à Sittway (Akyab). Lorsqu'il a été rapatrié, le témoin avait laissé un frère au Bangladesh. Il a alors été appelé par les soldats du Myanmar qui lui ont dit que son frère travaillait pour la RSO et qui l'ont menacé. Il a tenu à ajouter que, lors de son rapatriement, le HCR lui avait dit qu'il y avait la paix au Myanmar et qu'aucun travail forcé n'était plus demandé. Après son rapatriement, il a pu constater que le travail forcé était toujours en vigueur. Y avait-il moins de travail forcé après son rapatriement qu'avant 1992? Avant cette date, le travail forcé consistait en du portage sur de longues distances et pendant de longues durées; après son rapatriement, le travail forcé existait encore mais surtout dans les camps militaires et pas sur de longues distances.
  2243. 59
  2244. Ethnie: Rohingya
  2245. Age/sexe: 45 ans, masculin
  2246. Situation familiale: Marié, quatre enfants. A deux frères et soeurs
  2247. Activité professionnelle: Vend son travail
  2248. Domicile (avant de quitter le Myanmar: Perella, Buthidaung, Etat Rakhine
  2249. Le témoin est arrivé au Bangladesh pour la première fois en 1992 et a été rapatrié la même année. Il est revenu au Bangladesh au début de 1998, laissant sa famille au Myanmar car sa vie était devenue très difficile en raison d'exigences excessives de travail forcé et de dons. Le témoin a dû effectuer du travail forcé de nombreuses fois pour les trois camps proches de son village (deux camps militaires et un camp de police) consistant à défricher, creuser le sol, aller chercher du bois de chauffage, porter de l'eau. Il devait également donner de l'argent ("donation") réuni par le chef de village pour les forces armées. Régulièrement, il était contraint à du travail forcé une fois par mois pendant une semaine et parfois pendant dix jours. La circonscription du chef de village s'étendait sur sept villages comprenant environ 350 familles. Le village de Perella comprenait 35 familles et le chef de village appelait par roulement dix personnes à chaque fois de son village, et cela trois fois par mois (idem pour les autres villages), et répartissait ensuite cette main-d'oeuvre entre les camps. En outre, lorsque les militaires se déplaçaient d'un endroit à l'autre, ils pouvaient attraper n'importe qui et le prendre comme porteur. Le 5 janvier 1998, alors que le témoin et son frère se rendaient à Sabbi Taung pour faire des achats, son frère a été attrapé sur le chemin et a dû transporter les bagages des soldats. Il ne sait plus où et pour combien de temps. En 1997, il a travaillé pour un projet de construction de routes du HCR. Lorsqu'il a été appelé par le chef local, il a accepté volontairement ce travail pour seize jours et a reçu en retour 21 kg de riz. Mais, pendant qu'il travaillait sur la route, son tour est venu d'effectuer du travail forcé, si bien qu'il a dû envoyer un remplaçant à qui il a dû payer 150 kyats. Mauvais traitements pour avoir refusé de faire du travail forcé. Un jour, il y a deux mois ou deux mois et demi, le témoin a refusé d'effectuer du travail forcé. Lorsque le chef de village l'a appelé il lui a répondu: "Si j'y vais, mes enfants vont mourir." Son nom a donc été donné aux militaires. Il a été arrêté le soir même à minuit. Les soldats sont venus chez lui et l'ont emmené au camp de police de Jadi Taung, où il a été battu et retenu jusqu'à 3 heures de l'après-midi le lendemain. Il a été libéré lorsque sa mère a vendu ses bijoux pour donner 2 000 kyats au chef du camp en charge. Il sait qu'il n'est pas le seul à avoir eu ce genre de problème. Il n'a jamais été payé pour le travail forcé et devait apporter sa propre nourriture. Un jour, il y a un an, il est tombé malade et a failli mourir pendant qu'il effectuait du travail forcé au camp de Buthidaung -- Nakaindaung, c'est-à-dire le camp militaire principal où il devait se rendre une fois tous les deux ou trois mois à pied à 14 miles de son village. Il demeurait toujours au camp lorsqu'il devait faire du travail forcé. Lorsqu'il est tombé malade, aucun médicament ne lui a été donné. Ses amis du camp l'ont transporté dans un hôpital civil proche où on ne lui a pas non plus donné de médicaments et il a dû retourner au camp. Dans le camp, on lui a permis de se reposer en gardant les affaires des autres. Il y a quelques militaires qui étaient corrects et c'était l'un d'eux. Mauvais traitements pendant le travail forcé. Il y a sept ou huit mois, à Poimali (camp de Taraing), il a vu quelqu'un être tué d'un coup de fusil. Il existait dans le camp un système de "Mazi" (leader) pour 80 travailleurs, et les militaires faisaient l'appel trois fois par jour. Le soir, deux personnes de son groupe avaient disparu. Un soldat a alors demandé au Mazi de se reculer un peu et il l'a tué d'un coup de pistolet dans la tête (nom de la victime: Hassan du village de Poimali: 40 à 45 ans). Une autre fois, il y a trois ans, un homme de Jadi Taung, appelé Abdu Salam, a dû ramasser des bambous pour les militaires et a été battu à mort. Le témoin était avec lui. Ils ont ramené son corps. Les ordres étaient que chaque travailleur devait couper 100 pièces de bambou par jour. Abdu Salam n'avait pas pu y arriver et, quand un soldat lui a demandé pourquoi, il lui a répondu parce qu'il savait le birman et c'est pour cela qu'il a été battu à mort. Travail forcé des femmes. Si une femme chef de famille sans aucun adulte mâle dans la famille était appelée pour effectuer du travail, elle pouvait envoyer un remplaçant ou un enfant. Qu'arrivait-il si elle n'avait pas d'argent pour payer un remplaçant et n'avait que des petits-enfants? Elle pouvait demander à une veuve sans enfant d'aller chez le chef de village. C'est celui-ci qui décidait et elle devait parfois travailler pour le chef de village avec ses femmes. Travail forcé des enfants. Les jeunes garçons pouvaient être enrôlés dès l'âge de dix ans selon leur taille. Viol lié au travail forcé. Le témoin a vu une femme âgée de 30 ans, venant d'un village voisin, être violée au camp militaire de Poimali il y a sept ou huit mois. Le chef du village donne la liste de ceux qui refusent de faire du travail pour les militaires: ils vont rechercher les récalcitrants. S'ils ne trouvent pas les hommes, ils prennent les femmes pour trois à quatre nuits au camp. Cette femme avait donc été prise parce qu'ils n'avaient pas trouvé son mari. Avait-il vu les femmes travailler au côté des hommes? On ne voyait jamais les femmes dans le camp. Elles restaient enfermées à l'intérieur des bâtiments.
  2250. 60
  2251. Ethnie: Rohingya
  2252. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2253. Situation familiale: Marié avec quatre enfants. A quatre frères et quatre soeurs
  2254. Education: Deuxième primaire
  2255. Activité professionnelle: Commerçant, gère une boutique dans la ville de Maungdaw. Est venu à Teknaf avec un permis de transit, pour deux à trois jours par semaine, pour faire des achats. Puis, il retourne les vendre à Maungdaw
  2256. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Su Za, Maungdaw, Etat Rakhine (village très près de celui de Maungdaw)
  2257. Ce témoin étant commerçant, lorsqu'il était astreint au travail forcé, il envoyait une autre personne à qui il payait 200 kyats, deux à trois fois par mois. Il devait donc verser 400 kyats pour deux fois et 600 kyats pour trois fois. L'ordre de venir faire du travail forcé lui était transmis par les autorités locales. Le travail forcé était demandé pour le camp NaSaKa afin de construire des maisons et creuser le sol. S'il n'y avait rien à faire dans le camp, le témoin devait quand même envoyer un ouvrier. Il n'envoyait pas toujours le même ouvrier. D'après ce qu'il a compris, le travail forcé ne durait qu'un jour seulement. A la question qui lui a été posée de savoir pourquoi il devait faire moins de travail forcé que les témoins interviewés plus tôt le même jour, il a répondu que c'était parce qu'il venait d'une ville. Le témoin a souhaité ajouter que, dans sa ville en particulier, la police l'arrêtait souvent pour lui prendre de l'argent sans aucune raison et quelle que soit la somme qui s'y trouvait si elle constatait qu'il allait d'un village vers la ville; "les autorités se conduisaient comme des voleurs".
  2258. 61
  2259. Ethnie: Rohingya
  2260. Age/sexe: 45 ans, féminin
  2261. Situation de famille: Mariée, neuf enfants
  2262. Profession: Mère de famille
  2263. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Gariroa, près de Fatur Kila, Sittway (Akyab), Etat Rakhine
  2264. Elle est restée dans son village natal jusqu'à ce que la totalité de la population de ce village soit déplacée en différents lieux plus de deux ans auparavant. Elle est alors restée dans sa famille pendant près de six mois au village de Dhumzepera, circonscription de Rathedaung, jusqu'à ce que toute la famille parte au Bangladesh il y a un an et demi (mai 1996). Avant son déplacement forcé (il y a deux ans), le témoin a dû effectuer elle-même du travail forcé, c'est-à-dire transporter des briques pour la construction d'allées dans le camp militaire de Tunku Shai. Le chef du village en a reçu l'ordre des militaires. Il ne lui a pas demandé personnellement d'aller faire ce travail forcé mais, comme il fallait une personne par famille et que son mari était occupé, c'est elle qui a dû y aller (son mari gagne la vie de la famille avec deux chars à boeufs et quatre boeufs). Elle a dû y aller parfois deux ou trois fois par mois, parfois une fois par mois, parfois pendant sept jours d'affilée, parfois pour deux ou trois jours. Ils ne savaient pas d'avance pour combien de temps ils étaient requis. Le chef du village ne faisait que rassembler la main-d'oeuvre et les militaires décidaient. Elle a dû dormir dans le camp. Lorsque son mari était là, c'est lui qui y allait. Si quelqu'un était appelé et arrivait tard au camp, cette personne était battue par les soldats. Elle n'a pas assisté elle-même à cette punition. D'autres femmes qui ont dû effectuer du travail forcé dans le camp ont été victimes d'abus sexuels et de viols par les soldats, y compris la soeur de son mari, lorsqu'elle a été prise comme porteur pendant six à sept mois avant que le village ne soit déplacé. Elle ne connaît pas le nom ou le grade du soldat qui a violé sa belle-soeur.
  2265. Déplacement du village. Dans la zone de Fatur Kila, les Musulmans sont en minorité. Cinq villages musulmans, y compris Gariroa, ont été déplacés "sur ordre du gouvernement" il y a deux ans. Le village de Gariroa est situé près de la ville et toute la population rohingya a été déplacée, non pas pour la construction de routes ou pour des motifs analogues, mais simplement dispersée entre différents villages des circonscriptions de Maungdaw et de Rathedaung. Sa famille et quelques autres ont été envoyées à Dumsofara dans la circonscription de Rathedaung. Un jour, à trois heures de l'après-midi, sa maison a été marquée et le lendemain matin ils ont dû partir, quitter leur maison sans pouvoir s'organiser. Ils ont dû laisser leurs deux chars à boeufs et leurs quatre boeufs qui constituaient leur seul moyen d'existence. L'"autorité" est arrivée avec des fusils et des bâtons et ils ont été battus parce qu'ils étaient en retard et ont été envoyés à Buthidaung par bateau, et de là à Dumsofara par camion et à pied. On leur avait promis qu'ils auraient de la terre dans ce nouveau lieu de résidence, mais aucune terre ne leur a été donnée. Ils n'ont pas pu construire une maison mais une simple hutte "plus petite que celle-ci" et ont vécu "presque comme des mendiants". Dans ce nouvel endroit comme dans le précédent, ils n'avaient pas la permission de se rendre dans d'autres villages parce qu'ils risquaient de rentrer dans leur ancien village. Après l'élection de 1989-90, une nouvelle loi leur a interdit de bouger. Seulement les Rohingyas? Non, tout le monde.
  2266. Travail forcé (après le déplacement). Dans le nouveau village de Dumsofara aucun des Rohingyas venant de Gariroa n'a été astreint à du travail forcé dans les quelque six mois où le témoin est demeuré dans ce village alors que la population autochtone de Dhumzepera y a été contrainte. La plupart des membres de ce village étant des pêcheurs, ils ont dû pêcher pour les autorités militaires qui venaient presque tous les jours après la pêche voir ce qu'ils avaient pris et prendre tout le poisson de bonne qualité. En outre, ils devaient "tenir la maison" pour les militaires, ramasser du bois et du bambou.
  2267. 62
  2268. Ethnie: Rohingya
  2269. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2270. Situation familiale: Marié, épouse, deux fils et trois filles
  2271. Activité professionnelle: Cultivateur
  2272. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Lambabil, Buthidaung, Etat Rakhine (il y avait deux camps militaires près de son village et un camp du service d'information militaire)
  2273. Le témoin a quitté le Myanmar en 1991 en raison de la torture à laquelle il avait été soumis et du travail forcé qu'il devait exécuter. Il ne pouvait plus subvenir aux besoins de sa famille et assurer la culture de ses terres. Il a dû faire du travail forcé dès l'âge de 12 ans. Il n'y avait pas de système véritablement organisé. L'ordre venait du camp qui utilisait l'intermédiaire du chef de village qui envoyait, pour sa part, un messager afin de recruter la main-d'oeuvre nécessaire. Il devait le faire en moyenne cinq à sept fois par mois. Les assignations duraient en moyenne trois à quatre jours. Il n'y avait pas toujours d'endroits pour dormir. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il était impossible de refuser, la sanction d'un refus étant l'arrestation. Son épouse s'occupait des cultures pendant son absence. Chaque famille devait fournir un membre pour exécuter le travail. Il a dès lors été le seul dans sa famille immédiate. Il était possible de payer un substitut (ne l'a jamais fait puisqu'il n'avait pas les revenus nécessaires). Il n'était pas possible de verser des pots-de-vin aux militaires pour éviter de faire le travail. Il a dû poser des clôtures ou bambous dans les camps (pour les jardins et les animaux que les militaires y gardaient) et ramasser du bois. Il a également dû faire du portage pour les militaires, transportant leur nourriture et leurs munitions. Il n'a jamais vu de conflits armés. Il a agi à titre de porteur environ une vingtaine de fois. La durée des assignations a varié entre un et cinq jours. Même si l'ordre spécifiait un nombre donné de jours, il devait bien souvent rester plus longtemps jusqu'à ce que d'autres porteurs le remplacent. Comme les soldats s'appropriaient la nourriture trouvée dans les villages qu'ils avaient à traverser, il pouvait bénéficier des restes. Il a été battu à plusieurs reprises puisqu'il était incapable de porter les charges. Il estime que la situation n'a pas changé au Myanmar (une personne récemment arrivée le lui aurait confirmé). Au Myanmar, il devait payer une taxe de riz qui était proportionnelle aux revenus de la famille et qui avait pour fonction de nourrir les militaires. Cette taxe était inévitable.
  2274. 63 à 65
  2275. Ethnie: Rohingya
  2276. Age/sexe: Entre 25-30 ans, femme (témoin 63); 25-30 ans, femme (témoin 64); 20-25 ans, femme (témoin 65)
  2277. Situation familiale: Mariée avec cinq enfants (témoin 63); mariée avec deux enfants (témoin 64); mariée avec cinq enfants (témoin 65)
  2278. Activité professionnelle: Epoux cultivateur (témoin 63); travailleur occasionnel (témoin 64); cultivateur (témoin 65)
  2279. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Saab Bazar, Maungdaw, Etat Rakhine (témoins 63 et 64); Inn Saung, Buthidaung, Etat Rakhine (témoin 65)
  2280. Elles sont venues au Bangladesh au début de 1997 en raison du travail forcé qui les prive des moyens de subvenir à leurs besoins. Elles n'avaient pas d'autre choix que de quitter le Myanmar. La situation a en effet empiré à cet égard. Seuls les hommes sont soumis au travail forcé. Environ huit à dix fois par année. Ils devaient recueillir du bois, des tiges de bambou, construire des maisons et agir à titre de porteur entre deux villages ou deux camps. Le mari du témoin 63 a été requis à titre de porteur pendant plus d'un mois juste avant son départ pour le Bangladesh. Il a pris la décision de partir lorsque les autorités l'ont requis à nouveau pour faire du portage. Le travail n'est pas rémunéré et il n'y a aucune possibilité de refuser de l'exécuter puisque toute réticence peut entraîner tortures et passages à tabac par les militaires. Il était toujours possible d'envoyer un substitut puisque la règle d'un membre mâle par famille demeure. Les hommes exécutant le travail sont soumis à de mauvais traitements, les coups avec les armes, les poings ou les bottes étant fréquents ainsi que les passages à tabac. Pour ce qui est du traitement des femmes, dans les cas où les autorités ne réussissent pas à trouver le mari, elles menacent de prendre les femmes ou plus simplement s'approprient les avoirs et les possessions des familles. Le témoin 63 connaît des femmes qui auraient été prises par les autorités. Dans son village, le chef de village aurait été requis de fournir des femmes aux militaires. Etant lui aussi un Rohingya, il a refusé disant aux militaires de le faire eux-mêmes. Son mari lui aurait dit que des femmes auraient été prises. Des donations sont exigées par les Rakhines de la part des Rohingyas pour financer tous types d'activités (activités sociales, religieuses, pique-niques, etc.). Les Rohingyas doivent contribuer au financement de constructions. Le montant varie en fonction des occasions et des circonstances. Les hommes doivent dès lors travailler pour pouvoir avoir l'argent nécessaire pour payer ces taxes obligatoires.
  2281. 66
  2282. Ethnie: Rohingya
  2283. Age/sexe: 25 ans, féminin
  2284. Situation familiale: Mariée, quatre enfants
  2285. Activité professionnelle: Cultivateur et petit commerçant
  2286. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kachibil, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 200 familles. Il y aurait, dans son village un camp NaSaKa et, à deux miles, un camp militaire)
  2287. Elle a quitté le Myanmar avec les membres de sa famille au début de 1997. Ils ont quitté le Myanmar puisqu'ils ne pouvaient plus tolérer la situation. Ils seraient venus avec une autre famille de son village. Plus de 40 familles de son village seraient parties cette année. Sur le travail forcé. Son mari a dû exécuter du travail pour les militaires et pour NaSaKa: ramassage du bois, chercher de l'eau, tissage de cordes, construction de maisons, portage. Le mari devait s'absenter entre cinq à dix fois par mois pour faire du travail. Aucun moyen de subvenir à ses besoins lorsque le mari était absent. Il ne recevait pas d'aide de ses voisins. Son mari aurait été battu à de multiples reprises. Au moins une trentaine de fois. Il aurait même été blessé gravement à une occasion. S'il était incapable de porter les charges qui lui étaient assignées lorsqu'il était requis à titre de porteur, les passages à tabac, les coups de poings et de bottes étaient fréquents. L'ordre de faire du travail forcé provenait de NaSaKa ou des militaires qui le transmettaient par l'intermédiaire du chef de village. Ils devaient verser des montants considérables à titre de donations. Les montants variaient toutefois en fonction des circonstances, c'est-à-dire des activités des militaires, de NaSaKa ou des Rakhines. Environ 2 000 kyats. En fait, seuls les riches sont en mesure de demeurer au Myanmar puisqu'ils peuvent payer leurs donations et engager des substituts pour l'exécution du travail forcé.
  2288. 67
  2289. Ethnie: Rohingya
  2290. Age/sexe: 25 ans, féminin
  2291. Situation familiale: Mariée
  2292. Activité professionnelle: Cultivateur
  2293. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Nerebil, Maungdaw, Etat Rakhine
  2294. Elle serait venue pour la première fois avec le flux de réfugiés de 1992. Elle est retournée au Myanmar et a quitté de nouveau à la fin de 1997. Elle aurait personnellement été rapatriée il y a environ six mois (rapatriement de juillet 1997). Son mari est en prison du côté du Bangladesh. Après avoir épuisé l'allocation reçue du HCR, elle a dû revenir au Bangladesh car elle n'avait aucun moyen de subvenir aux besoins de sa famille au Myanmar. Elle n'a pas eu personnellement à faire du travail forcé. La famille a eu à payer à plusieurs reprises les militaires de manière à éviter que son beau-père ne soit forcé de travailler. Six à sept fois. Les montants variaient: 200 à 300 kyats. En fait, elle confirme que le travail forcé existe toujours au Myanmar et que tous ses proches y ont été soumis.
  2295. 68
  2296. Ethnie: Rohingya
  2297. Age/sexe: 70 ans, masculin
  2298. Situation familiale: Marié, deux fils
  2299. Activité professionnelle: Commerçant (vendait des légumes au marché)
  2300. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Naisapuru, Maungdaw, Etat Rakhine
  2301. Il a quitté le Myanmar il y a six ou sept mois puisqu'il trouvait que la situation était rendue intolérable en raison du travail forcé et des donations à verser aux autorités. S'il n'y avait pas de travail forcé et de donations, le Myanmar serait un endroit où les gens voudraient vivre. Le flux des réfugiés serait éventuellement inversé. Ses deux fils auraient eu à faire du travail forcé: construction de routes, collecte de bois et escorte pour les militaires. Il est incapable de donner des détails. Il indique que même les hommes plus âgés sont requis pour le travail forcé.
  2302. 69
  2303. Ethnie: Rohingya
  2304. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2305. Situation familiale: Marié, deux enfants
  2306. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2307. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Poimali, Buthidaung, Etat Rakhine (le village comptait 4 000 familles. Il y aurait un important camp NaSaKa dans son village)
  2308. Il est arrivé au Bangladesh au début de 1997. Il est venu avec deux familles de son village. Plusieurs autres familles auraient quitté le Myanmar et seraient venues dans la région après son départ. Il a dû quitter le Myanmar puisque la vie y était rendue tout à fait intolérable pour une famille à faible revenu. Le travail forcé et l'obligation de verser des donations empêchent les hommes de ces familles de subvenir aux besoins des leurs. Il a dû exécuter personnellement du travail forcé: collecte de bois, construction de routes. Il devait le faire en moyenne trois, quatre fois par mois. Il devait s'absenter de sa résidence un à deux jours. Il n'était pas rémunéré. Il ne pouvait pas refuser puisqu'il était menacé de torture. N'ayant jamais refusé, il n'a pas personnellement été soumis à des sévices, mais il connaît plusieurs personnes qui auraient été battues. L'ordre de faire du travail venait des militaires qui utilisaient les services du chef du village. Il devait payer des montants considérables en donation qui variaient selon les circonstances et les besoins des militaires.
  2309. 70
  2310. Ethnie: Rohingya
  2311. Age/sexe: 25 ans, féminin
  2312. Situation familiale: Mariée, deux enfants
  2313. Activité professionnelle: Cultivateur
  2314. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Thaimongkhali, Buthidaung, Etat Rakhine (il y aurait un camp NaSaKa dans son village)
  2315. Elle a quitté le Myanmar à la mi-1997. Son mari a été réquisitionné par NaSaKa pour le travail forcé environ deux mois avant son départ à elle pour le Bangladesh. Il n'est jamais revenu. Les autorités seraient revenues chez elle, lorsque son mari était absent, pour le réquisitionner à nouveau. Elles la soupçonnaient de le cacher. Ne pouvant plus tolérer la pression qui était mise sur elle, elle a quitté le Myanmar pour venir au camp. Le mari a été requis à de nombreuses reprises pour faire du travail forcé: recueillir du bois, prendre soin des animaux appartenant aux militaires, fournir l'eau, porter le matériel et les rations des militaires. Le mari était requis environ cinq à six fois/mois. Avant qu'il ne disparaisse, son époux avait été requis de travailler pendant un mois. Il s'agissait d'un travail de portage lors d'une patrouille de NaSaKa. Les hommes qui devaient exécuter du travail forcé sont soumis à un mauvais traitement. Son mari aurait reçu des coups de fusil à une occasion lorsqu'il n'était plus capable de porter la charge. Lorsque les maris sont loin, les femmes font fréquemment l'objet d'abus sexuels. Elle aurait déjà personnellement fait l'objet d'abus sexuels. L'ordre en vue de faire du travail provenait des militaires qui utilisaient les services du chef de village. Ce dernier demandait à un messager d'informer les hommes du travail qu'ils devaient exécuter. Il était obligatoire de payer les donations qui étaient requises de temps à autre par les militaires. Le montant et la fréquence dépendaient des circonstances et des besoins des militaires.
  2316. 71
  2317. Ethnie: Rohingya
  2318. Age/sexe: 70 ans, masculin
  2319. Situation familiale: Douze personnes (lui-même et sa femme, plus 10 enfants)
  2320. Activité professionnelle: Paysan
  2321. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Gong Gri, Buthidaung, Etat Rakhine (autrefois 40 familles, maintenant quatre)
  2322. Des soldats sont venus dans un village proche du sien (le village de Poimali) où ils ont pris trois étudiants pour le portage qui ne sont jamais revenus. Il craignait que la même chose arrive à ses enfants et c'est la raison pour laquelle il est venu au Bangladesh. Chaque maison de son village devait fournir au moins un travailleur forcé pour quinze jours à chaque fois. Si la famille comptait un homme suffisamment âgé pour faire du travail forcé, ils pouvaient se relayer. L'armée les a pris comme porteurs en patrouille dans la région des collines. Il y avait deux camps militaires près de son village, l'un au nord, l'autre au sud. C'étaient alors les forces d'armée qui ont pris ensuite le nom de NaSaKa. Les villageois ont dû construire ces camps (le site était choisi par les militaires et l'ordre était ensuite donné par l'intermédiaire du chef du village de construire le camp). Les premiers camps militaires ont été construits dans la région en 1962-1965; du portage a été effectué depuis 1975. Au début, c'était une fois tous les trois ou quatre mois mais, plus tard (quand il a quitté le pays), ce rythme avait augmenté pour devenir presque quotidien. Le travail forcé consistait par ailleurs à travailler au camp militaire (fabrication de clôtures et nettoyage). Les villageois devaient également fournir chaque mois des poulets pour la nourriture du camp militaire. Il avait trois fils, qui devaient aller faire du travail forcé, chacun à son tour. Pendant l'exécution de ce travail forcé, quiconque faisait une faute dans l'exécution des ordres était battu (à la main ou avec tout autre objet se trouvant à proximité). Il a vu des gens revenir blessés ou malades (l'un d'eux avait une cheville fracturée); il a entendu dire que des gens étaient morts au cours du travail forcé mais n'en a pas été témoin lui-même. Aucun argent n'était donné pour ce travail forcé, mais un peu de nourriture (une nourriture pas très bonne mais mangeable et seulement pour le travailleur, pas pour sa famille). Il a dû donner du riz comme impôt. Tout le monde devait verser cet impôt, mais les Musulmans devaient payer deux fois plus que les autres. En outre, chaque mois, des "donations" devaient être données pour l'entretien du camp militaire (environ 100 kyats par mois, mais cette somme pouvait varier). Les Rakhines n'avaient pas à verser cet argent ni à faire du travail forcé. Les gens qui ne pouvaient pas payer l'impôt étaient emprisonnés et battus, et leurs terres étaient confisquées et données à des Rakhines. Un mois avant son arrivée au Bangladesh (au cours de la saison sèche), des villageois rohingyas se sont rendus dans la jungle pour ramasser du bambou comme ils l'avaient toujours fait. Quarante-cinq personnes sont allées pour quinze jours dans la jungle et sont passées près d'un camp militaire à leur retour. Elles ont été vues par le camp et forcées de donner tout le bambou et tout le bois qu'elles avaient ramassés aux familles Rakhines. Des gens qui sont arrivés au Bangladesh après avoir été préalablement rapatriés ont déclaré que certains projets du HCR exigeaient des briques et que la responsabilité de la collecte de ces briques incombait à NaSaKa. NaSaKa avait ouvert un four et forçait les gens à ramasser du bois dans la forêt comme combustible, et cela sans rémunération, alors que des fonds leur avaient été donnés à cette fin par le HCR. Toutes les personnes qui avaient fui de nouveau après avoir été rapatriées ont déclaré qu'elles ne pouvaient pas rester une seconde en paix après leur rapatriement. Aussi avaient-elles dû fuir de nouveau.
  2323. 72
  2324. Ethnie: Rohingya
  2325. Age/sexe: 38 ans, masculin
  2326. Situation familiale: Sept personnes (lui-même et sa femme, plus cinq enfants)
  2327. Activité professionnelle: Ses parents avaient une ferme, il était commerçant
  2328. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kyein Chaung, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 800 familles)
  2329. En 1991, une nuit, il attendait (avec d'autres) au bord de la route un arrivage de riz. Un officier et quatre soldats sont arrivés et, en termes grossiers, leur ont demandé ce qu'ils faisaient étant donné que l'heure du couvre-feu était passée. Ils ont déclaré qu'ils attendaient un arrivage de riz et que les soldats devaient comprendre qu'ils devaient faire leur travail en dépit du couvre-feu. Les soldats l'ont pris comme porteur en lui attachant les poignets avec une corde afin, ont-ils dit, d'éviter qu'il ne s'échappe. Comme ils progressaient, trois autres hommes ont été pris comme porteurs et ont été attachés de la même manière. Ensuite, ils sont arrivés à une maison où brillait une lumière et les soldats ont appelé en demandant s'il y avait des hommes dans cette maison. Une voix de femme a répondu qu'il n'y avait pas d'homme, mais un soldat est allé vérifier et il a essayé de violer la femme. Il ne sait pas si le viol a eu lieu car le mari est arrivé et a essayé d'arrêter le soldat. Ce dernier a frappé l'homme trois fois sur la tête avec un bâton. Ce même soldat a menacé les porteurs qui avaient été témoins de ce qui s'était produit s'ils le disaient à quiconque. A ce moment-là, les soldats ont détaché le témoin en le menaçant de détruire sa boutique s'il s'enfuyait. Ils sont ensuite allés à une autre maison mais l'homme s'est enfui et ils ont pris deux poulets. La maison suivante était celle d'une vieille femme avec deux jeunes filles de moins de 20 ans qui étaient endormies dans des sarongs. Les soldats leur ont arraché leurs sarongs et il pense qu'ils les auraient violées s'il n'y avait pas eu autant de monde autour. Dans cette maison, il y avait un coffre contenant des habits. Les soldats ont trouvé 752 kyats dans ce coffre et ils les ont pris ainsi qu'un parapluie, un sarong et des couvertures. Dans la maison où ils se sont rendus ensuite, les soldats ont violé une femme. Dans une autre maison, ils ont battu un homme à coups de bâton. Dans la maison suivante, ils ont battu la plus jeune soeur du chef du village et, comme elle s'enfuyait vers une autre maison, ils l'ont suivie et ont frappé la vieille femme qui habitait dans cette maison. Ils ont enrôlé des porteurs cette nuit jusqu'à deux heures du matin et sont ensuite retournés au camp. Sur le chemin de retour vers le camp, un soldat lui a dit que, s'il lui achetait une bouteille d'alcool, il serait relâché. Il a acheté une bouteille de 250 kyats et a été relâché. Le lendemain matin, de nombreuses personnes étaient autour de sa boutique et demandaient ce qui s'était passé la nuit précédente, déclarant qu'elles avaient entendu des bruits. Il a attendu de voir ce qui allait se passer et quatre policiers sont arrivés demandant s'il avait eu des problèmes avec les soldats et déclarant qu'ils pensaient que les soldats reviendraient pour le prendre. C'est alors qu'il a quitté le village pour le Bangladesh. Il a eu d'autres expériences de travail forcé. Les soldats avaient l'habitude de venir à sa boutique et lui demandaient de transporter des provisions à leur camp. La première fois qu'il a dû faire du travail forcé, il avait 15 ans (il s'agissait de faire du portage pour les soldats en patrouille). Ce portage durait en général deux à trois jours à chaque fois, et parfois il devait y aller presque une fois par semaine, mais cela dépendait. Les autres villageois devaient eux aussi effectuer du travail forcé -- transport de marchandises, construction et entretien des camps militaires (les premiers de ces camps militaires ont été construits dans la région il y a longtemps, quand le gouvernement BSPP est arrivé au pouvoir). Il y avait aussi d'autres sortes de travail forcé: tout ce qui est imaginable, tel que le creusement de fossés de drainage, la construction de routes, le déminage des routes et toutes sortes de travaux associés à l'entretien des camps militaires. Les gens sont maintenant astreints à du travail forcé pendant quinze jours à un mois à chaque fois alors qu'avant 1988 il ne s'agissait que d'un jour par semaine. Au cours des deux dernières années, ce sont au moins 100 personnes de son village qui sont contraintes à chaque fois de faire du travail forcé. Son père et son frère sont toujours là-bas et il entre parfois en contact avec eux si bien qu'il sait ce qui se passe dans son village. Pendant le travail forcé, les soldats injurient les villageois et les battent s'ils sont trop lents, et parfois ils leur soutirent de l'argent. Il a été battu une fois lorsqu'il était porteur. Sa charge était trop lourde et il a dit aux soldats qu'il ne pouvait pas la transporter, étant donné qu'il n'était pas un travailleur manuel et qu'il n'était pas habitué à porter de si lourdes charges; les soldats ont pris un bâton et l'ont frappé. Les gens de son village ont dû également payer des impôts: chaque fois que l'armée arrivait au village, les villageois devaient donner aux soldats de la nourriture, de l'huile, des épices et des piments. Ce n'était pas systématique; parfois c'était deux fois par mois, parfois quatre fois ou chaque fois que l'armée traversait le village. Il a quitté le Bangladesh parce qu'il ne pouvait plus supporter cette situation. Il est parti seul, mais près de 700 familles ont quitté son village à ce moment-là; certains sont toujours au Bangladesh et d'autres sont revenus. Sur ceux qui sont revenus, beaucoup ont fui de nouveau mais pas à Kutupalong. Certains arrivent encore (50 familles sont venues récemment, les unes après les autres). Ceux qui viennent d'arriver lui donnent des informations sur la situation actuelle. Celle-ci n'est pas pire qu'avant mais ne s'est pas améliorée. Si quelqu'un se plaint au HCR, NaSaKa se venge. Les gens doivent encore travailler quinze jours par mois pour NaSaKa. Ils travaillent aussi pendant près de quinze jours par mois pour le HCR mais celui-ci leur donne du riz, de l'huile et des haricots; lorsqu'ils travaillent pour NaSaKa, ils ne reçoivent que des coups de bâton. NaSaKa ne se mêle pas des paiements en nourriture dans les projets du HCR; le HCR a un représentant qui est lui-même musulman et il leur donne directement la nourriture. Il n'a jamais entendu dire que NaSaKa prenait la nourriture.
  2330. 73
  2331. Ethnie: Rohingya
  2332. Age/sexe: 58 ans, masculin
  2333. Situation familiale: Dix personnes (lui-même, une femme, six enfants, une belle-fille et un petit-fils)
  2334. Activité professionnelle: Chef de village
  2335. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Village près de Maungdaw (600 ménages au moment où il l'a quitté), Etat Rakhine (le nom du village n'a pas été dévoilé à la demande du témoin)
  2336. Il a quitté le Myanmar en 1990. Il a participé au mouvement démocratique et après l'arrestation de Aung San Suu Kyi les choses ont commencé à se gâter pour lui, et il a dû fuir. Le travail forcé a été pratiqué dans son village depuis 1962, mais il a beaucoup augmenté après l'arrivée au pouvoir du SLORC en 1988. Actuellement, c'est NaSaKa qui exige du travail forcé et, avant que NaSaKa ne soie constitué, c'était l'armée. Il a dû fournir 200 travailleurs de son village à la fois pour travailler dans les camps de NaSaKa près du village. Il devait faire une rotation de 200 personnes à chaque fois qui n'étaient pas libérées avant que les 200 remplaçants n'arrivent. Il n'avait pas d'ordre écrit. Les camps de l'armée et NaSaKa devaient être construits par les villageois. Ils devaient construire la totalité du camp et ensuite l'entretenir et le réparer une fois qu'il était construit. Ces réparations devaient être effectuées surtout à la fin de chaque saison des pluies. Il y avait trois camps près de son village (à 1 mile, 2 miles et 4 miles de distance du village, respectivement). L'un de ces camps était un petit camp, et le village devait fournir 50 personnes en permanence pour y travailler nuit et jour. Ils devaient se nourrir eux-mêmes. Dans l'un des grands camps, il y avait un élevage de crevettes où 400 personnes de différents villages devaient effectuer du travail forcé. Les profits de l'élevage allaient aux militaires, tandis que tout le travail correspondant devait être fait par les villageois. Par exemple, les villageois devaient aller recueillir une quantité donnée de jeunes crevettes dans les rivières pour peupler l'élevage de crevettes. Il leur fallait ensuite fournir régulièrement une certaine quantité de fumier de vache et, si ces villageois ne parvenaient pas à fournir la quantité requise, lui, le chef du village, était mis au pilori. Cela lui était arrivé plusieurs fois et une fois pendant cinq jours. Parfois il était arrêté et mis au pilori afin de contraindre les villageois à obéir aux ordres. Les villageois devaient faire toute sorte de travail forcé pour les militaires/NaSaKa. Il est impossible d'en donner une liste complète; tout ce qu'il y avait à faire l'était par le travail forcé des villageois tel que ramasser du bois de construction, du bois de chauffage, creuser des tranchées. Il lui est difficile de dire le nombre de jours par mois qu'un villageois devait normalement passer à faire du travail forcé, mais il devait se situer autour de cinq jours par semaine, le villageois n'ayant plus que deux jours pour travailler pour son propre compte. NaSaKa n'obéissait à aucune loi; "la loi c'était ce qui sortait de leurs bouches". Si un officier venait en inspection depuis Yangon, c'étaient aux villageois à fournir la nourriture au camp qui hébergeait cet officier. NaSaKa battait les villageois. Beaucoup d'entre eux ont été battus à mort pendant le travail forcé. Même les vieillards étaient forcés à travailler et ils étaient punis pour ne pas travailler plus rapidement en les précipitant dans le bassin des crevettes. Ceci se passait en hiver quand il faisait très froid. Beaucoup de personnes âgées sont mortes de cette manière. Lorsque les autorités souhaitaient construire une école secondaire, le village devait trouver les 70 000 kyats nécessaires pour cette construction. Quelles que soient les décisions prises par les militaires, les villageois devaient s'y conformer. Il y avait également des extorsions de fonds sous la forme de taxes diverses. Une certaine proportion de la récolte de riz devait être donnée au gouvernement, un autre à NaSaKa, une autre aux Rakhines locaux et une autre encore aux monastères bouddhistes (bien que les villageois soient musulmans). "Comment réagiriez-vous si vous deviez payer 100 kyats à un soldat, et qu'un autre soldat arrive et vous demande 200 kyats, et ainsi de suite. C'est pour cela que les gens sont partis." Les Rakhines n'étaient pas très nombreux dans cette région mais ceux qui étaient là n'avaient pas à payer d'impôts ou à faire du travail forcé. Dans son village, les Rohingyas n'étaient pas forcés de travailler pour les Rakhines. NaSaKa venait voir le chef du village et demandait qui étaient les riches de ce village. Ces personnes étaient alors arrêtées sous l'accusation d'être des collaborateurs rebelles. Eux et leurs familles devaient alors payer 10 000 kyats ou 50 000 kyats ou toute somme que NaSaKa estimait pouvoir leur extorquer contre leur libération. Une fois terminée la tournée des villages, les autorités sont venues à lui parce qu'il était relativement riche. Il avait hérité de l'argent de son père et avait pu construire une maison à deux étages. Les militaires de NaSaKa ont arrêté son fils aîné (qui est aussi dans le camp). Ils ont torturé son fils pendant sept jours. On l'a obligé à marcher à genoux sur un lit de pierres pointues et on lui a planté des épines dans la plante des pieds. Il a également subi des tortures à l'électricité. Ils ne savent pas pourquoi il a été arrêté; aucun motif n'a été donné. Les sept jours écoulés, il a été libéré après le versement de 50 000 kyats par sa famille. Puis son fils a été arrêté de nouveau, cette fois-ci pour quarante jours sous l'accusation d'activités politiques, ce qui n'était pas vrai. Il a eu peur que son fils soit envoyé en prison à Yangon et qu'il y mourrait. Il a dû payer de nouveau de l'argent pour la libération de son fils qui lui a coûté au total près de 400 000 kyats. Il a dû vendre tout ce qu'il possédait pour réunir cette somme. Des amis lui ont conseillé de ne pas rester au village sous peine de nouveaux problèmes. Aussi a-t-il décidé de fuir au Bangladesh. Sa fuite a eu lieu pendant la saison des pluies. Il n'a rien dit à personne, pas même à sa mère. Il a quitté le village au milieu de la nuit avec sa femme, ses six enfants, son petit-fils et sa belle-fille. Il a eu quelques informations sur la situation actuelle de son village. Il semble qu'elle s'est un peu améliorée depuis que le HCR a fait sentir sa présence, mais le portage, le travail forcé et une forte taxation y ont toujours cours. La quantité de travail forcé a diminué mais, comme il y a maintenant moins de gens dans les villages pour faire ce travail, la quantité demandée à chaque villageois n'a pas beaucoup diminué. Toutefois, il y a moins de portage à faire. Actuellement, ce sont environ 500 familles qui ont quitté son village.
  2337. 74
  2338. Ethnie: Rohingya
  2339. Age/sexe: Masculin
  2340. Activité professionnelle: Etudiant
  2341. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Village dans la circonscription de Maungdaw, Etat Rakhine
  2342. Cet homme originaire du même village que le témoin 73 a assisté au témoignage de 73 et a ajouté: "Les bouddhistes ont des temples et nous, les Rohingyas, avons des mosquées. Mais nos mosquées ont été fermées par les autorités et nous ne pouvons pas prier. Les cimetières sont des lieux sacrés dans toute religion mais, dans notre village, un camp militaire a été construit sur le cimetière. Ils y ont même ouvert un magasin de spiritueux. Ils choisissent plus particulièrement les Musulmans pour les persécuter. Ils insultent délibérément notre religion. Ils violent les femmes. Nos chefs religieux ont beaucoup d'importance dans notre vie. Ils nous expliquent la signification des textes religieux, mais les autorités choisissent spécialement ces personnes pour leur imposer du travail forcé. J'ai dû faire du travail forcé pendant que j'étais encore collégien. Nous étions battus lorsque nous faisions du travail forcé. Les collégiens de la huitième, neuvième et dixième devaient faire du portage. Les gens devaient également faire du travail forcé pour la construction de nouveaux villages pour les Rakhines bouddhistes. Dans l'Etat Rakhine, les Musulmans n'ont aucune valeur ni aucune liberté."
  2343. 75
  2344. Ethnie: Rohingya
  2345. Age/sexe: 32 ans, masculin
  2346. Situation familiale: Trois personnes (lui-même, sa femme et un enfant)
  2347. Activité professionnelle: Soldat
  2348. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Buthidaung, Etat Rakhine
  2349. Le témoin était présent durant les témoignages des témoins 73 et 74. Il a quitté le Myanmar en 1994. Il est Rohingya mais a l'air d'un Rakhine. Les Musulmans ne peuvent entrer dans l'armée, mais l'on ne s'est pas rendu compte qu'il était musulman. Il a participé au coup d'Etat de 1988 avec d'autres soldats. C'est à ce moment-là que l'armée a découvert qu'il était musulman. La réaction a été "Comment! Nous avions un Musulman parmi nous pendant tout ce temps et nous ne le savions pas." Il s'est rendu compte quand il était soldat de l'ampleur des sentiments antimusulmans dans l'armée. La plupart des soldats, y compris les officiers de haut rang, sont d'avis qu'il vaudrait mieux que les Musulmans quittent le Myanmar car ce n'est pas leur pays. Ils veulent que tous les Musulmans s'en aillent, et toute la politique est conçue à cette fin.
  2350. 76
  2351. Ethnie: Rohingya
  2352. Age/sexe: 51 ans, masculin
  2353. Situation de famille: Douze personnes (lui, sa femme et dix enfants)
  2354. Profession: Mécanicien sur bicyclette (possédait un magasin de réparation de bicyclettes)
  2355. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Buthidaung, Etat Rakhine
  2356. Il a quitté le Myanmar en 1992. L'oppression exercée par le gouvernement sur les Rohingyas se manifeste de diverses manières. Il leur est interdit de voyager et font l'objet de discrimination en tant que Musulmans (par exemple, les Musulmans n'ont pas le droit de créer librement des écoles ou de faire des affaires). Les soldats vont chercher les Musulmans dans la ville pour nettoyer leur camp militaire. Cette situation dure depuis des dizaines d'années. Les soldats ont toujours dit qu'ils ne faisaient pas partie du Myanmar. Il y a un baraquement militaire dans la ville mais plusieurs bataillons dans la circonscription. Ils sont arrivés en 1990. Les camps et les baraquements ont été construits par les populations locales au titre du travail forcé. La situation est pire encore pour les gens des villages. Les soldats forcent les gens à quitter les lieux pour construire les camps militaires et ce sont ces mêmes personnes qui sont contraintes de construire ces camps. Une fois le camp militaire construit, les gens sont contraints de s'en aller, mais aucun endroit ne leur est alloué. On leur dit: "Vous êtes des Indiens. Retournez d'où vous venez." Les soldats vont même jusqu'à leur prendre leur argent en déclarant: "C'est de l'argent birman. Vous êtes Indiens, donc vous n'avez pas besoin de cet argent." Chaque fois que les soldats se déplacent, ils prennent des locaux pour porter leurs affaires. Ils ne prennent que les Musulmans. Ils enrôlent autant de gens qu'ils en ont besoin, souvent 100 ou 200 personnes à la fois. Aucune période n'est fixée pour ce travail. Les gens doivent juste continuer à travailler aussi longtemps que les soldats le souhaitent, parfois pendant un à deux mois. Beaucoup de gens sont morts en faisant du portage. Ils ne donnent aux porteurs aucun argent, et ceux-ci doivent même apporter leur propre nourriture. Lorsque les hommes ont fui pour éviter d'être pris comme porteurs, les soldats violent les femmes. Ceci est arrivé très souvent. Certaines jeunes filles ont été amenées dans les camps militaires où elles ont été violées; elles en sont souvent revenues enceintes. Parfois les soldats tuent les jeunes filles qui sont tombées enceintes. Il connaît le cas d'une jeune fille qui a été emmenée au camp et violée. Elle est tombée enceinte et elle a été obligée de rester dans le camp militaire jusqu'à ce qu'elle ait le bébé, mais elle est morte pendant l'accouchement. Les habitants de la ville de Buthidaung, y compris lui-même, ont toujours été contraints par les soldats de faire du travail forcé. Ils ont dû nettoyer la ville et construire des routes. Ce travail n'a jamais été organisé de façon systématique; les soldats se contentent d'attraper les gens. Il y a toujours eu aussi une discrimination religieuse. Les Musulmans n'ont aucune liberté de religion. Ils ne peuvent pas avoir des écoles musulmanes. Ils n'ont pas le droit de porter les habits musulmans. On leur dit: "Vous ne pouvez pas vous habiller comme cela. Ce n'est pas votre pays. Si vous voulez vous habiller comme vous voulez, retournez dans votre propre pays." Les Musulmans doivent également payer des taxes et des sommes d'argent qui ne sont pas exigées des Rakhines. A tout moment, lorsque les soldats avaient besoin d'argent, ils le réclamaient. Les gens leur donnent de l'argent, mais les choses ne font qu'empirer car les gens sont très pauvres, et ils doivent toujours donner davantage. Souvent il a dû abandonner son magasin de réparation de bicyclettes pour aller faire du travail forcé et du portage. Les Rakhines ne sont pas astreints au travail forcé.
  2357. 77
  2358. Ethnie: Rohingya
  2359. Age/sexe: 44 ans, masculin
  2360. Situation familiale: Huit personnes (le témoin, sa femme et six enfants)
  2361. Activité professionnelle: Enseignant
  2362. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Un village proche de Buthidaung, Etat Rakhine
  2363. (Le nom du village n'a pas été divulgué à la demande du témoin)
  2364. Le témoin a quitté le Myanmar en 1992 avec sa famille et son frère aîné. En 1990, les villageois ont dû construire un camp militaire. Ils ont dû fournir leur propre nourriture et ils étaient battus par les soldats pendant le travail. En 1990 également, certaines terres du village ont été confisquées et données à des familles rakhines. Ils ont dû continuer à travailler sur la terre pour les familles rakhines. Ils ont été forcés par l'armée et n'ont pas été payés. Sa terre n'a pas été confisquée.
  2365. 78
  2366. Ethnie: Rohingya
  2367. Age/sexe: 45 ans, masculin
  2368. Situation familiale: Dix personnes (le témoin, sa femme et huit enfants)
  2369. Activité professionnelle: Employé municipal; sa famille était dans l'agriculture
  2370. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Buthidaung, Etat Rakhine
  2371. Il a quitté le Myanmar en 1991. La terre du témoin a été confisquée pour y construire un camp militaire. Lui-même et d'autres personnes ont été forcés de construire ce camp. Il a aussi dû faire du portage. Pendant qu'il faisait du portage, sa femme a été violée par des soldats. Ceci est arrivé le 21 février 1991. C'est alors qu'il a décidé de partir. Il était employé municipal et devait organiser le travail forcé. Il a lui-même dû faire du travail forcé. S'il ne pouvait pas faire de travail forcé, il devait payer un remplaçant 30 à 50 kyats par jour. Lorsqu'il n'avait pas d'argent, il devait y aller lui-même.
  2372. 79
  2373. Ethnie: Rohingya
  2374. Age/sexe: 36 ans, masculin
  2375. Situation familiale: Cinq personnes (le témoin, sa femme et trois enfants)
  2376. Activité professionnelle: Commerçant
  2377. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sittway (Akyab), Etat Rakhine
  2378. Le témoin est venu au Bangladesh en 1992 à cause du poids excessif des taxes et du travail forcé. Il ne pouvait plus continuer à gérer son affaire tout en faisant du travail forcé. Il est commerçant, intermédiaire pour un commerce de Yangon. A partir de 1990, il lui est devenu impossible de voyager et les commerçants avec qui il travaillait à Yangon, qui étaient également des Musulmans, ne pouvaient plus venir le voir. La maison de certains Musulmans de Sittway a été confisquée. Ils ont aussi dû effectuer du travail forcé. Il y avait environ 12 000 soldats dans cette région. Les habitants de la région devaient transporter les approvisionnements aux camps de ces soldats. Cela a débuté après 1988. Il n'a fait qu'une fois du travail forcé, en 1988. Il a été pris comme porteur pendant quinze jours dans la jungle. Les Musulmans devaient également payer des impôts élevés auxquels les Rakhines n'étaient pas astreints. En tant que commerçant, il a réussi en général à éviter le travail forcé et l'essentiel de ces impôts.
  2379. 80
  2380. Ethnie: Rohingya
  2381. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2382. Situation familiale: Marié, deux enfants
  2383. Activité professionnelle: Pêcheur
  2384. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mongni Para, Maungdaw, Etat Rakhine (village d'environ 3 000 familles)
  2385. Il a quitté le Myanmar au début de 1997 avec sa famille. Plus de 400 familles auraient quitté le village. Il a dû faire du travail pour les militaires dans les montagnes. Il devait cueillir le bois, agir à titre de porteur ainsi que monter la garde puisque le village était près de la frontière. Il devait travailler en moyenne une fois par semaine. Il a dû faire du travail forcé dès l'âge de 15 ans. Il en a fait jusqu'à son départ du Myanmar. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il n'était pas possible de refuser puisque toute réticence pouvait entraîner un passage à tabac. Il n'a jamais refusé mais connaît des personnes qui l'auraient fait et qui auraient été battues gravement. En fait, toutes les familles du village devaient fournir un homme pour exécuter le travail. L'ordre de faire du travail venait des militaires qui le transmettaient par l'intermédiaire du chef de village. Il a dû payer des taxes pour la construction d'écoles ou tous types d'activités (sociales, religieuses ou sportives) des militaires ou des Rakhines. S'il n'était pas possible de payer, il devait alors exécuter du travail additionnel dans les camps. Il devait payer ces taxes en moyenne trois fois par mois.
  2386. 81
  2387. Ethnie: Rohingya
  2388. Age/sexe: 60 ans, masculin
  2389. Situation familiale: Veuf, deux fils
  2390. Activité professionnelle: Cultivateur
  2391. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Khoirmorapara, Buthidaung, Etat Rakhine (village d'environ 300 familles. Camp militaire et camp des services militaires d'information à proximité)
  2392. Après la mort de sa femme, il devait fréquemment s'absenter pour exécuter du travail forcé. Il n'y avait plus personne dès lors pour veiller sur ses fils. Il serait venu avec ses deux fils au début de 1997. Plus de 100 familles auraient quitté le village. Pas de tâche spécifique. Il devait à peu près tout faire au camp militaire: préparer la nourriture, laver les vêtements, cueillir le bois. L'assignation pouvait être jusqu'à trois jours mais pouvait se prolonger jusqu'à sept. Il devait travailler en moyenne dix à douze fois par mois. La journée commençait généralement au lever du soleil et se terminait vers 19 heures-21 heures. Il n'était pas rémunéré. Il devait apporter sa propre nourriture. Il était impossible de refuser puisque ceux qui refusaient étaient systématiquement arrêtés. Il n'a jamais refusé personnellement. Il était possible de payer un substitut pour qu'il exécute la tâche assignée. Il aurait fait du travail forcé pour la première fois à l'âge de 30 ans. Il en a fait jusqu'à son départ. L'ordre venait des militaires qui le transmettaient par l'intermédiaire du chef de village. Les hommes requis pour le travail étaient soumis à des mauvais traitements. Il a été personnellement battu puisqu'il s'était endormi sur le lieu de son travail. Dix-sept personnes de son village auraient été tuées peu avant son départ. Son village a fait l'objet de représailles de la part des militaires puisque des membres du RSO y auraient trouvé refuge. Il a dû payer en moyenne 40 kyats/semaine à titre de taxes. Il s'agit du montant qui devait être payé par les plus pauvres. En fait, s'il y avait une décision aux termes de laquelle un camp allait être construit, il était construit par le travail forcé et financé par le paiement de taxes. Ce fut le cas pour le camp situé à proximité de son village. Les taxes servaient aussi à payer les différentes activités des militaires.
  2393. 82
  2394. Ethnie: Rohingya
  2395. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2396. Activité professionnelle: Cultivateur
  2397. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Fatecha, Buthidaung, Etat Rakhine (le village comptait 52 familles)
  2398. Il serait venu une première fois en 1991-92 avec plusieurs familles de son village. En fait, 10 familles étaient restées et plusieurs seraient retournées au Myanmar. Il est personnellement retourné en 1994 et est revenu à la fin de 1996 au Bangladesh. La situation en ce qui concerne le travail forcé aurait empiré entre ses deux entrées au Bangladesh. Antérieurement, il devait exécuter six à huit jours de travail par mois. Avant de quitter la seconde fois, le nombre de jours avait doublé se situant aux environs de dix à quinze jours par mois. Il a fait du travail forcé pour la première fois à l'âge de 10-12 ans. Il en a fait jusqu'à son départ. Il a été requis pour construire le camp militaire, ramasser le bois et les tiges de bambous. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il a dû parfois rester une semaine sur le site de son assignation. Il n'y avait pas toujours d'abris pour dormir. Il dormait dans les huttes qu'il construisait. Il ne pouvait pas refuser puisque tout refus pouvait entraîner un passage à tabac et l'imposition d'une amende (environ 2 000 kyats). La journée débutait vers 6 heures pour se terminer au coucher du soleil. L'ordre provenait des militaires qui le transmettaient par l'intermédiaire du chef de village. Les hommes qui devaient faire du travail forcé étaient soumis à des mauvais traitements, étant régulièrement battus. Il a été personnellement battu jusqu'à en perdre une dent à une occasion. Le montant des donations a augmenté après son retour. Avant, elles se chiffraient aux environs de 10-15 kyats/mois. Après son retour, elles cumulaient aux environs de 200 kyats/mois. Toutes les occasions étaient bonnes pour leur extirper de l'argent (activités sportives, religieuses ou sociales). Ils avaient un délai de dix jours pour trouver l'argent pour payer ces taxes, sans exception.
  2399. 83
  2400. Ethnie: Rohingya
  2401. Age/sexe: Masculin
  2402. Situation familiale: Marié, deux enfants
  2403. Activité professionnelle: Petit commerçant
  2404. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tatupur (Poimali), Buthidaung, Etat Rakhine (le village comptait 500 familles. Il y avait un camp NaSaKa dans son village)
  2405. Il a dû quitter le Myanmar puisqu'il était accusé de faire partie du RSO. Il est arrivé au début de 1997 avec sa famille. Cinquante-huit familles auraient quitté avec lui. En 1993, il a dû payer 130 000 kyats au SLORC et à NaSaKa pour éviter que sa famille ne soit exterminée en raison du fait qu'il était soupçonné de faire partie du RSO. Son oncle, qui revenait de l'Arabie saoudite, a du reste été assassiné pour cette raison. Il a dû vendre ses terres pour pouvoir payer. Lorsque la situation est devenue intolérable, il a dû partir. Comme il provenait d'une famille possédant certains avoirs, il n'a pas eu à faire du travail forcé. Il a pu payer des substituts. Il a dû débourser 400 kyats en moyenne trois ou quatre fois par mois. Il a eu à payer des substituts pour la première fois dès son enfance. L'ordre provenait de l'armée qui le transmettait par l'intermédiaire du chef de village. Tous les hommes de son village sont soumis au travail forcé, chaque famille devant fournir un membre. Le traitement auquel ils étaient soumis variait. Si, par exemple, un groupe de personnes avait été requis pour fournir un nombre donné de tiges de bambou et que ce groupe n'arrivait pas à recueillir le quota spécifié, le groupe entier était puni. Pour les plus riches, l'amende consistait surtout au paiement d'une somme d'argent. Les autres étaient envoyés au Bangladesh. Il devait verser des donations pour toutes les activités organisées par les militaires (jeux, pagodes, activités religieuses). Il devait payer en taxes en moyenne 400 à 500 kyats par mois.
  2406. 84
  2407. Ethnie: Rohingya
  2408. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2409. Situation familiale: Marié, quatre enfants
  2410. Activité professionnelle: Petit commerçant
  2411. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kachibil, Maungdaw, Etat Rakhine (le village comptait 180 familles. Camp NaSaKa à proximité)
  2412. Il a quitté le Myanmar durant l'année 1997. Il s'est enfui du camp NaSaKa où il était détenu prisonnier depuis sept mois en raison du fait qu'il n'avait payé que 800 kyats sur les 1 200 que lui réclamaient les militaires. Il a été rejoint par la suite par sa famille. Une dizaine de familles auraient accompagné la sienne au moment de son départ. Il est venu pour la première fois au Bangladesh avec le flux de réfugiés de 1991. Il a été rapatrié en 1994. Il estime que la situation s'est empirée entre ses deux séjours au Bangladesh. Antérieurement, le travail forcé était principalement pour la police. Maintenant, les hommes doivent exécuter le travail pour NaSaKa. Les conditions sont plus difficiles et dangereuses. Les pots-de-vin sont aussi plus chers. Il devait, pendant la journée, travailler au camp: nettoyage général, lavage des vêtements des militaires, cueillette du bois, construction de sentiers/petits chemins à l'intérieur du camp. Durant la nuit, il devait monter la garde pour les militaires. Les ordres venaient des militaires qui les transmettaient par l'intermédiaire du chef de village. Il devait le faire environ trois fois/semaine. Il a dû le faire pour la première fois lorsqu'il était enfant. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il ne pouvait pas refuser. Au moment de son rapatriement, il a même été détenu, les autorités lui demandant de leur verser l'indemnisation reçue du HCR.
  2413. 85
  2414. Ethnie: Rohingya
  2415. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2416. Situation familiale: Deux (lui et sa femme)
  2417. Activité professionnelle: Cultivateur
  2418. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Fansi, Buthidaung, Etat Rakhine
  2419. Le témoin est venu au Bangladesh en 1991-92 suite aux formes diverses d'oppression qui signifiaient que sa famille ne pouvait plus gagner sa vie. Il y a toujours eu du travail forcé en faveur des militaires dans sa région, et ce depuis sa naissance. Il y a deux camps militaires à Sindaung, et les gens de son village ont été contraints au travail forcé. Il est allé lui-même une fois et, en trois occasions, il a payé afin de se faire remplacer. Il existait plusieurs autres formes de travail forcé. Il a dû passer la moitié de son temps à faire du travail forcé. Il a dû travailler pendant une semaine, puis il avait une semaine pour faire son propre travail. Il devait ensuite retourner exécuter du travail forcé pour une autre semaine, ainsi de suite. Il existait différents types de travail: portage, ramassage de bambous, nettoyage et creusage pour la construction de camps, construction de bâtiments, défrichage en brousse afin d'obtenir des terres cultivables. Il a été maltraité et battu pendant qu'il exécutait ce travail. A une occasion, il a été lent pour le portage alors que les militaires étaient pressés. Il a été battu et éprouve toujours des douleurs à son poignet suite à cet incident. Les autres incidents dont il se souvient sont ceux liés au portage. Sa charge était très lourde, il a trébuché et a renversé une partie de sa charge, ce qui fait qu'il a été battu. Lorsqu'il était éloigné pour le travail forcé, ses frères plus jeunes s'occupaient du travail sur la ferme et, quand ceux-ci étaient également loin, il le faisait lui-même.
  2420. 86
  2421. Ethnie: Rohingya
  2422. Age/sexe: 46 ans, masculin
  2423. Situation familiale: Neuf (lui, sa femme et sept enfants)
  2424. Activité professionnelle: Commerçant
  2425. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Buthidaung, Etat Rakhine
  2426. Le témoin a quitté le Myanmar en mars 1992. Il était commerçant. Il faisait le commerce du bois et du riz et, par la suite, il a acheté un permis afin d'acheter et de vendre du bétail. Il n'avait pas la liberté de mouvement, il a dû payer de l'argent afin d'obtenir des autorisations de voyager à chaque fois qu'il voulait voyager pour plus de 8 km. Il a également payé la somme de 30 000 kyats par année comme impôts. Il a vu plusieurs personnes être prises pour le travail forcé. Il connaît également des femmes qui se sont faites harceler lorsque leurs maris étaient loin pour le travail forcé. Comme son travail signifiait qu'il devait beaucoup voyager, il a acquis une grande expérience concernant la situation dans les différentes régions. Comme les gens le considéraient comme un Musulman d'influence, ils lui racontaient leur situation et problèmes, puisqu'ils estimaient qu'il avait une certaine influence auprès des autorités. De cette façon, il a beaucoup appris sur la situation dans les régions où il devait voyager. Lorsqu'il avait affaire aux autorités, il leur procurait des informations concernant la situation dans les différentes régions. A chaque fois qu'il a obtenu une autorisation de voyager quelque part, il devait se rapporter aux autorités dès son retour et, à ce moment, celles-ci lui demandaient où il était allé et ce qu'il avait fait. C'est à ce moment qu'il a partagé des informations qu'il avait reçues des villageois. Les autorités ont commencé à devenir très agacées parce qu'il connaissait toujours très bien la situation dans les différentes régions et elles ont donc commencé à le soupçonner. Les autorités croyaient qu'il était impliqué en politique et travaillait pour le NLD. Il fut averti par des amis dans l'administration locale qu'il pouvait encourir certains problèmes, et il a donc décidé de quitter. Il n'a jamais fait de travail forcé lui-même mais, à plusieurs occasions, il a vu d'autres personnes faire du travail forcé. A deux ou trois occasions, il a également vu des gens se faire arrêter et être contraints au travail forcé.
  2427. 87
  2428. Ethnie: Rohingya
  2429. Age/sexe: 68 ans, masculin
  2430. Situation familiale: Dix (lui, sa femme et huit enfants)
  2431. Activité professionnelle: Menuisier
  2432. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Monikul, Lawadok Pranshi, Buthidaung, Etat Rakhine
  2433. Le témoin a quitté le Myanmar en 1992. Il est né et a grandi à Minbya, mais a déménagé à Buthidaung après la seconde guerre mondiale. Il n'a jamais fait de travail forcé lui-même, mais un membre de sa famille a été requis pour exécuter du travail forcé de façon régulière. Ses trois fils l'ont fait également, en rotation. Cette situation existe depuis 1962. Ses fils étaient généralement absents pendant deux ou trois jours afin d'exécuter différentes formes de travail forcé. Il est venu au Bangladesh parce qu'il soutenait le NLD et, après les élections de 1990, les alliés du NLD étaient arrêtés.
  2434. 88
  2435. Ethnie: Rohingya
  2436. Sexe: Masculin
  2437. Activité professionnelle: Chef de village
  2438. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Village dans le canton de Buthidaung, Etat Rakhine (le nom du village n'a pas été dévoilé à la demande du témoin)
  2439. Les raisons principales qui ont amené le témoin à fuir le Bangladesh en 1992 sont le travail forcé, le paiement de taxes et les traitements infligés par les autorités. Après les élections de 1990, le SLORC n'a pas accepté les résultats et a procédé à des arrestations d'étudiants ainsi que des dirigeants des différentes communautés. A cette époque, certaines personnes ont commencé à fuir. Le travail forcé et l'oppression se sont intensifiés. Les femmes laissées seules dans les villages se faisaient harceler. Les terres et les propriétés furent confisquées aux Musulmans.
  2440. 89
  2441. Ethnie: Karenni
  2442. Age/sexe: 28 ans, masculin
  2443. Situation familiale: Marié, un fils
  2444. Activité professionnelle: Professeur de 1988 à 1990 (école primaire) dans son village. A ensuite rejoint le KNPP
  2445. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paloaung, Loikaw, Etat Kayah (village d'environ 40 familles. Depuis 1990, il y aurait un camp de l'armée dans son village)
  2446. Il a quitté le Myanmar le 17 mai 1997 avec 12 autres personnes de son village. Plusieurs autres familles seraient venues par la suite et seraient installées dans un autre village. 1) Camp militaire. Il a dû y travailler lorsqu'il avait 21-22 ans (six ans auparavant) pendant deux années. Il devait y travailler toute l'année, deux à trois fois par mois. Il a travaillé sur les installations de sécurité et électriques. Les ordres pour aller travailler venaient généralement du chef de village. Les militaires sont venus à quelques reprises directement aux maisons pour chercher la main-d'oeuvre nécessaire. Chaque famille devait fournir un membre pour le travail. Hommes et femmes devaient travailler au camp (jusqu'à 60 ans). Les femmes, environ une dizaine, devaient couper les bambous et fendre le bois. Les horaires pouvaient changer. Parfois, il n'y travaillait pas toute la journée (deux à trois heures). Parfois l'assignation était pour une journée complète. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il ne pouvait pas refuser. Il n'a pas été personnellement battu, mais aurait vu d'autres personnes l'être. Il était possible de payer un substitut (50 kyats par jour). Il n'avait toutefois pas l'argent nécessaire pour ce faire. 2) Chemin de fer reliant Aungban à Loikaw. Il y a travaillé en 1992 pendant la période de Noël. Le travail qu'il devait exécuter était sur la section près de Loikaw. Le lieu de travail était à deux jours de distance. Il faisait la première partie en voiture (taxi qu'il a payé) et la seconde en bateau. Le travail consistait à recouvrir de terre la voie qui devait être empruntée. Les militaires supervisaient le travail. Entre 6 000-7 000 personnes y auraient travaillé. Hommes, femmes, enfants (10-11 ans) et personnes âgées indistinctement. Sur sa section: plus de 200 personnes travaillaient avec lui. Il devait apporter ses propres instruments de travail. Il y travaillait du matin (6 heures) au soir (19 heures). Il devait apporter sa propre nourriture qu'il mangeait au moment du repos à l'heure du déjeuner. Il dormait près de la route, dans des villages. Il n'était pas rémunéré. Il pouvait payer un substitut ou verser des pots-de-vin pour être exempté. S'il ne payait pas, l'ordre précisait que les personnes qui ne le respectaient pas devaient être punies. Il n'a pas été personnellement battu. Il n'a pas vu de mauvais traitements administrés à d'autres travailleurs. Il a dû également payer pour l'essence requise pour les camions. Il n'a pas vu de trains sur la voie avant son départ. Il devait payer des taxes de porteurs. Il a dû payer à deux, trois reprises. Le montant pouvait varier (environ 100 kyats). Il payait ces taxes au chef de village.
  2447. 90
  2448. Ethnie: Karenni
  2449. Age/sexe: 46 ans, masculin
  2450. Situation familiale: Marié, deux filles
  2451. Activité professionnelle: 1972-1983: soldat dans l'armée birmane
  2452. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Loikaw, Etat Kayah
  2453. Il a dû quitter le Myanmar en 1992 puisqu'il avait peur d'être arrêté en raison de son implication dans les événements de 1988. Avant 1992, il a tenté de recueillir des informations en ce qui concerne les violations des droits de la personne au Myanmar. Il a dû travailler sur la voie de chemin de fer reliant Aungban à Loïkaw à trois reprises. Le lieu de travail était à une heure de marche. Il pouvait retourner chez lui le soir. Il devait apporter nourriture et outils de travail. Il a dû effectuer des travaux de creusage et de transport de terre. Hommes, femmes, enfants (9-10 ans) et personnes âgées (plus de 60 ans) y travaillaient indistinctement. Au total: plus de 150 personnes. Une journée normale de travail commençait à 6 heures et se terminait à 16 heures. La première fois où il a dû travailler était en 1990, en décembre, lorsque le projet était à ses débuts. Pendant trois mois, il a dû travailler en moyenne trois fois par semaine, douze jours par mois. Il a dû travailler une seconde fois sur la voie ferrée de janvier à juin 1991. Même nombre de jours par mois. Enfin, la troisième fois était de mars à mai 1992. Même nombre de jours par mois. Il n'était pas rémunéré. Il était impossible de refuser, les travailleurs étaient effrayés par les armes possédées par les soldats. Personne ne s'occupait de ses terres pendant son absence. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements et n'en a pas vu non plus infligés à d'autres travailleurs. Il ne sait pas si le chemin de fer est fonctionnel. Il estime que seule l'armée pourrait en bénéficier. Il n'a pas fait personnellement du portage, mais a des amis qui en auraient fait. Ils auraient fait l'objet de mauvais traitements, les passages à tabac étant fréquents pour quelque raison que ce soit. En 1991, un homme serait revenu d'une assignation de portage près de la frontière et ne serait plus en mesure de marcher. Il a dû payer à une reprise des taxes de porteurs. Le montant pouvait toutefois varier entre 70 et 100 kyats. Il payait ces taxes au chef du village qui les remettait aux militaires.
  2454. 91
  2455. Ethnie: Karenni
  2456. Age/sexe: 23 ans, masculin
  2457. Situation familiale: Célibataire, famille de sept personnes (les membres de sa famille sont demeurés au Myanmar, Etat Kayah)
  2458. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Demawso, Etat Kayah
  2459. Il a quitté le Myanmar en janvier 1993. Les ordres étaient donnés par le chef de village. Chaque famille devait fournir une personne pour exécuter le travail. A 15 ans, il aurait été arrêté par les militaires qui requéraient ses services à titre de porteur. Son professeur serait intervenu arguant que ses élèves (une vingtaine d'élèves avaient été arrêtés) étaient trop jeunes pour être porteurs. Ils auraient été libérés. 1) Construction du camp militaire du bataillon 427. La construction du camp aurait débuté en mars 1991 pour se terminer en janvier 1992. Il y aurait travaillé en janvier 1992 pendant quatre jours. Il avait alors 16 ans. Il devait construire les baraques pour les militaires. Environ 300 personnes travaillaient avec lui, incluant 50-60 enfants de son âge. Il n'a pas vu de femmes ou de personnes âgées. Il ne pouvait pas se reposer. Il devait apporter sa nourriture. La journée commençait à 7 heures et se terminait à 15 heures. Il pouvait retourner chez lui à la fin de la journée. Il n'était pas rémunéré. Il était impossible de refuser à moins de payer 25 kyats au chef de village. Il n'a vu personne qui aurait fait l'objet de mauvais traitements. Son frère plus âgé aurait eu à travailler sur un autre camp militaire à la même période. 2) Chemin de fer reliant Aungban à Loikaw. Il y aurait travaillé à deux reprises. La première en février 1991 pour une semaine. La seconde, en juin 1991. Le lieu de travail était à environ deux heures de voiture. La journée de travail commençait à 6 heures et se terminait à 17 heures. Trois cents personnes auraient travaillé avec lui, y incluant une trentaine de femmes, une quarantaine d'enfants de son âge et une quarantaine de personnes âgées (plus de 50 ans). Il a travaillé sur la section aux confins de l'Etat Kayah à la frontière de l'Etat Shan. Il a dû niveler le terrain. Pour ce faire, il a dû apporter ses propres outils. Il a dû dormir près de la route, sans abri. La nourriture n'était pas fournie. Il n'était pas rémunéré. Pendant trois ans, il a dû payer des taxes de porteurs. Environ 50 kyats par mois. En outre, il a dû payer des taxes pour le chemin de fer: à une reprise, environ 300 kyats. Ces taxes étaient payées au chef de village.
  2460. 92
  2461. Ethnie: Karenni
  2462. Age/sexe: 55 ans, féminin
  2463. Situation familiale: Mariée. Son mari est décédé le 18 novembre 1995. Une fille, quatre fils
  2464. Activité professionnelle: Cultivateur
  2465. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mawchi, Etat Kayah
  2466. Elle a quitté le Myanmar en mars 1995. Les militaires lui auraient tout pris. Son village aurait été notamment totalement détruit (brûlé) par les militaires. Elle craint les militaires. Ils s'approprient tout: hommes, récoltes, animaux, etc. Ils ne paient jamais de dédommagement. Elle souffre d'insomnie. Elle aurait été forcée de travailler il y a environ sept, neuf ans à Mawchi. Le travail consistait notamment à nettoyer les champs et baraques militaires, porter la nourriture aux militaires, couper le bois, affiler les pointes, etc. Elle aurait vu plusieurs personnes qui auraient été forcées de travailler. Ces personnes auraient aussi fait l'objet de mauvais traitements. Son époux aurait été porteur un nombre incalculable de fois. Il n'était pas payé, n'avait pas de nourriture ou d'eau fournies. Il a dû se rendre à la zone frontalière avec la Thaïlande.
  2467. 93
  2468. Ethnie: Birman
  2469. Age/Sexe: 23 ans, masculin
  2470. Situation familiale: Quatre (lui, deux frères et une soeur; parents décédés)
  2471. Education: Septième année
  2472. Activité professionnelle: Sa famille était cultivatrice, il a rejoint l'armée
  2473. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tantabin, Nyaunglebin, division de Bago (le village comptait 100 familles)
  2474. Le témoin a quitté l'école en 1990 pour rejoindre l'armée et est devenu sergent. Lorsqu'il vivait au village (vers 1985, avant de rejoindre l'armée), il se souvient que des membres du village ont été utilisés comme porteurs. Les ordres émanaient parfois de l'armée via le chef de village; parfois, les militaires venaient au village et embarquaient directement les gens. Dix à vingt personnes devaient faire du portage à chaque fois. A cette époque, le village devait fournir des porteurs lorsqu'il y avait des opérations militaires dans la région (environ une fois par deux ou trois mois). Chaque maison devait payer une taxe mensuelle de porteurs de 40 à 50 kyats. Ceci s'est poursuivi jusqu'au moment où il a rejoint l'armée. Il a rejoint l'armée à Toungoo mais, après seulement une semaine, il fut envoyé pour des entraînements durant six mois à Mingaladon (banlieue de Yangon). Il a été affecté au bataillon 102 à Ngwetaung dans le canton de Demawso dans l'Etat Kayah. C'est à ce moment qu'il a vu, pour la première fois, le portage (en tant que soldat); il a vu du portage à plusieurs occasions lorsqu'il était soldat. Les porteurs devaient transporter des charges pour les militaires, et certains devaient servir de guides locaux pour les militaires. L'armée obtenait des porteurs de différentes façons: parfois, un village entier devait venir et travailler dans un camp militaire; parfois, certains membres du village étaient choisis avec l'aide du chef du village et, parfois (sur la ligne de front), des militaires prenaient les villageois qu'ils rencontraient afin que ces derniers effectuent du portage pour eux; ils pouvaient aussi aller dans les villages et forcer les gens à venir avec eux (le plus âgé: 40 ans et le plus jeune: 13 ans). Lorsque des militaires patrouillaient, ils étaient habituellement une trentaine et 20 porteurs les assistaient. Parfois, son bataillon utilisait des porteurs pour quelques mois et, occasionnellement, pour une année complète. Parfois, il était difficile de trouver une opportunité afin de relâcher un porteur, particulièrement lorsque les troupes étaient en déplacement sur la ligne de front. Lors des patrouilles, ils allaient de village en village ou de camp militaire en camp militaire, dormant chaque nuit sur place. Les porteurs étaient relâchés seulement lorsque les militaires réussissaient à trouver d'autres porteurs. Les militaires ne traitaient jamais bien les porteurs et les injuriaient. S'ils étaient trop lents, les porteurs étaient battus par les militaires. Il a vu certains porteurs avec des blessures sérieuses provenant de mines (sur la ligne de front), des porteurs victimes de malaria, des porteurs avec des blessures infligées par les militaires et plusieurs porteurs tués par ces mêmes militaires. Lorsque les porteurs essayaient de s'échapper, ils étaient tués. Il a vu des porteurs se faire tuer à au moins dix occasions; à chaque occasion, au moins quatre ou cinq étaient tués, et parfois une ou deux personnes étaient tuées en même temps. Habituellement, lorsqu'un groupe de porteurs tentaient de s'échapper, ils étaient tous tués. Les porteurs étaient également blessés aux épaules puisque les charges qu'ils devaient transporter étaient très lourdes; ceci était le cas constamment et les porteurs ne recevaient aucun traitement. Il est allé sur la ligne de front à plusieurs occasions. Les porteurs sur la ligne de front devaient transporter de l'eau, du mortier et également creuser des abris. Il n'a jamais vu de femmes être utilisées pour le portage, mais ces dernières effectuaient d'autres types de travail forcé. Il a vu des villageois (parfois 50 à la fois) être contraints de construire des camps militaires à Demawso, Huay Paung Laung, Hti Hta et Pruso. Ces constructions duraient environ deux semaines, mais les femmes et les enfants ne participaient pas à ces travaux. Il a été témoin d'une opération de grande envergure à la fin de 1992 qui impliquait sept bataillons sur la ligne de front dans l'Etat Kayah et qui a requis 3 000 porteurs pendant huit mois. Plusieurs de ces porteurs furent battus ou tués. Il a également été témoin de plusieurs types de travail forcé en tant que militaire. Il a lui-même travaillé sur la ligne de chemin de fer Aungban-Loikaw. Il a vu environ 1 000 personnes effectuer ce travail (nettoyage et égalisation du terrain), mais à différents endroits sur le site de travail. Le travail était le même pour les militaires que pour les villageois. Ce qui était différent était la façon dont le travail était organisé: les militaires devaient travailler pendant un certain nombre d'heures par jour, tandis que les villageois recevaient une tâche à terminer et ne pouvaient retourner au village avant que cette tâche ne soit complétée. A l'occasion, il est retourné dans son village; tous les villageois devaient effectuer du travail forcé. Les gens devaient aller au camp militaire (à trois miles du village) une fois par semaine. De plus, ils pouvaient être réquisitionnés pour du portage pour des périodes de quatre à six mois. Les villageois avaient été contraints de construire ce camp militaire. Il précise que la vie d'un simple soldat était très difficile et qu'il était souvent maltraité par les officiers supérieurs. Il a déserté parce qu'il ne pouvait plus supporter cette situation. La pire chose pour lui s'est produite lorsque, en juin 1995, les soldats n'ont pas eu de riz pendant deux semaines et ont dû survivre avec des feuilles trouvées dans la brousse (ceux-ci étaient sur la ligne de front). Le riz avait été volé par des gens corrompus qui travaillaient à la distribution. Il a toujours reçu son salaire mais, presque chaque mois, un pourcentage était prélevé en guise d'amende parce qu'il n'aurait pas exécuter un ordre de façon adéquate ou pour d'autres raisons. Deux ans après avoir rejoint l'armée, il songeait déjà à déserter; les militaires doivent signer pour au moins dix ans lorsqu'ils se joignent à l'armée. Lorsque les déserteurs sont repris, ils sont envoyés en prison. S'ils prennent leurs armes avec eux lors de leur désertion, ils sont tués. Malgré cela, plusieurs personnes désertent. Il a quitté le Myanmar en mars 1996.
  2475. 94
  2476. Ethnie: Birman
  2477. Age/Sexe: 24 ans, masculin
  2478. Situation familiale: Six (parents, lui-même et trois jeunes soeurs)
  2479. Education: Education monastique
  2480. Activité professionnelle: Soldat
  2481. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tan Daw Gyi, division de Magway
  2482. Le témoin a quitté le Myanmar en mars 1996. Auparavant, il avait joint l'armée en 1987 (bataillon 72), et a été dans l'armée pendant neuf ans, jusqu'à sa désertion avec le témoin 95 en mars 1996. Il a joint l'armée à Taugdwingyi (a signé pour dix ans) et est resté là durant un mois avant d'être envoyé pour l'entraînement pendant six mois. Il s'est, par la suite, joint au bataillon 62 dans l'Etat Kayah, qui était situé à Lawpita. Le bataillon était divisé en cinq compagnies et chacune effectuait une rotation à la ligne de front: chaque compagnie devait passer six mois sur la ligne de front, puis se reposer pour une courte période de temps et retourner mais pas toujours au même endroit. Il a vu du portage à Lawpita; son bataillon a utilisé des porteurs afin de transporter des marchandises et des munitions sur la ligne de front. Les porteurs pour la ligne de front étaient recrutés dans les villages avoisinants mais également dans des villages un peu plus éloignés. Pour chaque groupe de 30 à 40 soldats, il y avait environ 40 porteurs. Les militaires allaient dans les villages et forçaient les gens à devenir porteurs. Ils utilisaient principalement des personnes âgées de 17 à 40 ans. Lors des patrouilles, les soldats utilisaient les porteurs pour une journée, puis les relâchaient le jour suivant s'il était possible de trouver d'autres porteurs au même moment. Lorsque les porteurs ne pouvaient pas transporter leurs charges, ils étaient battus et violentés; lorsque battus avec un bâton, ceux-ci souffraient régulièrement de blessures, telles que des coupures et des ecchymoses. Durant les périodes importantes (telles que des opérations), les porteurs malades et qui ne pouvaient continuer étaient tués. Les soldats avaient l'habitude de prendre de la nourriture des villages afin de nourrir les porteurs, c'est-à-dire un condensé de lait au riz par jour, avec du curry (nourriture acceptable puisqu'elle était la même que celle des villageois). Lorsque les militaires entraient dans un village afin de trouver des porteurs, les villageois n'avaient pas d'autres choix que d'être présents: c'était un ordre. Si les porteurs essayaient de s'enfuir durant le portage, ils étaient tués. Les porteurs étaient souvent blessés ou pouvaient mourir lors d'échanges de coups de feu durant les combats. Les militaires ne mettaient pas les porteurs devant eux lors des combats et ne les ont pas utilisés afin de détecter les mines (l'unité avait un expert sur les mines qui réussissait à désamorcer les mines suspectes). Il a déserté parce qu'il ne pouvait plus tolérer le traitement que lui infligeaient ses supérieurs, particulièrement parce qu'ils lui enlevaient un pourcentage de son salaire et qu'il était incapable de faire vivre sa femme.
  2483. 95
  2484. Ethnie: Birman
  2485. Age/Sexe: 20 ans, masculin
  2486. Situation familiale: Parents, lui-même et sept frères et soeurs
  2487. Activité professionnelle: Soldat (privé)
  2488. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Lat Paing Taung, Tharawady, division de Bago
  2489. Le témoin a rejoint à l'armée en 1991. Il a déserté avec le témoin 94 en mars 1996 et a quitté le Myanmar. Il a joint l'armée à Hmawbyi (division de Yangon) et est resté pendant six mois avant d'entreprendre six mois d'entraînement. Il s'est alors joint au bataillon 72 localisé à Lawpita dans l'Etat Kayah. Il est d'accord avec le témoin 94 sur la description des traitements infligés aux porteurs et le fait que ceux-ci ne furent pas utilisés pour des opérations de déminage. Les villageois étaient contraints de cultiver pour l'armée à son camp militaire (culture de légumes). Pour ce genre de travail, une personne par famille dans le village devait se rendre dans le camp militaire (le village près du camp comptait environ 500 familles). Les travailleurs ne devaient pas venir à tout moment, mais devaient travailler en grand nombre durant les périodes de pointe, c'est-à-dire celles des plantations et des récoltes. Les hommes, les femmes et les enfants effectuaient ce travail. Les militaires traitaient les villageois durement et les injuriaient, mais il n'a jamais vu un villageois se faire brutaliser pendant qu'il travaillait. Il s'est enfui suite à un problème avec son officier supérieur. Cet officier accusait les villageois d'avoir des contacts avec les rebelles et ainsi les emprisonnait. Il utilisait ce moyen afin d'obtenir d'eux de l'argent. Lorsqu'ils étaient emprisonnés, ceux-ci étaient battus et frappés avec des armes. Il était en désaccord avec son supérieur concernant ces pratiques, et il a donc décidé de déserter. Il a entendu parler de militaires qui abusaient des femmes, mais il ne l'a jamais vu lui-même.
  2490. 96
  2491. Ethnie/religion: Karenni, bouddhiste
  2492. Age/Sexe: Né le 13 novembre 1959, masculin
  2493. Situation familiale: Marié avec trois enfants; neuf frères et soeurs
  2494. Education: Neuvième année
  2495. Activité professionnelle: Commerçant à Loikaw
  2496. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Loikaw, Etat Kayah
  2497. Le témoin a été reconnu coupable de crimes liés à la drogue en avril 1996 à Loikaw et condamné à neuf ans d'emprisonnement. En tant que prisonnier, il a dû effectuer du portage pendant un mois, à partir du 12 mai 1996, se rendant entre Loikaw et Huay Paung Laung pour transporter des munitions et des armes. Après cela, il a travaillé comme journalier à Loikaw dans un camp militaire, creusant un étang pour les poissons, concassant des pierres, préparant des briques. Le 12 août 1997, il a encore effectué du portage ("chaque fois qu'ils ont besoin de main-d'oeuvre, ils utilisent les prisonniers comme porteurs"), et le 30 août 1997 il a fui le portage pour se rendre en Thaïlande. Durant le portage et pendant les assignations dans le camp militaire, les prisonniers et les villageois qui effectuaient du travail forcé n'étaient jamais ensemble. En tant que porteur, il n'a jamais vu les militaires attraper un civil pour le contraindre à effectuer du portage. Lorsque les militaires arrivaient dans un village, tous les habitants avaient déjà fui, et des soldats brûlaient les maisons, les fermes et les magasins. Les militaires en profitaient également pour tuer le bétail et le manger (porcs, poulets). Avant sa condamnation en avril 1996, lui et sa famille avaient rarement effectué du travail forcé et n'avaient jamais fait du portage parce que, à chaque fois que l'armée avait besoin de main-d'oeuvre, elle s'adressait aux chefs de la section de Loikaw, qui devaient lui fournir cinq à dix travailleurs par section. Lui et les membres de sa famille n'ont jamais été choisis parce qu'ils payaient. Il y avait 13 sections à Loikaw et 200 familles dans sa section. S'ils avaient besoin de cinq porteurs et que personne ne voulait y aller, les charges de porteurs de 50 000 kyats étaient divisées entre les 200 familles, et tous ceux qui ne voulaient pas envoyer un travailleur devaient payer 250 kyats. Il n'y avait pas de montant fixe, ce montant était habituellement entre 200 et 300 kyats et il pouvait augmenter. La dernière fois il a dû payer 200 kyats. Ce montant n'était valable que pour sa famille puisque ses frères et soeurs vivant ailleurs devaient payer séparément. Il ne savait pas pour combien de temps les porteurs devaient partir, il savait seulement qu'il devait payer cette taxe de porteur au moins une fois par mois. Il a vu lui-même d'autres formes de travail forcé. Par exemple, la construction du chemin de fer entre Loikaw et Aungban, qui a débuté en 1992-93 et qui se poursuit, a été entreprise avec du travail forcé. Suite aux ordres de l'armée donnés aux chefs de sections, chaque section a dû terminer une partie du chemin de fer dans un temps déterminé. Sa section a dû effectuer du travail sur une distance de quatre à cinq miles et une personne devait s'y rendre pendant cinq mois. Ceci se passait près de Loikaw en 1992 ou 1993. Il partait le matin et revenait le soir, et parfois prenait trois à quatre jours pour se reposer. Aucune famille n'avait le courage de désobéir aux ordres et tous y allaient. Sur le site de travail, il devait signer une feuille de présence. Si quelqu'un n'y allait pas, après quatre ou cinq jours, le chef de section les appelait et les menaçait de leur infliger une amende. De plus, puisque l'armée était pressée de terminer ce chemin de fer, elle ne permettait pas aux gens de prendre de longues pauses si ceux-ci étaient fatigués. Ainsi, s'ils se reposaient trop longtemps, ils étaient battus et brutalisés et les militaires les forçaient à retourner au travail. Il a vu des gens sérieusement blessés, mais personne ne fut tué. De plus, chaque samedi, une personne par famille dans la section devait aller pour une journée et demie dans le bâtiment militaire afin de le nettoyer et devait signer une feuille de présence. Il avait l'habitude de payer 50 kyats au chef de section afin de se faire remplacer pour ce travail. Parfois, il a vu des villageois être maltraités par les soldats lorsqu'il travaillait dans le bâtiment (mais jamais pendant les corvées de nettoyage durant la semaine). De plus, au moins deux à trois fois par mois, il était appelé pour une journée entière afin d'effectuer du travail d'urgence qui pouvait être du nettoyage ou repeindre des bâtiments lorsqu'un officier supérieur visitait Loikaw, ou la construction d'une nouvelle pagode en vue d'une occasion spéciale (même s'il était bouddhiste, toutes religions confondues devaient y aller, incluant les Musulmans et les Chrétiens). Les ordres provenaient du chef de section de l'armée. Il devait y aller et il n'avait aucun choix. S'il refusait, il recevait une amende de 50 kyats du chef de section. Parfois, lorsqu'il n'était pas libre, il trouvait quelqu'un pour le remplacer pour la somme de 50 kyats. A quelques occasions, il a vu des gens être maltraités pendant les travaux d'urgence mais jamais pendant la construction d'une pagode.
  2498. 97
  2499. Ethnie/religion: Birman, Bouddhiste
  2500. Age/Sexe: Né en 1960, masculin
  2501. Situation familiale: Marié avec deux enfants; cinq frères et soeurs
  2502. Education: Deuxième année
  2503. Activité professionnelle: Cultivateur (indépendant)
  2504. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chaung Hna Su, Ouk-hpo, division de Bago (emprisonné depuis avril 1994 à Loikaw, s'est échappé en août 1997 du portage alors qu'il était prisonnier)
  2505. Le témoin, alors qu'il travaillait comme cultivateur, fut emprisonné à Tharawady (division de Bago) en avril 1990 et condamné à cinq ans d'emprisonnement, puis relâché en décembre 1993. Alors qu'il se trouvait en prison, il a travaillé en juin 1990 sur l'autoroute Yangon-Mandalay, et en 1991 à la construction de centrales électriques à Loikaw. Il fut relâché en décembre 1993. Il n'avait pas d'argent pour retourner à son village et dans famille, il a donc décidé de se joindre à des amis rencontrés sur le projet électrique puisque ceux-ci étaient propriétaires d'une ferme au village de Daw Khu Si, dans le canton de Demawso. Il est resté sur cette ferme et les a aidés. En avril 1994, certains caporaux de l'armée sont venus et lui ont ordonné de couper les fils d'électricité et de téléphone. Il s'est exécuté parce qu'il avait peur. Il a, par la suite, été reconnu coupable de voler ces câbles et fut condamné à dix ans d'emprisonnement à Loikaw (les caporaux ont été condamnés à trois ans). Il s'est enfui pendant le portage en août 1997. En 1996, tous les prisonniers ont été amenés par bateau pour nettoyer et élargir la rivière Pilu au barrage de Moebye pendant quatre jours, mais les gardiens de sécurité les ont forcés à terminer le travail en deux jours. Il n'y avait que des prisonniers et aucun villageois. Durant cette assignation comme porteur, il était toujours séparé des villageois. En août 1997, avant de s'échapper et de quitter le Myanmar, il a vu un compagnon prisonnier qui faisait du portage qui ne pouvait porter le poids de sa charge et qui a tenté de s'échapper. Ce dernier fut battu à mort par les soldats lorsque ceux-ci l'ont retrouvé. Il a vu des villageois effectuer du travail forcé. Alors qu'il se trouvait à Daw Khu Si, de janvier à avril 1994, il a seulement entendu que, suite aux ordres des officiers au chef de village, les villageois devaient se rendre et travailler pour les militaires, mais il n'a jamais posé de questions à propos de ce travail. En 1996, il a vu des villageois effectuer du travail forcé à Loikaw dans le complexe militaire de TaKaSa ("quartier général habituel de l'armée") pour du travail ménager, creuser des étangs et des puits. Il ne sait toutefois pas pour combien de temps ces travaux ont duré.
  2506. 98
  2507. Ethnie: Karen
  2508. Age/Sexe: 27 ans, masculin
  2509. Situation familiale: Célibataire, six frères et soeurs
  2510. Education: Quatrième année
  2511. Activité professionnelle: Travailleur dans une mine de plomb
  2512. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Plo Ba, Mawchi, Etat Kayah (relocalisé en 1996 à Lo Kha Lu, près de Mawchi)
  2513. Le témoin a quitté le Myanmar au début de 1998. Relocalisation. Suite à un ordre donné par un officier de l'armée au chef de village, tout le village de Plo Ba a été relocalisé en juin 1996 à un endroit appelé Lo Kha Lu, également dans le canton de Mawchi, à une demi-journée de marche. Le village de Plo Ba était entièrement Karen (environ 50 familles). Au même moment, 12 villages constitués uniquement de Karens ont été relocalisés à Lo Kha Lu, où 150 familles vivent dorénavant. Le témoin ne connaît pas la raison de cette relocalisation. Personne n'a pu rester dans le village de Plo Ba et ils ont dû détruire eux-mêmes leurs maisons. Une ou deux familles ont refusé de partir et ont été relocalisées à un endroit différent, mais tous se sont vus interdits de retourner dans leur village. A Lo Kha Lu, ils ont eu trois semaines pour construire eux-mêmes un nouveau village puisqu'ils avaient transporté tout eux-mêmes depuis leur ancien village. Lo Kha Lu était au pied d'une colline, et il y avait une base de l'armée en haut de cette colline. Il a travaillé dans la mine de plomb de Mawchi de 1994 jusqu'à la relocalisation et a continué par la suite. Après la relocalisation à Lo Kha Lu en juin 1996, il a travaillé comme porteur en trois occasions: deux fois, suite à un ordre reçu du chef du village (pendant trois semaines en août 1996 et pendant un mois deux semaines plus tard). Environ 150 personnes devaient s'y rendre à chaque fois, ceci incluant les femmes et les garçons d'environ 13 ans; il n'était pas informé auparavant de la durée du travail ni promis ou payé quoi que ce soit. Pour toute nourriture, on leur donnait l'équivalent de quatre bols de riz au lait pour trois jours, avec un peu de poisson, mais il n'était pas permis de cueillir des légumes dans la forêt. La troisième fois, en novembre 1997, il a été amené directement par les militaires à Lo Khu Lu avec environ 100 autres personnes et forcé de transporter du riz à Buko. Il est tombé malade après une semaine et ne pouvait transporter sa charge; il n'a reçu aucune assistance médicale mais a plutôt été battu avec des armes et abandonné sur le chemin. Il a dû retourner et marcher pendant deux jours alors qu'il crachait du sang et qu'il avait toujours des douleurs à la poitrine et ne pouvait plus travailler (il montre une petite cicatrice; il montre également une cicatrice faite à la suite d'un coup accidentel subi en 1995 lorsqu'il restait avec sa cousine et que celle-ci avait décidé de rendre visite aux militaires la nuit). Il a également vu que, lorsque 100 personnes avaient été amenées comme porteurs en novembre 1997 à Lo Khu Lu, certaines avaient refusé et avaient été battues, frappées au visage par les militaires, et il avait vu leurs visages tuméfiés et couverts de sang. Il n'a rien vu concernant les femmes. Dans son ancien village (Plo Ba), avant 1996, les gens devaient effectuer du portage, incluant sa famille, mais pour de courtes distances, par exemple pour transporter des rations de nourriture pendant une journée, une fois ou deux fois par mois. A partir de décembre 1997, plusieurs villageois ont reçu l'ordre de leur chef de travailler à l'amélioration de la vieille route entre Mawchi et Toungoo. Sa famille s'est vu allouer un mile où elle devait remplir des trous avec des pierres et élargir la route d'un demi-mètre de chaque côté. Ils devaient transporter tout l'équipement et la nourriture depuis leur maison. Puisque la partie allouée était près de leur village, il a effectué tout ce travail avec sa soeur plus âgée en dix jours, marchant chaque matin et chaque soir deux heures pour aller et revenir au village. Ils n'étaient pas payés. En plus de son village, 15 personnes étaient requises en tout temps dans le camp, en plus de personnes d'autres villages, ce qui représentait environ 60 personnes à la fois. Depuis la relocalisation (mais également avant à Plo Ba), sa famille devait envoyer un travailleur environ trois fois par mois pour quatre jours au camp. Il y a travaillé pour la dernière fois en novembre 1997 suite aux instructions du chef (avant, il avait été utilisé en tant que porteur). Pendant deux jours, il a creusé un abri; les deux jours suivants, il a dû construire une clôture que quelqu'un a dû terminer par la suite. De plus, chaque samedi, suite à un ordre émanant d'un officiel de l'armée donné par le chef du village, une personne par famille devait travailler une demi-journée afin de débroussailler autour du village et de s'occuper de soins sanitaires. Finalement, au moins deux fois par mois, il a dû, pendant une demi-journée, effectuer du travail d'urgence tel que transporter de la nourriture ou de l'eau pour les militaires. Globalement, lors des derniers mois de 1997, il a dû travailler cinq jours par semaine pour l'armée et il ne lui restait donc que deux jours par semaine pour travailler avec sa famille (de plus, sa soeur devait également effectuer du travail forcé pour la construction d'une route). Dans sa famille, il n'y avait que sa soeur plus âgée et sa mère; ses autres frères et soeurs avaient quitté. Son père est décédé. Sa soeur travaillait dans le jardin, mais sa mère ne pouvait travailler à cause de maux d'estomac. A la mine, il recevait 150 kyats par jour pour pousser un chariot mais, lorsqu'il effectuait du travail forcé, il n'était pas payé. Il n'a jamais été payé pour le travail forcé, ni pour la construction de la route ni pour quelqu'autre travail ailleurs.
  2514. 99
  2515. Ethnie: Karenni (Padaung)
  2516. Age/Sexe: 67 ans, masculin
  2517. Situation familiale: Huit (lui, sa femme, quatre fils et trois filles)
  2518. Activité professionnelle: Conducteur de tracteur (à l'époque, au service du gouvernement)
  2519. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Loikaw, Etat Kayah
  2520. Le témoin a quitté le Myanmar le 30 avril 1997. Il a dû effectuer du travail forcé et du portage. Il devait payer de l'argent s'il ne pouvait y aller. Le travail forcé qu'il a dû effectuer comprenait creuser le sol et concasser des pierres; il devait fournir ses propres outils. Chaque famille se voyait donner une charge de travail à compléter. La période la plus difficile a été de 1992 à 1994 lorsque le chemin de fer Loikaw-Aungban devait être construit. A cette époque, un membre de chaque famille devait partir pour une semaine entière (plus de 100 personnes). Ils devaient apporter leurs propres nourriture et outils et devaient même prévoir eux-mêmes les moyens de transport pour se rendre sur le site de travail. Quiconque qui ne pouvait y aller se devait de payer de l'argent. Il a lui-même effectué ce travail ainsi que ses deux fils les plus âgés (parfois en rotation, parfois en même temps). Ils devaient travailler pour environ dix jours à la fois afin de compléter la tâche qui leur était assignée, ce qui était très exigeant. Ils étaient incapables de gagner leur vie à cette époque et devaient parfois vendre leur propriété pour pouvoir survivre. Puisque le site de travail était très éloigné, ils devaient dormir sur place. Les ordres émanaient du chef du LORC, qui eux-mêmes recevaient les ordres de l'officier cantonal du LORC. Il n'a jamais été battu pendant son travail (parce qu'il était plus vieux et que les autres villageois l'aidaient à compléter sa charge de travail), mais d'autres civils ont été battus et ont souffert de blessures. Ils étaient battus par les militaires s'ils travaillaient trop lentement ou s'ils parlaient trop. Il y avait également des prisonniers qui effectuaient le travail (enchaînés), et ceux-ci étaient violemment battus. Il a vu de nombreux prisonniers avec des blessures très graves résultant de ces violences et également plusieurs prisonniers qui sont morts (habituellement suite aux coups infligés par les militaires qui les surveillaient). Un soir, il a vu six prisonniers tués de cette façon en l'espace de deux heures. Il a également effectué du portage à deux occasions, la première en 1974, la seconde en 1978. Lors de la deuxième occasion, il a été porteur pendant trois mois lors d'une opération militaire majeure. Quatre membres de sa famille sont morts en effectuant du portage durant cette opération. Le traitement était terrible et les porteurs ne recevaient pas assez de nourriture et d'eau. Un de ses fils a également été utilisé comme porteur récemment, mais ils ont payé 1 000 kyats afin de le faire relâcher. Depuis 1987 ou 1988, les gens dans sa région ont été contraints de travailler dans les camps militaires (creusant des tranchées et des abris ou construisant des clôtures) et pour nettoyer des pagodes. Il n'a jamais effectué ce travail lui-même, mais il a vu d'autres le faire. Certaines personnes étaient contraintes de monter la garde autour de pilonnes électriques afin d'empêcher le sabotage des rebelles. Des gens ont également dû transporter du bois pour le feu et de l'eau au camp militaire en haut de la colline parce que les militaires étaient trop paresseux pour descendre la colline et aller chercher de l'eau pour le nettoyage. Les gens devaient également effectuer du travail forcé dans les champs de riz appartenant aux militaires. A Demawso et Loikaw, il connaît des gens qui ont eu leur ferme confisquée par l'armée et qui ont été contraints de travailler sur leurs terres sans être payés. Les militaires leur disaient la quantité de récolte qu'ils désiraient et, si les villageois ne réussissaient pas à produire assez, ils devaient compenser eux-mêmes pour les manques. Ceci était très fréquent. La moitié de ses terres a été confisquée (trois acres et des plantations d'arachide) en 1995; il a également dû, dans le passé, travailler dans les champs de riz pour l'armée, mais ceci n'était pas souvent le cas dans les villes, puisque les gens des villages devaient travailler beaucoup plus pour l'armée. Les villageois devaient construire et entretenir tous les camps militaires ainsi que s'occuper des besoins des militaires; si un haut officier visitait le camp, les villageois devaient lui apporter de la nourriture et le divertir. Il existait une colline appelée Sin Taung ("colline de l'éléphant") près de Demawso. Les Chrétiens avaient placé une croix au sommet de cette colline et, comme provocation, les militaires ont forcé les villageois bouddhistes à construire une pagode juste à côté de cette croix. Les villageois devaient tout faire pour l'armée. Les propriétaires de charrettes, de tracteurs, de bateaux, etc. devaient être disponibles en permanence pour le camp militaire au cas où les soldats auraient besoin d'eux. Dans un cas particulier, il a connu un conducteur de charrette qui a été envoyé à un village à quatre miles de chez lui afin d'acheter un paquet de cigarettes pour un officier. Une autre fois, un officier a appelé un villageois afin qu'il vienne et apporte une lettre d'amour à une jeune fille dans un autre village. Ce genre de chose était très fréquent. Lorsque le festival sportif des étudiants eut lieu à Loikaw, les villageois ont été contraints de fournir tout le matériel tel que du bois ou des briques et ont dû construire toutes les infrastructures nécessaires. Il était membre du NLD. Les autorités l'ont contraint à démissionner en janvier 1996 mais, malgré ceci, les soldats sont venus une nuit pour l'arrêter. A ce moment, il était absent, et il a réussi à échapper à cette arrestation et a décidé de s'enfuir. Sa famille est toujours au Myanmar (sauf ses trois fils qui ont fui il y a déjà six ans). La situation est très oppressante; les autorités utilisent toutes les opportunités pour opprimer les gens. Les gens, même les fonctionnaires, sont contraints de travailler une demi-journée presque chaque samedi pour effectuer des travaux à Loikaw. Il a lui-même été arrêté à trois reprises. La première fois, en 1964, il a passé six mois dans la prison de Taunggyi. La seconde fois, en 1983, il a été condamné à six mois mais n'a passé que quinze jours à la prison de Loikaw et a été relâché après avoir payé 10 000 kyats. La troisième fois était en mai 1995. Il était dans une petite cellule réservée normalement pour une personne, avec neuf autres personnes pendant 45 jours. Cette cellule était pratiquement complètement dans l'obscurité, avec seulement une petite ampoule de cinq watts. On leur donnait deux bouteilles d'eau sale chaque jour pour s'abreuver. Parmi les prisonniers, certains étaient là depuis quatre mois et tous avaient été torturés. Il a été relâché lorsque les autorités n'ont pu trouver de preuves contre lui. Finalement, un de ses voisins karens retournait de Toungoo avec 10 000 kyats et un peu d'or lorsqu'il a été contraint de faire du portage. Les militaires l'ont embarqué sur un camion et l'ont accusé d'être un rebelle et l'ont tué. Les militaires ont volé tous ses biens. Ceci lui a été rapporté par deux témoins oculaires.
  2521. 100
  2522. Ethnie: Karenni
  2523. Age/sexe: 36 ans, masculin
  2524. Situation familiale: Marié, un fils, une fille
  2525. Activité professionnelle: Cultivateur
  2526. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Si Ko Leh, Shadaw, Etat Kayah (tout son village a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw le 7 juin 1996)
  2527. (Le témoin a donné son témoignage en présence des témoins 101, 102, 103 et 104.)
  2528. Il a dû faire du travail forcé avant et après sa relocalisation. Il a quitté le Myanmar en février 1997 après s'être enfui de prison. Il a été porteur à une occasion en 1990, pendant la saison sèche, juste après le Nouvel An. Il avait alors 27 ans. Il a reçu l'ordre du chef de village. Il a dû porter les rations de riz dans une région montagneuse près de Shadaw pendant trois jours. La distance qu'il a parcourue totalise 22 miles. Il s'est rendu à un camp militaire dans la montagne (grandeur moyenne, une compagnie). Il y avait environ 34 porteurs, incluant cinq personnes de son village, pour 60 soldats. Il n'y avait pas de femmes, mais des enfants (13-15 ans) et une personne âgée (60 ans). La journée commençait à 4 heures pour se terminer à 16 heures. Les porteurs devaient commencer avant le lever du jour et n'avaient pas le droit d'utiliser des torches électriques. Un repos de quelques minutes était autorisé. La première nuit, il a dormi dans la forêt alors que les deux nuits suivantes, il a dormi dans des villages. Il n'a pas vu de combat. Il n'a pas fait personnellement l'objet de mauvais traitements, mais a vu d'autres personnes être battues ou frappées avec des bâtons, des fusils ou les pieds puisqu'elles ne réussissaient pas à transporter la charge qui leur avait été assignée. Il était possible de payer un substitut. Environ 300 à 400 kyats. La relocalisation de son village entier a eu lieu le 7 juin 1996. A l'exception d'un peu de riz, il n'a pu rien emporter avec lui. Il s'est rendu sur un site près d'un camp militaire à Shadaw. Il a dû construire un abri pour sa famille puisqu'il n'y avait rien sur le site. Il n'a vu personne faire l'objet de mauvais traitements. Les autorités le suspectaient de faire partie des rebelles. Il a été arrêté quelques jours après son arrivée. Il est resté en prison pendant six mois. Il a fait l'objet de torture, notamment en ayant les mains attachées au plafond et les pieds immobilisés pendant de longues périodes. Pendant le mois où il n'a pas été en prison, il a dû faire différents travaux pour les militaires. Toutes les familles étaient soumises au travail forcé. En fait, elles ne pouvaient faire rien d'autre. Il a dû poser des clôtures et couper du bois. Il a dû travailler à quatre reprises, une fois par semaine au cours du mois où il n'a pas été incarcéré. C'est le chef de village qui lui a transmis l'assignation de travail. La journée commençait normalement à 6 heures et se terminait à 16 heures. Environ 30 à 60 personnes travaillaient avec lui, incluant cinq à dix femmes qui devaient faire le même travail. Il n'était pas rémunéré. Il n'était pas possible de refuser. En cas de refus, les autorités les privaient du peu de riz qui était distribué.
  2529. 101
  2530. Ethnie: Karenni
  2531. Age/sexe: 23 ans, masculin
  2532. Situation familiale: Marié, sans enfant
  2533. Activité professionnelle: Cultivateur
  2534. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Taku, Shadaw, Etat Kayah (son village entier a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en juin 1996)
  2535. (Le témoin a donné son témoignage en présence des témoins 100, 102, 103 et 104.)
  2536. Il a dû exécuter du travail pour l'armée avant et après sa relocalisation. Il a quitté le Myanmar en octobre 1997. Il a dû faire du portage à quatre reprises. C'est le chef du village qui lui a transmis l'ordre de travailler. La première fois, il avait 15 ans. Il a dû exécuter à cette occasion du travail durant la saison des pluies à proximité de la rivière Salween. Le portage aurait duré vingt jours. Il y avait environ 40 porteurs, dont trois de son village, pour 250 soldats. Il n'y avait pas de femmes mais des jeunes hommes de 15-16 ans. La personne la plus âgée devait avoir 50 ans. Il a dû transporter les casseroles pour la cuisine. Il n'a pas vu de combats. Il a été frappé avec les pieds à une reprise puisqu'il n'avançait pas assez rapidement. Même routine et traitement pour les autres fois où il a été porteur à l'âge de 15, 16 et 17 ans. La durée de chaque assignation: trois jours, six jours et quinze jours. Même genre de travail que pour le témoin 100. En fait, le travail ne finissait jamais. Il devait travailler deux à trois fois par mois. Il était autorisé à retourner chez lui dans ses temps libres pour aller chercher de la nourriture. Il y avait deux bataillons qui comptaient environ 500 hommes chacun à Shadaw (LIB 350 et LIB 428).
  2537. 102
  2538. Ethnie: Karenni
  2539. Age/sexe: 33 ans, masculin
  2540. Situation familiale: Marié. Son épouse serait décédée à Shadaw quelques jours après son accouchement, faute des soins médicaux nécessaires. Un fils
  2541. Activité professionnelle: Cultivateur
  2542. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Kraw Aw, Shadaw, Etat Kayah (le village aurait fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en mai 1997)
  2543. (Le témoin a donné son témoignage en présence des témoins 100, 101, 103 et 104.)
