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Individual Case (CAS) - Discussion: 2019, Publication: 108th ILC session (2019)

Forced Labour Convention, 1930 (No. 29) - Myanmar (Ratification: 1955)

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 2019-MMR-C029-Fr

Discussion par la commission

Représentant gouvernemental – L’actuel gouvernement civil élu démocratiquement s’applique à transformer le pays, pour le faire passer d’une union fédérale autoritaire à une union fédérale démocratique. Depuis trois ans, le Myanmar jouit d’une plus grande liberté et de plus de droits démocratiques, avec l’émergence du gouvernement civil. Bien que notre transition démocratique soit confrontée dans son processus et au sein du pays à de nombreux défis, y compris la contrainte constitutionnelle et les conflits armés qui se poursuivent dans certaines parties du Myanmar, des améliorations sont tangibles dans de nombreux domaines dont la santé, l’éducation et les secteurs socio-économiques. Les changements positifs seront renforcés par la mise en œuvre du plan de développement durable du Myanmar qui établit une feuille de route unificatrice et cohérente pour toutes les réformes à venir. Le plan de développement durable du Myanmar est conforme aux objectifs de développement durable (ODD), y compris l’objectif 8.

Dans un pays multi-ethnique tel que le Myanmar, réaliser l’unification à partir des diversités existantes est un immense défi. C’est pourquoi le gouvernement s’efforce de parvenir à une paix durable, à une véritable réconciliation et à un développement global, tout en respectant les pratiques démocratiques et les valeurs des droits de l’homme, ainsi que le principe d’inclusion. Dans le cadre de son programme pour la paix, le gouvernement a déjà convoqué trois sessions de la Conférence de paix de Panglong du XXIe siècle et a donné son accord sur 51 principes fondamentaux en vue de la construction d’une union fédérale démocratique qui garantisse la sécurité et la prospérité pour tous, pour une société vivant dans la paix et l’harmonie. Il est prévu d’organiser trois autres sessions d’ici à 2020 afin de finaliser lesdits principes fondamentaux.

Au total, dix organisations ethniques armées ont déjà signé l’Accord de cessez-le-feu sur tout le territoire national. Les forces armées avaient également annoncé un cessez-le-feu unilatéral dans les Etats de Kachin et de Shan pour une durée de quatre mois à partir du 21 décembre, et cet accord a été prolongé en avril. Permettez-moi de passer la parole à l’Ambassadeur Kyaw Moe Tun, qui vous informera des questions relatives à la convention no 29.

Autre représentant gouvernemental – Le Myanmar s’associe à la déclaration conjointe de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) faite par la Thaïlande. La déclaration conjointe reflète les progrès, les actions et les mesures prises par le gouvernement du Myanmar dans ses efforts pour l’élimination du travail forcé. Comme nous avons besoin d’une Constitution qui puisse véritablement protéger les droits démocratiques du peuple, le parti au pouvoir a récemment pris l’initiative audacieuse de modifier les dispositions antidémocratiques de la Constitution de 2008. A cette fin, une commission parlementaire mixte a été créée et la modification de la Constitution est en cours. Notre combat démocratique reste très actif.

Dès lors que nous nous sommes engagés fermement à éliminer le travail forcé, le Département de l’administration générale, responsable de divers aspects et domaines liés au travail forcé, a été transféré du ministère de l’Intérieur, contrôlé par l’armée, au ministère civil du gouvernement de l’Union pour que des mesures contribuant à l’élimination du travail forcé soient entreprises de manière effective.

Nous sommes convaincus que tous les efforts tendant aux réformes démocratiques auront pour effet de promouvoir et de protéger les droits humains, y compris les droits du travail. Dans cet esprit, notre gouvernement encourage tous les partenaires concernés à intensifier le processus de réforme de la législation du travail, à continuer à renforcer la culture du dialogue social tripartite et à éduquer et former les personnes fortement engagées dans la promotion et la protection des droits au travail, en étroite coopération avec le Bureau international du Travail (BIT). Je saisis cette occasion pour remercier le BIT pour son assistance continue.

