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Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Malawi (Ratification: 1965)

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La commission prend note des observations du Congrès des syndicats du Malawi (MCTU), reçues le 1er septembre 2023. 
Article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission rappelle qu’en juin 2022, la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (Commission de la Conférence) a noté avec une profonde préoccupation les allégations des syndicats faisant état d’actes de violence et de harcèlement sexuels systématiques à l’encontre des femmes, notamment de viols, d’agressions et de discriminations subis par les travailleuses des plantations de thé et de noix de macadamia. Dans ses conclusions, la Commission de la Conférence a instamment prié le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, en consultation avec les partenaires sociaux, pour: 1) s’assurer que la législation existante sur le harcèlement sexuel est conforme à la convention; 2) organiser des discussions tripartites sur la question du harcèlement sexuel et de la violence sur le lieu de travail en vue de prendre de nouvelles mesures pratiques et concrètes pour assurer la protection effective des travailleurs à cet égard, en droit et dans la pratique; 3) garantir l’accès effectif et le bon fonctionnement des mécanismes nationaux judiciaires et non judiciaires qui examinent les allégations de violation des droits des travailleurs relatives à la discrimination, y compris le harcèlement sexuel et la violence, et fournir aux victimes des recours juridiques appropriés; et 4) continuer à soutenir les mesures prises par la Commission des droits de l’homme du Malawi (MHRC) et le Département de la gestion et du développement des ressources humaines, notamment les campagnes de sensibilisation et la diffusion de la politique relative au harcèlement sexuel sur le lieu de travail et des directives connexes, afin de garantir que les employeurs élaborent et appliquent des politiques efficaces en matière de harcèlement sur le lieu de travail. La commission note également que, comme elle l’avait recommandé dans son observation précédente, dans son rapport, le gouvernement dit qu’il s’efforcera d’entreprendre une étude consacrée aux plantations de thé et aux vergers de noix de macadamia afin de disposer d’éléments éclairant la mise au point d’interventions ciblées dans ce secteur, et qu’il souhaiterait bénéficier de l’assistance technique du BIT et de l’appui financier de l’OIT à cet égard. Le gouvernement ajoute que la MHRC a mené des recherches approfondies afin de fournir des données relatives à l’étendue et à l’ampleur du harcèlement sexuel sur le lieu de travail. La commission note également que, dans le rapport sur l’audit de genre mené dans le pays pour l’Association consultative des employeurs du Malawi (ECAM), en mai 2023, il est dit que, «pour mesurer l’impact des inégalités de genre, de la discrimination, du harcèlement et des abus sur le lieu de travail, il est indispensable que les entreprises puissent présenter et tenir à jour les données ventilées par sexe» (page  42). La commission rappelle également que, dans ses récentes observations finales, le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) s’est dit préoccupé par le manque de données ventilées par sexe, créées et mises à disposition dans différents secteurs, notamment l’éducation, la santé et l’emploi, ainsi que sur la violence à l’égard des femmes, tout en soulignant que ces données étaient indispensables pour éclairer l’élaboration de politiques, la planification de programmes et le suivi des progrès fondés sur des éléments probants en vue d’atteindre les objectifs relatifs à l’égalité des genres. Le CEDAW s’est également dit préoccupé par: 1) les différentes formes de violence fondée sur le genre, dont la violence domestique et la violence sexuelle; 2) le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et dans les espaces commerciaux et le faible taux de signalement de ces cas faute d’information sur les dispositifs correspondants; et 3) la traite des femmes et des filles, les victimes étant trompées par des offres d’emploi frauduleuses et contraintes de devenir des travailleuses domestiques ou de se prostituer dans des lieux privés, hors du champ d’action des inspecteurs du travail (CEDAW/C/MWI/CO/8, 30 octobre 2023, paragr.  