National Legislation on Labour and Social Rights
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Un représentant gouvernemental a fait valoir que son pays est un Etat qui se consacre au bien-être et à l'épanouissement de sa population en général et à celui des catégories vulnérables, comme les populations tribales, en particulier. La Constitution de l'Inde, et notamment ses articles 38, 39 et 46, atteste de cet attachement. Il convient de noter dans ce contexte que la population des tribus recensées s'élève, en Inde, à 67,8 millions, soit plus de 8 pour cent de la population globale. L'avancement de ces populations a été inscrit au nombre des principaux objectifs de la population nationale tout au long des plans quinquennaux. Cet attachement a été également illustré, dès l'origine, par la ratification de la convention en 1958.
En ce qui concerne les commentaires de la commission d'experts relatifs aux conditions de travail dans la zone de séparation des cendres de l'usine thermoélectrique du Gujarat, l'orateur a évoqué le partage des prérogatives et des responsabilités aux termes de la Constitution indienne entre le gouvernement central et les gouvernements des provinces. Les responsabilités se répartissent de la même façon en ce qui concerne la législation et l'administration du travail. Dans le cas d'espèce, elles incombent au gouvernement provincial du Gujarat, lequel a fourni l'essentiel des informations que l'intervenant lui-même s'apprête à livrer à la commission. Le Conseil de l'électricité du Gujarat possède la centrale thermoélectrique d'Ukai, qui emploie plus de 2 000 salariés. Il existe par ailleurs 9 sous-traitants à l'année employant quelque 300 travailleurs et 12 sous-traitants épisodiques employant encore 300 travailleurs. Tous ces sous-traitants détiennent des licences valides, délivrées conformément à la loi de 1970 (portant réglementation et abolition) du travail en sous-traitance. Ces travailleurs font des horaires fixés par les autorités, ont droit au paiement de leurs heures supplémentaires et bénéficient de prestations médicales gratuites. Ils ont également accès à des salles de repos et des crèches et bénéficient d'une dotation en uniformes et chaussures. Ils ont droit à des congés ordinaires, des congés de compensation, des congés maladie et des congés pour jours fériés. Les sous-traitants fournissent eux aussi uniformes et chaussures à leurs travailleurs. La communication envoyée par le syndicat Bijli Mazdoor Panchayat à la commission d'experts concerne les personnes travaillant à l'extérieur de l'enceinte de l'usine, à la séparation des cendres de charbon de l'eau après combustion. Ils ne sont couverts par aucun règlement et ne travaillent sous les ordres d'aucun sous-traitant déclaré. Le Conseil de l'électricité du Gujarat a concédé ce travail à une société, laquelle le concède à son tour à quelque 200 personnes appelées "Mukadams" rémunérées sur la base de la quantité de cendres enlevée des installations. Les Mukadams emploient des membres de leur famille et d'autres personnes. Ils sont rémunérés sur une base mensuelle mais ne sont pas enregistrés conformément à la loi (portant réglementation et abolition) du travail en sous-traitance. Deux procédures pénales ont été ouvertes contre l'entreprise en question et une autre procédure relative à la même question a été ouverte par le Bijli Mazdoor Panchayat. La centrale thermoélectrique d'Ukai et le Conseil de l'électricité du Gujarat ont refusé de reconnaître toute obligation, pour eux, d'offrir aux travailleurs de la zone de séparation des cendres les facilités prévues par la loi sur les usines, contestant que cette loi puisse avoir juridiction sur cette zone. Le vice-commissaire au travail et le secrétaire au travail du gouvernement du Gujarat ont néanmoins procédé à des inspections et pris un certain nombre de mesures concernant les travailleurs tribaux. Sur des motifs humanitaires, le Conseil de l'électricité du Gujarat a accepté, devant la Cour suprême, de fournir à ces travailleurs des facilités élémentaires et, dans la pratique, met à leur disposition de l'eau potable, des sanitaires, des abris, une crèche et une infirmerie. Les Mukadams sont payés de 155 à 165 roupies à la tonne pour séparer les cendres de charbon brûlé de l'eau de lavage, passer ces cendres au crible et les assécher. Leur activité ne rentre dans aucune catégorie d'emplois recensée conformément à la loi sur le salaire minimum. Les dispositions de cette loi ne sont donc pas pleinement appliquées dans cette zone, même si le gouvernement du Gujarat a proposé d'étendre les effets de cette législation à cette activité et que des mesures en la matière sont attendues à brève échéance. Par ailleurs, une action en justice sur le fondement de la loi sur l'égalité de rémunération contre l'employeur de ces travailleurs a été entérinée par le Commissariat au travail. On peut donc constater que les instances compétentes ont pris des mesures à l'encontre de tous ceux qui sont impliqués dans l'exploitation de travailleurs tribaux. L'aboutissement de cette action devrait contribuer à l'amélioration des conditions de travail de ces personnes.