En tant qu’Etat démocratique naissant, le Myanmar fait face à de nombreux défis de taille. Notre gouvernement est néanmoins résolument décidé à surmonter ces défis pour le bénéfice et le bien-être de toute personne vivant dans le pays. Grâce aux efforts déployés pour réformer les institutions publiques et renforcer l’état de droit pour une société juste et équitable, des progrès significatifs ont été réalisés dans différents domaines, y compris dans celui de la promotion et de la protection des droits du travail, en progression constante.

Le gouvernement du Myanmar fait preuve d’une volonté politique ferme et inébranlable s’agissant de l’élimination du travail forcé. Cette année, dans son message du 1er mai, journée des travailleurs, le Président du Myanmar a souligné les efforts du gouvernement visant à créer un environnement et des conditions dans lesquels le peuple du Myanmar pourra jouir pleinement et en toute légalité des droits humains et de la démocratie. Le Président a souligné, entre autres, la promotion des droits des travailleurs et de l’éradication du travail des enfants et du travail forcé.

L’une des causes fondamentales du travail forcé au Myanmar est la persistance de conflits internes durant des décennies, et ce depuis l’acquisition de l’indépendance en janvier 1948. Conscient de ce que le développement, qu’il soit politique, économique, social ou culturel, ne peut être réalisé sans la paix et la stabilité, le gouvernement actuel déploie des efforts considérables afin de mettre fin aux conflits armés dans le pays, en réalisant une transformation sociale, économique et politique rapide au cours des dernières années.

Nous voulons remercier le BIT pour sa contribution à l’élimination du travail forcé au Myanmar tout au long de ces années. L’Organisation internationale du Travail (OIT) a adopté des résolutions relatives aux cas de travail forcé au Myanmar lors des sessions de la Conférence internationale du Travail de 1999 et 2000, respectivement. Il y a lieu de noter que, grâce aux initiatives efficaces du gouvernement, telles que des ateliers de sensibilisation, des séminaires et des formations, organisés en étroite coopération avec le BIT, les plaintes relatives au travail forcé ont significativement baissé. Nos efforts, combinés à notre engagement, ont donné de bons résultats, et toutes les sanctions imposées au Myanmar ont été levées à l’occasion de la 102e session de la Conférence en 2013. Grâce à notre ferme engagement pour l’élimination du travail forcé, les recrutements de personnes mineures sont en baisse et nous sommes déterminés à traiter tous les cas de recrutement de personnes mineures. Nous espérons continuer à recevoir une coopération constructive de nos partenaires à cet égard.

Depuis son établissement et sa signature en 2007 entre le gouvernement du Myanmar et l’OIT, le Protocole d’accord complémentaire a bien fonctionné et conformément à son objectif d’éradication du travail forcé au Myanmar. Il a été prolongé chaque année et est entré en vigueur jusqu’à décembre 2018. Depuis l’expiration du Protocole d’accord complémentaire, le Myanmar continue de travailler étroitement avec le BIT pour la mise en œuvre des activités et mesures visant l’élimination du travail forcé en vertu du programme par pays de promotion du travail décent (PPTD) récemment signé. En conséquence, le plan d’action assorti de délais est en cours de préparation pour instituer un mécanisme approprié des plaintes. Afin d’acquérir une connaissance plus approfondie et une meilleure approche et afin d’être informés des meilleures pratiques à cet égard, nous avons organisé un atelier en janvier 2019. Des membres du Parlement, le groupe de travail de haut niveau et le groupe de travail technique, des représentants du BIT, du gouvernement, des travailleurs et des employeurs ont participé activement à cet atelier. Nous développons le nouveau plan d’action en consultation et en coopération avec l’OIT et les constituants tripartites. La négociation en est au stade final et le projet sera soumis au Cabinet pour approbation.