21, 23 (a), 33 (d) et 51). La commission note également que le Bureau a effectué une mission au Malawi du 8 au 12 mai 2023 afin de mener des consultations avec les mandants dans le but d’élaborer un plan d’action concernant le secteur du thé au Malawi, dans le cadre d’un projet regroupant plusieurs pays, financé par la Norvège, consacré à la promotion des droits des travailleurs et de l’égalité des genres. La mission a rencontré le ministère du Travail (dont des membres du personnel des bureaux régionaux), l’Association consultative des employeurs du Malawi (ECAM), le Congrès des syndicats du Malawi (MCTU), l’Association des producteurs de thé du Malawi (Tea Association of Malawi Limited, TAML), le Syndicat des travailleurs des plantations et de l’agriculture (PAWU) et plusieurs figures politiques de haut niveau.La commission prie le gouvernement de prendre des mesures pour: i) combattre les différentes formes de violence fondée sur le genre (y compris le viol) et de harcèlement fondé sur le genre (y compris le harcèlement sexuel) sur le lieu de travail, en particulier dans les plantations de thé et les vergers de noix de macadamia; et ii) renforcer son système de collecte de données afin de prendre des décisions fondées sur des données probantes. Prière de fournir des informations sur les résultats obtenus, y compris ceux issus des recherches menées par la Commission des droits de l’homme du Malawi.
Évaluation du cadre juridique existant sur le harcèlement sexuel et de sa conformité avec la convention. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle: 1) la loi de 2013 sur l’égalité des genres est en cours de révision et les suggestions visant à inclure expressément le «harcèlement dans un environnement de travail hostile» dans la définition du harcèlement sexuel (article 6 (1)) et à revoir le critère du «caractère raisonnable» sont en cours d’examen; et 2) dans le cadre du projet de coopération pour le développement OIT/Norvège, une feuille de route nationale a été élaborée pour promouvoir les droits des travailleurs et l’égalité des genres. La commission note également, d’après le rapport du gouvernement, que la politique nationale d’égalité des genres de 2015, le plan d’action national de lutte contre la violence fondée sur le genre, le plan de mise en œuvre et de suivi de la loi sur l’égalité des genres et le plan d’action national sur l’autonomisation économique des femmes sont tous en cours de révision. Elle note en outre: 1) l’adoption de la stratégie nationale d’engagement des hommes en faveur de l’égalité des genres, de la lutte contre la violence fondée sur le genre, du VIH et des droits sexuels et génésiques (2023-2030); 2) la création d’unités d’aide aux victimes au sein de la police; et 3) l’approbation en cours de la politique et des lignes directrices contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail dans la fonction publique. Le gouvernement ajoute qu’une évaluation rapide du cadre législatif et politique visant à promouvoir l’égalité des genres ainsi qu’une analyse des lacunes du cadre juridique et politique en matière d’égalité des genres et de harcèlement sexuel dans le secteur du thé au Malawi ont été validées et que les résultats ont été communiqués aux partenaires sociaux. Ils serviront de base à l’élaboration de stratégies appropriées et à la révision prochaine du droit du travail. La commission prie le gouvernement de veiller à aligner rapidement les cadres juridique et politique nationaux sur la convention, en collaboration avec les partenaires sociaux, notamment en modifiant l’article 6(1) de la loi de 2013 sur l’égalité des genres afin d’inclure expressément le harcèlement dans un environnement de travail hostile dans la définition du harcèlement sexuel et en révisant le critère du «caractère raisonnable». Veuillez fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard ainsi que sur les progrès accomplis dans: i) la mise en œuvre de la feuille de route nationale visant à promouvoir les droits des travailleurs et l’égalité des genres; ii) la révision en cours des politiques et plans d’action susmentionnés; et iii) le suivi de l’évaluation rapide et de l’analyse des lacunes du cadre juridique et politique en matière d’égalité des genres et de harcèlement sexuel.