En ce qui concerne les commentaires de la commission d'experts relatifs au projet de barrage et de centrale hydroélectrique de Sardar Sarovar, l'intervenant a expliqué que les différences constatées d'un Etat à l'autre quant à la réinstallation et à la réadaptation des populations sont naturelles, du fait que les mesures ne sont prises qu'en fonction de l'avancement du projet chaque année. Assurément, la réinstallation et la réadaptation s'effectuent en liaison avec la construction du barrage, de manière à ce que ces opérations soient achevées avant que les terres en question ne soient mises en eau. La construction des multiples tranches du barrage est planifiée sur une base annuelle, sur la base des progrès de la réadaptation. Ce processus est contrôlé par un comité de réadaptation, placé sous la responsabilité du ministère des Affaires sociales, lequel est comptable devant la Cour suprême de l'Inde. Les familles touchées par le projet ont la priorité, ce qui explique les différences substantielles constatées d'un Etat à l'autre.
L'orateur a ensuite donné des informations sur le nombre des familles touchées dans chaque Etat et sur l'état d'avancement des réinstallations. Le total des familles touchées dans le Gujarat s'élève à 4 600 et les terres mises à disposition pour leur réinstallation proviennent du domaine public et de l'acquisition de terres privées. Sur ce total, 4 392 familles ont reçu des terres agricoles et 4 331 ont reçu une parcelle constructible, sur quelque 116 sites de réinstallation équipés. Au Maharashtra, sur 3 113 familles touchées, 2 114 ont opté pour une réinstallation sur place et 999 pour une réinstallation au Gujarat. A ce jour, sur ces dernières, 662 ont reçu des terres agricoles et 639 une parcelle constructible. Le nombre des familles touchées au Madhya Pradesh est estimé à 33 014, dont 14 124 ont opté pour le Gujarat. Sur ces dernières, à ce jour, 2 652 ont reçu des terres agricoles et 2 449 une parcelle constructible. Au Madhya Pradesh, sur les 18 890 familles ayant choisi de rester dans cet Etat, 733 ont reçu une parcelle constructible. Pour cette dernière catégorie, leur habitation seulement ou 25 pour cent de leurs terres agricoles doivent se retrouver immergées. Ces familles seront en conséquence relogées à proximité mais un peu plus haut. Quelque 2 000 hectares de terres agricoles seront alloués aux familles désireuses de se réinstaller au Madhya Pradesh. Au Maharashtra, cinq sites de réinstallation ont été créés. La construction de bâtiments publics est réalisée sur deux de ces sites et elle est en bonne voie sur les autres. Sur la base de ces informations, l'orateur considère que la commission ne devrait pas avoir de motif d'inquiétude quant à l'aptitude des Etats compétents à acquérir des terres pour faire face aux nécessités de la réinstallation.
En réponse à l'observation de la commission d'experts concernant l'existence d'autres cas de déplacement de populations tribales à des fins de développement, l'orateur a déclaré que le gouvernement fournira des informations sur les cas spécifiques en se fondant sur les données qu'il obtiendra des gouvernements des provinces. Il a fait observer incidemment que les régions où s'effectuent tant l'exploitation des ressources minières que les autres activités de développement sont peuplées par des populations tribales et que l'exploitation des ressources naturelles du pays reste indispensable pour le développement économique et industriel. Il a souligné que les règlements en vigueur prévoient une compensation adéquate des personnes touchées, y compris des populations tribales, et que le gouvernement ne pratique aucune discrimination lorsqu'il aborde les besoins et les problèmes de l'ensemble de ces personnes. Pour conclure, l'intervenant a exprimé l'espoir d'être en mesure d'apporter des informations adéquates en réponse aux observations formulées par la commission d'experts.