Le nouveau plan d’action assorti de délais inclut quatre priorités: l’institutionnalisation d’un mécanisme national pour les plaintes relatives au travail forcé; la formation et la sensibilisation au travail forcé; le renforcement des capacités pour en finir avec le travail forcé; et la mobilisation des partenaires tripartites pour la prévention du travail forcé dans le secteur privé. Nous développons ce plan d’action dans le cadre du PPTD en vue de mettre en place les politiques pertinentes et la coordination entre les ministères concernés. Nous avons déjà préparé une note explicative afin de mettre en œuvre le mécanisme national des plaintes dès l’approbation du nouveau plan d’action par le Cabinet.

Je voudrais signaler que les membres du groupe de travail de haut niveau ont rencontré les représentants des organisations et des ministères intéressés en mars et mai 2019 et qu’ils ont eu des discussions fructueuses au sujet du mécanisme national des plaintes ainsi qu’au sujet des procédures provisoires de traitement des plaintes. En fait, avant même la mise en place du mécanisme national des plaintes, le groupe de travail de haut niveau traitera les plaintes relatives au travail forcé adressées par toute organisation ou toute personne, y compris l’OIT, en coopération et en coordination avec les ministères et organisations intéressés.

Outre le travail effectué avec l’OIT à cet égard, la question du recrutement des mineurs est examinée avec la collaboration de l’Equipe de pays des Nations Unies chargée de la surveillance et de la communication de l’information. En outre, le gouvernement du Myanmar coopère activement avec le Représentant spécial du Secrétaire général en ce qui concerne les enfants et les conflits armés pour prévenir et combattre les violations affectant des enfants à l’occasion des conflits.

En outre, en janvier 2019, le gouvernement a établi la Commission interministérielle pour la prévention de six graves violations durant les conflits armés. La commission s’est réunie deux fois, en avril et en mai 2019, et a discuté de la mise en œuvre du nouveau plan d’action.

Depuis mars 2019, les forces armées, Tatmadaw, ont déjà remis à leurs parents ou tuteurs 987 mineurs recrutés illégalement. Au total, 448 officiers de l’armée et autres militaires ont été sanctionnés par une mesure disciplinaire militaire, et un civil qui a aidé et encouragé le recrutement illégal a été condamné, en vertu de la loi civile, à un an d’emprisonnement. Afin de garantir l’intérêt supérieur de l’enfant, la loi relative aux droits de l’enfant (1993) a été révisée. De même, la loi sur les droits de l’enfant est examinée en relation avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Plusieurs chapitres ont été ajoutés à la loi en vigueur. Un des chapitres importants contient des dispositions interdisant à quiconque de commettre des infractions graves, notamment le recrutement et l’utilisation des enfants dans les conflits armés.

Permettez-moi, à présent, d’évoquer les activités de sensibilisation, un des facteurs essentiels de l’élimination du travail forcé. Bien que nous ayons réalisé de nombreux développements tangibles dans le domaine de la promotion et de la protection des droits du travail, grâce à nos efforts continus dans le domaine des activités et programmes de sensibilisation, il reste des défis à surmonter. Nous poursuivons en conséquence les ateliers de formation et de sensibilisation, y compris de formation de formateurs. Des séminaires de sensibilisation se tiennent à travers le pays, et des brochures sont distribuées dans plusieurs régions du pays et dans huit langues ethniques. En outre, les aspects saillants de la sensibilisation au travail forcé sont soulignés dans les journaux, à la radio, à la télévision et via les nouveaux médias, et des panneaux de sensibilisation sont affichés dans tout le pays en collaboration avec l’OIT. Au total, 9 221 activités, dont des ateliers de sensibilisation, des séminaires et des débats sur le travail forcé, ont été organisées avec la participation de plus de 360 000 personnes dans différentes communes des Etats et cantons, de juillet 2018 à mars 2019. Plus de 96 000 brochures ont été distribuées dans tout le pays. En janvier 2019, nous avons conduit, en étroite coopération avec l’OIT, des formations de formateurs sur l’élimination du travail forcé, avec la participation des membres du groupe de travail de haut niveau et du groupe de travail technique ainsi que des membres des forces armées et de la police. En outre, le BIT a conduit 34 ateliers, et des fonctionnaires ont mené dix autres sessions de formation et de sensibilisation sur le travail forcé à travers le pays. Il est indéniable que la culture du dialogue social tripartite s’est étendue au niveau national au Myanmar et qu’elle reflète une part significative de nos efforts tendant à l’élimination du travail forcé. Le Forum du dialogue tripartite national institué en 2014 s’est réuni trois fois par an. Il a donné lieu à des discussions, des décisions et des résolutions relatives aux questions liées au travail, y compris concernant les réformes législatives.