  2544. Le village du témoin a été brûlé par l'armée de manière à ce que les habitants ne puissent y retourner. Il a fait du travail forcé avant et après sa relocalisation. Il a quitté le Myanmar en août 1997. Avant la relocalisation. Il a été porteur à une occasion en 1993 durant la saison des pluies. L'assignation a duré deux jours. Trente porteurs devaient être présents pour 70 soldats, incluant deux enfants (13 ans) et quatre personnes de plus de 60 ans. Tous les porteurs étaient des hommes. La journée commençait à 9 heures pour se terminer à 16 heures. Il a dû porter les munitions pour les armes (MG42) et les rations de riz de son village à un autre village. Il ne recevait que très peu de nourriture. Il devait dormir dans la forêt. Il n'était pas rémunéré. Il n'a pas personnellement fait l'objet de mauvais traitements. Toutefois, son ami aurait été battu avec un bâton parce qu'il avait échappé la charge qui lui avait été assignée. Après la relocalisation. Il a dû faire du travail forcé pour les militaires. Le chef de village lui a transmis l'ordre de travail. Même nature que témoin 100. Le travail exigé par les militaires ne finissait jamais. Au cours de la période d'un mois et demi où il est resté au site de relocalisation, il a dû faire du travail pour les militaires à trois reprises. Les militaires fournissaient de la nourriture de façon irrégulière. Les rations étaient toutefois insuffisantes. Il n'était pas autorisé à retourner chez lui. Il n'était pas rémunéré. Il ne pouvait pas refuser. Il était toujours possible de payer un substitut ou de verser des pots-de-vin pour être exempté. Il ne l'a pas fait et ne connaît pas les montants qui devaient être versés. Les militaires se seraient appropriés l'ensemble de ses animaux (buffles, une vache, quatre cochons, dix poulets, etc.). Il est retourné quelques jours dans son village avant de revenir en Thaïlande.
  2545. 103
  2546. Ethnie: Karenni
  2547. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2548. Situation familiale: Marié, trois fils
  2549. Activité professionnelle: Cultivateur
  2550. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Klaw Leh Du, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 37 familles. Il était situé à deux miles du site de transfert à Shadaw. Il a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en juin 1996)
  2551. (Le témoin a donné son témoignage en présence des témoins 100, 101, 102 et 104.)
  2552. Le village du témoin a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en juin 1996. En août 1997, il a quitté Shadaw pour s'installer dans les collines de Soh Paw (à six miles). Là, il y a fait de la culture (riz, légumes), mais l'armée l'a forcé à partir. Alors il est venu en Thaïlande à la fin de 1997. Il a dû faire du travail forcé avant et après sa relocalisation. Avant la relocalisation. Il a dû travailler sur la construction de routes (transport de pierres) et a dû exécuter différents travaux pour les militaires: coupage de bambous, construction d'abris pour les personnes relocalisées, nettoyage des camps. Le site de relocalisation étant près de son village, il a participé aux travaux préparatoires. Il a fait ce travail pendant trois ans, dix fois par mois, six mois par année. Il a vu des hommes, des femmes, des enfants (10 ans) et des personnes plus âgées (plus de 50 ans) travailler. Après la relocalisation. Il a dû faire le même genre de travail que le témoin 100. En outre, il a dû construire des abris pour les personnes relocalisées et participer à la réfection de la route vers Loikaw. Il a dû travailler trois fois par mois pour un total de douze fois pendant l'année. Le reste du temps, il a travaillé à titre de journalier pour les fermes près du camp (les propriétaires étaient Karenni et Shan). Il était rémunéré en kyats et en riz. Il a été arrêté une fois puisqu'il a refusé de travailler. Il a passé une nuit et deux jours en prison. Il a été battu. Il a vu de nombreuses autres personnes battues (30-50 personnes). Des membres de l'armée se seraient appropriés tous ses animaux sans indemnisation, arguant que ces animaux étaient sauvages et qu'ils pouvaient dès lors les prendre.
  2553. 104
  2554. Ethnie: Karenni
  2555. Age/sexe: 70 ans, masculin
  2556. Situation familiale: Marié, deux filles, cinq fils
  2557. Activité professionnelle: Cultivateur
  2558. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Ta Ma, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 50 maisons (population: 1 000); il a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en juin 1997)
  2559. (Le témoin a donné son témoignage en présence des témoins 100, 101, 102 et 103.)
  2560. Il a quitté le Myanmar en octobre-novembre 1997. Il a dû faire le même genre de travail que le témoin 100 au site de relocalisation à Shadaw. Le mois où il est resté au site de relocalisation, il a travaillé environ trois fois pour les militaires. Trois à quatre cents personnes faisaient le même travail que lui. Il n'a pas vu de femmes ou d'enfants travailler. Il a pu retourner à quelques reprises dans son village pour y chercher de la nourriture. A une occasion, il a été arrêté par un militaire qui l'aurait menacé. On lui a attaché les mains dans le dos. Il a dû rester ainsi une journée et une nuit. Il s'est enfui par la suite. Il a vu de nombreuses autres personnes faire l'objet de mauvais traitements.
  2561. 105
  2562. Ethnie: Karenni
  2563. Age/sexe: 22 ans, masculin
  2564. Situation familiale: Marié (s'est marié en Thaïlande), une fille
  2565. Activité professionnelle: Cultivateur
  2566. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Ta Ma, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 15 familles (population: 200))
  2567. Il a quitté le Myanmar en juin 1996 au moment où son village a fait l'objet d'un transfert forcé. Avant la relocalisation. Il a été porteur à deux reprises en 1991 et 1992. Il ne peut oublier cette expérience qui l'a manifestement traumatisé. La première fois, l'assignation a duré quatorze jours alors que la seconde s'est prolongée pendant deux mois et demi. Dans son groupe, il y avait respectivement 20 et 50 porteurs pour 300 et 2 000 soldats (il ne peut préciser le nombre total de porteurs à chaque fois). Des femmes ont dû porter lors de la première journée de la deuxième occasion où il a été réquisitionné. Pour sa part, il devait transporter les casseroles et les munitions. Lors de la seconde fois, il aurait été utilisé à titre de bouclier humain par l'armée lors d'un combat. Il n'était pas rémunéré. Il a été battu à deux reprises puisque, trop exténué, il ne réussissait pas à suivre la colonne. Après la relocalisation, il a quitté le Myanmar puisqu'il ne voulait pas se rendre au site de relocalisation auquel il lui avait été ordonné de déménager. Il avait entendu parler que les gens faisaient l'objet de mauvais traitements et qu'on ne pouvait rien y faire sauf ce que l'armée ordonnait. Il ne pouvait pas toutefois rester dans son village. Advenant qu'une personne refusât de déménager, le village entier était exécuté à titre de représailles. Un ordre écrit était transmis au chef de village à cet égard. Il l'a vu et lu. Le document était signé par un officier du centre de commandement de Loikaw. Le document précisait également le lieu de relocalisation, le fait que tous les villages situés dans le district de Shadaw devaient être transférés au site de relocalisation et la date limite pour ce faire (7 juin 1996). Il a vu des personnes qui auraient été arrêtées par l'armée puisqu'elles se cachaient dans la jungle pour ne pas avoir à déménager au site de relocalisation. Un homme qui se serait échappé, après avoir été arrêté par l'armée, lui a raconté qu'il avait été battu et frappé alors qu'il avait les mains attachées dans le dos, puisqu'il ne voulait pas déménager au site de relocalisation.
  2568. 106
  2569. Ethnie: Karenni
  2570. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2571. Situation familiale: Marié, trois fils, trois filles
  2572. Activité professionnelle: Cultivateur
  2573. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Kraw Aw, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 105 familles (population: plus de 500); il a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en juin 1996)
  2574. Il a quitté le Myanmar en juin 1997. Avant la relocalisation. Il aurait été 1) porteur, aurait travaillé 2) sur les routes et 3) sur les chemins de fer. 1) Aurait été porteur à quatre reprises. La première fois, il y a dix ans (il avait 12 ans) et la dernière fois, il y a environ cinq ans. Il a dû porter la nourriture et les munitions, pendant la saison sèche (à trois reprises) et celle des pluies (à une reprise). Seuls des hommes étaient porteurs. Il a toutefois vu des enfants d'une dizaine d'années qui accompagnaient le groupe et devaient porter différentes choses. Les assignations ont duré environ deux, trois et sept jours. Il a dû dormir dans la forêt. Les militaires ne fournissaient que de temps à autre un repas par jour. La ration était tout à fait insuffisante. Il n'a pas vu de combat. Il n'a pas été personnellement battu, mais a vu son ami l'être en raison du fait qu'il ne réussissait pas à suivre le groupe. Pour ce qui est de la 2) route, il s'agissait de la route entre Shadaw et la rivière Salween (une dizaine de miles). Il y aurait travaillé, il y a environ huit ans, une journée. C'est le chef de son village qui l'aurait informé du travail à exécuter. Plus de 1 000 personnes de différents villages auraient travaillé avec lui, incluant des femmes (une vingtaine), des enfants (une dizaine d'environ 7 ans d'âge) et des personnes plus âgées (une trentaine de plus de 60 ans). La journée commençait à 7 heures pour se terminer à 15 heures. Il devait nettoyer la route. Il a dû apporter sa propre nourriture. Il n'a pas été rémunéré. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements. Il n'en a pas vu non plus. Enfin, pour ce qui est du 3) chemin de fer près de Shadaw, il a dû apporter, il y a six ans, des bûches de bois pour la voie ferrée. Il ne sait pas pour quelle voie ferrée. Le chef du village l'a informé de cette réquisition. Une cinquantaine d'autres personnes ont dû faire de même. Il n'a jamais été rémunéré même si on lui avait promis qu'il serait indemnisé. Après la relocalisation, il a quitté son village puisqu'il ne voulait pas déménager au site de relocalisation. Le chef de son village lui aurait montré l'ordre reçu des militaires aux termes duquel tout le village devait être transféré au site de Shadaw avant le 7 juin 1996. Il aurait vu ce document trois jours avant la date d'échéance. Ne sachant pas lire, le chef de village lui aurait dit ce qu'il contenait. Il ne voulait pas déménager au site de relocalisation puisqu'il craignait ne pas être en mesure de subvenir aux besoins de sa famille. En outre, on lui avait dit que les personnes transférées étaient forcées de travailler pour les militaires sans être rémunérées.
  2575. 107
  2576. Ethnie: Karenni
  2577. Age/sexe: 41 ans, masculin
  2578. Situation familiale: Marié, trois fils, trois filles
  2579. Activité professionnelle: Cultivateur
  2580. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Kraw Aw, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 105 familles (population: plus de 500); il a fait l'objet d'un transfert forcé à Shadaw en juin 1996)
  2581. Il a quitté le Myanmar en juin 1996 après quelques jours au site de Shadaw. Avant la relocalisation. 1) Il a été porteur à trois reprises pour l'armée. La première fois lorsqu'il avait 15 ans. La dernière fois, deux ans avant son départ. C'était durant la saison des pluies. Seuls des hommes étaient porteurs, incluant des enfants (aux environs de 8 ans) et des personnes plus âgées (plus de 70 ans). Il a dû se rendre, en partant de son village, dans l'Etat Shan. Il y avait plus de 80 porteurs pour 500 soldats. Il n'était toutefois pas en mesure de voir tous les porteurs. Il devait transporter les munitions, les journées commençant à 6 heures pour se terminer à 17 heures. Il n'avait droit qu'à un seul repas par jour, soit une poignée de riz. Il devait dormir dans la forêt. Il n'était pas rémunéré. Il a été battu et frappé avec les bottes puisqu'il était trop faible pour transporter la charge qui lui avait été assignée. 2) Il a dû travailler pour un camp militaire à Shadaw, il y a trois ans, à sept, huit reprises. C'est le chef de village qui l'a informé du travail qui devait être exécuté. Il devait notamment faire les travaux de réfection de la route, travailler sur les bunkers, couper les bambous et transporter des pierres. Environ 500-600 personnes travaillaient avec lui à chaque fois, incluant des femmes (une vingtaine) et des enfants (une vingtaine aussi jeunes que 7 ans d'âge). Ils faisaient le même travail. La journée commençait à 6 heures pour se terminer à 17 heures. Il n'était pas rémunéré. Il ne pouvait pas refuser et ne pouvait payer aucun substitut. Il a été battu à plusieurs reprises puisque les militaires estimaient qu'il n'exécutait pas convenablement le travail. Il a vu plusieurs autres personnes qui auraient été battues. Toutefois, il ne connaît pas la raison qui aurait justifié ces passages à tabac. C'est le chef de village qui l'a informé qu'il devait partir avec le reste du village. Il n'a pas personnellement vu l'ordre de relocalisation. Il a quitté le site de relocalisation après quelques jours puisqu'il n'avait même pas d'abri où lui et sa famille aurait pu demeurer. Il n'a pu rien apporter de chez lui. Les quelques jours où il est resté au site de relocalisation, il n'a rien fait. Il n'a pas été forcé de travailler.
  2582. 108
  2583. Ethnie: Karenni
  2584. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2585. Situation familiale: Marié, un fils, deux filles
  2586. Activité professionnelle: Cultivateur
  2587. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Klaw Leh Du, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 35 familles (population: plus de 200); il a fait l'objet d'un transfert forcé avec toute sa famille à Shadaw en juillet 1996)
  2588. Il a quitté le Myanmar en juillet 1996. Avant la relocalisation, il aurait été porteur un nombre incalculable de fois pour l'armée. La première fois, il y a dix ans. La seconde, il y a trois ans. Les assignations ont duré entre un et dix jours. Il devait dormir dans la forêt. C'est le chef de village qui lui a transmis l'ordre des militaires. Seuls des hommes étaient porteurs, incluant des enfants d'environ 15 ans et des personnes plus âgées (plus de 60 ans). Le nombre de porteurs dépendait du nombre de soldats. Pour 100 soldats, 40 porteurs étaient requis. Pour 200 soldats, 80 porteurs étaient requis. Il devait transporter les munitions. La journée commençait à 6 heures pour se terminer à 18 heures. Il n'avait droit qu'à un seul repas par jour. La ration était toujours insuffisante. Il n'était pas rémunéré. Il a vu un combat, il y a sept ans, près de son village, contre le KNPP. Lors du combat, les porteurs devaient rester avec les militaires. Aucun porteur n'aurait été tué. Il n'a pas fait personnellement l'objet de mauvais traitements. Toutefois, d'autres porteurs auraient été passés à tabac. Il a vu un porteur qui, ayant tenté de s'enfuir, avait été repris par les militaires. Il a été attaché à un arbre et a dû y passer la nuit après avoir été battu et frappé avec les bottes. Il aurait été transféré au site de relocalisation en juillet 1996. C'est le chef de son village qui l'aurait informé de l'ordre de transfert et de la date limite pour ce faire. Toute personne qui serait restée dans le village aurait été tirée à vue. Il est demeuré au site de relocalisation une trentaine de jours. Il aurait été forcé de travailler pendant cette période environ cinq jours. C'est le chef de village qui l'a informé du travail à exécuter. Il a dû notamment couper le bois et les bambous ainsi que monter les clôtures. Il a dû travailler des journées entières. Entre 20 à 60 personnes, incluant des femmes, des enfants (8 ans) et des personnes plus âgées (plus de 70 ans), travaillaient en même temps que lui pour exécuter les mêmes tâches. Il n'était pas rémunéré. Il pouvait payer un substitut pour exécuter le travail à sa place. Il ne l'a pas fait puisqu'il n'avait pas d'argent. Si les travailleurs ne trouvaient pas de substitut ou ne versaient pas de pots-de-vin, ils étaient généralement punis en étant incarcérés pour trois jours et obligés de travailler par la suite. Il n'a pas été battu personnellement, mais a vu deux personnes qui l'auraient été puisque le travail n'avait pas été exécuté à la satisfaction des militaires. Le reste du temps, il n'avait pas de travail. Il a pu retourner à deux reprises chez lui pour chercher de la nourriture.
  2589. 109
  2590. Ethnie: Shan
  2591. Age/Sexe: 34 ans, masculin
  2592. Situation familiale: Neuf (lui, sa mère, deux soeurs, sa femme et quatre enfants)
  2593. Education: Sixième année
  2594. Activité professionnelle: Collecte et vente de bois de chauffage, etc.
  2595. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Shwenyaung, Taunggyi, Etat Shan (Shwenyaung comptait environ 6 000 familles)
  2596. Les membres de son village ont dû effectuer beaucoup de travail forcé et de portage. Si quelqu'un n'allait pas effectuer du portage selon les ordres, il était arrêté et devait payer une amende de 3 000 kyats. S'il n'avait pas cet argent, comme c'était souvent le cas, des propriétés équivalant à ce montant étaient confisquées. Si un personnage important visitait le village, les gens étaient contraints de nettoyer le village. La première fois qu'il a effectué du travail forcé fut lorsqu'il a travaillé pour la construction du chemin de fer de Shwenyaung à Yatsauk (Lawksawk) en 1992-93. Ce travail a débuté en 1991, mais le travail préliminaire de nettoyage a été effectué par les gens des zones rurales et, seulement lorsqu'un nombre important de travailleurs était requis, l'armée a commencé à faire appel à des gens des villes, comme ceux de Shwenyaung. Les ordres étaient donnés par un gardien du LORC (YaWaTa) de l'armée qui a ordonné à une personne de chaque famille de travailler. Les familles qui ne pouvaient envoyer personne devaient payer 150 kyats. Il a vu des centaines de personnes travailler à la construction de ce chemin de fer. Shwenyaung était divisé en deux groupes et une personne de chaque famille par groupe devait effectuer du travail forcé un jour par semaine, avec des personnes de groupes différents travaillant des jours différents en rotation. Les travailleurs devaient apporter leur propre nourriture et ne pouvaient quitter le site de travail qu'une fois la nuit tombée. Ce travail a duré une année, mais lui ne l'a effectué que pendant deux mois, après quoi il a payé une somme pour ne pas avoir à y aller, puisque ce travail affectait ses revenus. Il était capable de payer ce montant uniquement pour un mois, après quoi il ne pouvait ni effectuer du travail forcé ni payer cet argent. A cause de cela, il était constamment dans une situation problématique et était appelé à se justifier auprès des autorités à plusieurs reprises, mais il a tout de même réussi à éviter d'être arrêté. Les autorités menaçaient que, si quelqu'un n'effectuait pas du travail forcé ou ne payait pas une amende, il serait arrêté et emprisonné. Il a vu autant les hommes que les femmes effectuer du travail, allant de 13-14 ans à 60-70 ans. Les travailleurs n'étaient pas battus. Une personne par famille était contrainte d'aller effectuer ce travail, indépendamment de la situation, ce qui explique pourquoi les femmes, les enfants et les personnes âgées devaient aller effectuer ce travail (environ la moitié des travailleurs était des femmes). Le travail qu'il a dû effectuer consistait à construire un remblais, à creuser et à niveler le sol et à concasser des pierres. Les travailleurs étaient transportés sur le lieu de travail en camion, mais ils devaient rentrer à la maison par leurs propres moyens le soir. Si les travailleurs étaient malades, ils ne recevaient aucun traitement médical. Lorsqu'ils ne réussissaient pas à compléter leur tâche à temps, ils devaient revenir pour la terminer le lendemain. Il n'a vu personne se faire brutaliser lorsqu'il effectuait du travail forcé, mais fut lui-même battu durant du portage. Le deuxième type de travail forcé qu'il a effectué fut lorsqu'il a aidé à la construction du chemin de fer de Shwenyaung à Namhsam. Ceci était en 1995 ou en 1996. Le travail était le même qu'auparavant et était organisé de la même façon. Il a effectué le travail lui-même les deux premières semaines et a, par la suite, envoyé son fils de 13 ans pour les deux semaines suivantes. Par la suite, il a payé 150 kyats à chaque fois pour éviter d'y aller. Il a payé cette somme pendant trois mois, puis ne pouvait se permettre de payer. A ce moment, il n'a ni payé ni travaillé et était constamment en danger. La ligne de chemin de fer n'est toujours pas terminée. L'autre genre de travail forcé qu'il a effectué fut du portage. Il a débuté le 17 novembre 1997. Les ordres venaient, une fois de plus, de l'armée par l'intermédiaire du gardien du LORC (YaWaTa). Les ordres exigeaient 40 porteurs de Shwenyaung, et les habitants devaient aller au bureau du LORC et effectuer un tirage. Cinq porteurs étaient demandés par ce gardien (il fut un de ceux qui furent choisis). Il était possible pour celui étant sélectionné de payer 3 000 kyats afin d'être exempté; les autorités utilisaient par la suite cet argent afin d'engager un substitut. Puisqu'il n'avait pas d'argent, il a dû se prêter à ce travail. La loterie qui permettait de choisir les porteurs se déroulait à 8 heures du matin, et ceux qui étaient choisis étaient détenus dans une maison appartenant aux militaires; c'est à cet endroit que tous les porteurs étaient amenés par les différents gardiens, un total d'environ 60 personnes. Il a dû envoyer sa femme afin qu'elle lui apporte quelques objets personnels. Il n'était pas informé de la durée pendant laquelle il serait absent. Entre 1 heure et 2 heures du matin, ils ont été amenés en camion au camp militaire de Loikaw et enfermés à cet endroit. Ils ont passé une nuit enfermés et ont été envoyés en camion vers 7 heures du matin dans la région de Shadaw. Ils ont passé une nuit là-bas, puis, à 6 heures du matin, ils ont été amenés à la rivière Salween. Ils ont traversé la rivière avec des bateaux à moteur. Une fois de l'autres côté de la rivière, les porteurs se voyaient assigner leurs charges (riz, munition et autres marchandises); il a dû transporter du riz. A ce moment, deux porteurs ont jeté leurs charges et se sont enfuis. Les soldats ont tiré sur eux mais ne les ont pas touchés. Les soldats et les porteurs ont marché pendant le reste de la journée et ont dormi en plein air à côté d'une rivière. Ils ont continué à marcher le lendemain matin et sont arrivés à Meh Te dans l'Etat Kayah (un village qui avait été relocalisé et brûlé). A ce moment, un des porteurs était incapable de continuer, victime de délires à la suite de douleurs dans la jambe et dans les épaules. Trois ou quatre soldats ont commencé à le frapper avec des armes jusqu'à ce que son visage soit couvert de sang et que du sang sorte de sa bouche. A ce moment, un soldat a pointé son arme vers le porteur et était sur le point de tirer sur lui lorsque l'officier en charge est intervenu. Le porteur a été contraint de continuer, mais on lui a donné un sac à dos militaire à transporter au lieu de sa charge. Cette nuit-là, vers 20 heures, ils sont arrivés à Kyauk Tat Kwe où se trouvait un camp militaire (bataillon 261). Les porteurs ont dû cuisiner (pour les militaires ainsi que pour eux-mêmes, mais séparément). Les porteurs ont reçu un condensé de lait au riz à cuisiner pour deux personnes. Ils n'ont reçu aucun curry ou sel pour aller avec le riz. Il a plu cette nuit-là. Les porteurs ont dû dormir sur le sol sous les maisons où dormaient les militaires. Ils ont quitté à 6 heures du matin le lendemain matin. Sur le chemin, certains des porteurs qui avaient 60 ans ont été battus par les militaires parce qu'ils ne pouvaient plus continuer. A 18 heures, ils sont arrivés au sommet de la colline 3222 (nom donné suite à la hauteur) et ont dormi à cet endroit pendant la nuit. Le jour suivant, ils ont quitté encore à 6 heures du matin et sont allés à Sin Taung ("colline de l'éléphant"). Ils ont dû marcher toute la journée pour arriver là et sont restés une nuit. Le lendemain matin à 6 heures, ils sont allés à Tin Shu Hill et sont arrivés vers 13 heures. Sur le chemin, un homme était fatigué et ne pouvait continuer. Les militaires l'ont battu et l'ont brûlé avec des cigarettes. Il a été ensuite ligoté et jeté sur le bord de la route (quelqu'un serait allé le chercher, mais il n'est pas sûr que cela soit vraiment arrivé). A Tin Shu Hill, ils sont restés deux nuits (ils se sont reposés une journée). Ils sont alors retournés à la colline 3222 en transportant un soldat blessé par balle. Sur le chemin du retour, ils ont fait arrêt à Daw Taket (un camp de provisions) et ont pris du riz qu'ils ont ramené à Tin Shu Hill. Ils se sont arrêtés pour la nuit vers 22 heures dans un village connu sous le nom de Thit Set. Le lendemain matin, ils ont quitté à 6 heures du matin et sont allés à Tin Shu Hill, via Sin Taung. Ils sont restés une nuit à Sin Taung (où un porteur a réussi à s'échapper). Le jour suivant, ils sont retournés à Tin Shu Hill et sont restés pour se reposer pendant quelques jours. Après ce repos, ils sont repartis avec des charges très lourdes pour une autre colline (il ne se souvient pas du nom). Sur le chemin, il a commencé à souffrir de la malaria et a été battu avec une arme par un soldat parce qu'il ne pouvait pas continuer. Ils n'ont pas réussi à atteindre leur destination cette nuit-là et ont dû dormir à côté de la rivière. Il était très malade et a reçu deux comprimés qui n'ont eu aucun effet. Il pense que ces comprimés n'étaient que pour chasser la douleur. Il pensait qu'il allait probablement mourir s'il devait continuer, alors pendant la nuit, à 2 heures du matin, il est allé aux toilettes et s'est échappé. Les militaires ont essayé de le retrouver avec des lampes de poche, mais il s'était caché derrière des arbres. Il a marché pendant trois jours pour atteindre la frontière. Sa famille n'a aucune idée de ce qui lui est arrivé.
  2597. 110
  2598. Ethnie: Karenni
  2599. Age/Sexe: 33 ans, masculin
  2600. Situation familiale: Lui, sa femme et quatre enfants
  2601. Education: Quatrième année
  2602. Activité professionnelle: A travaillé comme fonctionnaire du gouvernement pour le canton (a fait divers travaux)
  2603. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Duro, Pruso, Etat Kayah
  2604. Le témoin a travaillé à Loikaw pour le gouvernement jusqu'en 1986. Il était incapable de gagner sa vie et a décidé de quitter le travail pour aller travailler dans les mines à Mawchi. Là-bas également, il fut incapable de gagner sa vie parce que, à chaque fois que les travailleurs avaient une journée de congé, ils risquaient de se faire amener en tant que porteur par les militaires, ce qui impliquait qu'ils rataient du travail pendant une période et perdaient leurs salaires. A cause de cela, il est retourné à Loikaw. A cette période, les autorités ne contrôlaient que la région autour de Loikaw alors que le reste de la région était contrôlée par l'opposition Karenni. Il trouvait qu'il était plus facile de gagner sa vie dans la région contrôlée par les Karennis, ce qui lui permettait de ramener régulièrement de l'argent pour sa famille. Parce qu'il a décidé de s'installer entre Loikaw et les régions contrôlées par l'opposition, il fut accusé à tort de travailler avec l'opposition et fut arrêté en 1992. Il fut relâché en mars 1997. En probation, il devait s'enregistrer toutes les semaines auprès des autorités. Il était incapable de gagner sa vie et a également raté l'enregistrement en raison d'une maladie. Il a donc décidé de s'enfuir. Il est arrivé en Thaïlande une journée avant cette entrevue. Lorsqu'il travaillait pour les autorités dans un hôpital de Loikaw (lorsqu'il travaillait comme employé du gouvernement avant 1986), il devait effectuer un jour par semaine de travail forcé lors de sa journée de congé. Tous les employés gouvernementaux devaient faire cela et étaient payés 6,5 kyats par jour (en 1980), mais devaient payer une amende de 60 kyats s'ils ne le faisaient pas. Il a dû effectuer ce travail d'une journée par semaine pendant plusieurs années. Sa femme, qui était également une employée du gouvernement, devait également faire ce travail. La situation pour les employés du gouvernement était meilleure puisqu'ils devaient travailler une fois par semaine mais ne devaient pas compléter leur travail dans un délai de temps établi. Par contre, si les villageois ou les gens de la ville ne terminaient pas leur travail à temps, ils devaient continuer de travailler jusqu'à ce que le travail soit fini. Lorsque les villageois arrivaient pour exécuter le travail forcé, ils devaient se rapporter à l'armée et signer leur nom ainsi que le nom de leur village; s'ils n'avaient pas terminé leur tâche, ils étaient battus et ne pouvaient retourner à leur village qu'une fois le travail complété. Le traitement des militaires face aux villageois était également plus dur. Il a lui-même été battu lorsqu'il exécutait du travail forcé. Il y a eu un coup de feu et les militaires pensaient qu'un des villageois avait tiré sur eux. Ils ont encerclé les villageois et ont commencé à les battre; ils l'ont confondu pour un membre du village, ce qui fait qu'il fut battu également. Il fut relâché lorsqu'il a pu établir qu'il était un employé du gouvernement. Il ne sait pas ce qu'il est advenu des villageois après cet incident. Plus tard, il a dû travailler pour la construction du chemin de fer Aungban-Loikaw. Les autres personnes de cette ville ont également dû effectuer ce genre de travail. Elles recevaient les ordres du gardien du LORC. Chaque maison ou groupe de maisons avait une tâche à accomplir (pour les communautés rurales, chaque village se voyait assigner une tâche particulière). Il a vu des milliers de personnes effectuer ce travail. En plus de travailler à la construction du chemin de fer, il a dû effectuer d'autres travaux tels que la construction d'une route et le nettoyage du terrain en vue du Festival de sport étudiant (chaque année, il y avait quelque chose de différent). Lorsqu'il travaillait à l'hôpital de Loikaw, il a vu des patients qui lui ont dit avoir souffert de blessures en raison des violences infligées par les soldats alors qu'ils exécutaient du travail forcé.
  2605. 111
  2606. Ethnie: Karenni
  2607. Age/Sexe: 26 ans, masculin
  2608. Situation familiale: Parents, 14 enfants (il est le plus jeune)
  2609. Education: Sixième année
  2610. Activité professionnelle: Agriculteur
  2611. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tee The Klo, Demawso, Etat Kayah (le village comptait 100 familles)
  2612. Le témoin a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Il a effectué du travail forcé pour la première fois en août 1996. Auparavant, cette région n'était pas sous le contrôle du gouvernement, ce qui explique qu'il n'avait pas eu à effectuer du travail forcé. Lorsque l'armée est venue, quiconque refusait les ordres était accusé d'être un rebelle et était tué. Le village s'est vu donner trois jours en août 1996 afin de relocaliser son centre vers un autre village à deux miles de là du nom de Tee Po Klo. Tout ce qui ne pouvait être transporté sur le site de la relocalisation à ce moment a dû être abandonné. Sous le site de relocalisation, les villageois ont dû rester avec des amis ou de la famille jusqu'à ce qu'ils puissent construire leur propre abri. Ils ont été contraints de construire une clôture autour du site de relocalisation; il n'existait que deux sorties et toutes deux étaient surveillées. Les villageois étaient autorisés à quitter le site de relocalisation durant la journée pour aller cultiver mais devaient revenir le soir et ne pouvaient apporter de nourriture à l'extérieur avec eux lorsqu'ils quittaient (pour ne pas qu'ils donnent cette nourriture aux rebelles). Afin de quitter le site de relocalisation pendant la journée, ils devaient acheter un laissez-passer au coût de 10 à 15 kyats par jour. Sur le site de relocalisation, lui et d'autres villageois ont été contraints d'exécuter du travail forcé: travail pour le camp militaire, nettoyage du terrain, culture pour les militaires ou coupe d'arbres dans la jungle. A chaque fois que l'armée avait besoin de quelqu'un, elle prenait des gens du site de relocalisation. L'armée procédait à des enquêtes afin de déterminer lesquels des villageois était des rebelles. Son nom fut mentionné et les soldats du bataillon 429 sont venus l'arrêter. Ils lui ont masqué les yeux et ont attaché ses mains autour de son cou. Ils ont également attaché ses pieds ensemble. Ils l'ont amené avec 11 autres personnes et les ont torturées de différentes façons. Cinq membres de ce groupe sont morts durant la torture. La torture consistait, entre autres, à leur mettre un sac de plastique sur la tête, de la poudre de piment et de l'eau bouillante dans le nez, en plus d'être battus et coupés avec des couteaux. La torture a duré trois jours et deux nuits; les personnes étaient interrogées durant cette torture. Les sept survivants furent envoyés à la prison de Loikaw où ils furent emprisonnés dans une petite cellule sombre et furent interrogés une fois de plus par les militaires. Durant cet interrogatoire, on lui demandait s'il était un rebelle et on le battait s'il répondait non. Des militaires ont finalement décidé qu'il n'était pas un rebelle et l'ont envoyé dans une cellule du camp du bataillon 530 à Loikaw. La situation à cet endroit était très mauvaise, pas assez de nourriture ou d'eau ainsi que des mauvais traitements. Sa famille ne savait pas où il se trouvait. Il pensait que s'il continuait de rester à cet endroit il allait mourir, et s'il essayait de s'enfuir il se ferait probablement tuer dans sa tentative. Ainsi, il a estimé qu'il n'avait rien à perdre et tenterait de s'échapper. Il a frappé le militaire qui lui apportait sa nourriture et s'est enfui avec une autre personne. On a tiré sur lui mais il n'a pas été touché et, après six jours de marche, il est arrivé en Thaïlande. L'autre personne fut arrêtée de nouveau. Il a dû être admis à l'hôpital souffrant de blessures graves en raison de la torture. Il a également un problème avec sa jambe.
  2613. 112
  2614. Ethnie: Karenni
  2615. Age/sexe: 25 ans, masculin
  2616. Situation familiale: Douze (mère, père, lui-même, 11 frères et soeurs)
  2617. Education: Huitième année
  2618. Activité professionnelle: Agriculteur
  2619. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Demawso, Etat Kayah
  2620. Le témoin est venu en Thaïlande en juin 1993 parce qu'il ne pouvait plus continuer d'exécuter du travail forcé et du portage; sa famille est toujours au Myanmar (il a fui directement après son dernier voyage de portage). Il a dû exécuter du portage à huit occasions, la première en mai 1990 (il est le seul membre de sa famille à avoir fait du portage. Il craignait de devoir travailler jusqu'à six mois. Alors, à six occasions, il s'est enfui (les deux autres fois il fut relâché)). La première fois, il a été contraint de travailler dans une scierie, mais il s'est enfui après une semaine. La seconde fois, il a dû effectuer du portage pendant deux mois à Pwe Pu Laung, après quoi il s'est enfui. Les troisième et quatrième fois, il s'est enfui après un mois de portage. La cinquième fois, il a effectué du portage pendant un mois à Hti Hta et après trois semaines il s'est enfui. La sixième fois, il effectuait du portage au même endroit et s'est enfui après un mois. La septième fois, il se trouvait près de la frontière thaïlandaise, dans l'Etat Kayah, avec LIB 18, et il fut relâché après deux mois. La huitième fois était également près de la frontière thaïlandaise à proximité de BP9 (la patrouille de police de la frontière thaïlandaise au point no 9); il fut relâché après deux mois. Lorsqu'il effectuait du portage, il transportait habituellement de l'armement militaire, mais a également transporté de l'eau, du riz et d'autres munitions. Il a fait du portage sur la ligne de front durant des opérations militaires et entre des camps militaires. Parfois, les porteurs recevaient l'ordre de l'armée via le chef du village et, parfois, les militaires capturaient directement les porteurs (particulièrement au marché ou à la sortie de cinéma). Le travail était le même indépendamment de la méthode utilisée. Dans son cas, il fut recruté la plupart du temps via le chef du village. Normalement, une personne de chaque petit village ou une personne de chaque section d'un grand village devait se rendre pour effectuer du portage; celui qui était choisi était déterminé par le chef et, si la personne choisie était incapable d'y aller, il devait payer 3 000 à 4 000 kyats. Si les militaires estimaient qu'ils n'avaient pas assez de porteurs après cela, ils venaient et les prenaient directement. Lorsqu'il effectuait du portage, il y avait habituellement autour de 50 porteurs (certains venaient d'aussi loin que de l'Etat Shan). Les porteurs étaient battus et maltraités par les soldats et frappés avec leurs armes, lorsqu'ils ne pouvaient plus travailler. Ceci ne lui est jamais arrivé puisqu'il était capable de poursuivre son travail. Certains porteurs étaient très jeunes (13 ans), et certains étaient âgés. Les femmes n'étaient habituellement pas soumises au portage mais, à une occasion lorsqu'il effectuait du portage près de Shadaw, il a aperçu quatre femmes qui faisaient du portage parce que les soldats n'avaient pu trouver assez d'hommes. Ils étaient contraints de transporter des mortiers (84 mm), pesant environ 25 kg. Après une journée, ils étaient relâchés. La nourriture pour les porteurs n'était pas suffisante puisqu'elle consistait qu'en un peu de riz. Les porteurs ne recevaient pas d'eau mais devaient en boire à chaque fois qu'ils passaient près d'une rivière. Ils devaient dormir sur le sol sans couverture. La pire expérience qu'il a eue en tant que porteur d'artillerie lourde fut lors de son dernier voyage. Une bagarre a éclaté avec des rebelles karennis et des coups de mortier furent tirés; certains porteurs furent tués. Le pire traitement qu'il a vu infliger à un porteur fut lorsqu'un de ceux-ci était malade de diarrhée et avait perdu toute sa force. Le porteur n'a reçu aucun soin médical et a été contraint de continuer et est finalement décédé. Dans un autre cas, un porteur s'est enfui et les soldats se sont emparés d'un autre porteur qui voulait le suivre et l'ont tué devant tous les autres porteurs en guise d'avertissement. Il a également exécuté du travail forcé, comme d'autres membres de sa famille; en plus du portage, au moins une fois par mois, un membre de sa famille devait effectuer certains travaux forcés. Lorsqu'il était à Demawso, lui et d'autres gens étaient forcés de ramasser du bambou, ainsi que d'autres objets à partir de 1990. Il a dû régulièrement exécuter ce genre de travail une fois par semaine. Le travail forcé comprenait également le travail sur la voie de chemin de fer Aungban-Loikaw. Il devait construire un remblais autour des rizières, 16 pieds de large, 18 de longueur et huit de haut. Ce travail a eu lieu de 1992 à 1993, avec chaque famille recevant une certaine tâche à accomplir (environ 10 pieds de remblais, ce qui pouvait prendre environ d'une semaine à un mois par famille). Le chemin de fer est maintenant terminé. Personne n'a été payé pour ce travail; ceux qui ne pouvaient participer à ce travail devaient payer 1 200 kyats. Les ordres qui exigeaient de faire ce travail venaient du SLORC, via le VLORC. Une réunion était organisée afin d'expliquer aux chefs de village ce qui devait être fait et ceux-ci devaient en informer les villageois. Il a dû travailler pour ce chemin de fer à trois reprises (pour trois semaines, cinq jours et trois jours, respectivement). Les militaires sur le site de travail ne l'ont pas maltraité, mais il a vu ces derniers battre d'autres travailleurs et les menacer avec leurs armes s'ils n'exécutaient pas le travail de façon satisfaisante. Une fois le remblais construit, il a dû être couvert avec des pierres pour que les rails du chemin de fer puissent être installés. Il y avait également des prisonniers qui effectuaient ce travail, et il a entendu que le traitement de ces derniers était très mauvais. La quantité de travail forcé a augmenté à environ une fois par semaine par famille en plus du portage. Il devenait impossible d'exécuter autant de travail forcé et en plus de gagner sa vie.
  2621. 113
  2622. Ethnie: Karenni
  2623. Age/sexe: 48 ans, masculin
  2624. Situation familiale: Dix (lui, sa femme, quatre filles et quatre garçons)
  2625. Activité professionnelle: Chef du village et président d'un groupe entre le VLORC et le TLORC; avant cela, il a travaillé avec le BSPP et, antérieurement, il fut un dirigeant de l'aile de la jeunesse
  2626. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tong Pet, Shadaw, Etat Kayah
  2627. Le témoin a effectué du travail forcé pour le SLORC à plusieurs reprises: portage, coupe de bambou, travail au camp militaire. En tant que chef du village, il était responsable de l'organisation du travail forcé des villageois et a également dû exécuter du travail forcé en tant que représentant de sa famille. Le premier type de travail forcé qu'il a effectué fut du portage pour les militaires, transport de riz de Po Kyaw à Shadaw, une distance d'environ 15 miles. Il y a environ dix ans (bien qu'il ait déjà exécuté du portage en 1971-72). Depuis, il a effectué du portage environ dix fois. Puisqu'il était le chef du village, il a exécuté de courts voyages de portage d'environ trois jours; son plus long voyage a été de dix jours. Lorsqu'il exécutait du portage il devait transporter du riz, des munitions et d'autres marchandises. Le traitement qu'infligeaient les militaires aux porteurs était mauvais; les militaires insultaient les porteurs et, parfois, les battaient. Il n'a jamais été battu lui-même, mais à quelques occasions certains membres de son village se sont enfuis durant le portage, ce qui fait qu'il a été arrêté puisqu'il était en charge. Il fut battu, ce qui lui a causé des blessures à la poitrine. Il fut relâché seulement lorsque les porteurs qui s'étaient échappés ont pu être remplacés Sa blessure à la poitrine s'est aggravée lorsqu'il a dû transporter des charges lourdes durant le portage, parfois jusqu'à 60 kg. Il a toujours des problèmes avec sa poitrine. Il a vu d'autres porteurs avec des blessures très graves résultant des violences faites par les militaires, comme des nez cassés et du sang jaillissant de la bouche. Les porteurs étaient battus s'ils ne pouvaient continuer leur travail ou si les militaires estimaient qu'ils étaient sur le point de s'enfuir. Il a vu certains porteurs se faire tuer par les militaires lorsqu'ils étaient incapables de continuer. Leur corps était abandonné au bord de la route. Dans le cas de son village (qui était assez grand, environ 100 maisons), les ordres concernant le portage étaient envoyés par les militaires au chef de village par écrit, et le chef de village devait déterminer quels villageois iraient effectuer le portage. Comme ces ordres venaient très régulièrement, les villageois ne pouvaient plus le tolérer et s'enfuyaient souvent. Il était donc difficile de trouver des gens, ce qui implique qu'il a dû y aller lui-même. A une occasion, il s'est présenté lui-même pour le portage et a dû transporter des marchandises à Shadaw. A son arrivée, il fut relâché mais arrêté de nouveau par d'autres militaires. Il fut relâché seulement lorsqu'un président local du VLORC, qui était un de ses amis, s'est plaint auprès des militaires. Les ordres écrits ne contenaient pas de menaces. Toutefois, des menaces verbales à l'effet que le village serait brûlé et le chef du village arrêté si les ordres n'étaient pas respectés étaient monnaie courante. Les porteurs étaient relâchés uniquement lorsque des remplaçants arrivaient, habituellement au bout de dix jours, mais parfois jusqu'à plus de deux mois lorsqu'il était difficile de trouver des remplaçants. Les porteurs n'étaient pas rémunérés mais, en tant que chef du village, il essayait de collecter un peu d'argent pour les villageois afin de donner aux familles des porteurs de quoi survivre. Les femmes n'avaient pas habituellement à exécuter du portage mais, à l'occasion, lorsque les militaires ne pouvaient trouver assez d'hommes, ils utilisaient des femmes (même des femmes avec des enfants en bas âge). Les villageois devaient également exécuter du travail forcé au camp militaire (il n'a pas exécuté ce travail lui-même mais a dû organiser le travail des habitants de son village). Ceux-ci devaient construire des clôtures, creuser des tranchées, etc. Il y avait un camp militaire dans la région de Shadaw depuis plusieurs années, et ce genre de travail existait depuis très longtemps. Les ordres pour l'exécution de ce type de travail émanaient du TLORC et, dans le cas où les travailleurs n'arrivaient pas, les militaires venaient directement au village pour amener les gens. Les villageois devaient également fournir les outils et les matériaux de construction. Parfois, jusqu'à 20 personnes à la fois étaient demandées, avec l'exigence de fournir le travail en rotation parmi les villages de la région. Les femmes étaient également requises pour ce genre de travail. Il ne connaît aucun cas de violence physique contre les femmes durant le travail forcé ou le portage, mais les abus verbaux étaient courants. D'autres types de travail forcé qu les membres de son village ont eu à exécuter incluaient la coupe de bambous et la réfection du camp militaire (une à deux fois par année). Le camp militaire se situait à 10 miles ce qui implique, lorsque les villageois devaient y travailler, qu'ils devaient dormir une à deux nuits dans le camp militaire. Tous les villageois ont également dû exécuter du travail forcé pour le chemin de fer Aungban-Loikaw. Chaque village recevait une tâche et devait veiller à la construction d'une partie du remblai. Presque tous les villages dans l'Etat Kayah étaient impliqués. Son village a dû y aller pour la première fois en 1992. A une occasion, en 1991 ou 1992, 100 personnes de son village (un de chaque maison) a dû se rendre pour travailler quelques jours sur la construction de la route de Shadaw à la rivière Salween. Il est venu en Thaïlande avec sa famille après que son village reçut l'ordre de se relocaliser en sept jours à Shadaw, le 1er juin 1996; environ 100 familles sont venues au même moment de villages divers. Une fois que l'ordre fut donné, il a discuté avec les gens de son village mais ceux-ci ont refusé la relocalisation. Il a écrit une lettre aux autorités à Shadaw en expliquant les raisons des villageois qui refusaient d'être relocalisés (telles que des problèmes de santé, manque d'abris sur le site de relocalisation, des lacunes concernant l'éducation pour les villageois relocalisés, des manques de nourriture sur le site de relocalisation et des difficultés pour les personnes âgées d'effectuer ce voyage). Ces arguments n'ont pas été acceptés et les autorités ont décidé que le village devrait être brûlé, ce qui a amené certains villageois à se relocaliser à Shadaw, mais plusieurs autres ont décidé de fuir. Les villageois ont dû marcher 12 miles jusqu'au site de relocalisation et n'ont pas pu apporter avec eux tous leurs biens. Le village a, par la suite, été brûlé et le bétail et autres biens ont été volés par l'armée. "Il ne restait même plus un chien."
  2628. 114
  2629. Ethnie: Karenni
  2630. Age/sexe: 46 ans, masculin
  2631. Situation familiale: Neuf (lui, sa femme, quatre fils et trois filles)
  2632. Activité professionnelle: Cultivateur
  2633. Domicile (avant de quitter le Myanmar): To Ka Oh, Shadaw, Etat Kayah (le village comptait 100 familles)
  2634. Le témoin a quitté le Myanmar en juin 1996. Il a dû effectuer plusieurs types de travail forcé, tel que du portage, la coupe de bambous, coupe de bois pour la construction du chemin de fer, transport de riz pour les militaires qui surveillaient les travailleurs pour la construction de la route. Le travail le plus difficile était le portage: " les gens n'osaient pas effectuer ce travail". Il a effectué du portage à cinq ou six occasions, habituellement pour une durée de trois à six jours à chaque fois. Le plus long fut pour une durée de onze jours. La première fois fut en 1972 et la dernière en 1987. Il a dû transporter des munitions, de la nourriture et d'autres marchandises. Les charges étaient très lourdes (jusqu'à 49 kg) et occasionnaient des blessures pour les porteurs. Lorsqu'un porteur ne pouvait porter sa charge, il était battu ou frappé; à une occasion, il est tombé alors qu'il effectuait du portage et il ne pouvait plus se relever parce que la charge était trop lourde. Il a donc été battu par les soldats qui l'ont frappé dans le bas du dos. La dernière fois qu'il a effectué du portage, il y a eu une bagarre; les porteurs avaient très peur et certains d'entre eux se sont enfuis. Il a dû également couper du bambou pour les militaires afin de construire un camp. Il devait couper 100 tiges de bambou par jour, ce qui était très difficile. Plusieurs personnes ont également dû exécuter ce travail. Il a également dû couper de très gros arbres pour la construction du chemin de fer vers 1992, avec environ 100 autres villageois. Il est difficile pour lui d'évaluer combien de temps il a passé à exécuter du travail forcé, mais cela représentait habituellement une à deux fois par mois pour plusieurs jours à chaque fois. Les ordres pour effectuer le travail forcé émanaient de l'armée et étaient transmis par le chef du village.
  2635. 115
  2636. Ethnie: Shan
  2637. Age/sexe: 39 ans, masculin
  2638. Situation familiale: Marié avec trois enfants
  2639. Activité professionnelle: Cultivateur et chef de village (de 1994 à 1996)
  2640. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pa Ku Da, Bawlake, Etat Kayah (village sur les rives de la Salween, près de Ywathit; relocalisation forcée à Ywathit en 1996)
  2641. Le village du témoin faisait partie d'une relocalisation à grande échelle. Le village tout entier a reçu l'ordre de se relocaliser. L'ordre est venu d'un officier de l'armée le 16 avril 1996. Quinze familles, environ 50 à 60 personnes (surtout des enfants) furent touchés. Il a essayé de rester et d'ignorer l'ordre. Le deuxième ordre est venu et a précisé que, si on ne quittait pas le village, ce dernier serait brûlé. D'autres villages dans la région ont également été relocalisés au même moment: environ sept villages (100 familles au total), tous des villages Shan dans l'Etat Kayah. Son village fut relocalisé à Ywathit près d'un poste militaire sur la colline surplombant les champs où ils ont été envoyés. Ce site se trouvait à un demi jour de marche de son village. Ils ont reçu une semaine pour bouger et ont dû abandonner derrière eux la plupart de leurs biens, y compris des buffles et des poulets, puisqu'il n'y avait aucune route sur le nouveau site. D'autres villages qui furent relocalisés avec eux: Wan Loi, Wan Pla, Ko Su Pa, Ho Hta, Wan Pha Ku et Leh Way. Ils ont pu emporter avec eux seulement qu'un sac de riz. Il est retourné dans son village après une semaine sans autorisation afin de trouver des buffles, mais il n'a pu les trouver. Ils ont reçu beaucoup moins de terres sur le nouveau site: 10 à 20 fois moins de terres cultivables qu'avant. On leur a ordonné de construire leur maison eux-mêmes. Aucun matériel de construction n'était fourni, seulement qu'un peu de riz qui équivalait à la ration d'un pot de riz par personne par semaine. Ils ont dû vivre avec les villageois qui étaient déjà installés jusqu'à ce que leur propre maison soit terminée. Les unités militaires de la région dans leur village de relocalisation étaient: les bataillons 54, 72 et 102 avant 1994. La division 55 et le bataillon 429 après 1994. En tant que chef du village, il a dû exécuter beaucoup de travail forcé. Le travail que les habitants de son village devaient effectuer était essentiellement du travail dans le camp militaire, y compris du portage et du travail d'entretien. Ceci était fait sur une base rotative: chaque personne, chaque semaine, un par famille, de dix jours à un mois à la fois. Les ordres lui étaient donnés par écrit. Personne n'osait refuser d'effectuer ce travail. Le village recueillait 30 à 40 kyats par jour pour couvrir le coût de 210 à 280 kyats par personne par jour. Ceci était payé à un officier de l'administration et non à un militaire. Il a exécuté lui-même du travail forcé avant de devenir chef du village en 1994, mais jamais plus par la suite. Du travail forcé a également été exécuté pour la construction de la route près de la rivière Pai (une semaine par famille); ce travail était également exécuté par d'autres habitants de villages de la région. Ceci se passait en 1994, avant que le portage et le travail dans les camps militaires deviennent une obligation sur une base régulière à partir du début de 1995. D'autres types de travail forcé n'étaient pas exigés puisque son village était petit et qu'il n'y avait qu'un nombre limité de travailleurs et de familles disponibles. En ce qui concerne la façon dont les gens étaient recrutés, le premier ordre était simple et demandait à un certain nombre de personnes de se présenter. Si les villageois étaient en retard ou ne se présentaient pas, le deuxième ordre était plus menaçant. Il venait avec une cartouche et un morceau de piment. Ceci constituait des menaces traditionnelles représentant la mort et signifiant que les choses allaient se compliquer pour le village. Il devait garder cet ordre en tout temps et renvoyer la cartouche et le piment afin de montrer qu'il avait reçu cet ordre et qu'il avait compris le message. Les ordres venaient du bataillon 429 ou de la division 55. Il a vu plusieurs abus lorsqu'il était porteur (avant 1994). Les travailleurs devaient se rendre à pied et transporter des charges très lourdes tout en maintenant un rythme rapide. Lorsqu'un porteur ne pouvait continuer, un militaire prenait son sac de riz et le frappait très fort sur le cou, ce qui le faisait tomber. Le porteur en question était gravement blessé et pouvait mourir. Ceci se passait en 1992 durant la grande offensive à Mye Leth, près de la rivière Pai. Les villageois qui revenaient ont toujours mentionné qu'ils ne recevaient pas assez de nourriture (seulement qu'une petite portion de riz par jour). Lorsqu'un villageois s'enfuyait durant le travail forcé, le chef du village devait aller payer un pot de vin ou une amende aux militaires. Habituellement, ils payaient en poulets. A une occasion, il a dû envoyer des femmes travailler comme porteurs puisqu'il n'y avait plus assez d'hommes disponibles. A une autre occasion, ils ont dit aux militaires qu'il n'y avait pas assez de personnes disponibles pour remplir le quota. Les militaires sont donc venus au village et ont appelé tout le monde: hommes, femmes et enfants, même les bébés, et ont amené tout le monde au camp militaire afin d'effectuer du travail forcé pendant quatre jours. Les hommes coupaient les bambous, les femmes cuisinaient et nettoyaient la base. On leur a dit: "Ceci est votre première punition. Si vous désobéissez une fois de plus, nous vous punirons de nouveau de cette façon." Il a entendu parler de mauvais traitements durant le travail forcé, mais n'en a pas vu lui-même. Des viols ont été mentionnés lorsque les militaires étaient en patrouille et entraient dans un village. A une occasion seulement, il a été payé pour du travail forcé lorsqu'il a réparé une vieille route. Il a reçu 25 kyats par jour pendant sept jours.
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  2643. Ethnie/religion: Shan, bouddhiste
  2644. Age/sexe: 55 ans, masculin
  2645. Situation familiale: Marié, huit enfants
  2646. Education: Deuxième année
  2647. Activité professionnelle: Cultivateur
  2648. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pa Ku Da, Bawlake, Etat Kayah (village sur les rives de la Salween, près de Ywathit; relocalisation forcée à Ywathit en 1996)
  2649. Le témoin vient du même village que le témoin 115. Il a apporté avec lui de la nourriture lors de la relocalisation, mais a dû abandonner 300 sacs de riz et dix buffles. Il a amené des poulets et des cochons, mais a dû les manger sur le nouveau site de relocalisation. Il a également apporté avec lui des outils. Le nouveau site se trouvait à cinq jours de marche du village. Les militaires avaient promis leur aide et avaient dit qu'ils allaient couper des billots de bois gratuitement, mais, en fait, les villageois devaient payer pour ces billots de bois et les transporter eux-mêmes, ce qui implique qu'ils ne pouvaient le faire puisqu'il en coûtait 70 kyats par jour pour louer une charrette. Ils n'ont reçu ni nourriture, ni argent sur le site de relocalisation. Il a quitté avant de terminer sa nouvelle maison. En ce qui concerne le travail forcé, l'armée a ordonné à cinq personnes d'ériger une clôture autour du poste militaire, ce qui représentait deux jours de travail sur une base rotative. Même les hommes âgés (60 à 70 ans) devaient s'y rendre lorsque d'autres personnes n'étaient pas disponibles. Les travailleurs avaient droit à une journée de congé et devaient retourner à leur travail assigné s'il n'était pas terminé. Ils ne recevaient ni nourriture, ni argent. On lui a également demandé d'envoyer deux, trois, quatre ou cinq personnes comme porteur pour patrouiller. Le porteur qui était devant les autres risquait de marcher sur des mines. Il y avait également des porteurs du village de Wan Loi (près de Pa Ku Dah). Trois porteurs ont été tués par des mines durant le portage: deux en tant que porteurs, un comme guide. Ceci a eu lieu en 1975. La famille du premier porteur tué n'a rien reçu. Les familles des deux autres porteurs se sont partagées 10 000 kyats versés par l'armée comme dédommagement. Pour toutes ces formes de travail, ils n'ont rien reçu, ni argent ni nourriture. Après 1995, trois personnes étaient requises pour exécuter du travail de portage chaque semaine sur une base rotative. Cinq autres personnes étaient assignées à d'autres tâches: poser des clôtures, creuser des abris, construire des facilités pour le camp. Ceci impliquait du travail trois à quatre fois par mois, par famille, pendant au moins deux jours. Si les porteurs se plaignaient du poids excessif de leur charge, ils étaient battus (même les personnes âgées). Du travail forcé fut également exécuté pour la construction de deux routes: une de Bawlake à Ywathit et une autre de son village jusqu'au bord de la rivière Pai. Ceci eut lieu en 1995. Cela impliquait cinq jours de travail, deux jours de repos, puis encore cinq jours de travail pour un total de dix jours de travail par famille. Ce travail était payé trois kyats et 50 pyas (il a reçu au total 33 kyats et 50 pyas pour ce travail). Il n'avait pas le choix, il devait l'exécuter.
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  2651. Ethnie: Karenni
  2652. Age/sexe: 27 ans, masculin
  2653. Situation familiale: Marié, trois enfants; huit frères et soeurs
  2654. Activité professionnelle: Cultivateur
  2655. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw Ku Say, Shadaw, Etat Kayah
  2656. Le témoin a quitté le Myanmar en juillet 1996. Avant son départ, il a dû exécuter du portage pour l'armée. Les militaires sont venus dans son village et l'ont appelé comme porteur et ont battu d'autres porteurs. Lui et ses frères se sont enfuis parce qu'ils avaient peur de rester au village. Il est venu avec toute sa famille (femme, enfants, frères et soeurs). On leur ordonnait d'exécuter du portage une à deux fois par mois ou plus, habituellement pendant deux ou trois jours à chaque fois, mais à quelques occasions, des personnes ont dû faire ce travail pendant un à deux mois. Ils étaient réquisitionnés soit par un ordre écrit donné au chef du village, ou directement arrêtés par les militaires. Lorsque le chef du village avait des questions "... laisse-nous tranquilles ou nous utiliserons encore plus de gens pour le portage". Ceci n'était pas fait de façon systématique: parfois deux fois par mois, parfois une fois en deux mois. Ainsi, les villageois tentaient de fuir lorsqu'ils apprenaient que les militaires approchaient. Les militaires tiraient sur ceux qui tentaient de s'enfuir. Ils battaient et torturaient également les villageois. Ceci se passait en 1995. En tant que porteur, on l'a amené dans la partie nord-est de l'Etat Kayah. Parfois, il y avait des combats. Il a dû transporter des munitions pendant 16 jours, la première fois en 1991, pendant un mois en 1993 et une troisième fois également en 1993. On lui disait que ce serait pour une courte période. Ils sont descendus à la rivière Salween. Il craignait pour sa vie, c'est alors qu'il a décidé de s'échapper et de retourner à son village. Il a dû également travailler pour l'armée: couper des bambous et poser des clôtures autour du camp militaire qui se trouvaient à quatre heures de marche. Les ordres étaient donnés par écrit. Le camp militaire de Shadaw était le site où il devait travailler. Il a travaillé pendant une journée. D'autres travaux étaient faits sur une base rotative: cinq jours par personne, par famille, par mois, parfois une à deux fois par mois, parfois deux fois par mois. Pour toutes ces formes de travail, il n'a jamais reçu d'argent ou de nourriture. Aucun traitement médical n'était donné s'il était malade ou blessé. Les travailleurs étaient battus lorsqu'ils étaient fatigués ou prenaient une pause. A une occasion, les militaires sont venus dans son village pour chercher des porteurs. Tous les hommes étaient absents puisqu'ils travaillaient dans les champs. Les militaires se sont donc emparés des femmes du village et les ont forcées à travailler dans le camp pendant une journée et les ont battues. Il n'a pas entendu parler d'abus sexuels. Il a seulement entendu que les femmes avaient été battues. Le dernier ordre que son village a reçu fut celui de la relocalisation, ce qui l'a incité à quitter le Myanmar. Cet ordre est venu juste avant son départ en juin 1996. Ils ont été relocalisés parce que les militaires craignaient qu'ils approvisionnement les insurgés.
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  2658. Ethnie: Karenni
  2659. Age/sexe: 21 ans, masculin
  2660. Situation familiale: Célibataire lorsqu'il a quitté le Myanmar (maintenant marié); quatre frères et soeurs
  2661. Education: Première année
  2662. Activité professionnelle: Cultivateur
  2663. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Daw So Kya, Shadaw, Etat Kayah (village relocalisé de force à Shadaw en juin 1996)
  2664. L'ordre de relocalisation à Shadaw est venu en juin 1996. Il a quitté après un mois de relocalisation pour s'enfuir en Thaïlande avec ses parents. Quatre-vingt neuf familles à Daw So Kya furent relocalisées. L'ordre de relocalisation leur donnait une semaine pour s'exécuter ou être tués. Le nouveau site se situait à cinq heures de marche. Il n'a pu amener avec lui que ce qu'il pouvait transporter. Les buffles furent laissés derrière. Il a seulement reçu une petite partie de terre de 5 m2, juste assez pour pouvoir construire une maison, mais pas suffisamment pour cultiver. Aucun matériel de construction ne fut fourni. Il a reçu une petite portion de riz. Sans terres cultivables et sans travail, il n'avait aucun moyen de survivre. C'est pourquoi il a décidé de s'enfuir de l'autre côté de la frontière. Tous les villageois ont dû exécuter du travail forcé, même les femmes et les enfants. Il a fait du portage à quatre occasions, trois fois avant d'avoir 18 ans. La première et la seconde fois furent lorsqu'il avait 11 ans, lorsqu'il fut utilisé comme guide pour mener les troupes. La troisième fois, les militaires sont venus et ont amené les gens. Ils ont attaché et battu le chef du village et l'ont amené (il avait 12 ans à l'époque). Ils l'ont utilisé de nouveau comme guide. A la quatrième occasion, il était en train de cultiver dans le champ de son père. Les militaires sont venus et les ont amenés tous les deux afin de transporter des munitions. Il avait 17 ou 18 ans à l'époque. Il a fait du portage pendant cinq jours. Les combats ont éclaté avec les rebelles près du village de Daw Ei Lah. Une femme porteur a tenté de fuir les combats avec son bébé sur son dos, mais elle fut tuée. Ceux qui ne pouvaient transporter leur charge étaient battus. Aucune nourriture n'était donnée, ce qui fait que les gens étaient faibles et, par la suite, ils étaient battus. Parfois, les militaires torturaient les travailleurs en les pendant par les jambes avec un bâton sous leurs genoux. Les femmes et les enfants de 12 à 13 ans étaient également utilisés comme porteurs, tout comme les personnes âgées. Les porteurs ne recevaient ni argent ni nourriture; ils devaient aller mendier dans les villages avoisinants. Ils ont reçu seulement une petite quantité de pain sec lorsqu'ils ont atteint la rivière Pon. On leur demandait également de couper des bambous et d'exécuter d'autres formes de travail forcé dans le camp militaire. Cinq à dix personnes à la fois étaient requises dans un village pour faire ce genre de travail. Ils devaient construire des abris et couper du bois pour les bâtiments du camp.
  2665. 119
  2666. Ethnie: Shan
  2667. Age/sexe: 36 ans, masculin
  2668. Situation familiale: Marié, une fille
  2669. Activité professionnelle: Fermier
  2670. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Banlak, Taunggyi, Etat Shan (a grandi dans un village près de Namhsam)
  2671. Il a quitté le Myanmar à la mi-1997. Il a été réquisitionné par l'armée pour 1) le portage, 2) la construction de routes, 3) la construction de chemins de fer et 4) du travail pour un camp militaire. C'est le chef de village qui transmettait l'ordre qui venait des militaires. De façon générale, la règle était un membre par famille. Toutefois, il arrivait fréquemment que, lorsque le membre désigné était loin, les militaires requéraient un membre additionnel. Lorsqu'il était loin pour exécuter le travail qui lui avait été assigné, son frère prenait soin de ses terres. Il a personnellement dû faire du travail forcé pour les militaires en moyenne deux fois par mois, tous les mois pendant quinze ans (toutes formes confondues: portage, chemins de fer, routes...). 1) La première fois où il a dû porter des charges pour les militaires date de 15 ans. La dernière fois remonte à six mois. Les assignations pouvaient durer de cinq jours à un mois. Il devait porter le riz et les munitions. Quinze porteurs étaient requis pour 20 soldats; 40-50 porteurs pour 60-70 soldats. Hommes et femmes pouvaient être réquisitionnés, incluant des enfants de 15-16 ans et des personnes de plus de 60 ans. Il devait marcher toute la journée. Il n'était pas nourri de façon constante. Les rations étaient toujours insuffisantes. Il devait dormir dans la jungle. Il n'était pas rémunéré. Il était impossible de refuser ou de payer un substitut. Il a vu à deux reprises des personnes qui auraient été tuées puisqu'elles avaient refusé d'aller travailler. Il était toujours possible de payer un pot-de-vin: 5 000 kyats à chaque fois. Il a essayé à une reprise de payer pour ne pas avoir à y aller, mais le chef de village a refusé son argent. Il a dès lors dû travailler. Il a fait l'objet de mauvais traitements, ayant été battu à deux reprises. Il a vu d'autres porteurs être battus et frappés jusqu'à ce que mort s'en suive. Il a également vu des porteurs qui auraient été abattus par les militaires. Dans le cas où les femmes n'étaient plus capables de porter les charges qui leur avaient été assignées, elles faisaient l'objet de sévices sexuels (viols). Il a personnellement vu ces pratiques à quatre-cinq reprises. 2) Pour ce qui est de la construction de routes, il a travaillé à la construction de routes la première fois, il y a treize ans. La dernière fois: il y a environ six mois. Il a travaillé sur de nombreuses routes, notamment Shwenyaung-Yatsauk (Lawksawk) et Shwenyaung -Namhsan. Il devait faire les remblais, niveler la route. Ces routes étaient utilisées exclusivement par les militaires. Environ 2 000 personnes auraient travaillé en même temps que lui sur ces routes, incluant hommes, femmes, enfants et personnes plus âgées. La journée commençait à 8 heures pour se terminer à 17 heures avec un repos d'une heure à midi. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Tout refus pouvait entraîner une arrestation qui supposait le paiement d'une amende de 1 000 kyats et l'obligation de travailler. Il n'était pas possible d'engager un substitut. Les soldats assuraient la supervision. Il a vu de nombreuses personnes qui auraient fait l'objet de mauvais traitements puisqu'elles ne travaillaient pas à la satisfaction des militaires. 3) Pour ce qui est de la construction de chemins de fer, il a dû faire les remblais, niveler le terrain et poser les lames. Il a vu les voies sur lesquelles il a travaillé terminées: Yatsauk (Lawksawk) à Patu et Namhsam à Shwenyaung. Ces voies de chemin de fer étaient utilisées indistinctement par les militaires ou par les civils. Tout Taunggyi a dû y participer; 3 000 personnes auraient travaillé en même temps que lui sur ces chemins de fer, incluant hommes, femmes, enfants et personnes plus âgées. La situation était la même que pour les routes en ce qui concerne l'horaire de travail, la nourriture, la rémunération, la possibilité de refuser, les conséquences d'un refus et les mauvais traitements infligés par les militaires. 4) Enfin, il aurait travaillé à cinq reprises pour un camp militaire à Namhsam entre l'âge de 13 ans (1975) et l'âge de 19 ans (1981). Chaque assignation durait environ dix jours. Il devait dormir au camp militaire. Soixante à soixante-dix personnes ont travaillé avec lui à chaque fois, incluant hommes, femmes et personnes plus âgées (plus de 60 ans). Il n'y avait pas d'enfant. Devait apporter sa propre nourriture et devait fournir l'eau aux militaires. La journée commençait à 8 heures pour se terminer à 17 heures. Il n'était pas rémunéré. Il était impossible de refuser ou de payer un substitut. Il n'a pas personnellement fait l'objet de mauvais traitements mais a vu à deux reprises des personnes battues par les militaires. Une partie de ses récoltes devait être remise aux militaires. Si les cultivateurs ne pouvaient pas payer cette taxe, ils étaient mis en prison.
  2672. 120
  2673. Ethnie: Shan
  2674. Age/sexe: 25 ans, féminin
  2675. Situation familiale: Mariée, une fille
  2676. Activité professionnelle: Cultivatrice
  2677. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Mai Hong Nai, Nam Mong, Laikha, Etat Shan (le village comptait 80 familles environ)
  2678. Son mari voulait quitter le Myanmar puisqu'il ne voulait pas être porteur pour l'armée. Il l'a quitté il y a neuf ans et elle l'a rejoint à la mi-1997. Elle n'aurait pas été personnellement forcée de travailler. Son mari, étant en Thaïlande, il n'aurait pas non plus travaillé pour les militaires. Les hommes de son village s'enfuyaient lorsque les militaires s'approchaient du village de façon à éviter la réquisition. Toutefois d'autres personnes de son village auraient été forcées de cuisiner (riz, curry) pour les militaires lorsqu'ils s'arrêtaient dans le village. Il était impossible de refuser. Une femme aurait été tuée près de sa résidence juste avant son départ puisque les militaires la soupçonnait d'avoir des liens avec un soldat Shan. Elle a entendu dire que son village aurait été relocalisé près de Laikha.
  2679. 121
  2680. Ethnie: Pa-o
  2681. Age/sexe: 22 ans, masculin
  2682. Situation familiale: Marié, une fille
  2683. Activité professionnelle: Cultivateur
  2684. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Yong, Panglong, Loilem, Etat Shan (le village aurait fait l'objet d'une relocalisation à Panglong à la fin de 1997)
  2685. Le village du témoin a fait l'objet d'un transfert forcé à Panglong à la fin de 1997. Il a quitté le Myanmar en janvier 1998 et a marché quatre jours pour atteindre la Thaïlande. Sur le travail forcé avant la relocalisation. Il a travaillé: 1) à titre de porteur, 2) pour la construction de chemins de fer, 3) et de routes, ainsi que 4) dans les champs des militaires pour la culture de maïs et de riz. 1) Pour ce qui est du portage, il aurait été porteur pour l'armée pour la première fois à l'âge de 16 ans et, pour la dernière fois, il y a environ une année. Il aurait été porteur un nombre incalculable de fois. C'est le chef du village qui l'informait de l'ordre venant des militaires. Les assignations pouvaient durer de une à trois journées. Il devait transporter le riz et les munitions. Seuls des hommes étaient porteurs, âgés entre 14 et 50 ans. Les rations de nourriture étaient toujours insuffisantes. Les horaires pouvaient varier. Il a dû marcher à de nombreuses reprises sans aucun répit pendant de longues heures. Il devait dormir dans la jungle. Il n'a pas vu de conflits armés. Il n'était pas rémunéré. Il était possible de payer un substitut: 400-500 kyats par fois. Il était impossible de verser des pots-de-vin, les militaires ayant besoin d'hommes pour porter. Il a fait l'objet de mauvais traitements et a été battu personnellement à trois reprises avec un fusil puisqu'il ne progressait pas assez rapidement. Il a vu de nombreux autres porteurs être battus puisqu'ils n'étaient plus en mesure de porter la charge qui leur avait été assignée. 2) Pour ce qui est des chemins de fer, il aurait travaillé pendant une année il y a deux ans sur la voie reliant Namhsam à Mongnai. Ces voies seraient terminées et utilisées tant par les militaires que par les civils. Il devait y travailler tous les jours. Il devait niveler le terrain, transporter et briser les pierres. Il devait dormir sur le site de travail; 500-600 personnes auraient travaillé avec lui sur ce site, incluant hommes et femmes (pas d'enfant). Il n'était pas rémunéré. Il devait apporter sa propre nourriture. La journée commençait à 8 heures et se terminait à 17 heures, avec un repos à l'heure du déjeuner. Il a dû engager des travailleurs journaliers pour s'occuper de sa ferme. Il n'aurait pas personnellement fait l'objet de mauvais traitements. Toutefois, si les travailleurs tentaient de s'échapper et s'ils étaient repris, ils étaient battus avec un bâton. Il a vu ces pratiques à deux reprises. 3) Pour ce qui est de la construction de routes, il a travaillé il y a trois ans sur la route entre Panglong et Namhsam. Il y aurait travaillé environ 25 fois (pendant une journée) au cours de l'année. Il devait apporter sa propre nourriture; 20-25 personnes auraient travaillé en même temps que lui, incluant hommes et femmes (pas d'enfant). Il n'aurait pas fait l'objet de mauvais traitements et n'en aurait pas vu infliger à d'autres bien que les militaires leur adressaient la parole souvent en criant. 4) Enfin il a été forcé de travailler dans les champs des militaires pour les cultures de maïs et de riz, à cinq reprises il y a un an. Vingt personnes auraient travaillé en même temps que lui. Enfin, son village aurait fait l'objet d'une relocalisation il y a deux mois. Le chef du village l'aurait informé qu'il avait trois jours pour déménager. Personne n'était autorisé à demeurer dans le village. Tous les habitants du village ont été relocalisés dans différents sites. Le village a par la suite été incendié par les militaires. Il est resté deux mois au site de relocalisation près de Langlaung. Il a quitté le site puisqu'il ne pouvait pas travailler suffisamment pour subvenir aux besoins de sa famille. Il n'était pas autorisé à retourner dans son village pour prendre de la nourriture. Il n'a toutefois pas été forcé de travailler pour les militaires ou pour toute autre personne.
  2686. 122
  2687. Ethnie: Shan
  2688. Age/sexe: 23 ans, masculin
  2689. Situation familiale: Célibataire, parents vivants; cinq frères
  2690. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mauk Mong Lae, Taunggyi, Etat Shan (30 familles)
  2691. Il a quitté le Myanmar à la mi-1997 puisqu'il ne voulait pas être réquisitionné comme porteur par l'armée. Il n'aurait jamais été porteur personnellement. Il connaît toutefois plusieurs personnes qui l'auraient fait (pas dans sa famille immédiate). Il a toutefois dû faire d'autres formes de travail forcé: 1) routes et 2) chemins de fer. 1) Pour ce qui est des routes, il aurait participé à la construction de celle entre Lawsoek et Yangon, il y a 2 ans, une dizaine de fois au cours de l'année. C'est le chef de village qui l'a informé du travail qui était requis. La journée commençait à 6 heures pour se terminer à 17 heures. Il devait apporter sa propre nourriture. Quarante personnes auraient travaillé en même temps que lui, incluant hommes, femmes, enfants (16 ans) et personnes plus âgées (plus de 50 ans). Il pouvait retourner dormir dans son village. Il n'était pas rémunéré. Il était possible de payer un substitut: 50 kyats par fois. Il était impossible de verser des pots-de-vin. Son frère prenait soin de sa ferme pendant son absence. Il n'aurait pas fait l'objet de mauvais traitements personnellement. Les militaires s'adressaient souvent à eux en criant. Il aurait vu à quelques reprises des personnes qui, ayant tenté de s'enfuir, avaient été reprises et battues avec un bâton de bois par les militaires. 2) Pour ce qui est des chemins de fer, il aurait travaillé sur la voie entre Taunggyi et May Shee Law, il y a un an, une dizaine de fois. Chaque assignation durait en moyenne 15 jours. C'est le chef de village qui l'a informé du travail à exécuter. Il devait apporter et briser la pierre. Il devait dormir dans des villages voisins puisqu'il ne pouvait pas revenir chez lui. Il devait apporter sa propre nourriture. Quarante personnes auraient travaillé en même temps que lui, incluant hommes, femmes et enfants (16 ans). Il a fait l'objet de mauvais traitements puisque les militaires considéraient qu'il travaillait trop lentement.
  2692. 123
  2693. Ethnie: Shan
  2694. Age/sexe: 25 ans, masculin
  2695. Situation familiale: Neuf (mère, père, lui et quatre frères et soeurs)
  2696. Activité professionnelle: Cultivateur
  2697. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mong Yen, Kyaukme, Etat Shan (45 familles dans sa section du village)
  2698. Le témoin a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Il a quitté parce qu'il devait exécuter trop de travail forcé. Comme travail forcé, il a dû extraire le caoutchouc dans une très grande plantation d'arbres à caoutchouc (longue d'environ deux miles), puis de planter les récoltes et de les entretenir. La plantation était la propriété du bataillon 324. Les villageois qui exécutaient ce travail ne recevaient ni argent ni nourriture et devaient même apporter leurs propres outils. Ils devaient travailler de dix à quinze jours par mois. Sa famille et lui-même, ses parents, ses frères et soeurs ont tous exécuté ce genre de travail en plusieurs occasions. Il y avait entre cinq et 30 autres villageois qui exécutaient ce travail, dépendant de la quantité de travail qui devait être effectué. Ils recevaient l'ordre d'exécuter ce travail par le chef de village qui lui-même le recevait des militaires. Lorsqu'ils exécutaient mal le travail, ils devaient revenir et recommencer. Les villageois (lui également) devaient aussi travailler dans une plantation de canne à sucre pour le bataillon 324. Ils devaient faire tout le travail: nettoyer le sol, planter la canne à sucre et l'entretenir. Lorsque la canne à sucre était prête pour la récolte, ils devaient en extraire le jus afin d'en faire du sucre. Le résultat de leur travail devait être donné aux militaires. Tout ce travail n'était pas rémunéré et aucune nourriture n'était donnée, et les villageois devaient apporter leurs propres outils, y compris la machine du village pour extraire le sucre de la canne à sucre. Environ 20 à 30 villageois à la fois devaient exécuter ce travail. Les militaires vendaient par la suite le sucre pour leur propre profit. Les ordres d'effectuer ce travail provenaient du bataillon, via le chef du village. Son frère plus âgé a également dû faire du portage, mais pas lui. Son frère est allé pour la première fois en 1989 et a été parti pendant quatre mois afin de transporter du matériel pour les soldats. Les porteurs étaient requis par les militaires via le chef du village, mais ces derniers venaient parfois directement dans le village et amenaient les gens de force. Au moment de son départ, il n'y avait pas beaucoup de portage à effectuer, mais plutôt du travail forcé. Ceci était le cas depuis le cessez-le-feu de 1996, mais, avant cette date, il y avait beaucoup de portage à effectuer et peu d'autres formes de travail forcé.
  2699. 124
  2700. Ethnie: Pa-o
  2701. Age/sexe: 23 ans, masculin
  2702. Situation familiale: Neuf (lui, sa femme et sept enfants)
  2703. Activité professionnelle: Cultivateur
  2704. Domicile (avant de uitter le Myanmar): Bang Nim, Sanin, près de Panglong dans le canton de Loilem (le village comptait 80 familles)
  2705. Il y a vingt jours, tout le village de Sanin a reçu l'ordre par le bataillon d'infanterie 513 de se relocaliser à Panglong dans les sept jours. Sa famille et lui se sont déplacés au site de relocalisation, mais il n'y avait rien sur place et ils ont dû construire leur maison. Il a décidé de s'enfuir avec sa famille (ses parents étant trop âgés pour faire le voyage, ils ont décidé de rester avec sa soeur). Il pense que la relocalisation a eu lieu parce que l'armée craignait les rebelles. On leur a dit que ceux qui refusaient la relocalisation seraient tués. Le nouveau site se situait à un jour de marche de son village, ce qui implique qu'il n'a pu apporter tous ses biens et a dû laisser derrière lui le bétail. Ils ne pouvaient pas retourner dans les champs pour travailler; les cultivateurs qui ont été relocalisés ont dû travailler comme cultivateurs à Panglong. Certains ont dû mendier. Les villageois relocalisés avaient la possibilité de quitter le site de relocalisation durant la journée, mais devaient être de retour à 17 heures. Auparavant, il n'y avait pas eu beaucoup de travail forcé, mais depuis qu'ils étaient sur le nouveau site de relocalisation, ils ont dû effectuer beaucoup de travail forcé. Une personne de chaque famille devait effectuer le travail forcé en permanence. Les gens devaient planter trois acres de maïs pour les militaires. Ils ont dû également construire des toits pour les bâtiments du camp militaire. Auparavant, les villageois n'avaient pas eu à exécuter beaucoup de travail forcé, bien qu'ils aient dû faire du portage. Il y avait un camp militaire près de leur village qui avait d'ailleurs été construit par les villageois. Les troupes changeaient tous les trois mois, et le village devait leur fournir de la nourriture. De plus, les villageois devaient cuisiner pour ceux-ci. Ils envoyaient des ordres au chef du village en lui demandant ce dont ils avaient besoin. Il fut utilisé comme porteur à plusieurs occasions, habituellement pendant un à deux jours à la fois, mais parfois pour des périodes plus longues. Il a dû faire des périodes de portage plus considérables à deux reprises. La première fois en 1993 ou 1994, lorsqu'il fut amené pendant quatre mois. Les militaires avaient entouré le village et ont arrêté environ dix porteurs, y compris deux femmes (les femmes furent gardées pendant trois jours, et lorsqu'ils ont trouvé deux hommes, les femmes furent relâchées). Les dix personnes en question étaient attachées et battues. Elles n'ont pas été informées de la durée de leur séjour. Elles ont par la suite été amenées au camp militaire de Panglong où elles ont passé la nuit. Le jour suivant, elles furent amenées à Langkho en camion militaire (une distance d'environ 80 km). Elles ont passé la nuit au bataillon 99, et le jour suivant se sont rendues à pied au village de No Kong. Le témoin a dû transporter une charge de 4 RPG (mortier). Ils ont par la suite traversé la rivière Nam Taem en bateau et se sont rendus à Pang Hat dans la région de MTA. Des combats avaient lieu à Pang Hat. Les porteurs sont restés derrière les militaires, et personne ne fut tué. Par contre, plusieurs militaires furent tués. Les combats ont duré quarante-huit heures. Les porteurs avaient peu de nourriture qui consistait en un peu de riz et de poisson. Ils sont restés dans cette région pendant environ un mois. Il y avait environ 600 soldats et 80 porteurs, mais il y avait en plus plusieurs chevaux, ce qui explique qu'il n'y avait pas plus de porteurs. Durant cette période, sept ou huit porteurs sont tombés malades et sont morts sans recevoir de traitement. Deux porteurs ont été tués lorsqu'ils ont essayé de s'échapper et ont marché sur une mine. Ceci s'est passé près de la rivière Salween. Lorsque les militaires marchaient, les porteurs devaient marcher en avant d'eux, mais pas en tout temps. Il a également effectué du portage pendant quinze jours en 1997 dans la région de Laikha-Mongkaing. Il fut arrêté par les militaires tôt le matin lorsqu'il travaillait dans ses champs. Il a dû transporter des équipements radios à Lin Yok, ce qui représentait une journée de marche. Ils ont par la suite dormi sur place pendant cinq nuits. Ils ont dû alors continuer jusqu'à Wan Larng Long, environ à deux heures de marche où ils ont encore une fois passé la nuit. Il fut relâché à Wan Larng Long. Au total, il y avait six porteurs et quatre chevaux pour environ 90 soldats. Durant le portage, les soldats volaient les poulets des habitants des villages pour les manger. Si un porteur ne pouvait pas continuer, il était battu. Les porteurs qui ne pouvaient plus continuer étaient simplement abandonnés sur le bord de la route. Les porteurs mangeaient deux fois par jour; on leur donnait seulement un peu de riz et un peu de poisson.
  2706. 125
  2707. Ethnie: Shan
  2708. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2709. Situation familiale: Huit (lui, sa femme et six enfants)
  2710. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2711. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Laikha, Etat Shan (pendant vingt ans, puis, il y a six ans, il a déménagé dans le camp 5, Lashio, Etat Shan)
  2712. Le témoin a dû effectuer beaucoup de travail forcé avant son départ au début de 1997. En moyenne, il ne lui restait qu'environ dix jours par mois pour effectuer son propre travail; les autres vingt jours devaient être passés à effectuer du travail forcé. La première fois qu'il a fait du travail forcé était en 1976. Les villageois avaient reçu l'ordre de construire un camp militaire et, par la suite, les militaires ont exigé des porteurs. Les ordres étaient donnés par l'armée via le chef du village. Il s'est enfui il y a une année vers la Thaïlande parce qu'il jugeait qu'il n'avait plus de temps pour gagner sa vie, en raison de taxation excessive et de travail forcé. Environ deux fois par année, il devait payer 5 000 kyats pour engager un remplaçant pour le portage, il devait payer également un montant mensuel pour les frais de porteur. Habituellement, il allait faire lui-même le portage, mais il a dorénavant trop peur de mourir durant le portage et préfère ne plus y aller. Il connaît de nombreux porteurs qui sont décédés durant le portage. Soit ils furent tués durant les combats (particulièrement dans les Etats Kayin et Shan), soit ils furent tués en tentant de s'échapper ou sont morts de maladie. Certains sont morts de malnutrition parce que le travail était trop difficile et la nourriture insuffisante. Il devait effectuer du portage environ 12 fois par année, habituellement pour quelques jours à la fois; la plus longue période fut pendant une semaine. Les militaires traitaient les porteurs de façon très dure. Les porteurs étaient battus s'ils ne pouvaient continuer. Il a personnellement vu deux personnes se faire tuer parce qu'elles ne pouvaient plus continuer. Dans un cas, il y a sept ans, un de ses amis avait des problèmes d'estomac (probablement dus à un manque de nourriture) et était incapable de continuer. Il a vu les militaires battre son ami jusqu'à la mort devant lui. Les femmes devaient également effectuer du portage en certaines occasions si les militaires ne pouvaient pas trouver des hommes pour effectuer ces tâches. Lorsque les militaires arrivaient dans un village et qu'il n'y avait pas d'hommes disponibles, ils violaient les femmes. Les femmes utilisées comme porteurs étaient également violées; il a été témoin de ce genre d'actes à deux occasions. Les porteurs recevaient de la nourriture des militaires que ceux-ci volaient dans les villages, mais les rations qu'ils recevaient étaient très petites. Les porteurs souffrant de maladies ne recevaient pas de traitement, et ils pouvaient être relâchés s'ils étaient totalement incapables de continuer. Les ordres pour les porteurs étaient donnés par les autorités des villages mais, dans certains cas, les militaires arrêtaient les personnes directement. Il a exécuté d'autres types de travail forcé. Il a dû semer du maïs pour les bataillons d'infanterie 64 et 77, casser des pierres et remuer le sol en vue de la construction de routes de Laikha à Mongkaing et Laikha à Mong Hsu. Il a également travaillé dans les camps militaires pour les nettoyer.
  2713. 126
  2714. Ethnie: Shan
  2715. Age/sexe: 19 ans, féminin
  2716. Situation familiale: Cinq (parents, elle et deux soeurs)
  2717. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Ho Purk, Lashio, Etat Shan (le village comptait 50 familles)
  2718. Le témoin est arrivé en Thaïlande à la fin de 1997 avec cinq autres personnes (elle est le seul membre de sa famille à avoir quitté). Elle a quitté à cause du travail forcé excessif qui signifiait que sa famille ne pouvait plus survivre. En un mois, une personne de chaque famille devait effectuer environ une semaine de travail forcé, mais cela pouvait aller jusqu'à vingt jours. Elle a elle-même dû exécuter du travail forcé à plusieurs occasions depuis l'âge de 15 ans. Elle a habituellement fait du travail forcé pour des courtes périodes (environ une journée); les tâches plus longues de travail forcé (de trois à dix jours) étaient effectuées par son père. Les villageois devaient travailler dans le camp militaire à poser des clôtures, à nettoyer et également à participer à la construction de routes. Elle a elle-même dû nettoyer régulièrement le camp militaire. Les soldats la maltraitaient et l'injuriaient régulièrement, mais ne l'ont jamais battue. Certains de ses amis (masculins) étaient battus, mais ne savaient jamais pourquoi. Les ordres concernant le travail forcé étaient donnés par l'armée via le chef du village. Si quelqu'un ne se présentait pas pour le travail forcé, il était arrêté et les militaires exigeaient de la nourriture et de l'argent pour qu'il soit relâché. Il était possible d'engager quelqu'un d'autre pour faire le travail forcé à sa place, mais, dans ce cas, il fallait payer directement les militaires pour ne pas travailler. Son père a dû faire du portage. Il a relaté qu'il avait dû transporter du matériel pour les militaires en traversant les montagnes et, lorsqu'il était trop lent, il était battu. Lorsqu'il était loin pour effectuer du portage, sa famille devait faire face à plusieurs problèmes et a dû vendre certains de ses biens afin de pouvoir manger. Ceci est arrivé à plusieurs occasions.
  2719. 127
  2720. Ethnie: Shan
  2721. Age/sexe: 25 ans, masculin
  2722. Situation familiale: Famille de quatre, y compris les parents
  2723. Education: Sixième année
  2724. Activité professionnelle: Agriculteur
  2725. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Mong, Mong Yai, Etat Shan
  2726. Le témoin est venu en Thaïlande à la fin de 1997 lorsqu'un groupe d'anciens soldats du MTA est devenu un groupe paramilitaire essayant de combattre les rebelles. Ceux-ci sont venus dans son village afin de recruter des gens, ce qui l'a décidé à s'enfuir. Au Myanmar, il ne réussissait pas à gagner sa vie puisqu'il y avait trop de travail forcé et des taxes trop élevées. Il n'entrevoyait aucune amélioration tant que le régime militaire serait au pouvoir. Depuis que les militaires sont au pouvoir, sa famille a dû fournir du travail forcé au moins une fois par semaine. Lui-même a commencé le travail forcé à 18 ans, en creusant des tranchées autour d'un camp militaire. Il y avait environ 60 familles dans son village et six villages dans sa région, et lorsque le camp fut construit il y a sept ans, sur une période de quatre à cinq mois, une personne de chaque famille devait se rendre trois fois pendant sept jours de suite afin de construire ce camp et de creuser des tranchées. Il y est allé deux fois et son frère âgé une fois. Les ordres venaient du commandant du camp via le chef du village et ce dernier choisissait les familles. Quiconque ne se présentait pas devait payer une amende de 700 kyats. Les militaires forçaient les gens à travailler et ne leur permettaient pas de se reposer. Lorsque quelqu'un arrêtait de travailler, un soldat le frappait et lui disait qu'il devait terminer son travail avant de rentrer à la maison. Il a été battu à une occasion lorsqu'il coupait du bois pour une clôture. Son bois n'était pas tel que requis par les militaires et il fut donc battu et frappé dans le dos. A une occasion, dans le village de Palaung, alors qu'il ramassait du sable pour un camp militaire, une personne n'a pas compris les instructions en birman et il fut battu par un militaire. Il y a environ une année (1996), il a dû passer deux dimanches et son frère plus âgé deux dimanches et un samedi, à proximité du camp militaire, afin de nettoyer le terrain et de planter des ananas pour les militaires. Il devait planter ces ananas dans des rangées de 50. Pour leur propre récolte, les villageois plantaient une rangée par jour mais, lorsqu'ils travaillaient pour les militaires, ils devaient en faire deux par jour. A chaque fois qu'il travaillait pour les militaires, il avait peur d'être frappé. Il devait être présent à 7 heures et travailler de 8 heures à midi et de 13 heures à 17 heures. Seulement un ou deux villageois qui parlaient le birman se sont vu donner du lait par les militaires, mais lui n'a reçu ni nourriture ni argent. Il a également dû travailler dans une plantation de caoutchouc installée par les militaires depuis 1988. Il a dû passer une journée pour construire une clôture métallique autour de la plantation, mais son père a dû exécuter ce type de travail à cinq occasions différentes. Généralement, depuis que les militaires ont pris le pouvoir en 1988, les samedis et les dimanches sont devenus des jours quotidiens de travail forcé. Les gens devaient travailler pour les militaires d'une façon ou d'une autre. C'était devenu de la routine. Même lorsqu'il n'y avait rien à faire, ils devaient aller chercher de l'eau, nettoyer les terrains ou attendre. Sa famille ne devait pas partir les week-ends; il ne se souvient plus le nombre de fois. Il a également dû faire du portage en 1995 pendant quinze jours. Les villageois travaillaient de façon rotative, certains devant fournir des charrettes alors que certains travaillaient. Normalement, le commandant envoyait l'ordre au chef de village en lui précisant combien de charrettes et de porteurs étaient requis, et le chef du village déterminait au tour de qui c'était d'y aller. Il a commencé depuis son village à transporter du riz, des haricots, du poisson et des charges très lourdes jusqu'à Monghsu. Il ne recevait pas assez de nourriture et, la nuit, ils étaient attachés deux par deux à leur charge. Si quelqu'un avait l'air trop malin, il était attaché par les deux mains. D'autres membres de sa famille ont effectué du portage à plusieurs occasions en tant que porteurs ou chauffeurs de charrette bien avant que lui-même n'en fasse en 1995. Lorsque les militaires partaient en opération, ils restaient habituellement dans une région pendant six mois et, durant cette période, chaque village devait fournir des porteurs quatre fois par mois pour une période de quinze jours à deux mois. Son village de 60 familles a dû fournir à chaque fois environ six personnes et trois charrettes. Il n'y est allé seulement qu'en 1995 parce que, avant cette date, il allait à l'école en ville. Son frère, qui souffrait de problèmes d'estomac, avait terriblement de difficultés lorsqu'il exécutait le portage et ne recevait pas de repas réguliers. Ainsi, les militaires ont dû le relâcher et le renvoyer au village. Lorsqu'il était très jeune, son père a dû travailler comme porteur pendant presque deux mois. Ceci représentait la plus longue période pour quiconque dans sa famille. Lorsqu'aucun membre de sa famille ne pouvait y aller, il devait payer une taxe de porteur. Il est arrivé que sa famille doive payer 700 kyats aux troupes gouvernementales. Il y avait deux types de militaires. Il y avait ceux qui ordonnaient aux porteurs de travailler rapidement et, s'ils s'exécutaient, ne faisaient rien de plus. D'autres, par contre, les battaient et leur ordonnaient de travailler plus vite quoiqu'ils fassent. Ceci ne lui était pas arrivé; mais lorsqu'il a exécuté du portage en 1995, un compagnon de son village transportait des mortiers trop lourds pour lui. Il a essayé de se reposer en déposant sa charge et un soldat est venu derrière pour le battre, ce qui lui a occasionné des blessures aux genoux. Lors des patrouilles, les militaires ont battu un villageois en guise d'interrogatoire, ont tué et mangé les animaux des villages après que certains des membres de ce village s'étaient échappés. Il a également travaillé sur la construction d'une route en 1995 à de très nombreuses occasions. La première fois, il devait réparer une section de la route qui menait au camp militaire, en commençant dans un endroit très éloigné de son village. Il devait apporter sa propre nourriture et travaillait pendant cinq jours sur le site. Cela a pris deux mois. Il est allé à deux occasions, une fois pendant cinq jours et une fois pendant trois jours.
  2727. 128
  2728. Ethnie: Shan
  2729. Age/sexe: 18 ans, féminin
  2730. Situation familiale: Mariée (épouse du témoin 121) avec un enfant
  2731. Activité professionnelle: Agricultrice
  2732. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Yong, Panglong, Loilem, Etat Shan (village relocalisé à Panglong à la fin de 1997)
  2733. Le témoin a quitté le Myanmar en janvier 1998. Pour elle et pour ses compatriotes du village, le travail forcé a débuté seulement après la relocalisation à Panglong, il y a environ deux ans durant la saison sèche. L'ordre de relocalisation fut donnée par les soldats du bataillon 513 via le chef du village, leur donnant trois jours pour aller à Panglong et leur interdisant de revenir. Cet ordre disait que, si les villageois ne s'exécutaient pas, leur village serait brûlé et les villageois seraient battus puis tués. Ils n'ont pas eu la possibilité d'amener avec eux tous leurs biens comme des matériaux de construction ou le bétail. Les animaux furent tués par les soldats qui les ont mangés par la suite. Ils ont dû marcher jusqu'au site de relocalisation. Les villageois avaient peur d'utiliser des charrettes. Sur le nouveau site, ils ont ramassé du bois et ont construit de petites huttes. Les militaires n'ont rien fait durant la relocalisation. Depuis, il est devenu très difficile de trouver assez de nourriture pour survivre; il leur était interdit de travailler ailleurs. Sur la base militaire, les villageois devaient nettoyer le terrain, couper du bambou et effectuer d'autres tâches. Elle a dû elle-même nettoyer le sol pour la plantation et la culture de piment en plus de couper du bambou une à deux fois par mois pendant un ou deux jours. Ceci constitue tout le travail forcé qu'elle a effectué. Ses deux frères plus âgés ont dû faire du travail forcé plus souvent, trois à quatre fois par mois, et à deux ou trois occasions deux jours à la fois sur une période d'une année. Elle devait y aller seulement lorsque ses frères n'étaient pas disponibles puisque les militaires demandaient surtout des hommes. De plus, la route menant au camp militaire était régulièrement inondée par la pluie et on leur demandait de la réparer. Son frère plus âgé a dû exécuter ce travail à plusieurs reprises, et également exécuter du travail de remplissage sur la route même lorsque cette dernière n'avait pas besoin d'être réparée. Au moins quatre fois par mois, un membre de sa famille devait partir pour exécuter du travail forcé.
  2734. 129
  2735. Ethnie: Shan
  2736. Age/sexe: 35 ans, masculin
  2737. Situation familiale: Un frère et une soeur moins âgés
  2738. Education: Aucune
  2739. Activité professionnelle: Cultivateur
  2740. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mong Maw, Namtu, Etat Shan (il a quitté son village pour le canton de Laikha lorsque son village fut relocalisé de force il y a neuf ans)
  2741. Le témoin a quitté le Myanmar au début de février 1998. Il y a neuf ans, son village de 85 familles a été contraint de se déplacer au village de Pang Hai dans le canton de Namtu, où se situe une mine d'argent. A cette époque, il est allé lui-même en quatre jours dans le canton de Laikha dans l'Etat Shan parce qu'il ne voulait pas aller à Pang Hai. Les militaires ont dit au chef de village que le village devait se déplacer en trois jours. Les villageois étaient réticents, ce qui fait que les militaires sont revenus et, voyant que la majorité des villageois était toujours là, ils ont décidé de brûler le village. Son frère plus jeune s'est cassé le genou en essayant de s'échapper de la maison en feu. Il n'a reçu aucun traitement des militaires. Une autre personne s'est cassé le bras. Les militaires ont tué et mangé le bétail comme si ce dernier leur appartenait. Lorsqu'ils voyaient des gens autour du village, ils les battaient ou même tiraient sur eux. Lorsque le village fut brûlé, les villageois ont perdu tous leurs biens. Dans le canton de Laikha, il est allé dans un village éloigné de seulement 13 maisons, où il n'y avait aucun militaire du SLORC et, ainsi, il n'a jamais eu à exécuter du travail forcé là-bas. Mais il y a une année durant la saison froide (à la fin de 1996), ce village fut contraint de se relocaliser par les militaires birmans qui détestaient les militaires de l'opposition Shan qui étaient dans les parages à l'époque. Ils ont donné aux villageois trois jours pour se relocaliser à Laikha et ont tué un villageois lorsqu'il a essayé de retourner à son village d'origine malgré l'interdiction. Ils ont été relocalisés autour de Laikha, d'où il s'est échappé il y a environ deux ou trois jours parce que la situation était très chaotique. Concernant le travail forcé à Mong Maw, il devait monter la garde en tout temps, environ trois fois par mois pour une nuit. Il a dû également couper du bambou et du bois, creuser des tranchées et construire des clôtures et des maisons pour un camp militaire. Il a dû s'y rendre presque tous les jours pendant trois mois jusqu'à ce que le camp soit terminé. Il est le seul membre de sa famille à y être allé. Il a également dû exécuter du travail forcé tel que la construction de ponts ou la réparation de routes. Sa famille ne pouvait que l'envoyer lui puisque son frère et sa soeur étaient trop jeunes. Il devait y aller quinze jours à la fois environ 15 fois par année. Les militaires lui ordonnaient de terminer le travail dans un certain laps de temps et, lorsqu'il ne pouvait pas, ils le battaient. Il a été battu à trois occasions avec un bâton aussi long qu'un bras, ce qui était très douloureux. Les autres personnes qui faisaient du travail forcé ont également été battues par les militaires parce qu'elles étaient trop lentes dans leur travail ou parce qu'elles consommaient de l'opium. Concernant la construction du chemin de fer à Laikha, il a exécuté du travail forcé sur la ligne de chemin de fer de Taunggyi à Namhsan. Il a dû travailler là pendant quinze jours de suite, dormant sur le lieu de son travail avec des centaines d'autres personnes. Ils devaient amener leur propre nourriture. Les militaires du SLORC ont dit aux villageois ce qu'ils devaient faire comme travail. Ils ne les ont pas battus mais les ont avertis que, s'ils s'enfuyaient, ils seraient tués. De plus, il a dû travailler à trois occasions pendant une journée sur les lignes électriques de Panglong à Laikha. Il y avait des centaines de personnes à la fois mais pas toutes du même village au même moment.
  2742. 130
  2743. Ethnie: Shan
  2744. Age/sexe: 38 ans, masculin
  2745. Situation familiale: Marié, deux filles, deux fils
  2746. Activité professionnelle: Cultivateur
  2747. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pang Long, Wan Hat, Langkho, Etat Shan (le village comptait 70 familles)
  2748. Il a quitté le Myanmar il y a six ans puisqu'il ne voulait pas être forcé de travailler pour l'armée. Il a toutefois été forcé de travailler à titre de porteur et sur la construction de routes et d'un camp militaire. Dans les trois cas, c'est le chef de village qui lui a transmis l'ordre venant des militaires. Il n'a pas été rémunéré. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements bien que les militaires s'adressaient souvent aux travailleurs en criant. Sur le travail forcé. 1) Portage. Il aurait été recruté comme porteur à une seule occasion à l'âge de 16 ans (1976). L'assignation a duré 36-37 jours. Il a dû être porteur dans la région de Wan Hat-Mai-hsa-Se-Mawkmai. Il y avait plus de 100 porteurs pour 600-700 soldats. Seuls des hommes étaient recrutés pour être porteurs et étaient âgés entre 16 et 50 ans. Il pouvait se nourrir deux fois par jour. Il était impossible de refuser. Il a vu des personnes qui avaient été arrêtées puisqu'elles avaient refusé de travailler. A titre de sanction, elles devaient être porteurs pour une période de temps plus longue. Il était possible de payer un substitut bien qu'il ne l'ait pas fait: 1 500 kyats par fois. Il était impossible de verser des pots-de-vin. Il a vu un conflit armé. Quelques porteurs auraient perdu la vue ou les jambes en marchant sur des mines antipersonnel. Aucun traitement médical dispensé. Il ne sait pas contre quelle armée. 2) Construction d'une route. Il aurait également participé à une seule occasion à la construction de routes pour l'armée entre Sa Long et Wan Hat. Il s'agissait d'une route de terre. Il avait 20 ans (1980) et l'assignation a duré dix-sept jours. Il devait transporter la pierre de la montagne à la route. Il devait par la suite la briser. Un civil supervisait les travaux. Le travail se faisait généralement en rotation: un village devait travailler un nombre donné de jours et était par la suite remplacé par un autre. Environ 70 hommes ont travaillé en même temps que lui, âgés entre 18 et 60 ans. Les militaires donnaient des ordres généraux mais ne restaient pas sur place. Il devait apporter ses outils de travail. La journée commençait à 8 heures pour se terminer à 16 heures. Il pouvait se nourrir deux fois par jour. Il devait dormir près de la route. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements. 3) Construction de camp. Enfin, il aurait participé à une occasion pendant une journée à la construction d'un camp militaire à Wan Hat à une heure de marche de son village. Il avait 21 ans. Soixante hommes auraient travaillé en même temps que lui, âgés entre 15 et 60 ans. Il devait couper du bois. La journée a commencé à 8 heures pour se terminer à 15 heures. Il n'y avait pas de nourriture, seulement un peu d'eau.
  2749. 131
  2750. Ethnie: Shan
  2751. Age/sexe: 29 ans, masculin
  2752. Situation familiale: Marié, une fille
  2753. Activité professionnelle: Cultivateur, bûcheron
  2754. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Hokun, Wan Hat, Langkho, Etat Shan (le village comptait 45 familles)
  2755. Il a quitté le Myanmar à la fin de 1997 puisqu'il ne voulait pas travailler pour l'armée. Il aurait toutefois été porteur et aurait travaillé à la construction de routes et de chemins de fer. Lorsqu'il s'absentait, il n'y avait personne pour s'occuper de ses cultures. Dans tous les cas c'est le chef de village qui lui a transmis l'ordre venant des militaires. Il n'était pas rémunéré. Sur le travail forcé. 1) Portage. Il a été porteur à cinq reprises, la première lorsqu'il avait 20 ans (1989) et la dernière lorsqu'il avait 27 ans (1996). La première assignation a duré cinq jours alors que les autres ont duré une journée et une nuit. Il devait transporter la nourriture et les munitions. Cinq personnes de son village l'ont accompagné lors de la première assignation. Il y avait toutefois un nombre considérable de porteurs provenant d'autres villages pour 36 soldats. Les autres fois, il y avait environ 15 porteurs pour 40 à 50 soldats. La journée commençait à 7 heures pour se terminer à 17 heures. Il a surtout porté sur des terrains plats près de la rivière Salween, de Wan Hat et de Mai-hsa-Se. Il dormait dans les camps militaires et devait apporter sa propre nourriture. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements, mais a vu plusieurs porteurs qui auraient été battus puisqu'ils ne progressaient pas assez rapidement. 2) Pour ce qui est de la construction de routes, il aurait participé à la construction de la route entre Wan Hat et Langkho, pendant deux mois juste avant son départ. De nouveaux arrivants lui auraient dit que la route n'est pas terminée. Quarante personnes de son village auraient travaillé en même temps que lui, incluant hommes, femmes, enfants (12-15 ans) et personnes plus âgées (70 ans). La journée commençait à 4 heures pour se terminer à 16 heures. Il devait transporter les pierres. Les travaux étaient supervisés par un civil. Les militaires ne venaient que pour donner les ordres généraux d'exécution. Il devait apporter sa propre nourriture. Il était possible de payer pour ne pas y aller: 200 kyats pour une journée. Il a payé à trois reprises puisqu'il devait s'occuper de ses récoltes. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements. 3) Pour ce qui est de la construction de chemins de fer, il aurait participé à une occasion à la construction de la voie entre Mongnaï et Mawkmai, cinq à six mois avant son départ. Il devait nettoyer le terrain et couper le bois. Vingt-neuf hommes auraient travaillé en même temps que lui, âgés entre 17 et 60 ans. Il aurait travaillé pendant quinze jours puis se serait enfui en trouvant refuge dans l'Etat Kayah où il serait resté cinq jours avant de retourner dans son village. Pendant la quinzaine de jours où il a travaillé, il a dû apporter sa propre nourriture. Il travaillait sans arrêt. Les militaires s'adressaient aux travailleurs en criant. Il était possible de payer le chef de village pour ne pas être obligé de travailler: 2 000 kyats par fois (20 jours). Il était également possible de payer un substitut: 2 500 kyats par fois (vingt jours). Il aurait engagé un substitut à deux reprises puisqu'il devait s'occuper de ses récoltes.
  2756. 132
  2757. Ethnie: Shan
  2758. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2759. Situation familiale: Marié, deux fils
  2760. Activité professionnelle: Cultivateur
  2761. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Songkhe, Langkho, Etat Shan (le village comptait 130 familles)
  2762. Il a quitté le Myanmar il y a une année puisqu'il n'avait plus la possibilité de subvenir aux besoins de sa famille. Les militaires venaient régulièrement pour s'approprier nourriture ou autres biens. Ils ne payaient pas toujours mais, lorsqu'ils donnaient une indemnisation, elle était toujours dérisoire. Il a dû travailler pour l'armée à titre de porteur. Il a également été forcé de participer à la construction de routes. Lors de ses absences, son frère cadet et sa mère s'occupaient de ses cultures. Sur le travail forcé. 1) Sur le portage. Il a été porteur 70-80 fois pour l'armée, la première fois à l'âge de 14 ans (1983) et la dernière à 29 ans (1997). Il était informé de son assignation par le chef de village qui lui transmettait l'ordre provenant des militaires ou par les militaires eux-mêmes qui venaient le chercher directement à sa résidence (se serait produit à 14 reprises). La plus longue assignation a duré 94 jours en 1995. Lors de cette sortie, il y avait environ 72 porteurs pour 200 soldats. A la fin, 52 porteurs sont revenus (trois sont morts dont un battu jusqu'à ce que mort s'ensuive et les autres se sont échappés). Les autres assignations ont duré au moins cinq jours. Il devait notamment transporter le riz, les casseroles de cuisine, apporter l'eau, cuisiner pour les militaires et creuser les tranchées. Lors de la première assignation, certains porteurs se sont sauvés. Il a dès lors dû transporter également leurs charges. La journée commençait normalement à 7 heures pour se terminer à 17 h 30 Il n'avait droit qu'à un court repos de trois à cinq minutes. Il était nourri de temps à autre et la ration était toujours insuffisante. Il n'était pas rémunéré. Il devait dormir dans des maisons de village où les porteurs étaient enfermés de manière à les empêcher de s'échapper. Il aurait également dormi dans la forêt. Il a été pris dans des combats à sept reprises contre les brigands de l'opium. Généralement les porteurs étaient écartés du combat. Toutefois, ils servaient parfois de boucliers. Il a été battu au moins à sept reprises. A l'âge de 28 ans, il a été battu avec un bâton de bois muni de pointes puisqu'il était incapable de transporter l'eau au sommet d'une montagne. Il n'a pas reçu de traitement médical. Il a vu à de nombreuses reprises des porteurs faire l'objet de mauvais traitements. Si les porteurs tentaient de s'enfuir, ils étaient souvent battus. Lors de son assignation de trois mois, il s'est rendu de Wan Hat à Hopong en passant par Mai-hsa-Se, Na-kenglong, Loikaw, Inle Lake. Il a été relâché à Hopong. Il est ensuite retourné en voiture à Langkho où il a été arrêté à nouveau et envoyé à Mongpan pour y travailler pendant deux mois environ. Il a dû construire au camp militaire, transporter du matériel de Mongpan à Bang dowee où il a dû couper du bois. Il a été envoyé par la suite près de la rivière Salween pour y construire un camp. Il y est resté environ neuf jours pour devoir par la suite transporter des munitions jusqu'à Mongpan. La marche a duré environ deux jours. De Mongpan, il a été envoyé à Langkho pour y faire des travaux d'excavation pendant deux jours. Les cinquante-deux porteurs qui étaient restés à la suite de l'assignation de trois mois ont exécuté le même travail que lui. Par la suite, il a été forcé de travailler à deux reprises pour l'armée et se serait par la suite enfui en Thaïlande. 2) Pour ce qui est de la construction de routes, il aurait participé à la construction de celle reliant Wan Hat à Salong, il y a un an, à trois reprises. Chaque assignation durait dix jours. Cent cinquante personnes auraient travaillé en même temps que lui, incluant hommes et femmes, âgés entre 15 et 60 ans. C'est le chef de village qui l'a informé du travail qui devait être exécuté. Le site de travail était à environ une journée de marche de son village. Il devait dormir sur place, près de la route. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il était possible de payer un substitut: 2 500 kyats par fois (dix jours). Il était possible de verser des pots-de-vin du même montant. Il a vu des personnes qui ont fait l'objet de mauvais traitements puisqu'elles ne travaillaient pas assez vite.