Les membres employeurs ont apprécié les abondantes informations fournies par le représentant gouvernemental. Ils ont rappelé que la commission examine ce cas depuis le milieu des années quatre-vingt, et pour la dernière fois, en 1993. A cette dernière occasion, elle n'avait abordé que la question de l'application de la convention dans le cadre du projet de barrage et de centrale hydroélectrique de Sardar Sarovar. Aujourd'hui, les points soulevés par la commission d'experts couvrent également les conditions de travail des populations tribales recensées dans la zone de séparation des cendres de l'usine thermoélectrique de l'Etat du Gujarat. Dans son rapport, la commission d'experts décrit des conditions de travail très pénibles faites à ces travailleurs, pour la plupart d'origine tribale. A cet égard, le représentant gouvernemental déclare que cette situation ne relève pas de la compétence du gouvernement central mais des gouvernements provinciaux ayant juridiction, et que les informations qu'il a fournies proviennent essentiellement de ces instances provinciales. Selon lui, ces travailleurs ne sont pas couverts par la législation du travail ordinaire, si bien que, par exemple, le salaire minimum ne leur est pas applicable. Quant à la loi sur les usines, il est clair qu'elle ne s'applique pas au travail accompli dans cette "zone de séparation des cendres". La commission d'experts a mentionné qu'à de nombreux égards les conditions de travail dans cette zone ne sont pas satisfaisantes. Dans la pratique, on ne sait pas clairement quelle législation du travail est applicable à ces travailleurs. Toutefois, comme il s'agit de populations tribales, elles relèvent normalement de la protection particulière prévue par cette convention. A l'évidence, il reste beaucoup à faire pour que la convention soit respectée dans ce domaine et, compte tenu de la division des responsabilités, le gouvernement central a certainement beaucoup de difficultés à imposer sa volonté afin que les conditions de travail inadmissibles qui sont dénoncées soient améliorées. Les membres employeurs demandent donc au gouvernement de fournir, dans un rapport écrit, autant d'informations que possible sur les conditions de travail de ces populations et de suggérer de quelle manière leur situation pourrait être améliorée.
Les membres employeurs ont ensuite évoqué les discussions de cette commission en 1993, qui portaient sur l'incidence de la construction d'un barrage et la réalisation d'un projet hydroélectrique et sur les déplacements massifs de populations tribales nécessités par ces projets. Les questions soulevées concernaient la manière dont les intéressés étaient réinstallés, les compensations qui devaient leur être attribuées et l'application de ces mesures dans la pratique. Le représentant gouvernemental avait mentionné la constitution d'un groupe de cinq personnes chargées de superviser ces questions ainsi que l'action des organes régionaux compétents. Toutefois, les procédures de compensation et de réinstallation des populations tribales se sont révélées très complexes et la commission d'experts a noté des disparités profondes de traitement entre les divers Etats touchés. Bien que le représentant gouvernemental ait expliqué que les mesures de compensation et de réinstallation sont liées à l'avancement du projet, les chiffres spécifiques avancés sont difficiles à reclasser dans leur contexte. Néanmoins, selon le tableau général qui se dégage, les compensations de toute nature se sont sensiblement améliorées et se révèlent, dans la pratique, supérieures aux indemnisations que des tribunaux auraient accordées. Si tout progrès dans ce sens est assurément appréciable, il reste néanmoins préoccupant que des différences substantielles persistent entre les mesures prises dans les différents Etats. Le gouvernement est donc prié de fournir toutes informations pertinentes dans un rapport exhaustif, présentant des chiffres détaillés, replacés dans le contexte du problème dans son ensemble.
Les membres employeurs ont souligné que des efforts seraient nécessaires pour donner effet aux engagements pris par le pays en vertu de la convention, notamment en ce qui concerne les nombreuses populations tribales et la nécessité de réinstaller ces populations suite à des projets de développement et d'industrialisation. S'il est vrai que ces projets visent le bien du pays, il convient néanmoins de veiller à ce que leurs conséquences négatives pèsent le moins possible sur les catégories les plus faibles de la population, les populations tribales. Les membres employeurs ont également noté que, selon le représentant gouvernemental, de tels cas de déplacement seraient courants. Il conviendrait donc que le gouvernement tienne l'OIT informé aussi précisément que possible de la situation générale des populations tribales, afin que la commission d'experts et, le cas échéant, la commission de la Conférence puissent vérifier que les orientations suivies par le pays en la matière sont conformes à la convention.