Nous saluons le rôle joué par l’Officier de liaison pour la promotion et la protection des droits du travail ainsi que pour l’élimination du travail forcé. Nous continuerons à coopérer étroitement avec l’OIT et les autres partenaires intéressés pour la promotion et la protection des droits du travail fondés sur la compréhension et la confiance mutuelle. Nous espérons vivement que l’OIT pourra maintenir son approche constructive et sa coopération efficace avec le Myanmar au profit du peuple du Myanmar. Nous voulons exprimer notre sincère reconnaissance au directeur actuel de l’officier de liaison, M. Rory Mungoven, pour son travail difficile et sa contribution inestimable au développement du secteur du travail au Myanmar. Nous espérons recevoir de son successeur une coopération de même niveau.

Nous sommes heureux de célébrer le 100e anniversaire de la création de l’OIT, et nos efforts inlassables pour l’élimination du travail forcé devraient être en conséquence salués. J’estime qu’il est temps de renforcer encore les relations entre l’OIT et le Myanmar. Nous souhaiterions vivement que le BIT promeuve l’actuel bureau de liaison en bureau national, compte tenu de la coopération durable entre le Myanmar et l’OIT.

En conclusion, je voudrais exprimer nos sincères remerciements aux pays qui soutiennent nos efforts pour l’élimination du travail forcé.

Membres employeurs – Nous venons de prendre note des commentaires du gouvernement. Certains de ces commentaires sont très utiles dans le contexte de ce cas. D’un point de vue historique, le Myanmar n’est pas un cas nouveau pour le BIT. Il a rejoint l’OIT en 1952 et a ratifié 24 conventions, dont trois conventions fondamentales et 21 conventions techniques. Cela signifie pour nous que le Myanmar connaît depuis longtemps ses différentes sortes d’obligations en vertu des instruments internationaux du travail et qu’il n’est pas question de confusion quant à ce qu’il doit faire.

Le Myanmar a ratifié la convention en 1955. Pourtant, un demi-siècle plus tard, le Myanmar est toujours malheureusement très loin de la pleine application de cette convention. Nous notons une assistance continue de la part du BIT et la coopération soutenue du gouvernement du Myanmar pour corriger la situation, en particulier l’établissement d’une commission d’enquête en 1997 et plusieurs protocoles d’accord signés en 2002, 2007 et, plus tard, en 2018. Nous notons également que la commission a discuté ce cas au total 15 fois, quoique pour la plupart de ces occasions sous le précédent régime. Un nombre relativement petit des instances concerne le régime civil démocratique récemment élu.

Nous notons que, aussi récemment que cette année par exemple, la commission d’experts a néanmoins émis une double note de bas de page sur ce cas, ce qui signifie qu’il demeure en haut de la liste des préoccupations de cette commission, année après année. La commission d’experts a fait des commentaires sur les obligations du Myanmar en vertu de l’article 1 de la convention de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible, et c’est pour cette raison que nous sommes ici, car la suppression du travail forcé prend trop de temps.