  2763. 133
  2764. Ethnie: Shan
  2765. Age/sexe: 33 ans, masculin
  2766. Situation familiale: Sept (lui, ses parents, quatre frères et soeurs)
  2767. Domicile avant de quitter le Myanmar: Hang Loi, Wan Hat, Langkho, Etat Shan (le village comptait 20 familles)
  2768. Le témoin a quitté le Myanmar il y a deux ans. Il a fui parce qu'il ne pouvait plus tolérer le portage et le travail forcé. En moyenne, cinq jours par mois par famille étaient passés à exécuter du travail forcé. Les vingt maisons dans son village étaient divisées en cinq groupes de quatre et le travail forcé se faisait de façon rotative. Une personne de chaque maison devait se rendre pour exécuter du travail forcé pendant cinq jours. Ceci était en plus du portage. Concernant les différentes formes de travail forcé qu'il a dû exécuter, elles comprenaient entre autres la construction de la route entre Wan Hat à Salong. La route se trouvait à sept heures de marche de son village. Il devait passer la nuit sur le lieu de travail, sans abri, dormant sous les arbres le long de la route. A une occasion, plus de 300 personnes travaillaient sur cette route. Après deux mois de cette rotation, il fut réquisitionné pour du portage mais s'est enfui et est retourné à son village. La procédure normale était que les militaires informaient le chef du village du nombre de personnes dont ils avaient besoin. Si une personne sélectionnée n'y allait pas, les militaires venaient pour l'arrêter. Lors de sa première journée de portage, il a transporté du riz pour les militaires. Le second jour, il a transporté des munitions. Le troisième jour, il est resté à la base militaire et a utilisé cette opportunité pour s'enfuir. Plus de 100 porteurs étaient utilisés pour environ 200 soldats. La plupart des porteurs venaient d'autres villages. Plusieurs se sont enfuis en même temps que lui. Puisque les militaires ne savaient pas d'où les porteurs venaient, il leur était impossible de les poursuivre lorsque ceux-ci retournaient dans leur village d'origine. Ceci s'est passé en 1996. Il est resté trois mois dans son village. Durant ce temps, lorsqu'il était requis de faire du portage, il a payé une somme d'argent et lorsqu'il ne pouvait plus payer il s'est enfui. Il a payé 1 500 à 2 000 kyats à chaque fois. Lorsqu'il exécutait du portage, il n'avait pas besoin de faire d'autres formes de travail forcé et vice versa. Le portage pouvait s'effectuer pendant une période de un à deux mois. La plupart des gens s'enfuyaient plutôt que de terminer leur tâche. Ceux qui s'enfuyaient étaient souvent tués. Il a vu deux porteurs tués par les militaires de cette façon. Son père a effectué du portage pour sa famille avant de se marier. Lorsque les militaires se présentaient dans les villages pour obtenir des porteurs, ils se conduisaient de façon agressive. Les gens se sauvaient ce qui fait que les militaires devaient capturer et arrêter les gens pour qu'ils deviennent porteurs. Lorsqu'une personne ne pouvait continuer durant son portage, elle était abattue. Il n'a jamais vu des femmes effectuer du portage mais celles-ci faisaient d'autres formes de travail forcé. En général, elles n'étaient pas maltraitées. Les enfants de 14 à 15 ans étaient requis de faire du portage et du travail forcé. Les porteurs et ceux effectuant du travail forcé ne recevaient rien. Lorsqu'un porteur était malade ou blessé, on lui tirait dessus et on l'abandonnait le long de la route. En tant que porteur, il ne recevait qu'un peu de riz et parfois quelques feuilles mais jamais de curry. Les porteurs étaient nourris comme des chiens, avec la nourriture placée sur des feuilles de bambou pour tout le monde. Durant le travail forcé, il devait apporter sa propre nourriture.
  2769. 134
  2770. Ethnie: Shan
  2771. Age/sexe: 24 ans, masculin
  2772. Situation familiale: Sept (parents, lui, quatre frères et soeurs)
  2773. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Khan Tu, Nam Lot, Mawkmai, Etat Shan (le village comptait 170 familles)
  2774. Le témoin a quitté le Myanmar au milieu de 1997. Il y avait beaucoup de travail forcé pendant un ou deux jours et un des projets majeurs était le travail concernant la construction du chemin de fer de Namhsam à Mongnai. Le travail forcé sur ce projet ferroviaire a débuté il y a une année, ou environ cinq mois avant qu'il quitte. Plusieurs personnes étaient battues durant le travail, ce qui fait qu'elles essayaient de s'enfuir. Après deux mois seulement, le chef du village (son père) ainsi que cinq ou six autres étaient les seuls qui restaient parmi les trente personnes assignées au travail forcé. Les militaires ont dit à son père que puisque les autres s'étaient enfuis, ceux qui restaient devraient exécuter le travail eux-mêmes pour tous les autres. Ceci était physiquement impossible. Lorsque le travail n'était pas complété, ils ont tué son père. Le travail était fait de façon rotative: une personne par famille. Le travail consistait à casser des pierres, nettoyer, creuser des tranchées et construire des remblais. D'autres formes de travail forcé pendant un ou deux jours consistaient à planter des semences pour les militaires. Les militaires donnaient une parcelle de terre pour chaque village et leur indiquaient la quantité qu'ils devaient récolter. Lorsque le village ne cultivait pas assez, il devait acheter le manque au marché et le donner aux soldats. Il a dû exécuter ce travail lui-même à plusieurs reprises. Les militaires gardaient le fruit des récoltes mais il ne sait pas ce qu'ils faisaient avec par la suite. Lorsque des nouvelles unités de l'armée arrivaient, ils devaient construire des tranchées et des abris pour celles-ci. En général, le travail forcé prenait trois semaines dans le mois pour le travailleur principal de la maison, ce qui laissait seulement qu'une semaine pour s'occuper de ses propres choses. Il était plus facile pour les familles nombreuses de survivre puisqu'elles avaient plusieurs personnes pour partager le travail forcé. Puisque la situation était plus difficile pour les nouveaux couples, le chef du village leur donnait quelques mois de congé de travail forcé afin qu'ils puissent débuter. Les ordres concernant le travail forcé étaient parfois donnés par écrit. Dans les autres cas, le chef du village devait se rendre au camp militaire afin d'obtenir des instructions. Lorsqu'une tâche n'était pas exécutée assez rapidement, les travailleurs étaient battus. Lorsque ceux-ci voulaient se reposer parce qu'ils étaient fatigués, ils étaient également battus. La même chose se produisait lorsque le travail n'était pas satisfaisant. Dans son village, sept personnes ont été sérieusement blessées suite aux violences infligées durant le travail forcé. Six sont décédées. Certaines sont mortes sur place et d'autres furent exécutées. Finalement, il était impossible de gagner sa vie puisque les militaires relocalisaient tout le monde dans les villes, ce qui explique que plusieurs ont fui.
  2775. 135
  2776. Ethnie: Shan
  2777. Age/sexe: 24 ans, masculin
  2778. Situation familiale: Marié (en Thaïlande) avec un enfant, deux frères et soeurs
  2779. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Ho Pai, Laikha, Etat Shan (le village comptait 300 maisons)
  2780. Le témoin a quitté le Myanmar au milieu de 1995. Il a quitté à cause du portage. Il s'est enfui après sa dernière tâche de portage. Son père est mort alors qu'il était jeune, ce qui fait qu'il a dû faire du portage à sa place dès l'âge de 16 ans. Il y est allé 14 ou 15 fois, habituellement pour des périodes de dix jours à un mois. La plus longue période fut durant deux voyages de vingt-cinq et vingt-six jours respectivement. Les militaires s'adressaient habituellement au chef du village mais venaient parfois chercher des gens selon leur besoin. Durant son voyage de vingt-six jours, il n'avait pas de chaussures ou de sandales, il marchait donc lentement et fut battu souvent. Durant les huit premiers jours, il pouvait maintenir un rythme accéléré, mais après un moment il a commencé à accumuler du retard et fut battu à plusieurs reprises. Il transportait du riz, des casseroles et des munitions qui pesaient environ 23 kg. Quand il était plus jeune, il a également été utilisé comme guide. D'autres personnes venant d'autres villages ont également été arrêtées par les militaires en vue de faire du portage. Certaines ont tenté de s'échapper durant le portage. Lorsqu'on les attrapait, elles étaient ramenées devant le groupe et battues à mort comme exemple pour les autres. Il a vu des exécutions de porteurs à quatre ou cinq reprises. Lui et d'autres porteurs étaient attachés à leur charge avec une corde autour de leurs poignets pour les empêcher de fuir. Il a vu des femmes utilisées comme porteurs dans son groupe. Parfois elles étaient utilisées en tant que guide ou pour transporter des casseroles. Il a également vu un viol et des femmes se faire torturer. Ceci s'est passé dans un village qu'il traversait. Les militaires ne pouvaient trouver aucun homme pour faire du portage. Ils ont alors accusé les villageois de collaborer avec les rebelles et ont violé 15 ou 16 jeunes femmes et ont mis le feu à une fillette de 6 ans. Ceci s'est passé il y a cinq ans à Wan Mon, dans le canton de Laikha, à une journée de marche du village de Laikha. Les femmes faisaient également du travail forcé, identique au travail des hommes, mais les militaires insistaient pour avoir au moins un homme dans chaque groupe de travail. Il a également dû creuser un étang, travailler sur le chemin de fer et d'autres projets de travail forcé. Le travail sur la voie de chemin de fer s'est déroulé il y a quatre ans sur la ligne de Namhsam-Mongnai. Tout le monde dans son village a dû y aller pendant vingt-six jours à la fois durant quelques mois afin de travailler sur une portion de plusieurs miles. Les travailleurs étaient amenés en camion sur le site pour vingt-six jours. Si leur tâche n'était pas complétée dans un temps requis, ils devaient rester plus longtemps. Sur les douze personnes qui l'ont accompagné pour faire ce travail, six ou sept furent battues parce que leur travail n'était pas satisfaisant ou qu'elles n'arrivaient pas à finir à temps. Certaines ont été sérieusement blessées à la suite de ces violences mais devaient continuer de travailler. Les familles devaient habituellement exécuter du travail forcé ou du portage, mais pas les deux à la fois, sauf pour les familles qui comptaient assez d'hommes pour faire les deux. Elles devaient payer 7 000 kyats si un membre de la famille ne pouvait pas se rendre lorsqu'il était convoqué.
  2781. 136
  2782. Ethnie: Shan
  2783. Age/sexe: 32 ans, féminin
  2784. Situation familiale: Mariée avec des enfants
  2785. Occupation: Travailleur journalier
  2786. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kung Hart, Namhsam, Etat Shan (le village comptait environ 30 familles)
  2787. La famille du témoin est venue en Thaïlande il y a environ deux ans parce que la vie était trop difficile et qu'il n'avait plus assez à manger. De plus, il avait peu de temps pour travailler pour lui-même et consacrait trop de temps à travailler pour les autorités. Le travail forcé a débuté il y a longtemps et elle ne peut se rappeler quand exactement. Ses parents et la famille de son mari devaient cultiver des légumes, surveiller les routes et les chemins de fer, effectuer du portage et construire les camps militaires. De plus, les militaires demandaient toujours de l'argent ou de la nourriture. Les familles devaient se rendre au moins une fois par semaine, parfois pour quatre ou cinq jours de suite, y compris pour la construction d'un camp mlitaire. Les soldats battaient les travailleurs qui exécutaient le travail forcé (pas dans sa famille) et, lorsque ceux-ci essayaient de répondre, ils étaient battus encore plus violemment. Elle sait que son mari a dû aller exécuter ce travail pour les militaires birmans mais ne sait pas en quoi consistait ce travail. Il est allé à trois ou quatre reprises par mois, habituellement pour un à deux jours afin d'effectuer différents types de travail forcé. Ceci a continué jusqu'à ce qu'ils partent pour la Thaïlande. Les ordres venaient du chef du village. Elle a eu également à exécuter du travail forcé lorsque son mari n'était pas à la maison ou disponible. Elle a dû creuser des tranchées pour les camps militaires, et participer à la construction du chemin de fer. Elle devait y aller depuis tôt le matin jusqu'à tard le soir à plusieurs occasions pendant au moins une année. Les militaires venaient sur le lieu de travail et donnaient des instructions et les travailleurs ne pouvaient retourner qu'une fois leur travail terminé. Ils exécutaient une rotation dans la famille. Son père et son frère, qui vivaient dans des maisons séparées, devaient y aller de façon indépendante. Ceci s'est passé lorsqu'elle avait environ 26 à 27 ans, principalement lors de la construction du chemin de fer de Mongnai à Namhsam. Sa famille ne pouvait gagner sa vie puisque, lorsqu'elle n'avait pas à aller exécuter du travail forcé, elle devait trouver de l'argent pour les militaires étant donné que ceux-ci en demandaient constamment. Trois à quatre fois par mois, la famille a donné au moins de 100 à 200 kyats. Les familles plus nombreuses devaient payer plus. Sa famille donnait habituellement de 200 à 300 kyats, bien que c'était une petite famille qui ne possédait rien. La situation était très difficile puisque son mari ne gagnait que 30 à 40 kyats par jour comme travailleur journalier: le travail forcé ainsi que les dons d'argent aux militaires étaient tout aussi astreignants. Elle a généralement travaillé dans les champs d'autres membres du village afin de gagner de l'argent (environ 30 à 40 kyats par jour) dépendant du type de travail requis par l'employeur. Elle était travailleur journalier même si les militaires n'exigeaient pas d'argent.
  2788. 137
  2789. Ethnie: Shan
  2790. Age/sexe: 33 ans, féminin
  2791. Situation familiale: Mariée; 13 dans la famille de ses parents -- sept dans la famille de son mari
  2792. Occupation: Cultivateur et travailleur journalier
  2793. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Yong, Laikha, Etat Shan (le village comptait 100 familles)
  2794. La famille du témoin est venue en Thaïlande à la fin de 1996 parce que les militaires birmans les opprimaient et ils avaient une vie très difficile; chaque famille était requise pour effectuer du portage un jour sur cinq. Lorsque tous les hommes s'étaient enfuis, les militaires ont utilisé les femmes. Au lieu du portage, les femmes étaient plutôt requises pour montrer le chemin, mais à quelques occasions, ces dernières devaient faire du portage pendant un à deux jours jusqu'à ce que les militaires puissent les remplacer. Dans la famille de son père, trois personnes ont effectué du portage. A l'occasion, lorsque les militaires avaient un besoin urgent de porteurs, ils demandaient au reste de la famille. Ceci est arrivé à plusieurs familles dans le village y compris dans la sienne. Lorsque quelqu'un était loin pour effectuer du portage et n'était pas rentré, les militaires revenaient et utilisaient tous ceux qui étaient disponibles. Son mari a dû effectuer du portage depuis qu'elle est mariée avec lui (à l'âge de 13 ans, il y a vingt ans). L'année avant leur fuite, environ tous les cinq jours son mari devait se rendre au camp militaire et attendre des instructions, même si ces derniers n'avaient pas besoin de porteurs. De plus, lorsqu'ils l'emmenaient pour effectuer du portage, il devait y aller pour cinq à six jours ou plus et jusqu'à 10 à 20 jours. Après son retour, il devait souvent y retourner. La période la plus longue où son mari a dû effectuer du portage a été d'un mois et demi mais, pour certaines personnes, cette période pouvait aller jusqu'à trois mois sans qu'elles reviennent. Lorsque les porteurs ne pouvaient marcher de façon adéquate, les militaires les battaient ou les torturaient. Elle a été témoin de ce genre de pratique à deux ou trois occasions, y compris le chef du village de Kung Pak. Les membres de sa famille ont également été battus mais n'ont jamais souffert des pratiques telles que verser de l'eau dans leur bouche. Elle a vu ces pratiques sur d'autres porteurs d'autres villages lorsque les militaires traversaient leur village. Elle n'a pas elle-même effectué du portage, mais à deux occasions elle a dû guider les militaires en tenant une torche et en marchant devant eux pendant deux à trois heures sur la route. Son mari a également dû couper du bambou ou du bois pour l'armée, une fois par mois et à l'occasion pendant deux ou trois jours. Durant les sept ou huit dernières années, ils ont dû cultiver du maïs à chaque année pour les militaires, de la plantation à la récolte. Ceci se faisait sur une base rotative. Son mari devait y aller environ trois fois par saison, habituellement pendant une journée complète tôt le matin jusqu'à tard le soir. Des gens d'autres villages devaient apporter leur lit et dormir sur place parce que leur village était trop éloigné. Trente à 50 personnes travaillaient ensemble et venaient de deux ou trois villages différents. Son mari a également dû effectuer du travail sur la route de Panglong. Ceci a débuté environ il y a huit ans et à trois ou quatre occasions, son village a dû s'y rendre. Les travailleurs devaient apporter leur propre nourriture et rester sur le site pendant environ un mois. Son mari a dû y aller à deux reprises. Lorsqu'ils se sont enfuis pour la Thaïlande, les routes étaient toujours en construction. Environ 25 à 26 fois par année, ils ont dû utiliser trois charrettes pour transporter de l'eau au camp militaire. Puisque sa famille ne possédait pas de charrette, elle a dû payer entre 60 et 80 kyats. Son mari payait afin de ne pas avoir à y aller et le propriétaire de la charrette effectuait le travail. Les militaires demandaient même aux villageois de leur fournir du riz. Ils demandaient aussi de la viande et du poulet. De plus, les villageois ont dû collecter de l'argent afin d'acheter une vache ou un taureau pour les militaires. Lorsque son mari était loin pour effectuer du portage, elle était travailleur journalier. Si son mari n'avait pas eu à effectuer du portage, elle n'aurait travaillé qu'à temps partiel et se serait occupée de ses enfants.
  2795. 138
  2796. Ethnie: Shan
  2797. Age/sexe: 42 ans, masculin
  2798. Situation familiale: Marié, trois fils
  2799. Activité professionnelle: Cultivateur
  2800. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Hat, Langkho, Etat Shan (le village comptait 300 familles)
  2801. Le témoin a donné son témoignage en présence du témoin 139. Il a quitté le Myanmar en 1992. Il a été porteur pour la première fois à l'âge de 17 ans, il y a vingt-cinq ans. L'assignation a duré de trente-trois à trente-quatre jours. C'est le chef de village qui l'a informé de l'ordre provenant des militaires. Il devait transporter les munitions et les vêtements des soldats. Il devait apporter sa propre nourriture. Il n'était pas rémunéré. Il a fait l'objet de mauvais traitements. Il a été battu. On lui a même tiré dessus, mais la balle l'a manqué. Il a vu d'autres personnes qui ont été battues parce qu'elles ne progressaient pas assez rapidement. Il était possible d'engager un substitut: 3 000 kyats chaque fois (cinq jours). Il était impossible de verser des pots-de-vin. Pour ce qui est du travail sur les routes et du travail dans les camps militaires, il a confirmé ce qu'a raconté le témoin 139 (voir déclaration du témoin 139).
  2802. 139
  2803. Ethnie: Shan
  2804. Age/sexe: 41 ans, masculin
  2805. Situation familiale: Marié, deux fils, une fille
  2806. Activité professionnelle: Cultivateur
  2807. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wan Hat, Langkho, Etat Shan (le village comptait 300 familles)
  2808. Le témoin a donné son témoignage en présence du témoin 138. Il a quitté le Myanmar en 1992. Il a été porteur à cinq reprises, la première fois à l'âge de 21 ans (1978) et la dernière fois il y a environ sept ans (1990). Il n'était pas toujours nourri et la ration était de toute façon toujours insuffisante. Il devait dormir dans la forêt. Les soldats dormaient sur les porteurs afin de les empêcher de s'enfuir. Il n'est pas en mesure de dire où il a été porteur. Il était possible d'engager un substitut: 3 000 kyats chaque fois (cinq jours). Il était impossible de verser des pots-de-vin. Il a vu des porteurs battus par les militaires jusqu'à ce que mort s'ensuive. Il a personnellement été battu puisqu'il n'était plus en mesure de transporter la charge qui lui avait été assignée. Il a participé à la construction des routes entre Wan Hat et Salong, Wan Hat et Mawkmai et Wan Hat et Langkho il y a environ neuf ans (1989). Il y a travaillé à deux ou trois reprises au cours de l'année pendant cinq jours à chaque fois. Le lieu de travail était à cinq heures de marche. Plus de 100 hommes ont travaillé en même temps que lui, âgés entre 15 et 60 ans. Il devait porter et briser la pierre. La journée commençait à 8 heures pour se terminer à 17 heures. Les travaux étaient supervisés par un civil bien que les militaires étaient présents. Il devait dormir sur le site de travail. La nourriture devait être partagée par les personnes qui avaient pu en apporter. Il n'était pas rémunéré. Il était possible d'engager un substitut: 200 kyats pour une fois (cinq jours). Il n'avait pas l'argent pour ce faire. Enfin, il a travaillé dans un camp militaire qui se trouvait à une heure de marche. Il y a travaillé à une reprise pendant cinq à six jours il y a environ sept ans (1991). Il devait creuser la tranchée et poser les flèches défensives. Cinquante à 60 hommes auraient travaillé en même temps que lui. C'est le chef de village qui l'aurait informé du travail à exécuter. Il devait apporter sa propre nourriture, seule l'eau était fournie. Il était possible d'engager un substitut: 100 kyats par jour. Il pouvait retourner chez lui dormir. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements et n'en a pas vu infligés à d'autres.
  2809. 140
  2810. Ethnie: Shan
  2811. Age/sexe: 70 ans, masculin
  2812. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  2813. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pang Keng, Langkho, Etat Shan (le village comptait 12 familles)
  2814. Le témoin a quitté le Myanmar en 1992. Il a exécuté du portage à quatre reprises sur une période de quatorze ans: deux fois à l'âge de 50 ans, une fois à l'âge de 60 ans et une fois à l'âge de 64 ans. Il a réussi à terminer son travail les trois premières fois. A la dernière occasion, il s'est enfui parce qu'il craignait pour sa vie. Il n'a reçu aucun traitement de faveur à cause de son âge. La dernière fois qu'il a dû effectuer du portage était 19 jours avant sa fuite. La dernière journée il n'a reçu aucune nourriture. Neuf autres personnes se sont enfuies en même temps. Il n'a jamais été battu mais il a vu beaucoup d'autres personnes se faire battre parce qu'elles ne pouvaient transporter leur charge. Deux autres porteurs avaient son âge et le reste était plus jeune. Il n'y avait pas de femmes. Ils avaient droit à trois pauses par jour. Ils devaient marcher tout le reste de la journée. Seulement une poignée de riz et un peu de sel leur était donné. La raison pour laquelle les militaires utilisaient les personnes âgées est qu'il y avait trop peu de familles dans son village et pas assez de jeunes personnes pour remplir les quotas. La quantité de portage requis variait à chaque fois puisque il était âgé et ne travaillait pas autant que les autres. Ce travail variait donc de deux fois par mois à deux fois par année. Si les porteurs tentaient de s'enfuir, ils étaient tués. Il a été témoin de plusieurs violences mais n'a jamais vu quelqu'un se faire tuer. Les porteurs étaient battus s'ils étaient fatigués et ne pouvaient plus continuer de travailler à cause de leur âge. D'autres types de travaux comprenaient le travail dans les camps militaires. Il y a sept ans, à l'âge de 63 ans, il a également dû faire ce genre de travail. Il devait s'y rendre une à deux fois par mois pour une journée. Le camp militaire se situait environ une demi-journée de marche ce qui fait qu'il devait quitter très tôt le matin et rentrait très tard le soir. Le village fut relocalisé il y a six ans. Ceci explique partiellement pourquoi il a senti le besoin de quitter également.
  2815. 141
  2816. Ethnie: Shan
  2817. Age/sexe: 40 ans, masculin
  2818. Situation familiale: Marié (sa femme et deux enfants)
  2819. Activité professionnelle: Cultivateur
  2820. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mark Oon Lao, Wan Hat, Langkho, Etat Shan (le village comptait environ 40 familles)
  2821. Le témoin est venu en Thaïlande il y a quatre ans parce que les militaires l'opprimaient. A chaque fois qu'il voulait travailler ou se rendre dans un autre endroit, il devait demander la permission aux militaires pour obtenir un laissez-passer. Sans ce laissez-passer, il ne pouvait aller nulle part. A chaque fois que les militaires voulaient que les gens exécutent quelque chose mais que ceux-ci refusaient, ils les battaient. Il a été témoin de cette situation à plusieurs reprises dans son village. Sa famille ainsi que six ou sept autres familles de son village sont venus en Thaïlande pour les mêmes raisons. S'il n'avait pas eu à effectuer du travail forcé pour les militaires, il ne serait pas venu. Il a dû faire du portage à une occasion, à l'âge de 13 ans, pendant vingt-six jours. Il avait reçu l'ordre du chef de village qui lui-même l'avait reçu des militaires birmans. Plusieurs personnes devaient s'y rendre en même temps. Son frère plus jeune a également dû y aller pour environ vingt jours. Il a vu des militaires battre un porteur jusque dans le coma et le porteur a dû être transporté jusqu'au village. Ceci résultait du fait que ce porteur n'avait rien reçu à manger et qu'il était très faible et ne pouvait transporter sa charge. Il a lui-même été battu mais a réussi à expliquer qu'il ne pouvait continuer et fut relâché. "Nous trouverons quelqu'un d'autre." Bien que c'est ce que les militaires ont dit, ils l'ont également battu avant de le relâcher. Vers l'âge de 22 ans, jusqu'à ce qu'il vienne en Thaïlande, il a dû travailler pour la construction d'une route de Mark Oon Lao jusqu'à Salong, trois ou quatre jours à la fois et devait retourner assez régulièrement pendant cinq jours. Il devait rester sur le site de travail, il ne recevait ni nourriture ni endroit pour dormir (il devait dormir dans la forêt). Il n'était pas attaché durant la nuit et les militaires ne surveillaient pas le travail ce qui fait qu'il aurait pu s'enfuir s'il le désirait. Mais ils avaient amené avec eux leur nourriture et leur charrette. Les militaires leur assignaient une certaine partie de la route et ils devaient la terminer avant de pouvoir retourner à la maison. Les jours où il a dû s'y rendre, environ 20 personnes avec dix charrettes de son village étaient également là-bas en plus de gens d'autres villages: en tout, 200 à 300 personnes. Il n'a vu personne blessé ou battu par les militaires alors qu'il effectuait ce travail. Il n'a jamais été rémunéré pour ce travail. Lorsqu'il effectuait ce travail sur la route, il laissait 2,5 kg de riz pour sa femme et ses enfants jusqu'à son retour. De plus, les gens de son village ont dû travailler dans les camps militaires (dont un était vieux et déserté puis occupé de nouveau), en plus d'un nouveau camp qu'ils ont dû construire avant son départ. Quatre villages de la région ont dû travailler pour ces camps, une personne de chaque famille (son village comptait environ 40 maisons et trois autres villages environ sept, dix et 20 maisons respectivement). Ceux qui ne travaillaient pas de façon adéquate étaient battus par les militaires. Ils devaient creuser des tranchées et poser des clôtures. Il a également travaillé à cet endroit, posant des clôtures, environ cinq fois pour deux à trois jours à chaque fois (dépendant du temps qu'il mettait à terminer son travail). Il devait également effectuer de la surveillance, une fois tous les cinq jours. Ceci a débuté environ deux ans avant sa fuite et se poursuit toujours. En ce qui concerne les taxes, il devait également donner de l'argent et du riz une fois par mois aux militaires. Les familles les plus pauvres devaient donner au moins un pyi de riz et 50 kyats alors que les familles plus riches donnaient 3 pyi de riz et jusqu'à 500 kyats par mois.
  2822. 142
  2823. Ethnie: Musulman
  2824. Age/sexe: 40 ans, féminin
  2825. Situation familiale: Veuve. Le mari est décédé il y a dix ans lors d'un portage; sept enfants, cinq garçons (l'aîné a 27 ans) et deux filles
  2826. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2827. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yebu, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 300 familles)
  2828. Le témoin a donné son témoignage en présence du témoin 143. Elle a quitté le Myanmar en mai 1997 avec sa famille. Il y avait un camp militaire à proximité. Le village entier a été brûlé il y a vingt ans par l'armée KNU puisqu'il y avait un camp militaire. Les villageois ont tout perdu. Certains sont revenus. D'autres se sont installés dans les champs avoisinants. Il y a toujours un camp militaire à proximité. Les femmes devaient aller travailler pour l'armée lorsque les maris étaient absents ou décédés. Elle a personnellement travaillé pour un camp militaire. Elle devait obtenir des informations sur la progression de l'armée karenne. Elle a dû faire ce travail pendant vingt ans, tous les mois, une fois par semaine. Ce travail devait être exécuté conformément à une rotation entre 20 villages. Elle travaillait avec une autre personne. C'était surtout des femmes qui devaient exécuter ce travail. La journée commençait à 8 heures pour se terminer à 16 heures. S'il n'y avait pas de nouvelles à transmettre, elle devait rester au camp et y travailler: apporter l'eau, poser les clôtures, creuser les tranchées. A une reprise, elle a dû transporter de la nourriture pour les militaires (une journée). Elle a personnellement été battue avec un bâton de bambou à une reprise puisqu'elle s'est présentée en retard. En outre, elle aurait fait l'objet de mauvais traitements et aurait été maintenue dans un carcan de bois qui lui immobilisait les pieds pendant une journée entière (8 heures à 16 heures) puisqu'elle était arrivée en retard. Elle a confirmé ce que le témoin 143 a expliqué en ce que si le travail n'était pas exécuté, elle devait payer (300 kyats à chaque fois) ou demeurer dans un carcan. Elle a vu plusieurs personnes qui auraient fait l'objet de mauvais traitements. A titre de châtiment, elles devaient rester au soleil pendant de longues heures puisqu'elles étaient arrivées en retard. Elle a également participé à la construction de la route entre Dawlan (village Natkyun) et Hpa-an. Le témoin 143 aurait travaillé sur la même route, mais sur une section différente. Cette route serait utilisée par l'armée, les civils n'osant pas l'emprunter. Elle serait à refaire après chaque saison des pluies. Le site du travail était à une journée de marche. Elle y a travaillé à trois reprises, une semaine chaque fois, en 1994. Cent autres personnes auraient travaillé en même temps qu'elle sur la section de route qui lui avait été assignée, incluant des hommes et des femmes âgés de 17 à plus de 60 ans. Il y avait en général plus de femmes que d'hommes puisque ces derniers devaient subvenir aux besoins de leur famille en exécutant un travail rémunéré. La règle d'un membre par famille trouvait application. Un civil supervisait les travaux selon les ordres donnés par les militaires. Elle devait transporter la terre. La journée commençait à 7 heures pour se terminer à 17 heures, avec un répit d'une heure à midi. Elle devait apporter sa propre nourriture et dormir sur le site de travail, près de la route. Elle n'était pas rémunérée. Il était possible d'engager un substitut: le montant variait en fonction de la distance et du travail à exécuter (environ 100 kyats). Elle a confirmé la description du traitement donné par le témoin 143 en ce qu'elle aurait été battue et aurait vu plusieurs autres personnes subir le même traitement puisqu'elles ne travaillaient pas assez rapidement. Son époux a été porteur.
  2829. 143
  2830. Ethnie: Musulman
  2831. Age/sexe: 48 ans, féminin
  2832. Situation familiale: Veuve, huit enfants, quatre garçons et quatre filles
  2833. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2834. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yebu, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 100 familles)
  2835. Le témoin a donné son témoignage en présence du témoin 142. Elle a quitté le Myanmar en octobre 1997. Elle aurait exécuté les mêmes travaux que le témoin 142 pour le camp militaire. Voir déclaration du témoin 142 à cet égard. Elle a ajouté que, si le travail n'était pas exécuté, elle devait payer ou était placée dans un carcan. Elle a dû payer à de nombreuses reprises: 300 kyats chaque fois. Elle a également été battue à plus de 10 reprises puisqu'elle était en retard en raison du fait qu'elle tentait de subvenir aux besoins de sa famille. Elle a également participé à la construction de la route entre Dawlan (village Natkyun) et Hpa-an. Le témoin 142 aurait travaillé sur la même route mais sur une section différente. Elle y aurait travaillé à plus de cinq reprises en 1994. Chaque assignation a duré une semaine à l'exception d'une qui s'est prolongée pendant quinze jours. Elle aurait été battue à plusieurs reprises puisqu'elle ne travaillait pas assez rapidement. Elle a confirmé la description du travail et celle du site présentées par le témoin 142.
  2836. 144
  2837. Ethnie: Musulman
  2838. Age/sexe: 12 ans, masculin
  2839. Situation familiale: Neuf (lui, ses parents et six frères et soeurs)
  2840. Education: Non scolarisé
  2841. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sako, Hlaingbwe, Etat Kayin
  2842. Il aurait été forcé de travailler dès l'âge de 7-8 ans sur la construction de routes et pour un camp militaire. Il a quitté le Myanmar au début de janvier 1998 avec une de ses tantes. Pour ce qui est de la construction de routes, il devait transporter la terre pour la route de Paung à Yebu. La route n'était pas très loin de son village. Il a dû y travailler à quatre ou cinq reprises lorsque ses parents ne pouvaient y aller puisqu'ils tentaient de subvenir aux besoins de leur famille. Chaque assignation durait un jour et il pouvait retourner dormir chez lui. Il devait apporter sa propre nourriture. Il aurait été battu avec un fusil puisqu'il ne travaillait pas assez rapidement. Plus de 50 pour cent des personnes qui travaillaient sur la route en même temps que lui étaient des enfants de son âge (il ne peut donner le nombre total). Il aurait également, dès l'âge de 7-8 ans, travaillé pour un camp militaire. Il y aurait travaillé à plus de cinq reprises pendant une journée pour y couper du bois ou poser les clôtures. Il y avait des enfants de son âge qui travaillaient en même temps que lui, mais les adultes étaient plus nombreux. Il a également travaillé pour ce même camp militaire à plus de dix reprises, y coupant l'herbe. Il a été frappé avec un bâton et avec les poings à plusieurs reprises puisqu'il montrait des signes de fatigue. Il a dû travailler au camp militaire lorsque ses parents étaient loin pour subvenir aux besoins de la famille.
  2843. 145
  2844. Ethnie: Karenni
  2845. Age/sexe: 23 ans, masculin
  2846. Situation familiale: Marié, deux enfants
  2847. Activité professionnelle: Cultivateur
  2848. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko, région de Nabu, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait environ 100 familles; deux camps militaires à proximité)
  2849. Le témoin a rendu son témoignage en présence des témoins 146, 147 et 148. Il a quitté le Myanmar au début de 1998. Il a travaillé à titre de porteur, sur la construction de routes et pour un camp militaire. Enfin, il a dû cultiver pour les militaires. Il a quitté le Myanmar puisqu'il n'avait plus le temps de vaquer à ses propres occupations. Trois jours par semaine devaient être réservés pour les différents travaux requis par les militaires. En outre, les militaires se sont appropriés tous ses avoirs, sans aucune forme de dédommagement. Pour ce qui est de toutes les formes de travail forcé, l'assignation était transmise par le chef de village. Il n'était pas rémunéré et ne recevait aucune indemnisation. Il pouvait toutefois payer un substitut. Le montant varie en fonction du travail à exécuter et de la durée requise. 1) Pour ce qui est du portage, il a été porteur pour la première fois à l'âge de 18 ans (1992) et un nombre incalculable de fois par la suite (environ une vingtaine de fois). Il a dû porter pour la dernière fois juste avant de partir pour la Thaïlande. Montant pour se faire remplacer: 2 500 kyats/cinq jours. Il a payé un substitut à quatre reprises. Il était également possible de payer le chef de village de façon à être exempté: 400-500 kyats. Il a versé ce montant à dix occasions puisqu'il devait s'occuper de certains membres de sa famille qui étaient malades. Pour ce qui est de la nourriture, il devait bien souvent apporter la sienne puisque ce que les militaires leur donnaient n'était jamais suffisant. Les assignations duraient en moyenne cinq jours et se déroulaient dans l'Etat Karen. Il devait parcourir des terrains plats et montagneux. Il devait porter les munitions. Il a été pris dans un combat contre le KNU à une seule occasion, il y a deux ans. La bataille aurait duré une heure. Les porteurs tentaient de se cacher. Aucun n'aurait été blessé. La dernière fois où il a été porteur, il y avait trois hommes de son village avec lui. Il est incapable de donner le nombre total de porteurs à cette occasion. Il y avait toutefois une centaine de soldats. Il n'a jamais fait personnellement l'objet de mauvais traitements. D'autres porteurs ont toutefois été sévèrement battus puisqu'ils étaient trop fatigués ou épuisés pour porter la charge qui leur avait été assignée. 2) Pour ce qui est de la construction de routes, il a dû travailler sur la route menant du village au camp militaire, il y a trois ans, à dix reprises. Chaque assignation durait une journée. Il s'agit d'une route qui peut être utilisée par les charrettes et les voitures et qui a été construite en six mois (novembre à avril). Les militaires et les villageois l'utilisent. Un membre par famille devait y travailler. Les travaux étaient exécutés sous la supervision des militaires. Il devait creuser la terre, transporter la pierre et la briser. Environ une centaine de personnes provenant de deux villages travaillaient en même temps que lui, incluant hommes et femmes. Ces dernières travaillaient lorsque les hommes ne pouvaient y aller. Bien qu'il ne se soit jamais fait remplacer, le montant pour ce faire: 300 kyats/une journée. 3) Pour ce qui est des camps militaires, il a travaillé à la construction et à l'entretien de deux camps militaires. Montant pour se faire remplacer: 300 kyats/une journée. Il a payé un substitut à dix reprises. Il y a trois ans, il a participé à la construction du plus ancien des deux camps. Il y a travaillé à quatre reprises, une journée tous les sept jours. Pour ce qui est du plus récent, il a travaillé à sept reprises, une journée tous les trois jours, juste avant son départ. Dans les deux cas, dix hommes travaillaient avec lui. Par la suite, il a été appelé à faire différents travaux d'entretien pour les camps, notamment à les nettoyer, couper du bois et des bambous et poser les clôtures. Ce travail devait être exécuté tous les trois jours pour le nouveau camp. Dix personnes travaillaient avec lui. La même chose devait être faite pour l'ancien camp tous les dix jours, avec deux autres personnes. Il a dû se rendre au camp militaire, cinq jours avant son départ, pour y exécuter des travaux de nettoyage et y construire des bunkers. Il a dû également y apporter des bûches de bois. Il n'a jamais été battu bien que les militaires s'adressaient aux travailleurs en criant lorsqu'ils estimaient que le travail ne progressait pas assez rapidement. 4) Enfin, depuis 1995, il a dû, de façon bi-annuelle durant la saison des pluies, cultiver le riz pour les militaires. Il n'était pas rémunéré et ne recevait aucune compensation en retour.
  2850. 146
  2851. Ethnie: Karenni
  2852. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2853. Situation familiale: Marié, trois enfants
  2854. Activité professionnelle: Cultivateur
  2855. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko, région de Nabu, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait environ 100 familles; deux camps militaires se trouveraient à proximité de son village)
  2856. Le témoin est arrivé avec les témoins 145, 147 et 148. Il a écouté le témoignage du témoin 145. Il a quitté le Myanmar puisqu'il n'était plus en mesure de survivre. Pour ce qui est du portage, il a été porteur à plus de dix occasions. La dernière fois date de deux mois environ (fin 1997). Tous les portages ont été réalisés dans l'Etat Kayin. Les portages duraient entre une semaine et un mois. Il a été pris dans une bataille contre le KNU. Il a été sévèrement battu à plusieurs reprises (en a gardé des cicatrices). Pour ce qui est de la construction de routes, il y a travaillé à dix reprises, la dernière fois remontant à un mois.
  2857. 147
  2858. Ethnie: Karenni
  2859. Age/sexe: 37 ans, masculin
  2860. Situation familiale: Marié, cinq enfants
  2861. Activité professionnelle: Cultivateur
  2862. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko, région de Nabu, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait environ 100 familles; deux camps militaires se trouveraient à proximité de son village)
  2863. Le témoin est arrivé avec les témoins 145, 146 et 148. Il a écouté le témoignage du témoin 145. Il a été blessé à l'âge de 21 ans lorsque son ami a marché sur une mine antipersonnelle lors d'un portage. Il a été porteur par la suite à sept reprises. La dernière fois remonte à une année. Chaque assignation durait environ cinq jours. Il a été pris dans un combat à deux reprises contre le KNU. Pour ce qui est du travail sur les routes, il a dû en faire une semaine avant son départ. Dix jours avant son départ du Myanmar, il est allé dans la forêt, en compagnie de son neveu, puisqu'ils avaient été requis par les militaires pour aller chercher du bois. Ils n'étaient pas rémunérés. Son neveu a marché sur une mine antipersonnelle et a perdu les deux jambes. Il l'a amené à l'hôpital.
  2864. 148
  2865. Ethnie: Karenni
  2866. Age/sexe: 28 ans, masculin
  2867. Situation familiale: Marié, pas d'enfant
  2868. Activité professionnelle: Cultivateur
  2869. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko, région de Nabu, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait environ 100 familles; deux camps militaires se trouveraient à proximité de son village)
  2870. Le témoin est arrivé avec les témoins 145, 146 et 147. Il a écouté et corroboré le témoignage du témoin 145.
  2871. 149
  2872. Ethnie: Karenni
  2873. Age/sexe: 31 ans, féminin
  2874. Situation familiale: Mariée, trois enfants
  2875. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2876. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kopadu, Hpa-an, Etat Kayin
  2877. Elle a quitté le Myanmar en février 1998. Elle a travaillé juste avant son départ pour un camp militaire et à titre de porteur. Son mari était souvent parti tout le mois.
  2878. 150
  2879. Ethnie: Birman
  2880. Age/sexe: 24 ans, masculin
  2881. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mayangone, Yangon
  2882. Le témoin a quitté le Myanmar en 1996. Il a été arrêté en 1988 à l'âge de 13 ans lorsqu'il était impliqué dans des manifestations prodémocratiques le 8 août 1988 près de Shwedagon Pagoda. Des voitures militaires avec des armes automatiques entouraient les manifestants et ont tiré sur eux, tuant et blessant plusieurs personnes. Il fut envoyé en prison sans procès pendant un mois puis relâché à cause de son âge lorsqu'il a accepté de signer un papier disant qu'il ne serait plus impliqué en politique. Entre 1988 et 1996, il a voyagé beaucoup dans plusieurs endroits à travers le Myanmar, y compris dans l'Etat Shan, le delta Ayeyarwady ainsi que d'autres endroits. Il fut requis d'exécuter du travail forcé dans tous ces endroits. Ce n'était jamais fait sur une base volontaire. Les gens recevaient l'ordre de travailler. Les militaires ordonnaient à un certain nombre de personnes d'exécuter le travail et indiquaient le montant qui devrait être payé si cette personne ne faisait pas le travail. Il a effectué du travail forcé à Yangon et à Patu, dans le canton de Taunggyi. Ce travail a duré sept jours et consistait à casser les pierres pour égaliser les routes. Il devait payer 1 000 à 2 000 kyats pour éviter ce travail. Les gens avec peu d'argent et qui ne pouvaient même pas acheter du riz devaient travailler. Les ordres provenaient du siège du LORC jusqu'au chef local. Le lieu de travail était près de sa maison, ce qui fait qu'il a pu rester chez lui pendant la nuit. Il a également vu du travail forcé être exécuté par des prisonniers. Les travailleurs ne recevaient ni argent ni nourriture, mais ceux qui venaient des villes se voyaient donner des outils. Les personnes vivant dans les zones rurales devaient apporter leurs propres outils. Tous les gens à Yangon, y compris les fonctionnaires comme ses parents, devaient effectuer le travail forcé. Tous ses frères ont travaillé sur la route de Ayeyarwady. Son père était un officier de police et sa mère travaillait dans une usine du gouvernement. Ils obtenaient habituellement congé le week-end mais les jours de congé étaient réduits à une seule journée puisque l'autre était utilisée pour le travail forcé. Ce système a débuté en 1993-94. Il existait trois choix possibles concernant le travail forcé: exécuter le travail, payer pour que quelqu'un d'autre l'effectue, ou payer une amende pour ne pas travailler (habituellement un montant plus élevé que lorsque l'on payait pour que quelqu'un d'autre fasse le travail). La quantité de travail forcé variait selon les besoins. Dans la région de Yangon, il y avait du travail forcé tous les samedis. Il existait également des projets spéciaux de plus grande envergure. Le travail du samedi comprenait le nettoyage du bureau du LORC ou il fallait exécuter du travail administratif. De plus, lorsqu'il y avait une offensive militaire de grande envergure, les gens étaient requis d'exécuter du portage. Alors qu'il se trouvait dans la région de Yangon, il a également vu des terres être confisquées et du travail forcé pour la construction de la route de Yangon à Danubyu et Pathein (Bassein). Les militaires surveillaient, mais ne travaillaient pas. Il a quitté Yangon en 1989, mais y est retourné de façon régulière au moins une fois par année. Son dernier séjour à Yangon fut en 1995. Il a exécuté du portage à une occasion et a fait du travail forcé à deux ou trois occasions dans différents endroits lorsqu'il visitait des régions éloignées de Yangon. Sa plus longue tâche fut du portage en 1991. Il fut appelé par le chef local du LORC. Il a été porteur pendant un mois, ce qui impliquait de transporter des sacs de riz (un sac pour deux personnes). De son expérience, il a constaté une très grande différence entre le travail forcé dans les zones rurales et les zones urbaines. Dans les endroits plus riches, les gens utilisaient leur argent afin de ne pas travailler ou payaient pour qu'il soit exécuté par d'autres personnes. Ainsi, ce sont les pauvres qui sont le plus touchés par les problèmes du travail forcé.
  2883. 151
  2884. Ethnie: Karenni
  2885. Age/sexe: 41 ans, masculin
  2886. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  2887. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Naung Da Bwe, Kawkareik, Etat Kayin
  2888. Le témoin est en Thaïlande depuis le début de 1997 avec toute sa famille. Il a quitté le Myanmar à cause du travail forcé et du mauvais traitement que les militaires lui infligeaient. Il a fait du portage et du travail forcé. Plusieurs types de travaux différents étaient requis par les militaires, comprenant la coupe et le transport de bambous et de bois et la culture (autant de types de travaux que l'on pouvait imaginer). A cause de tous ces travaux "... nous n'avions rien à manger pour nous-mêmes et avons été contraints de partir". Chaque maison devait envoyer quelqu'un une à deux fois par semaine pour environ sept jours. Parfois deux ordres différents venaient au même moment, ce qui fait que plus d'une personne par famille devait partir ou payer quelqu'un d'autre: de 200 à 500 kyats à chaque fois. Habituellement, les gens y allaient, sauf s'ils étaient malades et payaient alors quelqu'un d'autre. Les femmes et les enfants étaient inclus. Les ordres émanaient des militaires qui donnaient des instructions au chef de village. Celui-ci relayait les instructions telles que: plus de bois était requis ou telle ou telle chose devait être construite. Par la suite, le chef de village divisait le travail parmi les villageois. "A chaque fois qu'une tâche était complétée, une autre était requise. Cela n'avait jamais de fin." Cette situation était identique pour tous les villages de la région. Les autorités ne demandaient pas toujours à chaque famille d'envoyer quelqu'un en même temps. Cela se passait sur une base rotative. S'il n'y avait pas assez de personnes, les militaires venaient au village et arrêtaient les gens. Lorsqu'ils venaient, ils prenaient et tuaient les animaux, et tuaient même parfois les hommes. Il a vu trois personnes se faire tuer de cette façon lors de visites des militaires. Ceux-ci les accusaient d'être des rebelles, même si ce n'était pas le cas. Lorsque les porteurs ne pouvaient porter leur charge, ils étaient battus. Il n'a pas vu de porteurs se faire tuer, mais il a entendu plusieurs histoires à cet effet. C'était surtout les hommes qui étaient utilisés comme porteurs et rarement les femmes. Les porteurs étaient beaucoup plus maltraités que les personnes qui exécutaient d'autres types de travaux forcés. Avec le travail forcé, il y avait moins de problèmes, puisque l'armée n'était là que pour surveiller. En ce qui concerne le portage, il recevait très peu de nourriture qui consistait en un petit bol de riz et qui était juste assez pour que les porteurs ne crèvent pas de faim. Aucune nourriture n'était donnée durant les autres types de travaux forcés. Les gens amenaient leur propre nourriture et outils. D'autres types de travaux comprenaient la construction de camps militaires, le creusage des tranchées, la coupe de bambous, la construction de routes et le travail dans des plantations de sucre ou de caoutchouc. Il a personnellement exécuté tous ces types de travaux, à l'exception du travail dans une plantation de sucre. Le travail dans les plantations de caoutchouc était considérable. Les militaires amenaient les semences et les travailleurs exécutaient tout le reste: planter, cultiver, tailler les arbres et récolter. Le caoutchouc était envoyé au quartier général des bataillons 549, 547 et 548. Ceux-ci étaient situés dans le village de Nabu. Il a dû exécuter du travail forcé pour ces trois camps militaires. Ils étaient tous à environ deux miles de son village. Les militaires contrôlaient totalement cette région depuis une année. Depuis ce temps, le travail forcé de grande envergure a débuté. En 1996, lorsqu'il est arrivé, la première chose que les militaires ont demandé fut de débroussailler la jungle autour des camps. Par la suite, ils ont exigé la construction de la route. Il a dû faire ce travail pendant une année avant de quitter. La route était à deux voies avec en surface des petites pierres. Il a exécuté du portage à plusieurs reprises, pour transporter du matériel entre les camps. Il a également exécuté du portage avant l'installation des camps militaires et avant les tâches concernant d'autres travaux forcés. Il a été à plusieurs reprises sur la ligne de front. Durant les combats, plusieurs porteurs furent blessés et certains se sont enfuis. Les porteurs blessés étaient soignés. Durant les offensives, les porteurs étaient utilisés par les militaires à l'avant en tant qu'éclaireurs. Les porteurs étaient parfois envoyés au devant des troupes afin de détecter les mines. A quelques occasions, un ou deux porteurs par semaine étaient tués ou blessés de cette façon. Le portage pouvait durer de quelques jours jusqu'à un mois. Il était effectué sur une base rotative deux à trois fois par année. D'autres types de travaux forcés avaient lieu de deux à trois fois par semaine pendant un à deux jours. Mais, parfois, ceux-ci duraient durant cinq jours si le site de travail était éloigné. Les villageois devaient en moyenne exécuter plus de deux semaines de travail forcé par mois.
  2889. 152
  2890. Ethnie: Karenni
  2891. Age/sexe: 36 ans, masculin
  2892. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  2893. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  2894. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Treh Wa, Bilin, Etat Mon (le village comptait 50 familles)
  2895. Le témoin a quitté le Myanmar il y a une année, mais il y est retourné au début de 1998. Il a de nouveau quitté le Myanmar à la mi-février 1998. Il fut arrêté et soumis à la torture par le LIB 96 il y a de cela une année et trois mois, juste avant son premier départ. Ils l'ont accusé d'être un soldat à la solde du KNU. Il fut battu et torturé avec une lampe à kérozène et on lui a versé de l'eau dans les narines. Il y avait un camp militaire dans la région de son village depuis 1988, ce qui fait que le portage était monnaie courante: plusieurs fois par mois pendant quatre ou cinq ans pour une durée de trois à dix jours à chaque fois. A une occasion, le portage a duré trois mois. Cela devenait de plus en plus fréquent. Durant ces trois mois de portage, il a dû transporter du riz sur la ligne de front. Il a été arrêté par les militaires alors qu'il marchait près de son village et a été contraint d'effectuer ce travail. Les autres fois, il a été arrêté de la même façon ou il recevait l'ordre du chef de village. L'assignation de trois mois a eu lieu il y a trois ou quatre ans. Il fut amené de Thaton et envoyé à Bilin en camion et a dû marcher jusqu'à la ligne de front dans le district de Papun. Il n'a pas reçu d'eau (les porteurs devaient trouver leur propre eau) et a eu droit à seulement un peu de riz: une poignée chaque jour avec une cuillère de curry. Les porteurs n'avaient aucune force, puisqu'ils recevaient peu de nourriture. Plusieurs furent battus et tués par les militaires. Dix porteurs furent battus à mort par les militaires durant cette période de trois mois. Lorsque les porteurs étaient trop lents, ils étaient battus. Il a lui-même été battu. Les femmes n'avaient pas à faire du portage sur la ligne de front, mais étaient utilisées pour des distances plus courtes. Il n'a vu aucun porteur être blessé ou tué pendant les combats. Il transportait deux sacs de riz, un sur son dos et un par-dessus ses épaules. Il était possible de payer 600 kyats pendant trois jours pour éviter ce travail. Aucun traitement médical n'était offert aux porteurs qui étaient malades. Il a dû travailler en tant que porteur pour la dernière fois il y a une année. D'autres types de travaux forcés comprenaient la pose de clôtures et le creusage de tranchées dans le camp militaire qui se trouvait à une heure de marche. Il a exécuté du travail forcé et du portage à différentes occasions. Il y avait également un camp de la DKBA installé il y a une année où il a dû exécuter du travail forcé. Pour la DKBA, il a dû faire du travail dans le camp tel que creuser des tranchées et construire des routes. Au total, en moyenne par mois, il a dû passer environ dix jours dans ce camp, en plus des quinze jours requis pour le travail au camp de la DKBA et du portage. Il ne lui restait plus que cinq jours par mois pour faire son propre travail et gagner sa vie. Il était cultivateur et travaillait pour d'autres gens. Il devait couper du bois et le vendre pour augmenter ses revenus. Mais même en faisant cela, il n'arrivait pas à survivre. C'est pourquoi il est venu en Thaïlande. La quantité de travail forcé est plus importante aujourd'hui qu'elle ne l'a jamais été, puisqu'il y a deux bases militaires à servir. En 1989, son village avait commencé à travailler sur la route de Mawlamyine à Yangon. Le village s'était vu assigner une partie de 1 000 pieds de la route avec une largeur de deux voies. Le chef du village donnait les ordres sur une base rotative. Son dernier projet de travail forcé consistait à ériger des barrières autour de la base de la DKBA. Juste avant son départ, il a payé 4 000 kyats pour être relâché lors d'une seconde arrestation par l'armée. A cette occasion, il avait de l'argent puisqu'il avait pu vendre des feuilles destinées à des toitures en métal.
  2896. 153
  2897. Ethnie: Karenni
  2898. Age/sexe: 28 ans, masculin
  2899. Situation familiale: Marié, une fille de sept mois
  2900. Activité professionnelle: Cultivateur
  2901. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tichara, Myawady, Etat Kayin (le village comptait plus de 300 familles)
  2902. Il a quitté le Myanmar au début de janvier 1998 puisqu'il n'était plus en mesure de subvenir aux besoins de sa famille en raison du temps requis pour le travail qui devait être exécuté pour les militaires et des taxes qui devaient être payées. Il a dû faire: 1) du portage et 2) de la construction de routes. Dans les deux cas, c'est le chef du village qui transmettait l'ordre des militaires bien que les militaires pouvaient venir directement aux maisons ou dans les lieux publics pour arrêter les porteurs. Il n'était pas rémunéré et ne recevait aucune forme de compensation pour ces travaux. 1) Il a été porteur à une seule occasion pendant une semaine durant la saison des pluies. Il a réussi à s'enfuir les autres fois. Le portage a dû être exécuté dans une région montagneuse de l'Etat Kayin. Les porteurs étaient des hommes, âgés entre 14 et 60 ans. Ils n'étaient pas rémunérés. Il était toutefois possible de se faire remplacer. Le montant variait en fonction du nombre de journées: entre 500 et 1 000 kyats. Il était également possible de payer le chef du village pour ne pas avoir à y aller. Il n'a jamais payé et ne connaît pas dès lors le montant qui devait être versé. Ils devaient porter les munitions et devaient marcher toute la journée. Il n'y avait jamais assez de nourriture. Au début, chaque porteur avait droit à sa boîte de conserve. Après quelques jours, trois porteurs devaient se la partager. Ils devaient dormir dans la jungle, sans abri. Personne n'a pu prendre soin de sa famille pendant son absence. Pendant cette période, son épouse a donné naissance à leur fille. Il n'a pas personnellement fait l'objet de mauvais traitements. Des amis auraient toutefois été battus avec un bâton puisqu'ils ne progressaient pas assez rapidement et étaient trop fatigués pour porter la charge qui leur avait été assignée. Il aurait également porté une à trois fois/mois au cours des deux dernières années la nourriture aux militaires qui vivaient dans un camp dans la montagne. La marche jusqu'au camp était d'environ une heure. Il exécutait ce travail avec d'autres hommes en rotation. Le nombre pouvait varier et même excéder 100 personnes. 2) Il a dû travailler sur la route entre son village et Meh Pleh. Il s'agit d'une route pour les voitures. Le site du travail était à trois heures de marche de sa maison. Il a dû y travailler à plusieurs reprises au cours de l'année dernière bien que la construction de la route ait commencé trois ans auparavant. Cette route doit être refaite après chaque saison des pluies. Plus de 20 personnes de son village travaillaient en même temps que lui. Toutefois, il ne peut dire le nombre total d'hommes ou de femmes qui travaillaient sur la route. La journée commençait à 8 heures pour se terminer à 17 heures avec un arrêt d'une heure à midi. Il devait apporter sa propre nourriture mais pouvait retourner chez lui le soir. Il était possible de payer un substitut. Il ne connaît pas le montant puisqu'il n'avait pas l'argent nécessaire pour se faire remplacer. Il était également possible de payer le chef du village pour ne pas avoir à y aller: 100 kyats pour une journée. Au cours de l'année dernière, il a dû également poser des clôtures le long de la route et monter la garde contre le KNU. Pour ce faire, il devait se déplacer chaque matin sur la route avec une charrue afin de vérifier si des mines ou autres explosifs avaient été posés. Une mine a explosé l'année dernière, tuant un travailleur et deux militaires. Taxes: entre 200-300 kyats par mois depuis son retour dans son village en 1995. Il ne connaît pas la raison pour laquelle ces taxes étaient imposées. Pour les payer, il a dû vendre des terres et se faire engager à titre de travailleur journalier.
  2903. 154
  2904. Ethnie: Karenni
  2905. Age/sexe: 44 ans, masculin
  2906. Situation familiale: Marié avec quatre enfants (tous venus avec lui)
  2907. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Minzan, Hpa-an, Etat Kayin (le village comptait 500 familles)
  2908. Le témoin et sa famille sont en Thaïlande depuis six ans. En janvier 1998, il est retourné dans son village pour voir la situation actuelle. Il est resté pendant vingt jours et est revenu en Thaïlande. Il a trouvé que la situation était mauvaise. Les militaires avaient le contrôle de toute la région. Avant son départ, il travaillait dans les rizières. Il devait donner un pourcentage de ses récoltes aux militaires et un autre pourcentage au propriétaire de la terre, ce qui lui en laissait très peu. "Il était difficile de survivre avec ce qui me restait." Il ne pouvait se permettre d'effectuer du portage ou des tâches de travail forcé, alors il les évitait en dormant en brousse. Cette stratégie a fonctionné puisqu'elle lui permettait de n'être pas arrêté directement par les troupes. Mais il ne pouvait éviter ce travail lorsque les ordres venaient directement du chef du village. Il a été porteur à quatre occasions, trois fois suite aux ordres du chef du village et une fois suite à une arrestation directement par les militaires. Il s'est enfui à chaque occasion avant la fin de son travail. Ainsi, il a travaillé pendant quatre ou cinq jours à trois occasions. La quatrième occasion a duré un mois et cinq jours. Quatre personnes étaient déjà mortes d'avoir trop travaillé et n'avoir pas reçu assez de nourriture, et il était donc certain qu'il allait mourir lui-même s'il restait. Il s'est donc enfui et est retourné à la maison. Lorsque les porteurs se sentaient faibles et ne pouvaient continuer, ils étaient battus. Après avoir été battus, les porteurs étaient parfois incapables de continuer à marcher et ils étaient abandonnés sur le bord de la route. A chaque fois que les porteurs ralentissaient, ils étaient battus. Ils ne recevaient aucun traitement médical s'ils étaient malades. Ils recevaient peu de nourriture. Les porteurs cuisinaient eux-mêmes leur nourriture. Les militaires préparaient la leur. Ils recevaient environ un contenant et demi de riz par jour avec un peu de curry. Il y avait environ 500 maisons dans le village et le portage était fait sur une base rotative à chaque fois que les militaires venaient. Ils appelaient alors 5, 10 ou 15 personnes à la fois, une ou deux fois par mois. Lorsqu'il n'y avait pas d'hommes à la maison, la famille devait payer 600 kyats. Maintenant, ce montant pouvait s'élever jusqu'à 2 000 kyats puisque de plus en plus de gens refusaient d'effectuer le travail et qu'il était de plus en plus difficile d'obtenir des remplaçants. Seuls les hommes faisaient le portage. Les femmes étaient utilisées pour du travail sur des courtes distances. Il y avait beaucoup de portage à l'époque. Maintenant, les villageois devaient seulement payer une taxe de porteur une fois par mois. Mais il n'y avait plus de portage. Il y avait, toutefois, beaucoup d'autres types de travail forcé, ce qui fait que le temps passé sur le travail forcé était à peu près le même. Puisqu'il estimait que le portage était plus difficile, il pense que la situation s'était un peu améliorée. A l'époque, le travail forcé consistait principalement à travailler dans les camps militaires, pour nettoyer, rénover les bâtiments et cultiver pour l'armée. Aujourd'hui, les constructions de routes étaient le travail principal en plus du travail dans les camps militaires. Il y avait également de l'agriculture imposée sur la plantation de caoutchouc pour le bataillon 202. Les villageois devaient effectuer la plantation et la culture ainsi que la récolte. Le caoutchouc produit était envoyé à la division 22. La route principale sur laquelle s'effectuait le travail était celle de Hpa-an à Shwegun. Elle était à trois miles du village. Lorsqu'il est retourné pour visiter, en janvier 1998, il a dû passer trois de ses vingt jours à exécuter du travail forcé sur la route. A l'époque, l'armée venait directement dans le village pour recruter les gens. Toutefois, aujourd'hui, ceci était fait via le chef du village. Ce dernier donnait les ordres à chaque maison. Le village se voyait assigner une certaine section de la route à compléter. Il n'y avait pas de militaires sur le lieu de travail, mais ils surveillaient quand même que le travail se faisait. Si les travailleurs ne réussissaient pas à terminer le travail à temps, ils encouraient des problèmes avec les militaires. Le chef du village devait faire rapport sur ceux qui ne travaillaient pas de façon adéquate. Personne n'a été battu, seules des menaces furent prononcées. Les travailleurs devaient apporter leur propre nourriture et leurs outils. Personne n'était rémunéré. Ils devaient eux-mêmes donner de l'argent s'ils étaient malades ou s'ils ne pouvaient travailler. Certains travailleurs sont morts sur le site suite à des accidents de travail. Lorsque le chef de village se plaignait, on lui disait que c'était parce que ses travailleurs n'étaient pas assez bons et qu'aucun dédommagement ne serait versé. Il en coûtait 300 kyats par jour si quelqu'un ne pouvait se présenter. Les personnes âgées, les enfants et tous les autres devaient y aller. Lorsque les enfants étaient assez vieux pour transporter des choses (entre 8 et 9 ans), ils devaient y aller. Les militaires n'étaient pas préoccupés par le fait que les enfants devaient travailler puisque le travail devait être complété. Un enfant prenait un peu plus de temps qu'un adulte (souvent les villageois compatissaient avec les enfants et les aidaient à terminer leurs tâches). Un minimum d'une personne par famille devait effectuer ce travail. Il estime qu'il était beaucoup plus difficile de gagner sa vie aujourd'hui. Les cultivateurs doivent vendre tout ce qu'ils ont afin de survivre. Le travail forcé est le problème majeur. Chaque jour passé à effectuer du travail forcé est un jour perdu pour nourrir sa famille. Le portage est aujourd'hui limité. Quatre personnes sont assignées en tout temps dans un village sur une base rotative afin de servir comme porteurs au camp militaire: pour aller chercher de l'eau, cuisiner ou transporter des messages. Auparavant, les villageois devaient également effectuer de la surveillance, mais plus maintenant. Durant cette surveillance, ils devaient payer une amende de plusieurs poulets si on les surprenait en train de dormir. Aujourd'hui, l'armée collecte une nouvelle taxe pour la construction d'une école. Ils imposent cette taxe en fonction du revenu: 7 000 kyats pour les riches et jusqu'à 1 500 kyats pour les pauvres. Mais, il devenait impossible de payer cette taxe additionnelle. Les villageois devaient donc vendre leurs biens et il était devenu impossible de rester. Il n'avait plus de choix que de partir.
  2909. 155
  2910. Ethnie: Mulsuman
  2911. Age/sexe: 38 ans, féminin
  2912. Situation familiale: Mariée avec six enfants
  2913. Activité professionnelle: Travailleur journalier dans l'agriculture
  2914. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yebu, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village, à l'époque, comptait 100 familles, mais la majorité est partie)
  2915. Le témoin a quitté le Myanmar avec sa famille à la fin de 1997 parce que le travail forcé imposé par les militaires (y compris le portage) couvrait environ vingt jours par mois. En tant que travailleurs journaliers, s'ils devaient effectuer du travail forcé pendant une journée, ils n'avaient plus rien à manger pour le jour suivant. Les militaires traitaient les Musulmans et les Karens de façon discriminatoire, mais les Musulmans se voyaient infliger un traitement encore pire que les autres, ce qui rendait leur situation d'autant plus difficile. Ils étaient contraints d'exécuter du travail forcé encore plus difficile et obtenaient moins de nourriture, ce qui fait que plusieurs d'entre eux quittaient les villages pour se rendre dans les villes. Dans son village, il y avait à l'époque 200 familles musulmanes, mais il n'en restait que 15 ou 16 aujourd'hui. Habituellement, les militaires indiquaient au chef de village le nombre de porteurs requis, mais, à quelques occasions, lorsque le village n'envoyait personne, les militaires venaient les chercher directement. A ces occasions, si les villageois partaient avec les militaires sur le champ, il n'y avait pas de problèmes. Sinon, les militaires pourchassaient les villageois et les battaient. Dans sa famille, le portage était toujours exécuté par les hommes. Son mari a dû transporter des munitions et de la nourriture pour l'armée. Durant plusieurs années, il était normal d'exécuter du portage une fois par mois, habituellement pendant cinq jours, mais parfois pour des périodes plus longues d'une semaine à dix jours, et même jusqu'à deux mois ou plus. Parfois, pour une très courte distance, ce travail ne prenait qu'une journée, mais à ces occasions ils utilisaient deux à trois personnes de la même famille, ce qui compliquait les choses. Parfois, les militaires ordonnaient aux porteurs d'apporter de la nourriture pour plusieurs jours (quinze jours) pour que ceux-ci puissent la manger. Les personnes fortes n'avaient pas de problème pour faire le travail. Si les porteurs étaient fatigués ou incapables de faire le travail, ils étaient battus et, parfois même tués. Quelques-uns de ses amis d'autres villages ont été tués de cette façon. A quelques occasions, son mari a été battu avec une tige de bambou; elle en a été témoin, et ceci est arrivé à beaucoup d'autres personnes. En tant que porteur, un villageois ne recevait que peu de nourriture et devait travailler beaucoup. Ils étaient battus et parfois abandonnés au bord de la route. Elle a vu plusieurs blessures infligées à des porteurs à la suite de violences causées par les militaires. Lorsqu'il y avait des combats dans l'Etat Kayin, les militaires mettaient les porteurs en avant, ce qui fait que ceux-ci se faisaient tuer alors que les soldats restaient en vie. C'est ce qui s'est passé avec son mari. A d'autres occasions, lorsque les militaires s'attendaient à une attaque, elle a été utilisée comme bouclier humain. Les militaires réquisitionnaient tout le village, même les enfants, et les plaçaient devant le camp militaire. Plusieurs villageois sont morts de cette façon (environ 20 personnes de son village). Des Musulmans et des Karens ont été tués de cette façon dans les derniers mois avant qu'elle parte. En ce qui concerne la construction de camps militaires, trois camps existaient dans sa région: Yebu, Nabu et Painkyone. Ils existaient depuis environ vingt ans, mais n'avaient pas toujours été situés au même endroit. Lorsqu'un camp changeait de site, les gens devaient construire un nouveau camp: les hommes, les femmes, les enfants. Dans le cas de Nabu, les habitants de ce village, qui comptait environ 100 familles, ont dû se déplacer il y a deux ou trois ans pour faire place à un nouveau camp militaire. Plus personne ne vit sur ce site. Certains ont déménagé à Kawkareik et d'autres dans des villages autour des collines. Il existe un camp majeur à Yebu qui n'a pas été déplacé, bien que certains petits postes autour l'aient été. Lorsqu'ils construisaient un camp, les gens des villages éloignés devaient venir exécuter du travail forcé. Dans son cas, elle n'a eu qu'à aller au camp de Yebu, mais pas à ceux de Nabu ou de Painkyone. En ce qui concerne le travail dans les camps, les ordres étaient donnés aux chefs de village par écrit, mais en cas de problèmes les militaires venaient directement au village et battaient les gens. Ils ne réquisitionnaient pas toujours une personne par famille, puisque dans certains cas, lorsqu'ils voulaient cinq personnes, cela se faisait d'une façon rotative. Une personne par famille devait y aller, peu importe si le mari était absent pour exécuter du portage ailleurs. En son absence, si elle avait de l'argent, elle devait les payer puisque ceux-ci ne pouvaient accepter qu'elle refuse d'y aller. Puisque son garçon le plus âgé est parti depuis longtemps, son deuxième enfant, qui est une fille, a dû exécuter du travail forcé; parfois, même les jeunes enfants devaient travailler. Dans les camps, les hommes et les femmes devaient exécuter du portage, puiser de l'eau, aller porter des messages aux militaires ou faire tout autre travail requis par ceux-ci. Lorsque les militaires quittaient, ceci impliquait plus de travail puisque de nouveaux militaires arrivaient. Ils devaient également couper du bambou. A quelques occasions, les hommes ont été envoyés dans la forêt pour couper du bois et pour apporter des billots aux militaires. Les villageois devaient également cultiver et donner le fruit de leurs récoltes aux militaires. Ils devaient également leur fournir de la viande et du poulet. Lorsque cela n'était pas fait, les militaires les emprisonnaient et tuaient et mangeaient leur bétail. Son mari, ses enfants et elle-même ont tous eu à travailler sur la route de Nabu à Painkyone. Après son départ, les gens de sa famille ont dû également faire ce travail. Une personne par famille, y compris les enfants de 12 à 13 ans. Elle connaissait des enfants de 10 ans qui ont dû effectuer du travail forcé. Lorsque personne d'une famille y allait, ils devaient payer une amende, mais puisque personne n'avait d'argent un enfant devait y aller. Même les villageois très éloignés de la route devaient travailler. Dans son village, on utilisait une personne par famille, mais pas toujours en même temps. La route entre Nabu à travers la région de Yebu se situait près de chez elle, ce qui implique qu'elle pouvait rentrer à la maison le soir, alors que d'autres devaient dormir sur le lieu de travail. Le traitement était différent du portage, qui était beaucoup plus difficile puisque les porteurs ne pouvaient se reposer que lorsque les militaires se reposaient. Ces derniers ne portaient aucune attention au fait que les porteurs étaient fatigués et affamés, et leur donnaient très peu de nourriture. Par contre, lors du travail sur la route, les villageois pouvaient apporter leur nourriture, dormir et se reposer tant que le travail se faisait. On leur assignait une partie de la route, et ce travail devait être terminé en cinq jours. Lorsqu'on refusait de faire du travail forcé, il fallait payer une amende d'environ 100 kyats par jour. Lorsque le travail était plus éloigné, on devait payer pour trois jours 300 kyats. Dans d'autres cas, cette somme ne pouvait être que de 60 à 70 kyats. Le montant payé variait selon la nature du travail. En ce qui concerne le portage, ce montant pouvait aller de 200 à 300 kyats par jour. Les militaires préféraient l'argent plutôt que d'obtenir des travailleurs. Toutefois, lorsqu'ils avaient vraiment besoin de travailleurs, ils les obtenaient. Ainsi, même lorsque les gens payaient, certains ont dû effectuer du travail forcé.
  2916. 156
  2917. Ethnie: Musulman
  2918. Age/sexe: 12 ans, masculin
  2919. Situation familiale: Huit enfants (mère, sept frères et soeurs)
  2920. Education: Aucune
  2921. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yebu, Hlaingbwe, Etat Kayin
  2922. Le témoin a effectué du travail forcé pour les militaires depuis l'âge de 10 ans. Il a quitté le Myanmar au milieu de 1997. En ce qui concerne le travail forcé, il a travaillé sur la construction d'une route. Il devait couper du bambou en vue de la construction de cette route. Il devait creuser des trous et transporter des pierres chaque jour durant la saison sèche de 7 heures le matin à midi, puis il arrêtait pour manger le riz qu'on lui apportait. Il travaillait alors de 13 heures à 17 heures. Le travail était très difficile et il était très fatigué. Parfois, vers 11 heures du matin, les enfants se cachaient dans les buissons. Les militaires ne les voyaient pas, mais les autres travailleurs leur demandaient de revenir. Parmi les adultes, il y avait toujours au moins cinq enfants, et parfois jusqu'à dix. Il a dû lui-même exécuter du travail forcé, puisqu'il n'a pas de père. Lorsque sa mère ne pouvait y aller, c'est lui qui devait y aller. De plus, lorsque des villageois payaient, c'est lui qui devait y aller à leur place et il recevait 30 kyats par jour. Mais, la plupart du temps, il y allait pour sa propre famille. Lorsque les militaires lui ordonnaient d'effectuer un travail quelconque, il devaient le terminer. Dans le cas contraire, ceux-ci l'insultaient mais ne l'ont jamais frappé. A une occasion, il a vu l'officier en charge battre le chef du village parce que celui-ci ne pouvait trouver assez de gens pour exécuter le travail forcé. Il l'a attaché avec une corde et l'a battu avec une tige de bambou; les autres militaires ne semblaient pas être d'accord avec ces actes. Son père est mort alors qu'il effectuait du portage durant des combats, lorsqu'il était encore enfant. Il a entendu dire que les militaires battaient les porteurs qui ne pouvaient pas travailler. Il a vu que certaines personnes avaient des blessures sur le crâne et sur leurs épaules.
  2923. 157
  2924. Ethnie: Karenni
  2925. Age/sexe: 48 ans, masculin
  2926. Situation familiale: Neuf (sa femme et sept enfants)
  2927. Activité professionnelle: Cultivateur
  2928. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Bee Lay Noh, Bilin, Etat Mon (à l'origine, il y avait 500 familles dans le village; maintenant seulement 100)
  2929. Le témoin en venu en Thaïlande il y a quatre ans: il est resté pendant trois ans et est retourné au Myanmar pendant quelques mois durant la saison des pluies afin de ramener quelqu'un avec lui en août 1996. Il est une fois de plus retourner au Myanmar et est revenu en Thaïlande en octobre 1997. Il y a quatre ans, il a dû couper des arbres et des bambous pour la construction de la route de Bilin à Papun. Il a dû travailler pendant quinze jours et a pu obtenir une journée de repos. Il a dû par la suite travailler une nouvelle fois quinze jours. Durant ce temps, il ne recevait pas assez de nourriture, ce qui fait qu'il ne pouvait continuer à travailler et a décidé de s'enfuir. Trois cents personnes par jour, une personne de chaque maison, devaient travailler sur la construction de la route. Les militaires avaient donné l'ordre au chef de village et les villageois devaient obéir sans rien dire. Il a vu deux femmes, deux jeunes filles et cinq hommes se faire tuer en une journée il y a de cela quatre ans. Ils ont été tués parce qu'ils étaient fatigués et avaient pris une pause durant le travail. Les militaires les avaient insultés, ils ont répliqué, et ceux-ci se sont fâchés et les ont tués. Ils les ont frappés sur la tête et ont violé les deux jeunes filles avant de les poignarder. La construction de la route se poursuivait lorsqu'il est retourné en octobre 1997. La première fois qu'il est retourné au Myanmar dans son village afin de ramener quelqu'un, durant la saison des pluies de 1996, il n'a pas eu à effectuer du travail forcé bien qu'il ait vu d'autres personnes poser des clôtures et creuser des tranchées. En 1997, il a dû effectuer du travail forcé pendant dix jours par mois (une personne de chaque famille devait couper des arbres et du bambou). La route n'est pas complétée mais le camp est complètement terminé aujourd'hui. Malgré cela, ils ont toujours dû continuer à couper du bambou. Les hommes qui ne pouvaient pas transporter le bambou étaient tués par les troupes du SLORC. Les femmes étaient battues et violentées. A une occasion, il a vu un homme âgé informer les militaires qu'il était fatigué et ne pouvaient plus continuer. Les militaires ont répliqué qu'il acceptait de travailler pour le KNU mais pas pour eux; ils l'ont donc battu; ils l'ont tué à coups de couteau. Une journée où tous les villageois coupaient du bambou dans la forêt, les militaires ont bu de l'alcool et ont contraint les femmes à venir dans leur camp. Une des femmes en question était très fatiguée et a demandé de se reposer. Les militaires l'ont battue avec une tige de bambou. Durant la soirée, il a tenté de retrouver cette femme mais elle n'était pas à la maison. Un moine du monastère l'a informé qu'elle avait été tuée par les militaires du SLORC. A une autre occasion, il a vu des militaires battre une femme jusqu'à la mort. Elle devait avec d'autres villageois couper du bambou mais elle avait demandé de se reposer et s'est assise. Un officier a répliqué que ceux qui voulaient se reposer devaient mourir. C'est ce qui s'est produit et ils l'ont tuée. En septembre 1997, les militaires ont brûlé plusieurs villages dans le canton de Bilin et ont contraint les villageois à se relocaliser ailleurs. Son village Be Lay Noh était un grand village avec un important camp militaire. Ainsi, les petits villages autour de Be Lay Noh ont été relocalisés à cet endroit. Plus tard, le commandant du camp a ordonné aux villageois de retourner dans leur village d'origine et ils ont dû construire de nouvelles maisons puisque les anciennes avaient été brûlées par les militaires. Les villageois devaient également couper du bambou et construire des maisons pour les familles des militaires du SLORC et du DKBA. Il s'est enfui avec sa famille et 60 autres familles ainsi que plusieurs autres personnes d'origine karenne des villages avoisinants. En tout, environ 300 familles restaient dans le même camp de réfugiés parce qu'elles n'avaient pas assez de nourriture. Il y a une année, les militaires du DKBA et du SLORC ont pris toutes leurs récoltes. Ils ont donc dû aller mendier. Les militaires leur ont donné seulement que trois petits contenants de riz par jour par famille. Ils ont tenté de s'éloigner du village pour cultiver près des montagnes là où les militaires ne pourraient les trouver, mais les cochons sont venus et ont tout manger.
  2930. 158
  2931. Ethnie: Karenni, chrétien
  2932. Age/sexe: 55 ans, masculin
  2933. Situation familiale: Onze (lui, sa femme et neuf enfants)
  2934. Activité professionnelle: Ancien chef de village
  2935. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Bee T'Ka, Hlaingbwe, Etat Kayin
  2936. Le témoin est venu en Thaïlande en 1996. Il est retourné dans son village en janvier 1998 et est revenu en Thaïlande en février. Des trois cents familles de son village, seules 50 familles bouddhistes sont toujours là; toutes les familles chrétiennes ont dû quitter. Il y a quatre ans, les troupes du SLORC et du DKBA ont commencé à chasser les villageois bien que certains soient revenus après quelques mois. Ceci s'est produit à plusieurs occasions. Toutefois, il y a deux ans, les militaires ne leur ont pas permis de retourner, ce qui fait que certains villageois ont vendu leur maison et ne sont jamais revenus. Il est venu en Thaïlande après avoir été arrêté à la suite d'accusations de possession d'armes. Avant de devenir le chef du village il y a dix ans, il a effectué quatre voyages de portage de deux à cinq jours chacun. Mais certains de ses enfants et d'autres personnes ont fait du portage pendant un mois de suite. Parfois, les militaires demandaient les porteurs pour trois jours, mais ceux-ci devaient rester jusqu'à un mois. Lorsqu'il est retourné en janvier 1998, les villageois devaient faire du portage tous les mois, habituellement pendant cinq jours. Lorsqu'ils ne pouvaient pas y aller, ils devaient payer 450 kyats par jour. Les villageois devaient effectuer la construction de la route et se rendre à pied sur le lieu de travail. Ils devaient y travailler et dormir sur place pendant une semaine jusqu'à ce que d'autres viennent les remplacer. Ceci implique qu'ils n'avaient plus le temps d'effectuer leur propre travail. Ses enfants ont travaillé il y a environ trois ans sur les routes de Dawlan et Natkyun, et également sur la route entre Ah Pou et Taun Zun pendant environ quatre jours par mois. Les autorités demandaient au chef du village de trouver des travailleurs et, lorsque celui-ci ne pouvait en trouver suffisamment, les militaires venaient et capturaient les gens dans le village. Durant le travail forcé, il a vu des militaires insulter des travailleurs mais jamais les tuer. Lorsque les militaires venaient au village, les villageois s'enfuyaient et les militaires tiraient sur eux. Il a vu plusieurs villageois se faire tuer alors qu'ils s'enfuyaient. D'autres ont été tués parce qu'ils étaient soupçonnés de soutenir le KNU. Lorsqu'il était chef de village, chaque famille a dû effectuer du travail forcé trois à quatre jours par mois. Aujourd'hui, les gens doivent effectuer du travail forcé chaque jour durant la saison sèche, mais toujours la même personne de la même famille. Les demandes d'argent de la part des militaires étaient maintenant un problème majeur. Si les militaires du KNU demandaient aux villageois de payer 10 000 kyats par année, le SLORC et le DKBA leur demandaient également la même somme. Ainsi, la plupart des villageois désiraient venir en Thaïlande bien qu'ils ne le pouvaient pas. Lorsqu'il est retourné dans son village en janvier, il a vu qu'entre Tichara et Tiwablaw, et entre Meh Pleh et Kyokyo, les militaires du SLORC-SPDC avaient brûlé des centaines de fermes ainsi que des rizières. Le bétail n'avait plus de quoi se nourrir et sautait souvent sur des mines. Il était maintenant essentiel d'engager quelqu'un pour montrer le chemin afin d'éviter les mines.
  2937. 159
  2938. Ethnie: Karenni, chrétien
  2939. Age/sexe: 48 ans, masculin
  2940. Situation familiale: Marié avec cinq enfants
  2941. Activité professionnelle: Travailleur journalier (avant la relocalisation)
  2942. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mye Yeh, Kyaukkyi, division de Bago (le village comptait 47 familles; relocalisé il y a quatre ans à Yan Myo Aung avec 650 autres familles de huit villages différents)
  2943. Le témoin est arrivé en Thaïlande au début de janvier 1998. Il y a quatre ans, suite à une embuscade des soldats du KNU dans la forêt près de Mye Yeh, lorsque 14 militaires du SLORC furent tués, les troupes du SLORC ont détruit trois puits ainsi que des arbres dans le village. Ils ont arrêté tous les hommes, les femmes et les enfants du village ainsi que ceux de deux villages avoisinants (Ter Paw et Po Thaung Su), les ont attachés et les ont gardés au soleil en préparant leurs armes pour les abattre. Par la suite, un soldat a convaincu le commandant de l'innocence des villageois. Ainsi, ils n'ont pas été tués mais ont dû marcher jusqu'au site de relocalisation à quatre heures de marche. En ce qui concerne le travail forcé, deux ans avant la relocalisation, les villageois ont dû travailler sur la construction d'une route chaque jour pendant la saison sèche et la saison des pluies. Une personne par famille, homme, femme ou enfant, devait transporter des pierres. Il a dû lui-même travailler pendant six jours alors que sa femme a travaillé une journée de 6 heures le matin à 18 heures le soir avec une pause pour manger du riz une fois par jour. Alors qu'il travaillait sur la route, sa femme gagnait de l'argent en ramassant des légumes dans la forêt et en les vendant. Lorsque son tour est venu d'effectuer du portage alors qu'il travaillait sur la construction de la route, il a emprunté de l'argent pour payer afin de ne pas travailler comme porteur. Après la relocalisation, il a dû travailler sur la construction de la route seulement durant la saison sèche et seulement pendant quelques jours par mois puisque le travail était partagé entre plusieurs villages. Lorsque les villageois sont arrivés sur le site de relocalisation, on leur a assigné des tâches à chaque jour et ils devaient surveiller la route durant la nuit. Son quota était de trois jours et trois nuits de suite par mois dans un groupe de trois personnes. Entre février et novembre 1997, il a dû couper de l'herbe une fois toutes les deux semaines sur le site de relocalisation. A cette occasion, il a dû transporter du matériel pour les militaires: avant la relocalisation, cinq fois pendant trois jours à chaque fois; et après la relocalisation, à deux reprises. Pendant les six dernières années, il a été requis comme porteur une fois par mois mais il a payé au lieu d'y aller. Afin d'être exempté du portage pendant trois jours par mois, il devait payer 200 kyats par jour. Tout le monde devait effectuer du travail forcé ou faire du portage et la seule façon de s'en sortir était de payer. Les gens qui ne pouvaient pas payer devaient effectuer le portage; puisque sa femme avait un bébé, il craignait d'être tué durant le portage et il a donc décidé de payer. Quelqu'un de son village est mort durant le portage en janvier 1997, laissant une jeune veuve et un bébé. Il ne voulait pas y aller mais fut arrêté par les militaires. Un de ses compagnons de portage est revenu et lui a annoncé qu'un de leurs compagnons avait sauté sur une mine avec un militaire. De plus, en janvier 1997, quatre personnes du village de Yan Myo Aung se sont perdues durant le portage. Les autres villageois ont présumé qu'ils étaient morts. Après la relocalisation, une personne de chaque famille dans le village devait aller en forêt et couper des arbres et du bambou pendant une durée de un mois et demi. En même temps, les villageois de deux autres villages devaient aller planter des piments. Plus tard, il y eut une inondation des plantations de piments qui a détruit la récolte. Les militaires du SLORC sont venus et ont exigé des villageois ayant planté le piment un dédommagement de 150 000 kyats par village. Alors qu'il exécutait du portage, il fut frappé par les militaires à quelques reprises. A une autre occasion, il a dû transporter 20 mortiers. Comme il peinait avec cette lourde charge, les militaires l'ont battu. Il a fallu qu'un sergent major intervienne pour qu'on lui retire 10 mortiers de sa charge. Il a également vu un jeune garçon être violemment frappé par les militaires, mais il ne sait pas pourquoi. Lors de la construction des routes, les militaires insultaient les gens mais ne les frappaient pas. La dernière fois qu'il a effectué du travail forcé, ce fut en novembre 1997 alors qu'il a dû transporter des mortiers pendant cinq jours. Après cela, il a toujours préféré s'enfuir (comme les autres villageois) lorsque les militaires du SLORC approchaient de son village. Depuis la relocalisation, lorsqu'il n'effectue pas de travail forcé, il survit grâce à la pêche. Il est venu en Thaïlande parce qu'il n'y avait plus de riz et qu'il ne pouvait plus travailler pour sa propre famille.
  2944. 160
  2945. Ethnie: Karenni
  2946. Age/sexe: Masculin
  2947. Situation familiale: Marié, une fille
  2948. Activité professionnelle: Fermier. Il travaillait sur les terres de son père.
  2949. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Noh Hay Hta, Papun, Etat Kayin (le village comptait environ 40 familles. Il y avait un camp militaire à environ trois miles)
  2950. Il a quitté le Myanmar en février 1997 puisqu'il n'était pas capable de subvenir aux besoins de sa famille en raison du travail qu'il devait exécuter pour les militaires. Personne ne pouvait s'occuper de ses récoltes pendant ses moments d'absence. Il lui restait cinq jours par mois pendant lesquels il pouvait se consacrer à ses propres affaires, ses propres cultures. 1) Portage. Il a dû faire du portage pendant dix ans, à deux reprises chaque mois. La durée variait, mais n'était jamais moins que cinq jours. Parfois les voyages pouvaient durer jusqu'à un mois, s'il y avait des opérations militaires. Toutes les familles de son village devaient fournir un membre masculin pour ce genre de travail. Ses frères ont dès lors eux aussi eu à faire du portage. L'ordre pour faire du portage venait des militaires, mais était transmis par le chef du village. Il n'a pas vu d'ordre écrit. Il devait transporter des munitions pour les mortiers, la nourriture et les casseroles pour la cuisine. Il y avait environ 40 à 50 porteurs pour 150 soldats. Il n'était pas rémunéré et ne recevait pas suffisamment de nourriture. Il a déjà été pris dans une bataille contre le KNU. Les porteurs devaient rester près des soldats. Il a fait l'objet de mauvais traitements, ayant reçu des coups de pieds puisqu'il était trop fatigué pour suivre le rythme de progression. On aurait menacé de le tuer. Il a vu deux porteurs qui seraient décédés puisqu'ils n'étaient plus en mesure de transporter la charge qui leur avait été assignée. Il n'y avait pas de médicaments disponibles en cas de maladie. 2) Monter la garde à proximité de la route entre Papun et Kamamaung. Son poste de travail était à environ trois miles de sa résidence. Il devait monter la garde à deux reprises pendant un mois, chaque assignation durant cinq jours. Il a exécuté ce travail en 1996 et jusqu'à son départ en février 1997. Tous les villageois devaient exécuter ce travail. Ses trois frères ont également été obligés d'y travailler. En fait, seules les personnes très âgées, incluant son père, étaient exemptées. Environ 400 personnes, incluant hommes, femmes et enfants, travaillaient en même temps que lui. Il devait dormir près de la route pendant ces journées. Il devait monter une tente à cette fin. Il a dû également poser, le long de cette route, une clôture qui servait de défense contre l'Union nationale karenne (Karen National Union) (KNU). En outre, les villageois devaient "nettoyer" la route chaque matin, ce travail consistant à vérifier si des explosifs n'avaient pas été posés. Advenant qu'une mine ait été oubliée et qu'un véhicule de l'armée sautât à son contact, les villageois devaient payer, à titre de représailles, un million de kyats. Chaque villageois, chaque village se voyaient dès lors assigner une section de la route aux fins de faire cette vérification. Il n'était pas rémunéré et devait apporter sa propre nourriture. A une occasion en 1997, après la saison des pluies, il a dû réparer un pont alors qu'il montait la garde. Les femmes de son village n'ont pas fait l'objet de mauvais traitements de la part des militaires. Il a toutefois entendu dire que des femmes d'autres villages auraient été violées, notamment une femme de Po Gay par cinq soldats. 3) Construction de tentes pour l'armée en 1997. L'assignation a duré dix jours et se trouvait à trois heures de marche de sa résidence (neuf miles). Chaque jour, 30 personnes travaillaient ensemble (total pour le mois: 300). Elles provenaient de trois villages différents, incluant le sien. Les ordres étaient donnés par les militaires. Les matériaux et le matériel (notamment bambous) nécessaires pour construire ces installations étaient fournis et transportés par les travailleurs qui ne recevaient aucune indemnisation à cet égard. Il était possible de payer une autre personne pour exécuter le travail: 150 kyats par jour. Il était également possible de verser des pots-de-vin, bien qu'il ne l'ait pas personnellement fait. Il n'était pas possible de refuser et connaît des personnes qui auraient été arrêtées puisqu'elles ne voulaient pas exécuter le travail. Il devait donner au gouvernement cinq paniers de riz sur 100 récoltés (un panier = deux boîtes de conserve de riz non cuit). Pour ce qui est des cannes à sucre, cinq contenants devaient être donnés sur 100. Tous les villageois devaient payer ces montants. C'est le chef de village qui devait collecter ces taxes. Elles étaient imposées au regard de dispositions de la loi. Il ne fait partie d'aucun groupement politique. Il retournerait au Myanmar si les conditions changeaient. Il craint d'être exécuté s'il y retourne (DKBA est dans son village).
  2951. 161
  2952. Ethnie: Musulman
  2953. Age/sexe: 30 ans, féminin
  2954. Situation familiale: Mariée, une fille
  2955. Education: Troisième année
  2956. Activité professionnelle: Vendeur itinérant
  2957. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mon Naing, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 340 familles)
  2958. Elle a quitté le Myanmar au début de 1998 en raison du travail forcé pour les militaires. Personnellement, elle a dû faire du portage et monter la garde près d'une route. Son mari a également été requis de faire du portage et de participer à la construction de la route. Il lui restait en moyenne dix à quinze jours par mois pour vaquer à ses propres occupations. Le travail forcé est exécuté en rotation, un membre par famille. De façon générale, elle se partageait le travail forcé avec son époux. Elle a dû faire du portage à plusieurs reprises. En 1997, au total, elle aurait été requise à 12 reprises dont quatre pendant la saison sèche. Elle aurait fait du portage à huit reprises auparavant. A chaque fois, les assignations duraient au moins quinze jours. Au cours des deux mois qui ont précédé son départ, on lui a demandé de se rendre de son village au camp militaire de Mawpokay qui se trouve près de la frontière. Il s'agit d'un voyage d'environ huit jours. La durée totale de cette assignation a été de quinze à dix-sept jours. A l'aller, elle a dû gravir une montagne pendant cinq jours et la descendre par la suite pendant trois. Cent-vingt soldats participaient à ce voyage. C'est le chef de village qui organisait le travail requis par les militaires. Parfois, les militaires arrêtaient directement les personnes dont ils avaient besoin. Un membre par famille devait faire le portage lorsque requis. Son époux, sa nièce, sa soeur et son frère ont également dû faire du portage. En fait, généralement, c'est son époux qui a exécuté le portage depuis les quinze dernières années. Hommes et femmes pouvaient être requis de faire du portage pour les militaires. Parfois jusqu'à 30 à 40 femmes. Les hommes étaient généralement placés au-devant des colonnes et les femmes derrière. Elle a dû transporter des munitions pour les mortiers (cinq) et la nourriture (riz). Elle n'était pas rémunérée et ne recevait pas suffisamment de nourriture. Elle n'a pas personnellement fait l'objet de mauvais traitements, mais plusieurs de ses amies auraient été frappées lorsqu'elles ne réussissaient plus à porter les charges très lourdes qui leur avaient été assignées. Au cours des nuits, les soldats en profitaient pour toucher les femmes et les menaçaient avec leurs armes si elles criaient. Elle aurait été touchée à une reprise. Quatre hommes seraient décédés à bout de force. Il était possible de payer pour être remplacé, mais elle ne l'a pas fait puisqu'elle n'avait pas les fonds pour ce faire. Elle ne sait pas s'il était possible de payer des pots-de-vin. Tout refus pouvait entraîner une arrestation. Elle connaît du reste des personnes qui auraient été arrêtées pour ce motif. Elle a dû monter la garde à proximité de la route de Mon Naing, à Nyamarah (14 miles) durant les huit dernières années, à une reprise chaque mois. Chaque assignation durait cinq jours. Une personne par famille devait faire ce travail qui était exécuté uniquement par les femmes. Elle travaillait avec environ 130 autres femmes. Elle devait dormir près de la route avec quatre autres femmes dans une tente. Elle devait "nettoyer" la route de manière à ce que les militaires puissent y circuler sans danger. Elle devait également tenir les militaires informés de tous mouvements ou de toutes informations concernant le KNU. Elle n'était pas rémunérée et devait apporter sa propre nourriture. Lorsqu'elle était loin pour exécuter ce travail, son époux devait souvent s'absenter également pour faire du portage pour les militaires et de la construction de routes. Pour ce qui est de ce dernier point, son époux a dû y travailler dix jours par mois, quatre mois par année pendant les trois dernières années. Il s'agissait de la même route pour laquelle elle devait monter la garde. La route était principalement utilisée par les militaires aux fins de déplacer troupes, équipements et rations. Elle estime que les Musulmans recevaient le même traitement que les autres villageois pour ce qui est du travail forcé. Toutefois, une quinzaine de Musulmans qui ont tenté de retourner dans leur village, il y a environ trois mois, auraient été arrêtés et transférés vers un monastère bouddhiste où ils auraient été forcés de porter adoration à des objets sacrés de ce culte. S'ils refusaient, ils étaient battus par des membres du DKBA. Une taxe sur les récoltes devait être payée au gouvernement. Sur 100 paniers de riz, cinq devaient être donnés au gouvernement. Sur 100 vis de légumes, sept devaient aller au gouvernement. Elle ne pense pas que les Musulmans devaient payer plus que les membres des autres groupes (bouddhistes ou chrétiens) dans son village.
  2959. 162
  2960. Ethnie: Karenni
  2961. Age/sexe: 48 ans, féminin
  2962. Education: Dixième année
  2963. Activité professionnelle: Chef d'une section du village
  2964. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Bee T'Ka, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 200 familles; il était divisé en huit sections, chaque section comptait 20-30 familles)
  2965. Elle a quitté le Myanmar au début de 1998 puisqu'elle avait terminé son terme à titre de chef de section et ne voulait plus être en contact avec les militaires. Les soldats la connaissaient. Si elle était demeurée, les soldats seraient éventuellement venus chez elle. Elle a fait son travail contre son gré, mais ne voyait aucune autre alternative puisqu'elle aurait pu être arrêtée ou battue si les militaires estimaient que son travail n'était pas satisfaisant. Les villageois assument le rôle de chef de section conformément à une rotation. Elle a été chef de section pendant un mois et a aidé son successeur pendant six mois. Les femmes sont souvent désignées à titre de chef de section ou de village puisqu'elles font généralement l'objet de moins de mauvais traitements de la part des militaires que les hommes qui assument les mêmes fonctions. Elle n'ose pas retourner puisqu'elle craint d'être arrêtée. A la demande des militaires, elle a dû organiser le travail des villageois pour ce qui est de la construction de la route entre Hpa-an et Dawlan. L'ordre reçu des militaires était écrit. Un membre par famille devait contribuer à ce travail. Elle a dû organiser le travail de 150 personnes incluant 90 femmes pendant six jours. Les villageois n'étaient ni rémunérés ni nourris. Ils étaient généralement réticents à l'idée de travailler mais finissaient par s'exécuter et semblaient finalement heureux de travailler ensemble. Une personne qui refusait d'exécuter le travail assigné pouvait faire face à une sanction qui était administrée par les militaires. Dans le cas où une famille ne pouvait contribuer, elle devait payer. Elle se servait alors de l'argent ainsi recueilli pour acheter de la nourriture pour les autres villageois qui travaillaient. Il était aussi possible de payer un substitut. Elle a également organisé le portage qui devait s'exécuter une fois par mois. Ce travail se faisait conformément à un ordre écrit des militaires. A chaque fois, huit à 12 villageois de sa section étaient désignés. Les villageois pouvaient lui donner directement l'argent lorsqu'ils ne pouvaient pas y aller ou engager un substitut. Il y avait deux types de portage: le premier consistait à transporter matériel, équipement ou nourriture d'un camp à un autre; le second était requis pendant les opérations militaires. Les femmes faisaient généralement le premier alors que le second était réservé aux hommes. Le portage des femmes durait en moyenne une journée alors que celui des hommes dépendait de l'importance de l'opération militaire. Les porteurs n'étaient pas rémunérés, mais étaient trop effrayés pour refuser d'aller faire le portage requis. Advenant un refus injustifié, les militaires les menaçaient de les relocaliser ou de brûler leur village. En outre, elle a dû organiser à trois reprises, pendant trois ans, une fois par année, la construction de deux camps militaires qui se trouvaient à proximité de son village (trois miles). Les villageois devaient aussi fournir le matériel nécessaire (notamment le bois) pour lequel ils ne recevaient aucune compensation. Ils n'étaient pas rémunérés. Elle a dû organiser la collecte de nourriture pour les militaires. A deux reprises pendant le mois, les villageois devaient fournir porcs, poulets et légumes aux militaires qui payaient un prix au moins deux fois inférieur à celui du marché (70 kyats le vis par rapport à 150 kyats). Enfin, à la demande des militaires, elle a dû convaincre les membres du KNU qui habitaient dans son village lorsqu'elle était chef de section de quitter cette organisation. Elle ne l'a pas fait de son plein gré, mais a été expressément requise par les militaires de ce faire.
  2966. 163
  2967. Ethnie: Karenni
  2968. Age/sexe: 37 ans, masculin
  2969. Situation familiale: Marié avec deux enfants
  2970. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Klaw Ka Hti, Hlaingbwe, Etat Kayin
  2971. Le témoin a quitté le Myanmar au début de 1997. Les villageois devaient exécuter du portage pour les militaires et du travail forcé tel que l'envoi de messages, la coupe du bois, la construction de routes et le déminage. Le travail était organisé par les chefs de village conformément à une rotation. Une personne par famille devait l'effectuer. Parfois, les militaires venaient directement au village et arrêtaient les gens dont ils avaient besoin pour le portage. Il a vu des gens être battus, y compris son oncle qui fut battu jusqu'à ce qu'il tombe inconscient. Il a également vu des porteurs se faire ligoter pour ne pas qu'ils puissent s'échapper. Sa plus grande expérience avec le travail forcé est survenue lorsqu'il vivait avec la famille de sa femme juste avant son mariage, en 1996 et 1997 avant son départ pour la Thaïlande. Les gens de tous les villages de la région étaient contraints de participer à des opérations de coupe de bois. Ils n'étaient pas rémunérés pour le travail et devaient apporter leur propre nourriture. Les billots étaient coupés et transportés près de Paw Po Hta. Les billots étaient alors coupés en morceaux. Il a dû transporter ces billots une fois qu'ils étaient coupés. Les ordre indiquaient combien de travailleurs étaient requis pour ce type de travail. Lorsque les villageois ne respectaient pas les ordres, on leur disait que leur village allait souffrir. Une des punitions était que les militaires venaient au village, cherchaient dans les maisons et tentaient de trouver des activités illicites ou de fausses preuves, telles que des munitions. Ils revenaient plus tard et accusaient ces personnes d'activités rebelles. Ils volaient par la suite tous leurs biens et exigeaient le paiement d'amendes. Les militaires surveillaient de près les travailleurs pendant le travail forcé. Il n'y avait aucun problème lorsque ceux-ci exécutaient le travail. Ils étaient battus s'ils se plaignaient. Son oncle et son cousin furent battus de cette façon. Son oncle fut d'ailleurs battu et est tombé dans le coma et fut laissé sur le sol. Personne ne pouvait l'aider sinon ils étaient eux-mêmes battus. A une occasion, les militaires lui ont tiré dessus et un autre de ses amis fut également blessé alors qu'il retournait à sa village afin d'aller chercher de la nourriture. Ceci s'est passé lorsque la région subissait des combats entre les forces gouvernementales et celles du KNU. Ces combats eurent lieu quatre à cinq ans en arrière lorsque le SLORC a pris le contrôle de la région. Les villageois qui se rendaient à la frontière thaïlandaise étaient accusés à leur retour d'être des rebelles même si ils étaient partis que pour obtenir un traitement médical. Le travail forcé était requis dans chaque famille pour une personne une à deux fois par mois. La durée du travail dépendait de ce qu'il y avait à accomplir mais pouvait durer de deux à trois jours à chaque fois. Au total, les ordres exigeant d'exécuter ce travail étaient reçus trois à quatre fois par mois de façon rotative. Les villageois étaient également requis d'effectuer du portage pour les militaires. Ceci comprenait le transport de marchandises et le service de messager. Ils devaient également monter la garde près des routes lorsque des convois militaires transportant de l'équipement passaient par là. Il n'a pas eu à exécuter du portage lui-même parce qu'il était nouveau dans le village. Son beau-frère a dû effectuer du portage à plusieurs reprises, y compris il y a deux ans. A cette époque, il a reçu qu'un seul repas pendant deux jours. Il s'est enfui après deux jours. Les militaires arrêtaient et emmenaient avec eux autant de porteurs qu'ils pouvaient attraper, bien que parfois ils s'adressaient directement au chef du village. Les villageois (y compris les femmes) étaient requis de nettoyer les routes et de déminer. Ils utilisaient des balais et des bâtons. Il n'a vu personne être blessé par des explosions de mines de cette façon. Le travail forcé était également requis pour la construction de routes sur la route de Klaw Ka Hti jusqu'à Paw Maw Hta. Toutefois, il n'a pas eu à effectuer ce genre de travail durant les deux dernières années.
  2972. 164
  2973. Ethnie: Pa-o
  2974. Age/sexe: 30 ans, masculin
  2975. Situation familiale: Une femme et cinq enfants
  2976. Activité professionnelle: Agriculteur
  2977. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Ti Lone, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 1 000 familles)
  2978. Le témoin est revenu dans son village au milieu de 1997 pour six mois après avoir séjourné en Thaïlande depuis 1988. Il a dû exécuter du travail forcé et du portage à plusieurs reprises avant 1988, mais pas durant sa récente visite puisqu'il ne s'est pas enregistré avec les autorités. De ce qu'il a pu voir, il n'y avait pas beaucoup de travail forcé à part du portage. Les militaires venaient et amenaient avec eux des porteurs de temps en temps, ce qui fait que les villageois devaient se cacher à ces occasions. Le portage était toujours effectué sur une base rotative. Avant 1988, il a fait du portage pour l'armée en effectuant ce qui devait être fait (habituellement transporter du riz et des marchandises). Il y est allé à une reprise en 1987 pendant sept jours. Ils ont voyagé à pied toute la journée et dormaient le long de la route. Les militaires les insultaient et les battaient s'ils avaient des problèmes pour transporter leur charge. L'année dernière, lorsqu'il est retourné dans son village, il a dû payer à une occasion pour ne pas avoir à faire du portage. La situation était très mauvaise durant les six mois qu'il a passés là-bas. Il avait du travail mais ne pouvait toujours pas obtenir assez de nourriture puisque la moitié de ce qu'il gagnait devait être donnée aux militaires comme charge de porteur. Le village était divisé en sections aux fins de déterminer les tâches de portage. Un certain nombre était appelé dans chaque section pour travailler pour les militaires. Il a dû payer afin d'éviter cela puisqu'il n'était pas enregistré et devait contribuer tout de même aux taxes de porteur payées par la famille où il vivait.
  2979. 165
  2980. Ethnie: Musulman
  2981. Age/sexe: 43 ans, masculin
  2982. Situation familiale: Marié avec sept enfants
  2983. Activité professionnelle: Agriculteur
  2984. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Nabu, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait de 300 à 400 familles)
  2985. Le témoin est arrivé en Thaïlande en mai 1997. Il a quitté parce qu'il ne pouvait plus tolérer les troubles et l'oppression du SLORC. Son village fut relocalisé en décembre 1996. Il a dû exécuter plusieurs types de travail forcé ainsi que du portage sur une base continue, particulièrement en 1996 lorsqu'un camp militaire fut construit près de son village. En août 1996, il a vu une femme qui travaillait sur la route être battue à mort parce qu'elle ne pouvait plus travailler. Dans les six mois avant la relocalisation, vingt-huit à trente et un jours par mois devaient être passés à faire du portage ou du travail forcé. En juin 1996, il a dû travailler sur la construction de routes de Nabu à Kyondo. Ce travail était exécuté par les villageois de façon rotative durant l'année. De plus, un nouveau camp fut construit en 1996 avant la relocalisation du village. Un troisième type de travail forcé était le portage. Tous ces types de travaux forcés se faisaient de façon continuelle les uns après les autres. Le village n'a reçu l'ordre de se relocaliser qu'une fois tous ces travaux forcés exécutés. Pendant six mois, ils ont exécuté trois types de travail forcé: construction de routes, travail dans le camp militaire et portage, les uns après les autres sans période de repos ou la possibilité de travailler à leurs propres affaires. Il y avait tout au plus une journée de repos de temps en temps. Les gens mouraient de fatigue ou de malnutrition. Tous les adultes devaient y aller et pas seulement une personne par maison: les femmes et les enfants âgés de 13 ans devaient y aller également. Ils l'ont même placé avec des femmes pour exécuter du travail. Les ordres pour ce travail venaient du chef du village. Mais lorsqu'ils avaient des problèmes pour trouver suffisamment de gens, les militaires venaient directement dans le village et arrêtaient les gens. En ce qui concerne les routes, environ 200 à 300 personnes à la fois de plusieurs villages travaillaient sur la route pendant quinze jours. Ils pouvaient retourner au village pour la nuit. Le travail de groupe se terminait uniquement lorsque la tâche était terminée. On leur disait ce qui devait être fait et le laps de temps octroyé pour ce faire. Le travail sur la route impliquait creuser la terre et la construction de remblais, en plus de couper des arbres et casser des pierres. Il a dû lui-même aller à quatre occasions différentes pendant quinze jours à chaque fois durant six mois avant la relocalisation. Il y a eu six mois de travaux continus sur cette route avant la relocalisation qui fut exécutée par les gens de son village. Lorsqu'il est revenu de ce travail, il y avait du portage à exécuter pour le camp militaire. En ce qui concerne le travail dans le camp militaire, il y avait trois groupes distincts: les bataillons d'infanterie 541, 548 et 549. Ils ont dû construire trois camps près du village de Nabu. Ces camps furent construits sur les terres mêmes des villageois que les militaires se sont appropriées à cette fin. Les villageois ont dû nettoyer le terrain, détruire les maisons et construire les camps. Ils ont coupé des arbres et ont dû les transporter sur le site. La construction de ces trois camps a duré une année. Les bâtiments étaient construits en ciment et également en bois. Ceci était également fait sur une base rotative pendant quinze jours. Lorsque les bâtiments furent terminés, d'autres types de travaux ont dû être exécutés dans le camp. Cela n'avait jamais de fin. La situation était tellement mauvaise que, lorsque la relocalisation est arrivée, ce fut presque un soulagement parce que les villageois avaient la chance de s'échapper. Les femmes et les enfants étaient également impliqués dans le travail au camp militaire. Les militaires insultaient les Musulmans et les battaient s'ils travaillaient trop lentement. Il a également fait du portage en trois occasions pendant dix jours en 1996. Il a dû faire du portage vers les montagnes Dawna dans l'Etat Kayin à de très hautes altitudes. Parfois, les militaires obligeaient les porteurs à travailler toute la nuit sans repos. En ce qui concerne le portage, la moitié du temps les ordres émanaient du chef du village, et l'autre moitié du temps les militaires venaient directement dans le village et arrêtaient tous les gens qu'ils trouvaient. Il fut arrêté à trois occasions: il s'est échappé deux fois et a dû terminer le portage la troisième fois. Les deux premières fois qu'il a fait du portage, il s'est échappé. Sa charge comprenait du riz et des munitions et pesait environ 33 kilos. Les militaires insultaient et battaient les travailleurs et les traitaient comme des animaux. Ils leur tiraient dessus si ceux-ci essayaient de s'enfuir. La violence était la même lors du portage que pendant le travail forcé bien que le traitement qu'il recevait pendant le portage était encore pire puisqu'il n'obtenait ni nourriture ni repos. Parfois, les porteurs étaient affamés et ne recevaient qu'un peu de soupe au riz. Au contraire, les travailleurs pouvaient apporter leur propre nourriture sur les sites de travail forcé. Tout ce que les porteurs recevaient était deux repas le matin et le soir: un total d'une portion de riz au lait condensé sans sel ni curry. Ils ramassaient des feuilles dans la forêt afin de les manger avec le riz et travaillaient toute la journée sans repos. Ils travaillaient même parfois durant la nuit. Si quelqu'un tombait malade, il n'y avait pas de traitement médical. Lorsque les porteurs étaient trop malades pour continuer, ils étaient abandonnés le long de la route. Il n'a jamais vu un porteur se faire tuer par les militaires bien qu'il ait entendu que cela arrivait parfois. Habituellement, il n'y avait pas de femmes porteurs. Le garçon le plus jeune comme porteur avait environ 13 ans. Les hommes devaient effectuer du portage jusqu'à l'âge de 70 ans. A l'occasion, les femmes étaient requises comme porteurs lorsque les militaires ne pouvaient trouver assez d'hommes. Il n'a pas été témoin de cas de violences sexuelles sur les femmes. Il y avait toutefois d'autres formes de violences physiques. Pendant le travail dans le camp militaire, les villageois devaient fournir leur propre nourriture en même temps que ce que tous les militaires avaient besoin, y compris de la nourriture pour eux-mêmes. Lorsque les villageois ne faisaient pas ce que les militaires demandaient, ils encouraient des problèmes. Lorsqu'ils ne pouvaient fournir des animaux, ils devaient donner de l'argent. Le village fut relocalisé en décembre 1996. Lorsque ceci est arrivé, il est parti dans un autre village karen et est resté là-bas jusqu'au moment où il a pu s'échapper pour la Thaïlande. Entre janvier et mai 1997, il s'est caché dans différents villages afin de ne pas avoir à exécuter le travail forcé. Il ajoute que tout le monde était requis pour faire du travail forcé et non seulement les Musulmans. Mais les mauvais traitements qu'on infligeait aux Musulmans étaient pires que ceux infligés aux Karens. En septembre 1997, il a appris que la mosquée de Nabu avait été détruite par les militaires et ceux-ci vivaient à cet endroit depuis la relocalisation. Au moment de la relocalisation, un autre site fut choisi pour que les villageois aillent s'y installer. Mais il n'y avait pas d'eau dans cette région, ce qui fait que personne n'y est allée. Les villageois savaient qu'ils ne pouvaient survivre là-bas. "Il n'y avait aucune compassion pour nous."