Les membres travailleurs ont souligné l'ampleur de ce cas, du fait que, selon les statistiques de 1991, les populations tribales représentent, en Inde, près de 68 millions de personnes. Ce sont plusieurs aspects de l'application de la convention en droit et en pratique qui sont ici en jeu. Les questions soulevées aujourd'hui devant la commission ne constituent cependant que la pointe de l'iceberg. La commission d'experts examine ce cas depuis plusieurs années. Aujourd'hui, trois éléments sont signalés à l'attention de la Commission de la Conférence. L'article 15 de la convention prescrit aux Etats l'ayant ratifiée de prendre des mesures particulières en faveur des travailleurs appartenant à des populations tribales dans la mesure où ces travailleurs ne peuvent prétendre à la protection assurée aux autres par la législation. Cependant, la commission d'experts semble considérer que ces travailleurs sont traités conformément à la législation du travail. Or les membres travailleurs ne peuvent souscrire à cette interprétation du fait que, selon les informations communiquées par le gouvernement lui-même, il est clair que ces travailleurs ne sont pas traités conformément à cette législation. Les éléments apportés par le syndicat Bijli Mazdoor Panchayat attestent d'abus flagrants dans la "zone des cendres" - journées de douze heures, conditions de travail inhumaines, problèmes de sécurité et d'hygiène, pollution par le charbon, les poussières et les cendres volantes, et absence d'infrastructures aussi élémentaires que les toilettes ou les cantines. La rémunération de ces travailleurs est si faible qu'il est difficile d'imaginer comment ils peuvent survivre. Il apparaît donc clairement que le gouvernement considère et traite ces travailleurs différemment de ceux qui sont dans les usines. Le représentant gouvernemental a déclaré que, sans s'engager sur le plan juridique, le Conseil de l'électricité du Gujarat a bien voulu accorder quelques facilités élémentaires et que quelques mesures ont été prises à la suite d'inspections du travail. Néanmoins, les membres employeurs réaffirment que cette situation constitue une violation grave de l'article 15 de la convention.
Les éléments communiqués par la Centrale des syndicats de l'Inde ont mis en exergue le sort de ces populations tribales, qui sont évacuées des zones visées par ces projets d'exploitation des ressources minières ou de construction de barrage. Lesdits projets ont une incidence directe sur les populations touchées sur le plan du développement agricole, de la santé, de l'éducation et de l'emploi. Le degré d'avancement économique et social des populations tribales reste bien inférieur à la moyenne nationale tant et si bien que les mesures de réinstallation sont une menace pour leur survie même. En fait, plutôt que de réinstallation et de réadaptation, il convient de parler d'éviction, terme utilisé dans le rapport de la commission d'experts. Au lieu de bénéficier de la protection prescrite par la convention, la plupart de ces populations sont traitées avec brutalité et se retrouvent sans habitations et sans terres. Une volonté politique plus affirmée et plus énergique serait nécessaire pour apporter une solution à ces problèmes.
La commission d'experts a noté en particulier qu'il existe des disparités considérables entre les différents Etats en matière de réinstallation de populations tribales. Au Gujarat, le taux de réinstallation atteint ainsi le chiffre encourageant de 93 pour cent mais au Maharashtra il n'est guère que de 42 pour cent, et au Madhya Pradesh il se situe au niveau effarant de 9 pour cent. La situation au Gujarat prouve donc qu'il est possible d'agir en faveur de ces populations. Les membres employeurs sont cependant profondément préoccupés par le fait que, contrairement à la mesure d'exception évoquée à l'article 12 de la convention, les déplacements de populations tribales soient devenus, au contraire, monnaie courante. Ils ont noté, à la lecture des rapports antérieurs de la commission d'experts, que le ministère des Affaires étrangères du Japon a décidé en 1990 de ne plus financer le projet de Sardar Sarovar à cause de l'insuffisance des plans de réinstallation des familles déplacées. En 1992, la Banque mondiale a publié une étude indépendante concluant à l'existence de nombreuses carences dans la planification et l'exécution du projet, qui ont particulièrement affecté les populations déplacées. Cet organisme s'est en conséquence retiré du projet sur le motif qu'il est contraire à la convention. Les membres travailleurs estiment que les mesures de réinstallation doivent être prises avant l'éviction des personnes. Ils souhaitent obtenir d'autres informations sur le degré de compensation octroyée et sur l'adaptation, à plus long terme, des travailleurs déplacés à leurs nouvelles situations. Ils demandent également des précisions sur les recommandations formulées par le groupe des cinq personnes, notamment en ce qui concerne la recevabilité des réclamations, le mécanisme de réparation et l'assistance des organismes volontaires.