Nous notons que, pas plus tard qu’en mars 2019, le Conseil d’administration du BIT a discuté de la question du suivi de la résolution concernant les mesures qu’il reste à prendre au sujet du Myanmar, adoptée par cette Conférence en 2013. Nous constatons que, en mars 2019, le Conseil d’administration a exprimé de sérieuses préoccupations quant à la persistance du travail forcé, notant les observations de la commission d’experts relatives à la convention, et a instamment demandé au gouvernement d’intensifier sa coopération déjà étroite avec l’OIT pour l’élimination du travail forcé, y compris dans le cadre du PPTD, récemment signé, bien que le développement d’un plan d’action assorti de délai dont nous avons entendu le gouvernement dire qu’il était prêt à être soumis au Cabinet, et pour l’établissement de – et une transition vers – une procédure efficace de traitement des plaintes. Regardant à présent les observations de la commission d’experts, nous relevons quelques problèmes. D’abord, nous notons que la commission d’experts se concentre sur le travail forcé employé par les forces armées. Le rapport ne traite pas des instances ou pratiques dans l’économie en général. Il s’agit là d’une remarque importante parce qu’elle traite les questions qui nous intéressent aujourd’hui dans le sens de l’amélioration d’une situation, mais pas de celui de la détérioration d’une autre. En d’autres termes, nous en sommes maintenant aux dernières étapes, aussi difficiles soient-elles. Il est donc important de noter que, dans l’ensemble, le Myanmar peut être considéré comme un cas de progrès, avec quelques points, des points négatifs à régler.

Le rapport de la commission d’experts relève dans le rapport des conclusions détaillées de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Myanmar du 17 septembre 2018 que l’emploi du travail forcé par les forces armées persiste, en particulier dans les Etats de Kachin et de Shan, de même que parmi les ethnies rakhine et rohingya. La commission d’experts a également noté que la plupart du personnel militaire impliqué dans le travail forcé n’est passible que de sanctions disciplinaires, et là j’aimerais ajouter: notant le commentaire du gouvernement selon lequel un certain nombre de militaires ont été sanctionnés et qu’un civil, qui était également en infraction, a été condamné à une année d’emprisonnement, il me semble qu’il y a là une disparité entre les niveaux de sanction appliqués dans l’armée, d’une part, et dans la population civile, d’autre part. Et j’aimerais en outre ajouter cela à la liste des questions qu’il faut examiner. Il devrait y avoir un traitement équitable et transparent, quel que soit l’auteur des faits.

Nous réitérons le ferme engagement du groupe des employeurs en faveur de l’élimination totale du travail forcé, tel que défini à l’article 2 de la convention. Nous considérons toute forme de travail forcé comme étant inacceptable et condamnons sans équivoque le recours au travail forcé par l’armée dans ces régions. Le groupe des employeurs demande instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures urgentes et transparentes nécessaires pour accélérer l’accomplissement de ses obligations en vertu de la convention à cet égard.

En ce qui concerne les sanctions, selon l’article 25 de la convention, le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales; il oblige tout Membre qui ratifie la présente convention à veiller à ce que les sanctions imposées par la loi soient adéquates et strictement appliquées.

La commission d’experts a noté avec satisfaction l’adoption de la loi de 2012 sur l’administration des villages, qui abroge la loi de 1907 sur les villages et les villes et définit comme infraction pénale, punissable par emprisonnement ou amendes, le recours au travail forcé par quelque personne que ce soit. Cependant, la commission a noté qu’aucune mesure n’a été prise pour modifier l’article 359 de la Constitution du Myanmar, qui exclut de l’interdiction du travail forcé les «tâches assignées par l’Union, conformément à la loi dans l’intérêt du public» et pourrait être interprété de manière à permettre une imposition généralisée du travail forcé de la population dans un certain nombre de circonstances. Sur ce point, les employeurs notent que le pays n’a pas encore été en mesure de réviser la Constitution, mais le conseiller d’Etat a récemment annoncé son intention de procéder à une révision de la Constitution. Par conséquent, nous demandons au gouvernement de fournir des informations à ce sujet afin de permettre de comprendre les mesures qu’il a prises et qu’il envisage de prendre pour faire en sorte que la révision de la Constitution soit une réalité de toute urgence.