  2986. 166
  2987. Ethnie: Karenni 166
  2988. Age/sexe: 34 ans, féminin
  2989. Situation familiale: Huit (elle, son mari et six enfants)
  2990. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Meh The, Hpa-an, Etat Kayin
  2991. Le témoin a livré son témoignage en présence du témoin 167. Elle est en Thaïlande depuis deux mois (depuis le début de 1998). Elle et le témoin 167 sont arrivés ensemble. Elle a travaillé comme chef de village avec une autre femme. Elles recevaient toutes les deux les ordres écrits concernant plusieurs types de travail forcé et de portage, y compris des ordres répétés assortis de menace. En plus du travail forcé, le village devait fournir deux tiers de toute la nourriture ainsi que de l'argent aux militaires sous forme d'impôts. Il était donc impossible de survivre au village. La population se dispersait dans d'autres villes ou en Thaïlande. Les gens ne pouvaient plus supporter le travail forcé et n'avaient pas assez de nourriture pour survivre puisqu'ils devaient donner celle-ci au gouvernement. On leur permettait de conserver seulement qu'un tiers de leur nourriture, ce qui n'était pas suffisant pour survivre. En ce qui concerne ses fonctions en tant que chef de village, elle a été choisie conjointement avec une autre femme puisqu'aucun homme n'osait faire ce travail. Les hommes savaient qu'ils seraient battus ou tués. C'était un peu plus facile pour les femmes. Ainsi, les femmes effectuaient ce travail en rotation et maintenant c'était son tour. Deux femmes servaient en même temps pendant quinze jours parmi celles qui pouvaient réussir ce travail. On utilisait deux femmes à la fois parce qu'une seule n'osait pas faire face aux militaires. La garnison n'était pas près du village, ce qui implique qu'un long voyage devait être effectué. Les femmes craignaient les militaires ainsi que les longs voyages si elles devaient y aller seules. Elle a été chef de village à trois reprises et a dû organiser les tâches de travail forcé. Elle devait également fournir de la nourriture lorsque les soldats l'exigeaient. Les ordres écrits concernant les tâches étaient envoyés par messager. Parfois, elle devait elle-même aller à la rencontre des militaires dans le camp. Le nombre de travailleurs requis était indiqué dans les ordres. A d'autres occasions, les porteurs étaient arrêtés directement. Des tâches de surveillance pendant trois jours étaient continuelles et effectuées en rotation. Le travail dans le camp consistait à couper du bambou et poser des clôtures. Les porteurs étaient utilisés sur une base régulière de cinq jours à la fois en rotation. Elle a elle-même effectué du portage à plusieurs reprises, habituellement pour un ou deux jours, mais sur des courtes distances. Son mari et les autres hommes du village l'ont effectué pendant des périodes plus longues. Elle faisait du portage lorsqu'elle n'était pas chef de village. On demandait également des porteurs d'urgence lorsque les militaires devaient se rendre de village en village. Les nouveaux porteurs étaient choisis par les troupes à l'avance. Les femmes étaient remplacées les premières, puis les enfants et les hommes âgés, qui étaient également utilisés comme porteurs. Quiconque était capable de transporter un sac à dos militaire pouvait être utilisé comme porteur. Les plus jeunes avaient 13 ou 14 ans. Elle a transporté des munitions: six obus d'environ 25 kg. Lorsque les ordres n'étaient pas suivis concernant le nombre requis de travailleurs, le village recevait une amende consistant en un certain nombre de bouteilles d'alcool ou un certain nombre de poulets. Un deuxième ordre était habituellement envoyé, mais cette fois il contenait une cartouche, un morceau de piment et un morceau de charbon comme avertissement. La cartouche signifiait que la personne allait être tuée. Le charbon signifiait que le village allait être brûlé. Elle ne savait pas ce que représentait le piment mais savait que cela n'augurait rien de bon. Elle avait reçu ce type d'avertissement à deux reprises. La première fois fut parce qu'un nombre insuffisant de porteurs avaient été envoyés. La seconde fois, parce que le travail n'avait pas été fait de façon adéquate. La première fois, l'avertissement était écrit en encre rouge et était accompagné d'une cartouche et d'un morceau de charbon. La seconde fois, il y avait une cartouche, un morceau de charbon et du piment. Il n'y a jamais eu de sanction contre son village alors qu'elle était chef du village. Mais d'autres chefs de village ont été enfermés dans le camp militaire et leurs jambes coincées dans un carcan pendant une journée ou deux. Le village devait payer une rançon en poulets ou en porcs afin de les faire libérer. A une occasion, le camp militaire a tiré un obus sur le village et a blessé une personne parce que ceux-ci croyaient que le village abritaient des membres du KULA. Lorsqu'un villageois ne pouvait aller faire du portage, il devait payer 500 kyats aux militaires afin d'engager un remplaçant. A cause du travail forcé considérable et de nombreux paiements, les villageois ne pouvaient plus survivre. Plusieurs ont quitté pour les collines et d'autres devraient suivre. Puisque le village était petit, les gens devaient exécuter du travail forcé à maintes reprises. Le village devait fournir 20 personnes à la fois, ce qui implique qu'environ chaque jour plus de gens devaient être envoyés. Les gens passaient une journée à effectuer du travail et obtenaient une journée de congé. Habituellement, pour chaque famille, une personne allait faire le travail forcé et les autres travaillaient sur la ferme. Mais les villageois devaient également donner les deux tiers de leur nourriture et de leur argent aux militaires, ce qui fait qu'il ne leur restait presque plus rien pour eux.
  2992. 167
  2993. Ethnie: Karenni
  2994. Age/sexe: 18 ans, féminin
  2995. Situation familiale: Mariée avec un enfant
  2996. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Meh The, Hpa-an, Etat Kayin
  2997. Le témoin a livré son témoignage en présence du témoin 166. Elle n'a pas eu à faire du travail forcé elle-même parce qu'elle n'a pas osé. Son mari est toujours allé à sa place. Il a fait du portage et du travail forcé et a coupé du bambou pour les militaires. Il a exécuté du travail forcé de cinq à huit jours par mois. A une occasion, il en a fait pendant un mois entier. Il fut battu à une occasion parce qu'il avait de la diarrhée ou de la dysenterie et devait se rendre aux toilettes fréquemment. Son mari n'a pas eu à travailler à la construction de routes, mais d'autres gens de son village ont dû y travailler. Sa mère et son père ont également exécuté du travail forcé pour sa famille lorsqu'elle vivait avec eux. Son mari a fait du portage à six reprises entre l'âge de 16 et 18 ans.
  2998. 168
  2999. Ethnie: Karenni
  3000. Age/sexe: 48 ans, masculin
  3001. Situation familiale: Veuf avec quatre enfants
  3002. Activité professionnelle: Cultivateur
  3003. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tee Pa Doh Hta, Bilin, Etat Mon (le village comptait 217 familles)
  3004. Le témoin est venu en Thaïlande en août-septembre 1997 parce que l'armée rendait la vie insécure et difficile dans son village. Lorsque les militaires rencontraient des villageois à la campagne et qu'ils pensaient que ceux-ci allaient s'enfuir, ils les attachaient et menaçaient de les tuer. Afin d'aller travailler dans leurs champs, les villageois devaient obtenir un laisser-passer pour un nombre spécifique de jours; si les militaires avaient des soupçons concernant un villageois, même lorsque celui-ci détenait un laisser-passer, ils pouvaient faire tout ce qu'ils voulaient de lui. Il a effectué du travail forcé à partir de 1983, lorsque des opérations militaires ont débuté dans sa région, et jusqu'en 1987, lorsque le travail forcé est devenu une routine journalière. En effet, ce travail lui prenait la moitié de son temps durant toute l'année, y compris durant l'été et l'hiver, la saison sèche et la saison des pluies. Durant la saison des pluies, les charrettes et les voitures ne pouvaient traverser et les villageois devaient transporter les marchandises pour les militaires. Il n'avait plus le temps de travailler à ses propres affaires parce qu'il devait constamment travailler pour les militaires. La pire forme de travail forcé était le portage. La charge assignée était plus lourde que ce qu'un homme pouvait transporter et il devait en plus transporter sa propre nourriture. Habituellement, le portage se faisait durant cinq jours, en rotation, mais, si le remplaçant n'arrivait pas, cela pouvait durer pendant un mois. De plus, lorsqu'un nouveau groupe de militaires arrivaient, quelqu'un pouvait se voir demander de travailler à nouveau, ce qui implique qu'il ne lui restait plus de temps pour gagner sa vie. Il a effectué du portage à plusieurs reprises; au mois deux fois par année pendant plus d'un mois. La période la plus longue fut pendant deux mois et quinze jours lorsqu'il est venu à Tah Kwa Law Soe en 1989, et trois mois et vingt jours à Twi Pah Wee Cho durant l'opération de 1991. Lors de cette offensive, il y avait 400 à 500 porteurs qui venaient de plusieurs villages, certains appelés par le chef du village, d'autres capturés directement par les militaires. Ce nombre comprenait 30 porteurs de son village (217 familles). Il a dû transporter 12 obus qui pesaient 39 kg. La dernière fois qu'il a fait du portage était en août 1997 pendant sept jours. Après cela, il a quitté le village. Son fils le plus âgé a également dû faire du portage environ 20 fois dans les cinq ou six dernières années à partir de l'âge de 20 ans jusqu'à son départ. Mais son fils n'a pas eu à faire du portage aussi souvent que lui, c'est-à-dire seulement sept, huit ou dix jours à la fois. Les porteurs qui ne pouvaient continuer étaient tués par les soldats, lapidés. Durant l'opération de Twi Pah Wee Cho en 1991, il était trop faible et ne pouvait plus transporter sa charge. Ils l'ont donc battu sur la poitrine (il montre des cicatrices) et il saignait. Ils l'ont également battu sur le côté et sur la tête (il montre de nouveau deux cicatrices). Après l'avoir presque tué, les militaires l'ont renvoyé à Meh Myeh (camp militaire). Durant la même opération, il a vu des militaires tuer deux porteurs qui étaient trop faibles pour continuer. L'un d'eux est mort après avoir été frappé à l'estomac et l'autre fut tué avec une pierre. Les porteurs n'étaient pas rémunérés durant l'opération, mais ils recevaient de la nourriture en petite quantité. De plus, l'été dernier, lui et d'autres villageois ont dû construire un camp militaire, creuser des tranchées et ériger des abris. Ils ont également dû couper des tiges de bambou et poser des clôtures autour du village et du camp. Par la suite, pour le camp militaire, des mines et des trappes en bambou ont été installées entre les clôtures. Ils ont été contraints de faire ce travail forcé non seulement pour leur village, mais également pour deux petits villages où ils devaient apporter leur propre nourriture. Le travail était difficile et pas tellement différent du portage. Les travailleurs devaient travailler de 8 heures le matin à 17 heures; lorsqu'ils travaillaient dans d'autres villages, ils devaient rester là-bas pendant quelques jours. Il a personnellement dû travailler sur les clôtures trois fois par année, mais jamais moins de vingt jours à la fois (parfois, pendant un mois). Lorsqu'il terminait à un endroit, il était envoyé ailleurs si on avait encore besoin de lui. Chaque famille devait fournir une personne pour ce type de travail, faute de quoi il devait donner 1,6 kg de poulet et 100 kyats par jour. Si ce travail durait quatre jours, la personne devait donner l'équivalent de quatre fois 1,6 kg de poulet en plus de 1 000 kyats: la compensation était proportionnelle au nombre de jours d'absence dans le cas des poulets uniquement. Par contre, en ce qui concerne l'argent, les montants exigés étaient excessifs. Si quelqu'un ne pouvait donner du poulet, il devait payer 250 kyats pour chaque poulet qu'il ne pouvait donner. Il a dû donner ce type de compensation à deux ou trois reprises, y compris à une occasion lorsqu'il restait à la maison parce que sa plus jeune soeur était malade. De plus, d'octobre à juin, chaque famille a dû fournir quelqu'un pendant vingt-quatre heures, trois fois par mois, afin de surveiller et nettoyer la route. Pour sa famille, on envoyait généralement son frère plus jeune à partir de l'âge de 10 ans pour effectuer ce travail. Il refusait de laisser son fils plus âgé y aller parce qu'à chaque fois que les militaires voyait quelqu'un de 15 à 16 ans ceux-ci décidaient de l'utiliser comme porteur bien qu'il soit en train d'effectuer une tâche de surveillance. Durant la surveillance, son fils ne pouvait dormir la nuit et devait nettoyer la route ainsi que déminer deux fois par jour. Ce travail était dangereux. Une fois, en 1995, une mine a explosé et une personne qui effectuait une tâche de surveillance a perdu une jambe et est morte par la suite sans traitement. Parfois, lorsque les militaires étaient en embuscade, si quelqu'un tirait sur eux, ils punissaient la personne qui devait surveiller. Lorsqu'une voiture était endommagée ou que des militaires étaient blessés, tout le village devait payer pour le dommage causé. A une occasion, tous les neuf villages se situant près de la route de Yoh Kla jusqu'à Kyo Wine, près de 940 familles, ont dû payer 500 kyats par famille en réparation d'une voiture endommagée.
  3005. 169
  3006. Ethnie: Musulman
  3007. Age/sexe: 30 ans, masculin
  3008. Situation familiale: Marié avec trois enfants
  3009. Activité professionnelle: Pasteur musulman
  3010. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mon Naing, Hlaingbwe, Etat Kayin (il a déménagé à Pata en février 1997)
  3011. Le témoin est venu en Thaïlande en septembre 1997 parce qu'il avait dû effectuer du travail forcé ou payer des sommes d'argent qui dépassaient ce qu'il pouvait payer avec son salaire de pasteur de 1 000 kyats par mois. Après être revenu d'un portage d'urgence en février 1997, il a déménagé dans un autre village, à Pata, où la situation n'était pas aussi mauvaise qu'à Mon Naing. Mais la situation là-bas s'est de nouveau détériorée après quelques mois, et il a décidé de quitter le pays avec sa famille. Plus précisément, il a dû effectuer du travail forcé de 1992 à 1997 sous différentes formes: portage, y compris portage d'urgence, travail divers, tâches de surveillance. Afin d'éviter le portage, le témoin devait payer une taxe de porteur. Lorsqu'il trouvait un ami qui pouvait le remplacer, il le payait 80 kyats par jour. Lorsqu'il ne pouvait trouver personne, il devait payer 200 kyats par jour aux autorités. Comme il était pasteur, ses proches ont effectué le portage régulièrement pour lui. En ce qui concerne le portage d'urgence, il fut capturé par les soldats le 30 janvier 1997 et a dû l'effectuer jusqu'au 27 février lorsqu'un porteur de son village ainsi que des membres de sa famille ont payé 2 000 kyats afin de le faire relâcher. Les militaires capturaient n'importe qui et décidaient qu'il y avait du portage d'urgence. Il fut capturé près de sa mosquée par le sergent major Ngwe Zan du bataillon 28 (bataillon de Thura Po Sein, commandant de compagnie Aung Moe). Il a dû transporter une charge d'environ 32 kg de petites cartouches, de riz et de fèves depuis son village en traversant une montagne de 5 000 pieds. Les femmes devaient transporter plus de 16 kg. Il était dans un groupe de 400 à 500 porteurs, comprenant 180 femmes provenant de quatre villages qui devaient transporter des marchandises sur la ligne de front. Lorsque les militaires l'ont arrêté, les mains des hommes étaient attachées et ils restaient ainsi même pour dormir ou pour aller aux toilettes. Ils étaient nourris seulement avec une portion de riz au lait pour huit personnes. Il a vu 16 porteurs être battus à mort. Certains furent battus à mort parce qu'ils ne pouvaient plus transporter leurs charges et s'étaient reposés. Un autre fut tué après avoir bu de l'eau de la rivière. Une autre personne se sentant étourdie, s'est assise un moment et a été battue à mort. Un de ses amis, Soba, un musulman de Kawkareik, fut également battu à mort. Il a également vu d'autres personnes qui ne pouvaient plus transporter leur charge être battues. Elles n'ont pas toutefois succombé à leurs blessures. Habituellement, les militaires battaient les gens lorsque ceux-ci étaient fatigués. Il a lui-même été battu en raison du seul fait qu'il avait regardé dans une autre direction. Les femmes étaient placées entre les militaires et certaines d'entre elles furent violées, y compris cinq femmes musulmanes de son village qui lui ont raconté cet incident le jour suivant. Elles devaient dormir parmi les militaires. Ceci se passait presque toutes les nuits pour toutes les femmes, y compris les musulmanes, les karens ou quiconque se trouvait là. Dans son village, tout le monde a dû effectuer du portage et a été battu ou blessé. Trois furent blessés, incluant son cousin qui a eu une jambe arrachée après avoir marché sur une mine alors qu'il exécutait du portage. Deux villageois ont eu des côtes brisées et deux autres la clavicule cassée alors qu'ils exécutaient du portage et qu'ils se sont fait battre pendant qu'ils se reposaient. Lui-même a eu des problèmes avec son dos à la suite du transport de charges très lourdes, en février 1997. A cette époque, il a dû, avec un autre porteur, transporter un soldat blessé. En 1983-84, son frère plus âgé et son beau-frère ont été tués alors qu'ils effectuaient du portage. Lorsque les corps ont été ramenés après plus de seize jours, son frère avait la gorge tranchée et son beau-frère avait des blessures de baïonnette dans la poitrine. Les porteurs qui les ont ramenés lui ont dit que les militaires les avaient tués. De plus, trois fois par mois, son village (où il ne restait que 80 familles) devait fournir dix personnes pour effectuer des tâches de surveillance qui duraient toute la journée et la nuit pendant cinq jours de suite. On pouvait trouver un remplaçant si l'on payait 30 à 50 kyats par jour ou 70 kyats par jour payés directement aux autorités. Il a lui-même effectué des tâches de surveillance ou a envoyé sa femme, bien que celle-ci avait un bébé de six mois qu'elle devait emmener avec elle. Parfois, sa mère, elle-même, est allée. Lorsqu'il effectuait des tâches de surveillance, il devait apporter des billots avec une charrette pour s'assurer qu'il n'y avait pas de mines sur la route. Finalement, en ce qui concerne le travail volontaire, il devait payer un montant de 200 kyats par jour aux autorités; tout comme le portage, si quelqu'un n'y allait pas, il pouvait envoyer un remplaçant. La différence était que la durée était fixée d'avance et, lorsque le tour de quelqu'un venait, ceux-ci partaient pendant quinze jours. Tandis que pour le portage, lorsque le tour de quelqu'un venait, tout dépendait de la durée pendant laquelle les militaires auraient besoin de porteurs. Lorsque son tour venait pour le travail "volontaire", les membres de sa famille et de sa communauté le remplaçait, tout comme ils le faisaient pour le portage régulier.
  3012. 170
  3013. Ethnie: Karenni
  3014. Age/sexe: 26 ans, masculin
  3015. Situation familiale: Marié
  3016. Education: Troisième année de collège
  3017. Activité professionnelle: Soldat (grade de sergent dans un bataillon d'infanterie)
  3018. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Insein, division de Yangon
  3019. Le témoin a joint l'armé en 1995 parce qu'il devait gagner sa vie et n'avait pas d'autres choix. Il a déserté et est venu en Thaïlande en août 1997 parce que, en tant que Karen, il ne pouvait plus voir les gens de son peuple être contraints d'effectuer du travail forcé et être opprimés par le gouvernement. En étant dans l'armée, il pouvait protéger les membres de sa famille mais pas les autres personnes. Il y avait donc de la discrimination même dans l'armée entre les Karens et les Birmans. En ce qui concernait l'entraînement des officiers, les étudiants birmans étaient choisis tandis que les Karens devaient payer beaucoup pour pouvoir y avoir droit. Alors qu'il était dans l'armée, il a vu des gens faire du travail forcé à trois ou quatre reprises lorsqu'il était à Lashio, et même à Yangon, et également à Hpa-an, Manerplaw et Kawkareik. Les différents types de travail forcé comprenaient le portage, le déminage, la construction de routes et de ponts. Lorsque le témoin a servi à Lashio, son bataillon (numéro donné à la commission) a dû fournir des civils pour le portage et le travail sur les routes. D'autres bataillons les informaient de leurs besoins en main-d'oeuvre. Certains bataillons devaient recruter le plus de personnes possible et son bataillon devait fournir le transport pour ces troupes. Depuis Lashio, il a été témoin de trois groupes de 170, 80 et 90 personnes, respectivement, qui ont été envoyées à Kunlon et Kurkai, sur la frontière chinoise et dans le Nord de l'Etat Shan afin de transporter des munitions et des marchandises pour les militaires. Ceux qui ne pouvaient pas continuer devaient construire des routes. Certains devaient y aller pour une semaine et d'autres pour un mois. Certains ont été tués alors qu'ils tentaient de s'échapper. A Kutkai, lorsqu'un glissement de terrain a arrêté le mouvement des troupes, il y avait des bulldozers disponibles mais les officiers ne les ont pas utilisés puisqu'ils voulaient vendre le carburant sur le marché noir. Ils ont plutôt utilisé des personnes afin de nettoyer la route. Une personne est tombée dans la rivière et est morte. Même à Yangon, il a vu du travail forcé depuis son tout jeune âge, et ceci se poursuit toujours aujourd'hui. Il a vu des gens contraints de niveler les routes pour la construction d'un camp militaire; certains furent mordus par des serpents et ne reçurent aucune indemnisation. Les militaires capturaient trois, voire quatre, camions pleins de personnes. Il a été témoin de tout cela. Une journée où il était en congé, il est retourné chez lui en uniforme et a appris que son ami (nom donné à la commission) avait été capturé par les militaires alors qu'il buvait du thé dans une maison de thé. Il connaissait le chauffeur et a trouvé son ami en prison mais a réussi à le faire libérer en convainquant les officiers qu'il s'agissait de son propre frère. Les gens qui étaient capturés de cette façon devaient travailler pour des périodes de trois à quatre mois et n'étaient pas rémunérées. De plus, des provisions avaient été faites dans le budget du département responsable pour fournir de la nourriture aux porteurs, mais les officiers ne leur donnaient que la moitié de ce dont ils avaient droit et gardaient le reste pour eux-mêmes. Les gens capturés étaient utilisés pour la construction du pont Than Lwin à Yangon, alors que d'autres étaient amenés dans des villes ou même sur la ligne de front. En ce qui concerne ses amis, ils ont généralement réussi à payer pour s'échapper. A chaque deux ou trois mois, les autorités venaient pour collecter 300 kyats de taxes de porteurs imposées à chaque famille dans les régions centrales de Yangon, y compris Insein, Kaway Chaung, Thamine, Kyutgon, qui étaient toutes des quartiers résidentiels de Karens. Mais, en principe, 300 kyats étaient suffisants pour éviter le portage. Par contre, lorsque quelqu'un était capturé pour le portage, les parents devaient payer entre 4 000 et 5 000 kyats pour le libérer. Dans la ville de Hpa-an, juste avant son arrivée en Thaïlande en juin 1997, il a vu des personnes être arrêtées près d'une jetée. Son département a été requis de fournir six camions mais n'a pu en livrer que cinq. Un camion pouvait contenir environ 50 personnes, bien qu'ils en mettaient 80 par camion. Ces gens étaient amenés dans des endroits tels que Nabu, Wawle, Kawkareik, Thingannyinaung. A ces endroits, ils devaient transporter de la nourriture et d'autres marchandises en tant que porteurs pendant deux ou trois mois. Même si elles ne savaient pas où elles se trouvaient, certaines personnes ont tout de même tenté de s'enfuir mais ne sont jamais revenues dans leur village. A Hpa-an, il a vu des militaires battre des porteurs (mais il n'a pas vu cela à Lashio). En juin 1997, le témoin a conduit des porteurs dans un camp militaire près de Manerplaw, où se situait les anciens quartiers généraux du KNU; les porteurs se voyaient remettre des tiges de métal afin de détecter celles-ci. Il restait derrière alors que les hommes qui devaient déminer étaient devant: cinq démineurs devant et cinq personnes derrière. Lorsqu'ils voyaient une mine, ils criaient. Il n'a vu personne se faire blesser bien qu'ils aient trouvé huit ou neuf mines; des experts les ont désamorcées. Dans d'autres groupes, des mines auraient tué plusieurs personnes. Lorsque ses camarades sont rentrés en avril 1997 de Hill 962, un endroit nommé Ta Lay, ils lui ont rapporté que huit porteurs avaient été blessés après avoir marché sur des mines. Ceux qui étaient gravement blessés furent tués par les militaires puisque ces derniers ne voulaient pas leur fournir de traitement médicaux. Il a vu le dossier personnel d'un militaire (nom fourni à la commission) qui a été rétrogradé. Il lui a demandé de lui expliquer les raisons de cet acte. Durant une opération sur la ligne de front, un lieutenant de 25 à 26 ans a groupé les villageois autour du camp et leur a demandé s'ils avaient vu des militaires du KNU. Lorsqu'ils ont répondu "non", le lieutenant a demandé à une femme de 80 ans dans la foule de lui dire la vérité. Il l'a, par la suite, frappée sur le front et lui a demandé, une fois de plus, de dire la vérité. Le caporal a tenté de dissuader le lieutenant qui lui a répondu de s'occuper de ses affaires. Il a continué de frapper la vieille dame bien qu'elle gisait sur le sol. Lorsque le caporal l'a imploré de cesser, le lieutenant l'a sommé de se battre et, puisque le caporal est resté silencieux, il a ramassé la vieille dame et lui a craché au visage. Le caporal savait qu'il ne pouvait arrêter le lieutenant et l'a frappé avec son arme. Ce qui explique que le caporal a été rétrogradé et a été enfermé pendant trois mois. Au camp 1-450 (compagnie 1 du bataillon 450), près de Kawkareik, au début de 1997, des villageois furent requis de couper du bois et de transporter les billots sur un site de construction. Ceci aurait pu être fait avec des bulldozers. Plus de 100 personnes ont été utilisées pour ce travail pendant deux à trois mois. Elles étaient gardées dans un endroit la nuit d'où elles ne pouvaient s'échapper. Finalement, en parallèle à ses tâches dans l'armée, lui et d'autres militaires ont dû planter des arbres et creuser des puits, pour le développement de la discipline militaire. Ceci signifiait qu'ils ont dû travailler des heures supplémentaires la nuit, presque vingt jours par mois. Au lieu de travailler de 8 heures le matin à 16 heures, ils devaient travailler de 6 heures le matin à 3 heures le lendemain matin. Ils ne dormaient que pendant trois ou quatre heures. Ceci arrivait assez régulièrement un peu partout. Par exemple, les officiers plantaient quelque chose, gardaient les deux tiers des profits pour eux-mêmes et un tiers pour acheter des provisions pour l'armée. Lui-même n'a rien reçu.
  3020. 171
  3021. Ethnie: Karenni
  3022. Age/sexe: 46 ans, masculin
  3023. Situation familiale: Marié, trois enfants
  3024. Education: Quatrième année
  3025. Activité professionnelle: Fermier. Il possédait une terre. Son beau-père, qui vit dans un autre village, s'en occupe en cachette.
  3026. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Meh The, Hpa-an, Etat Kayin (Le village comptait une trentaine de maisons mais il a été détruit récemment par les militaires afin d'éviter que les membres de l'Union nationale karenne (Karen Nation Union) (KNU) puissent y trouver refuge.)
  3027. Le témoin a quitté le Myanmar au début de 1998. Il a dû faire du 1) portage, 2) monter la garde à proximité d'une route et 3) construire un camp militaire. Il lui restait en moyenne quinze jours par mois pour vaquer à ses propres occupations. Pour ce qui est du 1) portage, il a dû le faire environ à 70 reprises depuis les vingt-six dernières années. Il a porté pour la première fois à l'âge de 20 ans et, pour la dernière, il y a environ 2 mois. Il est difficile d'estimer un nombre de fois par mois. En fait, les militaires réquisitionnaient les porteurs au gré de leurs besoins. Les ordres des militaires étaient généralement transmis par le chef de village bien que les soldats pouvaient arrêter les porteurs directement. Les ordres étaient par écrit bien qu'il ne les ait pas vus personnellement. Une personne par famille devait faire le travail conformément à une rotation entre quatre familles. Il était impossible de refuser. Toutefois, il était possible d'engager un substitut: 500 kyats par jour pour les voyages d'importance. Il aurait engagé un substitut à une reprise. Il n'aurait jamais osé offrir un pot-de-vin aux militaires afin d'être exempté. Les distances à parcourir pouvaient varier: de quatre à cinq jours jusqu'à un mois. Le portage pouvait être requis tant en saison des pluies qu'au cours de la saison sèche. Les assignations ont dû être exécutées dans les Etats Mon et Kayin. Il devait dormir avec les soldats. A plusieurs reprises, il a dû marcher toute la nuit, sans moment de répit. Les femmes devaient également faire la même chose. Sa femme a dû se rendre au front à une reprise. Lorsqu'il a porté pour la dernière fois, 60 autres porteurs l'accompagnaient, incluant hommes et femmes. Les femmes transportaient la nourriture, les casseroles et les munitions. Les hommes transportaient surtout les munitions. Il a été pris dans des batailles contre le KNU a cinq reprises. Dans ces cas, les porteurs (hommes et femmes) devaient rester près du soldat de manière à lui fournir les munitions. Il n'était pas rémunéré et ne recevait pas toujours la nourriture en portion suffisante. Il lui était parfois servi qu'un seul repas en deux jours. Il devait, avec les autres porteurs, se contenter de boire de l'eau. Lorsque, à bout de force et affamés, les porteurs ne réussissaient plus à porter leur charge, ils étaient battus et frappés. Il n'a jamais personnellement été battu mais a vu plusieurs porteurs l'être. Les porteurs ne recevaient pas de traitements médicaux ou de médicaments en cas de maladie. Il n'a pas été témoin de mauvais traitements infligés aux femmes mais a entendu dire que, dans d'autres villages, certaines auraient été maltraitées ou auraient fait l'objet de sévices sexuels. Il a également 2) dû monter la garde à proximité de la route entre Thaton et Hpa-an (route qui se rendait également au camp militaire). Cette route est à environ trois miles de son village. Il pouvait être requis de ce faire à un ou deux reprises par mois. C'est le chef du village qui organisait le travail exigé par les militaires. Chaque assignation durait trois jours. Cent-cinquante femmes et hommes travaillaient en même temps que lui dont trois de son village sur la section qui leur était assignée. Le travail consistait à défendre la route contre le KNU. Il devait pour ce faire rester jour et nuit sur la route. Il n'était pas rémunéré et devait apporter sa propre nourriture. Il craignait d'être arrêté, battu, voire tué par les militaires s'il refusait d'exécuter le travail. Cette route était en construction. Il a du reste travaillé à sa construction en 1996 avec d'autres villageois et soldats à une reprise pendant trois jours. Sa femme y a travaillé pour sa part à quatre reprises. Cette route est principalement destinée aux militaires. Enfin, il a participé à la construction du camp militaire de Pwo qui est situé à 1 mille et demi de son village à une seule occasion pendant une journée, il y a environ un an et trois mois. Il a dû y monter les tentes, poser les bambous et les clôtures. Le matériel devait être fourni par les villageois qui ne recevaient aucune indemnisation à cet égard. Les villageois se remplaçaient en rotation puisque la construction du camp a duré au total dix jours. Soixante personnes travaillaient en même temps que lui et provenaient de différents villages. Il n'était pas rémunéré et devait apporter sa propre nourriture. Il n'est membre d'aucune organisation politique.
  3028. 172
  3029. Ethnie: Karenni
  3030. Age/sexe: 50 ans, féminin
  3031. Situation familiale: Veuve, deux filles, un fils
  3032. Activité professionnelle: Commerçante. Vend de la nourriture dans le village
  3033. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pway Taw Roo, Hlaingbwe. Etat Kayin (le village comptait 20 familles)
  3034. Elle a quitté le Myanmar au milieu de 1997 puisqu'il ne lui restait pas assez de temps pour vaquer à ses occupations personnelles en raison du travail exigé par les militaires. Depuis la mort de son mari, elle a personnellement dû faire 1) du portage, 2) monter la garde près de la route et 3) participer à la construction d'un camp militaire. Elle n'a pas personnellement fait de travail pour les militaires avant le décès de son époux. Ce sont les chefs de village qui organisaient le travail. Elle n'était pas rémunérée et ne pouvait refuser de travailler par crainte d'être arrêtée. Si le chef de village manquait à sa tâche, les militaires pouvaient les réquisitionner directement. 1) Elle a personnellement dû faire du portage pour les militaires à trois reprises au cours de l'année qui a précédé son départ. Chaque famille devait fournir un membre pour exécuter ce travail. Elle devait transporter des munitions pendant une journée de son village à Painkyone. Une centaine de personnes travaillaient avec elle en même temps, dont une vingtaine de son village, incluant une majorité de femmes. Elle devait apporter sa propre nourriture. Sa soeur s'occupait de ses enfants lors de ses absences. Elle a personnellement fait l'objet de mauvais traitements, ayant été battue et frappée lorsqu'elle était fatiguée. Elle a également vu de nombreuses femmes, la majorité d'âge avancé, battues et maltraitées par les militaires. Elle a vu, à une occasion, une femme sévèrement battue puisque, fatiguée, elle avait déposé son panier afin d'aller à la toilette. 2) Elle a monté la garde près de la route entre son village et Painkyone-Hlaing Bwe-Hpa-an à trois reprises pendant un mois. Les autres fois où elle a été requise par les militaires pour ce genre de travail, elle a engagé un substitut pour lequel elle a dû payer 30 kyats à chaque fois. Chaque assignation durait une journée complète, incluant la nuit. Vingt personnes -- exclusivement des femmes -- devaient travailler en même temps sur une section de route donnée. Deux personnes montaient la garde ensemble, partageant la même tente et couvrant environ 150 à 200 pieds de route. 3) Elle a également participé à deux reprises, il y a deux ans, à la construction d'un camp militaire (camp 709) qui était situé à trois miles de son village. Chaque assignation durait une journée. Elle devait couper le bois et les bambous dans la forêt à proximité du camp, les transporter jusqu'au lieu de construction et participer à l'édification du camp. Cinquante personnes, dont dix femmes, auraient travaillé avec elle à la première occasion et 30, incluant huit femmes, à la seconde. Elle n'aurait pas fait l'objet de mauvais traitements à ces occasions bien que les militaires s'adressaient aux travailleurs en criant. Des chefs de villages féminins ont toutefois fait l'objet de mauvais traitements puisqu'elles n'ont pas réussi à organiser le travail. Elles ont été attachées et exposées au soleil ardent pendant une demi-journée. Elles ont été relâchées vers 14 heures. Elles ont également été menacées à l'aide d'une arme, des coups de feu étant tirés près de leurs oreilles. Son époux a dû faire du travail forcé au moins une dizaine de fois au cours des vingt années qui ont précédé sa mort. Il a notamment dû faire du portage à deux reprises, la première assignation durant deux jours et la seconde cinq.
  3035. 173
  3036. Ethnie: Karenni
  3037. Age/sexe: 40 ans, masculin
  3038. Situation familiale: Marié, deux filles
  3039. Education: Deuxième année
  3040. Activité professionnelle: Cultivateur, possède deux terres près du village
  3041. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Bee T'Ka, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 130 familles)
  3042. Il a quitté le Myanmar au milieu de 1997 puisque les militaires le soupçonnaient de faire partie du KNU. Il voudrait retourner dans son village dans la mesure où la situation change. Il a assumé les fonctions de chef de section durant les mois d'avril et de mai 1997. Le chef de section est choisi par le chef de village qui est lui-même élu par les villageois. A ce titre, il a dû organiser le travail requis par les militaires et par l'Union nationale karenne (KNU) (Karen National Union) (à quatre reprises pour cette dernière organisation). Il a dû organiser le travail suivant pour les militaires: portage, construction de route, monter la garde près d'une route et édification de camp militaire. Il risquait l'imposition d'une amende s'il ne pouvait pas organiser le travail requis. Les personnes sélectionnées risquaient d'être arrêtées si elles refusaient de faire le travail. Pour ce qui est du portage, il a dû organiser les équipes de porteurs à cinq reprises. Il devait trouver le nombre de porteurs requis par les militaires. Chaque famille devait fournir une personne pour exécuter le travail. Il a également organisé le travail pour les militaires pour la construction et la surveillance de routes et la construction d'un camp militaire. Il a organisé le travail, à trois reprises, pour la route entre Hpa-an et Dawlan, chaque assignation durant respectivement cinq jours, deux à trois jours et quatre jours et requérant 117, 107 et 37 travailleurs. Pour ce qui est de la surveillance d'une route, il a dû trouver quatre travailleurs à cinq reprises pour des assignations durant chaque fois trois jours. Pour ce qui est du camp militaire, il a dû organiser le travail à trois reprises, devant recruter respectivement 50, 35 et 70 travailleurs pour des assignations durant une journée. A toutes ces occasions, il a travaillé avec les personnes sélectionnées. Antérieurement à ses fonctions de chef de section, il a dû personnellement être porteur au moins deux fois par mois. Les assignations duraient entre cinq et quinze jours. Le nombre de porteurs dépendait du nombre de soldats. Hommes et femmes étaient recrutés. Tous deux devaient porter des munitions, les hommes ayant toutefois des charges plus lourdes à transporter. Il a dû se rendre au front à trois reprises. Hommes et femmes porteurs devaient rester lors des combats. Il n'a pas vu personnellement de sévices sexuels commis contre les femmes mais on lui aurait raconté que des femmes auraient été violées par des soldats. Une femme, qui travaillait avec lui, lui aurait dit avoir été violée par cinq soldats. Une plainte aurait été présentée au commandant qui aurait condamné cet événement et ordonné que de telles actions ne se reproduisent pas. Toutefois, il semblerait que l'ordre donné n'était pas respecté. A deux occasions lorsqu'il était chef de section, il a accompagné les porteurs. Le portage se faisait dans des régions montagneuses. Il a dû porter entre son village et trois autres situés près du sien (son village se situait près des montagnes. Un camp militaire se trouvait à proximité de sa maison). Cent-dix porteurs travaillaient avec lui, dont 10 de son village pour 250 soldats. Seuls des hommes exécutaient ce type de travail. Il devait transporter des munitions pour les mortiers. Chaque assignation a duré cinq jours. Les porteurs faisaient régulièrement l'objet de mauvais traitements, étant battus et frappés dès qu'ils ne réussissaient pas à suivre le rythme de progression. Il n'était pas rémunéré. Antérieurement à ses fonctions de chef de section, il a dû participer à l'édification de trois camps militaires à dix reprises au cours des années 1996 et 1997: cinq fois pour le camp de Nabu, deux fois pour celui de Naungbo et trois fois pour celui de Taun Zun. Il a dû travailler avec des villageois provenant de différents villages. Ils devaient fournir le matériel nécessaire et n'étaient rémunérés ni pour le matériel fourni ni pour le travail accompli. Il a dû également apporter sa propre nourriture. Il était toujours possible de payer un substitut: pour la construction et la surveillance de la route (500 kyats), pour le portage (1 000-1 200 kyats) et pour le camp militaire (100 kyats). Il n'était pas possible de payer des pots-de-vin pour être exempté. Enfin, son épouse a dû travailler pour les militaires depuis son départ. Il ne sait pas exactement le nombre de fois où elle a dû personnellement faire du portage mais il sait qu'elle est requise de ce faire à deux reprises par mois. Il a dû payer une taxe de riz qui devait être versée aux officiers du gouvernement. Au regard de cette taxe, établie par la loi, il devait verser 4 ou 5 pour cent de ces récoltes en fonction de la qualité des récoltes.
  3043. 174
  3044. Ethnie: Karenni
  3045. Age/sexe: 72 ans, féminin
  3046. Situation familiale: Mariée, quatre filles, deux fils
  3047. Activité professionnelle: Son mari est cultivateur et possède sa propre terre.
  3048. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Painkyone, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait 200 familles)
  3049. Le témoin vit au Myanmar et est arrivé en Thaïlande au début de 1998 pour rendre visite à ses filles. Elle souhaite retourner au Myanmar pour aller chercher toute sa famille afin de s'installer en Thaïlande. Elle estime qu'il est difficile de survivre au Myanmar compte tenu du travail exigé par les militaires. De plus, les militaires auraient torturé sa nièce à l'aide d'une baïonnette puisqu'ils la soupçonnaient de faire partie, d'aider ou coopérer avec l'Union nationale karenne (Karen National Union) (KNU). Elle a personnellement dû travailler pour les militaires en exécutant les tâches suivantes: portage, construction et surveillance de route et édification de camp militaire. Son mari a aussi dû exécuter les mêmes genres de travaux. Elle estime qu'environ 10 jours lui restaient pour vaquer à ses occupations alors que son mari devait consacrer au moins 50 pour cent de son temps pour les travaux exigés par les militaires. Pour ce qui est du portage, elle a dû en faire pour les militaires au moins une vingtaine de fois depuis les vingt-huit dernières années. Les ordres étaient généralement donnés par le chef de village, mais les militaires pouvaient également arrêter les personnes dont ils avaient besoin. Elle a personnellement été réquisitionnée par les militaires directement à cinq occasions. Chaque assignation durait entre un et quatre jours. Elle n'était pas rémunérée et devait apporter sa propre nourriture. Elle s'est rendue au front avec d'autres femmes à une occasion. La dernière fois où elle a été porteur remonte à deux mois avant son départ. A cette occasion, les militaires l'aurait réquisitionnée directement sans passer par l'intermédiaire du chef de village. Bien qu'elle ait fait valoir son âge avancé, ils lui auraient rétorqué qu'elle devait trouver quelqu'un pour la remplacer si elle ne voulait pas faire le travail personnellement. Ne trouvant personne, elle a dès lors dû transporter de la nourriture jusqu'à une montagne près du front, à proximité du camp militaire Lerpu. Elle a dû marcher pendant une journée entière, couvrant environ une quinzaine de miles. Il y avait environ 100 porteurs, principalement des femmes puisque les hommes réussissaient à s'enfuir, pour 50 soldats. Elle n'a pas vu de mauvais traitements infligés aux femmes contrairement aux hommes qui étaient régulièrement et violemment battus et frappés. Elle a entendu parlé d'histoires d'abus sexuels dont des femmes auraient fait l'objet, mais n'en a pas vu ou n'en a pas fait l'objet personnellement. Pour sa part, son époux a dû faire du portage pour les militaires un nombre de fois bien supérieur au sien. Il devait porter dans le cadre d'opérations militaires et pour les besoins de camps militaires. Il a été porteur pour la dernière fois en 1996 dans le cadre d'une opération militaire pour une durée de cinq jours. Les assignations de portage pour opérations militaires pouvaient varier entre cinq jours et un mois. Quelques jours avant son départ, son époux a dû porter du matériel pour un camp militaire pendant une journée. Elle a dû également participer à la construction et à la réfection de la route qui traverse son village (longueur: quatre miles) à quatre occasions, chaque fois pendant une journée. La dernière fois remonte à une journée avant son départ. C'est le chef du village qui l'informait du travail à exécuter. Cinq personnes de son village ont travaillé avec elle. La route, incluant un pont, était utilisée par les militaires et les civils. Elle n'était pas rémunérée. Autant de femmes que d'hommes participaient à ces travaux de construction et de réfection de route. Son mari, pour sa part, y aurait participé plus d'une quarantaine de fois depuis les vingt dernières années, chaque corvée durant une journée. Elle a également dû monter la garde auprès de cette route au moins une vingtaine de fois depuis les six dernières années. Chaque assignation couvrait trois nuits. Elle partageait une tente avec deux autres personnes, une seule devant rester éveillée durant la période de veille. Elle pouvait retourner chez elle pendant la journée. Elle a dû monter la garde près de la route, trois jours avant son départ pour la Thaïlande. Hommes et femmes devaient exécuter ce travail. Elle n'a pas fait l'objet de mauvais traitements ou de harcèlement. Elle a entendu parlé de viols collectifs qui auraient été perpétrés par des militaires. Son époux a également monté la garde au moins à dix occasions par année depuis les six dernières années. Enfin, elle a participé à la construction et à la réfection du camp militaire de Painkyone qui est situé dans son village à environ deux miles de sa résidence. La dernière fois où elle a été requise remonte à trois semaines avant son départ, pour une durée de cinq jours. Elle pouvait retourner le soir chez elle. Elle a travaillé avec 30 autres personnes provenant de son village. Chaque famille devait fournir une personne conformément à une rotation préétablie. Les travailleurs devaient fournir le matériel nécessaire. Ils n'étaient rémunérés ni pour le matériel fourni ni pour les heures de travail accomplies. Il était possible d'engager un substitut bien qu'elle ne l'ait pas fait puisqu'elle n'avait pas l'argent pour le payer. Son époux a également participé aux travaux relatifs à ce camp à de nombreuses occasions. Elle devait verser une taxe sur les récoltes de riz équivalant à 4 pour cent de la récolte, puisque ses terres n'étaient pas particulièrement fertiles. Les taxes étaient payées aux représentants du gouvernement et non aux militaires.
  3050. 175
  3051. Ethnie/religion: Karenni, bouddhiste
  3052. Age/sexe: 36 ans, féminin
  3053. Situation familiale: Mariée avec trois enfants
  3054. Activité professionnelle: Cultivateur
  3055. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Meh The, Hpa-an, Etat Kayin
  3056. Le témoin a quitté le Myanmar pour la Thaïlande au début de janvier 1998 avec toute sa famille lorsque son village de 36 maisons fut relocalisé. L'ordre de relocalisation a été donné à plusieurs reprises, mais les villageois l'ont ignoré et sont restés sur place. Le premier ordre fut donné par les autorités au chef du village avant la récolte à Tazaungmon (autour de novembre), et les gens n'ont pas écouté cet ordre. Les militaires sont donc venus deux fois au village et ont ordonné aux villageois de partir. Les villageois ont quitté mais sont revenus plus tard. La quatrième et dernière fois, le DKPA a tiré des mortiers sur le village et une maison fut brûlée; heureusement, personne n'a été blessé puisque la plupart des gens travaillaient dans les champs. On leur a demandé de se rendre à Htee Nu, où se situait auparavant un monastère. Ce village se trouvait à deux ou trois heures de marche de son propre village. Elle ne sait pas si d'autres personnes sont parties là-bas puisque sa famille et elle ont quitté vers la Thaïlande avec seulement 2 000 kyats; même les vêtements qu'ils portaient au moment de l'entrevue leur ont été donnés par d'autres personnes. En ce qui concerne le travail forcé, il en existait plusieurs types: construction de routes, portage ou construction de camps. Par exemple, elle a dû travailler dans le camp militaire et, dès qu'elle revenait à la maison, on l'appelait pour du portage. Il y avait plusieurs bataillons dans la région. Certains capturaient des gens pour effectuer du portage, d'autres pour d'autres types de travaux. Pendant certains mois, ni son mari ni elle n'avaient un seul jour pour effectuer leur propre travail. Tous les deux étaient réquisitionnés pour des mois entiers et devaient effectuer différents types de travaux, tels que du portage, la construction de routes ou la construction de camps militaires. Durant la saison des pluies, il y avait encore plus de travail forcé que pendant la saison sèche (lorsque les opérations militaires débutaient et qu'ils étaient forcés de quitter leur village). Lorsqu'elle ne voulait pas effectuer le travail forcé, elle devait trouver un remplacement (ce qu'elle n'a jamais fait). Il y a deux ans, le témoin a vu le chef du village, une femme de plus de 60 ans (nom donné à la commission) être battue. On lui avait demandé de dire aux villageois qu'ils devaient effectuer des tâches de messagerie, mais personne ne l'a écoutée. Ainsi, les soldats du gouvernement sont venus dans le village et l'ont battue. Elle a été blessée et porte maintenant une cicatrice. Elle fut attachée toute la nuit, puis battue. Après avoir été relâchée, les militaires lui ont demandé un porc. Le témoin ne connaît pas le nom ou le rang des militaires impliqués. Le commandant de la compagnie était M. Bo Hla Peine. Un peu plus tard, le même chef de village fut réquisitionné pour trouver des travailleurs pour effectuer du travail forcé. Puisqu'elle avait trop peur de se rendre au camp militaire, ils lui ont écrit à trois ou quatre occasions en incluant des cartouches dans la lettre. Lorsqu'elle est finalement allée au camp, elle a été placée dans un trou pour toute la nuit. Le lendemain, elle fut relâchée et les militaires lui ont demandé une vache. Elle ne pouvait pas fournir une vache mais leur a donné un porc. En ce qui concerne la construction de routes, le témoin a travaillé les trois ou quatre dernières années sur la route entre Lay Kay et Ta Paw, qui existe depuis longtemps mais n'a jamais été utilisée. Aujourd'hui, la route est terminée et est utilisée par les camions militaires et les voitures. Elle n'a jamais vu une charrette sur la route. Les ordres venaient du chef de village selon lesquels une personne par famille devait aller se présenter pour effectuer du travail forcé, au moins un à deux jours à la fois en fonction du travail requis. Les villageois ne recevaient ni nourriture ni argent, ni matériel qu'ils devaient apporter depuis leur maison. Ils devaient travailler jusqu'à la tombée du jour et pouvaient retourner à la maison la nuit. Chaque famille devait y aller trois à quatre fois par mois. Elle a également effectué du portage en quatre occasions. La première fois il y a deux ans pendant deux jours. Elle fut emmenée alors qu'elle dormait à la maison. Tôt le matin, les militaires l'ont réveillée et lui ont donné un panier à transporter qui pesait environ 22 kg. La charge était trop lourde pour elle et elle pleurait, tout en essayant de la transporter. Son mari était absent. Il travaillait dans les champs. Elle a dû transporter ce panier à un endroit près de Shwegun. Il y avait plusieurs porteurs, surtout les femmes. Les hommes étaient battus lorsque les militaires les accusaient de leur donner de mauvaises directions durant le portage. Ils étaient frappés sur la tête. La même année, en 1996, elle a dû effectuer du portage à quatre reprises (trois fois elle fut capturée par les militaires et une fois ce fut à la demande du chef de village). La deuxième et la troisième fois, elle a dû exécuter ce travail pendant trois jours, alors que la dernière fois ce ne fut que pendant deux jours. Son mari a effectué du portage en une occasion. Il avait très peur des Birmans et s'enfuyait à chaque fois que les militaires approchaient. Lorsqu'on l'encerclait pour le portage, il réussissait à s'échapper après quatre jours parce qu'il ne pouvait plus transporter sa charge. Il n'était pas attaché et n'a jamais été battu. Si quelqu'un avait de l'argent, il pouvait payer un remplaçant lorsque le chef du village le convoquait. Toutefois, lorsque les gens étaient arrêtés, ils n'avaient aucun choix et devaient aller effectuer le portage. De toute façon, personne dans son village n'avait de l'argent. Lorsque le camp de Ta Line Kayin fut établi il y a deux ans, à deux heures de marche de son village, les militaires ont ordonné au chef du village d'envoyer une personne par famille afin de participer au travail. Lorsque les ordres étaient respectés, une seule personne par famille devait y aller. Dans le cas contraire, tout le monde devait y aller. Tous devaient alors s'y rendre jusqu'à ce que le camp soit terminé. Cela a duré plusieurs mois au début de la saison des pluies. D'autres villages ont dû contribuer à ce travail, parfois 10, 20, 30 ou même plus étaient présents. Elle a dû elle-même couper du bambou, construire des clôtures ainsi que des trappes de bambou, couper des arbres, nettoyer les buissons et transporter des arbres à un endroit où les militaires amenaient les billots. Son mari n'était pas bien, ce qui fait qu'elle devait tout faire. Elle n'était pas rémunérée et devait apporter sa propre nourriture. Elle pouvait toutefois rentrer à la maison la nuit. Son fils de 17 ans a également dû effectuer du travail forcé tel que couper des arbres pour le camp militaire l'année dernière, mais ce travail n'a pas eu lieu en même temps que le sien. Parfois, les gens tentaient de s'enfuir. Elle a vu des gens être battus et maltraités. Habituellement, deux personnes du village devaient se rendre en même temps pour une journée complète au camp militaire afin d'effectuer des tâches de messager; d'autres villages, en tout cinq, devaient également fournir des messagers. Son fils le plus âgé a dû également servir en tant que messager (mais jamais en même temps qu'elle). De plus, les villageois devaient exécuter des tâches de surveillance. Les ordres venaient toujours du chef de village. Une personne devait être postée sur la route pendant cinq jours, nettoyer cette dernière, par exemple lorsque des camions militaires venaient de passer. L'année dernière, elle est allée en trois occasions pendant cinq jours sans jamais être rémunérée. Elle devait apporter sa propre nourriture et dormait sur le site près des buissons alors que les militaires surveillaient les villageois. Les soldats ne l'ont pas maltraitée. Elle a entendu parler d'abus sexuels, mais elle n'est pas sûre que cela ait eu lieu. Il y a deux ans, sa mère (qui vivait avec eux) est allée pour la famille. Son fils y est également allé à une reprise. En plus d'exécuter du travail forcé, les villageois devaient fournir aux militaires tout ce que ces derniers exigeaient (tel qu'une vache ou un porc). Les villageois devaient également fournir du riz aux militaires. Les militaires leur réclamaient également de l'argent. En 1997, les militaires ont demandé 3 000 kyats pour tout le village.
  3057. 176
  3058. Ethnie: Karenni
  3059. Age/sexe: 30 ans, féminin
  3060. Situation familiale: Mariée avec trois enfants
  3061. Activité professionnelle: Agriculteur
  3062. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Pa Nya Plee, Hlaingbwe, Etat Kayin
  3063. Le témoin est venu en Thaïlande en mai 1997 avec sa famille parce qu'elle avait vu des gens attaqués et tués par les militaires. De plus, elle était contrainte d'exécuter du travail forcé, y compris du portage, même lorsqu'elle était enceinte, ce qui fait qu'elle vivait constamment dans la peur. Les membres de sa famille n'avaient plus de temps pour leur propre travail puisqu'ils passaient tout leur temps à travailler pour les militaires. Lorsque les membres de sa famille sont venus en Thaïlande, ils n'avaient plus rien à la maison. La situation était identique pour son père et sa mère. En novembre-décembre 1996, alors qu'elle était enceinte de six mois, elle fut arrêtée par les militaires pour transporter des charges d'environ 30 à 32 kg (munitions et nourriture) pour les militaires pendant 28 jours. Elle dormait seule à la maison cette nuit-là. Tous les autres villageois s'étaient enfuis, mais elle croyait que, puisqu'elle était enceinte, rien ne qui arriverait. Elle fut appelé à l'extérieur de la maison par les militaires du bataillon 10 et a dû se rendre à un endroit appelé Gat Te, un village du DKBA où les gens revenaient de la frontière thaïlandaise. Elle a dû traverser la chaîne de montagnes de Dawna. Elle a mis trois jours pour rentrer à la maison. Plus de 100 personnes travaillaient comme porteurs, y compris deux femmes et cinq hommes de son village. On leur avait dit que le voyage durerait cinq jours, et le chef du village avait été réquisitionné pour apporter de la nourriture pour cinq jours afin qu'il puisse la transporter. Par la suite, on leur a donné un peu de riz deux fois par jour (parfois le riz était gâté). Les porteurs devaient cuisinier eux-mêmes. Une personne folle transportait du riz et en mangeait continuellement, mais elle ne l'a pas vue être battue. Elle a vu un homme âgé être battu par les militaires parce qu'il ne pouvait plus transporter sa charge. Ils n'ont pas essayé de le battre sur la route, mais plutôt dans un autre endroit, à leur retour, elle a vu l'homme âgé en sang et couvert d'ecchymoses sur la tête et le dos. Il a dû transporter sa charge le jour suivant. Elle a vu plusieurs personnes être battues. Un homme d'une soixantaine d'années, qui transportait une lourde charge de munitions, fut battu avec une tige de bambou pendant qu'il marchait et il avait des ecchymoses partout. Elle pense qu'il n'a pas dû survivre. Un homme qui ne pouvait plus transporter sa charge fut mis dans un sac par les militaires et jeté du haut d'une falaise. Il n'était pas dans son groupe, mais elle en a été témoin. Les porteurs étaient attachés deux par deux le jour et la nuit, hommes et femmes tous ensemble, par groupes de dix; lorsqu'ils devaient aller aux toilettes, deux devaient y aller à la fois et les militaires les suivaient. Une fille de 13 ou 14 ans (nom donné à la commission) d'un village avoisinant, qui effectuait du portage, fut enlevée de son groupe et violée par un officier haut placé (nom et grade de l'officier donnés à la commission). Ce dernier l'a menacée en lui disant que si elle révélait ce qui s'était passé son village serait brûlé. Elle pleurait toute la journée après le viol; elle fut relâchée au même moment que le témoin. Lorsque le témoin était célibataire (il y a environ huit ans), elle a dû effectuer du portage à plusieurs occasions, parfois à la suite d'ordres du chef du village ou lorsqu'elle était arrêtée directement par les militaires pendant des périodes de cinq, dix ou quinze jours. La période la plus longue fut de vingt jours. Avant le portage, elle était en bonne forme. Depuis, il ne lui reste plus que la peau et les os. Depuis son mariage, deux de ses frères plus jeunes ont effectué du portage à plusieurs reprises. Au cours d'un portage en 1996, un de ses frères fut battu par un soldat parce qu'il se plaignait qu'il ne pouvait plus transporter sa charge. Il a souffert pendant longtemps de problèmes à la poitrine. En ce qui concerne la construction de routes, il y a deux ans, et pendant toute l'année, ses deux frères ont dû effectuer du travail forcé en rotation sur la route de Painkyone à Hlaingbwe. Les ordres venaient du chef du village. Une personne par famille devait s'y rendre. Lorsque les militaires exigeaient dix personnes, une personne pour dix familles devait y aller pendant dix jours à la fois (le village comptait 30 familles). Chaque mois, une personne de chaque famille s'y rendait pendant dix jours et travaillait du matin jusqu'à midi et après du début de l'après-midi jusqu'au coucher du soleil. Le travail n'était pas rémunéré et ils devaient apporter leur propre nourriture. En 1996, d'autres villageois ont dû couper du bois, et son frère plus jeune a dû transporter les billots de la forêt jusqu'au site de construction de la route. Les ordres émanaient du chef du village, et plusieurs personnes de son village ainsi que d'autres villages ont dû effectuer ce type de travail pendant dix jours sans être rémunérées et survivant sur de petites rations de nourriture qu'ils devaient apporter eux-mêmes. Depuis son mariage, il y a huit ans, elle a dû effectuer de la surveillance une fois par mois pendant cinq jours et parfois jusqu'à sept jours à la fois. Elle le faisait en rotation avec son frère. Lorsqu'elle effectuait ce travail, elle prenait ses deux enfants avec elle; tous les deux font désormais de l'asthme. Ils devaient tous dormir à côté de la route, même durant la saison des pluies. Elle devait nettoyer le long de la route afin de s'assurer qu'il n'y avait pas de mines. Tout le monde devait faire la même chose le long de cette route. En 1996, une de ses tantes fut tuée lorsqu'elle tentait de déminer. Une mine a explosé et elle a perdu ses deux jambes; une autre femme a perdu une jambe dans la même explosion. Elle n'était pas présente à ce moment, mais elle l'a vue par la suite. Les militaires demandaient également aux propriétaires de charrettes de transporter des billots le long de la route, ce qui fait qu'ils étaient souvent les premiers à être tués. Durant ces tâches de surveillance, elle a vu à une occasion une charrette passer sur la route et exploser sur une mine, le chauffeur et les animaux tirant la charrette furent tués. Jusqu'à ce qu'elle quitte le pays, elle et son frère ont dû aller deux fois par mois dans un groupe de cinq personnes pendant cinq ou sept jours à chaque matin au camp militaire de Painkyone, qui se situait à deux heures de marche de son village. Là-bas, ils devaient faire rapport concernant toute activité militaire dont ils auraient pu être témoins. En 1996, ses frères ont dû construire des clôtures autour du camp militaire de Painkyone, creuser des tranchées et effectuer des travaux de réparation dans le camp. L'ordre émanait du chef. Ses frères ont dû y aller pour deux mois complets jusqu'à ce que le travail soit terminé; ils revenaient habituellement chaque soir. Lorsque quelqu'un ne voulait pas effectuer le travail forcé, il devait payer ou engager quelqu'un pour le remplacer. En ce qui concerne le portage, il était nécessaire de payer plus de 1 000 kyats d'une façon ou d'une autre. Pour les autres types de travail forcé, la plupart des gens y allaient eux-mêmes puisqu'ils n'avait pas d'argent. Elle a dû y aller elle-même puisqu'elle n'avait pas d'argent. Chaque année, les militaires collectaient de chaque village une quantité de riz, de bétail et de toute autre chose dont ils avaient besoin en plus d'un impôt de 100 à 200 kyats par famille, deux fois par mois. En 1995, les militaires sont venus demander du riz. S'ils estimaient qu'un agriculteur pouvait produire 30 sacs de riz, ils lui en prenaient dix; si l'agriculteur en produisait moins, il devait tout de même compenser pour atteindre le quota requis par les militaires.
  3064. 177
  3065. Ethnie: Karenni
  3066. Age/sexe: 45 ans, féminin
  3067. Situation familiale: Veuve avec cinq enfants
  3068. Activité professionnelle: Agriculteur
  3069. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Htihpokape, Hlaingbwe, Etat Kayin (le village comptait environ 40 familles)
  3070. Le témoin a quitté le Myanmar il y a quatre ans. Elle y est retournée pour une année entière en 1996 et a quitté de nouveau en février 1997. Elle a dû effectuer du travail forcé à plusieurs occasions en 1996, presque autant qu'auparavant (bien qu'elle fût exemptée de plusieurs types de travail forcé imposé à d'autres villageois). Elle n'a jamais été rémunérée pour son travail. Les villageois devaient effectuer du portage. Les militaires informaient le chef du village de leurs besoins, habituellement en indiquant le nombre de personnes requises. Lorsque leurs besoins n'étaient pas remplis, ils encerclaient et capturaient les villageois eux-mêmes. En 1996, ils ne sont jamais venus directement au village, mais les villageois ont tout de même dû aller exécuter du travail forcé. En 1996, les villageois furent également requis d'effectuer des tâches de surveillance de la route. Elle a elle-même effectué ce genre de travail à Plakyaw, à trois miles de son village (près de la route de Hlaingbwe à Painkyone). Après une journée, on leur demandait d'aller à Hpagat pour une nuit. Elle n'y est allée qu'à une seule occasion pendant deux jours "pour surveiller ce qui se passait". Ils y allaient deux par deux et il y avait plusieurs personnes le long de la route. Le matin, elle devait nettoyer la route avec des branches pour s'assurer qu'il n'y avait pas de mines. Elle n'a jamais vu une mine exploser. En 1996, les villageois furent également requis par le chef de village de fournir du travail à cette fin. Comme elle était trop vieille et plus en bonne santé, sa famille (elle-même et son frère plus jeune) fut exemptée. Elle devait payer 100 kyats par mois aux militaires. Toujours en 1996, les gens de Htihpokape furent ordonnée par le chef de village de transporter des billots pour des poteaux de téléphone. De Htihpokape, un petit village d'environ 40 familles, cinq personnes ont dû y aller en plus de gens d'autres villages. Elle a dû faire cela à deux ou trois occasions par mois pendant une journée. Des billots étaient transportés à une rivière, puis deux ou trois personnes les sortaient de la rivière avec des chaînes. Elle a elle-même participé à cette opération. A une occasion, quatre ou cinq militaires sont venus dans son village et ont informé le chef du village que des billots étaient craqués et inutilisables comme poteaux. Ils ont donc imposé une amende d'un porc aux villageois. A une autre occasion, des villageois furent requis de transporter des billots et des tiges de bambou de leur village jusqu'au camp de Painkyone qui se situait à trois heures de marche. Finalement, les villageois devaient également nettoyer le sol dans les plantations de caoutchouc appartenant aux militaires. Ils devaient apporter leur propre nourriture. Elle n'a jamais dû aller elle-même dans ces plantations.
  3071. 178 et 179
  3072. Ethnie: Karenni
  3073. Age/sexe: 21 et 17 ans, tous deux masculins
  3074. Situation familiale: Tous les deux célibataires (famille de sept et six, respectivement)
  3075. Education: Quatrième année (témoin 178); neuvième année (témoin 179)
  3076. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Bee T'Ka, Hlaingbwe, Etat Kayin
  3077. Les témoins ont quitté le Myanmar en juillet 1997. Le témoin 178 est venu en Thaïlande une première fois en 1992, alors que le témoin 179 est venu en 1997. En 1997, tous les deux sont retournés à Bee T'ka et, sur la route, ils furent arrêtés par les militaires le 9 juin 1997 à Lubaw (entre Bee T'Ka et la frontière thaïlandaise) afin d'effectuer du portage. Le témoin 178 a précisé qu'ils furent arrêtés par les militaires du bataillon 33 et qu'ils furent attachés et questionnés par un officier qui les a accusés d'être des agents du KNU. Ils ont nié mais n'ont pas été crus. Le jour suivant, ils furent questionnés séparément puis attachés ensemble et battus (nom de l'officier qui les a battus donné à la commission). On leur a même demandé de creuser un trou afin de les enterrer. On leur a bandé les yeux avec des sacs de plastique et versé de l'eau sur la tête afin qu'ils ne puissent pas respirer. Ils furent torturés pendant plusieurs heures et ont même perdu conscience. Un des témoins crachait du sang et avait des blessures internes. A partir du 11 juin 1997, ils furent utilisés comme porteurs. Tout d'abord, ils durent transporter des casseroles avec du riz qui pesaient environ 65 kg, de Lubaw pendant deux jours jusqu'à Thay Mo Hpa. Au début, ils étaient 11 porteurs (tous des hommes) mais, par la suite, le chef du village est venu avec d'autres porteurs et a payé afin qu'ils soient relâchés. Sept porteurs ont toutefois dû rester. Après deux jours, ils sont retournés à Lubaw et depuis cet endroit furent amenés à Kyawko. En tout, ils ont fait du portage pendant sept jours sur un terrain montagneux. Ils recevaient deux repas par jour constitués de riz qu'ils devaient cuisiner eux-mêmes. La nuit, ils étaient surveillés par les militaires. Après sept jours, lorsqu'ils ne pouvaient plus avoir assez de nourriture, on leur demandait de se rendre dans les village avoisinants et de mendier pour tout le groupe de 40 personnes (porteurs et militaires). Ils étaient surveillés par environ quatre ou cinq militaires. Ils ont dû mendier de maison en maison puis revenir avec ce qu'ils avaient pu obtenir. Les militaires allaient dans la maison, alors que les porteurs restaient à l'extérieur; tout ce qu'ils pouvaient trouver dans la cuisine, en particulier du riz, ils le prenaient. Les militaires leur avaient promis qu'ils seraient relâchés lorsqu'ils atteindraient le village de Kyawko. Toutefois, à leur arrivé au village de Kyawko, ils ont dit au témoin 178 qu'ils devaient continuer jusqu'au village de Ser Gaw puisqu'un membre de sa famille y vivait et il devait donc y ramener de la nourriture. Pendant ce temps, le témoin 179 devait rester au camp de Kyawko. Une fois que le témoin 178 a obtenu la nourriture et est revenu (deux heures plus tard) au camp de Kyawko, il a demandé à être relâché, mais le commandant de la compagnie (nom donné à la commission) a, une fois de plus, refusé. Ils furent, par la suite, requis de transporter des marchandises d'une rivière jusqu'en haut d'une colline. Après que le témoin 178 se soit plaint et ait imploré au commandant de les laisser partir, le commandant a appelé la personne qui avait gardé leurs effets personnels et ils furent tous les deux relâchés. Ils sont allés à Ser Gaw et sont revenus en Thaïlande. En ce qui concerne d'autres formes de travail forcé, le témoin 197 a dit qu'à partir de 1995 il étudiait à Hlaingbwe et qu'il n'a donc pas eu à effectuer de travail forcé. Le portage de 1997 constituait la première fois. Mais il fut arrêté et torturé en 1996, sans savoir pourquoi, par les militaires. Pendant environ neuf jours, il fut gardé au soleil et, la nuit, enfermé avec des gens dans un carcan. Sa famille a dû effectuer du travail forcé pendant la même période (1995 à 1997), tel que des services de messager, la fourniture de bois pour le feu ou des rations de riz. Il n'y avait pas de construction de routes ni de portage, mais ils ont dû payer une taxe de porteur afin de ne pas avoir à travailler. Il ne connaît pas le montant exact. En ce qui concerne les tâches de messager, deux villageois devaient chaque jour marcher trois miles jusqu'au camp et aider les militaires à faire tout ce que ceux-ci voulaient, tel qu'envoyer des lettre dans tel ou tel camp. Le témoin 179 a ajouté qu'à Hlaingbwe, lorsque quatre ou cinq étudiants étaient en groupe, le groupe devait se disperser. Il a souvent entendu des cris provenant de la prison et a vu les prisonniers portant des uniformes casser des pierres. A Bee T'Ka, au début de 1997, il a été témoin d'un incident où neuf personnes furent contrôlées; une des personnes disait qu'elle était un fonctionnaire du gouvernement mais fut incapable de donner une pièce d'identité et fut tuée sur place. Cinq se sont enfuies jusqu'à la rivière et ont essayé de nager mais furent capturées. Plus tard, les gens ont vu un corps attaché à un âne qui était traîné le long de la berge.
  3078. 180
  3079. Ethnie/religion: Karenni, chrétien
  3080. Age/sexe: 32 ans, masculin
  3081. Situation familiale: Marié avec trois enfants
  3082. Education: Sixième année
  3083. Activité professionnelle: Travailleur journalier dans l'agriculture
  3084. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Bee T'Ka, Hlaingbwe, Etat Kayin
  3085. Le témoin et sa famille sont venus en Thaïlande en avril 1996 parce qu'ils ont été accusés d'avoir eu des contacts avec le KNU et ont dû exécuter du travail forcé. Il a été chef de village pendant environ une année. Il y avait dix sections dans son village qui étaient divisées par une rivière: sur la rive est vivaient principalement les bouddhistes, alors que sur la rive ouest vivaient les chrétiens. Le chef du village recevait les ordres concernant le travail forcé du commandant du camp militaire se trouvant dans la région du monastère de Bee T'Ka. Chaque jour, le chef du village devait fournir des personnes pour le travail forcé; dès qu'il recevait les ordres, il devait aller rencontrer les dix chefs de section afin de trouver assez d'individus. Habituellement, l'ordre venait le matin et devait être exécuté le jour même. Lorsque les militaires avaient besoin de gens pour une période plus longue, il n'y avait qu'un ordre ne précisant pas la durée du temps. Parfois, cet ordre était accompagné de cartouches dans une enveloppe en plus d'un morceau de charbon. Entre la saison des pluies de 1995 et avril 1996, le chef du village a reçu quatre ordres accompagnés de cartouches et de morceaux de charbon lorsqu'il ne pouvait trouver un nombre suffisant de personnes. Une lettre contenant une cartouche et un morceau de charbon fixait l'échéance pour la fin de la journée. Durant son assignation, les villageois ont été arrêtés directement à quatre reprises par les militaires pour le travail forcé, sans l'autorité du chef de village. A une occasion, un ordre fut donné par écrit au chef du village de fournir 20 porteurs dans les deux heures. Le chef du village n'a pu réussir et, après les deux heures, les militaires sont venus au village et ont encerclé plusieurs personnes. Finalement, le chef du village leur a demandé de relâcher les travailleurs en trop, ce qu'ils ont fait. Les vingt porteurs requis ont dû travailler pendant trois jours. Concernant les trois autres fois, les militaires venaient parfois au village sans avertissement parce qu'ils désiraient se rendre quelque part sans que personne ne le sache. Ainsi, ils entraient dans le village et capturaient le nombre de personnes qu'ils désiraient. Quelques-uns des villageois ne pouvaient tolérer cette situation et se sont enfuis du village. Après cela, les militaire imposaient des amendes aux autres villageois. Lorsqu'une famille s'enfuyait, les villageois qui restaient devaient payer 40 000 kyats en plus de 65 kg de porc. Le jour de son entrée en fonction, il a reçu l'ordre d'un camp militaire de fournir 80 personnes par jour pendant un mois afin de transporter de la nourriture et les marchandises du camp de Paw Yebu jusqu'à Taun Zun, et également dans d'autres camps. Les gens qui ne voulaient pas effectuer le travail devaient engager un remplaçant, ce qui leur coûtait 100 kyats par jour. Des dix sections du village, deux personnes devaient aller chaque jour au camp militaire près du monastère et attendre qu'on leur donne l'ordre d'effectuer du portage. Ces vingt personnes devaient rester avec les militaires pendant une semaine et ne pouvaient revenir avant d'être remplacées. Afin d'être exempté de ce travail pendant trois jours, on devait payer 600 kyats aux militaires et, pour une semaine, le montant s'élevait à 1 300 kyats. La plupart ne pouvant payer, ils devaient donc y aller. Tout le travail n'était pas rémunéré et les gens devaient apporter leur propre riz. Lorsque l'armée avait un conflit avec le KNU, certaines personnes en profitaient pour s'enfuir. Par la suite, les militaires imposaient des amendes pour chaque personne qui avait pris la fuite; la dernière fois que cela s'est produit, le chef du village a dû payer 4 000 kyats par personne enfuie d'une zone de combat, alors qu'ils effectuaient du portage. Environ deux ou trois fois par mois, 30 à 40 villageois étaient requis comme porteurs par un bataillon qui patrouillait dans la région; ils devaient rester avec le bataillon aussi longtemps que celui-ci restait dans la région, c'est-à-dire pendant trois ou quatre jours, ou même parfois plus. Le chef du village devait également fournir des porteurs pour des voyages plus longs. Au moment de la saison sèche, 30 personnes furent requises pendant une semaine. Parfois, les porteurs étaient attachés et battus parce qu'ils étaient accusés sans aucune preuve d'être liés à l'armée du KNU; les porteurs étaient également battus parce qu'ils étaient trop lents. Lorsqu'il était chef de village, il a vu environ 13 personnes être sérieusement blessées. Elles furent placées dans des carcans et portent encore aujourd'hui les cicatrices sur leur peau. Une personne fut battue jusqu'au sang et a quitté pour la Thaïlande parce qu'il devait prendre des médicaments. Durant la même période, personne de son village ne fut tué et aucune femme ne fut molestée. Dans la seconde moitié de 1995, une nouvelle route fut construite de Bee T'Ka jusqu'à Paw Yebu. Un ordre fut envoyé au chef du village indiquant qu'une personne par famille devait travailler sur cette route jusqu'à ce qu'elle soit terminée. Le travail a duré pendant deux semaines et était non rémunéré. Les travailleurs devaient apporter leur propre nourriture et leurs outils et travaillaient toute la journée sous la supervision des militaires. Par la suite, il y eut la construction d'une autre route d'environ quatre miles du nom de Paw Yebo jusqu'à Taun Zun. Encore une fois, une personne de chaque famille devait travailler sur le site en tout temps. Lorsqu'il n'y avait que des femmes ou des personnes âgées dans la famille, cela dépendait du chef de village qui essayait de trouver quelqu'un d'autre d'une autre famille. Afin d'être exempté du travail, on devait payer 200 kyats par jour. En plus des vingt villageois qui devaient rester en attente de portage, deux personnes devaient aller chaque jour depuis le village afin d'effectuer des tâches de messagerie pour les militaires pendant une journée. L'ordre venait du chef du village qui demandait habituellement aux femmes d'effectuer ces tâches. Egalement, en janvier-février 1996, les militaires ont obtenu des informations selon lesquelles deux armes se trouvaient près du village et ont donc demandé au chef du village de les diriger là-bas. Lorsqu'il a refusé, ils ont arrêté six femmes et cinq hommes et leur ont demandé de les guider. Ils ont dû marcher devant, suivis du chef du village, et les soldats fermaient la marche. Cette marche a duré environ deux heures. Durant la saison chaude, il a reçu l'ordre qu'une personne de chaque famille devait aller au camp militaire près du monastère afin d'apporter des tiges de bambou pour clôturer le monastère. Ce travail a duré environ quatre jours jusqu'à ce qu'il soit terminé.
  3086. 181
  3087. Ethnie: Karenni
  3088. Age/sexe: 15 ans, masculin
  3089. Situation familiale: Cinq (lui, ses parents et deux frères)
  3090. Activité professionnelle: Son père possède des cultures (palmiers, mangues, châtaignes)
  3091. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko (près de Nabu), Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 100 familles)
  3092. Il s'est enfui de son village en février 1998. Il y avait un camp militaire à 500 mètres du village et un autre un peu plus loin au sommet d'une montagne. Son frère a perdu une jambe il y a environ un mois après avoir marché sur une mine près de son village alors qu'il coupait des bambous pour les militaires. Il est à l'hôpital de Myawady. Les militaires ont affirmé qu'il ne s'agissait pas d'une de leurs mines. Il craint la présence des militaires dans son village. Il a dû faire du 1) portage pour les militaires, 2) participer aux travaux relatifs à un camp militaire et 3) à la construction d'une route. En fait, un membre par famille devait faire le travail requis par les militaires. Lorsqu'il travaillait à cette fin, les autres membres de sa famille n'étaient dès lors pas requis de ce faire. Sa mère a fait du travail pour les militaires jusqu'au moment où il a été assez vieux pour qu'il le fasse lui-même. Son père en a fait un nombre incalculable de fois, notamment du portage. Ses soeurs et frères ont également dû travailler pour les militaires, ses soeurs lorsque leurs maris étaient absents. Ses parents qui devaient subvenir aux besoins de la famille envoyaient le plus souvent leurs enfants puisqu'ils ne pouvaient se permettre de perdre de précieuses journées de travail. C'est le chef de village qui transmettait les ordres des militaires. Il était possible de payer pour être exempté du travail qui devait être exécuté. Les travailleurs n'étaient pas rémunérés. Ils devaient bien souvent apporter leur propre nourriture puisqu'elle n'était pas fournie, ou en quantité insuffisante. 1) Pour ce qui est du portage, il se partageait le travail avec son frère. En raison de son jeune âge, son frère plus âgé a dû faire le travail un nombre de fois plus élevé que lui. La dernière fois où il a dû faire du portage pour les militaires remonte à la dernière moisson, l'assignation ayant duré trois jours, incluant deux nuits. Il a dû marcher de son village à Tiwablaw et Tilawthi (au-dessus des montagnes Dawna). Le portage se faisait dans la forêt et sur un terrain varié. Il a eu droit à une ration de riz ranci. Il a travaillé avec trois à cinq porteurs pour 30 à 40 soldats. Il devait transporter la nourriture, les munitions et les casseroles pour la cuisine. Lorsqu'il était incapable de porter la charge qui lui avait été assignée, les militaires s'adressaient à lui en criant et le forçaient à continuer à avancer. Il a également été frappé et n'a reçu aucun traitement médical. 2) Il a dû travailler pour le camp militaire cinq jours avant son départ. Il a travaillé pour la première fois pour ce camp à l'âge de 13 ans. Le travail consistait à poser les clôtures, creuser les tranchées, apporter l'eau nécessaire au camp, installer les pieux de bambous qu'il avait coupés auparavant. Il a aussi participé à l'érection du camp proprement dit. Il devait alterner trois jours de travail et trois jours de repos. Antérieurement, ces parents exécutaient le travail requis par les militaires. Il partageait la corvée avec son frère. En fait, tous les garçons du village, âgés de plus de 12 ans, devaient exécuter du travail pour le camp militaire. Il n'était pas rémunéré mais ne pouvait toutefois refuser de travailler par crainte d'être battu. Il a été battu à deux reprises par les militaires. De plus, les militaires s'adressaient aux enfants en criant lorsqu'ils n'exécutaient pas le travail de manière satisfaisante. Les enfants ne bénéficiaient d'aucun moment de repos lors de ces corvées et devaient travailler de 7 heures à 17 heures. Ils devaient apporter leur propre nourriture, mais pouvaient retourner dormir chez eux. Il a aussi participé à la construction de deux routes menant à Kawkareik un nombre incalculable de fois. Il a dû s'y rendre jusqu'à ce que l'une de celle-ci soit terminée. Environ une quarantaine de personnes travaillaient avec lui. Les enfants de sexe féminin n'étaient pas requis de travailler au camp militaire, mais devaient toutefois participer à la construction des routes en coupant les buissons de manière à pouvoir l'élargir.
  3093. 182
  3094. Ethnie: Karen
  3095. Age/sexe: 13 ans, masculin
  3096. Situation familiale: Trois (lui et ses parents)
  3097. Education: Première année
  3098. Activité professionnelle: Son père a des terres (mangues). Il avait une ferme mais les militaires ont construit leur camp sur les terres de son père
  3099. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko (près de Nabu), Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait environ 100 familles)
  3100. (Le témoin a entendu le témoignage du témoin 181 et l'a corroboré.)
  3101. Il a quitté le Myanmar à la mi-février 1998. A la demande de ses parents, il a cessé d'aller à l'école puisque ses parents avaient besoin de lui pour aller exécuter le travail requis par les militaires. Comme ils devaient subvenir aux besoins de leur famille, ils ne pouvaient se permettre de perdre une journée de travail et envoyait leur fils unique travailler sans être rémunéré. Il a dû travailler pour les militaires pour la première fois à l'âge de 9 ans, il y a quatre ans. L'ordre était transmis par le chef de village. Il devait notamment apporter l'eau au camp et couper les buissons poussant dans les talus de la route. Il devait travailler deux jours, se reposer le même nombre de jours et reprendre le travail suivant le même horaire. Il ne pouvait refuser de travailler. S'il était fatigué, ses amis l'aidaient à exécuter son travail. Il n'a pas eu à faire du portage mais les militaires l'ont utilisé à deux reprises afin de détecter les mines camouflées aux environs de son village. Le frère de son père aurait également fait du travail pour les militaires, incluant du portage.
  3102. 183
  3103. Ethnie: Karenni
  3104. Age/sexe: 13 ans, masculin
  3105. Situation familiale: Quatre (lui, ses parents et un frère plus âgé)
  3106. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Baw Ko (près de Nabu), Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait environ 100 familles)
  3107. (Le témoin a entendu le témoignage du témoin 181 et l'a corroboré.)
  3108. Il a quitté le Myanmar à la mi-février 1998. Ses parents ne l'ont pas autorisé à aller à l'école puisqu'ils avaient besoin de lui pour faire le travail exigé par les militaires. Il a dès lors travaillé pour le camp militaire, devant apporter l'eau, poser les clôtures et creuser les tranchées. Il a travaillé pour la première fois à l'âge de 9 ans, il y a quatre ans. Les ordres des militaires aux fins d'exécuter du travail étaient transmis par le chef du village. Il devait travailler une journée, se reposer une journée et reprendre le travail en suivant le même horaire. Il n'a pas fait de portage. Son père toutefois en aurait fait à plusieurs reprises, chaque assignation durant environ trois jours. Sa mère n'aurait pas fait de travail forcé. Sa soeur aurait participé à la construction d'une route. Elle se rendait sur le site de travail le matin et retournait chez elle le soir. Tous ces travaux n'étaient pas rémunérés. Enfin, il a, à six reprises, été requis par les militaires afin de trouver les mines camouflées aux environs de son village.
  3109. 184
  3110. Ethnie: Karenni
  3111. Age/sexe: 48 ans, masculin
  3112. Situation familiale: Marié, trois enfants
  3113. Education: Sixième année
  3114. Activité professionnelle: Cultivateur (louait ses terres). En 1996-97, il a assumé les fonctions d'assistant au chef de village. Il avait déjà assumé ces fonctions en 1993 pour une année.
  3115. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Htee Talay, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 174 foyers et était divisé en quatre sections)
  3116. Il a quitté le Myanmar en mai 1997 puisqu'il ne voulait plus faire de travail pour les militaires. A titre d'assistant au chef de village, il devait contacter les personnes qui devaient travailler pour les militaires, notamment pour construire les routes, éclaircir la forêt, faire les récoltes ou du portage. Un ordre écrit des militaires était généralement transmis au chef de village. Une personne par famille devait travailler conformément à une rotation préétablie. Aucun travail n'était rémunéré. Il était possible d'engager un substitut: 140 kyats par jour pour les assignations autres que le portage, le coût de remplacement de ce dernier étant de 500 kyats. Il était aussi possible de payer le chef de village, et ce dernier devait alors trouver un remplaçant. Il devait demander aux villageois de travailler puisque de toute façon les militaires les auraient forcés. Les villageois devaient consacrer plus de journées par mois pour les travaux requis par les militaires que pour vaquer à leurs propres occupations. Pour ce qui est du portage, une famille devait fournir une personne à trois reprises à chaque mois, chaque assignation durant cinq jours. Seuls les hommes faisaient ce travail. Ils devaient porter les munitions, les obus et la nourriture. Le nombre de porteurs dépendait du nombre de soldats à servir. Les porteurs devaient rester avec les soldats même lorsque des combats éclataient de manière à approvisionner ces derniers en munitions. Un porteur de son village est mort, abattu durant un combat contre l'Union nationale karenne (Karen National Union) (KNU). Les porteurs faisaient l'objet de mauvais traitements s'ils ne réussissaient pas à suivre le rythme de marche, étant battus et frappés par les soldats. Dans les cas où les porteurs étaient malades ou blessés, aucun traitement médical ne leur était prodigué et aucun médicament donné. Les villageois devaient également travailler pour les militaires afin de trouver les mines camouflées aux environs de leur village. Ce travail a été exécuté à trois reprises en 1996 et a été répété le même nombre de fois en 1997. Il a également organisé le travail pour ce qui est de la construction de la route entre Kawkareik et Hpa-an (à travers Kyawywa) qui se trouve à trois miles de son village. Ce travail devait être exécuté tout au cours de l'année, à cinq reprises pendant un mois. Tant les femmes que les hommes devaient y travailler. Chaque assignation durait trois jours incluant trois nuits. Les travailleurs devaient dormir près du site de travail et devaient apporter leur propre nourriture. Ils ne pouvaient refuser d'y aller par crainte de faire l'objet de représailles de la part des soldats. Il a organisé le travail requis pour l'édification du camp militaire de Nabu au cours des années 1995 et 1996. Quarante à cinquante personnes travaillaient en même temps et étaient remplacées par le même nombre de personnes suivant une rotation préétablie. Le travail consistait notamment à couper les arbres, éclaircir le terrain -- même si cela impliquait de couper des arbres sur des terres à cultures --, cueillir les bambous et le bois. Les travailleurs devaient également préparer les toitures. Les travailleurs devaient transporter le matériel et exécuter le travail afférent. Tant les hommes que les femmes devaient exécuter ce travail. Le travail commençait à 6 heures pour se terminer à 18 heures. Les soldats s'adressaient aux travailleurs en criant lorsqu'ils estimaient que le travail ne progressait pas de manière satisfaisante. Il n'a pas vu de travailleurs qui auraient fait l'objet de mauvais traitements, mais on lui a rapporté des histoires de viols perpétrés contre des femmes sur le site de travail. Il a également dû organiser le travail pour ce qui est des récoltes. Il a personnellement dû travailler à la construction de routes en 1991 (une occasion pendant quinze jours), 1992 (une occasion pendant quinze jours), 1993 (une occasion) et à maintes reprises en 1996 lorsqu'il était l'assistant du chef de village. Les soldats s'adressaient souvent à eux en criant. Il n'aurait toutefois pas fait l'objet de mauvais traitements. Il a également participé aux travaux relatifs au camp militaire de Nabu.
  3117. 185
  3118. Ethnie: Musulman
  3119. Age/sexe: 16 ans, féminin
  3120. Situation familiale: Elle vivait avec sa mère qui était veuve ainsi que sa soeur plus âgée et deux neveux
  3121. Education: Troisième année
  3122. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Dawlan, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 150 familles)
  3123. Le témoin a quitté le Myanmar en janvier 1998. Son village comptait 150 familles mais, aujourd'hui, il ne reste plus que deux ou trois maisons dans ce village. Depuis septembre 1997, les autorités ont annoncé que le village devait être relocalisé parce qu'un camp militaire devait être construit à cet endroit. Aucun autre endroit ne fut indiqué aux habitants où ils devaient se rendre (Musulmans, Mons, Birmans, Karens). Les gens ont tout de même dû partir. Certains ont traversé la frontière et se sont rendus dans les camps de réfugiés, certains (les Musulmans) voulaient rester mais, en raison des combats avec le KNU, les autorités ne leur ont pas permis de rester. En janvier, les militaires ont brûlé le village et, lorsque les villageois ont tenté de traverser la frontière du Myanmar, ils ont été arrêtés par l'armée qui a vérifié leurs pièces d'identité. Les Musulmans n'avaient pas de pièces d'identité bien qu'on leur en ait promis à au moins trois reprises; les autorités étaient même venues prendre des photos avant septembre 1997, mais les Musulmans et les Karens n'ont jamais reçu de pièces d'identité. Avec sa famille, elle a parlé aux militaires et décidé de traverser la frontière. En vérité, aucune base militaire n'a été construite sur le site du village puisqu'il existait déjà une base militaire dans la région. Elle a dû effectuer du travail forcé dès l'âge de 10 ans parce que sa soeur plus âgée n'était pas en bonne santé. Elle a fait du travail habituellement réservé aux hommes tel qu'ériger des clôtures autour du camp militaire et niveler la route. Les militaires se tenaient derrière les gens avec des bâtons et les insultaient et les battaient lorsqu'ils ne travaillaient pas. Elle a vu plusieurs hommes être battus par des militaires et, lorsqu'elle était plus jeune, jusqu'à l'âge de 13 ans, elle a elle-même été battue. Aujourd'hui, ayant très peur d'être battue, elle préfère toujours travailler. Chaque mois, elle devait aller travailler pendant 20 à 25 jours. Depuis l'âge de 10 ans, elle devait se rendre dans les camps militaires pour construire des maisons pour les soldats, creuser des trous et transporter du sable afin de faire des planchers; elle a également dû travailler à la pose de clôtures, au transport de bambous et à tout autre travail que les militaires réclamaient (creuser des tranchées ou cuisiner chaque matin). Durant la saison sèche, elle devait transporter de l'eau. Même lorsqu'elle était malade, elle devait travailler. Elle n'était jamais libre. Les ordres étaient reçus par le chef du village. Toutes les cinquante familles du village devaient contribuer chaque mois pendant dix jours à un travail régulier pour le camp militaire. Dans sa famille, elle a dû y aller pendant vingt ou vingt-cinq jours. Sa famille était incapable de payer les charges de porteur de plus de 1 000 kyats par mois, ce qui fait qu'elle devait effectuer encore plus de travail forcé. Lorsque les membres de sa famille ont dit au chef du village qu'ils ne pouvaient payer, les militaires sont venus dans sa maison et les ont menacés avec des armes. Elle a craint pour sa vie et a accepté d'aller travailler dans le camp militaire. Ainsi, les militaires venaient chaque mois lorsque sa famille ne pouvait payer les taxes de porteurs. Dans sa famille, une personne travaillait presque continuellement pour l'armée. Elle n'a pas effectué de portage. En ce qui concerne les abus sexuels, lorsque les femmes seules étaient envoyées au camp militaire, les militaires faisaient ce qu'ils voulaient avec elles et parfois les épousaient ou les payaient. Les femmes avaient très peur de parler. Les villageois ne pouvaient rien faire contre cela. Chaque fois qu'elle a dû travailler dans le camp militaire, sa mère venait la chercher le soir et la ramenait à la maison. Lorsqu'elle avait 13 ou 14 ans, elle a dû travailler sur une route qui menait d'un camp militaire jusqu'à un autre. Ceci dura pendant quinze jours et les gens durent apporter leur propre nourriture et dormir sur le bord de la route. La fréquence de ces demandes n'était pas régulière et dépendait de la situation de la route; durant la saison sèche, c'était plus souvent (parfois une fois par mois et parfois une fois tous les deux mois). Ils devaient couper des arbres et placer les troncs le long de la route et remplir les espaces entre les troncs. Durant la saison des pluies, les filles devaient transporter les munitions et les armes dix jours par mois. Durant la saison des pluies, le village était inondé et l'eau recouvrait les maisons. Néanmoins, les villageois devaient quand même payer des taxes de porteurs et transporter des munitions et des armes en canots. Tous ces types de travaux lui prenaient l'année entière. De plus, elle a dû effectuer quelques travaux mineurs. Tout d'abord, les villageois devaient payer 20 kyats par mois par famille pour le nettoyage des affaires des militaires, puis l'armée payait quelqu'un pour qu'il effectue leur lessive (habituellement les femmes seules). Elle a travaillé à deux occasions parce que sa famille ne pouvait pas payer les 20 kyats. Deuxièmement, chaque jour, chaque famille devait transporter du bois pour le feu ainsi que du riz et 10 kyats à l'armée. Elle ramassait et transportait le bois pour le feu. Troisièmement, chaque jour, quatre familles (sur 150) devaient fournir une personne pour surveiller les mouvements d'inconnus à l'extérieur du village. Deux se trouvaient devant la base militaire et deux à l'arrière. Sa famille n'était pas en mesure d'effectuer cette tâche de surveillance puisqu'elle avait déjà beaucoup trop d'autres travaux à effectuer. Ainsi, une fois par mois, lorsque venait leur tour d'effectuer cette tâche, sa famille devait payer 100 kyats pour que quelqu'un d'autre la fasse. Elle a décidé finalement qu'elle ne pouvait plus rester dans le village parce qu'elle avait beaucoup trop de travail. C'est la raison pour laquelle elle a quitté le Myanmar.
  3124. 186
  3125. Ethnie/religion: Karenni, bouddhiste
  3126. Age/sexe: 16 ans, féminin
  3127. Situation familiale: Sept (ses parents, deux frères et deux soeurs)
  3128. Education: Sixième année
  3129. Activité professionnelle: Cultivateur
  3130. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Htee Talay, Kawkareik, Etat Kayin
  3131. La famille du témoin est venue en Thaïlande en décembre 1997 parce qu'elle ne pouvait plus faire face à la quantité de travail forcé et de portage. Elle a elle-même exécuté du travail forcé depuis l'âge de 15 ans, ce qui l'a contrainte à quitter l'école. A l'âge de 15 ans, elle a travaillé pendant six mois sur la route de Nabu à Kyondo, à partir du début de la saison des pluies (de juin à juillet 1996) jusqu'à la fin de la saison froide (janvier 1997). Une personne par famille devait y aller. Il y avait des gens d'autres sections ainsi que d'autres villages, en tout 4 000 personnes à la fois. Les autorités avaient donné la liste des personnes: tant de personnes de tel village, tant de personnes de tel autre village. Lorsque les militaires mangeaient, ils ont mis cette liste sur la table et elle a pu voir son nom sur la liste. La présence de tous les travailleurs était vérifiée trois fois par jour: le matin, l'après-midi et le soir. La vérification du soir était très stricte. Parce que sa famille ne pouvait payer 300 kyats par jour pour la route, elle a dû quitter l'école et aller travailler sur cette route pendant six mois. Elle a dû manger et dormir sur le site de travail parce que la route était éloignée de sa maison. La nuit, il ne leur était pas permis de retourner à la maison. Ils devaient tous travailler depuis tôt le matin jusqu'à tard le soir, puis cuisiner lorsqu'il faisait déjà nuit. Il n'y avait pas d'abri, ce qui fait qu'elle devait dormir sous un arbre. Chaque mois, sa famille lui envoyait le riz nécessaire afin de survivre. Durant les six mois, elle est tombée malade à une occasion, avec de la fièvre et des maux de tête. Elle n'a reçu aucun médicament de la part des militaires, mais on lui a permis de retourner à la maison (à une heures et demie de marche) pendant deux jours. Pendant ces deux jours, sa famille a dû payer 200 kyats. L'armée est, par la suite, revenue et l'a amenée à nouveau. Sur le site de travail, certaines personnes coupaient des arbres, d'autres creusaient des trous, d'autres transportaient des pierres. Elle a dû transporter les marchandises et couper les arbres de 20 cm. Les militaires surveillaient les gens qui travaillaient et les insultaient lorsqu'ils arrêtaient. Elle a vu plusieurs personnes être battues parce qu'elles étaient paresseuses. Particulièrement, durant la saison sèche, lorsqu'il faisait très chaud, les gens ne pouvaient travailler continuellement et devaient se reposer. Les soldats les battaient et demandaient au chef de village de payer une amende de 200 kyats par jour pour les délais occasionnés. Elle a elle-même été battue à une occasion par un soldat qui l'avait insulté à plusieurs reprises. Elle a été battue parce qu'elle était malade et voulait arrêter. Le militaire lui a dit qu'elle devait voir le colonel, mais celui-ci était absent, ce qui fait qu'elle n'a pu obtenir de permission. Lorsqu'elle s'est assise sur le bord de la route, un soldat l'a vue et l'a battue. A cette occasion, elle n'a pas pu retourner à la maison et a dû continuer le travail. Elle avait de la fièvre et ne sait pas pourquoi, peut-être causée par la chaleur ou le travail au soleil. De plus, suite aux ordres des militaires, en mars 1997, une personne par famille a dû travailler pendant un mois sur la base militaire du village de Sin Hna-kaun. Environ 300 personnes ont travaillé sur ce site. Ces personnes devaient nettoyer et préparer le terrain afin de planter les arbres à caoutchouc. Lorsque les plantations furent terminées, les militaires ont pris les récoltes. Elle ne sait pas qui a gardé les profits de ces récoltes. L'endroit était éloigné de toute source d'eau et elle avait très soif. Cet endroit se situait à deux miles de sa maison, mais on ne lui permettait pas de retourner à la maison le soir, et cela pendant un mois. Elle devait dormir n'importe où et devait apporter sa propre nourriture et ne fut pas rémunérée pour ce travail. Les soldats étaient toujours présents pour surveiller. Le traitement fut identique lorsqu'il était question de travail sur la route. Mais elle ne fut pas battue parce qu'elle a travaillé en tout temps. Les présences étaient vérifiées chaque jours, deux à trois fois par jour. En avril 1997, suite à un ordre reçu du chef de village, une personne par famille a dû se rendre une journée entière au camp militaire de Sin Hna-kaun afin de transporter des troncs d'arbres pour cette base. Après avril 1997, au début de la saison des pluies, une personne par famille (c'était toujours elle qui y allait) a dû travailler pendant un mois entier à transporter des semences pour un champ appartenant à l'armée. Cet endroit se situait à quatre heures de marche de la maison du témoin près de la colline de Nabu. Elle a dû apporter sa propre nourriture et le matériel, et devait transporter les semences qui pesaient environ 4 kg. Ces semences appartenaient aux villageois. Il n'y avait pas d'abri. Les villageois devaient en construire eux-mêmes. Elle fut traitée comme auparavant.
  3132. 187
  3133. Ethnie/religion: Karenni, bouddhiste
  3134. Age/sexe: 20 ans, masculin
  3135. Situation familiale: Lui, ses parents et quatre frères et soeurs
  3136. Education Cinquième année
  3137. Activité professionnelle: Cultivateur
  3138. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Htee Talay, Kawkareik, Etat Kayin
  3139. Le témoin a quitté le Myanmar pour la première fois à l'âge de 17 ans et pour la dernière fois en octobre 1997. Il a dû quitter l'école à l'âge de 14 ans à cause du travail forcé. Il ne pouvait pas aller à l'école en même temps qu'il devait effectuer ce travail; de plus, sa famille devait payer des frais de scolarité de 200 à 300 kyats par mois au niveau primaire (de la première à la quatrième année) et environ 600 kyats pour les niveaux supérieurs. Il a continué à effectuer du travail forcé jusqu'à l'âge de 17 ans pendant environ six à huit mois durant la saison froide. Il devait alors travailler sur les routes, construire des camps militaires et également effectuer du portage. De plus, pendant les deux mois sur trois de la saison des pluies, il devait travailler dans les champs de l'armée. Il ne pouvait plus tolérer cela et, même s'il restait au village, il devait encore effectuer du travail forcé. Il est venu pour la première fois en Thaïlande à l'age de 17 ans, et depuis a traversé la frontière à plusieurs occasions afin d'éviter le travail forcé. A l'âge de 14 ans, il a travaillé pour la construction d'une route qui se trouvait à quatre heures de marche de son village. Pendant les deux autres années, il a travaillé sur deux autres routes, mais seulement durant la saison froide. Parfois, il devait y aller chaque semaine, et parfois pendant deux semaines de suite, et même pendant un mois entier. Les ordres provenaient de la base militaire qui les donnait au chef du village. Le chef du village exigeait une personne par famille. Il n'a jamais été rémunéré pour le travail forcé. Il devait apporter sa propre nourriture. Lorsque les gens ne pouvaient pas travailler, ils devaient payer de 500 à 600 kyats par jour aux militaires. Il a vu une femme de son village qui travaillait sur la route et a décidé d'aller prendre une douche dans le puits. Elle fut suivie à cette occasion par un militaire qui l'a violée. Il ne connaissait pas les militaire, mais il sait qu'il n'a jamais été puni. Cette femme a tenté de se plaindre au chef de village, mais ce dernier n'a pas eu le courage de parler aux militaires. Il n'a pas vu d'autres abus alors qu'il travaillait sur la construction de la route. De plus, de l'âge de 15 à 17 ans, il a dû aller deux à trois fois par année effectuer du portage, tel que transporter de la nourriture, du riz, des munitions pendant environ cinq jours (à une occasion, il a dû marcher pendant cinq jours sans arrêt). L'ordre était donné au chef de village; si celui-ci ne pouvait trouver un nombre de porteurs requis, l'armée venait dans les villages et capturait les gens. On ne leur précisait jamais la durée du portage. Lorsque cela durait trop longtemps, le village devait collecter du riz afin de nourrir les porteurs et leur envoyait ce riz. Ils n'ont jamais reçu d'argent pour le portage, mais sa famille a dû payer 200 à 300 kyats aux militaires afin de trouver quelqu'un d'autres pour effectuer le portage. Tout dépendait du nombre de porteurs requis par l'armée. Ces sommes représentent ce qu'ils ont dû payer lorsqu'il avait entre 15 et 17 ans. Il ne sait pas de combien sont les paiements aujourd'hui. A l'âge de 16 ans, il a attrapé la malaria après dix-sept jours de portage alors qu'il transportait 16 kg de riz et de munitions. Il n'a reçu aucun traitement et a dû continuer à porter sa charge, bien qu'il était malade. Il a eu peur d'être tué s'il s'arrêtait. Il a vu d'autres personnes être tuées et, parmi elles, dix personnes furent tuées par des mortiers alors que des combats faisaient rage. C'était le cas parce que les porteurs marchaient toujours devant les soldats sur la ligne de front. Ils n'étaient pas attachés. Deux ou trois porteurs furent tués alors qu'il n'y avait pas de combat. Ils ont été fusillés. Ils venaient d'autres villages. On lui a raconté que des femmes porteurs auraient été violées. Finalement, il a dû aller environ 15 fois par année pendant deux ou trois jours à chaque fois afin de nettoyer le sol autour du camp militaire, en plus de creuser des tranchées, nettoyer les toilettes et creuser pour construire une nouvelle toilette. Durant la saison des pluies, il a dû amener une vache et des outils dans les champs afin de cultiver pendant deux mois. Il devait apporter sa propre nourriture mais pas les semences.
  3140. 188
  3141. Ethnie/religion: Karenni, bouddhiste
  3142. Age/sexe: 49 ans, masculin
  3143. Situation familiale: Marié avec cinq enfants
  3144. Activité professionnelle: Cultivateur
  3145. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Htee Talay, Kawkareik, Etat Kayin
  3146. Dans les cinq ou six dernières années, la plupart du travail forcé que sa famille a dû accomplir, y compris le portage, a été effectué par son fils et sa fille. Son expérience personnelle concernant le travail forcé pendant la même période est assez limitée. Il y a quatre ans, durant la saison froide, il voyageait dans un autobus de Kawkareik jusqu'au village de Thingannyinaung, lorsque les militaires du bataillon 44 ont arrêté le bus et ont amené tous les passagers sur un camion militaire. Ils les ont attachés deux par deux et les ont envoyés à Mepale sur la ligne de front avec le KNU. Le jour suivant, ils ont tous reçu une certaine charge de riz à transporter jusqu'au sommet de la montagne où le bataillon était basé. par la suite, ils ont dû transporter du riz dans la région de Kawkareik pendant 28 jours lorsqu'un groupe de personnes auquel il appartenait fut relâché (l'autre groupe ne l'a pas été). Dans son groupe de 75 personnes, quatre sont mortes (il n'a rien vu pour l'autre groupe). Il a vu plusieurs personnes qui ont été porteurs pendant plusieurs mois ne pas être relâchées et qui étaient malades. Ces porteurs ont été battus parce qu'ils étaient faibles et n'ont pas reçu d'eau. Il n'a vu personne être tué, mais plusieurs personnes furent battues. Certains sont morts de maladie et n'ont reçu que très peu de médicaments. Il a vu son cousin qui avait également été arrêté mourir de diarrhée; ils lui ont donné un peu de médicament, mais il a dû continuer à faire du portage le jour suivant et il est mort. Pendant cinq jours, en 1997, il a remplacé sa fille pour planter des arbres à caoutchouc pour l'armée. Il a dû payer des taxes de porteur et des taxes pour les routes. Il a dû donner des semences et des plantes à caoutchouc et payer ou envoyer une personne pour cultiver et surveiller le village. Les taxes de porteur étaient d'environ 600 kyats par mois et devaient être payées aux autorités lorsque sa famille ne voulait pas effectuer du portage. La taxe concernant la construction de la route était de 100 kyats par jour lorsque le travail sur la route n'était pas complété. En ce qui concerne les plantations de caoutchouc et le travail de culture, la contribution de sa famille dépendait de ce que l'armée avait besoin. En 1997, ce fut 64 contenants de riz en plus de 3 000 semences d'arbres de caoutchouc pour le village; il apportait 50 semences et 25 kyats par personne, totalisant 1 250 kyats; il devait également planter les semences. L'armée gardait les profits.
  3147. 189
  3148. Activité professionnelle: Infirmier
  3149. Le témoin travaillait comme aide-médecin en Thaïlande. Il a vu de nombreux anciens porteurs du Myanmar avec des cicatrices dues au poids excessif de leurs charges. Lorsqu'il y avait des combats à la frontière, il y avait encore plus de portage. Chaque mois, il a vu des nouvelles personnes avec des cicatrices suite au portage. De plus, il recevait des informations de l'hôpital de Myawady (au Myanmar) selon lesquelles tous les six mois six à sept civils étaient blessés par l'explosion de mines. Tous ces civils semblaient être des porteurs puisqu'ils avaient des cicatrices dues aux charges trop lourdes qu'ils devaient porter. Ces gens ne pouvaient recevoir de soins médicaux parce que la priorité était donnée aux militaires et les civils devaient payer pour tout. Ils devaient payer même pour les gants des infirmières et l'alcool utilisé. Habituellement, ceux-ci mouraient de complications d'infections dues aux blessures subies lors de l'explosion de mines.
  3150. 190
  3151. Ethnie: Karenni
  3152. Age/sexe: 43 ans, féminin
  3153. Situation familiale: Mariée avec quatre enfants (âgés entre 3 ans et 17 ans)
  3154. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawsaing, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 260 familles)
  3155. Depuis février 1997, les villageois ont dû travailler sans arrêt pour les militaires. En février, des centaines de militaires sont arrivés dans le village et ont confisqué la plupart des propriétés et du bétail appartenant aux villageois. En mars, les militaires du bataillon 547 ont ordonné aux villageois de nettoyer le sol autour de leur nouveau camp. Les villageois devaient couper des arbres et du bambou, égaliser le sol, construire des bâtiments militaires, construire des clôtures, creuser des tranchées et construire des abris autour du camp. Les villageois ont travaillé sur le nouveau camp jusqu'à la fin mai. Elle a personnellement dû travailler quatre jours par mois au camp. Elle a également envoyé sa fille qui avait 17 ans. Ces personnes n'étaient pas rémunérées et devaient apporter leur propre équipement. En avril, des villageois ont reçu l'ordre du bataillon 547 de construire une nouvelle école primaire. Ils ont dû, une fois de plus, mettre le sol à niveau jusqu'à la fin mai. Ce travail a dû être fait simultanément avec le travail au camp. Deux professeurs ont été envoyés depuis la ville et le village a dû engager un professeur. Les étudiants devaient payer pour aller à l'école. Quinze à 45 kyats par mois en plus de deux paniers de 21 kg de riz par année. Elle-même devait travailler dix jours par mois. Lorsqu'une personne ne pouvait pas travailler, elle devait engager un remplaçant ou payer 300 kyats par jour. Durant la saison des pluies, sa fille fut requise pour du portage à trois ou quatre reprises. Elle et sa fille plus âgée ont été requises au moins deux fois par mois pour cuisiner et faire le ménage dans le camp militaire. Elle a également dû transporter des messages et apporter des légumes. Son mari était en mauvaise santé. En octobre 1997, elle a dû vendre le fruit de ses récoltes et donner l'argent aux militaires. Les membres de sa famille avaient peur de se plaindre bien qu'il ne leur restait plus rien. Ils ont décidé de quitter le village en octobre 1997.
  3156. 191
  3157. Ethnie: Karenni
  3158. Age/sexe: 17 ans, féminin
  3159. Situation familiale: Célibataire
  3160. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawsaing, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 260 familles)
  3161. Le témoin a quitté le Myanmar en octobre 1997. En mars et avril 1997, elle a dû faire des travaux de construction pendant vingt jours par mois. Elle a également fait du portage à quatre occasions en 1997 (le portage fut effectué dans l'Etat Kayin). Elle fait du portage de Kawsaing jusqu'à Yauk Kaya (un voyage de deux heures) où elle devait transporter des marchandises; de Kawsaing jusqu'à Lampha, puis de Kawsaing à Peinnwegon, et enfin de Kawsaing jusqu'à Kyeikywa. Les militaires lui demandaient de transporter leurs sacs et ils transportaient eux-mêmes leurs armes et leur équipement. Les femmes devaient occasionnellement faire du portage pour de courtes distances. Elle-même a également vu des femmes âgées ainsi que des mères avec des enfants et des filles enceintes être utilisées comme porteurs. Elles devaient apporter leur propre nourriture et leurs provisions.
  3162. 192
  3163. Ethnie: Karenni
  3164. Age/sexe: 35 ans, masculin
  3165. Situation familiale: Marié avec trois enfants (de 5 à 12 ans)
  3166. Activité professionnelle: Cultivateur
  3167. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawsaing, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 260 familles)
  3168. Le témoin a quitté le Myanmar en 1997. Durant la saison chaude de 1997, il a dû participer à la construction d'un camp militaire et d'une école. Il a dû également effectuer du portage à de nombreuses occasions durant la saison des pluies de 1997 puisque les charrettes ne pouvaient pas être utilisées sur les routes endommagées. Il a dû voyager d'Ason, Kyeikywa, Kwiko et jusqu'au village de Thaung Pyaung. Il devait transporter des munitions, du riz et des marchandises. Les sacs de riz pesaient 22 kg. Il a été maltraité à une occasion lors d'un voyage à Kyeikywa en juillet 1997. Il fut battu parce qu'il était en retard après s'être perdu en raison de fortes pluies. Il n'a reçu aucun traitement médical lorsqu'il était malade. A une occasion, en octobre 1997, le chef du village et quatre villageois furent battus à titre de représailles pour la mort d'un capitaine lors d'une embuscade près de son village. En 1997, il a également dû nettoyer le sol entre Kawkareik et Kyeikdon afin de préparer ce dernier pour la construction d'une route. Il a dû travailler à cet endroit à six occasions, deux fois pendant sept jours et quatre fois pendant trois jours. Il recevait les ordres des bataillons 547 et 548. Alors que les villageois coupaient les arbres, les militaires apportaient les billots dans les villages et les vendaient. Il a décidé de quitter le Myanmar à la fin de 1997 parce qu'il ne pouvait plus travailler sur sa propre ferme.