Discussion tripartite sur la question du harcèlement sexuel et de la violence sur le lieu de travail. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle le Conseil consultatif tripartite sur le travail (TLAC) s’est réuni en mai 2023 et a discuté des questions de harcèlement sexuel. Le TLAC a recommandé que le Malawi ratifie la convention (no 190) sur la violence et le harcèlement, 2019, et renforce les capacités du ministère du Travail et des partenaires sociaux à cet égard. Le gouvernement ajoute que les partenaires sociaux ont commencé à harmoniser leurs politiques et à élaborer des messages de sensibilisation sur la violence et le harcèlement au travail. La commission prie le gouvernement de continuer à encourager les partenaires sociaux à traiter la question du harcèlement sexuel et de la violence sur le lieu de travail et de la tenir informée de tout fait nouveau à cet égard.
Renforcement des capacités et sensibilisation au harcèlement sexuel. La commission note que le gouvernement indique que les inspecteurs du travail continuent d’être formés pour prévenir, identifier et traiter les cas de discrimination dans l’emploi et la profession, y compris le harcèlement sexuel. Le gouvernement indique également qu’il a intensifié ses efforts pour mener des inspections du travail visant à identifier les problèmes de discrimination par le biais du programme Zantchito, financé par l’Union européenne, (en mettant l’accent sur les petites et moyennes entreprises). Le formulaire de l’inspection du travail sera également revu pour couvrir les questions de violence et de harcèlement. À cet égard, la commission souligne l’importance de disposer d’une force d’inspection du travail comptant des hommes et des femmes afin de faciliter l’identification des cas de harcèlement sexuel, car les travailleuses peuvent trouver plus difficile de signaler un cas de harcèlement sexuel sur le lieu de travail à un inspecteur du travail de sexe masculin. La commission se réfère également aux commentaires qu’elle adresse au gouvernement sur l’application de la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, et de la convention (no 129) sur l’inspection du travail (agriculture), 1969. Le gouvernement ajoute que la politique de référence pour le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, élaborée par la Commission des droits de l’homme du Malawi en 2021, est bien accueillie: de nombreuses institutions ont contacté la Commission pour être formées, notamment des sections du service de police du Malawi (unités d’aide aux victimes et ressources humaines), des entreprises privées et des institutions publiques, plusieurs groupes de travail tripartites sur l’égalité des genres et les jeunes des conseils de district, ainsi que des directeurs et des enseignants d’établissements d’enseignement secondaire. De même, la Commission des droits de l’homme du Malawi a procédé à un examen des politiques en matière de harcèlement sexuel sur le lieu de travail pour plusieurs institutions et continue à diffuser sa politique de référence pour le harcèlement sexuel. La commission encourage le gouvernement à intensifier ses activités de renforcement des capacités et de sensibilisation au harcèlement sexuel et à fournir des informations sur: i) les activités menées (y compris des informations sur le public visé et le nombre de participants); ii) la diffusion et l’utilisation de la politique de référence pour le harcèlement sexuel sur le lieu de travail de la Commission des droits de l’homme du Malawi; et iii) la proportion d’hommes et de femmes dans les services d’inspection du travail, et les mesures prises ou envisagées pour assurer l’équilibre des genres à cet égard.