Bien que le Myanmar n’ait pas encore éradiqué le travail forcé, les mesures que je viens d’évoquer sont des étapes importantes vers cet objectif. Il y en a d’autres au sujet desquelles mes collègues du Myanmar ne manqueront pas d’intervenir. Nous apprécions les mesures prises et l’aide fournie par le BIT au gouvernement ainsi que les nombreuses observations et discussions de la présente commission, de la commission d’experts et du Conseil d’administration à ce jour. Cela étant, et compte tenu du fait qu’un nombre inacceptable de cas de travail forcé persistent, nous exhortons le gouvernement à intensifier sa coopération étroite avec le BIT pour en finir au plus vite avec le travail forcé, de la manière la plus efficace possible. Des efforts particuliers doivent être déployés pour finaliser le travail en cours relatif à l’établissement d’un mécanisme national efficace et fiable de traitement des plaintes relatives au travail forcé.

Le groupe des employeurs estime que la convention no 29 est importante non seulement parce qu’il s’agit d’une convention fondamentale, mais aussi et surtout parce que son essence même réside dans la nécessité de protéger la dignité humaine et la liberté contre l’oppression et l’esclavage. Il est donc essentiel que le Myanmar applique pleinement et mette en œuvre, à la fois en droit et en pratique, les dispositions de cette convention.

Nous notons que le Protocole d’accord sur un plan d’action pour l’élimination de toutes les formes de travail forcé et le Protocole d’accord complémentaire établissant le mécanisme du traitement des plaintes ont expiré en décembre 2018. Toutefois, le gouvernement nous a indiqué que ce travail a progressé et doit être soumis sous peu au Cabinet en ce qui concerne le plan d’action, et que cela prépare le terrain pour la fin des travaux sur le mécanisme de traitement des plaintes. Par conséquent, nous sommes prêts à croire que le nouveau PPTD, approuvé par le Forum de dialogue tripartite national de septembre 2018, qui s’aligne sur le plan de développement durable du Myanmar, se poursuivra et accentuera les efforts déployés jusqu’à présent pour éliminer le travail forcé et le travail des enfants au Myanmar.

Nous notons également qu’un nouveau projet de mécanisme des plaintes a été communiqué pour commentaires aux partenaires sociaux, et que des informations explicatives de support ont également été diffusées au cours des derniers jours. Les employeurs du Myanmar se sont engagés avec détermination à travailler de manière constructive avec le gouvernement pour y donner suite.

Nous souhaiterions par ailleurs vous faire savoir que le secteur privé lancera bientôt, par le biais de la Chambre de commerce et de l’Association des fabricants de vêtements du Myanmar (MGMA), un nouveau service d’audit du travail comprenant un chapitre spécial ciblant le travail forcé. Cette mesure vise à sensibiliser et à appuyer les entreprises dans l’évaluation de la présence de toute forme de pratique de travail forcé dans leurs activités. En outre, la Chambre de commerce a récemment organisé, avec le soutien du BIT et la participation de l’Organisation internationale des employeurs (OIE), un vaste forum sur les entreprises responsables au Myanmar et les droits de l’homme, qui permettra de recenser les initiatives existantes et de sensibiliser le public sur l’importance de la mobilisation des entreprises en matière de prévention de toute forme de travail forcé ou obligatoire.

Une chose est sûre, les employeurs sont fermement résolus à supprimer le travail forcé au Myanmar, et nous travaillerons conjointement avec le groupe des travailleurs, le gouvernement et le BIT pour accomplir de réels progrès, mesurés à l’aune des principaux indicateurs que sont le nombre de cas de travail forcé, les cas communiqués au gouvernement et au BIT et qui auront été réglés, ainsi que le nombre de recrues mineures affranchies du travail forcé.