Les membres travailleurs ont évoqué les commentaires de la commission d'experts selon lesquels il existe d'autres cas de déplacements de populations tribales à des fins de développement. Un complément d'informations est attendu à ce sujet du gouvernement, notamment quant aux critères de détermination de la nécessité du déplacement de ces populations à titre de "mesure exceptionnelle", conformément à l'article 12 de la convention. Des informations sont également nécessaires quant aux programmes mis en place par le gouvernement pour assister ces populations lors de leur déplacement, au cours de leur réinstallation et pendant leur réadaptation. Pour répondre aux propos du représentant gouvernemental selon lesquels le gouvernement central ne dispose pas de données sur les autres cas de déplacements de populations tribales, les membres travailleurs souhaiteraient en connaître les raisons et ont signalé que tout défaut de vigilance du gouvernement en la matière pour obtenir des preuves pertinentes constituerait un non-respect des dispositions de la convention, par défaut d'explications justifiées.
Pour conclure, les membres travailleurs ont souligné que ce sont souvent les populations tribales qui, en tant que catégories les plus vulnérables, font les frais du développement économique. Il incombe donc au gouvernement de l'Inde de veiller à ce que tout déplacement de populations tribales ne s'inscrive que dans le cadre d'une mesure exceptionnelle. Il appartient donc à ce gouvernement de faire preuve de décision et d'initiative, au niveau national, pour garantir la protection de cette frange irremplaçable de la communauté internationale.
Le membre travailleur de l'Inde s'est référé à la déclaration du représentant gouvernemental aux termes de laquelle les travailleurs employés dans la zone de dégrillage à Ukai relèvent de la compétence du gouvernement provincial concerné. A cet égard, il a insisté sur le fait que, lorsque le gouvernement central ratifie une convention, cet instrument doit aussi être mis en oeuvre par les gouvernements provinciaux. Tous les gouvernements provinciaux doivent dès lors respecter ces dispositions. En outre, il a noté que la proportion de la population tribale indienne, qui est l'objet d'éviction systématique de ses terres, est très élevée. Les cas auxquels se réfère la commission d'experts ne sont que des exemples symboliques de tous les cas dans lesquels une telle pratique se réalise. Le gouvernement de l'Inde doit porter plus d'attention aux problèmes des populations tribales. Dans le cas des travailleurs en question, la régie de l'électricité du Gujarat, principal employeur, assume la responsabilité à l'égard des travailleurs en sous-traitance. Malheureusement, les informations fournies par le représentant gouvernemental ne sont pas très claires. L'OIT doit pouvoir vérifier en détail les conditions réelles qui prévalent. En particulier, la situation des populations tribales qui ont fait l'objet d'un déplacement est très précaire. Ils sont souvent évincés de terres fertiles pour se voir octroyer des terres stériles. Une autre question importante est celle de la distance entre les terres desquelles ils sont évincés et celles qui sont par la suite allouées aux familles concernées.
Il a insisté sur le fait que c'est au gouvernement central qu'incombe la responsabilité de coordonner la mise en oeuvre de la convention et de recueillir l'information nécessaire à cet égard. Trop souvent, les nouveaux projets de développement, notamment dans le secteur minier, sont localisés dans des régions occupées par des populations tribales et entraînent leur déplacement. Le gouvernement doit examiner tous ces projets avec une grande attention et doit mettre sur pied une unité de coordination afin de surveiller la situation des populations tribales. Plusieurs lois concernant les populations tribales ont été adoptées en Inde. Toutefois, seules quelques-unes ont été mises en oeuvre et le gouvernement doit faire tous les efforts nécessaires pour appliquer la législation pertinente.
Le membre travailleur du Swaziland a souligné que ce cas soulève plusieurs aspects ayant trait aux droits de l'homme, aux responsabilités sociales et aux obligations incombant normalement aux gouvernements en ce qui concerne les populations tribales. La convention prescrit au gouvernement de promouvoir le développement social, économique et culturel de ces populations sur leur territoire. Elle leur prescrit également de s'employer à l'amélioration du niveau de vie de ces populations, de protéger leur dignité et de favoriser l'utilité sociale et l'initiative de l'individu. Elle prévoit enfin que les populations tribales doivent bénéficier de la protection de la législation nationale.