Accès aux mécanismes judiciaires et quasi-judiciaires et aux voies de recours légales pour les victimes de discrimination, y compris de harcèlement sexuel. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle les cas de harcèlement sexuel étant des affaires pénales, ils ne peuvent être traités par le ministère du Travail et le tribunal des relations professionnelles, mais relèvent de la compétence du tribunal d’instance et de la Haute Cour. Il reconnaît que les frais de justice sont à la charge des victimes, ce qui constitue un obstacle à l’accès aux voies de recours. À cet égard, la commission rappelle que, en général, les poursuites pénales ne suffisent pas pour éliminer le harcèlement sexuel en raison du caractère sensible de cette question, de la charge de la preuve qui est difficile à apporter, notamment s’il n’y a pas de témoin (ce qui est souvent le cas) et du fait que le droit pénal met généralement l’accent sur l’agression sexuelle ou les «actes immoraux», et non sur l’ensemble des comportements constituant le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession. La commission considère également que la législation qui n’offre aux victimes de harcèlement sexuel comme seule possibilité d’obtenir réparation que la cessation de la relation de travail ne leur accorde pas une protection suffisante puisque, dans les faits, elle sanctionne les victimes et pourrait les dissuader de chercher à obtenir réparation. (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 792). Le gouvernement ajoute que la Commission des droits de l’homme du Malawi a reçu 16 cas liés au harcèlement sexuel en 2021, 15 cas en 2022 et 5 cas de janvier à juin 2023. Notant la déclaration du gouvernement selon laquelle, sur ces cinq cas, deux ont été abandonnés pour «défaut d’identification des témoins» (les trois autres faisant toujours l’objet d’une enquête), la commission rappelle les préoccupations exprimées par le CEDAW au sujet de l’absence de directives en matière de procédurales légales pour l’abrogation de la «règle de corroboration», en vertu de laquelle le témoignage d’un témoin est requis en plus de celui de la victime dans les affaires de viol. La commission rappelle également que le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a noté la prévalence du harcèlement sexuel sur le lieu de travail et dans les entreprises, ainsi que la sous-déclaration de ce phénomène due à l’insuffisance d’informations sur les mécanismes de signalement. En outre, il a demandé que la Commission indépendante d’examen des plaintes contre la police soit dotée de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour garantir que tous les cas de violence fondée sur le genre fassent l’objet d’une enquête efficace sans délai, que les auteurs soient poursuivis d’office et dûment sanctionnés, et que les victimes aient accès à des voies de recours et à des services de soutien adéquats (CEDAW/C/MWI/CO/8, paragr. 21, 22 et 33 (d)). L’audit de 2023 sur l’égalité des genres pour l’ECAM, mentionné ci-dessus, a également estimé que les obstacles au signalement expliquent en partie la sous-déclaration des incidents, contribuant à ce que les entreprises sous-estiment le problème de la discrimination et du harcèlement fondés sur le genre sur le lieu de travail. L’audit a également souligné que le fait que les affaires de harcèlement sexuel relèvent de la justice pénale contribuait à allonger les délais pour traiter les affaires et rendre une décision (pages 7 et 19). La commission note également que, lors de la mission de mai 2023 au Malawi, les fonctionnaires du travail des districts ont indiqué que les cas de violence sexuelle étaient souvent signalés à un stade très tardif. Ils ont souligné la nécessité d’intensifier les inspections du travail et de redynamiser la structure existante au niveau du district et ont suggéré de mettre en place des lignes téléphoniques gratuites pour signaler les cas de violence et de harcèlement et de fournir des services d’appui aux victimes, en particulier un accompagnement psychosocial. Ils ont également mentionné le rôle que peuvent jouer les chefs traditionnels dans la lutte contre la violence et le harcèlement. Enfin, la commission prend note de l’observation du MCTU selon laquelle des mesures, notamment des programmes de sensibilisation, sont mises en place pour faciliter l’accès à la justice des victimes de discrimination. La commission prie le gouvernement de: i) relever les défis liés à l’accès aux voies de recours légales pour les victimes de discrimination dans l’emploi et la profession, y compris le harcèlement sexuel; et ii) renforcer la capacité des autorités compétentes, notamment des inspecteurs du travail et de la Commission indépendante d’examen des plaintes contre la police, à prévenir, identifier et traiter les cas de discrimination dans l’emploi et la profession, y compris le harcèlement sexuel, ainsi que la connaissance qu’ont les travailleurs des recours disponibles. Veuillez fournir des informations sur le nombre de cas de harcèlement sexuel dans les secteurs public et privé dont sont saisis les tribunaux et la Commission indépendante d’examen des plaintes contre la police ou détectés par les inspecteurs du travail, sur les réparations accordées aux victimes et sur les sanctions imposées aux auteurs.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement. 
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 202 5 .]
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