  3169. 193
  3170. Age/sexe: 58 ans, masculin
  3171. Situation familiale: Marié avec huit enfants
  3172. Activité professionnelle: Agriculteur
  3173. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawsaing, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 260 familles)
  3174. Le témoin a quitté le Myanmar parce qu'il ne pouvait plus vivre avec la présence des militaires. Les militaires lui ont tiré dessus il y a un mois alors qu'il rentrait de son champ. Il ne connaissait pas la raison. Il a exécuté du portage à deux occasions en 1997. La première fut en juillet entre Kawaw et Kyeikdon. C'était un voyage d'une journée et il devait transporter des munitions. Le second périple fut de quinze jours. Il a dû aller à Kawkareik. Ce fut un voyage de sept jours. Il a dû dormir sous la pluie pendant six jours. Les militaires étaient protégés par des abris en plastique. Les porteurs étaient attachés avec des cordes aux mains et aux pieds afin qu'ils ne puissent s'échapper. Il a été battu à une occasion lorsque, une nuit, il s'est levé pour aller aux toilettes. Un membre de sa famille est mort après avoir été tué à la suite d'une journée de portage. Au début de 1997, les militaires ont commencé à arriver dans son village et ont demandé aux villageois de construire un camp. Ils devaient, entre autre chose, nettoyer le sol, couper les arbres et construire des baraques. Il a personnellement dû travailler dans ce camp pendant deux mois. Il a vu un villageois être battu à mort parce qu'il ne pouvait pas grimper dans un arbre tel que requis par le militaire. Le témoin a essayé de s'échapper avec 30 autres personnes, mais n'y est pas arrivé. On leur a ordonné de ne plus essayer de s'échapper et on les a menacés de tous les tuer dans le cas contraire. Les villageois étaient également maltraités lorsqu'ils travaillaient dans le camp. Aucune assistance médicale n'était fournie.
  3175. 194
  3176. Ethnie: Karenni
  3177. Age/sexe: 62 ans, féminin
  3178. Situation familiale: Mariée
  3179. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Antwe, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 32 familles)
  3180. Le témoin a quitté le Myanmar en novembre 1997. Elle fut nommée chef de village en mars 1997 et a tenu ce rôle pendant trois mois. Les militaires lui ont demandé d'organiser le travail des villageois afin de construire un camp à Hlawlay. Elle a divisé les familles en deux groupes sur une base rotative. Elle a personnellement dû exécuter du travail avec d'autres villageois et estime que le travail le plus dur fut celui de couper et de transporter des tiges de bambou du village jusqu'au camp, sur une distance de deux miles. Durant la saison des pluies de 1997, son village fut relocalisé à Hlawlay avec ceux de Klaw Chaw, Thawaw Thaw, Po Kaw et No Po Khee. Elle a dû partir à Hlawlay en juin 1997. A cet endroit, elle a dû construire des clôtures. En novembre 1997, les militaires ont ordonné aux villageois de leur donner deux tiers de leurs récoltes de riz. Son mari a effectué du portage en cinq occasions en 1997. Il fut battu lorsqu'il était trop lent et n'a reçu que du mauvais riz en tant que nourriture.
  3181. 195
  3182. Age/sexe: 35 ans, masculin
  3183. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  3184. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mikathut, Kawkareik, Etat Kayin (a vécu au village d'Antwe avant de quitter le Myanmar)
  3185. Le témoin a quitté le Myanmar en novembre 1997. En mars 1997, il a dû travailler sur la construction d'un nouveau camp militaire ainsi que de terrains de football pour les militaires. Il a dû également construire des clôtures et creuser des pièges autour du camp. Il a également dû faire du portage en deux occasions. Le premier voyage fut juste avant le festival de l'eau de 1997 au début avril. Il a dû aller de Kwilo pendant un voyage de trois jours. A cette occasion, il a dû transporter une charge de riz qui pesait 25 kg. Le deuxième voyage a duré neuf jours. En mai 1997, il a dû accompagner les troupes de la division 101 qui retournaient à Kawkareik. Il a dû transporter des charges d'au moins 40 kg.
  3186. 196
  3187. Age/sexe: 43 ans, masculin
  3188. Situation familiale: Marié avec six enfants
  3189. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Aunghlaing, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 100 familles)
  3190. Les militaires ont construit un camp dans son village en mars 1997. Il a personnellement dû travailler à diverses tâches telles que couper des arbres, construire des bâtiments ou creuser des tranchées. Il a travaillé pendant deux mois. Des enfants de 10 ans venaient également et coupaient les petites branches. Afin d'être exempté de ce travail, il était nécessaire de payer 200 kyats et un poulet pour chaque jour de travail raté. Durant la saison des pluies, il a travaillé comme porteur à deux reprises. Il a également reçu l'ordre de travailler deux jours par mois pour le camp militaire afin d'exécuter des petites tâches. Deux personnes sont mortes et deux autres ont été blessées lorsque les soldats karens ont ouverts le feu sur le camp à la fin de juillet 1997. Il a été requis avec trois autres personnes de transporter les blessés à Kawkareik. Huit militaires les accompagnaient. Puisque le voyage était long et les personnes devaient transporter de lourdes charges, les militaires ont demandé des porteurs additionnels. Les militaires ont autorisé la présence de quatre porteurs additionnels. Ils sont arrivés tard dans la nuit. Le jour suivant, le chef du village a été sévèrement battu et les villageois ont été requis de payer 35 000 kyats parce qu'ils avaient négligé d'informer les militaires que se préparait une embuscade du KNU.
  3191. 197
  3192. Age/sexe: 50 ans, masculin
  3193. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Peinnwe, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 100 familles)
  3194. Le témoin a quitté le Myanmar à la fin de 1997. Durant la saison chaude de 1997, il a dû travailler dans le camp militaire qui avait été construit près de son village. Durant la saison des pluies de 1997, il a travaillé en tant que porteur et a dû transporter les marchandises pour les militaires.
  3195. 198
  3196. Ethnie: Mon
  3197. Age/sexe: 18 ans, féminin
  3198. Situation familiale: Trois (elle, son mari et un bébé de 14 mois; elle avait quatre frères et soeurs)
  3199. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Taung Khun, Yebu, division de Tanintharyi (le village comptait 40 familles)
  3200. Le témoin est arrivé au camp de réfugiés de Mon en janvier 1998. Elle s'est mariée il y a trois ans. Ses parents sont venus dans ce camp avant elle. Elle a exécuté du travail forcé pour la construction du chemin de fer Ye-Dawei sur la section de Natkyizin. Elle a débuté ce travail environ sept mois avant d'arriver au camp (durant la saison des pluies), après une pause parce qu'elle avait accouché. Elle a dû faire ce travail sur le chemin de fer jusqu'à son cinquième mois de grossesse. Après elle a pu se reposer jusqu'à ce que le bébé ait 5 mois. Durant cette période où elle se reposait, elle a dû payer un remplaçant pour aller à sa place en trois occasions (à chaque fois, elle a dû payer 1 000 kyats et l'équivalent de 15 jours de nourriture). Les ordres pour le travail étaient donnés par l'armée au chef de village qui donnait lui-même les instructions aux villageois. Les militaires réquisitionnaient également des porteurs de la même façon en plus d'exiger de la nourriture et de l'alcool sur une base régulière. Le village était divisé en deux sections aux fins de l'exécution de ces travaux. Une personne par famille devait aller travailler pour chaque section de façon rotative pendant deux semaines. Les villageois devaient marcher pendant une heure afin d'atteindre le lieu de travail. Ils devaient apporter leur propre riz, leur sel et leurs poissons en plus de l'argent nécessaire pour acheter des légumes sur le lieu de travail. Il y avait quelques petites boutiques sur le lieu de travail qui avaient été installées par les femmes des militaires (les prix étaient plus élevés qu'à la normale). Sa famille a dû effectuer sept rotations de travail forcé. Elle y est allée elle-même à quatre occasions (trois fois avant sa grossesse et une fois après sa grossesse). Son mari a dû y aller également à trois occasions. Elle a dû y aller plus souvent parce que son mari était souvent loin en train d'effectuer du portage. Il y avait un camp militaire près du lieu de travail et les villageois devaient y rester pendant des périodes de deux semaines. Le travail qu'ils devaient effectuer consistait à ramasser des pierres et les casser en utilisant un petit marteau. C'était du travail très difficile. Ils devaient travailler de 6 heures le matin à 17 h 30, avec une pause de 11 heures à 13 heures. Ils devaient travailler durant la saison des pluies également. Les militaires supervisaient les travaux et surveillaient les travailleurs. Ils criaient et battaient les gens lorsque le travail était fait trop lentement. Elle a souvent vu des gens être battus par les militaires (au moins trois fois pendant une période de deux semaines). Lorsqu'elle est retournée pour travailler après sa grossesse, elle a dû amener son bébé sur le lieu de travail. Alors qu'elle travaillait durant le jour, elle devait laisser le bébé sans surveillance dans le camp. Elle a pu s'arranger avec d'autres villageois afin de travailler dans un endroit qui était près du camp pour pouvoir garder un oeil sur son bébé. Elle nourrissait le bébé avant de partir le matin et devait demander une permission afin d'aller le nourrir durant la journée. On lui permettait de prendre une pause le matin pour nourrir son bébé et une pause l'après-midi. Il y avait d'autres femmes de son village avec des bébés sur le lieu de travail, mais les bébés étaient assez âgés et cela ne posait pas de problèmes. Environ sept ou huit personnes de son village étaient des femmes et elles devaient toutes amener leurs enfants avec elles sur le lieu de travail. Il y avait environ quatre ou cinq enfants de moins de 5 ans de son village sur ce lieu de travail. Des gens d'autres villages travaillaient également sur le chemin de fer, mais chaque village se voyait assigner une section différente. Le camp où elle travaillait était constitué uniquement de gens de son village, mais il existait un autre camp d'environ 100 villageois dans les environs. La personne la plus jeune qui a dû travailler avait 14 ans alors que la plus âgée en avait 50. Lorsque les travailleurs étaient malades, ils ne recevaient aucun médicament (s'ils avaient de l'argent, ils pouvaient acheter des médicaments). Lorsque son bébé fut malade, elle n'a obtenu aucun médicament. Son mari a dû faire du portage depuis leur mariage il y a trois ans. Ceci correspond au moment où elle et son mari ont également dû commencer à effectuer du travail forcé. Les militaires demandaient habituellement dix porteurs de son village à la fois et ce nombre pouvait aller jusqu'à 15. Les militaires demandaient les porteurs environ trois fois par mois et les gardaient pour une période de sept jours. Parce que son mari effectuait souvent du portage et qu'elle devait effectuer du travail forcé, elle le voyait très rarement. Trois jours après leur mariage, son mari a dû aller faire du travail forcé sur le chemin de fer. Son mari n'avait pas de salaire régulier. Il travaillait sur la ferme de son père, ce qui signifie que son père nourrissait toute la famille. Parce qu'elle devait effectuer du travail physique difficile lorsqu'elle allaitait, elle n'avait pas toujours assez de lait. Ainsi, son bébé souffrait de malnutrition et d'épilepsie, maladies causées par le fait qu'il n'a pas bénéficié de soins adéquats. Depuis qu'elle est dans le camp de réfugiés de Mon, elle a pu envoyer son bébé à l'hôpital et a pu se reposer. Son mari n'a pas quitté le village avec elle et elle ne sait toujours pas où il se trouve. Elle l'a vu pour la dernière fois cinq jours avant de quitter le village. Il fut amené comme porteur par le bataillon 409 avec cinq autres personnes. On leur a dit qu'ils allaient au village de Mae Than Taung près de Kanbauk, ce qui fait qu'il n'a pas apporté avec lui beaucoup de nourriture. Après trois jours, toutefois, aucun des villageois n'était encore revenu et elle a appris que son mari avait été envoyé à Kanbauk par les militaires. Elle a décidé de s'enfuir parce qu'en l'absence de son mari il était impossible pour elle et son enfant de survivre. Tout le travail forcé reposait sur elle. Elle n'avait toujours pas reçu de nouvelles de lui et ne savait pas s'il était vivant. Il était difficile pour elle de quitter le village parce que les troupes avaient donné des ordres afin d'éviter que les gens voyagent. En effet, les troupes craignaient que les gens s'enfuissent à cause du travail forcé. Elle a réussi à aller au village de Yah Pu, et elle a rencontré quelqu'un du camp de réfugiés de Mon qui achetait des légumes. Elle a suivi cette personne jusqu'au camp. Ses parents étaient déjà dans ce camp depuis deux ans. Elle avait déjà fait l'expérience de la relocalisation. En février 1997, son village ainsi que deux autres ont été relocalisés de force avec un préavis de trois jours donné par le bataillon 409. On leur a dit que s'ils ne portaient pas, ils seraient tués. Aucun site spécifique de relocalisation ne leur fut donné et les villageois ont donc dû partir dans les villages avoisinants tels que Kywe Thone Nyi Ma et Kyauktaya (le village le plus proche étant à deux heures de marche). Environ trois mois plus tard, au mois de juin lorsque les pluies ont débuté, les villageois ont tenté de retourner dans leur région d'origine pour retrouver leur ferme. On leur a permis de retourner à leur village mais en respectant un couvre-feu très strict. Lorsqu'ils voulaient aller à l'extérieur du village pour cultiver, ils devaient payer 20 kyats et revenir avant la nuit. Lorsqu'une personne était trouvée hors du village sans permission, elle devait payer une amende de 1 000 kyats et était battue. Ceci est arrivé à des gens venus au village depuis d'autres villages et qui n'étaient pas au courant du couvre-feu. Les militaires étaient toujours dans le village. Ils restaient dans les maisons. Il y avait un camp militaire à Chaungphya qui se situait à une heure de marche. Ce camp avait été construit par les villageois, il y a environ quatre mois, ces derniers ont dû également fournir du bois et du bambou pour la construction. Chaque femme a dû couper 50 tiges de bambou afin de construire une clôture et chaque homme a dû couper une centaine de tiges de bambou. Cette tâche a pris environ trois à quatre jours par personne. Durant la construction du camp, les travailleurs se sont vus retirer leurs outils et leur nourriture durant leur période de repos afin qu'ils ne s'échappent pas. De plus, au moins deux villageois ont dû en permanence assurer la surveillance autour du village. A l'occasion, les militaires venaient vérifier si les gardiens dormaient et, lorsque c'était le cas, ces derniers devaient donner un poulet.
  3201. 199
  3202. Ethnie: Mon 199
  3203. Age/sexe: 56 ans, féminin
  3204. Situation familiale: Six (son mari, deux garçons, une belle-fille et un petit-fils)
  3205. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Sein Suay, Mintha, division de Tanintharyi, Yebyu (a vécu précédemment à Kywe Thone Nyi Ma)
  3206. Le témoin est arrivé dans le camp de réfugiés de Mon en janvier 1998. Elle a dû exécuter du travail forcé en participant à la construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy). Elle a dû exécuter ce travail il y a trois ans. Elle l'a fait à plusieurs reprises pendant deux semaines à chaque fois. Le village était divisé en deux ou trois groupes (dépendant du nombre de travailleurs requis à chaque fois), avec une personne de chaque famille qui devait y aller de façon rotative. Les travailleurs obtenaient moins de mois de congé entre les périodes de travail forcé. Le chef du village avait dressé une liste de tous les gens capables de travailler dans les villages, et lorsque leur tour venait ils devaient exécuter le travail forcé. Ainsi, un seul travailleur pouvait rester avec la famille et travailler à son propre compte. Ce qui veut dire que, lorsqu'il y avait quatre travailleurs dans une maison, trois devaient aller effectuer du travail forcé et un seul restait à la maison. Dans sa famille, le travailleur qui restait à la maison variait selon la rotation. Des travailleurs dans chaque famille se voyaient donner un numéro et, lorsque ce numéro était appelé par le chef du village, ils devaient aller exécuter le travail forcé. Dans sa maison, ses fils et elle-même étaient sur la liste, mais pas son mari puisqu'il souffrait de la polio. Récemment, les militaires ont trompé les villageois en leur disant qu'ils seraient payés pour leur travail sur le chemin de fer. Toutefois, lorsque ce travail fut complété, ils n'ont pas été rémunérés. Lorsqu'elle a commencé à exécuter du travail forcé pour ce chemin de fer, elle vivait à Kywe Thone Nyi Ma. A l'époque, le travail consistait à creuser des trous et construire des remblais. Elle a continué à faire ce travail après avoir déménagé à Sein Suay. A cet endroit, les villageois devaient ramasser des pierres. Le site de travail se situait à une heure de marche de son village, ce qui veut dire qu'elle revenait la nuit au village pour dormir. Elle quittait le village à 5 heures du matin et débutait le travail à 6 heures. On leur permettait de se reposer de 11 h 30 à 12 heures et le travail devait reprendre jusqu'à 18 heures. Elle revenait à son village vers 19 heures. Selon les arrangements prévus par le chef de village, les femmes devaient travailler dans la journée (de 6 heures à 18 heures), et les hommes devaient travailler de 18 heures à minuit. Cet arrangement était prévu afin que les hommes puissent travailler à leur propre compte durant la journée. De plus, le village craignait les mauvais traitements infligés aux femmes par les militaires lorsqu'elles devaient travailler la nuit. Malgré cela, il y eut des problèmes avec cet arrangement parce que lorsque les hommes étaient absents durant la soirée les militaires venaient voler des animaux appartenant au village. Quelques femmes ont également été violées durant ce temps, et certaines furent emmenées de force pour vivre avec les militaires. Elle connaît cinq femmes qui ont été violées de cette façon et deux qui furent amenées de force par les militaires. Ceci s'est passé il y a deux ou trois mois. Deux femmes ne sont jamais revenues. Le travail était très difficile. Elle a toujours été en bonne santé mais, depuis l'année dernière, elle respire avec difficultés et tousse constamment. Elle pense que cela est dû au fait qu'elle doit travailler de longues périodes et transporter des charges très lourdes sans pouvoir se reposer. Durant le travail, les hommes étaient régulièrement battus par les soldats, les femmes ne se faisaient qu'insulter. A une occasion, alors que son fils effectuait du travail forcé, on lui a ordonné de trouver de l'alcool pour les militaires. Il a mis trop de temps pour trouver l'alcool et fut battu. Le chef du village dut trouver un bâton et battre son fils jusqu'à ce que le bâton se brise. Il fut gravement blessé et dut être soigné. Il a gardé des cicatrices. Elle a vu deux autres personnes être battues durant le travail forcé. Parce que les deux hommes se disputaient entre eux, les militaires ont décidé de les battre et les ont contraints à effectuer dix tours d'environ 20 mètres en saut de grenouille. Ceci était une punition classique pour les gens lorsque les militaires estimaient que le travail n'était pas fait de façon adéquate. A une occasion, elle a vu une personne âgée être contrainte d'effectuer cette punition. Les villageois ont également dû faire du portage. En tout temps, deux porteurs du village étaient requis pour effectuer du travail au camp militaire de Eindayaza. Ceci a duré une année. Les gens partaient pour une période de deux semaines et étaient remplacés par la suite. Son fils l'a fait à deux reprises pendant deux semaines à chaque fois. Il n'a jamais été battu pendant ce travail. L'année dernière, les villageois ont été contraints de construire un camp militaire au village de Siu Ku près de Kaleinaung. Quinze personnes de chaque village de la région furent requises pour effectuer ce travail. Le camp se trouvait à deux jours de marche de leur village, et les villageois devaient travailler pendant des périodes de sept jours. Les gens de sa famille y sont allés à trois occasions (son fils plus âgé y est allé deux fois et son fils plus jeune une fois). Elle s'est enfuie de Kywe Thone Nyi Ma parce qu'il y avait trop de travail forcé. Les hommes travaillaient comme pêcheurs, mais il était difficile de gagner sa vie à cause du travail forcé. Elle a dû vendre sa charrette parce que les militaires l'utilisaient souvent pour transporter des pierres ou de la terre. Elle a quitté en laissant la plupart de ses biens derrière elle. Plusieurs personnes se sont enfuies en même temps qu'elle. Lorsqu'ils sont arrivés dans le nouveau village (Sein Suay), ils ont trouvé que la situation n'était pas meilleure. Ainsi, il y a un mois, ils ont quitté pour se rendre au camp de réfugiés. Elle est venue parce que ses fils s'étaient également enfuis et qu'elle dépendait d'eux. Ses fils ont fui parce qu'ils n'avaient plus assez de temps pour travailler à leurs propres affaires. Elle a réussi à s'enfuir jusqu'au camp en prétextant être une vendeuse de poissons lorsqu'elle traversait un barrage militaire.
  3207. 200
  3208. Ethnie: Mon
  3209. Age/sexe: 35 ans, féminin
  3210. Situation familiale: Sept (elle, son mari, cinq enfants)
  3211. Activité professionnelle: Cultivateur (riz)
  3212. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paukpingwin, Yebyu, division de Tanintharyi (le village comptait 300 familles)
  3213. Le témoin est arrivé au camp de réfugiés de Mon à la fin de 1997 (il y a trois mois), depuis Paukpingwin, parce qu'il ne pouvait plus tolérer la quantité de travail forcé. Elle a dû exécuter du travail forcé pour la construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy). Ce travail, qui a débuté il y a deux ou trois ans, a recommencé en septembre-octobre 1997 à la fin de la saison des pluies. Les ordres concernant le travail forcé venaient des militaires via le chef du village qui donnait des instructions aux villageois. Une personne par famille devait s'y rendre. Elle a dû y aller elle-même parce que son mari était régulièrement loin en train d'effectuer du portage ou devait travailler dans ses champs (il était difficile de gagner sa vie: l'année dernière, ils ont dû survivre uniquement avec de la soupe au riz pendant une période de deux mois). Elle y est allée environ 15 fois, et à chaque fois pour une période d'un mois. Son mari n'a pas eu à travailler sur la construction du chemin de fer, mais il a dû effectuer du portage en plus de son propre travail. Pendant le mois de travail forcé, les travailleurs obtenaient une journée de congé à chaque dix jours. Le travail constituait à briser des pierres avec un marteau. Lorsqu'elle travaillait, elle laissait ses enfants au village (le plus jeune avait 2 ans, le plus vieux 10 ans). Le lieu de travail se trouvait à deux heures de marche du village (ils revenaient au village chaque nuit). Ils devaient quitter le village à 6 heures et revenaient le soir à 20 heures. Ils n'avaient droit qu'à une demi-heure de pause autour de midi. Il y avait un total d'environ 300 villageois qui travaillaient ensemble au même moment. Les villageois étaient maltraités lorsqu'ils exécutaient ce travail. Elle a elle-même été frappée à plusieurs reprises par un soldat pendant qu'elle travaillait parce qu'elle était fatiguée et ne pouvait plus faire le travail de façon adéquate. Elle a également vu d'autres personnes être maltraitées, habituellement battues avec une arme. Certaines personnes furent sérieusement blessées. Son oncle a été grièvement battu et a dû recevoir des traitements médicaux pendant un mois (aucun traitement médical n'était fourni par les autorités). Le médecin du village a fourni les soins et ces derniers furent payés par les villageois. Durant ce mois, son fils a dû aller travailler à sa place. Après un mois de convalescence, son oncle a dû recommencer à travailler. Il a mis deux mois pour récupérer totalement. Il était dangereux pour les femmes de marcher seules la nuit parce qu'elles pouvaient être agressées sexuellement par les militaires. Ceci est arrivé à deux ou trois femmes de son village, y compris sa propre soeur qui fut violée. Le chef du village s'est plaint au commandant militaire qui n'a fait qu'encourager le soldat à épouser la fille en question. Le militaire a refusé, prétextant que la femme était mon et qu'il était birman. Ce viol a eu lieu en septembre dernier lorsque sa soeur avait 15 ans. Son mari a dû effectuer du portage il y a cinq ans. Il y est allé à plusieurs reprises, habituellement trois fois par année. La pire fois fut en 1997 lorsqu'il a dû effectuer du portage trois fois durant trois mois à chaque fois. Les années précédentes, il était généralement absent pendant un mois à la fois. Certaines personnes pouvaient payer des remplaçants pour effectuer du portage, mais sa famille ne pouvait se le permettre. Lorsque son mari partait en tant que porteur, elle ne savait pas où il allait et combien de temps il resterait loin. Il fut battu à une reprise et est revenu à la maison avec de sérieuses blessures. D'autres porteurs sont morts durant le portage. Habituellement, cinq personnes du village étaient amenées comme porteurs. Son mari a déclaré qu'il devait transporter les munitions durant le portage. Il revenait toujours à la maison faible et amaigri et souvent avec des blessures, suite aux charges excessives qu'il devait transporter. Au cours des dernières années, elle a eu connaissance d'au moins dix porteurs de son village qui sont morts durant le portage. Cinq de ces dix personnes sont mortes en 1997. Les villageois ont vu quelques-uns des corps avec des blessures témoignant des violences perpétrées par les militaires. Il y a environ six mois, deux femmes ont été amenées comme porteurs, furent violées et tuées durant le portage. Elles avaient environ 16 ans et n'étaient pas mariées. Il était difficile de survivre lorsque son mari était loin pour exécuter du portage parce qu'elle devait effectuer tout le travail forcé. La situation était particulièrement difficile l'année dernière lorsque son mari était loin, bien que le travail forcé sur la construction du chemin de fer était moins astreignant puisqu'il n'y avait aucun militaire qui surveillait les travailleurs. Durant ce travail, elle devait régulièrement ramasser des légumes ou de la nourriture dans la brousse ou emprunter de la nourriture à d'autres membres de sa famille. Lorsque ses enfants étaient malades, elle devait emprunter de l'argent afin d'acheter les médicaments. Dans son village, environ 20 à 30 familles étaient dans une situation similaire à la sienne, c'est-à-dire lorsque l'homme de la maison était loin pour cause de portage la femme devait exécuter tout le travail forcé. D'autres familles étaient capables de payer des remplaçants. Il coûtait 1 000 kyats pour payer un remplaçant en tant porteur, indépendamment de la durée (ceci venant du fait que les militaires n'informaient jamais les porteurs à l'avance de la durée de leur travail). Il y avait un camp militaire dans son village qui fut construit par les villageois il y a environ trois ans. Elle a dû exécuter ce type de travail à cinq occasions. Elle devait transporter des tiges de bambou qui devaient être utilisées pour la construction. C'était un camp d'une grandeur considérable avec plusieurs bâtiments et qui fut terminé l'année dernière durant la saison des pluies. Quarante villageois étaient impliqués en même temps sur ce travail, hommes et femmes. Après la construction des bâtiments, de clôtures et de tranchées, le travail n'était pas terminé puisqu'il y avait constamment des rénovations à entreprendre. Cinq personnes toutes les nuits étaient requises pour des tâches de surveillance. Lorsque c'était au tour de sa famille de s'acquitter des tâches de surveillance, son mari était absent et c'est donc elle qui devait y aller, sauf lorsque sa cousine l'aidait par sympathie. Les militaires maltraitaient fréquemment les villageois. Les militaires habitaient dans les maisons des villageois sans leur permission et ils abusaient des femmes lorsque leurs maris étaient absents. Elle a eu connaissance d'au moins dix incidents de cette nature depuis la dernière saison des pluies. Habituellement, les militaires venaient deux par deux. Durant la dernière saison des pluies, la région où elle habitait fut inondée. A un moment donné, alors qu'elle était sur le site de travail, elle a dû passer un jour et une nuit dans un arbre sans nourriture. Ceci à cause des inondations. Les villageois s'étant plaints, les militaires ont finalement construit un radeau en bambou et l'ont fait descendre de l'arbre et ramenée au village. Une personne s'est noyée. L'inondation a détruit le camp ainsi que les remblais qu'ils avaient construit. Peu avant leur départ pour le camp de réfugiés, sa famille a dû achever une tâche qui consistait à casser l'équivalent de 10 mètres cubes de pierres. En octobre 1997, alors que son mari était absent pour effectuer du portage, elle n'a pas réussi à compléter son quota de pierres concassées, ce qui fait que les militaires sont venus et ont détruit sa maison. Après cet incident, elle est allée vivre avec une autre famille dans le village de Aleh Sakhan. Dans ce village, on lui a ordonné de terminer sa tâche concernant les pierres et, une fois terminée, elle a fui avec ses enfants au camp de réfugiés. Elle a mis quatre jours à pied jusqu'au camp. Son mari n'était pas encore revenu du portage, mais il a appris la nouvelle à son retour. Il a également décidé de fuir. Son mari est arrivé au camp de réfugiés il y a deux mois (un mois après elle). Elle a neuf soeurs. Les cinq soeurs les plus âgées, qui avaient également leur propre famille, ont aussi dû effectuer du travail forcé sur le chemin de fer. Seulement deux de ses soeurs avaient leur mari dans le village. Les maris des trois autres étaient partis travailler en Thaïlande et elles avaient perdu contact avec eux depuis deux ans. Pour ces trois-là, la vie était très difficile. L'une d'entre elles est d'ailleurs partie pour le camp de réfugiés avant qu'elle-même ne parte. Ses quatre autres soeurs ne sont toujours pas mariées et vivent avec ses parents. Elle est venue au camp de réfugiés avec sa famille ainsi que quatre autres familles. Elle connaît environ 30 familles qui ont quitté le village récemment afin d'échapper au travail forcé qui impliquait qu'elles n'avaient plus assez de temps pour travailler à leur propre compte.
  3214. 201
  3215. Ethnie: Mon
  3216. Age/sexe: 48 ans, masculin
  3217. Situation familiale: Marié avec six enfants
  3218. Activité professionnelle: Agriculteur
  3219. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Chaung Phya, Natkyizin, Yebyu, division de Tanintharyi (le village comptait 40 familles)
  3220. Le témoin est venu au camp de réfugiés de Mon à la fin de 1997 (il y a trois mois) afin d'échapper au portage et au travail forcé qui ne lui laissait plus le temps de gagner sa vie. Vingt personnes étaient requises de son village pendant quinze jours pour effectuer du travail forcé sur la construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy). Le site de travail se trouvait loin du village, ce qui fait que les villageois devaient y rester pendant toute la période de travail. Ils devaient s'occuper de leur propre transport ainsi que de leur nourriture (ils ne pouvaient pas transporter toute la nourriture et devaient se munir d'environ 2 500 kyats pour acheter de la nourriture sur place). Le lieu de travail était situé près de Kaleinaung, et cela leur prenait plus d'une journée de marche pour y accéder (avec un arrêt la nuit à Kanbauk). Le travail a débuté il y a trois ou quatre ans vers 1993. Son village était divisé en deux groupes afin d'organiser le travail forcé. Les villageois de chaque groupe devaient effectuer le travail en rotation. Chaque groupe travaillait pendant cinq jours puis obtenait 15 jours de repos, et ainsi de suite. Les militaires choisissaient un chef de groupe parmi les villageois, et ce dernier était sévèrement puni et parfois battu lorsque les travailleurs s'enfuyaient. Pour cette raison, personne ne voulait être chef de groupe et ces derniers préféraient souvent s'enfuir. Il a vu plusieurs chefs de groupe se faire punir. Un chef de groupe de son village fut sévèrement battu lorsque certains des travailleurs se sont enfuis. Ce chef de groupe a dû fournir des travailleurs remplaçants et il s'est enfui lui-même par la suite. Le travail consistait à étaler de la boue afin de niveler le sol. Le lieu de travail se situait à une heure de marche du camp. Les travailleurs devaient effectuer un tirage au sort afin de décider qui de chaque section irait travailler. Ils devaient travailler de 6 heures le matin à 17 h 30, avec une pause de 90 minutes au milieu de la journée. Lorsqu'ils terminaient leur tâche avant 17 h 30, on leur donnait d'autres travaux à effectuer, ce qui fait qu'ils prenaient leur temps et n'essayaient pas de terminer leur tâche avant la fin de la journée. La tâche la plus difficile fut celle de construire des remblais et de ramasser des pierres. Les hommes et les femmes (même les femmes enceintes, bien qu'il n'en ait pas vu dans son groupe) ont effectué ce travail. Les travailleurs les plus âgés avaient environ 60 ans et les plus jeunes entre 15 et 16 ans. Certaines femmes amenaient leur enfant avec elles sur le lieu de travail. Certains travailleurs prenaient des pauses en secret durant la journée. Lorsque les militaires les trouvaient, ils les battaient. Il est la seule personne de sa famille qui est allé effectuer ce travail parce qu'il était enfant unique et qu'il était assez âgé pour y aller. Il avait également une fille qui aurait pu y aller, mais il a préféré ne pas l'envoyer. Sa femme devait s'occuper des enfants. A certaines occasions, ils ont dû vendre certains de leurs biens ou emprunter de l'argent en attendant les profits de la récolte. Il y avait un camp militaire à côté de son village qui avait été construit grâce au travail forcé des villageois. Le camp a été construit à la même époque où les travaux forcés sur le chemin de fer ont débuté. Son village a dû construire le camp en utilisant son propre matériel ou celui de villages avoisinants. Une fois le camp terminé, il devait y avoir quatre villageois en permanence afin d'effectuer du travail forcé. La responsabilité d'effectuer une rotation incombait aux villageois. Toutefois, ces quatre travailleurs étaient maltraités par les militaires. Les villageois étaient battus par les militaires juste pour le plaisir. Ils n'avaient droit à aucun temps de repos. La plupart des villageois ne pouvaient parler birman, ce qui fait que, lorsqu'ils recevaient les ordres des militaires, ils ne comprenaient pas toujours. Lorsqu'il n'y avait pas de travail à effectuer, les militaires ne leur permettaient pas de se reposer mais trouvaient plutôt d'autres tâches. Certaines femmes furent violentées par les militaires. A cause de ces mauvais traitements, après un certain temps, aucun des villageois n'a voulu aller faire ce travail. Le village préférait verser 26 000 kyats par mois afin d'engager quatre personnes pour effectuer ce travail. Les militaires venaient également régulièrement au village afin d'amener avec eux des porteurs (trois à six à la fois). Les personnes ainsi choisies devaient effectuer du portage durant cinq à six jours à la fois. Les militaires utilisaient les porteurs de cette façon trois à quatre fois par mois. Il a dû lui-même effectuer du portage à deux occasions, il y a deux ans. La première fois a duré quatre jours, la seconde fois trois jours. Il a dû transporter de la nourriture et du riz qui pesaient environ 22 kg. Les porteurs ne bénéficiaient parfois d'aucune pause durant la journée, bien qu'ils devaient marcher sur de longues distances. Il y avait deux types de porteurs: ceux qui avaient été fournis par le chef du village et ceux qui avaient été amenés directement par les militaires. Ceux qui avaient été fournis par le chef du village ne pouvaient s'enfuir, mais ceux qui avaient été amenés directement avaient toujours la possibilité de s'échapper. Plusieurs personnes furent battues durant le portage. Il a lui-même été battu durant son premier voyage de portage. A cette époque, il était utilisé comme guide pour les militaires et ils l'ont battu lorsque ceux-ci n'étaient pas satisfaits des chemins qu'il leur avait montrés. On l'a frappé au visage et il a gardé de graves blessures pendant plusieurs jours. Heureusement, il a pu s'en remettre. La situation actuelle concernant le portage est moins dramatique qu'avant le cessez-le-feu avec les Mons. Dans son village, il y avait des gens d'origine mon et tavoyan. Les militaires favorisaient habituellement les Tavoyans (ils leur donnaient de la meilleure nourriture et du travail plus facile). Les militaires étaient également impliqués dans l'extorsion de fonds. Les militaires envoyaient des ordres aux chefs des villages afin que ces derniers leur fournissent des crevettes ou des poulets, ou d'autres types de nourriture. Lorsque le village n'avait pas ce que les militaires demandaient, il devait l'acheter. Parfois, sept ou huit soldats venaient dans le village et prenaient un porc ou tout ce qu'ils désiraient. Parfois, ils s'amusaient à jeter des pierres sur les poulets, mais personne ne pouvait se plaindre. Les soldats ont également violé les jeunes filles de son village. Une jeune fille mon fut violée par des soldats lorsque son mari était absent en train d'effectuer du travail forcé. Les militaires étaient venus au village et avaient demandé un porc. Le village a répondu qu'il ne pouvait en donner un. Les militaires ont donc demandé la moitié d'un porc et, après s'être saoulés, ils se sont promenés dans le village et ont aperçu la jeune fille. Ils ont essayé de lui parler, mais elle ne parlait pas le birman. Ils l'ont par la suite violée. Une autre femme fut attrapée par un des soldats, et ce dernier l'a mise sur ses épaules pendant qu'un autre soldat soulevait son sarong. Cette femme s'est mise à hurler et d'autres villageois sont venus l'aider, ce qui a mis un terme à l'incident. Ceci s'est passé l'année dernière. Il pense que cinq ou six femmes de son village furent violées depuis le cessez-le-feu en 1995, mais les femmes ne veulent pas en parler. Ces viols se passent habituellement lorsque leurs maris sont loin pour effectuer du portage ou du travail forcé. Dans un autre cas, un homme du village de Natkyizin avait une très jolie fille et un des soldats voulait l'épouser. Le père de la jeune fille n'était pas d'accord et s'est plaint au commandant du soldat qui a puni ce soldat. Pour prendre sa revanche, le soldat a emmené le père comme porteur et a coupé sa gorge alors qu'il effectuait du portage. Les familles pauvres ne pouvaient se permettre de donner de l'argent ou des pots-de-vin aux militaires, ce qui fait que ces derniers les battaient et leur disaient qu'elles devaient faire comme les autres villageois. Il était lui-même dans cette situation, ce qui fait qu'il a préféré fuir en secret avec sa famille. Il a dû venir en secret parce que les militaires arrêtaient les gens lorsqu'ils pensaient que ceux-ci étaient sur le point de s'échapper. Il a mis un mois afin d'atteindre le camp depuis son village. Son village comptait à l'époque 70 à 80 familles. Lorsqu'il l'a quitté, il n'en restait plus que 40 et maintenant il y en avait encore moins. Certains des villageois ont fui vers d'autres villages, alors que d'autres sont venus au camp de réfugiés. Avant le cessez-le-feu, peu de gens fuyaient. Le portage était plus difficile à cette époque, mais tout le village n'était pas affecté. Les gens étaient amenés de temps à autre pour le portage. Certains étaient tués lorsqu'ils étaient suspectés d'avoir des contacts avec les rebelles. Après le cessez-le-feu, l'extorsion de fonds et le travail forcé ont augmenté, ce qui a affecté tout le village et qui explique que plus de gens ont fui. De plus, comme les bataillons militaires de la région changeaient constamment, ceci signifiait qu'il y avait en permanence du travail forcé et de l'extorsion parce que chaque bataillon ne se préoccupait pas de ce qui avait été fait sous le bataillon précédent.
  3221. 202
  3222. Ethnie: Tavoyan
  3223. Age/sexe: 38 ans, masculin
  3224. Situation familiale: Marié avec six enfants
  3225. Activité professionnelle: Pêcheur
  3226. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mintha, Yebyu, division de Tanintharyi (le village comptait 70 familles)
  3227. Le témoin est venu au camp de réfugiés mon il y a trois ans. Il a dû effectuer du travail forcé sur le chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy), près de Yah Pu. Il a tout d'abord effectué ce travail une année avant de venir au camp. Il recevait les ordres concernant ce travail par le chef du village qui nommait lui-même les villageois. Chaque famille devait fournir 80 kyins de pierres concassées. Aucune durée ne leur était fixée, mais elle avait environ 15 jours pour produire cette quantité. Le lieu de travail était loin du village et elle mettait une journée en bateau ou en voiture pour s'y rendre. Il a effectué ce travail à six ou sept occasions et d'autres membres de sa familles ont également dû en faire. Ainsi, ses trois enfants les plus jeunes devaient être laissés aux bons soins de sa mère. Lui, sa femme et ses trois enfants plus âgés (21, 20 et 17 ans) ont dû effectuer du travail forcé. Il n'y avait pas de militaires sur le lieu de travail. Les travailleurs les plus âgés avaient environ 60 ans. Il y avait également des enfants d'environ 8 ou 9 ans. On avait dit aux travailleurs qu'ils recevraient environ 300 kyats par kyin qu'ils allaient produire, mais ils n'ont en fait rien reçu. Il a dû payer à sa mère 100 kyats par jour afin qu'elle puisse acheter de la nourriture pour les trois enfants dont elle s'occupait. Il devait également payer 300 kyats par jour comme taxe pour les trois enfants qui ne pouvaient effectuer le travail forcé puisque tout le village avait reçu l'ordre de se rendre sur le lieu de travail. Tout cet argent était perdu puisqu'ils n'ont jamais rien reçu pour leur travail. Il a également dû effectuer du portage en 1994, mais il a préféré payer 9 000 kyats afin d'engager un remplaçant. Le portage durait environ de dix à quinze jours. Personne de son village n'a été grièvement blessé en effectuant du portage, bien qu'il ait vu plusieurs porteurs être battus par les militaires. Il y avait un camp militaire dans son village. Le village tout entier avait été contraint de construire ce camp militaire il y a environ quatre ans. Il a participé à ce travail. Il devait couper du bambou afin de délimiter le périmètre du camp. Il devait effectuer ce travail pour des périodes de trois jours à la fois. Les ordres concernant ce travail émanaient du chef du village. Il y avait environ 50 personnes qui exécutaient ce travail à la fois, cinq ou six qui provenaient de son village. Ils ont dû effectuer tout le travail de construction, c'est-à-dire depuis le tout début niveler le sol et creuser des tranchées et des abris. Le village n'a pas eu à payer de pots-de-vin aux militaires. Son village était constitué principalement de Tavoyans, bien que, dans la région, les Mons constituaient la majorité. Il n'estime pas que la situation était différente entre les Mons et les Tavoyans dans cette région.
  3228. 203
  3229. Ethnie: Mon, Birman
  3230. Age/sexe: 68 ans, masculin
  3231. Situation familiale: Quatre (lui, sa femme et deux filles mariées)
  3232. Activité professionnelle: Cultivateur
  3233. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Ye, Etat Mon
  3234. Le témoin a organisé un groupe de travailleurs afin que ceux-ci effectuent du travail sur le chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy) en 1996. Ceci fut réalisé par l'intermédiaire du chef local du LORC. Il avait négocié avec les militaires un paiement de 1 200 kyats par kyin de pierres concassées (il recevait un certain pourcentage sur ce montant); ainsi, ce n'était pas du travail forcé puisque les travailleurs gagnaient un peu d'argent. Le remblais pour le chemin de fer devait être complété selon les indications fournies par les militaires. A certains endroits, ce travail était facile (par exemple lorsque le sol était facilement malléable ou que la région était plate), mais, à d'autres endroits, ce travail était très difficile (par exemple lorsque le chemin de fer devait traverser une colline). De plus, les travailleurs étaient responsables de leur propre équipement et devaient remplacer régulièrement les paniers qu'ils utilisaient pour transporter les pierres. Une personne pouvait prendre de dix à quinze jours pour compléter 10 kyins. Il se souvient qu'à une occasion des gens haut placés sont venus sur le lieu de travail pour prendre des photos. Les militaires supervisaient le travail. Ils n'ont pas battu les travailleurs mais leur prenaient leur nourriture. En plus d'être un agent pour les travailleurs, il a également effectué du travail pour son propre compte. Il a tout d'abord effectué 10 kyins de pierres pour un remblais, ce qui était très difficile puisqu'il travaillait à flanc de montagne, et cela impliquait de transporter des contenants très lourds pour la construction du remblais. Ceci lui a pris 12 jours. Il a, par la suite, travaillé sur une autre partie de la construction et a effectué 10 kyins de roche concassée. Cela lui a pris six jours. Il avait 216 travailleurs qui travaillaient sous ses ordres mais, lorsque le moment fut venu d'être payé, les militaires ont refusé de le payer. Le bataillon responsable de ce travail était le bataillon 106. Il a essayé d'obtenir un accord avec le commandant afin que ce dernier puisse garder 100 kyats par kyin et que lui-même toucherait 100 kyats par kyin et que 1 000 kyats iraient aux travailleurs. Le commandant a refusé et a finalement payé 700 kyats par kyin, indiquant que c'était un ordre qui devait être accepté. Le commandant a donc gardé les 500 kyats par kyin supplémentaire pour lui-même. Les 216 travailleurs avaient à ce moment complété 486 kyins. Après cet incident, plus personne n'a voulu effectuer le travail, ce qui fait que les militaires ont dû avoir recours au travail forcé, comme ils le faisaient auparavant. Alors qu'il travaillait sur le chemin de fer, il a vu plusieurs travailleurs sur le lieu de travail. Il estime qu'environ 6 000 à 7 000 personnes travaillaient en même temps sur ce projet, y compris des femmes et des enfants. A l'occasion, les militaires qui supervisaient le travail volaient des pierres aux villageois. Ils vendaient par la suite ces pierres à d'autres villages qui pouvaient payer afin de ne pas avoir à faire le travail.
  3235. 204
  3236. Ethnie: Mon
  3237. Age/sexe: 32 ans, masculin
  3238. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  3239. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  3240. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Tada Pyat, Kya In Seik Gyi, Etat Kayin (le village comptait 60 familles)
  3241. Le témoin est venu au camp de réfugiés Mon au début de 1998. Il a effectué du travail forcé en mars- avril 1997 sur la construction de la route de Kya In Seik Gyi jusqu'à Taungbauk. C'était une nouvelle route qui traversait les terres agricoles. La construction de cette route a débuté en 1996 durant la saison sèche. Le travail fut ordonné par les militaires qui ont demandé une réunion avec tous les villageois afin de les informer qu'une personne par famille devait se rendre sur le lieu de travail. Les militaires les ont informés que tout villageois qui refusait de se rendre serait puni. On leur a également dit que, lorsqu'il n'y avait pas de travailleur mâle dans une famille, une femme devait s'y rendre. Le lieu de travail se situait à une journée de marche du village. Lorsqu'ils y arrivaient, ils devaient y travailler pendant quatre jours. Les villageois devaient apporter leur propre nourriture. Il a effectué ce travail environ cinq fois avant la saison des pluies. A chaque occasion, il a dû travailler pendant quatre jours, avec une journée de marche pour revenir à la fin. Environ 60 villageois s'y rendaient à la fois, y compris une vingtaine de femmes. Il y avait également environ dix enfants de moins de 15 ans, le plus jeune ayant entre 12 et 13 ans. Le travail consistait à ramasser de larges pierres, à les concasser et à les étendre sur un remblais. Tous les villageois devaient effectuer le même type de travail. Il a vu environ 1 000 personnes travailler sur cette route. Chaque personne se voyait assigner une section de la route à accomplir. Les travailleurs devaient débuter à 6 heures du matin et terminaient à 18 heures. Les périodes de repos dépendaient des arrangements effectués par le chef du village. En général, les travailleurs obtenaient une heure de pause au milieu de la journée. Aucun arrangement n'était prévu concernant la nuit, ce qui fait que les travailleurs devaient dormir sur place. Ils devaient dormir sur le sol près du site de construction. Il y avait des militaires sur le site de travail. Ils ne supervisaient pas le travail puisque cette tâche incombait au chef du village qui était responsable du travail. Toutefois, les militaires patrouillaient autour du site et s'assuraient que le travail était effectué. Le village devait également fournir des porteurs pour les militaires. Six personnes sur une base rotative devaient effectuer ce travail tous les trois jours. Le chef du village était responsable d'organiser la rotation. Il devait se renseigner sur le lieu où les troupes se situaient et envoyer six nouveaux porteurs afin de remplacer les six qui étaient déjà sur place. Parfois, il était difficile de localiser l'emplacement des troupes, ce qui fait que deux semaines ou même un mois pouvait passer avant que le chef du village puisse envoyer de nouveaux porteurs. Ceci se produisait tout particulièrement lorsque les troupes étaient très éloignées, tel que dans les cas où elles menaient des offensives contre les troupes du KNU. Il a lui-même effectué du portage à environ dix reprises depuis juin 1997 pour une période allant de trois jours à neuf jours. Durant le portage, il devait transporter des munitions. Il devait les transporter toute la journée et même parfois la nuit. Les porteurs obtenaient peu de repos, surtout lorsque les troupes étaient pressées. Les porteurs recevaient uniquement une petite portion de riz et un peu de poisson. Ils dormaient habituellement dans la jungle ou dans une plantation, ou encore dans un village karen. Lorsque les porteurs étaient lents, ils étaient battus par les militaires. A une occasion, il a dû effectuer du portage avec son frère, et ce dernier fut battu parce qu'il ne marchait pas assez rapidement. Les soldats l'ont roué de coups et l'ont frappé avec un couteau. Après cet incident, son frère ne pouvait plus marcher normalement. On lui a donc permis de marcher sans aucune charge mais, le jour suivant, il a dû de nouveau transporter sa charge. Il a été lui-même témoin de cet incident. Les militaires l'ont insulté mais ne l'ont jamais battu. Il a toutefois vu plusieurs autres porteurs être battus par les militaires, certains de son village. Les militaires battaient toujours les porteurs qui ne pouvaient travailler de façon satisfaisante. Il en a été témoin à chaque fois qu'il a dû exécuter du portage. Les porteurs n'étaient jamais autorisés à retourner à la maison, même s'ils souffraient de maladies ou d'épuisement. Il a également dû effectuer du portage, de façon moins régulière, alors qu'il avait 14 ou 15 ans. A cette époque, les militaires venaient directement dans le village et encerclaient les villageois afin de choisir des porteurs. Avant le cessez-le-feu mon, le portage était beaucoup plus fréquent. Il a effectué du portage environ à huit reprises avant le cessez-le-feu. Il s'est également échappé à plusieurs reprises afin d'éviter le portage. Dans la période après le cessez-le-feu, il a dû effectuer du portage à huit occasions (sans inclure les dix fois depuis juin 1997). Avant le cessez-le-feu, lorsque les porteurs étaient arrêtés par les militaires, ils n'étaient jamais relâchés et ils devaient s'enfuir. Le traitement des porteurs était également pire avant le cessez-le-feu. Après le cessez-le-feu, lorsqu'un porteur ne pouvait marcher assez rapidement, il était battu. Mais lorsque cette situation se produisait avant le cessez-le-feu, le porteur était tout simplement tué. Il a vu les corps d'environ 30 porteurs lorsqu'il effectuait du portage (ils avaient été battus à mort ou fusillés). Son père a été grièvement blessé durant le portage, il y a environ dix ans. C'était durant une offensive des militaires et ses épaules furent grièvement blessées parce qu'il devait transporter des charges extrêmement lourdes. Durant les offensives, les porteurs étaient également utilisés comme boucliers humains et placés au-devant des troupes dans les zones dangereuses. C'était le cas dans toute offensive, et des centaines de porteurs ont été tués de cette façon. Les porteurs étaient souvent fusillés s'ils essayaient de s'enfuir et ils n'avaient donc aucun choix s'ils voulaient être relâchés un jour ou l'autre. Il s'est lui-même enfui à plusieurs reprises; la plus longue période pendant laquelle il a dû effectuer du portage a été 13 jours. Après le cessez-le-feu, le portage était organisé via le chef du village. Il n'était donc plus possible de s'enfuir, mais les porteurs étaient libérés lorsque les remplaçants arrivaient. Au début de 1997, son village fut contraint de construire un camp militaire pour le bataillon 32 au village de Taungbauk (environ à une heure de marche de son village). Une personne de chaque famille dans le village devait effectuer ce travail. Les villageois devaient également apporter cinq billots de bois et cinq morceaux de bambou avec eux pour la construction. Les propriétaires de charrettes étaient également réquisitionnés pour le transport des matériaux de construction. Durant la construction du camp, les villageois devaient rester sur place jusqu'à ce que leur travail soit terminé (environ deux jours). Environ la moitié des travailleurs étaient des femmes. Il n'y avait pas d'enfants. Le traitement infligé par les militaires n'était pas trop mauvais. Lorsque les militaires venaient dans le village, ils demandaient du riz, du poulet ou de l'alcool, et le village devait leur en fournir. Les militaires informaient parfois le chef du village des choses dont ils avaient besoin. Mais, à d'autres occasions, ils venaient simplement et volaient directement ce qu'ils voulaient. Il y avait habituellement environ dix militaires qui restaient dans le village (ils occupaient les maisons du chef du village et du secrétaire du village), et le village devait les nourrir. Lorsque les militaires désiraient quoi que ce soit, ils se servaient tout bonnement. Le chef du village avait été élu par les villageois et démontrait beaucoup de sympathie pour leurs problèmes bien qu'il ne pouvait rien y faire. La situation dans d'autres villages était bien pire que dans son village, particulièrement lorsque ces villages étaient liés aux rebelles. Dans ces villages, la torture des villageois était monnaie courante ainsi que les viols des femmes. Récemment, avant de se rendre au camp militaire, il y a eu une relocalisation forcée dans sa région (bien que son village n'était pas concerné). D'autres villages dans la région ont dû se déplacer au village de Taungbauk. La relocalisation fut ordonnée en octobre. Il a entendu parler du cas d'une famille mon qui n'a pas voulu se relocaliser parce que propriétaire d'une plantation de caoutchouc. Ceci se passait au village de Kyauk Kyat, à environ une heure de marche de son village. Puisqu'elle a refusé la relocalisation, la famille fut menacée par quatre militaires. Ces derniers ont violé la fille devant les membres de sa famille. Il a entendu parler de cet incident par des gens qu'il connaissait de la région. Les dix villages qui furent relocalisés comprenaient Kyau Kyat, Tha Shay, Ma-U, Klaw Taw Chaung, Kyaik Raung, Tha Ya Gone et Ye Le. Parmi ceux-ci, Ma-U et Kyaik Raung étaient principalement des villages karens, alors que les autres étaient des villages mons. Les villages comprenaient entre 60 et 200 familles chacun. On leur avait donné un mois pour se relocaliser dans le village de Way Tha Li (qui se situe entre Taungbauk et Kya In Seik Kyi, et qui est donc sous contrôle militaire). Certains villageois sont allés sur les sites de relocalisation, alors que d'autres ont fui dans les camps de réfugiés. Quelques-uns sont restés secrètement dans leur village d'origine. Les bataillons impliqués dans ces relocalisations étaient les numéros 32, 355 et 356. Il a décidé d'aller au camp de réfugiés parce que, en tant que travailleur journalier, il n'avait pas de ferme et devait travailler chaque jour pour survivre. Il était incapable d'accomplir cette tâche à cause du portage qui signifiait qu'il ne pouvait plus nourrir sa famille. Sa famille et la famille de son frère ainsi que trois autres familles du village ont fui au camp de réfugiés. C'était principalement les familles les plus pauvres qui s'enfuyaient puisque les villageois les plus riches qui possédaient des fermes restaient sur place. Les propriétaires de fermes dans son village furent avertis que, s'ils aidaient les rebelles, leur village serait également relocalisé. Son village ainsi qu'un autre village de la région ne furent pas relocalisés parce que les militaires voulaient les utiliser afin d'y demeurer. L'autre village était constitué principalement de Mons avec également des habitants thaïlandais.
  3242. 205
  3243. Ethnie: Thaï
  3244. Age/sexe: 41 ans, masculin
  3245. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  3246. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  3247. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kyaik Raung, Kya In Seik Gyi, Etat Kayin (le village comptait 100 familles)
  3248. Le témoin est venu au camp de réfugiés mon en décembre 1997. Il a dû effectuer du portage. Il a été arrêté par les militaires et contraint de transporter du matériel pour eux. La dernière fois où il a dû faire du portage fut en septembre 1997 et la première fois alors qu'il avait à peine 17 ans. Il ne peut estimer le nombre de fois où il a dû effectuer du portage. Parfois, il a dû en faire deux fois par mois. Le portage durait environ dix jours chaque fois, mais il n'était jamais relâché par les militaires après cette période et il avait l'habitude de s'enfuir. Si un porteur était capturé au moment où il tentait de s'échapper, il était battu et on lui donnait une charge plus lourde. Ceci lui est arrivé à deux occasions. Lorsqu'un porteur était trop lent, il était battu. Ceci lui est également arrivé en quelques occasions. Quiconque avait la force de transporter un sac à dos était réquisitionné (même des garçons de 13 ans ou des hommes plus âgés). Les femmes n'étaient pas réquisitionnées pour le portage. La charge la plus lourde qu'il a dû transporter consistait en des pièces d'artillerie lourde. Cette charge était tellement lourde qu'il était incapable de marcher normalement. Les obus qu'il transportait cognaient contre son dos lorsqu'il marchait et il fut donc blessé. Il a également dû transporter du riz et d'autres types de nourriture. La période la plus longue pendant laquelle il a dû effectuer du portage fut de 25 jours. Il a effectué toute sorte de portage, y compris sur la ligne de front et durant les combats. Durant les combats, les porteurs étaient placés au milieu des militaires. Il n'a jamais vu un porteur mourir durant les combats. Lorsqu'il y avait des combats avec le rebelles, les militaires allaient dans les villages et battaient le chef du village et brûlaient ce dernier. Le nombre de porteurs dépendait des besoins requis par les militaires. Parfois, ils en avaient besoin de cinq, parfois cela pouvait aller jusqu'à 20. Le plus dur était le portage durant la saison des pluies puisqu'à ces occasions ils pouvaient ne pas recevoir de nourriture pendant toute une journée. Les militaires dormaient normalement sur une plate-forme au-dessus du sol, alors que les porteurs devaient dormir dans la boue. Les porteurs devaient cuisiner pour eux-mêmes ainsi que pour les militaires. Lorsque les porteurs ne respectaient pas les ordres donnés ou lorsqu'ils étaient trop lents, ils étaient battus. De tels actes de violence étaient très fréquents. Il a vu ce type de violence chaque fois qu'il a dû effectuer du portage. A plusieurs reprises, il a vu des porteurs être frappés à la tête avec une telle violence que leur crâne était couvert de sang. Il a vu des porteurs qui étaient malades et qui ne pouvaient continuer et qui furent tout de même battus par les militaires jusqu'à la mort. Ceci est arrivé en quelques occasions mais pas à chaque voyage. Parfois, ces porteurs étaient malades, ils pouvaient payer les militaires afin d'être relâchés (pour trois jours, 200 kyats ou l'équivalent en poulets). Lorsque les militaires allaient dans un village, ils volaient tout ce qu'ils pouvaient et, lorsqu'ils voyaient une jolie fille, ils la forçaient à venir avec eux pour l'embrasser. Il a vu à une occasion un militaire attraper un villageois qu'il suspectait être un rebelle et l'a fusillé sur place. Les militaires avaient également l'habitude d'arrêter le chef du village et de le frapper. La pire blessure qu'il avait subie durant le portage fut un coup porté à la tête qui causa de nombreuses contusions mais pas de dommages irréversibles. L'année dernière, lorsqu'il était dans son village, des militaires sont venus dans sa maison et ont volé ses biens et l'ont frappé. Les militaires forçaient régulièrement les villageois, y compris les femmes, à dormir au camp militaire afin de décourager les possibles attaques des rebelles. Il ne sait pas si les femmes étaient abusées sexuellement. La dernière fois qu'il a dû effectuer du portage, en septembre 1997, cela avait été arrangé via le chef du village. Le chef du village lui avait dit d'aller effectuer du portage pendant trois jours, mais il ne fut relâché qu'après vingt jours puisqu'aucun remplaçant n'est arrivé avant. Il souffrait beaucoup des pieds et avait de la fièvre et des maux de tête. On ne lui permettait pas de se reposer et on le battait afin qu'il progresse plus rapidement. Les porteurs n'étaient jamais nourris de façon adéquate (juste du sel et du riz). Il n'y avait pas assez de riz pour les nourrir, ce qui fait qu'ils s'affaiblissaient. Les militaires volaient les poulets dans les villages mais ne les donnaient jamais aux porteurs. Finalement, après vingt jours, six remplaçants sont arrivés et il fut relâché. Il était généralement arrêté pour le portage par les militaires alors qu'il travaillait dans son champ. Il tentait alors de s'enfuir, ce qu'il a réussi à faire à quelques reprises avec succès. Les autres villageois tentaient également de s'enfuir. Lorsqu'un villageois avait de l'argent, il lui était possible de payer les militaires afin de le relâcher pour éviter le portage. S'il surveillait ses vaches lorsque les militaires arrivaient, il n'avait plus la possibilité de ramener les vaches au village. Le portage fut arrangé seulement en deux occasions par le chef du village. A une autre occasion, tout le village a dû couper des bambous pour la construction du camp pour le bataillon 355. D'autres villages se sont occupés de la construction alors que son village n'a dû que fournir des tiges de bambou. C'était du travail très difficile qui a nécessité deux jours de coupe. Les tiges de bambou devaient être très larges. Il n'a pas dû effectuer d'autres types de travail forcé bien que d'autres villageois aient dû travailler sur la construction de la route. La route devait aller jusqu'à la Passe des trois pagodes. Les travaux ont débuté l'année dernière durant la saison chaude. Cinq personnes du village devaient s'y rendre quinze jours à la fois. C'est le chef du village qui déterminait qui devait s'y rendre. Il a décidé de quitter le village avant que son tour ne vienne. Le village devait également donner de la nourriture et de l'argent aux militaires une fois par mois. Chaque mois, les militaires demandaient ce qu'ils voulaient; cela pouvait être de la nourriture, de l'argent, mais habituellement pas les deux. Ceci se passait depuis plusieurs années. Il est venu au camp de réfugiés il y a deux mois avec sa famille. Ils sont venus à cause des nombreux problèmes auxquels ils devaient faire face: il y avait beaucoup de portage, ce qui fait qu'ils étaient incapables de travailler à leurs propres affaires; chaque fois qu'ils quittaient le village, ils risquaient d'être arrêtés par les militaires pour effectuer du portage. Plusieurs autres familles de son village sont venues au camp avant lui (il en connaît au moins 30).
  3249. 206
  3250. Ethnie: Karenni
  3251. Age/sexe: 65 ans, masculin
  3252. Situation familiale: Sept (lui, sa femme, trois filles et deux fils)
  3253. Activité professionnelle: Agriculteur (cultiver le riz)
  3254. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Methali, Kya In Seik Gyi, Etat Kayin (le village comptait 15 familles)
  3255. Le témoin est venu au camp de réfugiés mon au début de 1997. Son village fut relocalisé durant la récolte de riz de l'année dernière au village de Taungzun. C'est à cette époque qu'il a décidé de venir au camp de réfugiés. Cinq ou six autres familles ont quitté le village en même temps. Les militaires ont donné au village cinq jours pour la relocalisation. Il a effectué du travail forcé pour la construction de la route de la Passe des trois pagodes. Ce travail a débuté au début de l'année dernière et se poursuivait lorsqu'il a quitté. Il a effectué du travail pour la construction de routes pour la première fois en 1996. A cette époque, le travail était près de son village et les villageois pouvaient revenir au village pour la nuit. Parce que son village était petit, il n'y avait pas de système de rotation. Parfois, une personne de chaque famille devait aller travailler, alors que d'autres fois tout le village devait s'y rendre. Ainsi, il était la seule personne de sa famille à effectuer le travail, alors qu'à d'autres reprises il travaillait avec son fils. Le travail constituait à couper des arbres et construire un remblais en plus de ramasser des pierres. Il devait travailler depuis la première lueur du jour jusqu'à la nuit. Il devait manger avant de commencer le travail. Lorsque les gens étaient fatigués, ils ne pouvaient plus travailler; les militaires continuaient d'exiger le même travail et les battaient. Un de ses fils qui a également exécuté du travail forcé n'a jamais été battu; son autre fils était membre du KUN et a, par conséquent, jamais exécuté du travail forcé. Il a été lui-même battu par les militaires. Il a également dû effectuer du portage durant les trois dernières années. Au début, le portage était arrangé par le chef du village mais, par la suite, les militaires venaient simplement au village et entouraient les gens. Il ne peut compter le nombre exact de fois où il a dû effectuer du portage. Parfois, c'était à six reprises dans un mois si les voyages étaient courts (un ou deux jours). Lorsqu'il devait se rendre à un autre village un peu plus éloigné, le voyage pouvait durer deux semaines. Il devait transporter des charges entre 16 et 32 kg, incluant du matériel militaire. Il n'y avait pas de problème pour les porteurs si ceux-ci pouvaient effectuer le travail. Mais, lorsqu'ils étaient lents, ils étaient battus. Lorsqu'il était lent, les militaires l'ont insulté en lui disant qu'il était inutile et ils l'ont frappé. Parfois, cela pouvait arriver quatre ou cinq fois par jour. Il a vu d'autres porteurs être battus jusqu'à ce qu'ils tombent dans le coma. Quelquefois, lorsque les porteurs étaient trop malades ou trop faibles pour continuer, ils étaient tués et jetés le long de la route. Il a été témoin de cela à deux reprises. Certains porteurs étaient tellement malades ou tellement faibles lorsqu'ils étaient relâchés qu'ils n'avaient même plus la force de retourner dans leur village. Des villageois devaient les ramasser le long de la route et les ramener à leur village pour qu'une infirmière s'occupe d'eux. A deux occasions, lorsqu'il est rentré de portages, il était si faible qu'il ne pouvait plus travailler et d'autres villageois ont dû s'occuper de lui. Certains militaires étaient un peu plus gentils que d'autres. Parfois, les militaires voulaient même lui donner de l'eau, mais ils ne pouvaient le faire puisque eux-mêmes risquaient d'être battus si on les voyait agir ainsi. La dernière fois qu'il a dû effectuer du portage fut en avril 1997 pendant deux semaines. A cette occasion, il a dû transporter six larges obus. C'était très lourd, mais les militaires lui ont dit qu'il était chanceux d'avoir une charge aussi légère. Un matin, les militaires du SLORC sont venus dans sa maison et l'ont accusé d'avoir un fils membre du KNU. En effet, un de ses fils avait été un membre actif du KNU mais l'avait quitté. Ce fils s'était marié et vivait maintenant au village de Mi Hki (près du Passage des trois pagodes). En fait, son fils avait déjà été arrêté par le SLORC et s'était récemment échappé. Mais, à cette époque, il n'était pas au courant de ces détails. Les militaires l'ont battu avec une tige de bambou et l'ont insulté. Les militaires l'ont accusé d'être lui-même un membre du KNU et de cacher des munitions et lui ont demandé où ces dernières se trouvaient. Ils l'ont frappé à plusieurs reprises sur le dos et sur la tête jusqu'à ce qu'il tombe inconscient. Son fils était maintenant dans un camp de réfugiés. Après que son fils se soit échappé, il est venu à la maison et lui a dit de ne pas rester là puisque c'était dangereux. Il a donc décidé de s'enfuir au camp. Avant que son fils s'échappe, il a été torturé et les militaires lui ont coupé une partie de ses oreilles et une partie de ses lèvres.
  3256. 207
  3257. Ethnie: KarenniAge/sexe: 50 ans, masculin
  3258. Situation familiale: Sept (lui, sa mère, sa femme et quatre enfants)
  3259. Activité professionnelle: Agriculteur (il était également chef de village)
  3260. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Hti Pa Taw Hta, Kya In Seik Gyi, Etat Kayin (le village comptait 20 familles)
  3261. Le témoin a quitté son village en septembre 1997 parce qu'il avait entendu qu'il était risqué pour lui de rester. Il a quitté et est resté au village de Kyunchaung avant de partir pour la Thaïlande en janvier 1998. Un de ses amis qui était chef d'un autre village l'a averti que les autorités posaient des questions le concernant et se demandaient pourquoi il avait quitté le village. La première fois, des soldats sont venus dans son village et lui ont dit de leur indiquer le chemin jusqu'au village de Bo Deh. La seconde fois, il a envoyé un de ses villageois à sa place. A d'autres moments, les militaires ne sont pas venus au village pour prendre des porteurs mais ont simplement envoyé un ordre demandant un certain nombre de villageois. Habituellement, ils demandaient deux à trois porteurs mais pouvaient aller jusqu'à dix porteurs. C'était impossible pour le village de fournir autant de porteurs puisque la plupart des villageois s'enfuyaient afin d'éviter le portage. Ceci se passait durant la saison chaude de 1997. Les porteurs étaient maltraités, et un villageois fut battu. Il dépendait de lui en tant que chef d'imposer une rotation aux porteurs après trois jours, dans la mesure du possible. La troisième fois où ils sont venus dans son village, en avril 1997, il était absent. Les militaires ont arrêté toute sa famille et ont commencé à le rechercher. Lorsqu'il est arrivé à la maison, ils l'ont attaché et ont relâché sa famille. Ils ont dit à sa famille de retourner à la maison et d'y rester. Les militaires l'ont emmené dans une grange et l'ont torturé et lui ont demandé où il gardait les armes. Ils l'ont frappé au visage et sur la poitrine et l'ont frappé avec une arme. Le chef du groupe des militaires, un capitaine, l'accusait d'être un rebelle. Le secrétaire du village est intervenu et a expliqué au capitaine que le chef du village était un simple fermier et non pas un rebelle. Le capitaine a refusé d'écouter et a averti le secrétaire qu'il risquait d'avoir certains problèmes. Les militaires ont continué à le torturer et il a souffert de blessures sérieuses, internes et externes. La torture comprenait plusieurs actes barbares tels que placer sa tête sous l'eau pendant plusieurs minutes. Ce type de torture a continué de midi jusque dans la soirée. Le lendemain, vers midi, les militaires ont commencé à le torturer de nouveau. Ils lui demandaient constamment s'il avait une arme et où elle était cachée. Ils l'ont amené une fois de plus à la rivière et ont mis sa tête sous l'eau jusqu'à ce que ses oreilles se remplissent d'eau. Depuis cet incident, il est partiellement sourd. Ils ont continué à le torturer jusqu'à ce qu'il perde conscience et l'ont, par la suite, ligoté et l'ont abandonné près de la rivière. Lorsqu'il a repris conscience, il s'est rendu compte qu'il était ligoté et a aperçu les militaires de l'autre côté de la rivière qui attendaient qu'il revienne à lui. Le troisième jour, les militaires l'ont emmené avec un autre homme qu'ils ont également torturé et qui venait du village de Grupadi. Ils sont arrivés dans la soirée et, à ce moment, d'autres troupes sont arrivées et le commandant a décidé d'amener les deux hommes avec eux pour ne pas qu'ils puissent s'enfuir. A cet instant, il a dit à l'autre homme qu'ils devraient essayer de s'enfuir, sinon ils seraient tués. Alors qu'ils étaient ligotés pendant la nuit, le soldat qui les surveillait s'est endormi et il a réussi à libérer ses mains et s'est enfui.
  3262. 208
  3263. Ethnie: Karenni
  3264. Age/sexe: 54 ans, masculin
  3265. Situation familiale: Douze (lui, sa femme, dix enfants dont deux vivent toujours à la maison)
  3266. Activité professionnelle: Chef de village
  3267. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Thi Paw Way, Kya In Seik Gyi, Etat Kayin (le village comptait 47 familles et fut établi il y a dix ans; avant, il vivait dans le canton de Kya In Seik Gyi)
  3268. L'armée est venue en mars 1997 et a pris tous les poulets et tous les animaux du village. Les villageois étaient effrayés et n'ont rien dit. De plus, en mars 1997, les villageois reçurent l'ordre de construire un camp militaire à Ya Kra, à environ cinq miles de leur village. Le camp était pour la brigade 44. Son village a dû fournir deux porteurs et une charrette en tout temps pour la construction; il y avait une rotation tous les trois jours (ils étaient relâchés uniquement lorsqu'un remplaçant arrivait). D'autres villages dans la région ont également été contraints de construire ce camp, un total d'environ 40 personnes à la fois. Le travail a duré environ deux mois. Parce qu'il était le chef du village, il devait y aller constamment afin de superviser les villageois. Les militaires étaient désagréables avec les travailleurs et les insultaient mais ne les ont jamais battus. Le traitement était bien pire durant le portage. Le portage a débuté en mars 1997. Le village reçut l'ordre de fournir deux personnes en permanence pour effectuer du portage. Lorsque ces gens n'étaient pas envoyés, l'armée venait et arrêtait les gens. De plus, il y avait habituellement deux militaires du KNU qui restaient dans son village. Les militaires sont venus et ont accusé les villageois d'abriter ces deux militaires. Ceux-ci ont tout d'abord nié. Les militaires les ont battus violemment. Ils ont insisté sur le fait que, si les deux soldats du KNU ne se rendaient pas, ils devraient tuer tous les villageois et brûler le village. Les militaires ayant fait cette déclaration venaient du bataillon 2. Les deux soldats du KNU avaient des familles dans les villages et ont donc préféré se rendre. Ils n'ont pas été tués et ont été relâchés après dix jours. Après cet incident, la brigade 44 fut remplacée par la brigade 22 en avril 1997. Plus tard, en septembre, les militaires ont forcé le village à se relocaliser en 15 jours au village de Bo Deh qui se situait à un mile et demi de leur village d'origine. Le commandant a déclaré que, si les villageois ne voulaient pas s'exécuter, cela le lassait indifférent en notant que les villageois partaient. Les villageois furent informés que quiconque serait vu dans le village d'origine après l'ordre de relocalisation serait tué. Après cela, les villageois ont pu retourner dans leur village d'origine durant le jour mais devaient retourner à Bo Deh entre 18 heures et 6 heures du matin. Ils n'avaient pas besoin de donner de l'argent afin de quitter le lieu de relocalisation durant la journée. L'ordre de relocalisation du village fut donnée par la brigade 22. Après la relocalisation, la brigade 22 fut remplacée par le bataillon 545; ceux-ci étaient extrêmement violents. Les militaires du bataillon 545 volaient des cochons et des poulets aux villageois et, si ces derniers se plaignaient, ils les frappaient. Le village devait fournir trois porteurs pour le bataillon 545, mais certains villageois avaient peur d'y aller. Ils payaient donc 1 300 kyats pour une période de trois jours afin d'éviter d'aller faire du portage. Il n'a jamais personnellement exécuté du portage bien que son neveu y soit allé à environ dix reprises. Les autres villageois ont effectué autant de portage que son neveu. Le traitement des porteurs était très mauvais. Les porteurs étaient battus et souffraient de blessures causées par les charges excessives qu'ils devaient transporter. Il a vu des porteurs avec les épaules lacérées jusqu'au sang, en raison des charges excessives. Le portage se poursuivait au mois de septembre lorsqu'il a quitté le Myanmar. Il y a eu un incident particulièrement déplorable qui s'est déroulé juste avant la relocalisation du village. Certains militaires sont venus et ont arrêté les villageois (du nom de U Kyaw Ku et Ngwe Tu). C'était un dimanche et ils furent arrêtés au sortir de l'église. Les militaires ont tenu une réunion avec les villageois à l'intérieur de l'église. La raison pour laquelle ils ont arrêté ces gens était qu'ils avaient reçu des informations selon lesquelles les individus possédaient des armes. Ceci n'était pas le cas. A l'intérieur de l'église, ils ont attaché quatre villageois et les ont battus devant tous les autres. Ils furent frappés et battus avec des bâtons et des cordes. Deux ont été grièvement blessés. L'un deux était incapable d'ouvrir ses yeux alors que l'autre avait des blessures sur sa poitrine. Les villageois étaient particulièrement choqués du fait que les militaires aient délibérément choisi d'effectuer ces violences à l'intérieur de l'église. Comme il était le chef du village, il a essayé de s'offrir à la place des quatre villageois arrêtés en tant que garantie. Les militaires ont toutefois refusé et l'ont menacé de l'arrêter également. Par la suite, tout le village fut forcé par les militaires de se tenir debout en plein soleil, et ce même pour les enfants. Ensuite, les quatre villageois furent amenés. L'un d'eux était très sérieusement blessé et ne pouvait plus marcher, ce qui fait que les deux autres ont dû le transporter. En tant que chef du village, il a dû se rendre avec les quatre villageois. Ils ont tous été emmenés dans un camp militaire proche de leur village où ils ont passé la nuit. Aucun traitement médical ne fut donné aux villageois blessés, à part un peu de pommade qui s'est révélée inutile (lorsqu'ils ont finalement été relâchés, un des villageois a dû être admis à l'hôpital à cause de la gravité de ses blessures). Ils avaient tous très peur. Le lendemain, ils furent amenés dans un autre camp militaire à environ six miles de là et furent battus par les militaires. Il a personnellement été frappé sur la tête avec un pistolet et giflé. Une fois dans le second camp militaire, ils furent attachés pendant trois ou quatre jours. On leur a donné du riz et un peu de poisson et ils ont dû dormir avec leur mains attachées dans le dos. Par la suite, ils furent relâchés et un des villageois dut se rendre à l'hôpital. Il existe beaucoup d'autres cas de torture de villageois par l'armée. Une personne d'un village avoisinant fut suspectée d'avoir des armes et fut pendue la tête en bas à un arbre et battue de cette façon. Une autre personne fut attachée dans la rivière pendant quatre jours (avec uniquement sa tête hors de l'eau). Un de ses amis d'un autre village fut mis dans un trou parce qu'on l'avait accusé faussement d'entretenir des contacts avec les rebelles. Il fut gardé dans ce trou qui était couvert de boue pendant quatre jours et ne reçut aucune nourriture ni eau. Dans tous ces cas, la brigade 44 était impliquée. Il s'est enfui en Thaïlande en septembre 1997 lors de la relocalisation du village. Au moins 50 autres personnes sont venues avec lui.
  3269. 209
  3270. Ethnie: Karenni
  3271. Age/sexe: 39 ans, masculin
  3272. Situation familiale: Marié avec deux fils
  3273. Activité professionnelle: Cultivateur (riz)
  3274. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Paw Ner Mu, Kya In Seik Gyi, Etat Kayin (le village comptait 100 familles)
  3275. Le témoin a quitté son village en juin 1997 et est resté dans d'autres villages de la région jusqu'à son arrivée en Thaïlande en août 1997. Il a exécuté du travail forcé et du portage. Les militaires sont venus en mars 1997 et ont arrêté environ 40 villageois avant de les interroger. Ils ont pris dix personnes (y compris lui-même) qu'ils présumaient rebelles dans un village voisin et les ont interrogées et torturées toute la nuit. Les dix furent séparées, trois militaires les ont battues et interrogées. Elles n'étaient pas au même endroit dans le village. Ainsi, il n'a pas vu ce qui arrivait à ses compagnons, bien qu'il ait entendu plus tard qu'ils avaient subi le même traitement que lui. Il a été frappé et battu toute la nuit par les militaires, bien qu'il leur disait qu'il n'était pas un rebelle. A un moment, ils ont mis un pistolet entre ses yeux et lui ont dit qu'ils allaient le tuer. Pendant qu'on le battait, il fut blessé à l'épaule et a été incapable d'utiliser son bras pendant un mois. Sept d'entre eux furent envoyés dans un autre camp alors que lui et deux autres villageois purent rester dans le village. Il a dit au capitaine qu'il n'était qu'un fermier et non un rebelle et qu'il ne possédait pas d'arme. Finalement, le capitaine l'a relâché et lui a donné un laissez-passer afin de retourner dans son village. A ce moment, la brigade 44 était postée dans un camp militaire près de chez lui, nommé Ya Kra. Ces militaires n'ont pas cru qu'il n'était pas un rebelle et ont commencé à l'accuser de toute sorte de chose. Il leur a dit de s'adresser au chef du village et que s'ils voulaient le tuer ils n'avaient qu'à le faire, mais qu'il n'avait aucune information à leur donner. Les militaires se sont fâchés et l'ont arrêté et l'ont enfermé dans une petite pièce (3 m de largeur et 4 m de profondeur) pendant deux jours et deux nuits. Ils lui ont donné une petite quantité de riz et de l'eau. Après cet incident, ils l'ont emmené dans un camp militaire où ils l'ont gardé pendant une semaine. Il pouvait circuler dans le camp mais n'avait pas la permission de le quitter. Finalement, sa femme qui était enceinte est venue au camp et a assuré qu'il n'allait pas quitter le village. Ils ont pu ainsi retourner au village mais ne pouvaient quitter la maison (il n'était pas surveillé, mais s'il était trouvé hors de la maison il risquait des problèmes). Trois ou quatre jours plus tard, la brigade 44 est partie et fut remplacée par la brigade 22 (en avril). Il ne sait pas exactement quand la brigade 22 a quitté mais, en mai, il a noté que de nouveaux militaires du bataillon 549 étaient arrivés. Quelques mois plus tard, le bataillon 545 est arrivé. Lorsque le bataillon 545 est arrivé, la situation s'est considérablement détériorée. Il devait toujours obtenir un laissez-passer des militaires afin d'aller travailler dans ses champs. Bien qu'il possédait ce laissez-passer, il a été vu par certains militaires qui l'ont frappé avec leur arme et l'ont arrêté et utilisé comme porteur. Il s'est enfui après le premier jour; les militaires ont crié mais ne l'ont pas abattu. Il est rentré au village mais, une semaine plus tard (en mai-juin), le chef du village l'a réquisitionné pour effectuer du portage. On lui a donné la possibilité de payer 2 000 kyats pour trois de portage afin de ne pas y aller, mais il ne pouvait payer cette somme. Il a dû travailler en tant que porteur à cette occasion pendant onze jours. Durant ces onze jours, il a dû transporter des armes, des munitions et d'autres équipements qui étaient très lourds, ce qui fait qu'il ne pouvait marcher de façon normale. Il y avait sept autres porteurs avec lui qui venaient de son village. Ils ont dû marcher pendant toute la journée et ne se sont arrêtés qu'occasionnellement. Il ne connaît pas le nom des endroits où ils sont passés. Ils recevaient seulement une petite quantité de riz par jour avec un peu de sel et du poisson. Ils couchaient tous en brousse ou dans les villages qu'ils traversaient. Les porteurs devaient effectuer exactement ce qu'on leur disait. Lorsqu'ils répliquaient, les militaires les battaient. Il a également été frappé parce qu'il ne pouvait plus marcher assez rapidement avec sa charge. Lorsqu'ils traversaient les villages, les militaires volaient les biens des villageois, et ces derniers étaient mis dans les paniers des porteurs. Après onze jours, le chef du village a envoyé des remplaçants et il a pu partir. Une semaine après son retour au village, il a une fois de plus été réquisitionné pour du portage. Il a décidé à ce moment de s'enfuir.
  3276. 210
  3277. Ethnie: Birman 210
  3278. Age/sexe: 23 ans, masculin
  3279. Situation familiale: Célibataire; parents, cinq frères
  3280. Activité professionnelle: Conducteur de pousse-pousse à vélo
  3281. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Myaukma, division Bago, district de Uttah (un camp militaire se trouverait à quatre kilomètres du village)
  3282. Il a quitté le Myanmar il y a cinq ans puisqu'il n'était plus en mesure d'exécuter son travail en raison de ce qui devait impérativement être fait pour les militaires. Dix jours par mois étaient réservés pour les travaux requis par les militaires. Il est retourné au Myanmar en juin 1997. Trois jours après être arrivé chez lui, il a été arrêté par les militaires afin de travailler 1) à la construction de l'aéroport à Indagau. Il y est resté pendant trois jours. Cinquante personnes, hommes et femmes, travaillaient avec lui. Il est par la suite retourné chez lui pour être arrêté à nouveau et incarcéré dans un camp de prisonniers près de Bago. Il y est demeuré pendant dix jours avant de s'échapper et de regagner la Thaïlande. Il ne connaît pas la raison qui a mené à son arrestation. Il estime que la situation s'est aggravée depuis son premier départ en 1993. Avant son départ, il a dû faire du portage et participer à la construction de voies ferrées. Dans tous les cas, il n'était pas rémunéré. Il ne pouvait refuser par crainte d'être arrêté et faire l'objet de représailles de la part des militaires. 2) Il a fait du portage en 1991 et 1992 à trois-quatre reprises. Chaque assignation durait une journée et demie. Cinq-six autres porteurs provenant de son village l'accompagnaient sur un total d'environ 300-400 porteurs dans le cadre d'offensives militaires d'importance. C'est le chef du village qui recrutait les porteurs bien que les militaires pouvaient les requérir directement en fonction de leurs besoins pour mener les opérations militaires le long de la frontière avec la Thaïlande. Les porteurs devaient transporter les munitions et ne recevaient qu'une ration de riz le matin et le soir. Lors de combats contre l'Union nationale karenne (Karen National Union) (KNU), les porteurs devaient rester près des soldats et étaient souvent utilisés comme boucliers humains. Deux de ses amis auraient été abattus. Aucun traitement médical n'était prodigué aux porteurs qui avaient été blessés ou qui étaient malades. Il a été battu puisqu'il n'était pas en mesure de suivre le rythme de progression. Il était possible de payer pour être remplacé: 1 500 kyats par assignation. Il a payé à deux reprises. 3) Pour ce qui est des voies ferrées, il a dû y travailler deux fois par mois, pendant cinq jours à chaque fois, la première fois en 1990 et la dernière juste avant son départ en 1993. Il s'agissait de la voie ferrée entre Yangon et Bago à huit miles de son village. Cette voie ferrée est en fonction et est utilisée tant par les militaires que par les civils. Une personne par famille devait y travailler. L'ordre des militaires était transmis par le chef de village. Il faisait ce travail en rotation avec son frère et son père. Hommes et femmes étaient requis pour participer à ces travaux, bien qu'avec lui, seuls une trentaine d'hommes âgés entre 15 et 56 ans provenant de différents villages étaient présents. Il devait dormir sur place et apporter sa propre nourriture. Il devait faire les travaux de préparation du terrain: creuser la terre, niveler le sol, transporter et poser les rames. Une section de la voie était assignée à chaque groupe qui avait l'obligation de la terminer. Le travail était supervisé par les militaires. La journée commençait à 5 heures pour se terminer à 20 heures sans répit possible. Il n'a pas fait l'objet de mauvais traitements.
  3283. 211
  3284. Ethnie: Mon
  3285. Age/sexe: 64 ans, féminin
  3286. Situation familiale: Mariée, trois fils, trois filles
  3287. Activité professionnelle: Commerçant
  3288. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Anin, Thanbyuzayat, Etat Mon (le village comptait 1 000 foyers et une population d'environ 9 000 personnes)
  3289. Elle a dû quitter son village en 1995 puisque son mari était en conflit avec les autorités locales. Elle s'est installée dans un premier temps dans le village Natkyizin, division Tanintharyi. Elle y est restée jusqu'en 1995, moment où elle s'est exilée en Thaïlande. Elle n'a pas personnellement fait de travail forcé (son mari était chef de village, mais en a vu exécuter par d'autres. En effet, son commerce était situé près de la voie de chemin de fer entre Ye et Dawei (Tavoy). Elle a vu des hommes et des femmes (incluant des enfants entre 6 et 14 ans) travailler sur cette voie ferrée. Ils n'étaient pas rémunérés et devaient dormir à même le sol. Le travail était supervisé par les militaires. En outre, elle aurait été témoin de décès causés par la malaria et les mauvaises conditions de travail.
  3290. 212
  3291. Ethnie: Birman
  3292. Age/sexe: 35 ans, masculin
  3293. Situation familiale: Marié, un enfant
  3294. Activité professionnelle: Travailleur journalier
  3295. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Village non mentionné, Thanbyuzayat, Etat Mon (le village comptait 3 000 familles)
  3296. Il a dû quitter le Myanmar en 1996 puisqu'il n'avait plus les moyens de survivre. Il avait hérité d'une plantation de caoutchouc de huit acres. Celle-ci a été confisquée par les militaires en 1990 afin d'y construire un camp militaire. Pendant les six années qui ont suivi, il a dû exécuter de nombreux travaux pour les militaires: 1) portage, 2) chemin de fer, 3) camp militaire. 1) Pour ce qui est du portage, il devait payer 50 kyats de frais de portage tous les mois. En outre, les militaires réquisitionnaient des porteurs en moyenne deux fois par mois pour leurs opérations militaires contre les Mons et l'Union nationale karenne (Karen National Union) (KNU). Il a été porteur à deux reprises, la dernière fois en 1994, réussissant à s'enfuir avant d'être capturé dans les autres cas. Lors des deux occasions où il a été porteur, les militaires l'ont appréhendé directement. Trois cents porteurs l'accompagnaient à la première occasion et cinq cents à la seconde. Seuls des hommes faisaient partie de son groupe. Il a été témoin de nombreux combats: contre les Mons et le KNU. Il a vu de nombreux porteurs blessés ou malades qui n'ont reçu aucun traitement médical ou de médicaments. 2) Pour ce qui est de la construction de chemin de fer, il a travaillé à cette fin la dernière fois en 1992 pour quatre mois. Deux cents à trois cents hommes et femmes l'accompagnaient, âgés entre 8 et 70 ans. Il n'était pas rémunéré et devait apporter sa propre nourriture. Il devait également dormir près du site de travail, sans abri. Il a fait l'objet de mauvais traitements comme plusieurs autres travailleurs dont le travail ne satisfaisait pas aux militaires. En 1993, les militaires lui ont réclamé la somme de 3 000 kyats, taxe relative au chemin de fer et que chaque foyer devait payer. 3) Enfin, pour ce qui est du camp militaire, chaque foyer dans sa division administrative devait payer 500 kyats pour ne pas avoir à effectuer différents travaux relatifs au camp. Il a payé à trois occasions depuis 1992. Son beau-père aurait toutefois exécuté du travail pour le camp militaire en 1992.
  3297. 213
  3298. Ethnie: Rakhine
  3299. Age/sexe: 24 ans, masculin
  3300. Situation familiale: Marié, pas d'enfant
  3301. Activité professionnelle: Etudiant
  3302. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mahamuni, district de Kyauktaw, Etat Rakhine
  3303. Il a dû quitter le Myanmar en 1996 puisqu'il ne réussissait pas à subvenir aux besoins de sa famille. Il lui restait environ sept jours par mois pour vaquer à ses propres occupations, le reste du temps étant consacré aux différents travaux exigés par les militaires. Il a travaillé pour le camp militaire à proximité de son village et participé à la construction de routes et de pagodes. Pour ce qui est du camp militaire, il s'agit du bataillon d'infanterie légère 376. Il a participé à la construction de la route menant au camp et à l'édification des baraques. Il n'a pas fait de portage pour des opérations militaires. En ce qui concerne les travaux routiers, il a participé à la construction de la route entre Kyauktaw et Paletwa entre 1991 et 1995. C'est le chef de village qui transmettait les ordres des militaires. Il s'agissait notamment des travaux préparatoires de nivellement du terrain. Il a dû travailler deux jours par semaine sur cette route. Cent autres personnes travaillaient avec lui sur cette section de route, incluant des hommes et des femmes âgés entre 13 et 50 ans. Ils devaient dormir près de la route et apporter leur propre nourriture. Ces travaux l'obligeaient à manquer l'école. Les travaux étaient supervisés par les militaires. Il a également participé à la construction et à la rénovation de pagodes entre 1991 et 1995. Il a dû faire ce travail deux fois par mois, pendant une journée à chaque fois. Trois cents personnes travaillaient avec lui, incluant des hommes et des femmes âgés entre 13 et 50 ans. Les ordres étaient également transmis par le chef de village et les travaux étaient supervisés par les militaires. Il a fait l'objet de mauvais traitements infligés par les militaires puisqu'ils estimaient que son travail ne progressait pas assez rapidement.
  3304. 214
  3305. Ethnie: Karenni
  3306. Age/sexe: 32 ans, masculin
  3307. Situation familiale: Célibataire, pas d'enfant; cinq frères et soeurs, père décédé
  3308. Activité professionnelle: Commerçant
  3309. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Wakema, division Ayeyarwady
  3310. Il a dû quitter le Myanmar en juillet 1996 puisqu'il ne réussissait plus à survivre. Les militaires l'obligeaient notamment à vendre sa marchandise à des prix bien inférieurs à ceux du marché. Il a également dû participer à des travaux de construction de routes. Il n'a pas eu à faire du portage puisqu'il a réussi à s'échapper à chaque occasion où les militaires ont tenté de le réquisitionner. Il a participé à la construction de la route entre Pantanaw et Einme, à deux reprises en 1995, à chaque fois pendant deux mois. C'est le chef du village qui lui transmettait les ordres provenant des militaires. La route se trouvant à une quinzaine d'heures de son domicile, pour se rendre au site de travail, il devait faire une partie du chemin à pied et l'autre par bateau. Deux cents à trois cents personnes travaillaient avec lui sur cette section de route, incluant des hommes et des femmes provenant de différents villages. Des femmes étaient parfois accompagnées de leurs jeunes nourrissons. Lorsque les hommes ne pouvaient faire ce travail, les femmes les remplaçaient. Chaque famille devait fournir un travailleur suivant une rotation préétablie. Le travail consistait à niveler le terrain. Il n'était pas rémunéré. Il était possible de payer les militaires de manière à ce qu'ils engagent un substitut. Or l'argent versé aux militaires était rarement utilisé à cette fin, et la charge de travail augmentait dès lors proportionnellement pour les travailleurs restants. Le coût de remplacement: 3 000 kyats pour chaque assignation de quinze jours. Sa famille a payé à plusieurs reprises. Si les militaires estimaient que le travail ne progressait pas assez rapidement, les travailleurs étaient punis, notamment en étant maintenus les pieds enchaînés au soleil. Il a également été témoin de passages à tabac infligés par les militaires.
  3311. 215
  3312. Ethnie: Karenni
  3313. Age/sexe: 37 ans, masculin
  3314. Situation familiale: Célibataire
  3315. Activité professionnelle: Cultivateur et travailleur journalier (ancien militaire)
  3316. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawkareit, Etat Kayin (a vécu plus tard à Yangon)
  3317. Il a quitté le Myanmar en 1996. Ancien militaire, il a quitté l'armée en 1983 après six ans de service à la suite d'une altercation avec son supérieur. Il a personnellement recruté les porteurs nécessaires pour mener les offensives militaires pendant cette période. Lorsque les porteurs tentaient de s'échapper, il avait ordre de les abattre, ce qu'il a fait à plusieurs reprises. Il a par la suite vécu à Yangon où il devait faire des travaux communautaires tous les samedis. C'est le chef de son secteur qui l'informait du travail à exécuter.
  3318. 216
  3319. Ethnie: Birman
  3320. Age/sexe: 37 ans, masculin
  3321. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Thapancho, Pyay (Prome), division Bago
  3322. S'est joint à l'armée en 1979. Il a personnellement procédé au recrutement de porteurs. Il trouvait ce travail difficile puisque, bien souvent, il connaissait les personnes qu'il devait réquisitionner aux fins d'exécuter le travail. Il a quitté l'armée après avoir tiré sur son supérieur à la suite d'un conflit. A la suite de cet événement, il a été incarcéré pendant trois ans et a été libéré en juillet 1984. Par la suite, il a fait du portage pour les militaires à une occasion au cours de la saison froide de 1986. Il a été réquisitionné avec 50 autres personnes alors qu'il voyageait sur un train entre Mawlamyine et Bilin. Il devait transporter les munitions et les obus pour les offensives militaires ainsi que la nourriture et les soldats blessés. Il n'était pas rémunéré. Les rations de riz étaient distribuées le matin et le soir. Il n'y avait pas d'abris pour dormir. Il a été envoyé sur le front après la première semaine. Il a dû par la suite traverser de très hautes montagnes et rejoindre un autre front près de Mawhpoklo, Etat Kayin. Il a dû creuser les tranchées et construire les huttes pour les militaires. Il y est demeuré pendant trois mois. Chaque jour, il devait vérifier l'état des mines posées par les militaires. Aucun traitement médical n'était prodigué aux porteurs malades ou blessés. Pas de médicament disponible non plus. Finalement, il a décidé de quitter le Myanmar en juin 1988.
  3323. 217
  3324. Ethnie: Birman
  3325. Age/sexe: 32 ans, masculin
  3326. Situation familiale: Célibataire, pas d'enfant
  3327. Activité professionnelle: Géomètre et commerçant
  3328. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Maletto, Ma-u-bin, division Ayeyarwady. Le village comptait 4 000 familles
  3329. Il n'a pas eu à faire de travail pour les militaires lorsqu'il était fonctionnaire-géomètre. Il a été requis de ce faire à partir du moment où il a démissionné de ses fonctions. Il a dû participer à la construction d'une route et d'un canal. Le canal reliait Ma-u-bin à Twantay sur une distance de 16 miles et une profondeur de 15 pieds. Il connaît bien ce canal puisqu'il a travaillé sur les plans à titre de géomètre. Il a participé à sa construction à deux reprises, la première fois pendant trois mois et la seconde pendant 1 mois et demi. Le travail a consisté lors de la première occasion à creuser le tunnel et lors de la seconde à réparer ce qui s'était effondré pendant la saison des pluies. Il a participé à plusieurs reprises, au cours des années 1993 et 1994, à la construction de la route entre Ma-u-bin et Twantay et à celle reliant Ma-u-bin et Yangon. Il a dû y travailler à toutes les saisons. Il s'agissait d'importantes routes, dont la largeur équivalait à quatre voitures. Comme le terrain sur lequel étaient construites ces routes était à un niveau inférieur à celui de la mer, des travaux de remblayage étaient requis. Le travail commençait le matin vers six heures et se terminait après le coucher du soleil. Cinq mille personnes y auraient travaillé en 1991-92 et 10 000 en 1993-94, incluant des hommes et des femmes âgés entre 13 et 60 ans. Les femmes étaient souvent accompagnées de leurs jeunes nourrissons. Ils n'étaient pas rémunérés et devaient dormir près de la route. Les conditions de travail étaient mauvaises et plusieurs personnes sont décédées des suites de complications liées à la malaria, de la faim ou à d'autres maladies infectieuses. Si les travailleurs prenaient du retard, ils faisaient l'objet de passages à tabac. Il n'a pas personnellement été battu. Les routes sont terminées mais ne sont pas vraiment utiles et peuvent être utilisées seulement pendant la saison sèche. Il était possible de payer pour ne pas avoir à travailler: 3 000 kyats pour le canal et 5 000 kyats pour les routes. Il a payé à une reprise pour le canal et à deux reprises pour les routes. De 1994 à 1996, il a exercé le métier de commerçant. Toutefois, il aurait été forcé de nettoyer les environs du palais de Mandalay et à faire des travaux généraux de nettoyage tous les samedis dans cette ville. Une personne par famille devait le faire. Il a décidé de quitter le Myanmar en juin 1996.
  3330. 218
  3331. Ethnie: Birman
  3332. Age/sexe: 25 ans, masculin
  3333. Activité professionnelle: Etudiant
  3334. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mawlamyine (Moulmein), Etat Mon
  3335. Il a été arrêté par des membres du bataillon d'infanterie 208 alors qu'il voyageait avec d'autres personnes. Il a été amené au camp militaire de Kyar-In-Seik-Gyi où il est resté trois jours. Il a par la suite dû porter des obus, de la nourriture et des vêtements pour les soldats dans une opération militaire contre le Front démocratique des étudiants birmans (All Burma Student Democratic Front). Quinze autres porteurs l'accompagnaient. Neuf ont été tués par les militaires puisqu'ils n'étaient pas en mesure de porter la charge qui leur avait été assignée. Il est revenu au camp. Il a été requis de porter dans une seconde opération militaire. Cent porteurs accompagnaient cette fois les soldats. Il a réussi à s'enfuir. Tous ces événements se sont déroulés au cours d'un mois.
  3336. 219
  3337. Ethnie: Birman
  3338. Age/sexe: 24 ans, masculin
  3339. Situation familiale: Célibataire
  3340. Activité professionnelle: Cultivateur (rizière). Son frère s'occupe de ses terres
  3341. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawet Yekanchaung, Dedaye, division Ayeyarwady
  3342. Il a quitté le Myanmar puisqu'il ne réussissait plus à survivre, notamment parce qu'il devait vendre à des prix bien inférieurs à ceux du marché ses récoltes au gouvernement. Il a dû travailler à la construction d'un canal entre Pyapon et Dedaye, en 1994-95 à quatre reprises. C'est le chef du village qui transmettait les ordres provenant des militaires. Les 700 familles de son village devaient fournir un membre pour exécuter ce travail. Il travaillait en rotation avec son frère. Son frère pour sa part y aurait travaillé à huit reprises. Quatre-vingt-treize villages ont travaillé sur ce canal. Chaque village se voyait assigner une section qu'il devait terminer. Trois-cent-cinquante personnes travaillaient en même temps que lui, incluant des hommes et des femmes dont les plus jeunes avaient 10 ans. Certaines femmes étaient accompagnées de leurs jeunes nourrissons. Chaque assignation durait quinze jours. Le travail consistait à creuser le sol et à niveler le terrain. Il n'était pas rémunéré et devait dormir à proximité du site de travail. Il devait également apporter leur propre nourriture. Il était possible de payer un substitut: 1 500 kyats. Il a payé à deux reprises. Les travailleurs faisaient fréquemment l'objet de mauvais traitements, sans raison. Il a vu des travailleurs laissés au soleil, les pieds immobilisés dans un carcan pendant deux à trois jours. Il n'a pas personnellement fait l'objet de mauvais traitements.
  3343. 220 à 228
  3344. Ethnie: Mon
  3345. Age/sexe: 220: 63 ans, masculin; 221: 63 ans, féminin; 222: 23 ans, masculin; 223: 40 ans, masculin; 224: 30 ans, masculin; 225: 44 ans, masculin; 226: 14 ans, masculin; 227: 30 ans, masculin; 228: 19 ans, masculin
  3346. Activité professionnelle: Le témoin 220 était chef de village alors que le témoin 221 était moine
  3347. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Anin, Thanbyuzayat, Etat Mon (sauf le témoin 228 qui était du village de Chabone, canton Yebyu et division Tanintharyi)
  3348. Le témoin 220 et sa femme qui est le témoin 221 sont venus en Thaïlande il y a plus de deux ans. Avant de quitter, ils ont vécu pendant environ trois ans à Ye Bu (mais sont retournés fréquemment au village d'Anin). Ils ont quitté parce qu'ils ne pouvaient plus payer les taxes de porteur ainsi que les contributions au SLORC et aux milices Pyithu Sit, qui fournissaient des armes au gouvernement, alors que les villageois devaient leur fournir de la nourriture et un logement. Avant de quitter pour Ye bu il y a cinq ou six ans, il y avait 700 familles dans le village d'Anin. De ses proches, cinq familles ont dû partir. De la famille du témoin 223, six maisons ont dû quitter le village. Lorsque lui et sa femme, après deux ans en Thaïlande, ont décidé de retourner brièvement dans leur village au début de l'année, il ne restait que quelques maisons. Le témoin 228 déclare que son village d'environ 70 maisons, Chabone, fut relocalisé l'année dernière, ce qui fait que la plupart des habitants sont venus en Thaïlande. Le témoin 220 était un membre du conseil local du village d'Anin pendant quatre ans avant que le SLORC fût établi le 18 septembre 1988. Il devint le chef du village une année et demie plus tard. Deux à trois ans après l'établissement de SLORC, le travail forcé, qui était limité auparavant au portage, fut étendu à d'autres activités pour le village d'Anin. Ce travail forcé comprenait notamment: construction de bâtiments pour les militaires; plus tard, construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy), construction de la route de Thanbyuzayat jusqu'à Anin; portage; tâche de surveillance près du chemin de fer; en fait, tout ce que les militaires avaient besoin (réparation du toit du bâtiment de la police, creuser des tranchées, nettoyer le village et les bâtiments des militaires et, durant la saison des pluies, ramasser des feuilles pour les toitures). L'organisation du travail forcé était la suivante: pour le portage, depuis 1990, les gens étaient toujours arrêtés par les militaires. Pour les autres travaux, les militaires envoyaient une lettre au chef du village en lui mentionnant le nombre de personnes dont ils avaient besoin pour effectuer une tâche. Ce nombre variait selon le travail qui devait être accompli. Les personnes choisies devaient se rendre. Il y avait environ 40 sous-chefs de village qui étaient en charge de 20 maisons chacun. Lorsque le chef du village recevait l'ordre, il disait aux sous-chefs de fournir les personnes requises sur une base rotative. Pour la construction de bâtiments militaires, l'ordre venait du bataillon 31, alors que pour la construction du chemin de fer, il venait du bataillon 104. En ce qui concerne les menaces dans les cas où les gens ne se rendaient pas pour effectuer le travail, elles n'étaient pas incluses dans la lettre mais prononcées verbalement lorsque la lettre était remise au chef du village. Ces menaces indiquaient que, si le travail n'était pas accompli selon les règles, le chef du village serait arrêté ainsi que tous les autres villageois. Ceux qui ne pouvaient y aller devaient payer 2 500 kyats par famille. Pour la construction de nouveaux bâtiments militaires, le travail durait environ un mois; pour la réparation de vieux bâtiments, ce travail durait environ sept jours. Comme le site était près du village, les gens pouvaient retourner au village la nuit. Ils devaient travailler de 5 heures jusqu'à 18 heures en apportant leur propre nourriture et en nourrissant également le militaires. Dès l'âge de 12 ans, et ce jusqu'à 50 ou 60 ans, les hommes et les femmes devaient travailler. Les enfants et les personnes âgées travaillaient uniquement lorsqu'il n'y avait personne d'autre de disponible dans la maison. Les militaires ne battaient pas les gens qui construisaient les bâtiments mais les insultaient et les menaçaient. La construction du chemin de fer de Ye-Dawei a débuté autour de 1993 et se poursuivait toujours. Environ 700 personnes du village d'Anin ont travaillé sur ce projet. Elles étaient séparées en deux groupes de 350 personnes qui travaillaient de façon rotative pendant 14 jours. Les travailleurs étaient choisis par les quarante sous-chefs qui étaient responsables d'environ 20 maisons et devant fournir 20 personnes. Si un sous-chef ne pouvait fournir le nombre requis de personnes, il devait payer une amende de 2 500 kyats par personne pendant deux semaines. Le trajet pour se rendre sur le site de travail était de six heures de train. Le site de travail se situait près du village de Kalot. En principe, les travailleurs dormaient dans la jungle et construisaient eux-mêmes des petits abris en plus de faire le propre cuisine. Le travail était assigné par section et chaque personne devait compléter une certaine unité chaque jour. Les militaires donnaient directement les ordres aux sous-chefs en ce qui concerne le travail qui devait être effectué par chaque groupe. Si ceux-ci ne réussissaient pas à accomplir le travail, ils étaient punis. Les femmes et les enfants de 12 ans ainsi que les personnes âgées (50 ou 60 ans) devaient également travailler. Les gens du village d'Anin n'étaient pas maltraités bien que les villageois d'autres endroits qui désobéissaient aux ordres étaient battus par les militaires. A chaque jour, huit personnes du village devaient effectuer des tâches de surveillance près du chemin de fer. Finalement, en ce qui concerne le portage, cette pratique existait avant 1988 mais fut en nette augmentation après l'établissement du SLORC. Jusqu'en 1990, les porteurs étaient arrêtés directement par les militaires dans les villages ou les ordres étaient donnés directement au chef du village. Pour le portage, les militaires réquisitionnaient un certain nombre de personnes qui pouvaient aller jusqu'à 40 à la fois. Lorsque les combats s'intensifiaient près de la frontière, les militaires amenaient tout le monde avec eux. Les troupes marchaient près de la frontière et, en moyenne une fois par mois, ils utilisaient 20 à 30 porteurs par jour (certaines personnes pendant un à deux mois, alors que d'autres pour seulement dix jours). Certains porteurs ne sont jamais revenus puisqu'ils se sont fait tuer ou se sont échappés. Personne ne voulait aller faire du portage, ce qui fait que la majorité des gens préférait donner de l'argent. Les hommes s'enfuyaient alors que les femmes et les enfants restaient. En 1990, le chef du village a informé les militaires qu'il ne voulait pas être responsable pour réquisitionner des porteurs. Il leur a donc demandé de s'arranger entre eux. Après cela, à chaque fois que les villageois étaient informés que les militaires arrivaient dans la région, ils préféraient s'enfuir. Le témoin 225 fut arrêté par les militaires pour des fins de portage avec environ 200 autres personnes en 1990-91. Les militaires l'ont emmené pendant un mois près de la montage de Kalama. Il devait transporter du riz et d'autres types de nourriture (environ 80 kg pour deux porteurs). Lorsqu'un porteur était fatigué, les militaires le frappaient avec leurs bottes. Dans certaines situations, lorsqu'un porteur était malade et ne pouvait plus transporter sa charge, les militaires le fusillaient. Le témoin 225 a vu environ dix personnes sur 200 porteurs tuées. Environ 15 à 20 personnes furent frappées et certaines furent grièvement blessées. En général, les militaires ne se préoccupaient pas de ceux qui ne pouvaient plus bouger et les fusillaient purement et simplement. Les porteurs devaient tolérer des blessures très graves suite aux charges excessives qu'ils devaient transporter. Le témoin 225 a été malade et il crachait du sang. Les porteurs n'ont jamais reçu de traitement médical et devaient se soigner eux-mêmes. On leur interdisait de fumer et ils ne recevaient qu'un peu de riz et des feuilles de bananes. Ils n'avaient pas le droit de cuisiner. Le témoin 225 fut envoyé à Kawkareik (avec environ 1 000 personnes sur un bateau) lorsqu'il fut relâché. Le témoin 222 a effectué du portage autour de 1993-94 pour le bataillon 109. Il devait transporter des marchandises (dans son cas, environ 40 kg de riz) jusqu'à Nat Ein Taung près de projets pétroliers. Il a été envoyé par son village pour effectuer du portage parce que c'était son tour. Il y est allé avec sept ou huit autres personnes de son village. En tout, il y avait environ 7 000 personnes. Mais ceux qui pouvaient se permettre de payer 1 000 kyats étaient relâchés. Ainsi, 300 personnes ont pu éviter le portage. Il a été absent pendant environ dix jours et il a mis six jours pour se rendre à Nat Ein Taung. Sur le chemin, il y avait des combats et deux porteurs furent blessés. Les militaires les ont fusillés parce qu'ils ne pouvaient plus transporter leurs charges. Un porteur était responsable de cinq autres porteurs (dans le cas où ceux-ci voulaient s'enfuir) et certains se sont enfuis et furent tués. Il n'a pas été témoin de cela personnellement. Si un porteur réussissait à s'enfuir, le militaire était puni. Il a vu à une occasion un officier frapper un soldat avec son arme parce qu'un porteur s'était enfui. De Nat Ein Taung, il a dû transporter les biens d'un soldat sur son dos. Sur le chemin du retour, il a vu environ 15 corps, principalement des porteurs, qui avaient été tués après avoir été fusillés ou battus. Lors des combats, les militaires ordonnaient aux porteurs de se coucher par terre. Le témoin 222 n'a jamais été battu bien que certains porteurs qui ne pouvaient transporter leurs charges le furent. Il a vu toutefois certaines personnes âgées ne pouvant transporter leurs charges être relâchées. Les porteurs recevaient une petite quantité de riz et de poisson. Le témoin 226, qui a quitté le Myanmar il y a environ trois ans alors qu'il était âgé de 11 ans, n'a pas eu à effectuer du travail forcé.