Le gouvernement de l'Inde est dans une position particulièrement critiquable quant au respect d'une convention qu'il a ratifiée en 1958. Dans le monde du travail, la population tribale est représentée essentiellement par des femmes, qui doivent s'employer à des travaux pénibles sans disposer de vêtements protecteurs, sans hygiène, sans alimentation appropriée et sans avoir non plus accès à des facilités pour la garde de leurs enfants. Elles sont en outre rémunérées de manière dérisoire et sont réduites à un système d'exploitation. Ces conditions, lorsqu'elles sont signalées à l'attention de l'inspection du travail, ne suscitent qu'indifférence et inertie. Cette attitude constitue en soi une violation flagrante des dispositions de la convention de même qu'une discrimination inacceptable à l'égard des populations tribales. Ces populations sont déplacées ou plus exactement évacuées pour le besoin de projets de développement sans être réinstallées de manière adéquate. Dans les cas où elles sont réinstallées, les terres qui leur sont attribuées n'ont pas la même valeur que celles dont elles disposaient auparavant. Pour conclure, l'orateur a déclaré souscrire pleinement à la recommandation formulée par le porte-parole de son groupe et par la commission d'experts.
Le membre employeur de l'Inde s'est rallié aux commentaires formulés par les membres employeurs et les membres travailleurs à propos des conditions de travail dans la zone de séparation des cendres de la centrale thermoélectrique d'Ukai. Il ne subsiste aucun doute quant à la responsabilité incombant au gouvernement central et à ceux des provinces pour que les travailleurs concernés jouissent de conditions de travail et de sécurité adéquates. Toutefois, à propos du temps nécessaire à l'entrée en vigueur d'une législation et, notamment, du salaire minimum, il a rappelé que l'Inde est un pays démocratique qui doit respecter les règles de procédure. En outre, en ce qui concerne les délais de mise en oeuvre des projets de développement, il a fait observer que toutes les personnes en cause ont le droit de défendre leurs intérêts et qu'ainsi les procédures comme celles qui ont trait à l'acquisition des terres peuvent prendre des années. Dans ces conditions, les travailleurs déplacés et leur famille peuvent avoir à supporter des difficultés considérables puisqu'il leur faut parfois attendre des années pour obtenir ce à quoi ils ont droit. Il faudrait donc que le gouvernement mette en place des systèmes permettant de satisfaire plus rapidement aux besoins. En outre, s'il est facile de dire que le gouvernement central doit prendre des mesures dans bien des domaines concernant les populations tribales, il convient de noter que les gouvernements des provinces tiennent à leurs prérogatives et sont peu enclins à les déléguer. Il n'en demeure pas moins que des mesures sont prises sur l'ensemble du territoire pour améliorer le niveau de vie des populations tribales. Pour ce qui est des projets de développement, l'intervenant a rappelé que ces projets concernent souvent des zones rurales afin de ne pas affecter des zones plus densément peuplées. Ces projets offrent par ailleurs l'avantage de fournir de l'emploi aux populations tribales. Ils sont donc nécessaires compte tenu des avantages qu'ils apportent à l'ensemble de la population.
Le représentant gouvernemental a remercié les membres employeurs et travailleurs de leur contribution au débat. Pour répondre aux remarques concernant la division des responsabilités entre le gouvernement central et les gouvernements des provinces quant à l'application de la convention, il a rappelé que son intervention ne tendait qu'à présenter de manière condensée les diverses dispositions juridiques adoptées dans la Constitution de l'Inde et que les autorités compétentes au regard des nombreux points soulevés par la commission d'experts sont en l'occurrence les gouvernements des Etats. Il a ajouté qu'il n'avait pas dit que le gouvernement national n'avait pas la responsabitlité de respecter les obligations de la convention no 107. En ce qui concerne les travailleurs de la zone de séparation des cendres de la centrale thermoélectrique d'Ukai, il a signalé que cette entreprise considérait que la zone ne faisait pas partie intégrante de l'établissement, contrairement à l'opinion retenue par le gouvernement de l'Etat, et que cette question est actuellement devant les tribunaux.
D'une manière générale, le retard, sur le plan économique et social, des populations tribales du pays résulte d'une exploitation remontant à plusieurs siècles. Des efforts considérables ont dû être déployés pour que ces populations rattrapent les autres catégories; dans cette optique, des sauvegardes ont été inscrites dans la Constitution de l'Inde. Grâce à ces efforts, les populations tribales ont aujourd'hui plus d'accès à l'emploi et ont fait des progrès sur les plans économique, social et éducatif. Malgré tout, cinquante années d'indépendance n'ont pas suffi à faire disparaître les séquelles de plusieurs siècles d'exploitation.