  3349. 229
  3350. Ethnie: Birman
  3351. Age/sexe: 30 ans, féminin
  3352. Situation familiale: Une mère et trois soeurs
  3353. Activité professionnelle: Commerçant
  3354. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Ye, Etat Mon
  3355. Le témoin est venu en Thaïlande en 1997 parce qu'il était trop difficile de survivre en Birmanie. Dans le village de Ye, les hommes avaient très peur et plusieurs s'étaient enfuis vers la Thaïlande. Les autorités du Myanmar ont demandé à sa famille d'exécuter du travail forcé. Un membre de sa famille devait y aller. Puisque tous les membres de sa famille étaient des femmes, elles ne pouvaient y aller et devaient payer plutôt une somme d'argent. Au milieu de 1996, elles ont dû payer 3 000 kyats. Un membre plus éloigné de sa famille a travaillé de 1995 jusqu'à la fin de 1996 pour les ingénieurs du gouvernement en tant que travailleur contractuel sur le projet du chemin de fer du village de Koe Mine (à neuf miles du village de Ye). Le contracteur recevait de l'argent pour engager des travailleurs afin qu'ils exécutent un travail déterminé. Il devait aller dans la région afin de trouver 100 personnes à qui il payait 180 kyats par jour. Il devait identifier les travailleurs et les ramener avec lui. Parfois, ces travailleurs contractuels travaillaient au côté de personnes qui exécutaient du travail forcé. A certaines occasions, les militaires ont réquisitionné ces travailleurs contractuels pour qu'ils effectuent du portage. Dans le village de Ye ainsi que dans le reste du canton, chaque famille devait fournir un membre pour travailler sur le chemin de fer. En principe, le contracteur utilisait les travailleurs qualifiés pour les travaux d'ingénierie ou de construction de ponts, alors que les travailleurs forcés faisaient du travail plus difficile. Il y avait également des prisonniers qui étaient utilisés pour casser des pierres. Il y avait beaucoup de gens qui faisaient du travail forcé sur la construction du chemin de fer. Chaque ville et chaque village se voyaient allouer une quantité de travail à exécuter. Lorsque le village avait une population plus considérable et était plus près du chemin de fer, le travail devait être complété en cinq jours. Dans le cas contraire, le délai pouvait aller jusqu'à dix jours. La fréquence dépendait du lieu où la personne vivait. A Ye, les gens étaient bien organisés et se rendaient au travail forcé que deux fois en huit mois. Un peu plus loin du village, les gens étaient plus pauvres et devaient s'y rendre un peu plus souvent (environ quatre fois en huit mois). Jusqu'à aujourd'hui, sa famille a dû payer entre 80 et 90 kyats par mois. Plus éloigné du centre ville, le taux était de 90 kyats. Les gens en ville pouvaient être arrêtés pour le portage et avaient ainsi peur d'ouvrir leur porte. Si quelqu'un pouvait payer entre 5 000 et 10 000 kyats, il pouvait se voir exonérer du travail. Toutefois, ceux qui vivaient éloignés de Ye ne pouvaient se permettre ce genre de chose. Sa famille possédait une voiture. Parfois, elle était réquisitionnée avec un chauffeur pendant trois à quatre jours par les militaires. Ces derniers promettaient de fournir de l'essence mais ne l'ont jamais fait. Lorsque les gens étaient amenés comme porteurs, ceux qui pouvaient s'échapper revenaient rapidement alors que les autres pouvaient être absents de trois à six mois. Le portage a débuté il y a fort longtemps. Tous les groupes ethniques dans le village de Ye étaient traités de la même façon. Autour de la ville, les villages étaient constitués principalement de Mons et de Karens. Certains membres de sa famille ont dû effectuer du portage et ont beaucoup souffert. Ils n'étaient jamais aussi bien traités que les militaires. Un de ses jeunes cousins réquisitionné pour le portage fut absent pendant trois mois. Il a, par la suite, pu trouver un remplaçant dans le village. Lorsque les porteurs étaient fatigués, ils étaient battus et on les privait de riz. Lors des combats, les porteurs manquaient d'entraînement et pouvaient être blessés. De plus, ceux qui étaient malades et qui ne pouvaient plus transporter leurs charges étaient fusillés. Son cousin fut battu mais n'en a pas gardé de séquelles.
  3356. 230
  3357. Ethnie: Musulman
  3358. Age/sexe: 45 ans, masculin
  3359. Situation familiale: Marié avec quatre enfants
  3360. Activité professionnelle: Vendeur de boissons froides
  3361. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mawlamyine (Moulmein), Etat Mon
  3362. Le témoin a dû exécuter du travail forcé mais uniquement avant de quitter le pays suite aux événements de 1988. Les membres de sa famille qui sont restés au Myanmar devaient aller une fois par semaine pendant une journée travailler à l'aéroport de Mawlamyine afin de nettoyer le sol et couper le gazon. Lorsqu'ils ne pouvaient y aller, ils devaient payer 300 kyats. Les ordres venaient des autorités du district via le chef du village. De plus, les membres de sa famille ont également dû travailler sur l'entretien de la route et ont dû couper le gazon une fois par semaine environ trois fois par mois pendant une demi-journée et même une journée entière. Ils payaient habituellement 300 kyats afin de ne pas y aller. Ils ont également dû payer des taxes de porteurs de 300 kyats deux fois par mois. Parfois, lorsqu'un visiteur venait et s'enregistrait auprès des autorités en tant que visiteur dans leur maison, ils devaient payer 50 kyats. Egalement, lors de grands événements, les militaires venaient leur réclamer de l'argent. Le témoin a montré un document daté du 27 juin 1990 qui confirmait le versement de 10 000 kyats pour la réparation et la réfection de routes (somme qui devait être payée par les propriétaires de commerces mais qui ne remplaçait pas le travail forcé).
  3363. 231
  3364. Ethnie: Bouddhiste
  3365. Age/sexe: 36 ans, masculin
  3366. Situation familiale: Marié avec un enfant
  3367. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kyaukphyu, Etat Rakhine
  3368. Le témoin a quitté le Myanmar il y a dix ans. Lorsqu'il est retourné à Kyaukphyu pendant trois mois en 1995, il a été témoin de travail forcé sur la route de Minbu dans la Division de Magway jusqu'à Taungkok dans l'Etat Rakhine près d'Ann. Ce travail faisait partie d'un projet qui avait débuté en 1993. Le travail avait été distribué par région; 600 à 700 personnes de cette région devaient y travailler. A la suite des ordres des autorités, chaque famille devait envoyer un travailleur. Pendant les trois mois où il est retourné pour vivre avec sa famille, cette dernière fut réquisitionnée à quatre reprises pendant dix jours pour travailler. Il s'est lui-même rendu pour sa famille à trois occasions pendant dix jours; il fut exempté à la quatrième occasion en payant 150 kyats par jour au chef du village. Il devait marcher pendant quatre heures jusqu'au site de travail et devait apporter sa propre nourriture pendant dix jours. Il devait rester sur ce lieu pendant toute la période et il travaillait de 7 heures le matin jusqu'à 18 heures, avec une pause pour le déjeuner. Il dormait à la belle étoile. Les militaires les surveillaient mais ne les ont pas battus. Il n'a jamais effectué d'autre travail forcé pendant ces trois mois, et il n'y avait pas de taxe de porteur dans l'Etat Rakhine. Une majorité de Rakhines s'étaient joints à l'armée et n'opprimaient pas les villageois.
  3369. 232
  3370. Ethnie: Birman
  3371. Age/sexe: 31 ans, masculin
  3372. Situation familiale: Marié avec deux enfants
  3373. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kaw Tot, près du village de Ye, Etat Mon (le village comptait environ 2 000 familles; il est originaire de Yangon)
  3374. Le témoin a quitté le Myanmar pour la première fois en 1991 mais est retourné pendant un mois en novembre 1997. Dans le village de Kaw Tot, sa femme ainsi que ses trois soeurs mariées vivaient avec leurs enfants et leur mari ensemble dans une grande maison afin de réduire les charges liées au travail forcé. Le chef du village a voulu les considérer comme plusieurs familles. En novembre 1997, il est allé demander à certains membres de sa famille d'exécuter du travail forcé pour couper des buissons autour du chemin de fer de Ye-Dawei pendant une journée. Ils ont versé, afin d'être exemptés, une somme de 150 à 200 kyats pour une journée. Ils ont ainsi payé une seule fois pour toute la maison. Ils ont également dû payer des taxes de porteurs d'environ 700 kyats par mois directement aux militaires. On a exigé d'eux quatre fois 700 kyats pour un mois parce que les militaires n'acceptaient que l'on puisse les considérer comme une seule famille.
  3375. 233
  3376. Ethnie: Mon
  3377. Age/sexe: 34 ans, masculin
  3378. Situation familiale: Marié avec un enfant
  3379. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Taungpone, Ye, Etat Mon (le village comptait 4 000 familles)
  3380. Le témoin est venu en Thaïlande il y a environ dix ans et a essayé, à plusieurs reprises, de retourner au Myanmar mais n'y est pas parvenu; puisqu'il y avait un manque d'hommes, on les a contraints à exécuter du travail forcé. Sa femme, qui est retournée il y a environ six mois (elle continue d'effectuer des aller et retour), a dû effectuer du travail forcé dans les six derniers mois. Les femmes devaient nettoyer les buissons près d'un pont deux fois par mois pendant une journée complète afin d'empêcher une embuscade de la part de rebelles. Les hommes étaient envoyés à Dawei (Tavoy) pour travailler sur le gazoduc ou le chemin de fer. Il sait tout parce qu'il y a environ 50 jours sa femme lui a téléphoné et lui a dit de ne pas venir puisque l'armée recrutait toujours des hommes pour une durée d'un mois. Certaines femmes ont dû ramasser des pierres pour le chemin de fer. Sa femme a dû y aller deux fois par mois afin de nettoyer les buissons ou de ramasser les pierres. Puisque son mari n'était pas là, elle devait y aller ou payer. Tous devaient également payer une taxe mensuelle de porteur variant en fonction du revenu de chacun. Le travailleur ordinaire payait 700 kyats par mois, alors qu'un propriétaire terrien pouvait payer 1 500 kyats.
  3381. 234 et 235
  3382. Ethnie: Mon
  3383. Age/sexe: 35 et 25 ans, tous deux masculins
  3384. Situation familiale: Tous deux célibataires
  3385. Activité professionnelle: Tous deux travaillaient sur la construction du chemin de fer
  3386. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Ye, Etat Mon (témoin 234); Sakaya, Ye, Etat Mon (témoin 235)
  3387. Les deux témoins furent engagés par un contracteur afin de travailler sur la construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy) qui a débuté en 1992. Ils ont tous deux dû payer 1 000 kyats à la personne responsable des chemins de fer afin d'obtenir cet emploi. On leur avait promis un salaire de 100 kyats par jour en tant qu'employés du gouvernement mais ils n'ont jamais rien reçu. Après six mois de travail sur le chemin de fer sans avoir été payés (en 1995 et 1996), ils ont décidé de quitter avec quatre autres personnes. Alors qu'ils travaillaient sur le chemin de fer, ils ont vu du travail forcé sur le site de construction. En ce qui concerne le travail forcé, en 1995 et 1996, les autorités locales du LORC leur ont ordonné de creuser des tranchées dans la ville de Ye sans rémunération. Ce travail avait lieu une fois par semaine ou trois fois par mois pendant une ou deux journées à la fois durant la saison sèche. Ils devaient travailler de 7 h 30 le matin jusqu'à 16 heures. Ils ne travaillaient pas lorsqu'il pleuvait. En tout, il y avait environ 600 personnes de différents villages qui travaillaient. Le témoin 234 a été utilisé comme porteur avant d'obtenir le travail sur la construction du chemin de fer. Il ne se souvient plus exactement du moment où il a dû faire ce portage, mais cela a duré pendant quinze jours. Les militaires l'ont arrêté lors d'une visite à Mawlamyine (Moulmein) et l'ont envoyé par camion au passage des Trois pagodes. Ils ont arrêté énormément de gens, environ 10 à 15 camions pleins. Les gens n'étaient pas ligotés mais ils étaient surveillés. Il a dû transporter des sacs de cartouches qui pesaient environ 20 kg. Il n'a jamais été rémunéré et a reçu un peu de riz. Il a vu d'autres personnes qui étaient incapables de transporter leur charge et qui furent battues mais pas tuées. Certaines ont été grièvement blessées à la suite de ces violences. Il n'a vu personne être abandonné le long de la route. Après quinze jours, il fut relâché au passage des Trois pagodes. Il a mis six jours pour rentrer à la maison. Par la suite, lorsqu'il fut employé pour la construction du chemin de fer. Ils ont tous deux dû payer des taxes de porteur d'environ 600 kyats par mois.
  3388. 236
  3389. Ethnie: Birman
  3390. Age/sexe: 44 ans, masculin
  3391. Situation familiale: Marié avec cinq enfants
  3392. Activité professionnelle: Il faisait des filets de pêcheurs
  3393. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Setse, Thanbyuzayat, Etat Mon (le village comptait environ 1 000 familles)
  3394. Le témoin est venu en Thaïlande en 1993 parce qu'il devait effectuer du travail forcé et payer des taxes de porteur qu'il ne pouvait plus assumer. Il n'avait plus le temps de travailler pour sa propre famille. Conformément aux ordres des autorités locales, il devait aller une à deux fois par semaine nettoyer les buissons ou effectuer des tâches de surveillance, avec 80 à 100 personnes de son village. Les militaires les surveillaient et les insultaient mais ne les battaient pas. Si quelqu'un n'y allait pas, les militaires le trouvaient. Si la personne ne pouvait pas y aller, elle devait payer une amende d'environ 300 à 500 kyats. Quatre à cinq jours par mois, et ce durant toute l'année, une personne par famille devait également effectuer du travail de réfection sur la route entre Thanbyuzayat et Setse. Environ 80 à 100 personnes à la fois devaient s'y rendre. Le tout était organisé par huit à dix sous-chefs responsables chacun de dix familles. Le travail forcé était exécuté de façon rotative entre village ou région. Les travailleurs du gouvernement n'étaient pas obligés d'effectuer du travail forcé. Ceux qui ne voulaient pas y aller devaient payer une amende. En 1990 et jusqu'en 1993, elle s'élevait pour une journée à 300- 500 kyats. Il devait également payer des taxes de porteur s'élevant à 200 kyats par mois, outre les 300 à 400 kyats qui devaient être versés pour les portages d'urgence. Ces paiements devaient être effectués au moins une et même deux fois par mois. Il a dû effectuer du portage à une occasion lorsqu'il fut arrêté par les militaires du bataillon 26 vers 1985 ou 1986. Il a dû transporter de lourdes charges jusqu'au passage des Trois pagodes pendant deux mois. Il s'est par la suite enfui. Il a été battu parce que sa charge l'empêchait d'avancer rapidement. Il n'a jamais été rémunéré et a reçu uniquement un peu de riz. Il a vu des porteurs tués par les militaires, y compris un homme qui ne marchait pas assez rapidement et blessé à l'épaule. Les militaires l'ont attaché et lui ont passé une corde autour du cou. Par la suite, ils l'ont frappé avec leurs bottes et l'ont étranglé jusqu'à ce que mort s'ensuive. Il a également vu deux porteurs qui transportaient de lourdes charges et qui voulaient se reposer; un soldat du bataillon 26 leur a dit "si vous vous reposez, vous vous reposerez pour le reste de votre vie". Il les a par la suite poussés du haut de la falaise. Il a vu environ 60 porteurs sur un total de 108 mourir durant le portage. Lorsque les personnes ne pouvaient transporter leur charge, elles étaient battues et certaines mouraient. Les soixante porteurs furent tués par les militaires et non par l'ennemi. Ainsi, il a toujours payé les taxes de porteur parce qu'il ne voulait pas effectuer du portage. Il s'est finalement enfui en Thaïlande. Après son départ, sa famille a dû travailler sur la construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy). Ils devaient s'y rendre une fois par année pendant vingt jours.
  3395. 237
  3396. Ethnie: Birman
  3397. Age/sexe: 35 ans, masculin
  3398. Situation familiale: Marié avec deux enfants
  3399. Activité professionnelle: Capitaine d'un petit bateau qu'il louait du propriétaire et qui pouvait transporter 25 à 30 personnes.
  3400. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Kawthaung, division de Tanintharyi
  3401. Le témoin a quitté le Myanmar il y a cinq ans parce que les autorités réquisitionnaient son bateau afin d'être transportées gratuitement; il n'avait dès lors plus d'argent pour payer le propriétaire du bateau (environ 150 bahts par jour). Il était réquisitionné environ deux fois par mois pendant une journée complète. Il devait payer l'essence et être au service des militaires. De plus, il a dû transporter ces militaires à trois ou quatre occasions pendant un mois dans le cadre de situations d'urgence. Il devait habituellement transporter toute sorte de personnes en position d'autorité: police, autorités d'immigration et militaires. Pour les urgences, il devait également transporter de la nourriture ou des habitants des petites îles près de Kawthaung. Les situations dites d'urgence se produisaient normalement lorsque les militaires, la police ou les autorités d'immigration voulaient se rendre sur une des îles sans lui donner d'explication. Ce n'était jamais pour transporter des gens à l'hôpital ou pour assister des personnes en danger. De plus, chaque samedi, une personne de chaque maison devait aller exécuter du travail forcé consistant à nettoyer le village ou à creuser des tranchées. Si quelqu'un n'y allait pas, il devait payer 200 kyats. Habituellement, il préférait payer plutôt que d'envoyer quelqu'un de sa famille. Dans cette région, il n'y avait pas de taxes de porteur. Les gens devaient uniquement payer une taxe de pompier d'environ 50 kyats par mois. Cet argent allait aux pompiers bien que ces derniers recevaient déjà un salaire et qu'il n'y avait jamais d'incendie.
  3402. 238
  3403. Ethnie: Mon
  3404. Age/sexe: 20 ans, masculin
  3405. Situation familiale: Ses parents et quatre frères et soeurs
  3406. Education Septième année
  3407. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Zathabyin, Hpa-an, Etat Kayin
  3408. Le témoin a quitté le Myanmar il y a quatre ans parce qu'il devait effectuer du portage et d'autres types de travail forcé. A l'âge de 15 ans, alors qu'il était en sixième année, il fut arrêté lors d'une visite à Kyondo, près de Kawkareik. A un point de contrôle policier, on l'a fait sortir de l'autobus dans lequel il voyageait avec trois autres personnes (le chauffeur, son assistant et un ancien soldat) et il fut mis dans une petite cellule. Les militaires ont ordonné aux policiers de réquisitionner des hommes pour le portage et de les garder jusqu'à ce qu'ils reviennent les chercher. Alors que la police s'est absentée, il a réussi à s'échapper. Il n'y avait pas de taxes de porteur sur une base régulière. Il existait uniquement une taxe de porteur d'urgence sur une base irrégulière. Lorsque les autorités demandaient des porteurs, on devait payer environ 1 000 kyats afin de ne pas y aller. Ceci arrivait environ une fois par mois dans sa famille. Toutes les familles devaient contribuer au travail forcé et chacune se voyait assigner une tâche particulière qu'elle devait terminer en cinq jours. Ceci devait être fait une fois tous les trois ou quatre mois. L'ordre émanait des autorités locales. Il était possible de rentrer à la maison le soir. En 1997 (lorsqu'il est retourné dans son village pendant deux mois), il a dû travailler à deux occasions pendant quinze jours à transporter des pierres et à niveler le sol pour la construction d'un pont entre son village et la route de Zathabyin à Mawlamyine (Moulmein). Un membre de chaque famille devait s'y rendre.
  3409. 239 et 240
  3410. Ethnie: Mon
  3411. Age/sexe: Le témoin 239: 26 ans, et le témoin 240: 18 ans, toutes deux de sexe féminin
  3412. Situation familiale: Toutes les deux mariées; avant de quitter le village, le témoin 239 était dans la maison de ses parents avec quatre frères et soeurs; le témoin 240 était dans la maison de sa grand-mère avec sa mère et sa soeur plus jeune
  3413. Education Témoin 239: quatrième année; témoin 240: septième année
  3414. Activité professionnelle: Témoin 239: pêcheur et vendeur de poisson
  3415. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Zathabyin, Hpa-an, Etat Kayin
  3416. Les deux témoins ont dû exécuter elles-mêmes du travail forcé (le témoin 239 depuis l'âge de 13 ans). Le témoin 239 a quitté le Myanmar il y a environ une année; le témoin 240 a quitté le Myanmar il y a deux ans. Le témoin 240 a déclaré que, pour la construction de la route de Zathabyin jusqu'à Hpa-an, chaque famille devait fournir une personne pendant quatre à six jours environ trois fois tous les deux mois. Le travail pouvait s'effectuer en quatre jours si on faisait partie d'un grand groupe alors qu'il s'effectuait en six jours si le travail était plus considérable. La durée dépendait des instructions du chef du village. Le témoin 240 y est allé à deux reprises. Les autres fois, ils sont venus dans sa famille; la famille a alors préféré payer 1 000 à 2 000 kyats pour quatre à six jours. Lorsqu'elle y est allée, elle est restée sur le lieu de travail puisqu'il était éloigné de son village. Elle a dormi sur place à une occasion alors que les autres fois elle a préféré rentrer durant la soirée. Ils devaient apporter leur propre nourriture et leurs instruments de travail. Le témoin 239 confirme ces déclarations. Elle a elle-même exécuté du travail forcé à de nombreuses reprises depuis l'âge de 13 ans parce que sa famille ne pouvait se permettre de payer et que ses parents étaient très vieux. Parfois, elle devait y aller deux fois par mois. Le témoin 240 a déclaré qu'il y avaient des militaires qui venaient normalement donner des instructions pour la fin du travail. Lorsque les militaires s'en allaient, les travailleurs pouvaient se reposer. Il n'y avait pas de harcèlement sexuel. Le témoin 239 a indiqué que, lorsqu'un chef militaire de Hpa-an est venu, ils ont dû nettoyer la route pendant une journée. Ceci arrivait deux à trois fois par mois pendant une journée complète (8 heures du matin à 18 heures). Le témoin 240 a ajouté qu'elle allait normalement exécuter ce type de travail (alors que sa famille avait tendance à payer plutôt que de l'envoyer travailler sur la route). Les taxes de porteur devaient être payées une fois par mois, parfois pour du portage d'urgence. Le taux dépendait des revenus de chaque famille. Pour le témoin 239, sa famille payait environ 300 kyats alors que, pour le témoin 240, elle payait environ 600 kyats.
  3417. 241
  3418. Ethnie: Birman
  3419. Age/sexe: 24 ans, féminin
  3420. Situation familiale: Six (elle vivait avec ses parents)
  3421. Activité professionnelle: Pêcheur
  3422. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Myeik (Mergui), division Tanintharyi
  3423. Le témoin a quitté le Myanmar en janvier 1997. Son jeune frère fut arrêté en 1994-95 alors qu'il se rendait dans un village près de Myeik (Mergui). Il fut amené à Netaye Taung avec deux personnes de son village. Son jeune frère est tombé malade alors qu'il effectuait du portage, et les deux autres personnes ont déclaré que les militaires l'avaient abandonné dans la jungle. Eux-mêmes ont pu s'enfuir plus tard et ont essayé de le trouver. Malheureusement, il était déjà mort. Elle n'a jamais effectué de travail forcé. Dans sa famille, les autres membres ont dû en effectuer très souvent. Habituellement, son jeune frère qui est mort devait y aller trois fois par mois et parfois pendant un mois complet. Il partait dans des endroits éloignés, et ce depuis l'âge de 16 ans. Il était le seul homme de la famille à l'exception de son vieux père.
  3424. 242
  3425. Ethnie: Karenni
  3426. Age/sexe: 21 ans, féminin
  3427. Situation familiale: Cinq (elle, ses parents et deux soeurs)
  3428. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Hpa-an, Etat Kayin (a vécu depuis 1979 dans une région contrôlée par le KNU dans l'Etat Kayin)
  3429. (Ceci est un résumé du témoignage donné par "Wa Wa" lors de la deuxième session de la commission à Genève.)
  3430. En sa capacité d'officier du FTUB en charge des femmes et des enfants, elle a interviewé plusieurs réfugiés qui ont effectué du travail forcé. Elle a fait ses entrevues pendant trois mois, débutant en avril 1996. Les gens qu'elle a interviewés ont eu à travailler sur la construction de la route entre Nabu et Dawlan, Nabu et Kawkareik et Nabu et Kyondo. Nabu était un village musulman qui fut relocalisé lorsque l'armée est arrivée en 1995. Certains des villageois devaient se rendre très loin de leur village afin d'effectuer le travail forcé. Les femmes, les enfants âgés de 10 à 12 ans ainsi que les personnes âgées entre 50 et 60 ans devaient tous effectuer ce travail. Les villageois ne pouvaient se reposer que pendant une heure durant la journée. Ils devaient fournir leur propre nourriture, le bois pour le feu ainsi que le matériel pour cuisiner. Certains villageois sont morts à la suite de maladies. Certains furent battus par les militaires. Un homme âgé d'environ 60 ans est mort d'épuisement. Une jeune fille fut tuée lors d'un accident de travail (glissement de terrain); sa famille n'a reçu aucune indemnisation. Lorsqu'un villageois ne pouvait se rendre pour effectuer du travail forcé, il devait engager un remplaçant qui pouvait lui coûter entre 200 et 1 000 kyats. Les villageois qu'elle a interviewés lui ont également fait part du portage qu'ils avaient dû effectuer. Les gens qu'elle a interviewés lui ont dit qu'ils avaient été contraints de signer un papier pour l'armée et que leurs terres furent confisquées sans indemnisation. Aucun des villageois ne possédait de voiture. Les routes étaient réservées aux militaires. Les ordres concernant le travail forcé et le portage étaient donnés par les militaires par l'intermédiaire du chef du village.
  3431. 243
  3432. Ethnie: Karenni
  3433. Sexe: Masculin
  3434. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yangon
  3435. (Ceci est un résumé du témoignage fourni par "Min Lwin" lors de la deuxième session de la commission à Genève.)
  3436. Le témoin a quitté Yangon en 1982 et est allé travailler dans une usine de ciment à Thayet dans la partie centrale du Myanmar. Il a quitté l'usine de ciment durant les événements de 1988 et est allé dans une région contrôlée par le KNU près de la frontière thaïlandaise. A cet endroit, il a travaillé comme mécanicien pour le KNU. Alors qu'il était dans cette région, il a parlé à des gens qui s'étaient échappés alors qu'ils étaient porteurs pour le SLORC. Ils lui ont dit qu'il devait transporter des charges entre 20 et 45 kg. Ils devaient accompagner les militaires à la ligne de front durant les combats. Ils devaient alors surveiller les munitions des militaires. Ils devaient également creuser des tranchées et aller chercher de l'eau pour les militaires. Ces porteurs ont été arrêtés dans des cinémas ou le long des routes. Les porteurs étaient battus lorsqu'ils étaient trop lents. Après avoir travaillé pour le KNU, le témoin a travaillé pour le FTUB en tant que secrétaire pour les droits de l'homme et les droits des travailleurs. Il a préparé des documents concernant les droits de l'homme. Il a interviewé plusieurs réfugiés (70 ou 80) sur les raisons de leur départ du Myanmar. Ses dernières rencontres ont eu lieu le 24 octobre 1997. La plupart des gens ont quitté le Myanmar à cause du travail forcé et parce que leurs terres avaient été confisquées par l'armée. Le travail forcé comprenait le travail de construction de routes ainsi que le travail dans les plantations qui appartenaient aux militaires. Il y avait également du travail de coupe de bois (les gens d'origine lao qui venaient de la région près de Mong Hsat dans l'Etat Shan ont dû effectuer ce type de travail). Les gens de Hmawbyi à Yangon ont dû effectuer du travail sur la route de Hmawbyi. D'autres personnes ont dû effectuer du travail forcé sur les projets d'irrigation dans la division de Yangon. Il a interviewé un prisonnier qui a dû travailler à la centrale électrique de Kalaymyo près de Kabaw. Les personnes de l'Etat Kayin lui ont dit que le travail forcé consistait à travailler, pour les bataillons 547, 548 et 549, sur les plantations que possédaient les militaires. Ils ont également dû effectuer du travail sur la construction de la route entre Hpa-an, Myawady et Mawlamyine (Moulmein), ainsi que la construction de camps militaires. Lorsque le site du travail était loin du village, les gens devaient dormir sur place. Aucun abri n'était fourni. Lorsqu'une personne ne pouvait y aller, elle devait engager un remplaçant. Les gens de la division de Ayeyarwady lui ont également dit qu'ils avaient déjà effectué du travail forcé qui consistait à construire une ferme pour l'élevage de poissons ainsi qu'un pont à Myaungmya. Il a également interviewé des gens qui ont effectué du travail forcé près de Kyaukkyi (division de Bago). Le témoin a également agi en tant qu'interprète pour une entrevue avec des gens qui ont effectué du travail forcé sur le chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy). Les ordres étaient habituellement donnés au chef du village par les militaires. Dans les villages plus populeux, le chef du village était nommé par les militaires alors que, dans les petits villages, les villageois le choisissaient eux-mêmes. Dans les villages où les villageois choisissaient eux-mêmes le chef du village, il y avait habituellement une rotation entre les villageois. Ceci venait du fait que la tâche de chef de village impliquait qu'il était responsable pour tout ce qui se passait dans le village: lorsqu'il y avait des problèmes, les militaires punissaient le chef du village. Ceci explique que personne ne voulait être chef du village s'il n'y avait pas de rotation. A plusieurs reprises, les femmes étaient choisies comme chef du village parce que l'on considérait que les militaires les traiteraient de façon un peu plus clémente. Cette rotation concernant la position de chef du village s'effectuait presque toutes les deux semaines. Les gens qui ont dû effectuer du travail forcé lui ont également parlé des punitions infligées par les militaires durant ce travail. Plusieurs personnes furent battues parce qu'elles ne travaillaient pas assez vite, et une femme qui était enceinte fut punie. On lui a demandé de se rouler plusieurs fois sur le sol. A la suite de cet incident, elle a perdu son bébé.
  3437. 244
  3438. Ethnie: Karenni
  3439. Age/sexe: 14 ans, féminin
  3440. Situation familiale: Sept (elle-même, ses parents, deux soeurs plus âgées et deux frères plus jeunes)
  3441. Education: Aucune
  3442. Activité professionnelle: Ses parents étaient agriculteurs
  3443. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Naw Khee, Kawkareik, Etat Kayin (le village comptait 40 familles)
  3444. (Ceci est un résumé du témoignage rendu par "Naw Mu" lors de la deuxième session de la commission à Genève.)
  3445. Le témoin a exécuté du travail forcé pour la première fois alors qu'elle n'avait que 11 ans. Elle était la seule personne dans sa famille qui était disponible pour effectuer du travail forcé. Les villageois recevaient les ordres du chef du village et devaient fournir un travailleur par famille. Sa mère était malade et son père et sa soeur plus âgée étaient hors du village pour travailler. Le premier endroit où elle a dû travailler fut à T'Nay Cha (Nabu) qui était à une demi-journée de marche de son village. Elle y est allée avec d'autres personnes de son village. Elle devait construire un remblais pour une route liant T'Nay Cha (Nabu) à Kawkareik. Ils devaient tous travailler de 6 heures jusqu'à 17 heures avec une pause d'une heure le midi. Le travail était très difficile et on ne leur permettait pas de se reposer. Ils devaient rester sur le site pendant trois jours et y dormir. Tous ne recevaient ni argent, ni nourriture, ni abri. Lorsqu'ils commettaient des erreurs pendant le travail, ils étaient battus par les militaires. Elle n'a jamais été personnellement battue. Il y avait d'autres enfants du même âge sur le lieu de travail ainsi que des personnes plus âgées. Certaines personnes étaient très âgées. Elle a dû effectuer ce travail à plusieurs reprises. A d'autres occasions, d'autres membres de sa famille ont dû le faire. Sa famille devait fournir un travailleur trois fois par mois. Le travail s'est poursuivi durant une période de deux ans; sa famille s'est par la suite enfuie vers la Thaïlande. Sa famille a également dû effectuer du travail forcé pour la construction d'un camp militaire à T'Nay Cha (Nabu). Elle a elle-même effectué ce travail. Ils devaient fournir des tiges de bambou pour la construction du camp. C'était son père qui coupait le bambou pour elle. Son père a également dû travailler en tant que porteur.
  3446. 245
  3447. Ethnie: Karenni
  3448. Sexe: Masculin
  3449. Education: Sixième année
  3450. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Mawlamyine (Moulmein), Etat Mon (sa famille s'est déplacée plus tard à Kanbauk dans la division de Tanintharyi)
  3451. (Ceci est un résumé du témoignage fourni par "M. Po" lors de la deuxième session de la commission à Genève.)
  3452. Le témoin a quitté Kanbauk après s'être marié et s'en est allé à Nsat Ein Taung près de la frontière thaïlandaise. Cette région était à l'époque sous le contrôle du KNU. Par la suite, l'armée du Myanmar a attaqué la région et il a dû fuir. Il est allé au village de Tat Lei Ya en Thaïlande qui se situait près de Nat Ein Taung. En 1995, il est retourné au Myanmar dans un village nommé Thuka (environ à une heure de la frontière près de Nat ein Taung). Il a ouvert une boutique à Thuka et a fait le commerce de marchandises entre le Myanmar et la Thaïlande. Il a dû également voyager dans d'autres endroits au Myanmar afin d'acheter des marchandises pour sa boutique. Il s'est notamment rendu à Taungthonlon (Trois montagnes) près de Dawei (Tavoy). En février 1997, il a effectué un voyage au village de Kalet Kyi. Il est arrivé à Kalet Ki le soir du 8 février. Il est resté chez des amis. Vers 6 heures le lendemain, les militaires sont venus dans cette maison. Ils ont pointé leurs armes et ont ordonné à tous les hommes de sortir de la maison. Les quatre hommes de la maison sont sortis. A cet instant, un total d'environ 30 hommes du village furent amenés sous la menace des armes par les militaires jusqu'à un camp militaire près de Hti Law Pei, ce qui représentait une distance d'environ trente minutes. Les militaires étaient membres du bataillon 104 (4e compagnie) sous les ordres du lieutenant Aung Pai Oo. Une personne a tenté de s'enfuir mais fut rattrapée et fut violemment battue. Après s'être arrêtés un court moment au camp, les porteurs ont dû continuer avec leurs charges. Le lieutenant Aung Pai Oo aurait affirmé que si les porteurs tentaient de s'échapper ils seraient tués. Le témoin a lui-même dû transporter 45 kg de riz sur son dos. Il savait que cette charge était très lourde puisqu'il avait déjà fait le commerce du riz et était habitué à transporter de telles marchandises. Il a également dû travailler auparavant en tant que journalier à Kanbouk et était habitué à transporter de très lourdes charges. Ils ont tous dû porter leurs charges jusqu'au village de Kalet Kyi. Lorsqu'ils sont arrivés à Kalet Kyi, il y avait des combats avec le KNU. Les porteurs furent placés au milieu des militaires et reçurent l'ordre de ne pas tenter de s'échapper. Les combats ont duré environ quinze minutes. Ils se sont par la suite retirés de Hti Law Pei jusqu'à Kane Po Kye. Ils ont passé la nuit à Kane Po Kye et les porteurs reçurent de la nourriture: un peu de riz et un peu de poisson. Les porteurs ont dû dormir à l'extérieur sans abri. Il faisait froid et brumeux cette nuit-là. Le lendemain matin, vers 6 heures, sans petit déjeuner, ils ont continué à progresser le long de la rivière pour se rendre jusqu'à un village nommé Myitta et Kanadaw. Ils se sont arrêtés en route pour déjeuner. Les porteurs ont eut droit à un peu de riz. Ils se sont arrêtés en chemin vers 19 heures et ont dormi près des arbres. Il faisait encore froid et brumeux cette nuit-là. La nuit suivante, vers 3 heures du matin, ils sont arrivés à Myitta. Onze porteurs furent placés dans une petite trappe afin qu'ils ne puissent pas s'échapper (le quatrième jour, un porteur avait réussi à s'échapper), et les militaires ont dormi au-dessus de cette trappe. Il y avait tellement de monde dans la trappe qu'ils n'ont pas pu dormir. Le lendemain matin, après avoir mangé, ils furent emmenés en camion à la mine de Hainda dans la région de Taungthonlon. Après avoir récupéré les marchandises, ils ont continué en camion jusqu'à la centrale électrique de Paung Daw Gyi. Le jour suivant, ils ont marché jusqu'au village de Paung Daw. Il a dû une fois de plus transporter du riz. Ils sont arrivés à Paung Daw dans la soirée. Ils ont passé la nuit dans une plantation d'arachides. Le lendemain matin, ils ont continué à pied jusqu'à Pya Tha Chaung. Sur le chemin, un des porteurs fut blessé au genou et ne pouvait plus continuer. Il fut relâché. La charge de cet homme fut alors redistribuée entre les autres porteurs. M. Po a dû par la suite transporter des casseroles. La charge était beaucoup plus lourde parce que ces casseroles étaient pleines de riz (le poids s'allégeant plus le riz était consommé). Ils sont arrivés à Pya Tha Chaung vers 15 heures et ont pris d'autres porteurs: un jeune homme, quatre hommes âgés de plus de 60 ans, et 25 femmes. Il y avait des combats à Pya Tha Chaung avec les militaires du KNU. Durant les combats, les porteurs furent placés au milieu du groupe de militaires afin qu'ils ne puissent pas s'échapper. Ce soir-là, ils ont dormi dans une étable à l'extérieur du village. Il a dû cuisiner pour les porteurs ainsi que pour les militaires. Parce qu'il a fait la cuisine, les porteurs ont pu avoir un peu plus de nourriture ce soir-là. Le jour suivant, ils sont retournés au village et, vers midi, d'autres combats ont éclaté avec le KNU. Les combats n'ont pas duré très longtemps. Les porteurs furent placés au milieu du groupe de militaires et on leur a signifié qu'ils seraient tués s'ils tentaient de s'échapper. Enfin, de 15 heures à 21 heures, il y eut des combats plus violents. La situation était grave puisqu'il était impossible de se protéger. Cette nuit-là, ils ont dormi sur les bambous. Le lendemain matin, à 5 h 30, ils sont allés dans un autre village et sont arrivés vers 19 heures. Ils ont dormi à l'extérieur sans abri. Cette nuit-là, il a dû cuisiner jusqu'à 23 heures parce qu'il devait s'éloigner des militaires pour cuisiner afin d'éviter que la fumée n'indique aux militaires du KNU leur présence. Vers 21 heures, deux autres porteurs se sont enfuis. Le jour suivant, ils ont tous marché jusqu'à un autre village karen. Le jour suivant, ils sont partis et ont marché pendant trois jours et trois nuits sans se reposer. Le troisième jour vers 16 heures, ils sont arrivés de l'autre côté de la rivière Hti Hta près du camp de Hti Hta (un camp du KNU). De 16 heures à 18 heures, il y eut de violents combats et ils ont finalement réussi à occuper le camp de Hti Hta. Il est resté à Hti Hta pendant dix jours en tant que chef cuisinier. Après cela, il est allé dans un camp sur la montagne Hti Hta pendant six jours. Il a dû cuisiner et transporter de l'eau jusqu'en haut de la montagne jusqu'au camp. S'il quittait le camp à 6 heures le matin pour aller chercher de l'eau, il revenait à 15 heures. Le septième jour, il n'y avait plus de nourriture dans le camp. Le capitaine a donc ordonné à six personnes (lui y compris) d'aller chercher de la nourriture. Il a réussi à s'enfuir avec quatre autres porteurs; il a marché pendant douze jours dans la jungle en survivant avec peu de nourriture. Le douzième jour, ils ont rencontré d'autres porteurs en fuite et ont tous voyagé ensemble. Le jour suivant, ils ont atteint le village de Htee Hpo Lay où ils ont rencontré des militaires du bataillon 401. Les militaires leur ont demandé leur provenance et les ont arrêtés. C'était le 25 mars. Il connaît la date parce qu'il a demandé à un militaire qui avait une montre quel jour c'était. Le jour suivant, certains militaires avec des blessures sont arrivés et ils ont tous dû les transporter jusqu'au village de Myitta sur des brancards. Il y avait quatre porteurs qui devaient transporter deux soldats blessés. Au village de Myitta, il s'est enfui et s'est caché dans la maison d'un ami. Il a réussi à obtenir un document du capitaine du bataillon 25, grâce à l'aide du chef du village de Myitta, qui certifiait qu'il avait terminé sa tâche de portage. Il a donc pu retourner à Thuka qui était une région contrôlée par les forces du KNU. Toutefois, sa famille n'était plus là. Elle avait fui en Thaïlande. Alors qu'il était porteur, il a vu des militaires battre des porteurs à plusieurs reprises, mais lui-même n'a jamais été battu. Un porteur fut grièvement blessé durant les combats à Pya Tha Chaung. Il a vu des porteurs battus à morts et d'autres mourir d'épuisement. Le porteur le plus jeune qu'il a pu voir avait 13 ans. Les porteurs les plus âgés avaient entre 67 et 68 ans.
  3453. 246
  3454. Ethnie: Karenni
  3455. Sexe: Masculin
  3456. Domicile (avant de quitter le Myanmar): Yangon
  3457. (Ceci est un résumé du témoignage de "Ka Hsaw Wa" donné sur vidéo lors de la deuxième session de la commission à Genève.)
  3458. Le témoin a quitté Yangon en 1988 suite aux manifestations estudiantines auxquelles il a participé. A cette époque, il venait de terminer l'école secondaire. Il s'est rendu dans une région contrôlée par le KNU près de la frontière thaïlandaise. Pendant six à sept mois, il a vécu dans une région contrôlée par le KNU dans le canton de Kyaukkyi (division de Bago), désignée par le KNU comme étant la région de la brigade no 3. Il devait se cacher. Puisqu'il avait toujours vécu à Yangon, il n'avait jamais vu ou effectué du travail forcé. Alors qu'il voyageait, il a pu parler à plusieurs villageois et a appris que plusieurs essayaient de quitter les zones contrôlées par les militaires parce qu'ils devaient effectuer du travail pour ces derniers. Ils lui ont expliqué qu'ils devaient couper du bois pour le feu, construire des routes et des chemins de fer, et travailler dans les camps militaires. Il a personnellement vu des villageois travailler dans un camp militaire. Certains villageois se cachaient parce qu'ils avaient peur d'être recrutés comme porteurs par les militaires. Les hommes, les femmes et les enfants étaient utilisés comme porteurs. Les enfants étaient également utilisés pour travailler pour les militaires en tant que messagers. Dès 1988, il a vu des ordres écrits concernant le travail forcé. Les ordres spécifiaient le nombre de personnes requises et la nature du travail ainsi que sa durée. Parfois, les ordres étaient accompagnés de charbon et de cartouches en guise d'avertissement au village. En effet, ceci signifiait que le village pouvait être brûlé lorsque les ordres n'étaient pas respectés. Il a commencé à travailler pour le groupe Karen Human Rights (KHRG) au début de 1992. Il a pu dresser des rapports sur toutes les formes de travail forcé, y compris le portage, la construction de routes et de chemins de fer. Les villageois devaient également travailler dans les camps militaires. Les représentants du KHRG ont interviewé des centaines de porteurs qui leur ont expliqué les différentes formes de portage ainsi que les conditions déplorables dans lesquelles ils devaient exécuter ce travail. Ils étaient en effet tués s'ils essayaient de s'échapper. Les porteurs n'étaient jamais rémunérés ou nourris. Il n'y avait aucun traitement médical afin de s'assurer que les gens pouvaient continuer le travail. Il a personnellement vu des villageois effectuant du portage en 1992. Il a pu discuter avec des porteurs qui venaient de différents endroits tels que Yangon, l'Etat Shan et l'Etat Kayah. Les porteurs devaient transporter des marchandises, des munitions et de la nourriture. Durant les combats, les porteurs étaient utilisés comme boucliers humains ou pour détecter les mines. Après la chute de Manerplaw, il est allé à Mae Sot en Thaïlande au début de 1995. Il a quitté le KHRG et a commencé à travailler pour l'établissement d'une organisation nommée Earth Rights International dont la fonction principale est d'obtenir des informations sur la construction du gazoduc dans la division de Tanintharyi. Entre avril 1995 et mai 1996, il a effectué quatre longs voyages dans cette région et a pu rencontrer de nombreuses personnes. A d'autres occasions, il a effectué plusieurs petits voyages tous les mois dans cette région près de la frontière. Son dernier long périple fut en mai 1996 afin d'identifier des plaignants potentiels en vue de poursuites judiciaires devant la Cour du district fédéral des Etats-Unis. Il a interviewé plus de 200 personnes parmi lesquelles 100 avaient des choses à dire concernant le gazoduc. Il a observé que beaucoup de portage dans cette région était lié au fait que les militaires surveillaient le gazoduc. Il estime que la sécurité du gazoduc était la raison première pour laquelle il y avait une présence militaire accrue dans cette région. Il a interviewé des villageois de Migyaunglaung et de Eindayaza qui lui ont dit avoir travaillé sur la construction du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy). Les gens devaient travailler pendant quinze jours et retournaient dans leur village pendant quinze jours. Les villageois de Natkyizin devaient payer des taxes pour le gazoduc allant de 500 à 1 000 kyats qui étaient collectées par les militaires. De plus, il a pu parler aux villageois de Migyaunglaung et de l'île de Keinzebok qui ont dû effectuer du travail pour les militaires.
  3459. Annexe VIII
  3460. Liste de soumissions faites durant le cours de la mission
  3461. -----------------------------------------------------------------
  3462. M1 Rapport sur l'afflux de réfugiés arakans dans l'Etat
  3463. indien du Mizoram (13 août 1997)
  3464. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3465. and Welfare, page 6579
  3466. M2 Rapport sur les violations des droits de l'homme en
  3467. Arakan (Arakanese Students Congress, 13 mars 1995)
  3468. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3469. and Welfare, page 6603
  3470. M3 Liste des réfugiés arakans de 1995 au camp Parava
  3471. dans l'Etat indien du Mizoram (source non indiquée)
  3472. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3473. and Welfare, page 6623
  3474. M4 Liste des réfugiés arakans de 1993 et 1994 dans
  3475. l'Etat indien du Mizoram (source non indiquée)
  3476. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3477. and Welfare, page 6633
  3478. M5 "Arakanese students hold rally" (National Herald
  3479. newspaper, 14 août 1995)
  3480. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3481. and Welfare, page 6645
  3482. M6 Brief account of forced labour on Arakanese (Rakhine)
  3483. people from Arakan State (present Burma)
  3484. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3485. and Welfare, page 6646
  3486. M7 Discours de Kyaw Thein Maung, Arakan League for
  3487. Democracy (ALD exile), bureau de Delhi
  3488. Soumis par: Kyaw Thein Maung, page 6648
  3489. M8 "Victims of eco-politics" (Ne Sun newspaper, 1er avril 1996)
  3490. Soumis par: Kyaw Thein Maung, page 6649
  3491. M9 Chin refugee conditions in India (compilation de Salai
  3492. Sang Zel, avril 1997)
  3493. Soumis par: Henri Val Theng, page 6650
  3494. M10 Photos avec titres
  3495. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6806
  3496. M11 Carte montrant la route entre Haka et Than Tlang
  3497. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6811
  3498. M12 Interview de M. Chi Nan (9 janv. 1998)
  3499. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6812
  3500. M13 Article du journal Zo-En (en langue mizo) (8 juillet 1997)
  3501. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6814
  3502. M14 Phuntungtu News Bulletin (18 août 1997)
  3503. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6815
  3504. M15 Phuntungtu News Bulletin (19 déc. 1997)
  3505. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6818
  3506. M16 Phuntungtu (1er nov. 1997 (en langue Chin)),
  3507. avec traduction anglaise
  3508. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6820
  3509. M17 "The death of Tial Cung" (août 1997), et documents annexés
  3510. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6846
  3511. M18 Photos de réfugiés au Mizoram (1996-97)
  3512. Soumis par: Salai Sang Zel, page 6850
  3513. M19 Photos et déclaration du Committee for Arakanese Refugees
  3514. Relief and Welfare (13 déc. 1997)
  3515. Soumis par: Committee for Arakanese Refugees Relief
  3516. and Welfare, page 6851
  3517. M20 Protection to refugees: Case of Rohingya women
  3518. (Oxfam, 29 déc. 1997)
  3519. Soumis par: Zulfiquar Ali Haider, page 6852
  3520. M21 Rohingya refugee programme health report (déc. 1997, MSF-H)
  3521. Soumis par: (source confidentielle), page 6865
  3522. M22 MSF-H in Bangladesh
  3523. Soumis par: (source confidentielle), page 6867
  3524. M23 Camps de réfugiés: districts de Cox's
  3525. Bazar-Teknaf-Bandarban, Bangladesh
  3526. Soumis par: HCR, page 6869
  3527. M24 Carte du HCR -- Situation des camps pour les réfugiés
  3528. du Myanmar qui sont encore au Bangladesh
  3529. Soumis par: HCR, page 6870
  3530. M25 Communication du 1er février 1998 donnée par une personne
  3531. non identifiée dans le camp de réfugiés de Kutupalong et
  3532. adressée au HCR, Genève
  3533. Soumis par: Source anonyme, page 6871
  3534. M26 Communication du 19 janvier 1998 donnée par une personne
  3535. non identifiée dans le camp de réfugiés de Kutupalong et
  3536. adressée au HCR, Genève
  3537. Soumis par: Source anonyme, page 6872
  3538. M27 Communication datée du 30 janvier 1998 donnée par une
  3539. personne non identifiée dans le camp de réfugiés de
  3540. Kutupalong et adressée au HCR, Genève
  3541. Soumis par: Source anonyme, page 6874
  3542. M28 Ordres du SLORC de fournir du travail (en birman)
  3543. (original vu, ce document est une photocopie véridique)
  3544. Soumis par: Source anonyme, page 6876
  3545. M29 Carte du HCR donnant une vue d'ensemble du nord de l'Etat
  3546. d'Arakan avec les principales villes
  3547. Soumis par: HCR, page 6878
  3548. M30 Communication du 31 janvier 1998 donnée par une personne
  3549. non identifiée dans le camp de réfugiés de Nayapara et
  3550. adressée "à qui de droit"
  3551. Soumis par: Source anonyme, page 6879
  3552. M31 Communication du 27 janvier 1998 donnée par une personne
  3553. non identifiée dans le camp de réfugiés de Nayapara et
  3554. adressée à l'Organisation des pays islamiques
  3555. Soumis par: Source anonyme, page 6885
  3556. M32 Rapport du programme d'aide aux réfugiés pour la période
  3557. de janvier à juin 1997 (août 1997)
  3558. Soumis par: Burmese Border Consortium, page 6888
  3559. M33 Situation des camps sur la frontière birmane avec
  3560. statistiques des populations (déc. 1997)
  3561. Soumis par: Burmese Border Consortium, page 6948
  3562. M34 Forced labor practice by the SPDC in 1997
  3563. Soumis par: Human Rights Documentation Unit, page 6949
  3564. M35 Terror in the South: Militarisation, economics and
  3565. human rights in southern Burma (ABSDF, nov. 1997)
  3566. Soumis par: Human Rights Documentation Unit, page 6967
  3567. M36 Notes d'information sur les camps de réfugiés en Thaïlande
  3568. (en général et pour ceux en provenance de l'Etat de Karenni)
  3569. Soumis par: Images Asia, page 7017
  3570. M37 Exodus: An update on the current situation in Karenni
  3571. (compilation de Green November 32, de diverses sources,
  3572. 18 août 1996)
  3573. Soumis par: Images Asia, page 7020
  3574. M38 Document en birman ("Violations des droits de l'homme")
  3575. (KNPP, janv. 1998)
  3576. Soumis par: Témoin 99, page 7081
  3577. M39 Chanson karenni (versions birmane et karenni) (chanson
  3578. interprétée par des travailleurs karennis durant le travail
  3579. forcé (chantée en langage karenni afin que les soldats ne
  3580. puissent pas comprendre))
  3581. Soumis par: Témoin 99, page 7084
  3582. M40 Independence and self-determination of the Karenni States
  3583. (Karenni National Revolutionary Council, 18 déc. 1974;
  3584. réimpression du 9 janvier 1997 par le gouvernement karenni)
  3585. Soumis par: Oo Reh, page 7086
  3586. M41 Notes d'information sur les camps de réfugiés en provenance
  3587. de l'Etat de Shan en Thaïlande
  3588. Soumis par: Images Asia, page 7166
  3589. M42 Notes d'information sur le travail forcé -- régions de Karen
  3590. (10 fév. 1998)
  3591. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 7167
  3592. M43 Rapport annuel de la clinique Mae Tao 1997 (1er janv. 1998)
  3593. Soumis par: Mae Tao Clinic, page 7177
  3594. M44 Clinique médicale du Dr Cynthia sur la frontière
  3595. birmano-thaïlandaise
  3596. Soumis par: Mae Tao Clinic, page 7186
  3597. M45 The rape of the rural poor (Karen National Union,
  3598. Mergui-Tavoy District, juillet 1995)
  3599. Soumis par: Graham Mortimer, page 7188
  3600. M46 Development and the cry of people (Karen National Union,
  3601. Mergui-Tavoy District, déc. 1994)
  3602. Soumis par: Graham Mortimer, page 7242
  3603. M47 Carte du district Mergui-Tavoy
  3604. Soumis par: Graham Mortimer, page 7284
  3605. M48 Carte: "Displacement of population in Mergui Tavoy district"
  3606. Soumis par: Graham Mortimer, page 7285
  3607. M49 KHRG no 98-01 "Wholesale destruction" (15 fév. 1998) et
  3608. KHRG no 98-41 "Information update" (25 fév. 1998)
  3609. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 7286
  3610. M50 Ordres du SLORC/SPDC aux villages du district de Pa'an
  3611. (originaux en birman avec projets de traductions)
  3612. Soumis par: Karen Human Rights Group, page 7354
  3613. M51 Carte annotée de Moulmein et note d'information sur
  3614. des projets de travaux forcés dans l'Etat Karen
  3615. (Royal Thai Survey Dept. map, 1984, avec annotations)
  3616. Soumis par: Min Lwin, page 7400
  3617. M52 Carte de Moulmein (Royal Thai Survey Dept. map, 1984)
  3618. Soumis par: Min Lwin, page 7401
  3619. M53 Carte de Amphoe Li (Royal Thai Survey Dept. map, 1986)
  3620. Soumis par: Min Lwin, page 7402
  3621. M54 Human rights practice in Burma (HRDU, 1997)
  3622. Soumis par: NCGUB, page 7403
  3623. M55 Discours de U Tin U, président du Central Legal Committee
  3624. of the National League for Democracy
  3625. Soumis par: NCGUB, page 7409
  3626. M56 SLORC continues ruthless atrocities (janv. 1998)
  3627. Soumis par: Mon Information Service, page 7417
  3628. M57 Note d'information sur la situation dans la division
  3629. de Tenasserim
  3630. Soumis par: Mon Information Service, page 7432
  3631. M58 Carte de la division de Tenasserim
  3632. Soumis par: Mon Information Service, page 7433
  3633. M59 Documents (en birman) sur le travail forcé
  3634. Soumis par: Yoma 3 Information Group, page 7434
  3635. M60 Déclaration des objectifs de Burma Issues
  3636. Soumis par: Burma Issues, page 7452
  3637. M61 The new eye 1997
  3638. Soumis par: Burma Issues, page 7460
  3639. M62 The 1997 offensives: Suffering and struggle for identity
  3640. and justice of the ethnic Karen in Burma (Moe K. Tun,
  3641. Burma Issues, 1997)
  3642. Soumis par: Burma Issues, page 7550
  3643. M63 Burmese workers in Mahachai Samut Sakhorn Province,
  3644. Thailand (9 fév. 1998)
  3645. Soumis par: Thai Action Committee for Democracy in Burma,
  3646. page 7588
  3647. M64 Exploitation of Burmese migrant workers by their brokers
  3648. and agents in Mahachai (12 juin 1997)
  3649. Soumis par: Thai Action Committee for Democracy in Burma,
  3650. page 7591
  3651. M65 A report on the situation at Mahachai police station,
  3652. Samut Sakhorn Province, Thailand (mai 1997)
  3653. Soumis par: Thai Action Committee for Democracy in Burma,
  3654. page 7595
  3655. M66 Implementation of community-based rehabilitation
  3656. (Mahachai pilot project area)
  3657. Soumis par: Karen Solidarity Organisation, page 7598
  3658. -----------------------------------------------------------------
  3659. Annexe IX
  3660. Cartes du Myanmar
  3661. Ces cartes n'apparaissent pas dans ILOLEX.
  3662. Annexe X
  3663. Noms, termes étrangers et acronymes
  3664. Noms
  3665. ----------------------------------------------------------------
  3666. Variantes courantes
  3667. ----------------------------------------------------------------
  3668. Ayeyarwady Irrawaddy
  3669. Azin Saw Hta
  3670. Bagan Pagan
  3671. Bago Pegu
  3672. Dawei Tavoy
  3673. Hinthada Henzada
  3674. Kalaymyo Kalay, Kale(myo)
  3675. Kayah Karenni
  3676. Kayin Karen
  3677. Kengtung Kyaing Tong
  3678. Langkho Langkher
  3679. Magway Magwe
  3680. Maungdaw Sinchaingbyin
  3681. Mawlamyine Moulmein
  3682. Mottama Martaban
  3683. Mrauk-U Mrohaung
  3684. Myaing Gyi Ngu Khaw Taw
  3685. Myeik Mergui, Beik
  3686. Nabu T'Nay Cha
  3687. Nam Wok Mong Kwan
  3688. Nyaungdone Yandoon
  3689. Pathein Bassein
  3690. Pyapon Phapon
  3691. Pyay Prome, Pyi
  3692. Pyin Oo Lwin Maymyo
  3693. Pyingyi Pingyi
  3694. Rakhine Arakan
  3695. Sittaung Sittang
  3696. Sittway Akyab, Sittwe
  3697. Tanintharyi Tenasserim
  3698. Taunggok Taungup
  3699. Twantay Twante
  3700. Way Sha Kweshan
  3701. Yangon Rangoon
  3702. Yatsauk Lawksawk
  3703. ----------------------------------------------------------------
  3704. Termes étrangers
  3705. ----------------------------------------------------------------
  3706. Baht
  3707. Devise de la Thaïlande (le cours de change en juillet 1998 était d'environ 40 baht pour 1 dollar des Etats-Unis)
  3708. Hankaw
  3709. Gamelle (composée de petits plateaux superposés, avec une poignée en haut)
  3710. KaLaYa
  3711. Bataillon d'infanterie (BI -- en anglais IB)
  3712. KaMaYa
  3713. Bataillon d'infanterie légère (BIL -- en anglais LIB)
  3714. Khani
  3715. Unité de surface (utilisée notamment par les Rohingyas: 1 khani correspond à environ 0,15 ha ou 1 500 m2)
  3716. Kyat
  3717. Devise du Myanmar (le taux d'échange en juillet 1998 était d'environ 300 kyats pour 1 dollar des Etats-Unis; un salaire typique était d'environ 100 kyats par jour, le prix d'un kg de riz de basse qualité)
  3718. Kyin
  3719. Unité de volume (environ 2,8 m3)
  3720. Longyi
  3721. Sarong (porté par les hommes et les femmes)
  3722. Lone Htein
  3723. Police anti-émeutes
  3724. NaSaKa
  3725. Force de sécurité des frontières
  3726. Tatmadaw
  3727. Forces armées du Myanmar
  3728. ----------------------------------------------------------------
  3729. Acronymes
  3730. ----------------------------------------------------------------
  3731. ABSDF Front démocratique des étudiants de toute la Birmanie
  3732. BSPP Parti du programme socialiste birman
  3733. CISL Confédération internationale des syndicats libres
  3734. CNF Front national Chin
  3735. DKBA Armée bouddhiste démocratique Kayin
  3736. FTUB Fédération des syndicats de Birmanie
  3737. HRDU Unité de documentation sur les droits de l'homme
  3738. du NCGUB
  3739. KHRG Groupe Karen des droits de l'homme
  3740. KNU Union nationale Karen
  3741. LORC Conseil pour le rétablissement de l'ordre public
  3742. NCGUB Gouvernement de coalition nationale de l'Union de
  3743. Birmanie
  3744. NMSP Nouveau parti de l'Etat Mon
  3745. PDC Conseil pour la paix et le développement
  3746. RSO Organisation de solidarité Rohingya
  3747. SLORC Conseil d'Etat pour le rétablissement de l'ordre
  3748. public
  3749. SPDC Conseil d'Etat pour la paix et le développement
  3750. TLORC Conseil de circonscription pour le rétablissement
  3751. de l'ordre public
  3752. VLORC Conseil d'arrondissement rural pour le rétablissement
  3753. de l'ordre public
  3754. ----------------------------------------------------------------
  3755. Annexe XI
  3756. Exemples d'ordres communiqués à la commission
  3757. Les textes figurant dans cette annexe sont des traductions non officielles faites par le secrétariat de la commission des versions originales en birman des ordres qui lui ont été communiquées. Au cours des audiences organisées pendant la seconde session à Genève, les originaux de ces ordres ont été vus par la commission, et les photocopies précédemment soumises ont été vérifiées et trouvées fidèles aux originaux. Une déclaration à ce sujet figure aux comptes rendus sténographiques d'audience de la treizième séance, 26 novembre 1997, page 1.
  3758. Ordre no 1. (La version originale en birman est reproduite sous 001-1913 (Ordre no 42).)
  3759. (TAMPON) BIL 310, Renseignements.
  3760. Aux: Village (...)
  3761. Président
  3762. 1. Cher chef, pour le rapport au bataillon d'infanterie légère no 310, colonne 2, vous devez fournir la liste suivante à la colonne 2, dès que vous pouvez, mais au plus tard le 3 décembre (1995):
  3763. 1. Nom du village
  3764. 2. Nombre total de maisons
  3765. 3. (Nombre de) personnes âgées de moins de 12 ans
  3766. (masculines/féminines)
  3767. 4. (Nombre de) personnes âgées de 12 ans et plus
  3768. (masculines/féminines)
  3769. 5. (Nombre d') écoles: supérieures, moyennes, primaires
  3770. 6. (Nombre d') enseignants (masculins/féminins);
  3771. total des étudiants (masculins/féminins)
  3772. 7. (Nombre) total des monastères: abbé et autres membres
  3773. 8. Nombre total de buffles et vaches
  3774. 9. Surface des rizières
  3775. 10. Nombre total de chars à boeufs et de bateaux
  3776. 11. (Nombre) total de moulins à riz, scieries, pressoirs à huile,
  3777. générateurs
  3778. 12. Nombre total d'appareils vidéo et de téléviseurs.
  3779. 2. Nous vous informons que le président ou secrétaire du LORC d'arrondissement rural doit venir en personne et remettre la liste ci-dessus sans faute.
  3780. Note: Vous devez l'envoyer jusqu'à la date indiquée, sans faute.
  3781. (Signé) Commandant de colonne,
  3782. BIL 310.
  3783. Ordre no 2. (La version originale en birman est reproduite sous 001-1915 (Ordre no 44).)
  3784. (TAMPON) BI 231, colonne 2
  3785. A: Village (...)
  3786. Laïc en charge du monastère/chef du village
  3787. Dirigeants de village, dès que (vous) recevez cette lettre, (vous) devez envoyer deux personnes pour servir (dans notre camp), comme promis. En outre, vous devez envoyer deux personnes en plus pour relayer les précédentes et vous devez aussi renvoyer (au camp) deux personnes qui se sont enfuies et n'ont pas fini leur devoir. Le fait qu'elles sont retournées (au village) est de votre responsabilité et nous estimons que vous n'avez pas rempli votre devoir.
  3788. La colonne opérationnelle vous met en garde que si (ces personnes) saisissent l'occasion de partir quand la colonne n'est pas sur place, nous ne prendrons aucune responsabilité (pour ce qui arrivera). Si cela devait arriver à l'avenir, nous prendrons des mesures et vous serez accusé d'avoir perturbé et retardé nos opérations militaires.
  3789. Vous devez prendre des mesures pour trouver ces deux serviteurs insoumis et nous informer quand vous l'aurez fait.
  3790. Vous devez les envoyer rapidement à la colonne (...).
  3791. (Signé) 3.4.94,
  3792. Bureau de colonne.
  3793. Ordre no 3. (La version originale en birman est reproduite sous 001-1933 (Ordre no 6).)
  3794. Aux: Chef et membres
  3795. 1. Ceci est la lettre finale.
  3796. 2. Ce soir, 31.7.95, 22 travailleurs volontaires du village (...)
  3797. doivent venir sans faute.
  3798. 3. Un des dirigeants du village doit les amener lui-même.
  3799. 4. Si vous manquez de venir, nous ne prendrons aucune
  3800. responsabilité pour le village (...). Chef, vous devez
  3801. venir vous-même et résoudre ce problème au camp de l'armée
  3802. de Ye Tho Gyi.
  3803. (TAMPON) Bataillon d'infanterie 48
  3804. (Signé) Commandant de compagnie.
  3805. Ordre no 4. (La version originale en birman est reproduite sous 001-2015 (Ordre no 19).)
  3806. (TAMPON) Bataillon d'infanterie 231, colonne 1
  3807. A: Chef de village
  3808. Village (...)
  3809. Concerne: Invitation à une réunion
  3810. Ceci est la dernière invitation, parce que nous vous avons invitée, chef, de nombreuses fois pour discuter de questions générales. Si vous ne venez pas, vous serez en faute, et alors ne pensez pas que l'armée vous rudoie (c'est-à-dire quand vous serez punie). Si personne ne vient, des mesures seront prises. Si personne ne vient cette fois-ci, (vous) serez détruits par une attaque d'artillerie. Si vous venez, vous devez arriver le troisième jour de la lune croissante de Nadaw (le 5 décembre 1994). Si vous ne venez pas, un gros (obus d'artillerie) sera envoyé. Une personne de chaque famille doit venir à la réunion sans faute.
  3811. Vous êtes informée d'apporter un panier de riz et deux viss (3,2 kg) de poulet du village (...).
  3812. (Signé) Adjudant Htun Win,
  3813. BI 231 du front,
  3814. Camp de Daw Pa Lan.
  3815. Ordre no 5. (La version originale en birman est reproduite sous 028-2352 (Ordre no 2).)
  3816. Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public
  3817. Thantlang
  3818. Réf. (...)
  3819. Date: 24 avril 1996
  3820. Au: Responsable
  3821. Conseil d'arrondissement urbain/rural pour le rétablissement de l'ordre public
  3822. Village/arrondissement urbain (...)
  3823. Concerne: Elargissement de la route carrossable de 20 pieds
  3824. Référence:
  3825. Lettre (...) de ce bureau datée 18/1/96
  3826. Lettre (...) de ce bureau datée 26/2/96
  3827. Lettre (...) de ce bureau datée 29/2/96
  3828. Lettre (...) de ce bureau datée 04/4/96
  3829. 1. Conformément à la résolution de la réunion à laquelle participaient des membres du Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public, des chefs de département et tous les responsables des villages, les tâches assignées pour élargir la route de 20 pieds entre Thantlang et Haka doivent être terminées en avril 1996. Vous avez déjà été informé que nous prendrons des mesures sérieuses à l'encontre de tout village qui ne peut terminer ce qui lui a été assigné. Ceci a été fréquemment reconnu par lettre et par communication verbale.
  3830. 2. Cependant, nous notons qu'à ce jour, 24/4/96, vous n'avez pas encore commencé. Cette tâche assignée est un devoir national et est aussi du développement régional. Nous vous avons déjà donné assez de temps pour la réaliser. En outre, le Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public a fourni de l'assistance en allant autant que nous le pouvions à la rencontre de tous vos besoins. Si vous donnez une raison quelconque, telle que le fait que vous êtes venus en retard et ne pouviez accomplir la tâche qui vous est assignée en construisant la route carrossable, nous ne l'accepterons pas.
  3831. 3. Nous vous informons par la présente de compléter la construction de la route en avril en utilisant tous les villageois nécessaires de votre village. Quiconque refuse de venir construire la route doit être puni, conformément à la loi, et vous devriez informer ce bureau. Par la présente, nous vous informons à nouveau de vous présenter au Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public quand vous allez construire la route. Nous informons par la présente tous les villages qui ne peuvent venir pour faire (le travail) jusqu'au 26/4/96 que tous les membres du Conseil de village pour le rétablissement de l'ordre public doivent venir et rencontrer le Président du Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public le 30/4/96 à 10 heures sans faute.
  3832. (Signé) Tin Aung,
  3833. Président.
  3834. Copies à:
  3835. -- Ingénieur de circonscription, département des travaux publics, Thantlang; assignez un endroit quand (les villageois) viennent se présenter à Thantlang
  3836. -- Département de la santé de la circonscription, Thantlang; prenez la responsabilité des soins de la santé
  3837. -- Copie de bureau
  3838. -- Reçu
  3839. Ordre no 6. (La version originale en birman est reproduite sous 018-2189 (Ordre no 2).)
  3840. (TAMPON) BIL 406, du front, colonne 1, quartier général
  3841. Bataillon d'infanterie légère 406 du front
  3842. Camp de Natkyizin
  3843. Réf. no (...)
  3844. Date: 4 novembre 1994
  3845. Au: Président
  3846. Conseil de village pour le rétablissement de l'ordre public
  3847. Village (...)
  3848. Concerne: Appel pour le chef du village et des travailleurs
  3849. 1. Concernant le sujet susmentionné, nous avons déjà appelé de nombreuses fois pour que le chef du village (...) et 25 villageois viennent au camp de Natkyizin pour du travail sur les chemins de fer.
  3850. 2. Donc, dès que vous recevez cette lettre, le chef et 25 personnes, avec des rations et l'équipement nécessaire, doivent venir sans faute.
  3851. 3. Avec cette lettre, nous envoyons quelques cadeaux pour le président et le secrétaire (du village). Si vous recevez ces cadeaux, venez ici avec eux rapidement. Si vous manquez de venir, voyez quel genre de cadeau nous viendrons donner au chef du village.
  3852. (Signé) (pour) Commandant de colonne,
  3853. Camp de Natkyizin.
  3854. (La source qui a fourni cet ordre a indiqué que les "cadeaux" mentionnés dans le texte de cet ordre et envoyés sous le même pli étaient deux cartouches.)
  3855. Ordre no 7. (La version originale en birman est reproduite sous 018-2190 (Ordre no 3).)
  3856. (TAMPON) BIL 406, du front, colonne 1, quartier général
  3857. 94 nov. 09-0900
  3858. (9. 11.94)
  3859. Aux: Président/secrétaire
  3860. (Village (...))
  3861. (Nous) devons avoir une discussion avec le président et le secrétaire (du village). Pour cela, venez en personne au camp de Natkyizin. (Nous) vous donnons votre dernière chance de venir sans faute le 15.11.94. Si vous travaillez réellement pour les villageois, vous devez venir sans faute. Si vous y manquez, ce sera votre responsabilité.
  3862. Si vous ne venez pas parce que vous avez peur des rebelles Mon, nous, l'armée, devons-vous montrer que nous sommes pires qu'eux.
  3863. (Signé) (pour) Commandant de colonne,
  3864. Camp de Natkyizin.
  3865. Ordre no 8. (La version originale en birman est reproduite sous 027-2317 (Ordre no 24).)
  3866. (TAMPON) Bataillon d'infanterie 62 (le reste est illisible)
  3867. Date: 11.03.96
  3868. Au: Président
  3869. Village (...)
  3870. Dès que vous recevez cette lettre, venez (nous) rencontrer au village Chaung Wa. Je vous mets en garde que, si vous présentez des excuses et manquez de venir, une action violente sera entreprise contre vous.
  3871. (Signé) Sergent des renseignements,
  3872. Bataillon d'infanterie 62.
  3873. Ordre no 9. (La version originale en birman est reproduite sous 028-2361 (Ordre no 11).)
  3874. Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public
  3875. Thantlang
  3876. Réf. no (...)
  3877. Date: 2 septembre 1995
  3878. Aux: Président/secrétaire/(personne) en charge
  3879. Conseil d'arrondissement rural pour le rétablissement de l'ordre public
  3880. Ville/village (...)
  3881. Concerne: Mettre sur pied des Milices du peuple et envoyer leurs noms rapidement
  3882. 1. Il a été rapporté que certains villages de la circonscription de Thantlang n'ont pas formé de Milice du peuple. Pour les villages qui n'ont pas encore mis sur pied de Milice du peuple, ils doivent mettre sur pied cinq membres à plein temps et 10 membres de réserve pour les villages qui ont moins de 50 foyers. Pour les villages qui ont plus de 50 foyers, la force sera de 10 membres à plein temps et 25 membres de réserve. Mettez-là rapidement sur pied et remplissez complètement la liste, comme indiqué ci-dessous. Nous vous informons de faire ceci et de l'envoyer à notre groupe sans faute.
  3883. 2. Si vous manquez d'envoyer ceci, (nous) prendrons des mesures décisives.
  3884. Milice du peuple
  3885. No de série
  3886. Nom Age
  3887. No de carte d'identité
  3888. Nom du village
  3889. Plein temps
  3890. Réserve
  3891. Remarques
  3892. (Signé) (pour) Président,
  3893. Kyin Za Pone, secrétaire.
  3894. Copies à: Reçu/bureau
  3895. Ordre no 10. (La version originale en birman est reproduite sous 028-2362 (Ordre no 12).)
  3896. Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public
  3897. Thantlang
  3898. Réf. no (...)
  3899. Date: 5 avril 1996
  3900. Aux: Président/(personne) en charge
  3901. Conseil d'arrondissement urbain/rural pour le rétablissement de l'ordre public
  3902. Ville/village (...)
  3903. Concerne: Entraînement des recrues des Milices du peuple
  3904. Référence: Lettre du BI 266 datée (...) mars 1996, réf. no (...)
  3905. 1. Comme (prévu), selon la (la lettre en) référence ci-dessus, les membres à plein temps de la Milice du peuple de votre village recevront un entraînement de combat dans le cours de guerre du 22.04.96 au 27.04.96. En conséquence, cinq personnes à plein temps des villages de moins de 50 foyers et 10 personnes à plein temps des villages de plus de 50 foyers doivent être amenées au bureau du LORC de circonscription par les secrétaires d'arrondissement rural jusqu'au 20.04.96 au plus tard, absolument sans faute.
  3906. 2. Les présidents des arrondissements ruraux et les dirigeants des groupes de Milice du peuple doivent venir à ce bureau pour des discussions préliminaires le 12. 04.96 à 10 heures, sans faute.
  3907. 3. Nous informons tous les dirigeants concernés des arrondissements urbains et des villages, lorsqu'ils viendront à ce bureau pour la réunion le 12.04.96, d'apporter avec eux la liste de la Milice du peuple comprenant les noms, dates de naissance, âge, no de carte d'identité nationale, noms du père et nom du village.
  3908. (Signé) Tin Aung,
  3909. Président.
  3910. Copies à: Reçu/bureau
  3911. Ordre no 11. (La version originale en birman est reproduite sous H25-6512 (Ordre no 12).)
  3912. (TAMPON) "Précisément, correctement et rapidement"
  3913. Conseil de circonscription pour le rétablissement de l'ordre public
  3914. Kya In Seik Gyi
  3915. Lettre no (...)
  3916. Date: 10 mars 1994
  3917. Aux: Président/chef de village
  3918. Conseil d'arrondissement urbain/de village pour le rétablissement de l'ordre public
  3919. Circonscription de Kya In Seik Gyi
  3920. Concerne: Interdiction des chars à boeufs sur les routes carrossables
  3921. Référence: Lettre du TLORC datée du 23.02.94; lettre no (...)
  3922. 1. Concernant le sujet ci-dessus, nous vous avons déjà informé, par la lettre en référence, qu'il est interdit aux chars à boeufs d'utiliser les routes carrossables. A la place, ils doivent utiliser la piste tracée à côté de la route.
  3923. 2. Tout char à boeuf surpris utilisant la route sera frappé d'une amende de 500 kyat, conformément à l'article 4, paragraphe (e), décidé par le Comité de surveillance de la construction des routes de la circonscription le 8.03.94.
  3924. 3. En conséquence, notifiez à la population dans votre village d'agir conformément à ces instructions de sorte que des problèmes non nécessaires ne se posent pas.
  3925. (Signé) Président.
  3926. Copies à:
  3927. -- Bataillon d'infanterie 32, Kya In Seik Gyi
  3928. -- Officier de circonscription, poste de police de circonscription, Kya In Seik Gyi
  3929. -- Reçu/copie de bureau
  3930. Annexe XII
  3931. Décret du Président du Conseil d'Etat pour le rétablissement de l'ordre public (SLORC) portant "Interdiction des contributions de travail non rémunéré dans les projets de développement national", daté du 2 juin 1995
  3932. Secret
  3933. Union du Myanmar
  3934. Conseil d'Etat pour le rétablissement de l'ordre public
  3935. Bureau du Président
  3936. No 125/Na Wa Ta (00)/Nyaka -- 2
  3937. Date: 2 juin 1995
  3938. Aux,
  3939. Conseils d'Etat/de division pour le rétablissement de l'ordre public
  3940. Objet:
  3941. Interdiction des contributions de travail non rémunéré dans les projets de développement national
  3942. 1. Il a été rapporté qu'en obtenant de la main-d'oeuvre auprès des populations locales dans l'exécution de projets de développement national, tels que la construction de routes, de ponts et de voies ferrées ainsi que la construction de barrages et de digues, la pratique est qu'elles doivent contribuer leur travail sans rémunération.
  3943. 2. En réalité, ces projets ont été entrepris en vue de promouvoir le bien-être de la population locale. En conséquence, il est impératif qu'en obtenant la main-d'oeuvre nécessaire auprès de la population locale, il faut lui payer sa juste part.
  3944. 3. Causer misères et souffrances à la population des zones rurales en raison du travail dit forcé et non rémunéré est hautement contre-indiqué. Les souffrances du peuple peuvent à leur tour créer des fausses impressions, des malentendus et une appréciation erronée de l'action du gouvernement et des forces armées (Tatmadaw).
  3945. 4. En conséquence, il est par la présente donné instruction aux autorités concernées aux différents niveaux d'exercer la surveillance nécessaire de manière à éviter des incidents indésirables.
  3946. (Signé) Lieutenant-colonel Phay Nyein
  3947. (pour le Secrétaire)
  3948. Copies au:
  3949. ministère de la Culture
  3950. ministère des Chemins de fer
  3951. ministère des Travaux publics
  3952. Note 1
  3953. Ces délégués travailleurs étaient: MM. E. Abou-Rizk (Liban), C. Agyei (Ghana), K. Ahmed (Pakistan), M. Blondel (France), W. Brett (Royaume-Uni), U. Edström (Suède), Mme U. Engelen-Kefer (Allemagne), MM. R. Falbr (République tchèque), C. Gray (Etats-Unis), S. Itoh (Japon), Y. Kara (Israël), A. Lettieri (Italie), I. Mayaki (Niger), S. Mookherjee (Inde), B.P. Mpangala (République-Unie de Tanzanie), J.-C. Parrot (Canada), Mme P. O'Donovan (Irlande), MM. Ramírez León (Venezuela), Z. Rampak (Malaisie), I. Sahbani (Tunisie), A. Sanchez Madariaga (Mexique), G. Sibanda (Zimbabwe), L. Sombes (Cameroun), L. Trotman (Barbade) et T. Wojcik (Pologne).
  3954. Note 2
  3955. Annexe I.
  3956. Note 3
  3957. Voir rapport de la Commission instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner la plainte déposée par le gouvernement du Ghana au sujet de l'observation par le gouvernement du Portugal de la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957, (1962) Bulletin officiel, vol. XLV, no 2, supplément II, paragr. 15; rapport de la Commission instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner la plainte déposée par le gouvernement du Portugal au sujet de l'observation par le gouvernement du Libéria de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, (1963) Bulletin officiel, vol. XLVI, no 2, supplément II, paragr. 381; rapport de la Commission instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner les plaintes au sujet de l'observation par la Grèce de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentées aux termes de l'article 26 de la Constitution de l'OIT par un certain nombre de délégués à la 52e session de la Conférence internationale du Travail, (1971) Bulletin officiel, vol. LIV, no 2, supplément spécial, paragr. 8; rapport de la Commission instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner la plainte au sujet de l'observation par la Pologne de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée par des délégués à la 68e session de la Conférence internationale du Travail, (1984) Bulletin officiel, vol. LXVII, supplément spécial, Série B, paragr. 5; rapport de la Commission chargée d'examiner la plainte concernant l'exécution, par le Nicaragua, des conventions (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, présentée par plusieurs délégués à la 73e session (1987) de la Conférence en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT, (1991) Bulletin officiel, vol. LXXIV, supplément 2, Série B, paragr. 5; rapport de la Commission d'enquête instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner la plainte relative à l'observation par la Roumanie de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, (1991) Bulletin officiel, vol. LXXIX, supplément 3, Série B, paragr. 4.
  3958. Note 4
  3959. Le texte de ces règles est joint au présent rapport (annexe III).
  3960. Note 5
  3961. Une invitation a été adressée aux gouvernements des pays suivants: Australie, Bangladesh, Cambodge, Canada, Chine, République de Corée, Etats-Unis, France, Inde, Indonésie, Japon, République démocratique lao, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Philippines, Singapour, Sri Lanka, Thaïlande et Viet Nam.
  3962. Note 6
  3963. Les Nations Unies, y compris le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés; l'Union européenne; l'Association des nations du Sud-Est asiatique (ASEAN).
  3964. Note 7
  3965. Ayant le statut consultatif auprès de l'OIT: Confédération internationale des syndicats libres, Confédération mondiale du travail, Fédération syndicale mondiale, Organisation internationale des employeurs. Autres: Fédération internationale des producteurs agricoles, Fédération internationale des syndicats de travailleurs de la chimie, de l'énergie, des mines et généraux, Brotherhood of Asian Trade Unionists, Syndicat international des associations de travailleurs de l'alimentation et des secteurs connexes, Confédération des employeurs de l'ASEAN, Fédération des syndicats de Birmanie, Chambre de commerce et d'industrie du Myanmar.
  3966. Note 8
  3967. Organisations non gouvernementales: Action contre la faim, Aide médicale internationale, Amnesty International, Article 19, Australia Burma Council, Australian Council for Overseas Aid, Burma Action Group, Burma Border Consortium, Burma Donors' Secretariat, Burma Centrum Nederland, Burma UN Services Office, Burma Issues, Burma Peace Foundation, Burmese Relief Centre, Burmese Women's Union, Comité consultatif mondial des amis (Quakers), Comité de juristes pour les droits de l'homme, Commission internationale de juristes, Danish Burma Committee, Earth Rights International, Euro-Burma Office, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, Groupe des droits des minorités, Groupe international de juristes pour les droits de l'homme, Groupe de travail international pour les affaires indigènes, Health Unlimited, Human Rights Watch (Asie), Images Asia, International Rescue Committee, Investor Responsibility Research Center, Jesuit Refugee Service, Karen Human Rights Group, Ligue internationale des droits de l'homme, Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples, Maryknoll Thailand, Médecins sans frontières (France), Médecins sans frontières (Pays-Bas), Médecins sans frontières (Thaïlande), Mon information Service, Projet Maje, Shan Human Rights Foundation, Société anti-esclavagiste, Southeast Asia Information Network and Tourism Concern.
  3968. Note 9
  3969. TOTAL, UNOCAL Corporation et Yukong Limited.
  3970. Note 10
  3971. Doc. 35.
  3972. Note 11
  3973. Doc. 36.
  3974. Note 12
  3975. Doc. 45.
  3976. Note 13
  3977. Doc. 37-41.
  3978. Note 14
  3979. Doc. 42 et 43.
  3980. Note 15
  3981. Doc. 44 (identique au doc. 125).
  3982. Note 16
  3983. Doc. 46.
  3984. Note 17
  3985. Le texte de ces Règles figure à l'annexe III.
  3986. Note 18
  3987. Doc. 34.
  3988. Note 19
  3989. Doc. 159.
  3990. Note 20
  3991. Doc. 152.
  3992. Note 21
  3993. Doc. 105.
  3994. Note 22
  3995. Doc. 2.
  3996. Note 23
  3997. Doc. 56.
  3998. Note 24
  3999. Doc. 57-84.
  4000. Note 25
  4001. Doc. 11.
  4002. Note 26
  4003. Doc. 33.
  4004. Note 27
  4005. Doc. 85-101.
  4006. Note 28
  4007. Doc. 153.
  4008. Note 29
  4009. Doc. 101.
  4010. Note 30
  4011. Doc. 102.
  4012. Note 31
  4013. Doc. 103 (une copie de ce document figure dans le doc. 1 aux pages 227 et suiv.).
  4014. Note 32
  4015. Doc. 104.
  4016. Note 33
  4017. Doc. 12-14.
  4018. Note 34
  4019. Doc. 106-124.
  4020. Note 35
  4021. Doc. 161.
  4022. Note 36
  4023. Doc. 1 et doc. 154-158.
  4024. Note 37
  4025. Doc. 73 et 74.
  4026. Note 38
  4027. Doc. 164.
  4028. Note 39
  4029. Doc. 162 et 163.
  4030. Note 40
  4031. Doc. 160.
  4032. Note 41
  4033. Doc. 3.
  4034. Note 42
  4035. Doc. 149.
  4036. Note 43
  4037. Doc. 150.
  4038. Note 44
  4039. Doc. 151.
  4040. Note 45
  4041. Doc. 125-128, 131 et 132.
  4042. Note 46
  4043. Doc. 129 et 133.
  4044. Note 47
  4045. Doc. 130.
  4046. Note 48
  4047. Doc. 134-138.
  4048. Note 49
  4049. Doc. 32.
  4050. Note 50
  4051. Doc. 16 et 21.
  4052. Note 51
  4053. Doc. 15, 17-20 et 22-31.
  4054. Note 52
  4055. Doc. 6-10.
  4056. Note 53
  4057. Doc. 4.
  4058. Note 54
  4059. Doc. 48-55.
  4060. Note 55
  4061. Voir notamment le paragraphe 26 ci-dessus. Des lettres de rappel ont été envoyées par le secrétariat au gouvernement le 15 octobre et les 9 et 12 novembre 1997.
  4062. Note 56
  4063. Comptes rendus sténographiques d'audience de la première séance, 17 nov. 1997, pp. 2-3.
  4064. Note 57
  4065. Comptes rendus sténographiques d'audience de la première séance, 17 nov. 1997, pp. 6-7.
  4066. Note 58
  4067. Les personnes suivantes ont prononcé des déclarations liminaires: M. William Brett, plaignant, représentant travailleur du Royaume-Uni et président du groupe des travailleurs du Conseil d'administration du BIT, MM. Kuczkiewicz et Fenwick, représentants désignés des plaignants, et M. Maung Maung, conseiller pour les plaignants.
  4068. Note 59
  4069. Comptes rendus sténographiques d'audience de la quatrième séance, 19 nov. 1997, p. 1.
  4070. Note 60
  4071. Comptes rendus sténographiques d'audience de la dixième séance, 25 nov. 1997, p. 1.
  4072. Note 61
  4073. La liste des documents soumis au cours des audiences figure à l'annexe VI du présent rapport.
  4074. Note 62
  4075. La liste des documents reçus par la commission après sa deuxième session figure à l'annexe V du présent rapport.
  4076. Note 63
  4077. Doc. 176.
  4078. Note 64
  4079. Doc. 167.
  4080. Note 65
  4081. Doc. 168.
  4082. Note 66
  4083. Doc. 169-172, 174 et 175.
  4084. Note 67
  4085. Doc. 173.
  4086. Note 68
  4087. Doc. 165.
  4088. Note 69
  4089. Doc. 166.
  4090. Note 70
  4091. Voir chap. 4, deuxième session de la commission, paragr. 55 à 68.
  4092. Note 71
  4093. Voir annexe VII. En outre, on trouvera à l'annexe VIII du présent rapport la liste des documents qui ont été remis à la commission lors de sa visite dans la région.
  4094. Note 72
  4095. Annexe VIII, témoins 1 à 17.
  4096. Note 73
  4097. Annexe VIII, témoins 18 à 88.
  4098. Note 74
  4099. Annexe VIII, témoins 89 à 141.
  4100. Note 75
  4101. C'est pendant cette période que la commission a autorisé la prise des témoignages mentionnés au paragr. 81.
  4102. Note 76
  4103. Annexe VIII, témoins 142 à 209.
  4104. Note 77
  4105. Annexe VIII, témoins 210 à 241.
  4106. Note 78
  4107. Le texte des moyens de preuve supplémentaires soumis par les plaignants est reproduit dans son intégralité à l'annexe I du présent rapport.
  4108. Note 79
  4109. Voir paragr. 150 et 151 ci-après.
  4110. Note 80
  4111. Le texte des observations du gouvernement sur la plainte initiale et sur les moyens de preuve supplémentaires fournis est reproduit à l'annexe II du présent rapport dans son intégralité, à l'exception de deux annexes confidentielles (sous-annexes II et VII qui n'y figurent pas).
  4112. Note 81
  4113. En outre, le gouvernement déclara au titre de l'article 2 que, "Jusqu'à présent, il n'a pas été nécessaire de se prévaloir des exceptions prévues au paragraphe 2 de cet article. Toutefois, il en sera fait dûment état si besoin est."
  4114. Note 82
  4115. Le texte intégral des dispositions pertinentes de la loi sur les villages et de la loi sur les villes figure aux paragr. 238-240 ci-dessous.
  4116. Note 83
  4117. L'article 24 de la Constitution déclare: "Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux termes de laquelle l'un quelconque des Membres n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d'une convention à laquelle ledit Membre a adhéré, pourra être transmise par le Conseil d'administration au gouvernement mis en cause et ce gouvernement pourra être invité à faire sur la matière telle déclaration qu'il jugera convenable."
  4118. Note 84
  4119. Voir paragr. 15 à 19 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT alléguant l'inexécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1994).
  4120. Note 85
  4121. Voir paragr. 131 ci-dessus. Les indications pratiquement identiques données par le gouvernement au comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL, en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, alléguant l'inexécution par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, sont reflétées aux paragr. 22 à 25 du rapport de ce comité (doc. GB.201/13/7, Genève, nov. 1994).
  4122. Note 86
  4123. Voir paragr. 26 et 27 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4124. Note 87
  4125. Voir paragr. 28 et 29 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4126. Note 88
  4127. Voir paragr. 30 à 32 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4128. Note 89
  4129. Voir paragr. 33 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4130. Note 90
  4131. Voir paragr. 37 à 39 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4132. Note 91
  4133. Voir paragr. 37 à 39 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4134. Note 92
  4135. Voir paragr. 40 et 41 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4136. Note 93
  4137. Voir paragr. 42 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4138. Note 94
  4139. Voir paragr. 43 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4140. Note 95
  4141. Voir paragr. 44 à 48 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4142. Note 96
  4143. Voir paragr. 49 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4144. Note 97
  4145. Voir paragr. 50 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4146. Note 98
  4147. Voir paragr. 52 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid).
  4148. Note 99
  4149. Voir paragr. 53 du rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (doc. GB.261/13/7, Genève, nov. 1997, ibid) et Conseil d'administration, 261e session, Genève, nov. 1994, Relevé des décisions (doc. GB.261/205), paragr. 61.
  4150. Note 100
  4151. Voir paragr. 134 ci-dessus.
  4152. Note 101
  4153. Voir paragr. 138 ci-dessus.
  4154. Note 102
  4155. Voir paragr. 154 ci-dessus.
  4156. Note 103
  4157. Voir paragr. 154 ci-dessus.
  4158. Note 104
  4159. CIT, 83e session, Genève, Compte rendu provisoire, p. 14/56.
  4160. Note 105
  4161. CIT, 83e session, Genève, Compte rendu provisoire, pp. 14/56 à 14/58.
  4162. Note 106
  4163. CIT, 83e session, Genève, Compte rendu provisoire, p. 14/58.
  4164. Note 107
  4165. CIT, 83e session, Genève, Compte rendu provisoire, pp. 14/58 et 14/46.
  4166. Note 108
  4167. Voir paragr. 1 ci-dessus.
  4168. Note 109
  4169. Toutefois, la situation des droits de l'homme au Myanmar avait déjà fait l'objet de discussions au sein de la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités en 1988 et 1989 et avait donné lieu à une résolution de la Commission des droits de l'homme en 1989: résolution 1989/112 du 8 mars 1989.
  4170. Note 110
  4171. Doc. off. AGNU A/RES/46/132 du 17 décembre 1991.
  4172. Note 111
  4173. Doc. off. AGNU A/RES/46/132 du 17 décembre 1991, paragr. 2. L'Assemblée générale a réitéré ses préoccupations en 1992 et 1993: doc. off. AGNU A/RES/47/144 du 18 décembre 1992 et doc. off. AGNU A/RES/48/150 du 20 décembre 1993.
  4174. Note 112
  4175. Doc. off. AGNU A/RES/49/197 du 23 décembre 1994.
  4176. Note 113
  4177. Doc. off. AGNU A/RES/49/197 du 23 décembre 1994, paragr. 10.
  4178. Note 114
  4179. Doc. off. AGNU A/RES/49/197 du 23 décembre 1994, paragr. 12. Les résolutions adoptées en 1995, 1996 et 1997 sont aux mêmes effets: doc. off. AGNU A/RES/50/194 du 22 décembre 1995; doc. off. AGNU A/RES/51/117 du 12 décembre 1996; doc. off. AGNU A/RES/52/137 du 12 décembre 1997.
  4180. Note 115
  4181. L'examen de la question du travail forcé par d'autres organes de la Commission des droits de l'homme, à savoir les rapporteurs spéciaux sur l'application de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, sur la torture et autres peines, ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires est présenté ci-après à la section iv) Autres organes des Nations Unies.
  4182. Note 116
  4183. Commission des droits de l'homme, résolution 1992/58 du 3 mars 1992. La décision de la Commission a été approuvée par le Conseil économique et social le 20 juillet 1992 par sa résolution 1992/235. Le Conseil économique et social a renouvelé son approbation en 1993 (résolution 1993/278 du 28 juillet 1993), 1994 (résolution 1994/269 du 25 juillet 1994), 1995 (résolution 1995/283 du 25 juillet 1995), 1996 (résolution 1996/285 du 24 juillet 1996) et 1997 (résolution 1997/272 du 22 juillet 1997).
  4184. Note 117
  4185. Rapport préliminaire établi par le professeur Yozo Yokota (Japon), rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 3 de la résolution 1992/58 de la Commission en date du 3 mars 1992 et de la résolution 1992/235 du Conseil économique et social en date du 20 juillet 1992, doc. off. AGNU A/47/651 du 13 novembre 1992. Le plus grand nombre de cas concernent des membres de la population musulmane au nord de l'Etat Rakhine, ainsi que des membres de l'ethnie Karen: ibid., paragr. 46 in fine.
  4186. Note 118
  4187. Rapport préliminaire établi par le professeur Yozo Yokota (Japon), rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 3 de la résolution 1992/58 de la Commission en date du 3 mars 1992 et de la résolution 1992/235 du Conseil économique et social en date du 20 juillet 1992, doc. off. AGNU A/47/651 du 13 novembre 1992, notamment aux paragraphes 46 à 52. Le rapporteur spécial cite le cas de soldats d'une compagnie nommément désignée qui auraient investi un village de l'Etat Rakhine pour enrôler ses habitants aux fins de travail forcé: ibid., paragr. 48.
  4188. Note 119
  4189. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993. Le rapporteur spécial a par la suite visité le pays à trois occasions, soit du 9 au 16 novembre 1993, du 7 au 16 novembre 1994 et du 8 au 16 octobre 1995.
  4190. Note 120
  4191. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 79-85.
  4192. Note 121
  4193. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 101-104.
  4194. Note 122
  4195. Ces actes se seraient produits particulièrement dans les Etats Shan, Kayah, Mon, Kayin et Rakhine: Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 101-103 et 231-234.
  4196. Note 123
  4197. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 232.
  4198. Note 124
  4199. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 104.
  4200. Note 125
  4201. A cet égard, le chemin de fer d'Aungban-Loikaw a été mentionné.
  4202. Note 126
  4203. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 85 et 234.
  4204. Note 127
  4205. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 135 et 235-236.
  4206. Note 128
  4207. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 136.
  4208. Note 129
  4209. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 228. Les autres catégories de personnes regroupent, d'une part, les citoyens désireux de participer librement au processus politique et à la transition vers un gouvernement civil démocratiquement élu et, d'autre part, les minorités ethniques contre lesquelles des mesures de répression sont dirigées.
  4210. Note 130
  4211. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 242 f).
  4212. Note 131
  4213. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la commission, en application de la résolution 1992/58 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1993/37 du 17 février 1993, paragr. 242 k).
  4214. Note 132
  4215. Consulter notamment: rapport intérimaire établi par le professeur Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 16 de la résolution 1993/73 de la commission en date du 10 mars 1993 et de la décision 1993/278 du Conseil économique et social en date du 28 juillet 1993, doc. off. AGNU A/48/578 en date du 16 novembre 1993, au paragr. 35; Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial, en application de la résolution 1993/73 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NUE/CN.4/1994/57 du 16 février 1994, au paragraphe 55.
  4216. Note 133
  4217. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994.
  4218. Note 134
  4219. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994, paragr. 19.
  4220. Note 135
  4221. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994, paragr. 20.
  4222. Note 136
  4223. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994, paragr. 21.
  4224. Note 137
  4225. Selon les informations obtenues, "chaque famille habitant les villages situés le long de la nouvelle ligne ou tout près est tenue de fournir un travailleur, qu'elle doit relever tous les 15 jours. Dans leur quasi-totalité, les familles, dans les circonscriptions de Ye, Thanbyuzayat et Mudon (Etat Mon) et de Yebyu, Dawei (Tavoy), Launglon et Thayet Chaung de la division de Tanintharyi, auraient été contraintes de fournir de la main-d'oeuvre pour la construction de la voie ferrée. Il aurait été demandé aux travailleurs d'apporter leur propre nourriture, de se loger eux-mêmes et de subvenir à leurs besoins en matière de soins médicaux, d'utiliser leurs propres outils et, dans certains cas, de trouver le matériel nécessaire à la construction de la voie ferrée. Les militaires qui supervisaient la construction de la voie ferrée auraient exigé de l'argent pour l'usage des engins disponibles sur les chantiers de construction ou vendu le carburant destiné aux bulldozers (...) Selon des rapports concordants, plus de 100 000 personnes auraient été astreintes à la corvée pour la construction de la voie ferrée sans aucune compensation. Des personnes âgées, des enfants et femmes enceintes auraient été également vus en train de travailler le long de la voie ferrée. Plusieurs personnes auraient trouvé la mort à la suite de maladies ou d'accidents dus aux mauvaises conditions sur les chantiers (...). Les terres situées le long de la voie ferrée auraient été confisquées à leur propriétaire sans indemnisation.": Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994, paragr. 22.
  4226. Note 138
  4227. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994, paragr. 23.
  4228. Note 139
  4229. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1994/85 de la commission en date du 9 mars 1994 et à la décision 1994/269 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1994, doc. off. AGNU A/49/596 du 28 octobre 1994 et doc. off. AGNU A/49/594/Add. 1 du 9 novembre 1994, paragr. 24.
  4230. Note 140
  4231. Rapport intérimaire établi par M. Yozo Yokota, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar, conformément au paragraphe 20 de la résolution 1995/72 de la Commission en date du 8 mars 1995 et à la décision 1995/283 du Conseil économique et social en date du 25 juillet 1995, doc. off AGNU A/50/568 du 16 octobre 1995.
  4232. Note 141
  4233. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le rapporteur spécial, M. Yozo Yokota, en application de la résolution 1994/85 de la Commission, doc. off. NUE/CN.4/1995/65 du 12 janvier 1995.
  4234. Note 142
  4235. Les lignes qui, en 1995, étaient en cours de construction et pour lesquelles les autorités auraient eu recours au travail forcé sont, entre autres, celles liant Pakokku-Gangaw-Kalaymyo-Tamu et Ye Dawei (Tavoy). La population aurait été contrainte de fournir non seulement son travail, mais aussi les matériaux nécessaires.
  4236. Note 143
  4237. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par le rapporteur spécial, M. Yozo Yokota, en application de la résolution 1995/72 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NUE/CN.4/1996/65 en date du 5 février 1996.
  4238. Note 144
  4239. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par le rapporteur spécial, M. Yozo Yokota, en application de la résolution 1995/72 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NUE/CN.4/1996/65 en date du 5 février 1996, paragr. 141-142. Plusieurs sources auraient indiqué que le travail forcé était abondamment utilisé dans le cadre de projets de chemins de fer. Plus de 50 000 personnes auraient été forcées de travailler sur la nouvelle section entre Ye et Kanbauk. Le travail forcé serait aussi utilisé pour rénover la route dans la municipalité de Bago, le travail consistant notamment à trier et transporter la pierre provenant d'une carrière, à tamiser le gravillon et à étendre le bitume, chaque famille devant payer 50 kyats par membre toutes les deux semaines à titre de contribution à la construction de cette route.
  4240. Note 145
  4241. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par le rapporteur spécial, M. Yozo Yokota, en application de la résolution 1995/72 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NUE/CN.4/1996/65 en date du 5 février 1996, paragr. 173.
  4242. Note 146
  4243. Rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par le rapporteur spécial, M. Yozo Yokota, en application de la résolution 1995/72 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NUE/CN.4/1996/65 en date du 5 février 1996, paragr. 180.
  4244. Note 147
  4245. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996.
  4246. Note 148
  4247. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996, notamment aux paragr. 45-51.
  4248. Note 149
  4249. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996, paragr. 126-145.
  4250. Note 150
  4251. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996. A cet égard, le rapporteur a signalé quelques cas pertinents, à savoir: les habitants de Ahphyauk dans la division d'Ayeyarwady auraient été forcés de construire un canal d'irrigation long d'environ 25 milles. Ceux qui refusaient de travailler devaient payer une amende de 1 300 kyats ou étaient accusés, aux termes de l'article 12 de la loi sur les villages, et condamnés, si jugés coupables, à un mois d'emprisonnement (paragr. 133); un homme de Hinthada, dans la division d'Ayeyarwady, aurait fait l'objet de voies de fait puisqu'il avait refusé de participer à la construction d'un remblai vu son âge trop avancé (paragr. 134); en mai 1995, les autorités militaires auraient ordonné à près de 200 villageois d'aller sur les îles Heinze pour 2 semaines, où ils ont dû nettoyer le terrain, construire une zone d'atterrissage pour hélicoptères et diverses baraques. Les travailleurs n'auraient pas été rémunérés, devant même payer pour le carburant utilisé par les bateaux effectuant la liaison. Les villageois qui refusaient d'y aller devaient verser une amende ou étaient arrêtés et envoyés dans les zones de conflits aux fins de servir comme porteurs pour les militaires (paragr. 135); en août et septembre 1995, un fermier Mon de la circonscription Yebyu aurait été forcé de construire des baraques militaires près du gazoduc à Ohnbinkwin et au port de Kadaik. Il aurait également été forcé à couper du bois et nettoyer les buissons près de la route (paragr. 136); les autorités auraient eu recours au travail forcé pour construire un musée bouddhiste dans la ville de Sittway (paragr. 137); des villageois de Pathein, de la division d'Ayeyarwady auraient été forcés de travailler à la construction d'une nouvelle route entre Nga Saw et Talakwa (paragr. 138); en mars 1996, des villageois auraient eu à couper du bois et à le transporter à la scierie de Kyet Paung (circonscription de Hlaingbwe, Etat Kayin) et certains auraient aussi eu à travailler à la scierie (paragr. 139).
  4252. Note 151
  4253. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996. Les rapports reçus par le rapporteur révéleraient que les porteurs pourraient être classés en diverses catégories soit: les porteurs utilisés pour la durée d'une opération militaire spécifique; les porteurs permanents que les villages fourniraient aux termes d'ordres reçus des militaires. Ces porteurs travailleraient un temps déterminé et seraient par la suite remplacés par d'autres; les porteurs d'urgence provenant de villages et utilisés pour des tâches spécifiques telles que la livraison mensuelle de riz aux troupes; les porteurs d'opportunités -- souvent des fermiers rencontrés sur la route et gardés selon les besoins. Au nombre des porteurs se trouveraient également des civils de milieux urbains ou semi-urbains purgeant une sanction imposée par les autorités, des prisonniers et des porteurs rémunérés remplaçant des villageois mieux nantis en mesure de payer pour leurs services (paragr. 140).
  4254. Note 152
  4255. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996. Les rapports reçus par le rapporteur révéleraient que les porteurs pourraient être classés en diverses catégories soit: les porteurs utilisés pour la durée d'une opération militaire spécifique; les porteurs permanents que les villages fourniraient aux termes d'ordres reçus des militaires. Ces porteurs travailleraient un temps déterminé et seraient par la suite remplacés par d'autres; les porteurs d'urgence provenant de villages et utilisés pour des tâches spécifiques telles que la livraison mensuelle de riz aux troupes; les porteurs d'opportunités -- souvent des fermiers rencontrés sur la route et gardés selon les besoins. Au nombre des porteurs se trouveraient également des civils de milieux urbains ou semi-urbains purgeant une sanction imposée par les autorités, des prisonniers et des porteurs rémunérés remplaçant des villageois mieux nantis en mesure de payer pour leurs services (paragr. 140).
  4256. Note 153
  4257. Le rapporteur a signalé différents cas de portage forcé: le 10 décembre 1995, un groupe de soldats serait arrivé à Meh Bleh Wah Kee dans la circonscription de Myawady (Etat Kayin) et aurait arrêté 10 personnes qui auraient été forcées de transporter de l'équipement lourd à travers les montagnes Dawna jusqu'à Ber Kho (paragr. 143); un fermier de l'Etat Mon aurait été pris par les militaires, attaché et forcé à transporter du matériel militaire pendant 17 jours (paragr. 144); en mars 1996, un pêcheur du village de Taung Kun dans la circonscription Ye (Etat Mon) aurait été forcé de porter du matériel pour les militaires pendant une durée de 15 jours (paragr. 145). Le rapporteur a noté que les porteurs seraient des civils auxquels on impose du travail qui ne tomberait sous le coup d'aucune exception prévue à la convention no 29.
  4258. Note 154
  4259. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996, paragr. 153 (14).
  4260. Note 155
  4261. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996, paragr. 153 (15).
  4262. Note 156
  4263. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996, paragr. 153 (17).
  4264. Note 157
  4265. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, préparé par le juge Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, en application de la résolution 1996/80 du 23 avril 1996, doc. off. AGNU A/51/466 du 8 octobre 1996, paragr. 153 (14). Le rapporteur spécial a réitéré ses conclusions dans les rapports subséquents.
  4266. Note 158
  4267. Rapport du rapporteur spécial, M. Rajsoomer Lallah, soumis en application de la résolution 1996/80 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1997/64 du 6 février 1997.
  4268. Note 159
  4269. Rapport du rapporteur spécial, M. Rajsoomer Lallah, soumis en application de la résolution 1996/80 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1997/64 du 6 février 1997, paragr. 80.
  4270. Note 160
  4271. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, conformément à la résolution 51/117 de l'Assemblée générale, en date du 12 décembre 1996, et à la décision 1997/272 du Conseil économique et social, en date du 22 juillet 1997, doc. off. AGNU A/52/484 du 16 octobre 1997. Voir notamment les paragr. 50-68.
  4272. Note 161
  4273. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, conformément à la résolution 51/117 de l'Assemblée générale, en date du 12 décembre 1996, et à la décision 1997/272 du Conseil économique et social, en date du 22 juillet 1997, doc. off. AGNU A/52/484 du 16 octobre 1997, paragr. 57. Des porteurs auraient accompagné également les offensives menées en 1996 et 1997 dans les Etats Shan et Karenni. A la suite des cessez-le-feu avec les Kachin (1994) et un certain nombre d'autres groupes, et de la reddition de l'armée de Mong Tai de Khun Sa en 1996, il y aurait eu une réduction du nombre d'opérations effectives sur la ligne de front. Le rapporteur spécial a résumé d'autres cas qui ont été portés à sa connaissance, notamment le 28 juin 1997, 17 villageois auraient été capturés par les militaires au village de Ho Thin dans la communauté de Laihka et auraient été contraints de porter des munitions et du matériel militaires (paragr. 58).
  4274. Note 162
  4275. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, conformément à la résolution 51/117 de l'Assemblée générale, en date du 12 décembre 1996, et à la décision 1997/272 du Conseil économique et social, en date du 22 juillet 1997, doc. off. AGNU A/52/484 du 16 octobre 1997, paragr. 59. A cet égard, le rapporteur spécial a reçu des rapports sur le travail forcé dans la circonscription de Thabaung (division d'Ayeyarwady), aux termes desquels il appert que tous les villages de la communauté auraient eu à construire à leurs propres frais des camps provisoires, des casernes, des magasins, des logements et auraient eu à fabriquer des meubles. Egalement, ils auraient été forcés de construire une route le long du cours d'eau Hgawun, chaque famille devant fournir de la terre à cette fin; le 4 juillet 1997, des villageois, contraints en 1997 de s'installer à Kunhing (Etat Shan), auraient été forcés de couper des bambous, construire quatre enceintes autour d'un camp militaire et creuser des fossés entre les enceintes (paragr.60- 61).
  4276. Note 163
  4277. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, conformément à la résolution 51/117 de l'Assemblée générale, en date du 12 décembre 1996, et à la décision 1997/272 du Conseil économique et social, en date du 22 juillet 1997, doc. off. AGNU A/52/484 du 16 octobre 1997, paragr. 62.
  4278. Note 164
  4279. Rapport intérimaire sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, établi par M. Rajsoomer Lallah, rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, conformément à la résolution 51/117 de l'Assemblée générale, en date du 12 décembre 1996, et à la décision 1997/272 du Conseil économique et social, en date du 22 juillet 1997, doc. off. AGNU A/52/484 du 16 octobre 1997, paragr. 63. Le rapporteur a résumé l'information fournie dans les rapports soumis, à savoir: en octobre 1996, les autorités auraient fait appel au travail forcé pour construire une route reliant Ywamon à Zeebyugon, dans la circonscription de Natmauk. Des gens venant de plus de 40 villages de Natmauk auraient été contraints à participer au projet, à défaut de verser une somme d'argent; treize personnes, dont deux femmes, auraient été arrêtées le 15 janvier 1997 parce qu'elles refusaient de prendre part à un projet concernant la construction d'une route de Pathein à Talakwa à Morton Point dans la division de Ayeryarwady. Dans 33 villages, toutes les familles auraient eu à fournir un panier et demi de pierres. Ceux qui ne pouvaient le faire devaient verser 2 000 kyats au Conseil du village pour le rétablissement de l'ordre public (paragr. 65); les paysans de la circonscription de Wuntho dans la division de Sagaing auraient eu à fournir de la main-d'oeuvre forcée pour la construction d'un stûpa dans le village de Kyingyi (paragr. 66); des contributions forcées auraient été imposées pour la construction de routes (Kanthagyi-Kyaungdawya, Salin, Natyegan) et d'un pont (pont de Man) à Pwinbyu, dans la division de Magwe (paragr. 67); le travail forcé aurait également été pratiqué dans la ville de Kawhmu (division de Yangon), en décembre 1996, pour la construction d'une route menant au village de Htamanaing (paragr. 68). Les travailleurs auraient fait régulièrement l'objet de sévices.
  4280. Note 165
  4281. Rapport du rapporteur spécial, M. Rajsoomer Lallah, présenté en application de la résolution 1997/64 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1998/70 du 15 janvier 1998.
  4282. Note 166
  4283. Rapport du rapporteur spécial, M. Rajsoomer Lallah, présenté en application de la résolution 1997/64 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1998/70 du 15 janvier 1998, paragr. 65.
  4284. Note 167
  4285. Rapport du rapporteur spécial, M. Rajsoomer Lallah, présenté en application de la résolution 1997/64 de la Commission des droits de l'homme, doc. off. NU E/CN.4/1998/70 du 15 janvier 1998, paragr. 66. A cet égard, le rapporteur a cité le cas suivant: le 8 juin 1997, des soldats de Mongpan (Etat Shan) auraient arrêté 17 villageois (10 hommes et 7 femmes) dans le village de Ter Hong (Etat Shan) et les auraient forcés à transporter du matériel militaire depuis la région de Kengtung jusqu'à Mongpan. A l'arrivée, les hommes auraient été libérés mais les femmes auraient été gardées toute la nuit et auraient été victimes d'un viol collectif avant d'être relâchées le lendemain matin.
  4286. Note 168
  4287. Résolution de la Commission des droits de l'homme 1993/73 du 10 mars 1993, préambule, paragr. 7; résolution de la Commission des droits de l'homme 1994/85 du 9 mars 1994, préambule, paragr. 6; résolution de la Commission des droits de l'homme 1995/72 du 8 mars 1995, préambule, paragr. 8; résolution de la Commission des droits de l'homme 1996/80 du 23 avril 1996, préambule, paragr. 5 et 7. En 1997, la Commission des droits de l'homme a exprimé sa profonde inquiétude devant "(l)es violations persistantes des droits de l'homme au Myanmar signalées par le Rapporteur spécial, y compris (...) le travail imposé à des enfants aussi bien qu'à des adultes, (et) l'obligation de servir de porteurs aux militaires": résolution de la Commission des droits de l'homme 1997/64, paragr. 2 a).
  4288. Note 169
  4289. Résolution 1993/73, paragr. 6; résolution 1994/85, paragr. 7; résolution 1995/72, paragr. 11; résolution 1996/80, paragr. 12.
  4290. Note 170
  4291. Résolution 1993/73, paragr. 11; résolution 1994/85, paragr. 13; résolution 1995/72, paragr. 16; résolution 1996/80, paragr. 14; résolution 1997/64, paragr. 3 g). Dans cette dernière résolution, la commission engage expressément le gouvernement à coopérer plus étroitement avec l'OIT, "en particulier avec la commission d'enquête mise en place conformément à l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail"; résolution 1998/63 du 21 avril 1998, paragr. 4 j).
  4292. Note 171
  4293. Résolution 1994/85, paragr. 8; résolution 1995/72, paragr. 12; résolution 1996/80, paragr. 12; résolution 1997/64, paragr. 3 g); résolution 1998/63 du 21 avril 1998, paragr. 4 l).
  4294. Note 172
  4295. Résolution 1997/64, paragr. 2 g). En 1998, elle a exprimé sa profonde inquiétude devant les atteintes persistantes dont font l'objet les droits des enfants et qui sont liées en particulier au recrutement d'enfants dans les programmes de travail forcé et dans les forces armées: résolution 1998/63, paragr. 3 d).
  4296. Note 173
  4297. Résolution de la Commission des droits de l'homme E/CN.41998/L.81, paragr. 2 b).
  4298. Note 174
  4299. Résolution E/CN.4/1998/L.81, paragr. 4 a) et d).
  4300. Note 175
  4301. Doc. off. AGNU A/RES/48/150 du 23 décembre 1993, paragr. 15.
  4302. Note 176
  4303. Comme le rapporteur spécial sur le Myanmar avait déjà pour mandat "d'établir directement des contacts avec le gouvernement et avec le peuple du Myanmar" "afin d'examiner la situation des droits de l'homme dans ce pays" et de rendre compte à l'Assemblée générale, le Secrétaire général en a tiré comme conséquence que son rôle "consistait non pas à établir les faits mais plutôt à fournir (ses) bons offices afin d'aider le gouvernement du Myanmar à répondre aux préoccupations des autres Etats membres": rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. AGNU A/49/716 du 25 novembre 1994, paragr. 2.
  4304. Note 177
  4305. Ils n'ont pas eu la possibilité de se rendre dans ce pays en 1996: rapport du Secrétaire général à la Commission des droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. NU E/CN.4/1996/157 du 17 avril 1996 et rapport du Secrétaire général à l'Assemblée générale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. AGNU A/51/660 du 8 novembre 1996.
  4306. Note 178
  4307. Voir notamment rapport à l'Assemblée générale, rapport du Secrétaire général à l'Assemblée générale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. AGNU A/51/660 du 8 novembre 1996, paragr. 13.
  4308. Note 179
  4309. Rapport à la Commission des droits de l'homme, op. cit., note 177, paragr. 15; rapport à l'Assemblée générale, doc. off. AGNU A/51/660 du 8 novembre 1996, paragr. 13; rapport à la Commission des droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. NU E/CN.4/1997/129 du 27 mars 1997, paragr. 16; rapport à l'Assemblée générale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. AGNU A/52/587 du 10 novembre 1997, paragr. 14; et, rapport à la Commission des droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, doc. off. NU E/CN.4/1998/163 du 9 avril 1998, paragr. 16.
  4310. Note 180
  4311. Observations finales du Comité des droits de l'enfant: Myanmar, doc. off. NU CRC/C/15/Add.69 du 24 janvier 1997.
  4312. Note 181
  4313. Observations finales du Comité des droits de l'enfant: Myanmar, doc. off. NU CRC/C/15/Add.69 du 24 janvier 1997, paragr. 21 et 22.
  4314. Note 182
  4315. Observations finales du Comité des droits de l'enfant: Myanmar, doc. off. NU CRC/C/15/Add.69 du 24 janvier 1997, paragr. 25.
  4316. Note 183
  4317. Observations finales du Comité des droits de l'enfant: Myanmar, doc. off. NU CRC/C/15/Add.69 du 24 janvier 1997, paragr. 42 et 45.
  4318. Note 184
  4319. Rapport du rapporteur spécial sur l'application de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, doc. off. NU E/CN.4/1993/62 du 6 janvier 1993, paragr. 45-47.
  4320. Note 185
  4321. Rapport du rapporteur spécial, M. Abdelfattah Amor, sur l'application de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, doc. off. NU E/CN.4/1995/91 du 22 décembre 1994, p. 64 (version anglaise).
  4322. Note 186
  4323. Rapport du rapporteur spécial, M. P. Kooijmans, sur la torture et autres peines, ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, doc. off. NU E/CN.4/1993/26 du 15 décembre 1992, paragr. 335-350; rapport du rapporteur spécial, M. Nigel S. Rodley, sur la torture et autres peines, ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, doc. off. NU E/CN.4/1994/31 du 6 janvier 1994, paragr. 399-403; rapport du rapporteur spécial sur la torture et autres peines, ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, doc. off. NU E/CN.4/1995/34 du 12 janvier 1995, paragr. 492-500.
  4324. Note 187
  4325. Rapport du rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, doc. off. NU E/CN.4/1995/61 du 14 décembre 1994, paragr. 230.
  4326. Note 188
  4327. Rapport du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage sur sa dix-neuvième session, doc. off. CES E/CN.4/sub.2/1994/33 (23 juin 1994), p. 25; rapport du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage sur sa vingtième session, doc. off. CES E/CN.4/sub.2/1995/28 (13 juin 1995), p. 17. M. Benjamin Whitaker, Rapporteur spécial de la Sous-commission des droits de l'homme, a, dans sa mise à jour du rapport présenté à la sous-commission en 1966, identifié plus d'une dizaine de manifestations contemporaines de l'esclavage et des pratiques esclavagistes dont fait partie le travail forcé: rapport de M. Benjamin Whitaker, Rapporteur spécial, Mise à jour du rapport sur l'esclavage présenté à la sous-commission en 1966, doc. off. CES E/CN.4/sub.2/1982/20 (5 juillet 1982).
  4328. Note 189
  4329. Acte final du Congrès de Vienne reproduit in De Martens, Nouveau recueil de traités (N.R.T.) 1814-15, tome II, p. 433. L'Autriche, la France, la Grande-Bretagne, la Prusse et la Russie, réunies à Vérone en 1822, ont réitéré leur engagement à "chercher les moyens les plus efficaces pour prévenir un trafic que déjà les lois de la presque totalité des pays civilisés ont déclaré illicite et coupable; et pour punir rigoureusement ceux qui le poursuivent en contravention manifeste de ces lois": De Martens, N.R.T., 1822-23, tome VI.1, pp. 136-137.
  4330. Note 190
  4331. A titre d'exemples, consulter les traités conclus par l'Angleterre pour la répression de la traite sur mer, soit notamment la convention additionnelle au traité du 22 janvier 1815 avec le Portugal, signée le 18 juillet 1817, remplacée le 3 juillet 1842 et modifiée par la convention additionnelle du 18 juillet 1871 (reproduite in De Martens, Nouveau recueil général de traités (N.R.G.), tome III, p. 511); avec l'Espagne le 23 septembre 1817 (reproduite in De Martens, N.R.T., 1808-1818, tome III, no 20, pp. 135-140), modifiée et étendue par celle du 28 juin 1835; avec les Pays-Bas le 4 mai 1818 (reproduite in De Martens, N.R.T., 1808-1819, tome IV; no 48, pp. 511-523); avec la Suède-Norvège le 6 novembre 1824 (reproduite in De Martens, N.R.T., 1824-1826, tome IV.2, no 128, pp. 619-655); avec la France le 30 novembre 1831, complétée le 22 mars 1833 et suspendue par un autre traité en date du 29 mai 1845 (reproduite in De Martens, N.R.G., 1845, tome VIII, no 30, pp. 284-311); avec les Etats-Unis d'Amérique en date du 7 avril 1862 (reproduite in De Martens, N.R.G., 1847-1864, tome XVII.2, no LI, pp. 259-277) qui fut modifiée et étendue en février 1863 et juin 1870 (reproduite in De Martens, N.R.G., 1837-1874, tome XX, pp. 504-511).
  4332. Note 191
  4333. Le Traité de Londres a été signé par la France, la Grande-Bretagne, l'Autriche, la Russie et la Prusse (reproduit in De Martens, N.R.G., 1841, tome II, no 96, pp. 508-534). Ce traité assimile la traite des esclaves à la piraterie. Il ne fut pas ratifié par le gouvernement français.
  4334. Note 192
  4335. Article 9, Acte général de la Conférence de Berlin reproduit in De Martens, N.R.G., 1853-1885, tome X, no 20, p. 419.
  4336. Note 193
  4337. Reproduit in De Martens, N.R.G., 1881-1890, deuxième série, tome XVI, no 7, pp. 3-29. L'Acte général de Berlin du 26 février 1885 et l'Acte général de la Conférence de Bruxelles ont été révisés par la convention signée à Saint-Germain-en-Laye le 10 septembre 1919 aux termes de laquelle "(les Puissances signataires) s'efforceront, en particulier, d'assurer la suppression complète de l'esclavage sous toutes ses formes et de la traite des Noirs, sur terre et sur mer" (reproduit in Recueil des traités de la Société des Nations (R.T.S.D.N.), 1922, vol. VIII, no 202, p. 35). Enfin, lors de la Conférence de Bruxelles, la Grande-Bretagne et l'Espagne ont signé le Traité relatif à la suppression de la traite des esclaves en Afrique (reproduit in De Martens, N.R.G., 1882-1893, deuxième série, tome XVIII, pp. 168-173).
  4338. Note 194
  4339. Arrangement international en vue d'assurer une protection efficace contre le trafic criminel connu sous le nom de traite des Blanches signé à Paris le 18 mai 1904 et Convention internationale relative à la répression de la traite des Blanches signée à Paris le 4 mai 1910 entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, l'Autriche, la Hongrie, la Belgique, le Brésil, le Danemark, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie et la Suède (reproduit in De Martens, N.R.G.,1894-1913, troisième série, tome VII, no 21, pp. 252-264).
  4340. Note 195
  4341. A été signée par l'Albanie, l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Brésil, la Grande-Bretagne (avec le Canada, le Commonwealth d'Australie, l'Union sud-africaine, la Nouvelle-Zélande et l'Inde), le Chili, la Chine, la Colombie, Costa Rica, Cuba, l'Estonie, la Grèce, la Hongrie, l'Italie, le Japon, la Lettonie, la Lituanie, la Norvège, les Pays-Bas, la Perse, la Pologne (avec Dantzig), le Portugal, la Roumanie, le Siam, la Suède, la Suisse et la Tchécoslovaquie (reproduite in R.T.S.D.N., 1922, vol. IX, no 269, pp. 415-433). L'arrangement du 18 mai 1904 et les conventions du 4 mai 1910 et du 30 septembre 1921 ont été complétés par une convention additionnelle relative à la traite des femmes majeures signée à Genève le 11 octobre 1933 (reproduit in R.T.S.D.N., 1934, vol. CL, no 3476, pp. 433-456). La Convention pour la répression et l'abolition de la prostitution des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui signée le 2 décembre 1949 est venue unifier les instruments précédents.
  4342. Note 196
  4343. Reproduite in R.T.S.D.N, 1927, vol. LX, no 1414, pp. 253-270. La convention a été amendée en 1953 (reproduite in R.T.S.D.N, 1953, vol. CLXXXII, no 2422, pp. 51-72).
  4344. Note 197
  4345. Art. 1 (1).
  4346. Note 198
  4347. Art. 2 et art. 6.
  4348. Note 199
  4349. Art. 5.
  4350. Note 200
  4351. Art. 5 (3).
  4352. Note 201
  4353. Au 31 mai 1998, la convention no 29 a été ratifiée par 146 Etats. Voir ci-après, chap. 9, section B), paragr. 205-218.
  4354. Note 202
  4355. Art. 25 de la convention no 29.
  4356. Note 203
  4357. Reproduite in R.T.N.U., 1957, vol. CCLXVI, no 3822, pp. 3-87. Au 31 mai 1998, 117 Etats ont ratifié cette convention.
  4358. Note 204
  4359. Art. 1 a), b) et d) de la convention de 1956.
  4360. Note 205
  4361. Au 31 mai 1998, la convention no 105 a été ratifiée par 130 Etats.
  4362. Note 206
  4363. A titre d'exemples: Constitution des Barbades, art. 6; Constitution de la Colombie, art. 17; Constitution du Congo, art. 31; Constitution d'El Salvador, art. 9; Constitution des Etats-Unis d'Amérique, art. 13; Constitution de l'Ethiopie, art. 17; Constitution de la Georgie, art. 30; Constitution de la Grèce, art. 22 (3); Constitution de l'Inde, art. 23; Constitution de la Malaisie, art. 6; Constitution du Malawi, art. 27; Constitution de la Mongolie, art. 16; Constitution du Nigéria, art. 33; Constitution du Pakistan, art. 11; Constitution de la Fédération de Russie, art. 37 (2); Constitution du Rwanda, art. 17; Constitution du Suriname, art. 15; Constitution de la Turquie, art. 18; Constitution de l'Ukraine, art. 43.
  4364. Note 207
  4365. Instruments à vocation universelle: Déclaration universelle des droits de l'homme, 1948, art. 4. Même si le travail forcé n'y est pas expressément nommé, l'examen des discussions qui ont précédé l'adoption de cet article révèle qu'il était considéré comme une forme d'esclavage ou de servitude. Voir, à cet égard, procès-verbaux de la troisième session de la Commission des droits de l'homme (doc. off. CES E/CN.4/SR.53); Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966, art. 8; Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid, 1973, art. II e); Convention relative aux droits des enfants, 1989, art. 32, 34 et 36; Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, 1990, art. 11. Instruments à vocation régionale: Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1950, art. 4; Convention américaine relative aux droits de l'homme, 1969, art. 6; Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, 1981, art. 5.
  4366. Note 208
  4367. Pour un exemple de renvoi aux conventions de l'OIT dans le contexte de la Convention européenne des droits de l'homme, voir: Van der Mussele c. Belgique, 23 nov. 1983, série A, no 70.
  4368. Note 209
  4369. Pour les prisonniers de guerre, se référer notamment à la Convention de Genève (III) relative au traitement des prisonniers de guerre du 12 août 1949, art. 49-57 et art. 130. Pour les civils se référer à la Convention de Genève (IV) relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949, art. 40, 51 et 52 ainsi qu'au Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, art. 75 et 76. Enfin, le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux prévoit expressément, en son article 4, que sont et demeurent prohibées "en tout temps et en tout lieu" "f) l'esclavage et la traite des esclaves sous toutes leurs formes."
  4370. Note 210
  4371. Annuaire de la CDI, 1980, vol. II, 2e partie, pp. 29 et suiv. L'article 19 du projet d'articles se lit:
  4372. 1. Le fait d'un Etat qui constitue une violation d'une obligation internationale est un fait internationalement illicite quel que soit l'objet de l'obligation violée.
  4373. 2. Le fait internationalement illicite qui résulte d'une violation par un Etat d'une obligation internationale si essentielle pour la sauvegarde d'intérêts fondamentaux de la communauté internationale que sa violation est reconnue comme un crime par cette communauté dans son ensemble constitue un crime international.
  4374. 3. Sous réserve des dispositions du paragraphe 2 et d'après les règles du droit international en vigueur, un crime international peut notamment résulter:
  4375. (...)
  4376. c) d'une violation grave et à une large échelle d'une obligation internationale d'importance essentielle pour la sauvegarde de l'être humain, comme celles interdisant l'esclavage, le génocide, l'apartheid;
  4377. (...)
  4378. Note 211
  4379. Barcelona Traction, Light and Power Company, limited, arrêt, C.I.J., Recueil 1970, p. 33. La Commission des droits de l'homme estime pour sa part que l'esclavage et ses manifestations modernes représentent quelques-unes des violations des droits de l'homme les plus graves: résolution 1991/58, préambule 8 (6 mars 1991); résolution 1994/25, préambule 13 (4 mars 1994).
  4380. Note 212
  4381. Projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité adopté par la Commission du droit international en 1996: rapport de la CDI sur les travaux de sa quarante-huitième session (6 mai -- 26 juillet 1996), doc. off. AGNU, suppl. no 10 (A/51/10), pp. 30-144. Pour définir l'esclavage, la Commission du droit international se réfère notamment à la convention de 1926 relative à l'esclavage, à la Convention supplémentaire de 1956 relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage, au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à la convention no 29 de l'Organisation internationale du Travail. Voir également Annuaire de la CDI 1991, vol. II, 2e partie, p. 108.
  4382. Note 213
  4383. Statut du Tribunal militaire de Nuremberg, art. 6 c); Charte du Tribunal militaire international pour l'Extrême-Orient, art. 5 c); Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, art. 5 c); Tribunal pénal international pour le Rwanda, art. 3.
  4384. Note 214
  4385. Rapport de la CDI sur les travaux de sa quarante-sixième session (2 mai -- 22 juillet 1994), doc. off. AGNU, suppl. no 10 (A/49/10), pp. 76-85. Sur la notion de crime contre l'humanité, consulter également La Rosa, Dictionnaire de droit international pénal, Termes choisis, Paris, PUF, 1998, pp. 17-26.
  4386. Note 215
  4387. Art. 18 d) du projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, op. cit., note 212, p. 119.
  4388. Note 216
  4389. Art. 1, paragr. 1, de la convention.
  4390. Note 217
  4391. Pour la définition du travail forcé ou obligatoire donnée dans la convention ainsi que les exceptions à cette obligation, voir paragr. 198 et suiv. ci-dessus.
  4392. Note 218
  4393. Art. 25 de la convention.
  4394. Note 219
  4395. Art. 2, paragr. 1, de la convention.
  4396. Note 220
  4397. CIT, 65e session 1979, Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (désignée ci-après Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé), paragr. 21.
  4398. Note 221
  4399. Compte rendu de la Conférence, 14e session, Genève, 1930, p. 691.
  4400. Note 222
  4401. CIT, 83e session, 1996, rapport III (partie 4A), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (désigné ci-après R.C.E., 1996), p. 94.
  4402. Note 223
  4403. Art. 2, paragr. 2, de la convention.
  4404. Note 224
  4405. Art. 2, paragr. 2 a), de la convention.
  4406. Note 225
  4407. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 24.
  4408. Note 226
  4409. CIT, 14e session, Genève, 1930, Rapport I: Travail forcé, pp. 142-146; CIT, 14e session, Genève, 1930, Compte rendu des travaux, vol. I, p. 301. On relèvera par ailleurs que la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957, ratifiée par 130 Etats, mais non par le Myanmar, prévoit en son article 1 b) la suppression et le non-recours à toute forme de travail forcé ou obligatoire en tant que méthode de mobilisation et d'utilisation de la main-d'oeuvre à des fins de développement économique.
  4410. Note 227
  4411. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 33.
  4412. Note 228
  4413. A titre d'illustration de ce principe, la commission d'experts a rappelé que l'article 1 a) de la convention supplémentaire de 1956 sur l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage se réfère à l'état ou la condition résultant du fait qu'un débiteur s'est engagé à fournir en garantie d'une dette ses services personnels si la durée de ces services n'est pas limitée ni leur caractère défini.
  4414. Note 229
  4415. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 68.
  4416. Note 230
  4417. Art. 2, paragr. 2 b).
  4418. Note 231
  4419. Voir paragr. 208 ci-dessus.
  4420. Note 232
  4421. Voir paragr. 212 ci-dessous.
  4422. Note 233
  4423. Voir paragr. 213 ci-dessous.
  4424. Note 234
  4425. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 34.
  4426. Note 235
  4427. Art. 2, paragr. 2 c).
  4428. Note 236
  4429. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 35.
  4430. Note 237
  4431. Art. 2, paragr. 2 e).
  4432. Note 238
  4433. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 36.
  4434. Note 239
  4435. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 36. La commission a noté qu'une formule analogue a été adoptée dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont l'article 4 permet des dérogations à ces dispositions dans le cas où un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation, dans la stricte mesure où la situation l'exige.
  4436. Note 240
  4437. Art. 2, paragr. 2 e).
  4438. Note 241
  4439. Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 37.
  4440. Note 242
  4441. Autres que celles spécifiquement exclues du champ d'application de la convention (voir ci-dessus paragr. 197 à 203).
  4442. Note 243
  4443. Art. 1, paragr. 2 (voir ci-dessus paragr. 205).
  4444. Note 244
  4445. La convention est entrée en vigueur le 1er mai 1932, mais cela n'a été fait ni en 1937 ni ultérieurement.
  4446. Note 245
  4447. CIT, 52e session, 1968, rapport III (partie IV), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, partie III: Travail forcé, étude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957; également publié sous forme de tiré à part: Travail forcé, extrait du rapport de la 38e (1968) session de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (désignée ci-après: Etude d'ensemble de 1968 sur le travail forcé), paragr. 19 b) et c).
  4448. Note 246
  4449. Art. 7 et 8.
  4450. Note 247
  4451. Art. 9 et 10.
  4452. Note 248
  4453. Art. 9 à 12.
  4454. Note 249
  4455. Art. 13 à 17.
  4456. Note 250
  4457. Art. 18 et 19.
  4458. Note 251
  4459. Art. 4 et 6.
  4460. Note 252
  4461. Art. 11.
  4462. Note 253
  4463. Art. 19.
  4464. Note 254
  4465. Art. 21.
  4466. Note 255
  4467. Art. 7 et 8.
  4468. Note 256
  4469. BIT, Rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport III (partie IV), CIT, 46e session, Genève, 1962, partie III: Travail forcé, paragr. 69; R.C.E., 1964, pp. 78, 80 et 85; Etude d'ensemble de 1968 sur le travail forcé, paragr. 22.
  4470. Note 257
  4471. R.C.E., 1998, p. 106.
  4472. Note 258
  4473. Voir paragr. 198 à 204 ci-dessus.
  4474. Note 259
  4475. Il s'agit des Etats Chin, Kachin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan; et des divisions de Ayeyarwady, Bago, Magway, Mandalay, Sagaing, Tanintharyi et Yangon. On trouvera à l'annexe IX des cartes montrant où se trouvent ces Etats et ces divisions, ainsi que les lieux mentionnés dans le présent rapport.
  4476. Note 260
  4477. Egalement désignées sous le nom de quartiers.
  4478. Note 261
  4479. Estimation du gouvernement citée dans EIU Country Profile 1997-98, pp. 20 et suiv.
  4480. Note 262
  4481. Le gouvernement reconnaît officiellement 135 "races nationales" différentes.
  4482. Note 263
  4483. Pour certaines de ces estimations, voir Anti-Esclavage International, doc. 153 à la page 4746.
  4484. Note 264
  4485. EIU Country Report, premier trimestre 1998, p. 10.
  4486. Note 265
  4487. Composition du SLORC au 20 décembre 1995: le général en chef Than Shwe (président), le général Maung Aye (vice-président), le lieutenant général Khin Nyunt (premier secrétaire), le lieutenant général Tin Oo (deuxième secrétaire), le vice-amiral Maung Maung Khin, le lieutenant général (armée de l'air) Tin Tun, le lieutenant général Aung Ye Kyaw, le lieutenant général Phone Myint, le lieutenant général Sein Aung, le lieutenant général Chit Swe, le lieutenant général Kyaw Ba, le lieutenant général Maung Thint, le lieutenant général Myint Aung, le lieutenant général Mya Thin, le lieutenant général Tun Kyi, le lieutenant général Aye Thaung, le lieutenant général Myo Nyunt, le lieutenant général Maung Hla, le lieutenant général Kyaw Min, le général de division Soe Myint et le général de division Myan Lin.
  4488. Note 266
  4489. Selon la notification du SPDC no 1/97 du 15 novembre 1997 portant création du SPDC, la composition du conseil était la suivante: le général en chef Than Shwe (président), le général Maung Aye (vice-président), le lieutenant général Khin Nyunt (premier secrétaire), le lieutenant général Tin Oo (deuxième secrétaire), le lieutenant général Win Myint (troisième secrétaire), le contre-amiral Nyunt Thein (commandant en chef de la marine), le brigadier général Kyaw Than (commandant en chef de l'armée de l'air), le général de division Aung Htwe (commandant, commandement occidental), le général de division Ye Myint (commandant, commandement du centre), le général de division Khin Maung Than (commandant, commandement de Yangon), le général de division Kyaw Win (commandant, commandement du Nord), le général de division Thein Sein (commandant, commandement de la zone du triangle), le général de division Thura Thiha Thura Sitt Maung (commandant, commandement de la zone côtière), le brigadier général Thura Shwe Mann (commandant, commandement du sud-ouest), le brigadier général Myint Aung (commandant, commandement de la région du sud-est), le brigadier général Maung Bo (commandant, commandement oriental), le brigadier général Thiha Thura Tin Aung Myint Oo (commandant, commandement du nord-est), le brigadier général Soe Win (commandant, commandement du nord-ouest), le brigadier général Tin Aye (commandant, commandement du sud).
  4490. Note 267
  4491. Voir la notification no 1/97 du 15 novembre 1997 sur le Conseil pour le rétablissement de l'ordre public, ainsi que les notifications nos 1/97 et 3/97 sur le Conseil d'Etat pour la paix et le développement. Ils figurent au registre officiel sous H01-5652 et H01-5655. Voir également EIU Country Profile, premier trimestre 1998, p. 11.
  4492. Note 268
  4493. La loi sur l'adaptation des expressions (no 1/97), qui est entrée en vigueur le 15 novembre 1997, a ordonné le remplacement de l'expression "Conseils pour le rétablissement de l'ordre public" par "Conseils pour la paix et le développement" dans tous les textes légaux, "par commodité".
  4494. Note 269
  4495. The Military Balance 1988/89, Institut international d'études stratégiques, pp. 159-60.
  4496. Note 270
  4497. The Military Balance 1997/98, Institut international d'études stratégiques, p. 158.
  4498. Note 271
  4499. The Military Balance 1997/98, Institut international d'études stratégiques, p. 158.
  4500. Note 272
  4501. Ces bataillons constituent plusieurs régiments; néanmoins, c'est le bataillon qui est la principale unité de combat, le régiment étant un regroupement plus traditionnel et symbolique.
  4502. Note 273
  4503. Chaque commandement régional et chaque division d'infanterie comprend environ 3 commandements d'opérations tactiques (TOC), qui contrôlent chacun 3 ou 4 bataillons d'infanterie (Heppner, XII/27, s'y réfère sous le terme de "commandements stratégiques").
  4504. Note 274
  4505. The Military Balance 1997/98, Institut international d'études stratégiques, p. 158. Voir également Andrew Selth, Transforming the Tatmadaw, Australian National University Strategic and Defense Studies Centre, 1996.
  4506. Note 275
  4507. Voir Human Rights Watch/Refugees International, 154 à 5404.
  4508. Note 276
  4509. Une liste des diverses orthographes des noms cités dans le présent rapport figure à l'annexe X. Bien que la commission se soit efforcée dans ce domaine de donner des désignations aussi précises et aussi complètes que possible, elle ne disposait pas d'informations officielles du gouvernement malgré la demande présentée à la Mission permanente du Myanmar pour que ces informations lui soient fournies.
  4510. Note 277
  4511. Voir EIU Country Profile, 1997/98, p. 10. Voir également EIU Country Report, premier trimestre 1998, pp. 14 à 15, et Karen Human Rights Group, doc. 174, p. 8601.
  4512. Note 278
  4513. Voir paragr. 121 à 123 ci-dessus.
  4514. Note 279
  4515. Voir paragr. 145 ci-dessus.
  4516. Note 280
  4517. Voir le rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (cité à la note 84 ci-dessus), paragr. 45.
  4518. Note 281
  4519. Transcription de la déclaration faite par Daw Aung San Suu Kyi lors des auditions du GSP des Etats-Unis, 129-4283.
  4520. Note 282
  4521. Article 9A de la loi sur les villes, voir paragr. 240 ci-dessus.
  4522. Note 283
  4523. Voir paragr. 237 ci-dessus.
  4524. Note 284
  4525. Ce texte figure au doc. H9, p. 5843.
  4526. Note 285
  4527. Doc. H10, p. 5858.
  4528. Note 286
  4529. Doc. H7, p. 5802, et doc. H10, pp. 5870 et 5871.
  4530. Note 287
  4531. Doc. H10, p. 5871.
  4532. Note 288
  4533. Doc. H10, p. 5871.
  4534. Note 289
  4535. Voir paragr. 242 ci-dessus.
  4536. Note 290
  4537. Le texte intégral de ce décret figure à l'annexe XII. Ce décret a été transmis par le gouvernement du Myanmar en tant qu'annexe de son "Rapport sur le progrès des mesures prises par le gouvernement du Myanmar en vue d'abolir le recours au travail forcé", daté du 30 septembre 1996 et soumis au Directeur général du BIT.
  4538. Note 291
  4539. "Rapport sur le progrès des mesures prises par le gouvernement du Myanmar en vue d'abolir le recours au travail forcé", 30 sept. 1996, paragr. 15.
  4540. Note 292
  4541. Le texte de cette directive figure au document CES/E/CN.4/1996/65, p. 42 (annexe III).
  4542. Note 293
  4543. Doc. H10, p. 5870.
  4544. Note 294
  4545. Voir paragr. 112 ci-dessus.
  4546. Note 295
  4547. Voir paragr. 237 et suiv. ci-dessus.
  4548. Note 296
  4549. Par exemple, aux termes de l'ordonnance no 1/90 prise par la division du LORC de Rangoon le 22 mai 1990 et diffusée par la radiodiffusion birmane le même jour, "les fonctionnaires responsables sont tenus de déclarer aux conseils pour le rétablissement de la loi et de l'ordre les personnes absentes de même que les invités et étrangers dans les quelque 42 localités urbaines de la division de Rangoon. Toute défaillance entraînera des mesures effectives à l'encontre du fonctionnaire responsable et de la partie coupable. Cette disposition a déjà été annoncée par l'ordonnance no 1/89 de la division de Rangoon du Conseil pour le rétablissement de la loi et de l'ordre du 18 juillet 1989, premier jour de la lune descendante de Waso, de l'an 1351 de l'ère birmane". Voir également art. XIX, Burma Beyond the Law, août 1996, p. 56 (joint aux éléments de preuve supplémentaires présentés par les plaignants le 31 octobre 1996 mais non inclus dans l'annexe I au présent rapport), et déclarations de témoin(s).
  4550. Note 297
  4551. Extrait de: Burma Code, 1943, vol. 1, p.18.
  4552. Note 298
  4553. Extrait de: Nations Unies, Annuaire des droits de l'homme pour 1947, p. 53.
  4554. Note 299
  4555. Extrait de: Nations Unies, Annuaire des droits de l'homme pour 1947, p. 53.
  4556. Note 300
  4557. Cité d'après Human Rights Watch/Asia, doc. 154, p. 4918. Selon cet organisme, "c'est à titre de prévention d'une immigration continue d'Indiens en Birmanie que tous les habitants de la Birmanie étaient tenus de demander leur enregistrement dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi de 1948 et se sont vu délivrer des cartes d'identité. De nombreux Rohingyas se sont faits enregistrer et ont reçu une carte d'identité qui leur a permis de voter pendant la période démocratique comprise entre 1950 et 1962. Les Rohingyas font valoir qu'après le coup d'Etat militaire en 1962 il est devenu de plus en plus difficile pour des enfants de citoyens reconnus de recevoir la citoyenneté. La loi demandait aux parents d'enregistrer leurs enfants lorsque ceux-ci atteignaient l'âge de dix ans, de sorte que, dans de nombreuses familles, ceux qui sont nés avant 1952 ont une carte tandis que leurs cadets se sont vu simplement opposer une fin de non-recevoir. En 1974, une nouvelle Constitution a été adoptée pour consacrer l'Etat unipartite existant de fait depuis 1962. Ceux des Rohingyas qui n'étaient pas considérés comme citoyens en vertu de la loi de 1948 et ne pouvaient justifier de la résidence de leurs familles en Birmanie pendant deux générations avant cette date n'ont eu d'autre solution que de demander une attestation d'enregistrement en qualité d'étrangers (FRC). A nouveau, de nouvelles cartes d'identité ont été délivrées et, à nouveau, selon les déclarations de Rohingyas qui ont été entendus, lorsqu'ils ont remis leur carte pour renouvellement, celle-ci ne leur a jamais été restituée. Lorsque 200 000 Rohingyas se sont enfuis au Bangladesh en 1976, le gouvernement birman a déclaré qu'ils étaient tous des immigrants illégaux qui se sont enfuis lorsqu'ils se sont trouvés dans l'impossibilité de produire leurs documents d'identité à l'occasion de contrôles d'immigration de routine. Peu après le retour forcé des derniers réfugiés en Birmanie, en 1980, le gouvernement a élaboré une nouvelle loi sur la citoyenneté, qui a été promulguée en 1982. Aussi bien la teneur de cette loi de 1982 que le moment où elle a été adoptée révèlent que cet instrument visait délibérément les Rohingyas, tout en établissant une discrimination aussi à l'égard d'autres immigrants asiatiques entrés dans le pays pendant la période coloniale britannique, et qui comprennent d'autres personnes originaires du Sud asiatique ainsi que des Chinois ethniques. Au total, la population d'immigrants est estimée à environ un million de personnes" (à cet égard, Human Rights Watch/Asia se réfère également à: Martin Smith: Ethnics groups of Burma, Anti-Slavery International, doc. 153, pp. 4728 et suiv.).
  4558. Note 301
  4559. Blaustein et Flanz (éditeurs): Constitutions of the World, New York, 1990, Union du Myanmar, p. 8; voir également Human Rights Watch/Asia, doc. 154, p. 4919. Selon ce dernier organisme, la loi définit le citoyen par naturalisation comme étant celui dont l'un des parents a été citoyen de plein droit et l'autre citoyen par association (ou qui a été admis à la nationalité en vertu de la loi de 1948). Mais un citoyen par naturalisation doit également "bien parler l'une des langues nationales", "avoir eu un bon naturel" et "être sain d'esprit". Seuls les citoyens à part entière et les citoyens par naturalisation sont admis à "jouir des droits de citoyen prévus par la loi, à l'exception, de temps en temps, des droits stipulés par l'Etat".
  4560. Note 302
  4561. Human Rights Watch/Asia, doc. 154, p. 4919.
  4562. Note 303
  4563. Voir déclaration des témoins nos 53, 54, 61, 76, 86 et 88.
  4564. Note 304
  4565. Traduction non officielle de la commission d'enquête, établie à partir du texte birman à sa disposition. L'intitulé de la loi se réfère à ceux qui sont employés dans la milice et non à la milice elle-même, et se traduit donc littéralement par: "loi sur les membres de la milice".
  4566. Note 305
  4567. Selon un rapport de 1964 du Département d'Etat des Etats-Unis au travail concernant la législation et la pratique dans l'Union birmane (BLD Report No. 264), "les médecins sont désormais soumis à la conscription dès qu'ils sont diplômés de la faculté de médecine et doivent servir pour une période indéfinie, en fonction des besoins de l'armée". La loi sur la milice populaire, telle qu'adoptée en 1959, ne prévoit pas que les médecins servent pour une période indéfinie, mais seulement dans les limites indiquées ci-dessus.
  4568. Note 306
  4569. C'est-à-dire, pour du travail incompatible avec l'art. 2, paragr. 2 a), de la convention.
  4570. Note 307
  4571. Selon le rapport de 1964 du département d'Etat des Etats-Unis au Travail, op. cit., note 305, la loi n'était alors pas encore entrée en vigueur. Voir également les indications plus récentes données au paragr. 389.
  4572. Note 308
  4573. Extrait de Burma Code, 1944, vol. IV, p. 93.
  4574. Note 309
  4575. Les références du registre officiel des conclusions donnent la source de l'information ainsi que le numéro du document et le numéro de la page du registre officiel, séparés par un tiret. Les références au registre des audiences qui ont eu lieu lors de la seconde session de la commission indiquent le nom du témoin ainsi que la séance et la page par des chiffres romains et arabes, respectivement. Les références au témoignage des témoins interrogés par la commission au cours de sa visite dans la région indiquent le numéro du témoin; les résumés de ces témoignages figurent à l'annexe 6 du présent rapport.
  4576. Note 310
  4577. Voir chap. 3, paragr. 28-54.
  4578. Note 311
  4579. Voir chap. 4, paragr. 55-76.
  4580. Note 312
  4581. Voir chap. 5, paragr. 77-98.
  4582. Note 313
  4583. Trois registres ont été établis: le premier répertorie les documents reçus à la suite de la première session de la commission; le second se réfère aux documents qui ont été soumis par des témoins lors des audiences qui ont eu lieu à Genève en novembre 1997 et le troisième donne la liste des documents communiqués à la commission pendant sa visite dans la région.
  4584. Note 314
  4585. A cet égard, voir Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited, deuxième phase, C.I.J., Recueil 1970, paragr. 58, opinion individuelle de Sir Gerald Fitzmaurice. L'opinion de Sir Fitzmaurice a été citée avec approbation dans l'affaire relative à l'application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), ordonnance du 13 septembre 1993, C.I.J., Recueil 1993, page 357, opinion individuelle du juge Shahabuddeen.
  4586. Note 315
  4587. Affaire relative à l'application de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), ibid. Le juge Shahabuddeen s'est également référé à l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique), C.I.J., Recueil 1986, paragr. 59.
  4588. Note 316
  4589. Voir paragr. 300-350 ci-dessous.
  4590. Note 317
  4591. Karen Human Rights Group, 001-0189 à 0190, 001-0489 à 0490, Lin, VII/30; voir paragr. 351-373 ci-dessous.
  4592. Note 318
  4593. Voir paragr. 374-388 ci-dessous.
  4594. Note 319
  4595. Voir paragr. 389-393 ci-dessous.
  4596. Note 320
  4597. Voir paragr. 394-407 ci-dessous.
  4598. Note 321
  4599. Voir paragr. 408-443 ci-dessous.
  4600. Note 322
  4601. Voir paragr. 444-457 ci-dessous.
  4602. Note 323
  4603. Voir paragr. 458-461 ci-dessous.
  4604. Note 324
  4605. Guest, II/24; Liddell, V/34; Lin, VII/47; Heppner, XII/62.
  4606. Note 325
  4607. Human Rights Watch/Asia, 001-0050.
  4608. Note 326
  4609. Par exemple, 364 224 personnes auraient fourni du travail pour la construction de la voie ferrée Nahtogyi-Mingyan dans la division de Mandalay; 799 447 personnes pour la voie ferrée Aungban-Loikaw dans les Etats Shan et Kayah; plus de 4 000 personnes en un seul jour pour la voie ferrée Ye à Dawei (Tavoy) dans l'Etat Mon et dans la division de Tanintharyi; plus de 85 000 personnes pour la route allant de Yenangyaung à Namauk; et 2,3 millions de personnes pour le curage de douves et la construction d'une ceinture routière à Mandalay. Voir document H14 pour la copie de certains de ces rapports du New Light of Myanmar et de son prédécesseur le Working People's Daily. Selon une estimation fournie à la commission et établie à partir de chiffres publiés par ces journaux, ce sont plus de 4 millions de personnes qui ont été contraintes de travailler sur des projets d'infrastructure au cours de la période 1992-1995. Voir Steele, VIII/5. En outre, l'ambassade des Etats-Unis à Yangon a estimé la quantité de travail forcé utilisé sur les projets de développement local calculée sur la base de la valeur des "contributions populaires" (non rémunérée) figurant dans les données économiques publiées par le gouvernement du Myanmar. La valeur de ces contributions a atteint son maximum au cours de l'exercice financier 1995-96, date à laquelle elles étaient évaluées à 186,9 millions de kyats, ce qui, au prix officiel de la journée de travail établi par le gouvernement à vingt kyats par jour, équivaut à plus de 9,3 millions de journées de travail. Voir ambassade des Etats-Unis à Rangoon, 101-3905 et suiv., H13-6009 à 12; Steele, VIII/5-7 pour d'autres éléments de la discussion.
  4610. Note 327
  4611. Min Lwin, VI/14; Ka Hsaw Wa, X/9.
  4612. Note 328
  4613. Mirante, I/48, 59; Heppner, XII/25-28; Heppner, XIII/6.
  4614. Note 329
  4615. Copies de ces ordonnances figurent, entre autres, dans les documents 001, 015 à 020, 022 à 028, 130, H6, H21, H25 et M50.
  4616. Note 330
  4617. Voir les ordres 5, 7, 8 et 4 reproduits à l'annexe XI.
  4618. Note 331
  4619. Voir l'ordre 2 reproduit à l'annexe XI.
  4620. Note 332
  4621. Voir par exemple l'ordre 3 reproduit à l'annexe XI; voir également Heppner, XII/35-39.
  4622. Note 333
  4623. Ka Hsaw Wa, X/9, 43 à 44; Heppner, XII/38 à 39; pour un exemple d'ordre auquel étaient jointes des cartouches, voir ordre 4 reproduit à l'annexe XI.
  4624. Note 334
  4625. Pour le texte d'un ordre demandant de fournir cette information, voir ordre 1 reproduit à l'annexe XI.
  4626. Note 335
  4627. Karen Human Rights Group, 032-2428 à 2429; UNHCR, 033-2435; Lin, VII/23-25; Heppner, XII/11-14, 49-51.
  4628. Note 336
  4629. Karen Human Rights Group, 016-2147 à 2148 et 031-2393; Wa Wa, III/7-8; Min Lwin, V/6; Heppner, XII/31-35.
  4630. Note 337
  4631. Pour des exemples de populations déplacées, utilisées pour le portage, voir Karen Human Rights Group, 001-0307, 001-0481 à 0482; voir également Guest, II/9-10.
  4632. Note 338
  4633. Karen Human Rights Group, 001-0028 à 30, 032-2429; Human Rights/Asia, 065-2965; Mirante, I/47-48; Guest, II/9-10, 20-21; Heppner, XII/46-49, 54.
  4634. Note 339
  4635. Human Rights Watch/Asia, 154-5406.
  4636. Note 340
  4637. Karen Human Rights Group, 001-0027 à 0028.
  4638. Note 341
  4639. Voir, à titre d'exemple, Karen Human Rights Group, 016-2148; Heppner, XII/17.
  4640. Note 342
  4641. Karen Human Rights Group, 032-2427 à 2428; Liddell, V/10; Heppner, XII/49-51.
  4642. Note 343
  4643. Guest II/6; Lin VII/30-31; Heppner XIII/20-21.
  4644. Note 344
  4645. Human Rights Watch/Asia a relevé, par exemple, un nombre particulièrement disproportionné de musulmans parmi les porteurs déserteurs qu'ils avaient questionnés. Voir Human Rights Watch/Asia, 001-0054.
  4646. Note 345
  4647. Lin, VII/31-32; Heppner, XIII/21.
  4648. Note 346
  4649. Karen Human Rights Group, 032-2430; Guest II/7-9; Heppner, XII/63-64.
  4650. Note 347
  4651. Karen Human Rights Group, 001-0028, 032-2430; Human Rights Watch/Asia, 001-0051 à 0052; Guest, II/7-9, 14-16; Min Lwin III/21; Liddell, V/29-30; Lin, VII/27-28; Heppner, XII/10-11, 49-51.
  4652. Note 348
  4653. Australian Council for Overseas Aid, 001-0266; Human Rights Watch/Asia, 001-0050 à 0051, H07-5805 à 5806; Liddell, V/20-22.
  4654. Note 349
  4655. Voir paragr. 19 de la réponse du gouvernement du Myanmar au Mémorandum du Rapporteur spécial, transmise au Rapporteur spécial dans une Note verbale datée du 4 octobre 1995 par la mission permanente du Myanmar auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, et document UN UNGA A/50/568 (16 oct. 1995), p. 26.
  4656. Note 350
  4657. Human Rights Watch/Asia, 001-0057, 001-0059; Mon Information Service, M57-7432; Heppner, XII/14; Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, mars 1995, p. 7.
  4658. Note 351
  4659. Karen Human Rights Group, 001-1462, 016-2149, 032-2422; Min Lwin, III/16; Liddell, V/35-36; Lin, VII/39; Heppner, XII/18-19.
  4660. Note 352
  4661. Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, mars 1995, p. 7.
  4662. Note 353
  4663. Heppner, XII/27-28.
  4664. Note 354
  4665. Mon Information Service, M57-7432; Heppner, XII/15.
  4666. Note 355
  4667. Karen Human Rights Group, 016-2147; Human Rights Watch/Asia, 065-2572 à 2573; Lin, VII/54; Heppner, XII/25.
  4668. Note 356
  4669. Lin, VII/26; Heppner, XII/28.
  4670. Note 357
  4671. Cela représente une somme d'argent substantielle pour la plupart des gens au Myanmar. Pour une indication du pouvoir d'achat, voir sous "kyat", à l'annexe X.
  4672. Note 358
  4673. Mon Information Service, M57-7432; Karen Human Rights Group, 032-2422.
  4674. Note 359
  4675. Karen Human Rights Group, 016-2148, 032-2429; Liddell, V/23.
  4676. Note 360
  4677. Karen Human Rights Group, 001-1474; Guest, II/24.
  4678. Note 361
  4679. Amnesty International, 088-3588.
  4680. Note 362
  4681. Heppner, XII/15-16.
  4682. Note 363
  4683. Karen Human Rights Group, 001-0028; Guest, II/12; Ka Hsaw Wa, X/13.
  4684. Note 364
  4685. Karen Human Rights Group, 001-1461 à 62.
  4686. Note 365
  4687. Guest, II/12-13.
  4688. Note 366
  4689. Guest, II/10-11; Ka Hsaw Wa, X/15.
  4690. Note 367
  4691. Voir paragr. 294-295 ci-dessus.
  4692. Note 368
  4693. Heppner, XII/64.
  4694. Note 369
  4695. Dans l'un des documents soumis à la commission, il est noté que les porteurs ainsi engagés étaient peut-être moins maltraités par les soldats car ils étaient habitués à ce travail et que, étant mieux payés, ils pouvaient graisser la patte des soldats pour obtenir de la nourriture ou être mieux traités. Voir Karen Human Rights Group, 016 à 2149.
  4696. Note 370
  4697. Karen Human Rights Group, 016-2147; Min Lwin, III/16; Heppner, XII/16.
  4698. Note 371
  4699. Voir les photos sous 155-5474, 156-5517; voir également Karen Human Rights Group, 032-2422; Heppner, XIII/5.
  4700. Note 372
  4701. Lin, VII/52-53.
  4702. Note 373
  4703. C'est ainsi qu'une femme épileptique, qui avait été prise comme porteur alors que sa soeur avait expliqué son état de santé aux soldats, est décédée dès le premier jour (Liddell, V/11); une autre fois, une femme âgée Mon prise comme porteur a été contrainte de transporter un lourd chargement de munitions, ce qui lui a valu de graves blessures (Lin, VII/26). Voir également Karen Human Rights Group, 001-1461 à 62, 016-2149.
  4704. Note 374
  4705. Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, op. cit., note 350, p. 9.
  4706. Note 375
  4707. "Boîte" se réfère à des boîtes de lait condensé d'un format standardisé, qui sont le récipient normalement utilisé pour mesurer les petites quantités de produits secs au Myanmar. Une boîte est l'équivalent d'environ 300 grammes de riz cru. A titre de comparaison, le Programme mondial d'alimentation estime qu'une famille de six à huit personnes a besoin de six kilos par jour, soit près d'un kilo par personne (voir Human Rights Watch/Asia, H07-5806).
  4708. Note 376
  4709. Liddell, V/8.
  4710. Note 377
  4711. Karen Human Rights Group, 016-2147; Heppner, XII/16; Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, op. cit., note 350, p. 9.
  4712. Note 378
  4713. Liddell, V/8.
  4714. Note 379
  4715. Human Rights Watch/Asia, 001-0059; Liddell, V/6-7; Ka Hsaw Wa, X/11-12.
  4716. Note 380
  4717. Human Rights Watch/Asia, 001-0059; Guest, II/11; Min Lwin, III/18-19; Liddell, V/8; Heppner, XII/16; Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, op. cit., note 350, pp. 9-10.
  4718. Note 381
  4719. Human Rights Watch/Asia, 001-0060; Guest, II/10; Ka Hsaw Wa, X/14-15; Heppner, XII/16-18; Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, op. cit., note 350, pp. 9-11.
  4720. Note 382
  4721. Ces meurtres étaient probablement perpétrés pour éviter que les porteurs ne donnent des renseignements à l'ennemi. Karen Human Rights Group, 032-2422; Heppner, XII/16.
  4722. Note 383
  4723. Karen Human Rights Group, 032-2422; Heppner, XII/16.
  4724. Note 384
  4725. Guest, II/24; Liddell, V/8; Lin, VII/41-42.
  4726. Note 385
  4727. Human Rights Watch/Asia, 001-0059, 065-2971; Karen Human Rights Group, 001-1462; Ka Hsaw Wa, X/17.
  4728. Note 386
  4729. Min Lwin, III/16.
  4730. Note 387
  4731. Heppner, XII/18-19.
  4732. Note 388
  4733. Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, op. cit., note 350, pp. 6-7, 9.
  4734. Note 389
  4735. Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, ibid., p. 10.
  4736. Note 390
  4737. Human Rights Watch/Asia, Abuses Linked to the Fall of Manerplaw, ibid., pp. 8-9.
  4738. Note 391
  4739. Min Lwin, III/16.
  4740. Note 392
  4741. Karen Human Rights Group, 016-2147; Ka Hsaw Wa, X/16.
  4742. Note 393
  4743. Karen Human Rights Group, 001-1469, 032-2422; Heppner, XII/17.
  4744. Note 394
  4745. Voir, par exemple, Liddell, V/11-12; Heppner, XII/17-18; Amnesty International, 001-0505, 090-3653; Images Asia, 001-0216; Karen Human Rights Group, 001-0187, 001-0189, 001-0196 à 0197, 001-0905, 001-0921.
  4746. Note 395
  4747. Les régions mentionnées ici recouvrent les circonscriptions suivantes: Hsi Hseng (par le bataillon d'infanterie légère 424), Kengtung, Kunhing, Laikha (par le BIL 515), Langkho, Mongnai (par le BIL 520), Mong Hsat, Mong Yai (par le 31e régiment d'infanterie légère), Namsham (par le BIL 518) et Tachilek.
  4748. Note 396
  4749. Human Rights Watch/Asia, 001-0059 à 0060; Shan Human Rights Foundation, 001-0176, 001-0369, 001-0417, 144-4536 à 4537, 145-4581 à 4583; Amnesty International, 001-0505 à 0506, 091-3693, 099-3892, 168-8397 à 8398.
  4750. Note 397
  4751. S.H.A.N./Shan Human Rights Foundation, 001-0170.
  4752. Note 398
  4753. Karen Human Rights Group, 001-0305 à 0306, 001-0320, 001-0324, 001-1970 à 1972, 154-5095; Amnesty International, 090-3660, 099-3891 à 3892, 099-3896; Images Asia, M37-7039.
  4754. Note 399
  4755. Les zones mentionnées comprennent la ville de Loikaw (par le bataillon d'infanterie 54), la circonscription de Demawso y compris le camp de réinstallation de Demawso (par les bataillons 102 et 249), le site de réinstallation d'Iwathit, la circonscription de Shadaw (par le bataillon d'infanterie légère 336), la circonscription de Mawchi et celle de Pasaung.
  4756. Note 400
  4757. Karen Human Rights Group, 001-0186 à 87, 001-0189, 001-0191 à 0197, 001-0310, 001-0318 à 0319, 001-0325, 001-0327, 001-0364 à 0365, 001-0367, 001-0376, 001-0388, 001-0449, 001-0481, 001-0485, 001-0552, 001-0593, 001-0607 à 0608, 001-0620, 001-0762 à 0764, 001-0905, 001-0921, 001-1342, 001-1855, 001-1868 à 1869, 015-2127, 017-2153, 027-2278 à 2279, 027-2294, 031-2393 à 2394, 031-2396, 031-2399, 031-2403 à 2404, 031-2409 à 2410, 154-4935, 154-5188, 154-5196, 154-5220, 154-5228, 154-5232, H21-6350 à 6954, H23-6388, H23-6391, H23-6396, M50-7354 à 7355, M50-7358 à 7360; Human Rights Watch/Asia, 001-0057, 150-4692, H07-5800; Amnesty International, 001-0767 à 0770, 001-0774, 087-3580, 088-3589 à 3591, 090-3653, 092-3719 à 3720; Images Asia, 125-4031, 125-4034, 125-4036, 125-4038; HRDU, M34-6952.
  4758. Note 401
  4759. Les unités militaires expressément mentionnées sont les suivantes: BI 1, BIL 4, BI 5, BIL 8, 11 division, BIL 12, BIL 13, BI 19, BIL 22, 22 division, BI 23, bataillon 36, 44 division, BI 51, BI 75, LIB 76, 77 division, bataillon 77, BI 84, BIL 88, BI 97, 99 division, bataillon 104, BI 106, BIL 113, BIL 116, BIL 119, BIL 207, bataillon 230, BI 231, bataillon 248, bataillon 249, BI 258, bataillon 301, BI 310, BI 317, BIL 339, BIL 340, BIL 355, bataillon 356, bataillon 357, BIL 420, BIL 434, bataillon 531, BIL 545, BIL 549, et la DKBA.
  4760. Note 402
  4761. Karen Human Rights Group, 001-0189, 001-0319, 001-0376, 001-0449, 001-0619 à 20, 031-2401, 031-2403 à 05; Amnesty International, 088-3592; Images Asia, 125-4038; Human Rights Watch/Asia, 150-4692.
  4762. Note 403
  4763. Karen Human Rights Group, 154-5188.
  4764. Note 404
  4765. On dispose d'informations sur les événements qui se sont produits dans la circonscription de Letpadan et dans la ville de Ouk-twin.
  4766. Note 405
  4767. Karen Human Rights Group, 001-0179 à 0182, 001-0305 à 0308, 001-0338, 001-0340 à 0341, 001-0399, 001-0707 à 0708, 001-0924 à 0927, 073-3357 à 3359, M49-7311 à 7314; Images Asia, 001-0201 à 0226.
  4768. Note 406
  4769. Amnesty International, 087-3579.
  4770. Note 407
  4771. Human Rights Watch/Asia, 001-0054, 065-2973; Amnesty international, 001-0769; Images Asia, 001-0880. En 1994, un musulman a aussi été capturé par les soldats dans le train allant de Yangon à Mottama (Martaban) et forcé d'être porteur au cours de cette même offensive. Voir Human Rights Watch/Asia, 065-2972.
  4772. Note 408
  4773. Karen Human Rights Group, 001-0299, 001-0759 à 0760, 001-0763, 001-1068, 001-1341, 001-1609 à 1612, 154-5220; Amnesty International, 001-0792, 088-3589, 090-3653, 094-3786, 099-3890; Mon Information Service, 001-1279, 001-1284, 139-4445; Human Rights Watch/Asia, 065-2972.
  4774. Note 409
  4775. Ces informations mentionnent expressément les zones suivantes: la circonscription de Kyaikto (par le BIL 1 et le BIL 207), la ville de Mawlamyine (Moulmein) (par le bataillon 104 et le régiment 80), la ville de Mottama (Martaban), la circonscription de Mudon (par le BI 62 et le BIL 209), la ville de Thaton et la circonscription de Ye (par le BI 61 et le BIL 406).
  4776. Note 410
  4777. Voir paragr. 374 à 388 ci-dessous.
  4778. Note 411
  4779. Karen Human Rights Group, 001-0304, 001-0312; Amnesty International, 093-3751.
  4780. Note 412
  4781. HRDU, 001-0150; Karen Human Rights Group, 001-0176, 001-0412 à 0413, 001-1036, 001-1051, 001-1054 à 1057, 001-1072, 001-1368 à 1372, 029-2370; Amnesty International, 001-0500, 001-0791 à 0792; Images Asia, 001-1184; Mon Information Service, 001-1276 à 1277, 001-1386, 043-2651, 139-4443 à 4445, 139-4449 à 4450; Human Rights Watch/Asia, 150-4688 à 4689; affidavit de John Doe B, H20-6297.
  4782. Note 413
  4783. Les zones et les unités militaires suivantes sont expressément mentionnées: circonscription de Yebyu notamment pour la division 33, le BI 104, BIL 273, bataillon 403, BIL 404, BIL 405, BIL 406, BIL 407, BIL 408, BIL 409, BIL 410 et BIL 43; circonscription de Dawei (Tavoy), y compris pour le BIL 17, bataillon 25, division 33, division 66, BI 80 et bataillon 402; circonscription de Thayetchaung, y compris pour la division 33, le BIL 403, BIL 404, bataillon 405 et BIL 25; circonscription de Launglon, y compris pour la division 33; circonscription de Palaw, y compris pour le bataillon 280 et le bataillon 101; et circonscription de Bokpyin.
  4784. Note 414
  4785. HRDU, 001-0150, M34-6950, M34-6958 à 6959; Karen Human Rights Group, 001-0176, 001-0412 à 0413, 001-0434, 001-0448, 001-1032, 001-1036 à 1045, 001-1051, 001-1054 à 1057, 001-1072, 001-1129, 001-1368 à 1372, 029-2370, 154-5112, H24-6442, H24-6476, H24-6485; Amnesty International, 001-0500, 001-0791 à 0792; Images Asia, 001-1184; Mon Information Service, 001-1276 à 1277, 001-1386, 043-2651, 139-4442 à 4445, 139-4449 à 4450, M56-7421 à 7422; Human Rights Watch/Asia, 150-4688 à 4689, 150-4691, 154-5310; FTUB, 164-7766 à 7767; affidavit de John Doe B, H20-6297.
  4786. Note 415
  4787. Ces informations concernent les circonscriptions de Thantlang, Tiddim, Falam, Matupi et Paletwa.
  4788. Note 416
  4789. Karen Human Rights Group, 028-2341, 154-5134 à 36, 154-5152 à 56; Images Asia, 167-8308; Interview, M12-6812 à 13.
  4790. Note 417
  4791. Karen Human Rights Group, 154-5138. Ce travail a été fait pour le BIL 266.
  4792. Note 418
  4793. Amnesty International, 090-3653.
  4794. Note 419
  4795. Karen Human Rights Group, 001-0563 à 0564.
  4796. Note 420
  4797. Karen Human Rights Group, 001-0535, 001-0692; Amnesty International, 001-0770 à 0772.
  4798. Note 421
  4799. Amnesty International, 089-3624a, 089-3624b, 089-3608 à 3616; Karen Human Rights Group, 001-0557 à 0558; Human Rights Watch/Asia, 001-0711, 001-0716, 107-3940 à 3941, 118-3995, 154-4923 à 4924, H07-5800; UNHCR, 033-2435 à 2436; Zunetta Liddell, 114-3986 à 3987.
  4800. Note 422
  4801. Human Rights Watch/Asia, 001-0711; HCR, 033-2435. Voir aussi l'examen de cette pratique aux paragraphes 374-388 ci-dessous.
  4802. Note 423
  4803. Voir les déclarations des témoins 151, 168, 175 et 200. Le témoin 175 a affirmé que, durant certains mois, ni son mari ni elle n'ont pu bénéficier d'un seul instant pour s'occuper de leurs propres activités.
  4804. Note 424
  4805. Voir la déclaration des témoins 93 et 98.
  4806. Note 425
  4807. Voir la déclaration du témoin 8.
  4808. Note 426
  4809. Voir les déclarations des témoins 29, 31, 33, 39, 48, 59, 63 et 85.
  4810. Note 427
  4811. Voir la déclaration des témoins 18, 20, 48, 63, 66, 72, 121 et 171.
  4812. Note 428
  4813. Voir les déclarations des témoins 93, 98, 100, 101, 108, 109, 112, 113, 121, 132, 163, 174, 177, 187, 210 et 216.
  4814. Note 429
  4815. Le délai peut être très bref; certains témoins ont précisé que le chef de village devait trouver les porteurs dans la journée même: voir les déclarations des témoins 155 et 180.
  4816. Note 430
  4817. Voir les déclarations des témoins 113, 173 et 175.
  4818. Note 431
  4819. Voir la déclaration du témoin 166. Certains chefs de village ou de section auraient été torturés pour avoir mal exécuté des ordres transmis. Voir, à cet égard, les déclarations des témoins 220-228.
  4820. Note 432
  4821. Voir les déclarations des témoins 113, 120, 153, 154, 164 et 220-228.
  4822. Note 433
  4823. Voir les déclarations des témoins 93, 94, 98, 112, 125, 132, 135, 155, 169, 178, 179, 188, 201, 210 et 216. L'interpellation directe serait même pratiquée à Yangon: voir déclaration du témoin 170.
  4824. Note 434
  4825. Voir notamment les déclarations des témoins 49 et 59.
  4826. Note 435
  4827. Pour la partie orientale, voir les déclarations des témoins 5, 102, 106, 107, 108, 112, 113 et 166. Même les femmes enceintes ou d'âge avancé peuvent être réquisitionnées: voir les déclarations des témoins 174 et 176. Pour l'Etat Chin, les témoignages couvrent les régions avoisinant Thantlang et Paletwa et les collines Arakan (Arakan Yoma).
  4828. Note 436
  4829. Voir les déclarations des témoins 119, 125, 169, 176 et 200.
  4830. Note 437
  4831. Le témoin 119 a vu à deux reprises des personnes abattues puisqu'elles avaient refusé de faire le portage requis.
  4832. Note 438
  4833. Le témoin 109 a indiqué qu'un refus entraînait une amende de 3 000 kyats.
  4834. Note 439
  4835. Voir les déclarations des témoins 93, 98, 100, 102, 105, 106, 108, 109, 112, 113, 114, 119, 131, 132, 145, 160, 165, 169, 175, 176, 184, 187, 192, 193, 195, 204, 206, 210 et 245.
  4836. Note 440
  4837. Voir les déclarations des témoins 9, 10, 19, 44 et 52.
  4838. Note 441
  4839. Il est important de souligner qu'il n'y a pas de conflits majeurs depuis que le NMSP a signé un cessez-le-feu avec le gouvernement du Myanmar en juin 1995.
  4840. Note 442
  4841. Il n'est pas rare que les porteurs doivent accompagner les militaires lors des offensives armées: voir la déclaration du témoin 32 qui a accompagné des soldats lors d'une opération militaire en 1991 et la déclaration du témoin 43 qui a été porteur à la frontière près de la Thaïlande dans une opération contre la KNU. Enfin, le témoin 33 aurait accompagné les militaires dans une opération contre la RSO en avril 1997.
  4842. Note 443
  4843. Voir la déclaration du témoin 6 et la déclaration du témoin 208 pour ce qui est d'un village dans lequel trois porteurs doivent demeurer en permanence disponibles, depuis mars 1997, pour les besoins de l'armée.
  4844. Note 444
  4845. Voir la déclaration du témoin 201.
  4846. Note 445
  4847. Voir la déclaration du témoin 93.
  4848. Note 446
  4849. Voir la déclaration du témoin 5 pour les opérations militaires massives dans l'Etat Shan.
  4850. Note 447
  4851. Voir la déclaration du témoin 118.
  4852. Note 448
  4853. Voir les déclarations des témoins 5, 93, 116, 124 et 151. Les villageois peuvent être aussi requis pour détecter les mines aux environs des villages ou des camps militaires: voir déclaration 183.
  4854. Note 449
  4855. Voir les déclarations des témoins 93, 105, 132, 204 et 210. Le témoin 155 a expliqué que le village entier, incluant les enfants, est parfois utilisé comme bouclier
  4856. Note 450
  4857. Notamment dans les Etats Shan et Karen. Voir notamment la déclaration du témoin 125.
  4858. Note 451
  4859. Les témoignages concernent des affrontements avec les forces Mon, Shan et Karen. Voir notamment les déclarations des témoins 108, 112, 184 et 248.
  4860. Note 452
  4861. Voir les déclarations des témoins 98, 105, 106, 112, 114, 117, 119, 121, 131 et 135. Consulter la déclaration du témoin 132 dont une assignation s'est prolongée durant 94 jours et a été immédiatement suivie d'une autre de deux mois.
  4862. Note 453
  4863. Voir les déclarations des témoins 19, 20, 26, 31, 44 et 48.
  4864. Note 454
  4865. Voir les déclarations des témoins 93, 113 et 168.
  4866. Note 455
  4867. Voir la déclaration du témoin 168.
  4868. Note 456
  4869. Voir les déclarations des témoins 26, 44, 48, 63, 80, 98, 100, 102, 105, 107, 113, 117, 119, 121, 132, 160, 162, 168 et 184. Le témoin 31 aurait reçu 15 kyats par portage.
  4870. Note 457
  4871. Voir les déclarations des témoins 6, 7, 46, 48, 102, 106, 107, 108, 117, 118, 119, 121, 132, 153, 154, 160, 165 et 171.
  4872. Note 458
  4873. Voir la déclaration du témoin 193.
  4874. Note 459
  4875. Voir les déclarations des témoins 98, 117 et 168. Le témoin 241 a affirmé que son frère serait décédé à la suite des complications d'une maladie infectieuse lors d'un portage.
  4876. Note 460
  4877. Lorsque, interrogés à cet égard, tous les témoins ont dit avoir été en contact d'une manière ou d'une autre avec des exactions commises par les militaires sans raison apparente: voir déclarations des témoins 6, 7, 19, 21, 26, 48, 63, 66, 80, 93, 98, 100, 102, 105, 106, 107, 112, 113, 114, 117, 118, 121, 124, 125, 126, 131, 132, 135, 137, 138, 146, 151, 155, 160, 168, 171, 172, 173, 176, 181, 194, 200, 204, 205, 206, 207, 210 et 248. Un déserteur a affirmé avoir personnellement battu des porteurs sur ordre de son supérieur. Enfin, le témoin 44 s'est référé à une pratique utilisant un fer rouge.
  4878. Note 461
  4879. Voir la déclaration du témoin 236 qui aurait vu une soixantaine de porteurs tués par les militaires parce qu'ils étaient exténués, trop faibles pour continuer ou souhaitaient simplement prendre un moment de repos. Voir également les déclarations des témoins 169, 200, 222 et 225. La situation des prisonniers qui doivent faire du portage est extrêmement déplorable à cet égard: voir les déclarations des témoins 96 et 242.
  4880. Note 462
  4881. Voir les déclarations des témoins 108, 109, 118, 145, 168, 185 et 236.
  4882. Note 463
  4883. Ces montants relatés varient de 300 à 10 000 kyats Voir les déclarations des témoins 96, 112 (3 000 kyats), 119 (5 000 kyats), 121 (400 à 500 kyats), 125 (5 000 kyats), 138 (3 000 kyats), 154 (2 000 kyats), 158 (450 kyats), 169 (200 kyats), 171 (500 kyats), 180 (1 300 kyats pour une semaine), 184 (500 kyats), 187 (200 à 300 kyats), 209 (2 000 kyats pour trois jours de portage), 229 (5 000 à 10 000 kyats) et 236.
  4884. Note 464
  4885. Le témoin 236 avait en effet fait l'objet de passages à tabac au cours d'un portage en 1985 à Three Pagodas Pass (Etat Kayin) et ne souhaitait pas revivre cette expérience traumatisante.
  4886. Note 465
  4887. Voir les déclarations des témoins 100, 113, 159, 200 et 210.
  4888. Note 466
  4889. Karen Human Rights Group, 032-2423; Lin, VII/42-43.
  4890. Note 467
  4891. Karen Human Rights Group, 001-0027, 032-2423; Human Rights Watch/Asia, 065-2978; Min Lwin, VI/14; Ka Hsaw Wa, X/9.
  4892. Note 468
  4893. Karen Human Rights Group, 001-1462, 016-2147, 032-2423.
  4894. Note 469
  4895. Les camps militaires suivants ont été mentionnés: un camp pour le BIL 360 dans la circonscription de Mong Ping en 1992; pour le bataillon 64 dans la circonscription de Mongkaing en 1994; pour le bataillon 518 dans la circonscription de Kunhing en 1996 et diverses autres nouvelles bases dans cette même circonscription en 1997; un camp militaire dans la circonscription de Namhsan en 1997; et un camp militaire dans la ville de Laikha en 1997 et 1998.
  4896. Note 470
  4897. Par exemple, creuser des tranchées et abris pour un camp militaire dans le site de réinstallation de Wan Lao dans la circonscription de Kunhing.
  4898. Note 471
  4899. Shan Human Rights Foundation, 001-0334, 001-0383, 143-4533, 145-4579, 147-4621, M34-6964; Karen Human Rights Group, 001-0665; Amnesty International, 168-8399 à 8400.
  4900. Note 472
  4901. Amnesty International, 099-3895 à 3896; Karen Human Rights Group, 154-5083, 154-5089 à 5092, 154-5095.
  4902. Note 473
  4903. Les camps suivants ont été spécifiquement mentionnés: un camp militaire à Shadaw, un camp pour le bataillon 429 à Teepoklo dans la circonscription de Demawso, un camp militaire à Daw Tama Gyi dans la circonscription de Demawso, un camp militaire dans le site de réinstallation de Mawchi dans la circonscription de Mawchi, un camp militaire au site de réinstallation de Mar Kraw She dans la circonscription de Pruso, et un camp militaire au site de réinstallation de Ywathit.
  4904. Note 474
  4905. Karen Human Rights Group, 001-0586, 001-0592; Human Rights Watch/Asia, 065-2978.
  4906. Note 475
  4907. Karen Human Rights Group, 001-0181, 001-0189à 0197, 001-0302, 001-0307, 001-0310, 001-0318 à 0319, 001-0364, 001-0480, 001-0488, 001-0586, 001-0593, 001-0603, 001-0632, 001-0637, 001-0763 à 0764, 001-0904, 001-1922 à 26, 001-1988 à 1990, 031-2393, 031-2395 à 2396, 154-5190, 154-5226, 154-5254 à 5260, 154-5268, H23-6394, M50-7360; Human Rights Watch/Asia, 065-2978; Amnesty International, 093-3748, 099-3896; Images Asia, 001-0209, 001-0220, 125-4024, 125-4036, 125-4038; Min Lwin, H06-5777 à 5782, H06-5785 à 90.
  4908. Note 476
  4909. Les installations militaires suivantes ont été spécifiquement mentionnées: dans l'Etat Kayin: un camp pour la division 99 dans la circonscription de Hpa-an en 1993; un camp pour le BIL 9 près de la frontière thaïlandaise en 1994; un camp pour le BIL 12 dans le district de Hpa-an en 1997; un camp à Kadaingti dans le district de Papun en 1995 et 1996; un camp pour le BIL 547 dans le village de Nabu de la circonscription de Kawkareik en 1995 et de nouveau en 1997; un camp pour le bataillon 104 a Maw Kee dans le district de Dooplaya en 1995; le camp militaire de Paw Yin Pyu dans la circonscription de Hlaingbwe en 1995; un camp près de Painkyone utilisé par le bataillon 339, le bataillon 338 et la division 99; un camp pour le BIL 310 dans la circonscription de Kawkareik en 1996; le camp Ta Mine Gone du BI 231 dans la circonscription de Kawkareik en 1996; un camp pour le BI 62 dans la circonscription de Kawkareik en 1996; un camp pour le BIL 549 dans la circonscription de Kawkareik en 1997; des camps pour le bataillon 36 dans la région de Painkyone de la circonscription Hlaingbwe de 1993 à 1997; un camp pour le BIL 340 près de Dee Taw Kee dans le district de Papun en 1995 et 1996; un camp à Tee Per près de Painkyone dans la circonscription de Hlaingbwe en 1996; un camp pour une compagnie du bataillon 310 au village de Kya-in dans la circonscription de Kawkareik en 1995; des bunkers pour la Tatmadaw et pour des unités de la DKBA dans le village de Kyat Kwa dans la circonscription de Kawkareik; un camp pour le commandement opérationnel tactique 202 dans la région de Kyeikdon de la circonscription de Kya In Seik Gyi en 1997; des bunkers pour les troupes dans le village de Paglawni près de Kyeikdon dans la circonscription de Kya In Seik Gyi; des postes avancés à Azin (Saw Hta) et Mae Tha Raw Hta dans le district de Dooplaya en 1996 et 1997; un camp militaire près du village de Kyunchaung dans le Sud du district de Dooplaya en 1997; un camp militaire au village de Kyone Yaw dans le Sud du district de Dooplaya en 1997; un camp de la DKBA à Myaing Gyi Ngu (Khaw Taw) en 1995 et 1996; un camp de la DKBA dans la région de Painkyone de la circonscription de Hlaingbwe en 1997; et plusieurs autres camps militaires situés entre Papun et Kyauknyat pendant une période allant de 1992 à 1995. Dans la division de Bago: dans la circonscription de Busakee, pour le BI 57 dans la circonscription de Shwegyin, pour le BI 26 dans la circonscription de Tantabin et pour le BI 60 dans la circonscription de Kyaukkyi. Les villageois ont aussi été contraints d'effectuer des travaux de construction et autres travaux pour un camp militaire à Ye Tho Gyi dans le district de Toungoo pour le BI 48 et pour le BIL 354, et de creuser un fossé de 8 miles dans le complexe militaire de Yan Myo Aung dans la circonscription de Kyaukkyi en 1994.
  4910. Note 477
  4911. Les villageois du district de Papun ont été également forcés, en 1996, de construire des logements pour les familles de soldats décédés. Voir Karen Human Rights Group 001-0480.
  4912. Note 478
  4913. Les camps suivants ont été spécifiquement mentionnés: un camp pour le bataillon 108 dans la circonscription de Ye en 1994, un camp pour le BI 93 dans la circonscription de Bilin en 1995, un camp près du village de Yah Pu dans la circonscription de Ye en 1996, et un camp pour le BI 31 dans la circonscription de Thanbyusayat en 1997.
  4914. Note 479
  4915. Karen Human Rights Group, 001-0176, 001-0394, 001-1341.
  4916. Note 480
  4917. Les installations militaires suivantes ont été spécifiquement mentionnées: des baraquements militaires et des magasins sur l'île de Heinzebok depuis 1994; pour le BIL 267 dans la circonscription de Yebyu en 1994 et en 1995; pour les BIL 406, 407 et 408 dans la circonscription de Yebyu; la construction d'un terrain d'entraînement militaire et d'autres constructions pour les BIL 403, 404 et 405 dans la circonscription de Thayetchaung en 1995; pour le bataillon 103 dans la circonscription de Palaw en 1995; pour le bataillon 101 et le bataillon 280 dans la circonscription de Palaw en 1997; pour le bataillon 280 dans la circonscription de Palaw en 1997; la construction de logements pour les soldats du bataillon 404 et de bâtiments militaires près de Ohnbinkwin et Kadaik dans la circonscription de Yebyu en 1995; pour les bataillons 408, 409 et 410 dans la circonscription de Yebyu; pour les BIL 273 et 405 dans la circonscription de Yebyu; les camps de travail sur la section Eindayaza à Natkyizin du chemin de fer de Ye-Dawei (Tavoy) dans la circonscription de Yebyu en 1996; deux bâtiments pour le BIL 407 dans la circonscription de Yebyu en 1997; pour les BIL 17 et 25 dans la circonscription de Dawei (Tavoy) en 1996; et pour trois camps militaires proches du village de Yebone dans la circonscription de Yebyu depuis 1988.
  4918. Note 481
  4919. Y compris les circonscriptions de Yebyu, Dawei(Tavoy), Thayetchaung et Palaw.
  4920. Note 482
  4921. HRDU, 001-0149; Amnesty International, 001-0793; Karen Human Rights Group, 001-1034, 001-1055, 001-1117 à 1118, 001-1128, 001-1348, 001-1368 à 1369, 001-1373, 018-2167, 018-2169, H24-6423, H24-6469, H24-6478, H24-6480, H24-6484; Mon Information Service, 001-1280, 001-1386, 001-1388, 042-2621, 043-2651, M56-7428; Human Rights Watch/Asia, 065-2969, 150-4690; FTUB, 164-7766 à 7767; H20-6294, H20-6296.
  4922. Note 483
  4923. Le BI 263 et le BI 264 ont été spécifiquement mentionnés.
  4924. Note 484
  4925. Karen Human Rights Group, 001-0445, 001-0557 à 0559, 001-0565 à 0566; Human Rights Watch/Asia, 001-0711, 118-3995; Amnesty International, 064-2962.
  4926. Note 485
  4927. Voir paragr. 397 ci-dessous.
  4928. Note 486
  4929. Amnesty International, 089-3605; Human Rights Watch/Asia, 154-4926; Human Rights Watch/Refugees International, 154-5404.
  4930. Note 487
  4931. Les villageois de la circonscription de Matupi ont reçu l'ordre de construire un poste de police à Lailenpi; les villageois de la circonscription de Thantlang on reçu l'ordre de construire six postes de garde pour le BIL 266 à Thantlang.
  4932. Note 488
  4933. Karen Humen Rights Group, 028-2343, 154-5138 à 40; Images Asia, 167-83-08.
  4934. Note 489
  4935. Cette terre a été prise à des villageois de la circonscription de Momauk par le BIL 384. Voir Mirante, I/51.
  4936. Note 490
  4937. Cette route en construction allait de Talakwa, près de Pathein, à la plage de Nga Saw (30 km au Nord de Chaungtha); certaines informations indiquent que du travail forcé a également été utilisé pour la construction de cette route (voir paragr. 422 ci-dessous). Voir Karen Human Rights Group, 001-0652, 001-0692.
  4938. Note 491
  4939. Bataillon d'artillerie 20.
  4940. Note 492
  4941. Karen Human Rights Group, 001-0563, 154-5148; Images Asia, 167-8337.
  4942. Note 493
  4943. Les témoins interrogés par la commission proviennent de différents groupes ethniques: Birman (3); Chin (4); Karen (36); Karenni (17); Mon (8); Musulman autres que Rohingya (6); Rakhine (8); Rohingya (44); Shan (17); Tavoyan (1). Les témoignages couvrent notamment, dans l'Etat Chin, les régions aux environs de Thantlang et Paletwa; dans l'Etat Mon, les régions de Bilin et Thanbyuzayat; dans l'Etat Kayah, les environs de Demawso, Loikaw, Mawchi, Shadaw, Ymathit; dans l'Etat Kayin, les régions de Hlaingbwe, Kawkareik, Kya In Seik Gyi, Nabu, Pa'an, Papun, Paynekyone, Yebu; dans l'Etat Shan, les environs de Laikha, Langkho, Lashio, Mongpan, Mong Yai, Namhsam, Namtu, Panglong, Taungyyi, Wan Hat; et dans la division Tanintharyi, les environs de l'agglomération de Yebyu.
  4944. Note 494
  4945. La référence aux camps militaires n'est dès lors pas limitée à ceux de la Tatmadaw mais englobe tout le travail exécuté pour les camps de ces différentes forces de l'ordre, sans distinction aucune.
  4946. Note 495
  4947. Voir les déclarations des témoins 29, 30, 31, 38, 46, 47, 48, 58, 62, 71, 81, 89, 98, 113, 138, 139, 155, 166, 162, 163, 173, 175, 176, 181, 182, 183, 184, 185, 186, 202, 208 et 220.
  4948. Note 496
  4949. Voir les déclarations des témoins 113 et 155.
  4950. Note 497
  4951. Voir les déclarations des témoins 89, 160, 175 et 185. Le témoin 32 a indiqué que, pour sa part, les militaires l'interpellaient toujours directement puisque son domicile était adjacent au camp de ces derniers.
  4952. Note 498
  4953. Voir les déclarations des témoins 29, 58, 61, 91, 89, 98, 141, 157, 163, 168, 174, 175, 181 et 202. Le témoin 155 a affirmé que les militaires peuvent requérir plus d'une personne par famille selon leurs besoins.
  4954. Note 499
  4955. Voir les déclarations des témoins 13, 58, 89, 107, 100, 113, 144, 155, 165, 181, 185, 196, 204, 220-225 et 227.
  4956. Note 500
  4957. Voir les déclarations des témoins 144, 182, 183 et 185.
  4958. Note 501
  4959. Voir les déclarations des témoins 78, 155 et 165.
  4960. Note 502
  4961. Plusieurs témoins ont donné des précisions à cet égard: voir les déclarations des témoins 7, 9, 50, 51, 61, 71, 76-78, 82, 91, 132, 151, 160, 168, 170, 171, 174, 185, 190-193, 196, 198-202 et 205.
  4962. Note 503
  4963. Voir les déclarations des témoins 142, 143 et 180.
  4964. Note 504
  4965. Voir les déclarations des témoins 138, 139, 171 et 181.
  4966. Note 505
  4967. Voir les déclarations des témoins 168, 175, 180 et 195.
  4968. Note 506
  4969. Voir les déclarations des témoins 7, 62, 98, 100, 113, 116, 141, 142, 144, 166, 168, 174-176, 180, 181, 190, 195 et 196.
  4970. Note 507
  4971. Voir les déclarations des témoins 137, 204 et 208.
  4972. Note 508
  4973. Voir les déclarations des témoins 66, 92, 100, 107, 108, 114, 117, 118, 137, 144, 155, 157, 166, 168, 171, 175, 187, 190, 194 et 180.
  4974. Note 509
  4975. Voir les déclarations des témoins 7, 44, 56, 66, 99, 126, 142, 143, 155 et 181-183.
  4976. Note 510
  4977. Voir les déclarations des témoins 20, 51, 56, 92, 125, 126 et 145-148.
  4978. Note 511
  4979. Voir les déclarations des témoins 81, 124, 155, 165 et 185.
  4980. Note 512
  4981. Voir les déclarations des témoins 180 et 176. Ce dernier a précisé que, dans ce contexte, il devait tenir informé les militaires du mouvement d'autres troupes.
  4982. Note 513
  4983. Voir les déclarations des témoins 144 et 175.
  4984. Note 514
  4985. Voir les déclarations des témoins 48, 58, 81, 91, 116, 117, 119, 138, 139, 168, 173, 175 et 181. Le témoin 32 est la seule personne rencontrée qui a affirmé avoir reçu de temps à autre un peu de riz et de dal (purée de lentilles).
  4986. Note 515
  4987. Voir la déclaration du témoin 162.
  4988. Note 516
  4989. Voir les déclarations des témoins 16, 48, 58, 81, 100, 102, 108, 116, 117, 162, 173, 175, 181 et 190. Le témoin 38 a affirmé avoir reçu 10 kyats à quelques reprises.
  4990. Note 517
  4991. Voir les déclarations des témoins 113, 160, 162, 171, 173, 174, 190, 198 et 201.
  4992. Note 518
  4993. Plusieurs témoins ont déclaré avoir été passés à tabac: 13, 29, 32, 37, 48, 73, 85, 107, 108, 126, 127, 157, 165, 175, 181 et 201.
  4994. Note 519
  4995. Voir les déclarations des témoins 113, 126, 145-148, 181, 208, 220-225 et 227.
  4996. Note 520
  4997. Voir les déclarations des témoins 32, 56, 185, 200 et 201.
  4998. Note 521
  4999. Les montants varient substantiellement: voir les déclarations des témoins 30 (1 000 kyats); 91 (25 kyats); 168 (100 kyats par jour et un poulet); 181; 185 (1 000 kyats par mois); 196 (200 kyats et un poulet); 212 (500 kyats); et 220 (2 500 kyats par projet).
  5000. Note 522
  5001. Le coût des services des substituts fluctue également: voir les déclarations des témoins 38 (200 kyats); 60 (200 kyats, à deux ou trois reprises par mois); 81; 89 (50 kyats); 145 (300 kyats); 173 (100 kyats); et 174.
  5002. Note 523
  5003. Voir déclaration du témoin 201.
  5004. Note 524
  5005. Karen Human Rights Group, 001-1462.
  5006. Note 525
  5007. Amnesty International, 088-3588; Karen Human Rights Group, 001-1462.
  5008. Note 526
  5009. Karen Human Rights Group, 001-0027, 032-2423; Mon Information Service, M56-7419; Lin, VII/39.
  5010. Note 527
  5011. Voir, par exemple, Karen Human Rights Group, 001-0549 à 0550, 001-0618.
  5012. Note 528
  5013. Karen Human Rights Group, 032-2423; Heppner, XII/58-59.
  5014. Note 529
  5015. Voir paragr. 230-333 ci-dessus.
  5016. Note 530
  5017. Les zones mentionnées sont le district de Papun et le district de Dooplaya. Voir Karen Human Rights Group, 001-0189, 001-0319, 001-0449, 154-5196, Images Asia, 125-4038.
  5018. Note 531
  5019. Les zones mentionnées sont situées dans le district de Toungoo. Voir Images Asia, 001-0216; Karen Human Rights Group, 001-0399.
  5020. Note 532
  5021. Les incidents dont il fait mention sont survenus dans le district de Thaton. Karen Human Rights Group, 001-0312.
  5022. Note 533
  5023. Karen Human Rights Group, 001-0304, 001-0312, 001-0318, 001-0449, 031-2409; Amnesty International, 093-3751; Images Asia, 125-4038.
  5024. Note 534
  5025. S.H.A.N/Shan Human Rights Foundation, 001-01170.
  5026. Note 535
  5027. Il est fait mention de l'utilisation de la population du camp de réinstallation de Mawchi. Voir Karen Human Rights Group, 154-5095.
  5028. Note 536
  5029. Les zones mentionnées sont les districts de Papun et de Dooplaya ainsi que les circonscriptions de Hpa-an, Kawkareik et Hlaingbwe. Voir Karen Human Rights Group, 001-0189, 001-0376, 001-0586, 001-0619, 031-2401, 031-2403; Images Asia, 125-4038.
  5030. Note 537
  5031. Karen Human Rights Group, 031-2405, à propos des événements survenus dans la circonscription de Bilin.
  5032. Note 538
  5033. La zone spécifique mentionnée est située dans la circonscription de Yebyu. Voir Karen Human Rights Group, 018-2167.
  5034. Note 539
  5035. Des villageois de la circonscription de Kalaymyo ont été forcés de monter la garde sur la section nouvellement construite de la voie ferrée allant de Gangaw à Kalaymyo, en particulier durant les visites de fonctionnaires importants. Voir Karen Human Rights Group, 001-0563.
  5036. Note 540
  5037. La zone mentionnée est celle de la circonscription de Thantlang. Karen Human Rights Group, 154-5138.
  5038. Note 541
  5039. Circonscription de Hpa-an. Karen Human Rights Group, 001-0376.
  5040. Note 542
  5041. District de Toungoo. Karen Human Rights Group, 001-0182, 001-0453, 073-3357.
  5042. Note 543
  5043. Circonscription de Tamu. Karen Human Rights Group, 001-0376.
  5044. Note 544
  5045. Les témoins rencontrés proviennent des groupes suivants: Birman (3); Chin (1); Kayah (1); Kayin (18); Mon (3); Musulman autre que Rohingya (1); Rakhine (1); Rohingya (9); et Shan (2).
  5046. Note 545
  5047. Voir les déclarations des témoins 5, 19, 159, 161, 166, 169, 174, 177 et 236.
  5048. Note 546
  5049. Voir les déclarations des témoins 136, 220-225, 227 et 229.
  5050. Note 547
  5051. Voir les déclarations des témoins 182-185 et 198.
  5052. Note 548
  5053. Voir la déclaration du témoin 200.
  5054. Note 549
  5055. Voir les déclarations des témoins 19, 46 et 80.
  5056. Note 550
  5057. Voir les déclarations des témoins 163, 166, 169 et 173.
  5058. Note 551
  5059. Voir les déclarations des témoins 161, 163, 168 et 185.
  5060. Note 552
  5061. Voir les déclarations des témoins 160, 169 et 174.
  5062. Note 553
  5063. Les groupes peuvent varier de deux à cinq personnes: voir les déclarations des témoins 159, 161, 172 et 177.
  5064. Note 554
  5065. Voir les déclarations des témoins 160, 161, 166, 169, 171 et 174-176.
  5066. Note 555
  5067. Voir la déclaration du témoin 25 qui a été battu puisqu'il s'était endormi au cours d'une garde le long d'une route.
  5068. Note 556
  5069. Le témoin 168 a déclaré que 940 foyers, regroupant 9 villages, avaient dû verser 500 kyats chacun pour des dommages causés à des véhicules militaires.
  5070. Note 557
  5071. Voir les déclarations des témoins 153, 160, 161, 163, 168, 169, 174 et 177.
  5072. Note 558
  5073. Voir notamment la déclaration du témoin 216.
  5074. Note 559
  5075. Voir les déclarations des témoins 153 (un travailleur et deux soldats blessés); 168 (un travailleur a perdu une jambe); et 174 (tante décédée).
  5076. Note 560
  5077. Voir les déclarations des témoins 161, 171 et 175.
  5078. Note 561
  5079. Voir les déclarations des témoins 161 et 175.
  5080. Note 562
  5081. Voir notamment la déclaration du témoin 236.
  5082. Note 563
  5083. Le témoin 169 aurait payé aux militaires un montant de 70 kyats par jour de manière à être exempté des gardes requises.
  5084. Note 564
  5085. Les frais de substitution varient: voir les déclarations des témoins 169 (30-50 kyats par jour); 172 (30 kyats par jour) et 185 (100 kyats).
  5086. Note 565
  5087. Voir les déclarations des témoins 15, 99 et 185. Le témoin 237 a indiqué que les militaires monopolisaient son bateau plusieurs fois par mois sans l'indemniser. Privés de ses revenus tirés de passagers payants, il n'était tout simplement plus en mesure de payer les frais de location et d'entretien exigés du propriétaire.
  5088. Note 566
  5089. Il semble toutefois que la législation du Myanmar contient des dispositions sur le service militaire obligatoire (voir paragr. 255 à 257 ci-dessus).
  5090. Note 567
  5091. Karen Human Rights Group, 001-1463 à 1464; M56-7418 à 7419; Liddell, V/14-16; Lin, VII/23, 34-36.
  5092. Note 568
  5093. Karen Human Rights Group, 001-1463, Human Rights Watch/Asia, H07-5807 à 5808; Images Asia, 127-4174 à 4176; Liddell, V/14-16.
  5094. Note 569
  5095. Karen Human Rights Group, 001-0190, 001-0603, 001-1463; Human Rights Watch/Asia, H07-5808.
  5096. Note 570
  5097. Mon Information Service, M56-7418.
  5098. Note 571
  5099. FTUB, 164-8080.
  5100. Note 572
  5101. Karen Human Rights Group, 001-0310; Images Asia, 127-4174 à 4176, M36-7019; Human Rights Watch/Asia, H07-5807; Liddell, V/15-16; Lin, VII/35.
  5102. Note 573
  5103. Voir ordres 9 et 10 à l'annexe XI.
  5104. Note 574
  5105. Voir ordre 10 à l'annexe XI.
  5106. Note 575
  5107. Mon Information Service, M56-7418 à 7419.
  5108. Note 576
  5109. Karen Human Rights Group, 001-0908, 031-2416 à 2417.
  5110. Note 577
  5111. Voir les déclarations des témoins 5, 75, 93 à 95, 170, 215 et 216.
  5112. Note 578
  5113. Voir la déclaration du témoin 93.
  5114. Note 579
  5115. Voir la déclaration du témoin 93.
  5116. Note 580
  5117. Karen Human Rights Group, 001-0028, 032-2424, M42-7170.
  5118. Note 581
  5119. Karen Human Rights Group, 032-2424, M42-7170.
  5120. Note 582
  5121. BIL 401 et bataillons 25, 265, 280.
  5122. Note 583
  5123. Mon Information Service, M56-7426.
  5124. Note 584
  5125. Ces informations font mention de la confiscation de terres dans la circonscription de Waimaw en 1994 par le BI 29. Les villageois ont ensuite été forcés de cultiver sur cette terre de la canne à sucre et du riz pour le bataillon. Des informations plus récentes indiquent que le BIL 321 a forcé des villageois de plusieurs villages proches de Myitkyina à travailler pendant toute la saison dans leurs rizières, que des villageois ont été également contraints de travailler pour le BIL 384 dans des rizières qu'on leur avait confisquées dans la circonscription de Momauk, et d'effectuer des travaux similaires pour les BIL 385 et 386 dans la circonscription de Mohnyin. Voir HRDU, 001-0167; Mirante, I/51-52.
  5126. Note 585
  5127. En 1994, les bataillons 336, 421 et 422 auraient chacun confisqué 1 000 acres de terres appartenant à des villages de la partie nord de l'Etat et auraient ensuite forcé les villageois à continuer à cultiver ces terres. En 1996, des villageois qui avaient été réinstallés à Shadaw auraient été forcés de défricher la terre pour l'armée afin d'y cultiver des haricots. Voir Karen Human Rights Group, 001-0436, 154-5083.
  5128. Note 586
  5129. On aurait eu recours au travail forcé dans les projets suivants: dans la circonscription de Kawkareik, culture de terres préalablement confisquées aux villageois, pour les bataillons 330, 355 et 356; culture de riz pour l'armée et la DKBA sur des terres confisquées aux villageois à Nabu dans la circonscription de Kawkareik; culture d'hévéas pour les bataillons 547 et 549 dans la circonscription de Kawkareik en 1997. Karen Human Rights Group, 001-0444, 001-0586, 001-0592 à 0593; Amnesty International, 099-3896; Min Lwin, H06-5767 à 5776, H06-5783 à 5784, H06-5791 à 5794.
  5130. Note 587
  5131. Il semble qu'en 1995 des villageois de la circonscription du nord de Ye ont été forcés de cultiver des légumes pour le BIL 106 sur des terres qui avaient été confisquées par ce bataillon. Voir Karen Human Rights Group, 001-0175.
  5132. Note 588
  5133. Des villageois auraient été forcés de travailler au défrichage de terres pour la NaSaKa dans la circonscription de Maungdaw et de cultiver du riz pour plusieurs bataillons de la circonscription de Sittway (Akyab) en 1994 et 1995. Karen Human Rights Group, 001-0445; Human Rights Watch/Refugees International, 154-5404.
  5134. Note 589
  5135. Il apparaît que le BIL 510 a forcé des villageois du site de réinstallation de Kho Lam près de Namhsam à abattre la forêt pour y cultiver des haricots pour ce bataillon. Des habitants de la circonscription d'Hsipaw ont été contraints de cultiver du maïs pour les militaires. Voir Karen Human Rights Group, 001-0698; Shan Human Rights Foundation, 147-4621.
  5136. Note 590
  5137. En 1995, le BI 60 et le BIL 351 auraient confisqué de grandes quantités de terres dans la circonscription de Kyaukkyi et auraient ensuite forcé près de 500 villageois à travailler chaque jour pour y cultiver du riz de saison sèche pour l'armée. Une fois cette première culture terminée, ces villageois auraient été contraints de monter la garde autour de ces champs pour en chasser les animaux errants. Voir Burma Issues, 001-0539 à 0541.
  5138. Note 591
  5139. Les bataillons 87 et 89, le BI 228, les bataillons 362, 363 et 365, le service de renseignement militaire 17 et le bataillon d'entraînement 10 ont tous utilisé du travail forcé pour leurs projets d'agriculture dans la circonscription de Kalaymyo. Voir Images Asia, 164-8337 à 8338.
  5140. Note 592
  5141. Les projets suivants ont été mentionnés: pendant de nombreuses années, des bataillons stationnés dans les circonscriptions de Dawei (Tavoy) et Thayetchaung, y compris les BIL 403, 404 et 405, ont exigé du travail forcé sur leurs plantations (en particulier ces trois bataillons ont forcé les villageois en 1997 à construire des digues pour constituer de la terre arable qu'ils ont ensuite accaparée; le BIL 404 a utilisé du travail forcé en 1997 pour défricher des terres pour y effectuer des plantations d'hévéas); les BIL 406 et 408 ont imposé du travail forcé pour la culture de terres dans la circonscription de Yebyu; et des unités militaires dans la circonscription de Launglon pour la culture de riz en 1997. Il y a également des informations selon lesquelles en 1997 plus de 1 000 acres de rizières ont été confisqués sur l'île de Pyingyi dans la circonscription de Launglon pour y établir un projet expérimental de culture du riz réalisé par le BI 104 et par les autorités gouvernementales; plus de 500 habitants de la région ont été forcés à travailler sur ce projet. Voir Mon Information Service, 139-4447 à 4450, M56-7425 à 7429, M57-7432.
  5142. Note 593
  5143. Human Rights Watch/Asia, 154-4926.
  5144. Note 594
  5145. Ces informations font état de coupe d'arbres et de travail dans une scierie pour le BIL 545 à Kyondo dans le district de Hpa-an en 1995 et de débitage de troncs en bois de coupe pour le bataillon 330 dans la circonscription de Kawkaraik en 1995. Voir Karen Human Rights Group, 001-0175.
  5146. Note 595
  5147. En 1995, des villageois de la circonscription de Thaton auraient été forcés par les militaires de couper de grandes quantités de bambou, et d'aller ensuite vendre ce bambou dans la ville de Bilin, le fruit de cette vente étant conservé par les soldats. Karen Human Rights Group, 001-0175.
  5148. Note 596
  5149. En 1992, des villageois de la circonscription de Mongping auraient été forcés d'abattre des arbres de teck dans le cadre du travail effectué pour la construction d'un camp à l'intention du BIL 360 (voir paragr. 356 ci-dessus); ces arbres ont été vendus dans la ville de Kengtung, et que les commandants du BIL 360 et du BIL 43 se seraient partagés les fruits de cette vente. Voir Shan Human Rights Foundation, 001-0334.
  5150. Note 597
  5151. En mars 1997, le BI 228 aurait forcé des villageois de transporter du bois de teck que les soldats ont ensuite vendu à leur profit. On rapporte également qu'en 1995 des officiers du BI 50 auraient forcé des villageois propriétaires de chars à boeufs de transporter en fraude des grumes de teck venant de l'Inde; le groupe a été arrêté par les forces indiennes qui ont détenu les villageois mais ont relâché les soldats. Karen Human Rights Group, 001-0578, HRDU, 001-0163 à 0164; Images Asia, 167-8338; Lin, VII/13-15.
  5152. Note 598
  5153. Il y a des informations selon lesquelles les BIL 404 et 406 auraient forcé des gens dans la circonscription de Yebyu, en 1994 et 1995, à abattre des arbres de bois dur et transporter les billots, et le bois qui n'était pas utilisé pour la construction était vendu par le bataillon; un travail similaire a dû être effectué pour les BIL 403, 404, 405 et 406 dans la circonscription de Thayetchaung, au moins jusqu'en 1997. Karen Human Rights Group, 001-1054 à 1055; Mon Information Service, 139-4449.
  5154. Note 599
  5155. Il y a des informations selon lesquelles des personnes ont dû s'occuper d'animaux pour plusieurs bataillons dans la circonscription de Sittway (Akyab) en 1994 et 1995, et d'autres travailler dans un élevage de crevettes de la circonscription de Ponnagyun depuis 1989. Voir Karen Human Rights Group, 001-0558 à 0559; Human Rights Watch/Asia, 001-0711; Amnesty International, 064-2962.
  5156. Note 600
  5157. Il y a des informations selon lesquelles des personnes ont été contraintes de travailler au creusement de 80 bassins de pisciculture pour le BI 10 dans la circonscription de Kalaymyo en 1995. Voir HRDU, 001-0164; Images Asia, 167-8338.
  5158. Note 601
  5159. Selon ces informations, des villageois devaient couper du bois pour alimenter les fours des briqueteries appartenant à l'armée dans la circonscription de Kawkareik; des villageois possédant des chars à boeufs devaient transporter le bois et les briques jusqu'aux fours de l'armée et à partir de ces fours dans la circonscription de Kawkareik, et des villageois devaient collecter du bois pour alimenter les fours appartenant au BIL 545 à Kyondo et les soldats vendaient alors une partie de ce bois aux villageois. Voir Karen Human Rights Group, 001-0629, 001-0632; Amnesty International, 099-3896.
  5160. Note 602
  5161. Selon les informations, des villageois de la circonscription de Maungdaw devaient fabriquer des briques pour la NaSaKa qui vendait ensuite ces briques. Voir Karen Human Rights Group, 001-0565; Amnesty International, 064-2962.
  5162. Note 603
  5163. Selon les informations, dans toute la division, les villageois étaient contraints de travailler à la fabrication de charbon de bois et de briques; pour les fours des briqueteries appartenant aux militaires dans la circonscription de Yebyu; et, en 1997, dans la circonscription de Palaw, pour les fours de briqueteries appartenant au bataillon 280. Karen Human Rights Group, H24-6423, H24-6478; Mon Information Service, 043-2653.
  5164. Note 604
  5165. Les témoins entendus à cet égard proviennent des groupes suivants: Birman (1); Kayah (5); Kayin (14); Mon (1); Musulman autre que Rohingya (1); Pa'O (1); Rakhine (1); Rohingya (27); Shan (5); et Taï (1).
  5166. Note 605
  5167. Voir les déclarations des témoins 159, 163, 176, 186 et 192.
  5168. Note 606
  5169. Voir la déclaration du témoin 97.
  5170. Note 607
  5171. Voir les déclarations des témoins 8, 19 et 73.
  5172. Note 608
  5173. Voir les déclarations des témoins 99 et 154. Dans le cas des Rohingyas, les terres sont parfois confisquées pour être redistribuées aux Rakhines: voir les déclarations des témoins 18, 71 et 77.
  5174. Note 609
  5175. Voir notamment les déclarations des témoins 33, 40, 44 et 46.
  5176. Note 610
  5177. Voir les déclarations des témoins 95, 97 et 111.
  5178. Note 611
  5179. Voir les déclarations des témoins 177 et 186.
  5180. Note 612
  5181. Voir les déclarations des témoins 99 et 134.
  5182. Note 613
  5183. Voir les déclarations des témoins 8 et 156.
  5184. Note 614
  5185. Voir la déclaration du témoin 137.
  5186. Note 615
  5187. Voir les déclarations des témoins 21, 24, 99 et 146-148.
  5188. Note 616
  5189. Voir les déclarations des témoins 123, 151, 186 et 188.
  5190. Note 617
  5191. Voir la déclaration du témoin 190.
  5192. Note 618
  5193. Voir les déclarations des témoins 123 et 151.
  5194. Note 619
  5195. Voir la déclaration du témoin 127.
  5196. Note 620
  5197. Voir les déclarations des témoins 159 et 186.
  5198. Note 621
  5199. Voir les déclarations des témoins 163, 176, 184 et 186.
  5200. Note 622
  5201. Voir les déclarations des témoins 18, 145-148, 176 et 186.
  5202. Note 623
  5203. Voir les déclarations des témoins 93, 103, 124, 155, 176 et 204.
  5204. Note 624
  5205. Par exemple, Karen Human Rights Group, 001-0189.
  5206. Note 625
  5207. Voir paragr. 156 ci-dessus; ce projet est également décrit dans la presse officielle du Myanmar, voir Working People's Daily, H14-6099.
  5208. Note 626
  5209. Human Rights Watch/Asia, 001-0051.
  5210. Note 627
  5211. New Light of Myanmar, H14-6112.
  5212. Note 628
  5213. Voir Heppner, XII/55-56; Liddell, V/18, Min Lwin, VI/1; Wa Wa, II/52-53. Pour le texte d'un ordre interdisant l'utilisation de chars à boeufs sur les routes réservées aux véhicules à moteur, voir l'ordre 11 à l'annexe XI.
  5214. Note 629
  5215. Karen Human Rights Group, 001-0027, 032-2425; Liddell, V/18; Heppner, XII/13, 54. Le travail effectué par les travailleurs forcés était souvent très médiocre: un lit de branches couvertes d'une fine couche de boue pour niveler la terre et construire les accotements. Comme explication à cela, les témoins ont fait valoir que ceux qui étaient ainsi forcés d'effectuer ce travail essayaient de finir la tâche aussi rapidement que possible bâclant parfois le travail lorsqu'ils pouvaient le faire sans que cela se remarque.
  5216. Note 630
  5217. Certains de ces prisonniers seraient des prisonniers politiques. Voir Amnesty International, 064-2961, 085-3491, 098-3874; Karen Human Rights Group, 032-2429; Liddell, V/22-27; Lin, VII/10-11.
  5218. Note 631
  5219. Bien que récemment il ait été fait appel plus visiblement à des soldats pour des tâches précédemment effectuées par une main-d'oeuvre civile, ce recours aux soldats était la plupart du temps limité aux zones accessibles aux étrangers; on dispose également d'informations selon lesquelles, dans certains autres cas où des soldats ont été vus au travail, la majorité du travail était néanmoins réalisée grâce à une main-d'oeuvre civile. Voir Karen Human Rights Group, 001-0632; Liddell, V/32-34; Lin, VII/49-50; et paragr. 438 ci-dessous. Voir également doc. 176.
  5220. Note 632
  5221. Liddell, V/18; Heppner, XIII/10.
  5222. Note 633
  5223. Heppner, XII/58.
  5224. Note 634
  5225. Le kyin est une mesure de volume équivalente à 100 pieds cubiques.
  5226. Note 635
  5227. Heppner, XII/58.
  5228. Note 636
  5229. Wa Wa, II/49; Lin, VII/42; Heppner, XII/64.
  5230. Note 637
  5231. Wa Wa, II/46.
  5232. Note 638
  5233. Wa Wa, II/45.
  5234. Note 639
  5235. Récemment, de petites sommes d'argent ont été versées aux travailleurs contraints de travailler sur des projets d'infrastructure, essentiellement dans les zones où peuvent se rendre des visiteurs étrangers. Voir également Lin, VII/12-13; Heppner, XII/44-45. Voir également UNHCR, 033-2435.
  5236. Note 640
  5237. Le taux officiel du salaire journalier versé par le gouvernement était de 10 kyats par jour jusqu'en 1988, de 15 kyats entre 1988 et 1993, et de 20 kyats jusqu'en 1993. En comparaison, le taux du marché pour la journée de travail en saison sèche dans les campagnes est de 60 à 80 kyats par jour depuis l'année fiscale 1994-95. Voir American Embassy in Rangoon, H13-6009, H13-6082. Pendant une courte période en 1996, des villageois de la circonscription de Yebyu ont été rémunérés au taux du marché local pour le travail effectué sur ce projet, et c'est pourquoi certains villageois ont alors consenti à aller y travailler de leur plein gré.
  5238. Note 641
  5239. Mon Information Service, 001-1229, 042-2620, 139-4435, 139-4439 à 4440; Human Rights Documentation Unit, M34-6965.
  5240. Note 642
  5241. Heppner, XII/12.
  5242. Note 643
  5243. Heppner, XII/54-55.
  5244. Note 644
  5245. La population musulmane de l'Etat Rakhine semble avoir été la seule exception à cette règle car, en raison de leurs valeurs culturelles, il est rare que les femmes aient effectué du travail forcé; dans cette population, la charge du travail forcé ainsi tombait entièrement sur les hommes de la famille.
  5246. Note 645
  5247. Human Rights Watch/Asia, 001-0051.
  5248. Note 646
  5249. Min Lwin, III/32-33.
  5250. Note 647
  5251. Human Rights Watch/Asia, 065-2968.
  5252. Note 648
  5253. Heppner, XII/64.
  5254. Note 649
  5255. Human Rights Watch/Asia, 001-0051.
  5256. Note 650
  5257. Lin, VII/38.
  5258. Note 651
  5259. Heppner, XII/31-35, 40-41.
  5260. Note 652
  5261. Voir Amnesty International, 090-3655. En 1994 et 1995, on a eu recours au travail forcé pour la construction de la section allant de Sumprabum à Putao, pour laquelle on rapporte que 3 000 habitants de Putao auraient été contraints à la fin de 1994 de travailler sur un chantier de cette route très éloigné et qu'un grand nombre d'entre eux seraient décédés faute de nourriture. Voir Human Rights Watch/Asia, 001-0051.
  5262. Note 653
  5263. Karen Human Rights Group, 001-0574 à 0575, 032-2424, 032-2426.
  5264. Note 654
  5265. Images Asia, 001-0208 à 0209; Karen Human Rights Group, 001-0528 à 0529, 032-2424.
  5266. Note 655
  5267. Images Asia, 167-8301, 167-8306; Karen Human Rights Group, 028-2338, 154-5136 à 5138.
  5268. Note 656
  5269. Karen Human Rights Group, 001-0577.
  5270. Note 657
  5271. Karen Human Rights Group, 001-0557, 001-0566; Asia Watch, 107-3942.
  5272. Note 658
  5273. Karen Human Rights Group, 001-0534, 001-0652, 001-0693, 001-3942.
  5274. Note 659
  5275. Amnesty International, 001-0500; Mon Information Service, 008-2053 à 2058, 008-2062, 139-4436, 139-4440 à 4441; Karen Human Rights Group, 001-1367, 001-1371, 154-5040 à 5044, 154-5106, 154-5112 à 5114, H24-6424, H24-6469 à 6472.
  5276. Note 660
  5277. Ce réseau comprend les routes suivantes: dans l'Etat Kayin: de Papun à Bilin (dans l'Etat Mon), de Papun à Kyauknyat (par Par Haik), de Papun à Kamamaung, de Saw Hta (dans le district de Papun) à Kyaukkyi (dans la division de Bago), de Hpa-an à Painkyone, de Hpa-an à Zathabyin (par Shwe Taw), de Hpa-an à Dawlan, de Painkyone à Nabu (par Bee T'Ka), de Way Sha (Kweshan) à Than Ma Ya Taung dans la circonscription de Mayawady, de Dawlan à Pata, de Nabu à Eindu (par Dawlan), de Nabu à Kyondo, de Nabu à Kawkareik (par Myatpadine); un pont de bois a été construit en 1995 dans le cadre de ce projet, de Kya In Seik Gyi à Taungbauk, de Kya In Seik Gyi à Chaung Wa (y compris la construction d'un pont de bois à Chaung Wa en 1996), de Kya In Seik Gyi à Kyeikdon, de Kya In Seik Gyi à Kyondo, un pont dans la circonscription de Kya In Seik Gyi en 1994, de Thanbyuzayat (dans l'Etat Mon) au col des Trois pagodes, ainsi que bien d'autres petites routes locales dans tout l'Etat Kayin. Dans la division de Bago:de Toungoo à Busakee (par Kaw Thay Der), de Zayatkyi à Tantabin, de Shwegyin à Kyaukkyi.
  5278. Note 661
  5279. Karen Human Rights Group, 001-0185 à 0186, 001-0189, 001-0192 à 0197, 001-0376, 001-0451, 001-0480, 001-0488, 001-0551, 001-0607 à 0609, 001-0619 à 0620, 001-0629, 001-0632 à 0637, 001-0904, 001-1342 à 1343, 001-1853 à 1854, 001-1988, 001-1994, 027-2286 à 2288, 027-2292 à 2293, 031-2393 à 2396, 031-2399, 031-2401, 154-4938, 154-4941, 154-5196, H21-6354, H25-6499, M49-7315 à 7316, M49-7350 à 7351, M50-7361, M49-7310, M49-7315 à 7316; Images Asia, 01-0208 à 0209, 001-0216; Human Rights Watch/Asia, 065-2965; Amnesty International, 091-3694, 093-3748, 099-3896.