L'orateur a pris note du fait que les membres employeurs et travailleurs ont appelé le gouvernement à une action décisive pour remplir ses obligations au titre de l'article 15 de la convention. Réaffirmant que son gouvernement est conscient de ses obligations, il a rappelé que la Constitution de l'Inde et la législation de ce pays sont jugées satisfaisantes à cet égard. Les divergences résultent de l'application des lois. Dans le cas où la protection prévue se révélerait inadéquate, une démarche serait entreprise, comme par le passé, pour procéder aux changements nécessaires. Dans ce contexte, l'Inde est actuellement engagée dans un processus d'adoption des instruments juridiques nécessaires à l'élimination des problèmes concernant le travail en sous-traitance. Le gouvernement a d'ailleurs manifesté son soutien dans ce domaine dans le cadre des discussions consacrées par la Conférence internationale du Travail à cette question. La législation indienne du travail se révèle plus contraignante et plus précise que l'instrument envisagé. De plus, les tribunaux de l'Inde ont joué un rôle important dans l'application de la législation pertinente. Récemment, la responsabilité de l'employeur principal quant aux droits des travailleurs en sous-traitance en matière de sécurité sociale a été confirmée par les tribunaux. Les conséquences de cette décision doivent être examinées, et le gouvernement ne manquera pas de fournir des informations à ce sujet à la commission d'experts.
En ce qui concerne les déplacements et réinstallations des populations tribales en conséquence des projets de développement, l'orateur a rappelé la nécessité d'exploiter les ressources naturelles du pays pour le développement et l'industrie. Il se trouve que de nombreuses populations tribales vivent dans les zones où ces ressources ont été découvertes. Cette situation s'est présentée dans le cadre de nombreux projets d'exploitation des ressources minières ou de l'énergie hydroélectrique. En examinant ces questions, la commission se doit de prendre en considération le contexte national et, notamment, la pénurie d'énergie et les risques constants de famine en cas de mauvaises conditions climatiques. Convaincu de la nécessité d'éviter l'injustice, le gouvernement s'est doté d'une législation adéquate pour assurer la compensation des familles touchées. En ce qui concerne le projet de barrage et de centrale hydroélectrique de Sardar Sarovar, l'orateur a donné à nouveau l'assurance que la réinstallation de toutes les familles sera achevée avant que les terres ne soient mises en eau. Il s'est également engagé à fournir une réponse détaillée à la demande directe formulée par la commission d'experts au sujet de cette convention. Il a réaffirmé l'attachement de son gouvernement aux intérêts des populations tribales et sa volonté de prendre toute mesure qui se révélerait nécessaire, en droit ou en pratique, pour donner effet à la convention. Il a néanmoins invité la commission à replacer ce problème dans son contexte et à ne pas adopter, en la matière, une attitude par trop juridique. Il a confirmé enfin que toutes les informations écrites demandées seront communiquées à la commission d'experts, réitérant incidemment l'engagement total, de la part de son gouvernement, de donner effet à cette convention en Inde.
La commission a pris note des informations détaillées fournies par le gouvernement et de la discussion ayant eu lieu en son sein. Elle a également noté que les travailleurs tribaux ne bénéficient pas d'une protection conforme à l'article 15 de la convention, et elle a demandé au gouvernement de fournir un complément d'information sur les efforts déployés pour améliorer la situation. Elle a constaté en particulier que la réinstallation et la réadaptation des populations tribales déplacées la suite à la construction du barrage de Sirdar Samovar ont été entreprises. Bien que les informations les plus récentes communiquées par le gouvernement fassent état de progrès dans la réinstallation de ces populations, la commission souhaite avoir plus d'informations, en particulier quant à la réadaptation des populations tribales. La commission a également pris note du fait que le gouvernement a donné l'assurance qu'aucune zone ne sera mise en eau avant que la réinstallation et la compensation aient été menées à bien. Elle s'est ralliée aux préoccupations de la commission d'experts devant l'absence d'informations sur les cas de déplacement de populations tribales suite à des projets de développement et à propos des conditions dans lesquelles ces déplacements s'effectuent. Elle a prié le gouvernement de continuer à fournir des informations détaillées sur les progrès accomplis vers la solution de ce problème, qui fait l'objet de son attention depuis de nombreuses années.