  5280. Note 662
  5281. Amnesty International, 099-3896.
  5282. Note 663
  5283. Il a été fait mention spécifiquement de la construction et de l'amélioration des routes suivantes: de Haka à Thantlang, de Haka à Falam, de Haka à Gangaw, de Haka à Matupi, de Matupi à Mindat et de Paletwa à Kuah Daw. Il semble que les travailleurs forcés travaillant sur les routes de Haka à Matupi et de Matupi à Mindat auraient été payés 25 kyats pour chaque kyin de pierre concassée alors qu'il leur avait été promis 100 kyats par kyin (voir Karen Human Rights Group, 154-5140 à 5142).
  5284. Note 664
  5285. 028-2338 à 2340, 064-2962, 154-5136 à 5144, 167-8301, 167-8306 à 8307, M12-6812. Parmi ces informations figurent un certain nombre d'ordres émis à partir de 1996 pour demander aux civils de fournir de la main-d'oeuvre pour deux de ces projets routiers, pour l'élargissement de la route de Haka à Thantlang et pour du travail sur la route de Haka à Gangaw.
  5286. Note 665
  5287. Les routes suivantes ont été mentionnées plus particulièrement: de Salong (dans la circonscription de Langkho) à Mawkmai depuis 1992; casser la roche pour la construction de plusieurs routes dans les circonscriptions de Langkho et Mawkmai en 1996 et 1997, y compris de Langkho à Wan Hat et de Wan Hat à Mawkmai; casser la roche pour une route de Mongping à Mong Hsat en 1986 et 1997; réparer la route de Mongkaing à Hsipaw de même que d'autres routes autour de Hsipaw, en 1996; une route de la ville de Laikha à Panglong (dans la circonscription de Loilem), en 1996 et 1997; et une route de Laikha à Mongkaing en 1997. Des villageois réinstallés le long de la route de Laikha à Mong Nawng étaient aussi forcés à travailler à la construction de cette route.
  5288. Note 666
  5289. Karen Human Rights Group, 001-0672, 001-0698; Amnesty International, 099-3895; Shan Human Rights Foundation, 144-4536 à 4537, 145-4553 à 4554, 145-4585, 147-4632, M34-6964; HRDU, M34-6961.
  5290. Note 667
  5291. Il s'agit notamment des routes reliant la ville de Tanintharyi à la frontière thaïlandaise à Mawtaung; de la route de Boke à Kyay Nan Daing (au nord de Myeik (Mergui)); de la route allant de la ville de Tanintharyi au nord à Ta Po Hta, ainsi que d'autres routes des circonscriptions de Tanintharyi et de Thayetchaung. Voir Karen Human Rights Group, 001-1242, 154-4040 à 5044, 154-5106, 154-5112 à 5114, H24-6424, H24-6424, H24-6445, H24-6447, H24-6450 à 6465, H24-6469 à 6472, H24-6475 à 6483, H24-6485, H24-6487 à 6489; Mon Information Service, 139-4437 à 4439.
  5292. Note 668
  5293. Ces routes comprennent les routes de Kaleinaung à Kanbauk et de Ohnbinkwin, Pyingyi à Migyaungaing ainsi que de Migyaunglaung à Eindayaza. Du travail forcé aurait également été utilisé pour la construction d'un pont entre Kadaik et Ohnbinkwin en 1995. Voir Karen Human Rights Group, 001-1120, 001-1124, 001-1359, 001-1367 à 1373. A propos de ces routes, la compagnie TOTAL a informé la commission qu'aucun réseau routier spécifique au gazoduc n'existait dans la région mais qu'en 1995-96, pour les besoins du projet, des améliorations avaient été apportées au réseau routier existant dans la zone côtière et que ces travaux avaient été réalisés par une société française sous le contrôle de TOTAL et dans le respect de son code de conduite. Ces travaux avaient impliqué l'utilisation d'un matériel de travaux publics moderne et à aucun moment il n'avait été fait appel à des travailleurs forcés. Voir TOTAL, 165-8278 (résumé au paragr. 75 ci-dessus).
  5294. Note 669
  5295. Selon ces informations, du travail forcé a été employé en 1996 sur les routes proches du site de réinstallation de Shadaw, sur une route allant de Demawso au site de réinstallation de Daw Tama Gyi (par Tee Po Klo) dans la circonscription de Demawso, sur une route allant au site de réinstallation de Mar Kraw She dans la circonscription de Pruso, et sur une route allant à Daw Ku Li dans la circonscription de Loikaw en 1997. Voir Amnesty International, 099-3896; Karen Human Rights Group, 154-5083, 154-5091 à 5093.
  5296. Note 670
  5297. Selon ces informations, des personnes ont été forcées de travailler à l'élargissement d'une partie de la route allant de Ye à Dawei (Tavoy) près de Ye en 1996; du travail forcé a également été utilisé pour la réparation de la route allant de Kyaikto à Bilin et sur des routes locales dans les circonscriptions de Ye et Mudon. Voir Karen Human Rights Group, pour Mon Information Service, 139-4438 à 4439.
  5298. Note 671
  5299. Selon ces informations, des personnes ont été forcées de travailler à la construction et à l'amélioration d'un certain nombre de routes, et notamment des suivantes: de Layshi à Somra en 1997; de Layshi à Tamanthi pendant de nombreuses années; de Layshi à Lahe; de Homalin à Tamanthi en 1997; de Kalaymyo à Tamu en 1995; d'une route de 14 miles allant de Monywa à Ah Myint en 1995; et de projets routiers dans la circonscription de Tamu en 1995. Voir HRDU, 001-0163 à 0164; Images Asia, 167-8338 à 8339.
  5300. Note 672
  5301. Des personnes auraient été forcées de travailler sur les projets routiers suivants: Maungdaw à Kyein Chaung en 1995; fournir des pierres pour l'élargissement de la route menant à l'état major de la NaSaKa, dans la circonscription de Maungdaw; ainsi que d'autres projets d'amélioration de routes dans les circonscriptions de Maungdaw et de Buthidaung en 1996. Voir Human Rights Watch/Asia, 001-0051; Karen Human Rights Group, 001-0057 à 0058, 001-0565 à 0566; UNHCR, 033-2435, 113-3983, Amnesty International, 089-3610; Asia Watch, 107-3940 à 3942.
  5302. Note 673
  5303. Les informations indiquent que ces dernières années des personnes ont été forcées de travailler sur une route allant de Shwelaung à Wakema et qu'en 1995-96 d'autres ont également été forcées de construire une route allant de Talakwa, près de Pathein (Bassein) à la plage de Nga Saw (30 km au nord de Chaungtha). Voir Karen Human Rights Group, 001-0652, 001-0695. Comme indiqué au paragraphe 364, des travailleurs ont été contraints de défricher un terrain et de construire des baraquements pour les troupes qui surveillaient le travail sur cette route.
  5304. Note 674
  5305. Les travailleurs provenaient pour la plupart de la circonscription de Ye dans l'Etat Mon ainsi que des circonscriptions de Dawei (Tavoy), Launglon, Thayetchaung et Yebyu dans la division de Tanintharyi.
  5306. Note 675
  5307. Human Rights Watch/Asia, 001-0052, 065-2967 à 2968, 150-4690; Amnesty International, 001-0500 à 0501; Karen Human Rights Group, 001-0527 à 0531, 001-1032, 001-1051 à 1052, 001-1060 à 1074, 001-1241, 001-1243, 001-1341, 001-1367, 001-1373 à 1374, 001-1843, 001-1940 à 1945, 0115-2116, 018-2166, 018-2170 à 2172, 029-2370; Mon Information Service, 001-1223, 001-1228 à 1234, 008-2061, 042-2615 à 2644, 043-2653, 139-4435, 139-4439 à 4440; Images Asia, 001-1822 à 1823, 001-1826, 001-1829, 001-1835 à 1836; John Doe A, H20-6293, H20-6295; John Doe B, H20-6297; Jane Doe A, H20-6300 à 6301.
  5308. Note 676
  5309. Shan Human Rights Foundations/S.H.A.N., 001-0167 à 0170; Karen Human Rights Group, 001-0669; Amnesty International, 099-3897.
  5310. Note 677
  5311. Karen Human Rights Group, 001-0305, 001-0320, 032-2425, 032-2429; Amnesty International, 091-3700.
  5312. Note 678
  5313. Human Rights Watch/Asia, 001-0051; Karen Human Rights Group, 001-0553, 001-0561 à 0564, 001-0575 à 0576; Images Asia, 167-8327 à 8332.
  5314. Note 679
  5315. Il y a des indications selon lesquelles cette voie ferrée est en train d'être prolongée de Kalaymyo à Tamu à la frontière avec l'Inde. Voir Images Asia, 167-8327.
  5316. Note 680
  5317. La répartition des témoins en fonction du groupe ethnique auquel ils se rattachent est la suivante: Birman (3); Karen (32); Chin (4); Rakhine (8); Shan (17); Karenni (5); Mon (10); Tai (1); Rohingyas (7); Musulmans autres que Rohingyas (8).
  5318. Note 681
  5319. Les Etats et divisions couverts par les témoignages sont les suivants: Ayeyarwady, Bago, Chin, Kayah, Kayin, Magway, Mon, Rakhine, Sagaing, Shan et Yangon. Les routes nommément désignées par les témoins sont, dans la division Ayeyarwady, les grandes routes Ma-u-bin-Twantay et Einme-Pantanaw; dans la division Bago, une route dans la circonscription de Kyaukkyi; dans l'Etat Chin, les routes reliant Matupi à Paletwa et la rivière Kaladan, et des routes entre Haka et Thantlang et Haka et Gangaw; dans l'Etat Kayah, les réseaux de routes aux environs de Loikaw, Bawlake, Ymathit et Mawchi; dans l'Etat Kayin, le grand réseau routier reliant Papun, Bilin, Hpa-an, Shwegun, Hlaingbwe, Pain Kyone, Dawlan, Yebu, Nabu, Kawkareik, Myawady, Kyondo, Kyeikdon et Three Pagoda Pass; dans l'Etat Mon, les routes reliant Mawlamyine (Moulmein) à Yangon, et Thanbyuzayat à Anin et Setse; dans l'Etat Rakhine, le réseau de routes au nord de l'Etat reliant Ann, Buthidaung, Kyauktaw, Maungdaw, Minbya, Rathedaug et Sittway (Akyab); dans la division Sagaing, la route importante entre Kalaymyo et Thantlang; dans l'Etat Shan, le réseau routier reliant Taunggyi, Aungban, Hopong, Yatsauk et Shwenyaung et le réseau routier reliant Laikha, Loilem, Mong Hsu, Mung Kung, Panglong, Lashio, Namtu et Mong Yai.
  5320. Note 682
  5321. Certains témoignages relatent des faits qui remontent au début des années quatre-vingt.
  5322. Note 683
  5323. Voir la déclaration du témoin 154.
  5324. Note 684
  5325. Voir notamment les déclarations des témoins 162 et 180.
  5326. Note 685
  5327. Voir notamment la déclaration du témoin 173.
  5328. Note 686
  5329. Voir la déclaration du témoin 170.
  5330. Note 687
  5331. Voir les déclarations des témoins 220-228.
  5332. Note 688
  5333. Voir la déclaration du témoin 180.
  5334. Note 689
  5335. Voir la déclaration du témoin 133. Des cas isolés font toutefois référence à une action directe de la part des militaires: voir à cet égard, la déclaration du témoin 170, déserteur de la Tatmadaw, qui a raconté que, lorsqu'il se trouvait à Lashio (Etat Shan), en 1996, il a dû, à trois occasions, recruter au hasard des personnes aux fins de les envoyer à la frontière chinoise pour qu'elles servent de porteurs ou travaillent sur les routes. A ces fins, il avait ainsi recruté par la force, à ces trois occasions, 170, 80 et 90 personnes respectivement.
  5336. Note 690
  5337. Voir les déclarations des témoins 11, 12, 110, 119, 126, 174 et 214.
  5338. Note 691
  5339. Voir les déclarations des témoins 119, 155, 159, 162, 175, 176, 180, 204 et 214.
  5340. Note 692
  5341. Voir à cet égard les déclarations des témoins 122, 131, 132, 138, 139, 159, 214 et 217.
  5342. Note 693
  5343. Voir la déclaration du témoin 4. Ce témoin, qui provient d'une famille de magistrats, a expliqué qu'il avait eu à exécuter avec les autres familles de juges de son village une section de la route entre Haka et Thantlang (Etat Chin) entre le 1er et le 15 janvier 1995.
  5344. Note 694
  5345. Voir les déclarations des témoins 181, 186 et 244.
  5346. Note 695
  5347. Voir les déclarations des témoins 130, 165 et 186.
  5348. Note 696
  5349. Voir les déclarations des témoins 8, 37, 142 et 175.
  5350. Note 697
  5351. Voir les déclarations des témoins 4, 12, 214 et 217.
  5352. Note 698
  5353. Voir les déclarations des témoins 122 (6 h à 17 h); 130 (8 h à 16 h); 139 (8 h à 17 h); 142 (7 h à 17 h); 153 (8 h à 17 h); 156 (7 h à 17 h); 159 (6 h à 18 h); 184 (6 h à 18 h); 204 (6 h à 18 h); 231 (7 h à 18 h); 247 (6 h à 17 h).
  5354. Note 699
  5355. Voir les déclarations des témoins 7, 142, 143, 144 et 186. Le témoin 143 a précisé que les travailleurs étaient parfois mis dans des carcans, à titre de sanctions.
  5356. Note 700
  5357. Voir la déclaration du témoin 157. Ce témoin a vu, lorsqu'il travaillait sur la route entre Bilin et Papun en 1993, deux femmes, deux fillettes et cinq hommes qui auraient été abattus par les militaires puisqu'ils voulaient prendre un moment de repos. Les femmes auraient été violées auparavant.
  5358. Note 701
  5359. Voir notamment la déclaration du témoin 217.
  5360. Note 702
  5361. Voir les déclarations des témoins 98, 106, 119, 122, 127, 131, 132, 137, 138, 139, 141, 142, 144, 162, 175, 176, 180, 183 et 186.
  5362. Note 703
  5363. Voir notamment les déclarations des témoins 110 et 183.
  5364. Note 704
  5365. Voir la déclaration du témoin 98.
  5366. Note 705
  5367. Voir les déclarations des témoins 12, 137, 142 et 186.
  5368. Note 706
  5369. Voir notamment les déclarations des témoins 122 (50 kyats), 131 (200 kyats par jour), 132 (2 500 kyats pour 10 jours), 138, 139 (200 kyats pour 5 jours), 142 (100 kyats), 173 (500 kyats), 176, 180 (200 kyats par jour), 214 (3 000 kyats pour 15 jours) et 220-228 (2 500 kyats par projet).
  5370. Note 707
  5371. Voir la déclaration du témoin 150.
  5372. Note 708
  5373. Voir notamment les déclarations des témoins 54, 68 et 76.
  5374. Note 709
  5375. Voir la déclaration du témoin 76.
  5376. Note 710
  5377. Voir les déclarations des témoins 8, 30, 34, 38 et 45. Les travailleurs peuvent être enchaînés, mis dans des carcans ou exposés au soleil ardent pendant des heures: se référer à la déclaration du témoin 8.
  5378. Note 711
  5379. La répartition des témoins en qui concerne le travail exécuté sur les voies ferrées est la suivante: Birmans (7); Chin (1); Karen (1); Karennis (9); Mons (14); Shans (8); Tavoyan (1).
  5380. Note 712
  5381. Il s'agit de la voie entre Myitkyina (Etat Kachin) et Mandalay (division de Mandalay). La déclaration du témoin se réfère à du travail qui aurait été réalisé par des soldats non rémunérés. Voir la déclaration du témoin 5.
  5382. Note 713
  5383. Il s'agit de la voie entre Augban (Etat Shan) et Loikaw (Etat Kayah). Voir les déclarations des témoins 40, 84, 90, 91, 93, 99, 106, 110, 113, 114.
  5384. Note 714
  5385. Il s'agit de la voie ferrée entre Ye et Dawei (Tavoy) reliant l'Etat Mon et la division Tanintharyi. Voir les déclarations des témoins 198-213, 211, 212, 220-225, 227, 228, 232, 233, 234-236.
  5386. Note 715
  5387. Il s'agit de la voie ferrée reliant la ville de Bago à Yangon. Voir les déclarations des témoins 109, 119, 122, 129, 131, 134, 135 et 210.
  5388. Note 716
  5389. Voir les déclarations des témoins 91, 99, 106, 109, 122, 199, 200, 202 et 210.
  5390. Note 717
  5391. Voir les déclarations des témoins 91, 200 et 210. Seul le témoin 199 a indiqué que tous les membres de sa famille, en âge de travailler, ont dû se rendre sur le site. Seule est restée derrière une personne pour vaquer aux occupations de la maison. Enfin, le témoin 190 a indiqué que même les employés du gouvernement ont dû participer à la construction de ces voies, ces derniers bénéficiant d'un traitement plus favorable puisqu'ils ne devaient s'y rendre qu'une fois par semaine et n'avaient pas à terminer la tâche assignée.
  5392. Note 718
  5393. Voir les déclarations des témoins 112, 135 et 202. Le témoin 113 a déclaré que tous les villages de l'Etat Kayah ont participé à la construction des chemins de fer dans cet Etat.
  5394. Note 719
  5395. Voir les déclarations des témoins 89, 91, 109, 122, 131, 201, 210, 211, 212 et 220. Le témoin 198 a précisé qu'elle a dû se rendre à ses assignations de travail accompagnée par son nourrisson.
  5396. Note 720
  5397. Voir la déclaration du témoin 90.
  5398. Note 721
  5399. Voir la déclaration du témoin 93.
  5400. Note 722
  5401. Voir la déclaration du témoin 99 qui a même vu des prisonniers mourir sur le site de travail en raison des mauvaises conditions de travail.
  5402. Note 723
  5403. Voir les déclarations des témoins 90, 91, 112 et 131.
  5404. Note 724
  5405. Voir les déclarations des témoins 122, 198 et 200.
  5406. Note 725
  5407. Voir les déclarations des témoins 106 et 114.
  5408. Note 726
  5409. Voir les déclarations des témoins 112, 119, 134, 199, 201 et 210.
  5410. Note 727
  5411. Voir la déclaration du témoin 232.
  5412. Note 728
  5413. Voir les déclarations des témoins 90, 91, 198, 201 et 210.
  5414. Note 729
  5415. Voir les déclarations des témoins 89, 90, 91, 99, 109, 119, 129, 131, 198, 201, 210, 212 et 220.
  5416. Note 730
  5417. Voir les déclarations des témoins 91, 99, 210 et 211.
  5418. Note 731
  5419. Voir les déclarations des témoins 89, 90 et 99.
  5420. Note 732
  5421. Voir les déclarations des témoins 90, 91, 112, 119, 211 et 212. Le témoin 229, responsable de trouver la main-d'oeuvre pour la voie ferrée entre Ye et Tavoy a affirmé que les travailleurs étaient payés 180 kyats par jour.
  5422. Note 733
  5423. Voir les déclarations des témoins 106, 199, 202, 234 et 235. En 1996, le témoin 203 aurait recruté de la main-d'oeuvre pour le chemin de fer Ye-Tavoy après avoir négocié avec les militaires un montant de 1 200 kyats par mesure (kyin) de remblais. Le travail terminé, les militaires ont refusé de payer et ont finalement versé 700 kyats par mesure.
  5424. Note 734
  5425. Voir les déclarations des témoins 99, 112, 119, 122, 134, 198 et 212. Des femmes auraient fait l'objet d'exactions sexuelles: se référer notamment aux déclarations des témoins 199 et 200.
  5426. Note 735
  5427. Voir les déclarations des témoins 109 (150 kyats), 112 (1 200 kyats), 131 (2 000 kyats pour 20 jours), 198 (1 000 kyats), 220 (2 500 kyats pour deux semaines) et 232 (150-200 kyats).
  5428. Note 736
  5429. Voir la déclaration du témoin 131 (2 500 kyats). Seul le témoin 119 a affirmé que les autorités refusaient la substitution.
  5430. Note 737
  5431. Voir la déclaration du témoin 212 (3 000 kyats).
  5432. Note 738
  5433. Ce festival a eu lieu notamment à Sittway (Akyab), Etat Rakhine, en 1993; à Dawei (Tavoy), division de Tanintharyi, en 1996; à Haka, Etat Chin, en 1998.
  5434. Note 739
  5435. Voir paragr. 408 à 418 ci-dessus.
  5436. Note 740
  5437. Les informations indiquent que des habitants de plusieurs villages ont été forcés, en 1995 et 1996, de travailler à la construction d'un grand barrage de production d'énergie hydroélectrique sur la rivière Pa Thi dans la circonscription de Toungoo et qu'en 1995 d'autres avaient été forcés de construire un autre barrage, cette fois sur la rivière Kyauk Ke Kyi dans la circonscription de Kyaukkyi, pour produire de l'énergie hydroélectrique à l'intention de l'état major du commandement tactique et opérationnel de l'armée situé à Kyaukkyi. Voir Karen Human Rights Group, 001-0705 à 0708; Burma Issues, 001-0537.
  5438. Note 741
  5439. Amnesty International, 089-3617.
  5440. Note 742
  5441. Selon les informations, un grand nombre de personnes ont été forcées depuis 1994 de travailler à la construction du barrage de Thazi dans la circonscription de Monywa. Des habitants de cette division ont également été forcés de travailler à la construction du barrage de Tant Sae dans la circonscription de Salingyi en 1995 et 1996, à la construction du barrage de Phalan Kyin dans la circonscription de Monywa, à des projets d'irrigation sur la rivière Mu près de Shwebo en 1995 et au projet hydroélectrique de Zee Chaung dans la circonscription de Kalaymyo entre 1990 et 1996. Voir Karen Human Rights Group/HRDU, 001-0164 à 0165; Karen Human Rights Group, 154-5148; Images Asia, 167-8332 à 8337.
  5442. Note 743
  5443. La construction du barrage de Nam Wok (Mong Kwan) près de Kengtung, achevée en 1994. Voir Karen Human Rights Group, 001-0028; Heppner, XII/56-57.
  5444. Note 744
  5445. Cinq mille personnes auraient été forcées de travailler à la construction d'un barrage dans la circonscription de Thayetchaung en 1995; il a également été fait appel au travail forcé pour la réparation de ce barrage en 1996. Voir Mon Information Service, 001-1280.
  5446. Note 745
  5447. On dispose d'informations selon lesquelles en 1994 des milliers de personnes ont été forcées de creuser un canal depuis la circonscription de Taikkyi jusqu'à celle de Hmawbyi. Voir Shan Human Rights Foundation, 001-0364.
  5448. Note 746
  5449. Karen Human Rights Group, 001-1118, 001-1367 à 1372.
  5450. Note 747
  5451. John Doe IV, 067-3046 (l'emplacement de cet hélipad a été indiqué mais n'a pas été repris dans la déclaration pour cause de protection des témoins).
  5452. Note 748
  5453. TOTAL, 165-8278 (cette communication est résumée au paragraphe 75 ci-dessus): "La plupart des hélipads situés sur le parcours même du gazoduc ont été construits par TOTAL ou par des sociétés travaillant pour TOTAL et appliquant son code de conduite (TOTAL ignorant) dans quelles conditions (auraient) été réalisés d'autres hélipads dans la région."
  5454. Note 749
  5455. Images Asia, 167-8313.
  5456. Note 750
  5457. Des personnes auraient été forcées de travailler à la rénovation d'une pagode près de Hsipaw en 1996. Voir Karen Human Rights Group, 001-0698.
  5458. Note 751
  5459. Pour la construction d'une pagode dans la circonscription de Palaw. Voir Karen Human Rights Group, H24-6487.
  5460. Note 752
  5461. Dans le cadre du développement de la vallée du Kabaw, depuis 1991, des habitants chrétiens de la région ont été forcés de construire un monastère bouddhiste. Voir Images Asia, 167-8347.
  5462. Note 753
  5463. Les informations indiquent qu'en 1996 des habitants de la circonscription de Toungoo ont été forcés de travailler sur le chantier d'excavation et de restauration du Palais de Bayintnaung à Toungoo, site de très grande importance historique. Voir Karen Human Rights Group, 001-0707.
  5464. Note 754
  5465. On dispose d'informations selon lesquelles en 1995 un grand nombre de personnes dans la division de Mandalay ont été forcées de nettoyer le Palais de Mandalay et d'en curer les douves. Ce nettoyage était fait semble-t-il en préparation de l'année "Visiter le Myanmar 1996". Voir Karen Human Rights Group, 001-0574 à 0575, 032-2424, 032-2426.
  5466. Note 755
  5467. Ce travail a été effectué à partir de 1991 et jusqu'en 1995 au moins, et des terres auraient été confisquées aux habitants du lieu. Voir Karen Human Rights Group, 001-0556 à 0557.
  5468. Note 756
  5469. Ces informations ont trait à la construction d'une école dans la circonscription de Falam, Etat Chin (Images Asia, 167-8307); à la construction d'une école dans le village de Tichara dans la circonscription de Myawady, Etat Kayin en 1995 et 1996 (Karen Human Rights Group, 001-0549 à 0550, 001-0618 à 0619); à l'achèvement d'une clinique dans le village de Kanbauk dans la circonscription de Yebyu, division de Tanintharyi (Karen Human Rights Group, 001-1125); à la construction d'une école et d'une clinique dans le cadre du développement de la vallée du Kabaw dans la division de Sagaing depuis 1991 (Images Asia, 167-8347).
  5470. Note 757
  5471. Selon les informations, du travail forcé a été utilisé dans l'Etat Chin au cours de l'année 1997 pour la construction des infrastructures du 8e Festival national de sport estudiantin qui, bien que prévu pour 1997, a eu lieu en réalité à Haka du 29 mars au 8 avril 1998. Pour la préparation de ce festival, des habitants de la ville de Haka ont été forcés de créer un terrain de football, de construire un stade et de construire des routes d'accès. Voir Karen Human Rights Group, 154-5144. Dans l'Etat Rakhine, des personnes ont également été forcées de fournir des matériaux de construction et d'effectuer d'autres travaux à l'occasion du Festival national de sport estudiantin de 1993 qui a eu lieu à Sittway (Akyab). Voir les déclarations écrites soumises par le témoin 10, M07-6648.
  5472. Note 758
  5473. Selon les informations, du travail forcé a été utilisé en 1995 pour la construction de l'hôtel Sittway, sur la plage proche de Sittway (Akyab), et en 1994 pour la construction d'un hôtel au sud de Ngapali, deux hôtels qui appartiendraient à des membres de haut rang du Conseil pour le rétablissement de l'ordre public (SLORC). Voir Karen Human Rights Group, 001-0560.
  5474. Note 759
  5475. La commission a reçu copie d'un ordre donné par les militaires à un chef de village, exigeant la construction de toilettes dans un village situé au sud de Kawkareik en 1995. L'ordre déclarait que "des mesures draconiennes" seraient prises contre le village s'il ne construisait pas lui-même ces toilettes. Voir 027-2295.
  5476. Note 760
  5477. Selon les informations, il est fait appel à du travail forcé depuis 1994 pour la construction d'une clôture de 30 miles dans la circonscription de Mohnyin dans l'Etat Kachin. Voir Mirante, I/51-52.
  5478. Note 761
  5479. Karen Human Rights Group, 001-1120, 001-1124.
  5480. Note 762
  5481. TOTAL, 165-8278 (cette communication est résumée au paragraphe 75 ci-dessus): "Il n'est pas vrai que des travaux de nettoyage aient pu être réalisés par des travailleurs forcés dans le but de faciliter l'accès aux équipes du projet. Au cours des années 1993 et 1994, l'enlèvement de la végétation (le "clearing") (aurait) été assuré, sous (le contrôle de TOTAL), par la Compagnie générale de géophysique (CGG)."
  5482. Note 763
  5483. Certains des événements relatés se réfèrent à des faits qui se seraient produits avant ces dates: voir notamment la déclaration du témoin 230 qui concerne la construction d'un aéroport à Mawlamyine en 1988.
  5484. Note 764
  5485. La répartition des personnes ayant fourni de telles données de fait est la suivante: Birman (4); Chin (1); Karenni (3); Karen (5); Mon (3); Musulman autre que Rohingya (1); Rakhine (3); Rohingya (1); et Shan (1).
  5486. Note 765
  5487. Voir les déclarations des témoins 14, 217, 219, 238 et 243.
  5488. Note 766
  5489. Voir les déclarations des témoins 234 et 235.
  5490. Note 767
  5491. Voir les déclarations des témoins 17, 210 et 230.
  5492. Note 768
  5493. Voir la déclaration du témoin 3.
  5494. Note 769
  5495. Voir la déclaration du témoin 74.
  5496. Note 770
  5497. Voir la déclaration du témoin 13.
  5498. Note 771
  5499. Voir les déclarations des témoins 190 et 192.
  5500. Note 772
  5501. Voir la déclaration du témoin 129.
  5502. Note 773
  5503. Voir la déclaration du témoin 177.
  5504. Note 774
  5505. Voir les déclarations des témoins 10, 13, 99 et 110.
  5506. Note 775
  5507. Voir la déclaration du témoin 177.
  5508. Note 776
  5509. Voir les paragr. 427 à 443.
  5510. Note 777
  5511. Plusieurs témoins ont mentionné que l'ordre était transmis par le chef du village ou de la section (voir les déclarations des témoins 3, 96, 117, 219 et 243); d'autres ont mentionné des ordres venant du LORC d'arrondissement urbain (voir la déclaration du témoin 13), ou même du LORC de district (voir les déclarations des témoins 230, 234, 235 et 238).
  5512. Note 778
  5513. Voir les déclarations des témoins 170 et 210.
  5514. Note 779
  5515. Les villes ou villages sont divisés en fonction de leur importance.
  5516. Note 780
  5517. Voir les déclarations des témoins 14, 219 et 238.
  5518. Note 781
  5519. Voir la déclaration du témoin 219.
  5520. Note 782
  5521. Voir la déclaration du témoin 219.
  5522. Note 783
  5523. Voir les déclarations des témoins 13, 219, 234 et 235.
  5524. Note 784
  5525. Voir la déclaration du témoin 219.
  5526. Note 785
  5527. Voir la déclaration du témoin 219.
  5528. Note 786
  5529. Les montants devant être payés pour un substitut varient, les déclarations précisant des montants entre 50 et 3 000 kyats (voir notamment les déclarations des témoins 13 (150 kyats), 96 (50 kyats), 217 (3 000 kyats) et 219 (1 500 kyats).
  5530. Note 787
  5531. Voir la déclaration du témoin 219 qui déclare avoir vu des travailleurs mis dans des carcans et exposés à un soleil ardent pendant des heures.
  5532. Note 788
  5533. Sur ce dernier point, voir la déclaration du témoin 99.
  5534. Note 789
  5535. Karen Human Rights Group, 032-2425 à 26; Human Rights Watch/Asia, H07-5797 à 99.
  5536. Note 790
  5537. Karen Human Rights Group, 001-0028, 032-2425 à 26.
  5538. Note 791
  5539. Karen Human Rights Group, 001-0534.
  5540. Note 792
  5541. Voir également la déclaration du témoin 217.
  5542. Note 793
  5543. Karen Human Rights Group, 032-2425.
  5544. Note 794
  5545. Voir la déclaration du témoin 99.
  5546. Note 795
  5547. Voir la déclaration du témoin 96.
  5548. Note 796
  5549. Voir la déclaration du témoin 237.
  5550. Note 797
  5551. Human Rights Watch/Asia, H07-5798.
  5552. Note 798
  5553. Paragr. 205.
  5554. Note 799
  5555. Voir paragr. 207 à 213.
  5556. Note 800
  5557. Voir paragr. 214 à 218.
  5558. Note 801
  5559. Voir paragr. 205.
  5560. Note 802
  5561. Voir le texte aux paragr. 238 et 239.
  5562. Note 803
  5563. Voir le texte au paragr. 240.
  5564. Note 804
  5565. Voir le texte aux paragr. 239 et 240.
  5566. Note 805
  5567. Voir paragr. 206.
  5568. Note 806
  5569. Voir paragr. 243.
  5570. Note 807
  5571. Art. 9(b) de la loi sur les villes et art. 11(d) de la loi sur les villages, lu conjointement avec l'article 8(1)(g)(n) et (o) de la loi.
  5572. Note 808
  5573. Voir critères de la convention aux paragr. 212 et 213.
  5574. Note 809
  5575. Voir paragr. 121 et 145.
  5576. Note 810
  5577. Voir paragr. 218.
  5578. Note 811
  5579. Voir paragr. 217 et 122 et suiv.
  5580. Note 812
  5581. Voir paragr. 215 et suiv. ainsi que le texte in extenso de la convention, reproduit à l'annexe XIII. Toutefois, pour ce qui est de la réparation ou indemnisation en cas d'accident ou de maladie, conformément à l'article 15 de la convention, voir paragr. 72 des instructions concernant l'application de la loi sur les villages, citées au paragr. 247.
  5582. Note 813
  5583. Voir paragr. 245.
  5584. Note 814
  5585. Voir paragraphe 246.
  5586. Note 815
  5587. Voir paragr. 299 et suiv., en particulier les paragr. 408 et suiv. et 444 et suiv.
  5588. Note 816
  5589. Voir paragr. 479 et suiv.
  5590. Note 817
  5591. Voir paragr. 251 à 254.
  5592. Note 818
  5593. Voir paragr. 249 et 250.
  5594. Note 819
  5595. Voir paragr. 249 et sa deuxième note de bas de page (no 296).
  5596. Note 820
  5597. Voir paragr. 255 et 256.
  5598. Note 821
  5599. Voir paragr. 257 et sa note de bas de page.
  5600. Note 822
  5601. Voir paragr. 115 et les éléments présentés aux paragr. 412 et 438.
  5602. Note 823
  5603. Voir paragr. 284 pour les indications qu'il ne l'a pas été.
  5604. Note 824
  5605. Voir paragr. 204, deuxième note de bas de page (no 213).
  5606. Note 825
  5607. Annuaire de la Commission du droit international 1950, vol. I, p. 374. Voir également La Rosa, Dictionnaire de droit international pénal, PUF, Paris, 1998, p. 69.
  5608. Note 826
  5609. Voir en particulier paragr. 286 et suiv.
  5610. Note 827
  5611. Voir paragr. 302 et suiv., 340 et suiv., 367 et suiv., 384, 390, 429, 430, 437, 455 et 459.
  5612. Note 828
  5613. Voir paragr. 286, 287, 292, 302, 340, 367, 384, 390, 430, 437, 455 et 459.
  5614. Note 829
  5615. Voir paragr. 302, 307, 308, 328, 329, 330, 333, 341, 343, 367 et 455.
  5616. Note 830
  5617. Quelques échantillons seulement sont reproduits dans l'annexe XI.
  5618. Note 831
  5619. Voir paragr. 237 à 240.
  5620. Note 832
  5621. Voir paragr. 302, 307, 308, 328, 329, 330, 333, 341, 343, 347, 367 et 455.
  5622. Note 833
  5623. Voir art. 2, paragr. 1, de la convention.
  5624. Note 834
  5625. Voir paragr. 481.
  5626. Note 835
  5627. Voir paragr. 239 et 240.
  5628. Note 836
  5629. Voir annexe XI.
  5630. Note 837
  5631. Voir paragr. 289, 292 et 295.
  5632. Note 838
  5633. Voir paragr. 302, 307, 312, 317, 340, 349, 350, 367, 373, 376, 387, 414, 418, 429, 433, 434, 441 et 442.
  5634. Note 839
  5635. Voir paragr. 289, 340 et 429.
  5636. Note 840
  5637. Voir paragr. 292, 333, 367, 418, 433, 435 et 441.
  5638. Note 841
  5639. Voir paragr. 292, 311, 317, 349, 376, 413 et 418.
  5640. Note 842
  5641. Voir paragr. 292, 418 et 434.
  5642. Note 843
  5643. Voir paragr. 292, 418 et 441 et sa note (no 734).
  5644. Note 844
  5645. Voir paragr. 311, 317, 349 et 418.
  5646. Note 845
  5647. Voir paragr. 295, 312, 373, 387, 414, 434 et 442.
  5648. Note 846
  5649. Voir paragr. 302 et 307. De plus, outre les nombreux cas dans lesquels les gens sont appelés ou directement réquisitionnés pour le travail ou les services, il existe des cas où des foyers, dans l'incapacité de s'acquitter des différents impôts qui les frappent, sont tenus de fournir un supplément de travail ou de services en lieu et place du versement des impôts -- voir paragr. 295.
  5650. Note 847
  5651. Pour la notion de "peine", voir également paragr. 206 et ses deuxième et troisième notes de bas de page (nos 220 et 221).
  5652. Note 848
  5653. Voir paragr. 303 et 349, deuxième note de bas de page (no 461).
  5654. Note 849
  5655. Voir paragr. 412 et 438.
  5656. Note 850
  5657. Art. 2, paragr. 2 c), de la convention.
  5658. Note 851
  5659. Pour ce qui est de la condition selon laquelle le travail doit résulter d'une "condamnation prononcée par une décision judiciaire", les éléments portés à l'attention de la commission indiquent cependant que les condamnations au Myanmar ne sont souvent pas le résultat d'un procès équitable. C'est notamment le cas pour les prisonniers politiques, qui, jusqu'en 1992, ont été couramment jugés par un tribunal militaire. En juillet 1989, l'ordonnance no 2/89 de la loi martiale a institué des tribunaux militaires ayant autorité pour ne pas entendre les témoins "inutiles", mettre en accusation les prévenus sans avoir entendu les témoins de l'accusation et refuser le rappel de témoins ayant déjà été entendus. Aucune voie de recours n'était prévue, sauf devant le commandant en chef des forces armées. Les tribunaux militaires étaient habilités à prononcer trois types de sentences: non moins de trois ans d'emprisonnement avec travail, emprisonnement à vie ou peine de mort. L'ordonnance no 2/89 de la loi martiale a été abrogée par l'ordonnance no 12/92, prise le 26 septembre 1992. Voir Liddell, V/24-27; Lin, VII/10B12. Voir également Amnesty International, 090-3646 à 47, 091-3681.
  5660. Note 852
  5661. Voir paragr. 303 ci-dessus et Liddell, V/23.
  5662. Note 853
  5663. Voir paragr. 206 ci-dessus.
  5664. Note 854
  5665. Voir paragr. 482.
  5666. Note 855
  5667. Voir paragr. 212.
  5668. Note 856
  5669. Voir paragr. 132.
  5670. Note 857
  5671. Paragr. 486.
  5672. Note 858
  5673. Paragr. 278 et 389 à 393.
  5674. Note 859
  5675. Paragr. 477.
  5676. Note 860
  5677. Voir paragr. 255 à 257.
  5678. Note 861
  5679. Voir paragr. 394 à 407.
  5680. Note 862
  5681. Voir paragr. 207 à 213.
  5682. Note 863
  5683. Art. 2, paragr. 2 e), de la convention.
  5684. Note 864
  5685. Art. 2, paragr. 2 d), de la convention.
  5686. Note 865
  5687. Voir paragr. 408 à 443.
  5688. Note 866
  5689. Voir paragr. 412 et 438.
  5690. Note 867
  5691. Voir paragr. 477 (en ce qui concerne les militaires) et 483 (en ce qui concerne la main-d'oeuvre carcérale).
  5692. Note 868
  5693. Outre les cas dans lesquels le travail est accompli par des remplaçants dont les services ont été loués par des foyers ou des individus qui ont été requis pour ce travail (voir paragr. 480 et 482), les éléments fournis à la commission incluent les témoignages de deux entrepreneurs ayant travaillé respectivement avec un groupe de 216 et d'environ 100 ouvriers embauchés sous contrat (contre rémunération) pour la construction de la ligne de chemins de fer Ye-Dawei (Tavoy) pendant qu'à côté d'eux de nombreuses autres personnes accomplissaient un travail forcé (témoins 203 et 229), et les témoignages de deux travailleurs embauchés sous contrat qui avaient payé pour obtenir un travail sur le chantier de construction de la ligne Ye-Dawei (Tavoy) et qui sont partis au bout de six mois sans avoir été rémunérés (témoins 234 et 235). En outre, une société étrangère opérant au Myanmar (TOTAL) atteste avoir fait procéder à des améliorations du réseau routier dans sa zone d'activité en utilisant du matériel moderne et sans recours au travail forcé -- paragr. 75 et dernière note de bas de page (no 668) du paragraphe 421.
  5694. Note 869
  5695. Voir paragr. 206 et 480 à 482.
  5696. Note 870
  5697. Voir paragr. 207 à 213.
  5698. Note 871
  5699. Voir les critères énoncés au paragr. 213.
  5700. Note 872
  5701. Voir paragr. 408, 424 à 426 et 436.
  5702. Note 873
  5703. Voir paragr. 408 et 411.
  5704. Note 874
  5705. Voir paragr. 413.
  5706. Note 875
  5707. Voir paragr. 437 (et 429).
  5708. Note 876
  5709. Voir paragr. 213.
  5710. Note 877
  5711. Voir paragr. 420 à 422 et 427.
  5712. Note 878
  5713. Voir paragr. 410, 411 et 436.
  5714. Note 879
  5715. Voir paragr. 429.
  5716. Note 880
  5717. Voir paragr. 409.
  5718. Note 881
  5719. Voir paragr. 429.
  5720. Note 882
  5721. Voir paragr. 444 à 457.
  5722. Note 883
  5723. Voir paragr. 494.
  5724. Note 884
  5725. Voir paragr. 213 et conclusions concernant les routes et les lignes de chemins de fer aux paragr. 494 à 496.
  5726. Note 885
  5727. Voir paragr. 447.
  5728. Note 886
  5729. Voir paragr. 447 et 454.
  5730. Note 887
  5731. Voir paragr. 447.
  5732. Note 888
  5733. Voir paragr. 447 et 454.
  5734. Note 889
  5735. Voir paragr. 448 et 454.
  5736. Note 890
  5737. Voir paragr. 454 et déclaration du témoin 129.
  5738. Note 891
  5739. Voir paragr. 449 et note de bas de page no 755.
  5740. Note 892
  5741. Voir paragr. 449 et notes de bas de page nos 753 et 754.
  5742. Note 893
  5743. Voir paragr. 451 et note de bas de page no 760.
  5744. Note 894
  5745. Voir paragr. 451 et note de bas de page no 757.
  5746. Note 895
  5747. Voir déclaration du témoin 177, mentionnée sous le paragr. 454, et note de bas de page no 773.
  5748. Note 896
  5749. Voir paragr. 448.
  5750. Note 897
  5751. Voir paragr. 451 et note de bas de page no 758.
  5752. Note 898
  5753. Voir déclaration du témoin 74, mentionnée au paragr. 454.
  5754. Note 899
  5755. Voir paragr. 449 et notes de bas de page nos 749 à 752.
  5756. Note 900
  5757. Voir déclarations des témoins 190 et 192, mentionnées au paragr. 454, ainsi que les informations citées au paragr. 450.
  5758. Note 901
  5759. Voir déclarations des témoins 234 et 235, mentionnées au paragr. 454.
  5760. Note 902
  5761. Voir paragr. 451 et note de bas de page no 759.
  5762. Note 903
  5763. Voir déclarations des témoins 234 et 235, mentionnées au paragr. 454.
  5764. Note 904
  5765. Voir paragr. 213.
  5766. Note 905
  5767. Voir déclarations des témoins 190 et 192.
  5768. Note 906
  5769. Voir l'ordonnance visée dans la note de bas de page no 759 correspondant au paragr. 451.
  5770. Note 907
  5771. Voir paragr. 458 et 461.
  5772. Note 908
  5773. Voir paragr. 459 et 461.
  5774. Note 909
  5775. Une mobilisation d'une journée par semaine, c'est-à-dire de 52 jours par an, se situe près de la limite supérieure prévue à l'article 12, paragraphe 1, de la convention pour ce qui était toléré pendant une période transitoire (paragr. 214 à 218) tout en étant défini comme travail forcé ou obligatoire dans le plein sens de la convention et ne rentrant donc pas dans l'exception de l'article 2, paragraphe 2 e).
  5776. Note 910
  5777. Voir paragr. 472.
  5778. Note 911
  5779. Voir paragr. 218 et 472.
  5780. Note 912
  5781. Voir paragr. 472.
  5782. Note 913
  5783. Voir paragr. 479 et 502.
  5784. Note 914
  5785. Voir paragr. 394 et 396.
  5786. Note 915
  5787. Voir paragr. 449, note de bas de page no 750.
  5788. Note 916
  5789. Voir paragr. 451, note de bas de page no 758.
  5790. Note 917
  5791. Art. 1, paragr. 1, de la convention.
  5792. Note 918
  5793. Voir annexe I, partie III B.1, deuxième paragraphe et sa note no 1132.
  5794. Note 919
  5795. Voir annexe I, partie III B.1, troisième paragraphe et sa note no 1136.
  5796. Note 920
  5797. Voir paragr. 54.
  5798. Note 921
  5799. Voir paragr. 423 et 436 et suiv.
  5800. Note 922
  5801. Voir les allégations figurant dans l'annexe I, partie III B.1, troisième paragraphe, et leur rejet au paragr. 54 ci-dessus.
  5802. Note 923
  5803. Voir paragr. 448.
  5804. Note 924
  5805. Art. 1, paragr. 1, de la convention.
  5806. Note 925
  5807. Voir paragr. 291, 302, 308, 314, 317, 323, 334, 342, 343, 353, 368, 375, 384, 416, 437 et 456.
  5808. Note 926
  5809. Voir paragr. 308.
  5810. Note 927
  5811. Voir paragr. 291, 302, 314, 323, 343, 368, 375, 384, 416, 430, 437 et 456.
  5812. Note 928
  5813. Voir paragr. 430.
  5814. Note 929
  5815. Voir paragr. 342 et 456.
  5816. Note 930
  5817. Voir paragr. 368.
  5818. Note 931
  5819. Voir paragr. 291, 302, 323, 416 et 430 (jusqu'à 72 ans).
  5820. Note 932
  5821. Voir paragr. 302 et 323.
  5822. Note 933
  5823. Voir paragr. 302, 308, 314, 317, 323, 334 et 343.
  5824. Note 934
  5825. Voir paragr. 353.
  5826. Note 935
  5827. Voir paragr. 368.
  5828. Note 936
  5829. Voir paragr. 375.
  5830. Note 937
  5831. Voir paragr. 384.
  5832. Note 938
  5833. Voir paragr. 416, 430 et 437.
  5834. Note 939
  5835. Voir paragr. 456.
  5836. Note 940
  5837. Voir paragr. 312, 314 et 433.
  5838. Note 941
  5839. Voir paragr. 314.
  5840. Note 942
  5841. Voir paragr. 312, 338 et 348.
  5842. Note 943
  5843. Voir paragr. 312.
  5844. Note 944
  5845. Voir paragr. 302 et 312.
  5846. Note 945
  5847. Voir paragr. 351.
  5848. Note 946
  5849. Voir paragr. 369.
  5850. Note 947
  5851. Voir paragr. 373.
  5852. Note 948
  5853. Voir paragr. 387.
  5854. Note 949
  5855. Voir paragr. 395 et 406.
  5856. Note 950
  5857. Voir paragr. 415, 433 et 440.
  5858. Note 951
  5859. Voir paragr. 457.
  5860. Note 952
  5861. Voir paragr. 319.
  5862. Note 953
  5863. Voir paragr. 414.
  5864. Note 954
  5865. Voir paragr. 394 à 407.
  5866. Note 955
  5867. Voir paragr. 258.
  5868. Note 956
  5869. Voir paragr. 284.
  5870. Note 957
  5871. Voir paragr. 470 et suiv.
  5872. Note 958
  5873. Pour ce qui est de la responsabilité pénale en droit international, voir cependant les paragr. 204 et 478.
  5874. Note 959
  5875. Voir paragr. 122 et suiv.; voir cependant le changement de position évoqué aux paragr. 145 et 237.
  5876. Note 960
  5877. Voir paragr. 481.
  5878. Note 961
  5879. Voir paragr. 480 et 481.
  5880. Note 962
  5881. Voir supra paragr. 70.
  5882. Note 963
  5883. Pour une présentation exhaustive des mesures prises lors de la première session, voir supra paragr. 17-27.
  5884. Note 964
  5885. Pour plus de détails sur le déroulement de la deuxième session, voir supra chap. 4, paragr. 55-67.
  5886. Note 965
  5887. Voir supra paragr. 58.
  5888. Note 966
  5889. Rapport de la commission instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner la plainte au sujet de l'observation par la Pologne de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentée par des délégués à la 68e session de la Conférence internationale du Travail (1984), Bulletin Officiel, vol. LXVII, série B, paragr. 466, p. 128.
  5890. Note 967
  5891. Voir les articles pertinents reproduits supra au paragr. 3.
  5892. Note 968
  5893. Voir supra, paragr. 121 à 168.
  5894. Note 969
  5895. Voir supra paragr. 8.
  5896. Note 970
  5897. Voir supra paragr. 12-16.
  5898. Note 971
  5899. Voir supra, paragr. 300 à 350.
  5900. Note 972
  5901. Voir supra, paragr. 351 à 373.
  5902. Note 973
  5903. Voir supra, paragr. 374 à 388.
  5904. Note 974
  5905. Voir supra, paragr. 394 à 407.
  5906. Note 975
  5907. Voir supra, paragr. 394, 396 et 504.
  5908. Note 976
  5909. Voir supra, paragr. 408 à 443.
  5910. Note 977
  5911. Voir supra, paragr. 444 à 457.
  5912. Note 978
  5913. Voir supra, paragr. 458 à 461.
  5914. Note 979
  5915. Voir supra, 485 à 488 et 492 à 502.
  5916. Note 980
  5917. Voir supra, 237 et suiv. et 470 et suiv.
  5918. Note 981
  5919. Voir supra, paragr. 286 à 288.
  5920. Note 982
  5921. Voir supra, paragr. 480 et 481.
  5922. Note 983
  5923. Voir supra, paragr. 291 et 322.
  5924. Note 984
  5925. Voir supra, paragr. 302, 307, 308, 328, 329, 330, 333, 341, 343, 349, 367, 455 et 481.
  5926. Note 985
  5927. Voir supra, paragr. 239 et 240.
  5928. Note 986
  5929. Voir supra, 302, 305, 307, 312, 373, 387, 414, 434 et 442.
  5930. Note 987
  5931. Voir supra, paragr. 289, 340 et 429.
  5932. Note 988
  5933. Voir supra, paragr. 343, 367, 414 et 433.
  5934. Note 989
  5935. Voir supra, paragr. 292, 343, 367, 418, 433, 435 et 441.
  5936. Note 990
  5937. Voir supra, paragr. 292, 311, 317, 349, 376, 413 et 418.
  5938. Note 991
  5939. Voir supra, paragr. 292, 418 et 435.
  5940. Note 992
  5941. Voir supra, paragr. 292, 418, 441 et sa note de bas de page no 734.
  5942. Note 993
  5943. Voir supra, paragr. 311, 317, 343 (note de bas de page no 437), 349 et 418.
  5944. Note 994
  5945. Voir supra, paragr. 291, 302, 308, 314, 317, 323, 334, 342, 343, 353, 368, 375, 384, 416, 430, 437, 456 et 511.
  5946. Note 995
  5947. Voir supra, paragr. 291, 302, 314, 323, 343, 368, 375, 384, 416, 430, 437, 456 et 511.
  5948. Note 996
  5949. Voir supra, paragr. 291, 302, 323, 416, 430 et 511.
  5950. Note 997
  5951. Voir supra, paragr. 302 et 323.
  5952. Note 998
  5953. Voir supra, paragr. 312, 338, 348, 387, 395, 406, 415, 433, 440, 457 et 512.
  5954. Note 999
  5955. Voir supra, paragr. 319, 414 et 512.
  5956. Note 1000
  5957. Voir supra, paragr. 245 et suiv. et 473 et suiv.
  5958. Note 1001
  5959. Voir, inter alia, paragr. 295 et 443.
  5960. Note 1002
  5961. Voir supra, paragr. 370, 372 et 404.
  5962. Note 1003
  5963. Voir supra, paragr. 352 et 370.
  5964. Note 1004
  5965. Voir supra, paragr. 296, 297 et 434.
  5966. Note 1005
  5967. Voir supra, paragr. 295, 302, 307, 312, 373, 387, 434 et 443.
  5968. Note 1006
  5969. Voir paragr. 297 et 339 ainsi que plusieurs des éléments de preuve testimoniale.
  5970. Note 1007
  5971. Voir supra, paragr. 296.
  5972. Note 1008
  5973. Voir supra, paragr. 355 et suiv., 362 et 366.
  5974. Note 1009
  5975. Voir paragr. 296, 339 et 362. Voir également paragr. 249 et 254 concernant les restrictions à la liberté de mouvement et leurs incidences sur le travail forcé.
  5976. Note 1010
  5977. Voir supra, paragr. 300, 328, 330, 332 et 346.
  5978. Note 1011
  5979. Voir supra, paragr. 318.
  5980. Note 1012
  5981. Voir supra, paragr. 314.
  5982. Note 1013
  5983. Voir supra, paragr. 319.
  5984. Note 1014
  5985. Voir supra, paragr. 348.
  5986. Note 1015
  5987. Voir supra, paragr. 348.
  5988. Note 1016
  5989. Voir supra, paragr. 414 et 432.
  5990. Note 1017
  5991. Voir supra, paragr. 317, 349, 372, 376, 385, 418, 432, 435, 441 et 457.
  5992. Note 1018
  5993. Voir supra, paragr. 317, 346, 347, 349, 374, 418 et 432.
  5994. Note 1019
  5995. Voir supra, paragr. 317, 343, 353, 372, 418 et 432.
  5996. Note 1020
  5997. Voir supra, paragr. 338, 341, 370, 380, 387, 406, 414 et 433.
  5998. Note 1021
  5999. Voir supra, paragr. 370 et 372.
  6000. Note 1022
  6001. Voir supra, paragr. 316 et 348.
  6002. Note 1023
  6003. Voir supra, paragr. 316.
  6004. Note 1024
  6005. Voir supra, paragr. 315.
  6006. Note 1025
  6007. Voir supra, paragr. 320.
  6008. Note 1026
  6009. Voir supra, paragr. 417, 433 et 440.
  6010. Note 1027
  6011. Voir supra, paragr. 514.
  6012. Note 1028
  6013. Voir supra, paragr. 258.
  6014. Note 1029
  6015. Voir supra, paragr. 284.
  6016. Note 1030
  6017. Voir supra, paragr. 481 et 514.
  6018. Note 1031
  6019. Voir supra, paragr. 203.
  6020. Note 1032
  6021. Voir supra, paragr. 204 et 478.
  6022. Note 1033
  6023. Voir supra, paragr. 122 et suiv.
  6024. Note 1034
  6025. Voir supra, paragr. 119.
  6026. Note 1035
  6027. Voir supra, paragr. 481 et 529.
  6028. Note 1036
  6029. Voir supra, paragr. 258.
  6030. Note 1037
  6031. Voir supra, paragr. 152.
  6032. Note 1038
  6033. Voir supra, paragr. 477 et 489 à 491.
  6034. Note 1039
  6035. Document NU AGUN A/RES/52/137, 12 déc. 1997, paragr. 8.
  6036. Note 1040
  6037. Document NU CESE/CN.4/1998/70, 15 janv. 1998, paragr. 78.
  6038. Note 1041
  6039. Conférence internationale du Travail, 82e session, rapport III (partie 5), liste des ratifications par convention et par pays (Genève, 1995), p. 46.
  6040. Note 1042
  6041. Le manquement du Myanmar à ses obligations au titre de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, a également fait l'objet de commentaires de la part de la commission d'experts et de la Commission de la Conférence. Voir, par exemple, les paragraphes 166 à 169 du Compte rendu provisoire de la Commission de l'application des normes de la 83e session de la Conférence internationale du Travail (Genève, 1996).
  6042. Note 1043
  6043. Conférence internationale du Travail, 48e session, rapport III (partie 1), résumé des rapports sur les conventions ratifiées (Genève, 1964), p. 71.
  6044. Note 1044
  6045. Conférence internationale du Travail, 52e session, rapport III (partie 1), résumé des rapports sur les conventions ratifiées (Genève, 1968), p. 57.
  6046. Note 1045
  6047. Conférence internationale du Travail, 78e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1991), p. 134 (à cette occasion, la commission d'experts exprimait l'espoir que le gouvernement du Myanmar réponde de manière détaillée aux questions soulevées); Conférence internationale du Travail, 79e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1992), p. 134 (la commission d'experts réitérait ses commentaires de 1991 compte tenu du fait qu'aucun rapport n'avait été reçu du gouvernement).
  6048. Note 1046
  6049. Pour plus de détails sur la procédure fondée sur l'article 24, voir infra notes 1056 à 1066 et texte correspondant.
  6050. Note 1047
  6051. Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1993, document des Nations Unies E/CN.4/1993/37 (17 fév. 1993) ("Rapport du Rapporteur spécial, 1993"); Conférence internationale du Travail, 80e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1993) ("RCE, 1993"), p. 122.
  6052. Note 1048
  6053. Cet article exclut de la définition du travail forcé les "menus travaux de village", exécutés dans l'intérêt direct de la collectivité. Voir ci-après notes 1203 à 1205 et texte correspondant.
  6054. Note 1049
  6055. Conférence internationale du Travail, 82e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1995) (RCE, 1995), pp. 112 à 115.
  6056. Note 1050
  6057. Le rapport du gouvernement se référait simplement à l'article 2 2) b) (excluant de la définition de travail forcé tout travail faisant partie des obligations civiques normales des citoyens -- voir infra notes 1193 et 1194 et texte correspondant) et à l'article 2 2) d) (excluant de la définition de travail forcé le travail exigé en cas de force majeure -- voir infra notes 1200 à 1202 et texte correspondant), affirmant que la notion de "travail forcé" n'est pas applicable aux dispositions de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, instruments qui, de toute façon, sont périmés et font l'objet d'une révision.
  6058. Note 1051
  6059. Conférence internationale du Travail, 83e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1996) (RCE, 1996), p. 93. Voir également, d'une manière générale, les pages 91 à 93.
  6060. Note 1052
  6061. Conférence internationale du Travail, 79e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1992), pp. 27/41.
  6062. Note 1053
  6063. Conférence internationale du Travail, 82e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1995), paragr. 139 (RCE, 1996), voir supra note 1051 et p. 93 du rapport III (partie 4A) de 1996.
  6064. Note 1054
  6065. Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996), paragr. 165.
  6066. Note 1055
  6067. Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, Rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996), paragr. 169.
  6068. Note 1056
  6069. Réclamation présentée en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT contre le gouvernement du Myanmar (anciennement la Birmanie), pour ses violations de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (convention no 29 de l'Organisation internationale du Travail), ratifiée par la Birmanie en 1955. Le Directeur général du Bureau international du Travail a été saisi le 25 janvier 1993 de cette réclamation par la Confédération internationale des syndicats libres (dossier CISL -- Réclamation en vertu de l'article 24).
  6070. Note 1057
  6071. Voir, d'une manière générale: BIT, Conseil d'administration, rapport du Directeur général, deuxième rapport supplémentaire, rapport du Comité chargé d'examiner la réclamation présentée par la Confédération internationale des syndicats libres en vertu de l'article 24 de la Constitution, alléguant l'inexécution de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, par le Myanmar (Genève, novembre 1994), document GB.261/13/7 ("rapport établi conformément à l'article 24").
  6072. Note 1058
  6073. BIT, Conseil d'administration, procès verbaux de la 261e session, document GB.261/PV(Rev.) (Genève, nov. 1994), paragr. 61; (RCE, 1996), voir note 1051 précédente relative au rapport III (partie 4A), p. 93.
  6074. Note 1059
  6075. Réclamation présentée en vertu de l'article 24, voir note 1056 ci-dessus, note au point 6.
  6076. Note 1060
  6077. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 12, 14-19.
  6078. Note 1061
  6079. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 42 (communications de mai et d'octobre 1993).
  6080. Note 1062
  6081. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 20, 21, 25-40 et 48, respectivement.
  6082. Note 1063
  6083. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 48.
  6084. Note 1064
  6085. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 49.
  6086. Note 1065
  6087. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 50. Sur la base de ces éléments, ayant acquis la conviction qu'il n'est pas question de période transitoire dans le cas du Myanmar, le comité constitué en vertu de l'article 24 n'a pas examiné la question de savoir si le portage forcé serait conforme aux garanties prévues aux articles 8 à 16, 18, 23 et 24 de la convention no 29. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 51.
  6088. Note 1066
  6089. Rapport établi conformément à l'article 24, visé à la note 1057 ci-dessus, paragr. 52.
  6090. Note 1067
  6091. Anti-Slavery International: Ethnic groups in Burma (Londres, 1994( (Ethnic groups), p. 91.
  6092. Note 1068
  6093. Australian Council for Overseas Aid: Slave labour in Burma: An examination of the SLORC's forced labour policies (mai 1996) (ACFOA), pp. 28-29; Ethnic groups, voir p. 91 de la référence mentionnée sous la note 1067.
  6094. Note 1069
  6095. Voir également commentaires du gouvernement du Myanmar adressés au comité constitué en vertu de l'article 24, notes 1061 et 1062 supra et paragr. 20 à 41 du texte correspondant.
  6096. Note 1070
  6097. Ethnic groups, p. 89 de la référence citée sous la note 1067 ci-dessus.
  6098. Note 1071
  6099. Ethnic groups, p. 89 de la référence citée sous la note 1067 ci-dessus.
  6100. Note 1072
  6101. Pour une description générale de la pratique du portage forcé, voir par exemple Amnestie internationale: Myanmar: The climate of fear continues -- Members of ethnic minorities and political prisoners still targeted, AI: ASA 16/06/93 (octobre 1993) ("Climate of fear"), pp. 13-21; Human Rights Watch/Asia: Abuses linked to the fall of Manerplaw, vol. 7, no 5 (mars 1995) ("Manerplaw"), p. 12. "Divers rapports, photographies, enregistrements vidéos et éléments matériels de preuves attestés par le Rapporteur spécial indiquent que les pratiques du travail forcé et du portage obligatoire ... sont encore largement répandues au Myanmar...". Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1996, document des Nations Unies E/CN.4/1996/65 (5 fév. 1996) ("Rapport du Rapporteur spécial, 1996"), paragr. 173.
  6102. Note 1073
  6103. Pour plus de détails sur la législation, voir notes 1145 à 1150 infra et texte correspondant.
  6104. Note 1074
  6105. Rapport du Rapporteur spécial, 1996, voir paragr. 173 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus.
  6106. Note 1075
  6107. Amnesty International: Myanmar: No place to hide; Killings. Abductions against ethnic Karen villagers and refugees, AI: ASA 16/13/95 (juin 1995) ("No place to hide"), p. 25.
  6108. Note 1076
  6109. Voir notes 1061 et 1062 ci-dessus et texte correspondant (commentaires du gouvernement du Myanmar adressés au comité constitué en vertu de l'article 24).
  6110. Note 1077
  6111. Ethnic groups, voir chap. III de la référence citée sous la note 1067 (mères de famille et femmes enceintes contraintes de travailler comme porteuses); et Images Asia: No childhood at all: A report on child soldiers in Burma (mai 1996), p. 6 (enfants réquisitionnés comme porteurs).
  6112. Note 1078
  6113. Amnesty International: Portering and forced labour: Amnesty International's concerns, AI: ASA 16/42/96 (sept. 1996), pp. 2 et 3, Amnesty International: Conditions in prisons and labour camps, AI: ASA 16/22/95 (sept. 1995) ("Conditions carcérales"), pp. 1, 6.
  6114. Note 1079
  6115. Conditions carcérales, voir pp. 1, 6 de la référence mentionnée sous la note 1078 ci-dessus.
  6116. Note 1080
  6117. Voir, par exemple, Amnesty International: Myanmar: Human rights after seven years of military rule, AI: ASA 16/23/95 (oct. 1995) ("Seven years"), pp. 24-25; No place to hide, p. 27 de la référence mentionnée sous la note 1065 ci-dessus; Amnesty International: Human rights still denied, AI: ASA 16/18/94 (nov. 1994) ("Denied"), pp. 14-21.
  6118. Note 1081
  6119. Voir notes 1090 à 1093 ci-après et texte correspondant.
  6120. Note 1082
  6121. Voir, par exemple, Asia Watch: Burma: Rape, forced labour and religious persecution in North Arakan State (mai 1992) ("Arakan State"), p. 13.
  6122. Note 1083
  6123. Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1995, document des Nations Unies E/CN.4/1995/65 (12 janv. 1995) ("Rapport du Rapporteur spécial, 1995"; Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/57 (16 fév. 1994) ("Rapport du Rapporteur spécial, 1994", paragr. 49; voir également Rapport du Rapporteur spécial, 1996, paragr. 114 et 115 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus; Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, 1993, paragr. 79-84, 101-104, 135-138, 222, 228, 229, 231-233.
  6124. Note 1084
  6125. Rapport du Rapporteur spécial sur la torture et les autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/31 (6 janv. 1994), paragr. 401.
  6126. Note 1085
  6127. Voir également Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, 1994, document des Nations Unies E/CN.4/1994/7 (7 déc. 1993), paragr. 448.
  6128. Note 1086
  6129. Voir également Climate of fear, p. 21 de la référence mentionnée sous la note 1072.
  6130. Note 1087
  6131. Rapport du Rapporteur spécial sur la torture, voir note 1081 ci-dessus.
  6132. Note 1088
  6133. Human Rights Watch/Asia: Entrenchment or reform? Human rights developments and the need for continued pressure, vol. 7, no 10 (juillet 1995) ("Entrenchment"), p. 21. La relation ci-après d'un ancien porteur sur la mort d'un autre, son voisin au village, est représentative des traitements infligés aux porteurs par les troupes du SLORC: "J'entendis Tun Shwe dire au soldat qui le suivait, un homme du rang appartenant au bataillon 531: "Ne me tuez pas, je ferais de mon mieux pour arriver à destination. Maintenant, je ne peux pas porter ma charge, je ne peux pas marcher, mais je vais essayer. Ne me punissez pas, ne me tuez pas'. Dès que Tun Shwe eut prononcé ces mots, le soldat le tua d'une balle de G-4 tirée dans le dos à environ quatre mètres, de sorte que ses viscères apparurent. Après cette exécution, chacun resta muet. Les soldats se contentèrent de dire aux autres porteurs: "Avancez, avancez" tout comme s'ils avaient conduit du bétail." ("No place to hide"), p. 29 de la référence mentionnée sous la note 1075 ci-dessus.
  6134. Note 1089
  6135. Climate of fear, pp. 20-21 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus (jeunes filles de 16 et 17 ans appartenant à des minorités ethniques réquisitionnées pour le portage et violées). Un organisme s'occupant des droits de l'homme ayant entendu un certain nombre de réfugiés dans un camp établi en Thaïlande signale que les femmes ayant été réquisitionnées pour le portage déclarent souvent avoir été violées: "quatre victimes, âgées de 17 à 42 ans, déclarent avoir été enlevées sur leur lieu de résidence ou à proximité dans la localité de Kammamaung. Elles déclarent avoir été violées par les militaires au cours de missions de travail obligatoire de 22 jours consistant à acheminer des obus d'artillerie jusqu'au front, pour l'assaut mené par Tatmadaw sur Manerplaw." ("Ethnic groups"), p. 113 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6136. Note 1090
  6137. Ethnic groups, p. 89 de la référence mentionnée sous la note 1067.
  6138. Note 1091
  6139. Article 19: Burma: Beyond the law, août 1996 ("Beyond the law"), p. 50. Par exemple, dans le cadre d'une offensive du SLORC contre l'Union nationale Karen et l'armée Mong Tai, menée de novembre 1994 à juin 1995, des milliers de porteurs ont été vus en première ligne, des centaines ayant été tués ("Entrenchment"), p. 21 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus.
  6140. Note 1092
  6141. Par exemple, un vieux chef karen du district de Thaton a perdu une jambe après avoir été attaché à une corde puis contraint par le SLORC de trouver un chemin à travers un champ de mines (Ethnic groups), pp. 29-30 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6142. Note 1093
  6143. Dans un cas notoire signalé en 1991, deux fillettes d'une dizaine d'années fréquentant la Papun High School, dans l'Etat de Karen, Naw Aye Hia et Ne Law Win, ont été tuées en marchant sur des mines après avoir été enrôlées de force comme porteurs ("Ethnic groups"), p. 117 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6144. Note 1094
  6145. Rapport du Rapporteur spécial, 1996, paragr. 141 à 144 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus; "Des rapports détaillés, des photographies, des enregistrements vidéos et différents éléments matériels de preuve attestés par le Rapporteur spécial indiquent qu'il est apparemment recouru à des pratiques de travail forcé ... dans le contexte de programmes de développement ... de nombreuses victimes de ces actes sont des populations appartenant à des minorités ethniques. Il s'agit en particulier de paysans, de femmes, de travailleurs journaliers et autres civils sans intention belliqueuse...". Ibid., paragr. 173.
  6146. Note 1095
  6147. RCE, 1995, paragr. 2, p. 109 de la référence mentionnée sous la note 1049 ci-dessus (le gouvernement du Myanmar signale "799 447 personnes travaillant" à titre "de contribution volontaire" à la réalisation de la voie de chemin de fer Aungbon-Loikow); New light of Myanmar, 15 déc. 1993, cité dans Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus (il déclare que 921 753 personnes contribuent à la réalisation de la ligne de chemin de fer Pokokku-Manywa); Beyond the law, p. 49 de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus (des centaines de milliers de personnes touchées); Entrenchment, p. 14 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus (depuis 1992, on estime à environ deux millions le nombre de personnes contraintes de travailler sans rémunération à la réalisation de routes, lignes de chemin de fer et ponts sur tout le territoire); Ethnic groups, p. 84 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus (citation du Working People's Daily du 8 mai 1992 faisant état de plus de 300 000 personnes contribuant "à titre volontaire" à la réalisation de la ligne de chemin de fer Aungbon-Loikow).
  6148. Note 1096
  6149. Pour une discussion plus approfondie sur le travail forcé et le tourisme, voir notes 1142 et 1143 ci-après et texte correspondant.
  6150. Note 1097
  6151. En 1995, le gouvernement du Myanmar a admis la "contribution au travail" de populations dans le cadre de sept nouveaux projets de lignes de chemin de fer. Lettre du Représentant permanent de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève datée du 18 mars 1996 ayant pour objet un mémorandum d'observations et de commentaires concernant le document E/CN.4/1996/65 du 5 fév. 1996 relatif à l'Union du Myanmar, document des Nations Unies E/CN.4/1996/139 (21 mars 1996) ("Memorandum of Observations"), p. 21; Ethnic groups, p. 84 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus. On citera à titre d'exemple de projets de développement impliquant un recours au travail forcé une ligne de chemin de fer allant de Ye à Tavoy, dans la circonscription de Tenasserim, célèbre pour avoir nécessité la réquisition de dizaines de milliers de civils soumis à du travail forcé; Seven years, pp. 25-26 de la référence mentionnée sous la note 1080 ci-dessus. Article 19: Paradise lost? The suppression of environmental rights and freedom of expression in Burma (Londres, sept. 1994) ("Paradise lost"), p. 6; et voir discussion des notes 1130 à 1137 ci-après concernant la prospection des réserves de gaz et de pétrole et le texte correspondant; construction d'une route dans l'Etat d'Arakan, région particulièrement sous-développée qui a connu, ces dernières années, l'exode puis le retour de quelque 250 000 musulmans de l'ethnie Rohingya; Climate of fear, note 1072 ci-dessus; la population locale Rohingya subit régulièrement de manière disproportionnée des enrôlements de force (Beyond the law, p. 49 de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus) au fur et à mesure que le développement nécessite une plus forte emprise de la part du SLORC; et une route allant de Putao à Sumprabum dans l'Etat de Kachin, à la réalisation de laquelle 3 000 personnes étaient contraintes de travailler fin 1994, Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus. Pour une représentation cartographique des différents projets de construction réalisés au Myanmar en recourant au travail forcé, voir ACFOA, note 1068 ci-dessus, appendices A et B.
  6152. Note 1098
  6153. Voir, par exemple, "Burma using forced labour on tourist projects", New York Times, 17 juillet 1994. On peut citer au nombre de tels projets le curage des douves du Palais d'or à Mandalay; des informations concourantes permettent d'établir que des milliers de civils ont été réquisitionnés par le SLORC pour curer les douves à la main: voir par exemple The Bangkok Post du 22 janvier 1995; la construction d'aéroports, souvent réalisée, d'après ce que l'on a pu constater, par une main-d'oeuvre forcée; non moins de 30 000 personnes auraient été employées sans être rémunérées pour réaliser l'aéroport de Bassein (The Guardian, Londres, le 12 juillet 1994); et un barrage au lac Inlayl, réalisé en rapport avec un projet de développement touristique à Moebye, sur la rivière Biluchaung; des villageois et d'autres civils ont été réquisitionnés pour nettoyer le lac à la main.
  6154. Note 1099
  6155. En 1996, le gouvernement du Myanmar a admis que des détenus "fournissent leur travail sur des chantiers" et, donnant une idée de l'étendue de cette pratique, a déclaré que "plus de 23 000 personnes ... ont vu leur peine réduite d'au moins un tiers" en conséquence: Mémorandum d'observations, p. 21 de la référence mentionnée sous la note 1077 ci-dessus.
  6156. Note 1100
  6157. Conditions dans les prisons et les camps de travail, note 1078 ci-dessus. C'est ainsi que, par exemple, un moine de Mandalay âgé de 51 ans serait mort de malnutrition et de malaria le 18 novembre 1994 après avoir travaillé dans une zone infestée. Il avait été arrêté pour avoir participé au mouvement prodémocratique de 1988-89 et condamné à cinq ans de travaux forcés dans l'Etat de Kachin. Mémorandum d'observations, p. 3 de la référence mentionnée sous la note 1077 ci-dessus.
  6158. Note 1101
  6159. Département d'Etat des Nations Unies, Foreign economic trends report: Burma (juin 1996) ("Economic trends"), p. 88. ("Les éléments dont on dispose portent à croire que l'utilisation de main-d'oeuvre non rémunérée (par le gouvernement) dans le cadre de projets régionaux et nationaux, de même que dans le cadre de projets de développement rural de niveau local, s'est considérablement intensifiée").
  6160. Note 1102
  6161. Ethnic groups, p. 86 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6162. Note 1103
  6163. Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus.
  6164. Note 1104
  6165. Voir, par exemple, Human Rights Watch/Asia: Burma: The Rohingya Muslims, ending a cycle of exodus? Vol. 8, no 9(C) (sept. 1996), p. 30.
  6166. Note 1105
  6167. Voir, par exemple, Beyond the law, p.50 de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus; Climate of fear, p. 13 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus.
  6168. Note 1106
  6169. Voir, par exemple, Paradise lost, p. 20 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6170. Note 1107
  6171. Voir, par exemple, Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 1108 ci-dessus (de nombreuses personnes seraient mortes de malaria au cours de la réalisation par le travail forcé d'une route à Patao).
  6172. Note 1108
  6173. Dans un entretien publié par le Bangkok Post du 18 octobre 1992, le lieutenant-colonel Than Han, du programme de développement des zones frontalières, expliquait que les montagnards souffrent du changement climatique lorsqu'ils descendent travailler dans les plaines: "Ils transpirent énormément, perdent du poids et ont des problèmes de santé." Ethnic groups, p. 88 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6174. Note 1109
  6175. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires s'est déclaré préoccupé par "les informations persistantes faisant état de recours arbitraire et excessif à la force de la part des membres des forces de sécurité, qui semblent jouir d'une totale impunité", voir note 1085 ci-dessus.
  6176. Note 1110
  6177. Rapport du Rapporteur spécial, 1995, paragr. 230 de la référence mentionnée sous la note 1083 ci-dessus.
  6178. Note 1111
  6179. "Les personnes âgées et infirmes sont particulièrement vulnérables; il arrive qu'elles soient battues lorsqu'elles prennent un peu de répit ou qu'on estime qu'elles travaillent trop lentement." Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus.
  6180. Note 1112
  6181. "Dans la région du Nord-Ouest, un ... visiteur de l'Etat de Chin signale que sur le chantier de la ligne de chemin de fer Pakoku-Kalemyo une femme a été tuée pour s'être arrêtée deux fois de travailler afin de nourrir son bébé. Cette femme avait été contrainte d'emmener avec elle son bébé sur le chantier du fait que tous ses proches avaient également été réquisitionnés." Entrenchment, p. 15 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus.
  6182. Note 1113
  6183. Une chrétienne de l'ethnie Karen originaire de la localité de Kyaukkyi ayant réussi à s'enfuir en Thaïlande déclare avoir été violée sous la menace d'un couteau par un sergent supervisant le travail de son équipe chargée de creuser des fossés. Voir Ethnic groups, p. 113 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6184. Note 1114
  6185. Voir Ethnic groups, p. 113 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6186. Note 1115
  6187. Rohingyas, p. 30 de la référence mentionnée sous la note 1104 ci-dessus.
  6188. Note 1116
  6189. Rohingyas, p. 30 de la référence mentionnée sous la note 1104 ci-dessus.
  6190. Note 1117
  6191. ACFOA, p. 9 de la référence mentionnée sous la note 1068 ci-dessus.
  6192. Note 1118
  6193. Cf. article 19: Fatal silence? Freedom of expression and the right to health in Burma ("Health") (Londres, juillet 1996), p. 107 (l'UNICEF estime la mortalité maternelle au Myanmar à 140 pour 100 000, en raison du manque d'accès à l'information sur la santé de la reproduction ainsi que du caractère illégal de l'avortement; 50 pour cent des décès maternels résulteraient d'avortements illégaux).
  6194. Note 1119
  6195. Cf. article 19: Fatal silence? Freedom of expression and the right to health in Burma ("Health") (Londres, juillet 1996), p. 103.
  6196. Note 1120
  6197. Voir, par exemple, Climate of fear, p. 20 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus.
  6198. Note 1121
  6199. Paradise lost, p. 6 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6200. Note 1122
  6201. Voir, par exemple, Seven years, p. 26 et 27 de la référence mentionnée sous la note 1080 ci-dessus; Human rights still denied, p. 17 et 18 de la référence mentionnée sous la note 1080 ci-dessus; Rohingyas, p. 32 de la référence mentionnée sous la note 1104 ci-dessus.
  6202. Note 1123
  6203. Voir, par exemple, Rohingyas, p. 29 de la référence mentionnée sous la note 1104 ci-dessus ( près de 2 000 kilomètres de routes doivent être construites dans l'Etat d'Arakan pour faciliter les déplacements militaires et le développement du tourisme).
  6204. Note 1124
  6205. Voir également RCE, 1995, note 1049 ci-dessus et texte correspondant (avis de la commission d'experts selon laquelle les chantiers de construction de routes et de lignes de chemin de fer ne correspondent pas à des "menus travaux de village" au sens de la convention no 29).
  6206. Note 1125
  6207. Economic trends, p. 87 de la référence mentionnée sous la note 1101 ci-dessus.
  6208. Note 1126
  6209. Ce pourcentage est vraisemblablement minoré, du fait que les chiffres officiels semblent évaluer les "contributions de la population" sur la base du taux officiel de rémunération journalière. Si les chiffres étaient réajustés pour correspondre aux taux du marché, la valeur de ces "contributions de la population" atteindrait pratiquement 75 pour cent pour les années en question; Economic trends, p. 87 de la référence mentionnée sous la note 1101 ci-dessus.
  6210. Note 1127
  6211. Les crédits en devises octroyés par le SLORC aux forces armées trouvent leur expression dans un contrat de 1,2 milliard de dollars entre le Myanmar et la Chine pour l'acquisition d'armements en 1994; voir également Paradise lost? p. 6 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus; Economic trends, p. 22 et 27 de la référence mentionnée sous la note 1101 ci-dessus (la Chine est l'un des principaux fournisseurs d'acquisitions militaires; les dépenses d'importations pour la défense sont passées de 20 millions de dollars pour les années 1988 et 1989 à 390 millions de dollars en 1991).
  6212. Note 1128
  6213. Voir, par exemple, Ethnic groups, p. 84 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus; Earth Rights international and Southeast Asian Information Network: Total denial (juillet 1996) ("Total denial"), p. 33 (réalisation de casernes militaires sur l'île de Heinze, en liaison avec la réalisation du gazoduc de Yadana; voir ci-après notes 1130 à 1136 et texte correspondant); la population de l'Etat d'Arakan a elle aussi été réquisitionnée pour la construction de casernes pour le NaSaKa, une unité de la police des frontières; Rohingyas, p. 29 de la référence mentionnée sous la note 1084 ci-dessus.
  6214. Note 1129
  6215. Voir, par exemple, Earth Rights international and Southeast Asian Information Network: Total denial (juillet 1996) ("Total denial"), p. 36 (réalisation de casernes à proximité du tracé du gazoduc); Manerplaw, pp. 12-14 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus (villageois réquisitionnés par l'armée pour la réalisation de latrines et pour des tâches de cuisine et de jardinage ainsi que de coupe de bambous); Amnesty International: Myanmar: Human rights violation against Muslims in the Rakhine (Arakan) State, AI: ASA 16/06/92 (oct. 1992) ("violations des droits de l'homme"), p. 6 (des Musulmans déclarent avoir travaillé sous la contrainte à la réalisation de camps militaires, à la construction ou à l'amélioration de routes entre les camps et, à l'intérieur des camps, à la garde de troupeaux, à la réalisation de bunkers et de latrines ainsi qu'au blanchissage des uniformes des militaires).
  6216. Note 1130
  6217. Voir, par exemple, Ethnic groups, p. 89 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus (depuis 1992, plus de 30 000 personnes auraient été réquisitionnées pour la construction de la ligne de chemin de fer Ye-Tavoy).
  6218. Note 1131
  6219. Paradise lost?, pp. 16-20 de la référence mentionnée sous la note 57 ci-dessus. Un gazoduc doit être construit à partir d'un site de la mer d'Andaman, pour longer l'île de Heinze, traverser ensuite sur près de 100 kilomètres la circonscription de Tenasserim avant d'entrer en Thaïlande, lieu de consommation finale du gaz. Voir, par exemple, Total denial, p. 1 de la référence mentionnée sous la note 1128.
  6220. Note 1132
  6221. La réalisation du tracé du gazoduc a consisté essentiellement à défricher la jungle à la main. Les travaux d'infrastructure associés incluent la réalisation de casernes dans le voisinage pour loger les bataillons du SLORC affectés à la région pour assurer la sécurité du gazoduc. Voir, par exemple, Total denial, p. 1 de la référence mentionnée sous la note 1128.
  6222. Note 1133
  6223. Voir, par exemple, John Doe I., etc. et. al. v. Unocal Corp. et. al., numéro d'archives 96-6959 LGB (C.D. Cal.), plainte portée devant la Cour fédérale des Etats-Unis, 3 octobre 1996, paragr. 37-182; National Coalition Government of the Union of Burma and the Federation of Trade Unions of Burma v. Unocal, Inc. (plaidoiries établies par anticipation de la démonstration du caractère prépondérant des preuves produites). Voir également lettre datée du 21 mars 1995, adressée par Beth Stephen, du Center for Constitutional Rights, à M. Roger Beach, CEO, Unocal Corporation, p. 2.
  6224. Note 1134
  6225. Memorandum of Observations, pp. 20 et 21 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus (il n'y a pas de travail forcé au Myanmar; la population fournit son travail à titre bénévole).
  6226. Note 1135
  6227. Voir, par exemple, Total denial, p. 9 de la référence mentionnée sous la note 1128 ci-dessus.
  6228. Note 1136
  6229. Paradise lost?, p. 19 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus; il a été constaté des "divergences considérables" entre les divers organismes dénonçant des pratiques de travail forcé dans la région, et les compagnies pétrolières associées au projet, de même qu'en ce qui concerne le rapport entre la ligne de chemin de fer et le gazoduc. Il n'en reste pas moins, en tout état de cause, que l'achèvement de la ligne de chemin de fer facilitera les transports de troupes du SLORC et l'acheminement de leurs équipements dans la région, la partie déjà réalisée étant utilisée à cette fin; Total denial, p. 14 de la référence mentionnée sous la note 1128 ci-dessus.
  6230. Note 1137
  6231. Ethnic groups, pp. 88-89 de la référence mentionnée sous la note 1067 ci-dessus.
  6232. Note 1138
  6233. Voir notes 1096 à 1098 ci-dessus et texte correspondant.
  6234. Note 1139
  6235. Memorandum of Observations, p. 16 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus; "autres informations concernant la réalisation de l'axe routier Yangon-Mandalay", Myanmar News Agency, 23 janv. 1996.
  6236. Note 1140
  6237. Memorandum of Observations, p. 16 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6238. Note 1141
  6239. Memorandum of Observations, p. 20 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus, (partie intitulée "Contribution traditionnelle sous forme de travail", en rapport avec l'obtention de grâces par des "contributions sous la forme de travail"); pratiques que l'OIT assimile au travail forcé. Voir notes 1052 à 1066 ci-dessus et texte correspondant.
  6240. Note 1142
  6241. Paradise lost?, p. 24 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus. Au 15 juillet 1995, les investissements étrangers comptabilisés dans le secteur de l'hôtellerie et du tourisme au Myanmar venaient au deuxième rang, immédiatement après le secteur du gaz et du pétrole; Jeremy Mark, "Western firms remain hesitant about investing in Burma in contrast to Asians' enthusiasm", Asian Wall Street Journal, semaine du 4 sept. 1995, pp. 1, 8.
  6242. Note 1143
  6243. Voir, par exemple, Burma Action Group: Burma. The alternative guide (janv. 1996), p. 21, référence aux annexes III et IV.
  6244. Note 1144
  6245. N. Chan: "A culture of coercion", Burma Issues, janv. 1995, pp. 2-3.
  6246. Note 1145
  6247. Voir loi de 1908 sur les villages, s. 12 (chapeau) et loi de 1907 sur les villes, s. 9A, notes 1146 à 1150 ci-après et texte correspondant. Les plaignants s'appuient sur une source extrêmement fiable et produiront des exemplaires desdites lois dès que ceux-ci seront disponibles.
  6248. Note 1146
  6249. Loi de 1908 sur les villages, in Burma Code, vol. VI (1979) (partie pertinente) (c'est nous qui soulignons).
  6250. Note 1147
  6251. Memorandum of Observations, p. 22 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6252. Note 1148
  6253. Voir notes 1052 à 1066 ci-dessus et texte correspondant.
  6254. Note 1149
  6255. Le 19 février 1992, le SLORC a annoncé dans le New light of Myanmar l'abrogation d'un grand nombre de lois, ayant constaté qu'elles "n'étaient plus conformes à une situation qui avait changé, qu'elles n'étaient plus appliquées depuis très longtemps et qu'il n'existait aucune raison pour qu'elles le soient à l'avenir..." Conseil d'Etat pour la restauration de la loi et de l'ordre public, loi no 1/92, The Working People's daily, 20 fév. 1992, pp. 1, 7 et 8. La liste de quelque 137 lois était jointe en annexe. La loi no 4/93 du SLORC annonçait de même l'abrogation de 14 autres lois, The Working People's Daily, 1er avril 1993, pp. 1, 6. En mars 1996, le SLORC annonçait que 151 lois avaient été abrogées, 35 lois "anciennes" et 78 lois "subsidiaires" étaient également déclarées abrogées et remplacées par de nouveaux instruments, Memorandum of Observations, p. 18 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6256. Note 1150
  6257. En 1996, le gouvernement déclarait avoir "engagé le processus de modification de ces deux instruments...", Memorandum of Observations, p. 22 de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus; cette déclaration a ensuite été expliquée par un représentant du gouvernement devant la Commission de la Conférence en juin, lequel a indiqué qu'un comité constitué pour superviser la révision de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes s'était réuni trois fois l'année précédente, en conséquence de quoi un projet de nouvelle législation unifiée avait été soumis à l'organe central de contrôle de la législation pour approbation, Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire (Genève, 1996, p. 14/56); voir également la discussion relative à la procédure de la Commission de la Conférence, notes 1053 à 1055 ci-dessus et texte correspondant. La teneur de ce projet de législation n'a pas été révélée. Voir également la déclaration du gouvernement à la commission d'experts en 1968, note 1041 ci-dessus et texte correspondant.
  6258. Note 1151
  6259. Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le Myanmar a obtenu copie de certaines directives secrètes concernant la pratique du travail forcé lorsqu'il s'est rendu sur place en 1995, rapport du Rapporteur spécial, 1996, add. 2, 3 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus.
  6260. Note 1152
  6261. Rapport du Rapporteur spécial, 1996, add. 2, 3 de la référence mentionnée sous la note 1072 ci-dessus, paragr. 141.
  6262. Note 1153
  6263. Burma Code, vol. VIII (1979) (partie pertinente) (c'est nous qui soulignons).
  6264. Note 1154
  6265. Conférence internationale du Travail, 14e session, Genève, 1930, Compte rendu des travaux, p. 691, mentionné dans Conférence internationale du Travail, 65e session, rapport III (partie 4B), rapport de la commission d'experts, Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (Genève, 1979) ("Etude d'ensemble de 1979"), paragr. 21, note 1043; et dans Conférence internationale du Travail, 52e session, rapport III (partie 4), rapport de la commission d'experts, Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (Genève, 1968) ("Etude d'ensemble de 1968"), paragr. 27, note 1043.
  6266. Note 1155
  6267. Selon les termes de l'article 1 1) de cette convention. En outre, le terme de "peine" doit être compris en association et à la lumière de l'autre partie de la définition du "travail forcé ou obligatoire", selon laquelle l'individu accomplissant ledit travail ou lesdits services ne s'est pas offert pour cela de son plein gré, voir article 2 1) de la convention.
  6268. Note 1156
  6269. Loi de 1908 sur les villages, s. 12, loi de 1907 sur les villes, s. 9A. Les dispositions pertinentes sont citées in extenso dans la partie III.C.1 ci-dessus. La commission d'experts et la Commission de la Conférence ont dit l'une et l'autre que l'existence et l'application de ces lois sont incompatibles avec les obligations du Myanmar en vertu de la convention no 29. Voir notes 1045 à 1055 ci-dessus et texte correspondant.
  6270. Note 1157
  6271. Voir RCE, 1996, p. 89 de la référence mentionnée sous la note 1051 ci-dessus (cas du Japon: conditions dans lesquelles des Coréennes destinées à servir de "chair à plaisir" ont été contraintes de fournir des prestations sexuelles pendant la seconde guerre mondiale, ces conditions étant assimilables à "un esclavage sexuel", lequel rentre dans ce qu'interdit la convention no 29; les femmes en question auraient eu droit à des salaires et à d'autres prestations au titre de l'emploi).
  6272. Note 1158
  6273. Voir, par exemple, "Le travail des enfants", document du BIT GB.265/2 (Genève, 1996), paragr. 32 (la convention no 29 "donne à l'OIT la possibilité d'examiner les pratiques en matière de travail des enfants qui correspondent à un travail forcé au sens de la convention"; c'est ce qu'elle fait "depuis une dizaine d'années").
  6274. Note 1159
  6275. Voir discussion dans la partie IV.D.4 ci-après.
  6276. Note 1160
  6277. Quant à l'incidence du paiement sur les exceptions visées à l'article 2 2), voir note 1190 ci-après et texte correspondant.
  6278. Note 1161
  6279. US Committee for Refugees, mission de l'USCR au Bangladesh (20 juin-1er juillet 1996) (Washington, DC, 1996) (des réfugiés originaires de l'Etat d'Arakan, parvenus récemment au Bangladesh signalent que les Rohingyas sont assujettis de manière disproportionnée au travail forcé et que ces périodes de travail forcé atteignent plusieurs semaines par mois, réduisant en conséquence le temps qui leur reste pour travailler leurs terres); Beyond the law, pp. 46 à 49 de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus; Amnesty International: Myanmar: Human rights still denied, AI: ASA 16/8/94 (nov. 1994), pp. 15-17.
  6280. Note 1162
  6281. Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes, Genève 1996, pp. 14/56-14/58.
  6282. Note 1163
  6283. Voir discussion sous les notes 1128 et 1129 ci-dessus et texte correspondant.
  6284. Note 1164
  6285. Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996), pp. 14/61-14/63.
  6286. Note 1165
  6287. A ce jour, de 800 000 personnes (déclaration des délégués travailleurs à la Commission de la Conférence, 1996, Conférence internationale du Travail, 83e session, Compte rendu provisoire, rapport de la Commission de l'application des normes (Genève, 1996), p, 14/60) à 2 millions de personnes (estimation de Human Rights Watch/Asia: Entrenchment, p. 14 de la référence mentionnée sous la note 1088 ci-dessus) ont été soumises au travail forcé.
  6288. Note 1166
  6289. RCE, 1993, note 1047 ci-dessus, cas du Myanmar, paragr. 3; RCE, 1996, note 1051 ci-dessus, paragr. 3; voir également note 1049 ci-dessus et texte correspondant.
  6290. Note 1167
  6291. Rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 52, de la référence mentionnée sous la note 1057 ci-dessus.
  6292. Note 1168
  6293. Voir notes 1051 et 1052 ci-dessus et texte correspondant.
  6294. Note 1169
  6295. Voir notes 1125-1127 ci-dessus et texte correspondant.
  6296. Note 1170
  6297. Voir notes 1130-1137 ci-dessus et texte correspondant.
  6298. Note 1171
  6299. Voir note 1097 ci-dessus et texte correspondant.
  6300. Note 1172
  6301. Voir note 1098 ci-dessus et texte correspondant.
  6302. Note 1173
  6303. Voir note 1144 ci-dessus et texte correspondant.
  6304. Note 1174
  6305. Art. 4 2) de la convention no 29.
  6306. Note 1175
  6307. Art. 4 1) de la convention no 29.
  6308. Note 1176
  6309. La teneur des directives secrètes est discutée sous les notes 1151 et 1152 ci-dessus et dans le texte correspondant.
  6310. Note 1177
  6311. Voir notes 1145-1150 ci-dessus et texte correspondant.
  6312. Note 1178
  6313. Memorandum of Observations, p. 22, de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6314. Note 1179
  6315. Memorandum of Observations, p. 22, de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus, pour ce qui concerne la difficulté d'étudier la législation actuelle du Myanmar, voir Beyond the law, pp. 3-4, de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus.
  6316. Note 1180
  6317. Voir, par exemple, Memorandum of Observations, paragr. 20-23, de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus; communications du gouvernement du Myanmar au comité constitué en vertu de l'article 24, voir paragr. 24 de la référence mentionnée sous la note 1057 ci-dessus; note verbale en date du 4 novembre 1994 de la Mission permanente de l'Union du Myanmar à l'Office des Nations Unies à Genève contenant la réponse au rapport du Rapporteur spécial, 1994 (note 1083 ci-dessus), reproduite dans le rapport provisoire du Rapporteur spécial, document des Nations Unies A/49/594/Add.1 (28 oct. 1994), paragr. 3 (aux paragraphes 24 à 28 de sa note verbale, le gouvernement réitère sa position selon laquelle le recrutement des porteurs serait conforme à la législation, ils seraient bien traités et une réglementation existerait en la matière).
  6318. Note 1181
  6319. Voir la discussion correspondante dans la partie III ci-dessus.
  6320. Note 1182
  6321. Voir, d'une manière générale, OIT, Conseil d'administration, procès-verbaux de la 261e session, document GB.261/PV(Rev.) (Genève, nov. 1994), paragr. 61.
  6322. Note 1183
  6323. Conférence internationale du Travail, 75e session, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1988) ("RCE, 1988"), p. 79 (cas du Burundi: mesures à prendre pour assurer que la population est informée de l'abrogation de la législation qui permettait jusque-là d'imposer du travail forcé). Voir RCE, 1993, p. 116, de la référence mentionnée sous la note 1047 ci-dessus (cas du Libéria: la persistance du travail forcé après l'abrogation de la législation qui l'autorisait jusque-là démontre la nécessité d'assurer la publicité des instruments abrogateurs).
  6324. Note 1184
  6325. RCE, 1993, p. 98, de la référence mentionnée sous la note 1047 ci-dessus (cas du Brésil: le gouvernement était prié de prendre des mesures systématiques, adaptées à "l'immensité du territoire et aux difficultés qui en résultent...").
  6326. Note 1185
  6327. Conférence internationale du Travail, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1994), p. 148 (cas de la Thaïlande: le gouvernement était prié de prendre des initiatives sur le plan législatif contre l'extension du travail des enfants dans un "cadre juridique exhaustif").
  6328. Note 1186
  6329. Conférence internationale du Travail, rapport III (partie 4A), Rapport de la commission d'experts (Genève, 1994), p. 119, cas du Libéria (le gouvernement doit concourir au strict respect de l'interdiction du travail forcé en assurant une inspection du travail adéquate, notamment dans le secteurs réputés pour être touchés par ce problème).
  6330. Note 1187
  6331. Voir notes 1151, 1152 ci-dessus et texte correspondant.
  6332. Note 1188
  6333. Voir notes 1190-1205 ci-après et texte correspondant.
  6334. Note 1189
  6335. Voir note 1152 ci-dessus et texte correspondant.
  6336. Note 1190
  6337. En exceptant certains types de travaux qui seraient autrement considérés comme "travail forcé ou obligatoire", l'article 2 2) reste muet quant à la question du paiement. Ce silence signifie la non-pertinence de la question du paiement quant à déterminer si tel type de pratique constitue une exception envisagée par la convention. Voir également la discussion relative à la relation entre paiement et coercition, sous les notes 1159 et 1160 ci-dessus et dans le texte correspondant.
  6338. Note 1191
  6339. Voir, par exemple, Memorandum of Observations, paragr. 10-11, de la référence mentionnée sous la note 1097 ci-dessus.
  6340. Note 1192
  6341. Voir notes 1072-1074 ci-dessus et texte correspondant (procédés de réquisition pour le portage et autres pratiques de travail forcé).
  6342. Note 1193
  6343. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 34, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6344. Note 1194
  6345. Voir, d'une manière générale, partie III ci-dessus (durée des missions, caractère pénible du travail ou du portage, participation à des activités militaires et au déminage, prestations sexuelles forcées, maladies et lésions corporelles graves ou mortelles).
  6346. Note 1195
  6347. Les prisonniers peuvent choisir de travailler pour des particuliers, pour autant que la relation de travail entre le prisonnier et le particulier bénéficiaire soit comparable à la relation d'emploi librement conclue, Etude d'ensemble de 1979, paragr. 97, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6348. Note 1196
  6349. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 97, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus, paragr. 94 et note 1044 (renvoyant à l'Etude d'ensemble de 1968 (note 1154 ci-dessus), au paragr. 78 et se référant de même à la Déclaration universelle des droits de l'homme, à la résolution 217A de l'Assemblée générale des Nations Unies, aux articles 7 à 11 du document des Nations Unies A/810 (1948); ainsi qu'au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, adopté par la résolution no 2200 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 16 décembre 1966 et entré en vigueur le 23 mars 1976, 21e session ordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies, supp. no 16, document des Nations Unies A/6316, art. 14, 15).
  6350. Note 1197
  6351. Pour une analyse du fonctionnement des tribunaux militaires, par rapport aux normes internationales auxquelles l'étude d'ensemble se réfère, se reporter à la note 1154 ci-dessus: Lawyers Committee for Human Rights: Summary injustice: Military tribunals in Burma (avril 1991) ("Summary injustice"); Beyond the law, pp. 34 à 40 de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus (respect d'une procédure équitable selon les normes internationales par les tribunaux civils ou militaires du Myanmar); Commission internationale de juristes: The Burmese way: To where? Report of a mission to Myanmar (Genève, déc. 1991), pp. 37-54 (chap. 3: Le respect du droit et le système juridique, par rapport à la législation du SLORC et au système des tribunaux militaires).
  6352. Note 1198
  6353. Voir, d'une manière générale, pour une analyse du fonctionnement des tribunaux militaires, par rapport aux normes internationales auxquelles l'étude d'ensemble se réfère, se reporter à la note 1154 ci-dessus: Lawyers Committee for Human Rights: Summary injustice: Military tribunals in Burma (avril 1991) ("Summary injustice"); Beyond the law, pp. 34 à 40 de la référence mentionnée sous la note 1091 ci-dessus (respect d'une procédure équitable selon les normes internationales par les tribunaux civils ou militaires du Myanmar); Commission internationale de juristes: The Burmese way: To where? Report of a mission to Myanmar (Genève, déc. 1991), pp. 37-54 (chap. 3: Le respect du droit et le système juridique, par rapport à la législation du SLORC et au système des tribunaux militaires).
  6354. Note 1199
  6355. Voir, par exemple, Reuters, sept. 96, condamnation sur arrestation de l'aide de Aung San Suu Kyi, accessible sur Internet.
  6356. Note 1200
  6357. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 36, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6358. Note 1201
  6359. Un seul groupe dissident est encore en conflit ouvert avec le gouvernement. Voir, par exemple, la déclaration de Son Excellence U Ohn Gyaw, président de la délégation de l'Union du Myanmar aux Nations Unies, New York (3 oct. 1995), p. 5.
  6360. Note 1202
  6361. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 66, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus, renvoyant à l'Etude d'ensemble de 1968, paragr. 54, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6362. Note 1203
  6363. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 37, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6364. Note 1204
  6365. RCE, 1988, p. 98, de la référence mentionnée sous la note 1153 ci-dessus (cas de la Tanzanie: on ne saurait assimiler à de menus travaux de village le travail forcé, imposé par la législation, pour la réalisation d'un programme de développement agricole ou pastoral, la construction d'ouvrages ou de bâtiments destinés au bien-être social des résidents, l'établissement d'une industrie ou la construction d'un ouvrage d'utilité publique).
  6366. Note 1205
  6367. RCE, 1988, p. 98, de la référence mentionnée sous la note 1153 ci-dessus (cas de la Tanzanie: on ne saurait assimiler à de menus travaux de village le travail forcé, imposé par la législation, pour la réalisation d'un programme de développement agricole ou pastoral, la construction d'ouvrages ou de bâtiments destinés au bien-être social des résidents, l'établissement d'une industrie ou la construction d'un ouvrage d'utilité publique).
  6368. Note 1206
  6369. Rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 50-51, de la référence mentionnée sous la note 1057 ci-dessus. La convention no 29 prévoit que les Membres peuvent encore recourir au travail forcé ou obligatoire après ratification de cet instrument "pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties" stipulées par les articles qui suivent, article 1 2). Ces garanties incluent les dispositions des articles 7 à 19 et 22 à 24 de la convention no 29, Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6370. Note 1207
  6371. Les débats des organes de contrôle de l'OIT sont, à juste titre, considérés comme une source de droit international du travail, à laquelle s'attache un certain poids. Voir, d'une manière générale, Valticos: Le droit international du travail (1979), pp. 61-62.
  6372. Note 1208
  6373. Voir note 1041 ci-dessus et texte correspondant.
  6374. Note 1209
  6375. Article 1 3).
  6376. Note 1210
  6377. Voir note 1154 ci-dessus et texte correspondant.
  6378. Note 1211
  6379. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6380. Note 1212
  6381. Etude d'ensemble de 1968, paragr. 22, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus (l'engagement en question consiste à supprimer le travail forcé ou obligatoire et, une fois que la convention est appliquée dans le pays, à ne pas introduire de nouvelles formes de travail forcé ni à rétablir celles qui ont été abolies).
  6382. Note 1213
  6383. Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6384. Note 1214
  6385. Voir note 1065 ci-dessus et texte correspondant.
  6386. Note 1215
  6387. Ou même tout acte d'acquiescement, à faire des essais nucléaires (Australie contre France) (Nouvelle-Zélande contre France), jugement du 20 décembre 1976, CIJ.
  6388. Note 1216
  6389. Ou même tout acte d'acquiescement, à faire des essais nucléaires (Australie contre France) (Nouvelle-Zélande contre France), jugement du 20 décembre 1976, CIJ, pp. 269-270, paragr. 50-51 et pp. 474-5, paragr. 52-53.
  6390. Note 1217
  6391. (Australie contre France) (Nouvelle-Zélande contre France), jugement du 20 décembre 1976, CIJ, p. 267, paragr. 44 et pp. 472-3, paragr. 47.
  6392. Note 1218
  6393. Conflit de frontières: arrêt, CIJ, 1986, p. 574, paragr. 40.
  6394. Note 1219
  6395. Plus précisément, il n'est pas question d'une période transitoire dans ce cas; rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 50-51, de la référence mentionnée sous la note 1057 ci-dessus.
  6396. Note 1220
  6397. Plus précisément, il n'est pas question d'une période transitoire dans ce cas; rapport du comité constitué en vertu de l'article 24, paragr. 50-51, de la référence mentionnée sous la note 1057 ci-dessus.
  6398. Note 1221
  6399. Ces conditions et garanties pendant la période transitoire sont précisées aux articles 7 à 19 et 22 à 24 de la convention, Etude d'ensemble de 1979, paragr. 7, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus; voir également Etude d'ensemble de 1968, paragr. 19 et 20, de la référence mentionnée sous la note 1154 ci-dessus.
  6400. Note 1222
  6401. Voir notes 1130 à 1144 ci-dessus et texte correspondant.
  6402. Note 1223
  6403. Voir notes 1125-1127 ci-dessus et texte correspondant.
  6404. Note 1224
  6405. L'article 8 prévoit que la responsabilité de toute décision de recourir au travail forcé, même si elle peut être déléguée, incombe aux autorités civiles supérieures. L'article 23 prévoit qu'une réglementation complète et précise sur l'emploi du travail forcé ou obligatoire doit être promulguée et que cette réglementation doit comporter des règles permettant à toute personne assujettie de présenter des réclamations. L'article 24 prévoit que les règlements concernant l'emploi du travail forcé ou obligatoire doivent être strictement appliqués au moyen de l'inspection.
  6406. Note 1225
  6407. Voir notes 1151 et 1152 ci-dessus et texte correspondant.
  6408. Note 1226
  6409. L'article 9 prévoit qu'avant de recourir au travail forcé, toute autorité ayant le droit d'imposer un tel travail doit d'abord s'assurer que ce travail est "important pour la collectivité appelée à l'exécuter" (article 9 a)); que le travail est d'une nécesaité actuelle ou imminente (article 9 b)); qu'il a été impossible de se procurer la main-d'oeuvre volontaire pour l'exécuter, malgré l'offre de salaires et de conditions de travail au moins égaux à ceux qui sont pratiqués dans le territoire intéressé (article 9 c)); et qu'il ne résultera pas de ce travail un fardeau trop lourd pour la population (article 9 d)).
  6410. Note 1227
  6411. Voir, d'une manière générale, la partie III ci-avant.
  6412. Note 1228
  6413. Voir discussion sous les notes 1200-1202 ci-dessus et texte correspondant concernant l'existence d'une force majeure, au sens de l'article 2 2) d).
  6414. Note 1229
  6415. Voir notes 1094-1127 ci-dessus et texte correspondant.
  6416. Note 1230
  6417. L'article 10 prévoit que le travail forcé ou obligatoire demandé à titre d'impôt doit être progressivement supprimé, sauf sous réserve des mêmes conditions que celles prévues à l'article 9. Voir notes 1226-1229 ci-dessus et texte correspondant. De plus, cet article prévoit que les travailleurs concernés ne doivent pas être obligés de s'éloigner du lieu de leur résidence habituelle et que ce travail soit organisé dans le respect des préceptes religieux et des exigences de la vie sociale et de l'agriculture (art. 10 d), e)).
  6418. Note 1231
  6419. L'article 11 prévoit que seuls les adultes valides de sexe masculin de 18 à 45 ans pourront être assujettis au travail forcé; que leur aptitude au travail doit être déterminé par examen médical, que certaines catégories doivent être exemptées et que les besoins de la collectivité et de l'individu doivent être respectés.
  6420. Note 1232
  6421. Voir, par exemple, note 1076 ci-dessus et texte correspondant.
  6422. Note 1233
  6423. L'article 12 prévoit que le travail forcé ne doit pas excéder 60 jours par an et que toute personne ayant été assujettie à ce travail doit obtenir une attestation pour la période correspondante.
  6424. Note 1234
  6425. Voir note 1075 ci-dessus et texte correspondant.
  6426. Note 1235
  6427. L'article 13 prévoit que les horaires et les taux de rémunération devraient être les mêmes que ceux en usage pour le travail libre et qu'un jour de repos hebdomadaire doit être accordé. Sauf dans le cas du travail forcé conçu comme un impôt, conformément à l'article 10, le travail forcé doit être rémunéré aux taux en usage, et des précautions doivent être prises pour garantir que les personnes assujetties au travail forcé perçoivent leur salaire.
  6428. Note 1236
  6429. L'article 15 prévoit que la législation sur l'indemnisation des travailleurs s'applique de même aux personnes assujetties au travail forcé et que, de toute façon, toute autorité employant un travailleur au travail forcé a l'obligation d'assurer sa subsistance en cas d'incapacité résultant de ce travail forcé.
  6430. Note 1237
  6431. Voir, par exemple, rapport du comité constitué au titre de l'article 24, paragr. 41, de la référence mentionnée sous la note 1057 ci-dessus (ce comité prenait note de l'affirmation du gouvernement du Myanmar selon laquelle la législation concernant l'indemnisation des travailleurs s'applique dans le cas des porteurs).
  6432. Note 1238
  6433. Voir notes 1083 à 1089 ci-dessus et texte correspondant (les porteurs font l'objet d'atteintes flagrantes aux droits de l'homme), et notes 1106 à 1113 ci-dessus (les atteintes flagrantes aux droits de l'homme sont monnaie courante dans le cadre des projets de développement basés sur le travail forcé).
  6434. Note 1239
  6435. L'article 16 prévoit que les personnes soumises au travail forcé ou obligatoire ne doivent pas être transférées dans des régions présentant un danger pour leur santé ou, lorsqu'un tel transfert ne peut être évité, qu'une adaptation progressive doit être prévue. Des mesures analogues doivent être prises dans le cas de personnes assujetties à un travail forcé auquel elles ne sont pas accoutumées.
  6436. Note 1240
  6437. L'article 17 prévoit que, lorsque le travail forcé doit s'étendre sur une période prolongée, des mesures doivent être prises pour assurer la couverture médicale, la subsistance de la famille du travailleur, la prise en charge du coût de transport des travailleurs sur leur lieu de travail et retour (y compris le rapatriement sanitaire), ainsi que le maintien de ce droit pendant deux ans pour le travailleur désireux de rester sur place comme travailleur libre à l'expiration de sa période de travail forcé.
  6438. Note 1241
  6439. L'article 18 prévoit que le travail forcé ou obligatoire pour le transport de personnes ou de marchandises "devra être supprimé dans le plus bref délai possible". Lorsque, pendant la période transitoire, il est fait recours au travail forcé à cette fin, des mesures doivent être prises pour préserver la santé des travailleurs; un règlement doit limiter la durée et la nature de la tâche à accomplir et des mesures doivent être prises pour garantir la subsistance de la collectivité d'où proviennent les travailleurs.
  6440. Note 1242
  6441. Voir, d'une manière générale, les notes 1067 à 1093 ci-dessus et texte correspondant.
  6442. Note 1243
  6443. Selon les autorités, le territoire où se trouve le village fait partie de l'Etat Chin.
  6444. Note 1244
  6445. Selon les autorités, le territoire où se trouve le village fait partie de l'Etat Chin.
  6446. Note 1245
  6447. Selon les autorités, le territoire où se trouve le village fait partie de l'Etat Chin.
  6448. Loi de 1908 sur les villages
  6449. Loi de 1907 sur les villes
  6450. Loi sur l'emploi et la formation
  6451. Loi sur la restriction de l'emploi
  6452. Loi de 1974 sur le Conseil du peuple
  6453. Loi de 1923 sur l'indemnisation des travailleurs
  6454. Constitution de 1974
  6455. Loi sur la citoyenneté de 1948
  6456. Loi sur la citoyenneté de 1982
  6457. Loi de 1959 sur la milice populaire
  6458. Code pénal
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