Grâce aux efforts du BIT et des partenaires tripartites, nous notons que le nombre de plaintes reçues en vertu du Protocole d’accord complémentaire a diminué. L’année dernière, 130 plaintes relevaient du mandat du Protocole d’accord complémentaire. La grande majorité de ces plaintes – 108 – concernaient des cas de recrutement de personnes mineures, et 76 plaintes ont été soumises au gouvernement. Au cours de cette année, le BIT a également clos 431 cas en suspens depuis des années. Bien que l’objectif d’éradication totale du travail forcé n’ait pas encore été atteint, ces chiffres sont encourageants. Nous sommes convaincus que ces efforts, combinés à l’engagement constant du gouvernement, conduiront finalement à l’éradication totale du travail forcé au Myanmar.

C’est pourquoi nous exhortons le gouvernement à poursuivre ses efforts pour assurer l’élimination du travail forcé sous toutes ses formes, tant en droit que dans la pratique. Nous exhortons en particulier le gouvernement à modifier toute législation nationale incompatible avec la convention no 29, en particulier la loi de 2019 portant modification de la loi sur les villages et les villes et le Code pénal, à imposer et appliquer des sanctions dissuasives à ceux qui ont recours au travail forcé et à veiller à ce qu’une telle dissuasion s’applique de manière uniforme et équitable aux forces armées et aux civils. S’agissant des activités de renforcement des capacités de prévention et de dissuasion du recours au travail forcé, nous notons là également que le pays doit absolument adapter ses efforts de manière à atteindre toutes les régions et tous les Etats.

Donc, ainsi que nous l’avons entendu dire, les conflits internes au Myanmar ont une longue histoire, et certains Etats sont beaucoup plus difficiles à sensibiliser simplement parce qu’ils sont moins accessibles à quelque voie de dialogue que ce soit. Cela représente un défi particulier. Néanmoins, des efforts supplémentaires devraient être déployés dans cette direction. Enfin, nous exhortons le gouvernement à rassembler et à fournir périodiquement au BIT, à cette Conférence, et plus largement à l’ensemble de la population, des informations sur les progrès réalisés, de manière à ce que la population du Myanmar soit confiante que les choses qu’elle redoute le plus ne se produiront pas à l’avenir.

Nous souhaitons par ailleurs souligner les progrès significatifs finalement accomplis en matière d’élimination des pratiques de travail forcé et noter que les cas actuels de plaintes visent principalement les forces armées. C’est donc la priorité pour combler définitivement l’écart. Reconnaissant les progrès accomplis, permettez-moi de conclure par le souhait que, la prochaine fois que la commission examinera le cas du Myanmar, elle le citera comme un cas de progrès.

Membres travailleurs – En 2013, la commission avait décidé de mettre fin à toutes les sanctions pendantes imposées au gouvernement du Myanmar en vertu de la résolution de la Conférence de 2000. Cette résolution avait autorisé les Etats Membres à prendre des mesures en vertu de l’article 33 de la Constitution de l’OIT pour contraindre le Myanmar à se conformer aux recommandations du Rapport de la commission d’enquête de 1998 sur les violations graves et systématiques de la convention. La décision de 2013 faisait suite à l’adoption par le gouvernement, en 2012, d’une stratégie commune élaborée avec le BIT pour l’élimination du travail forcé à la fin de 2015. Malheureusement, le gouvernement a échoué dans cette entreprise, aussi bien à la fin de 2015 qu’à la fin de 2018, délai fixé dans le cadre d’un plan d’action révisé. En effet, bon nombre des activités prévues dans les plans de 2012 et 2018 n’ont jamais été mises en œuvre ou ne l’ont pas été pleinement. En raison du manque de volonté politique suffisante, le travail forcé, y compris les recrutements par l’armée nationale, se poursuit, en particulier dans les zones de conflit au sein des communautés ethniques.

Aujourd’hui, les militaires responsables de la traite des personnes exploitent régulièrement des adultes et des enfants qui se retrouvent dans des situations de travail forcé dans les mines, la pêche et d’autres activités au Myanmar. D’autres font l’objet de trafic à l’étranger, y compris en Thaïlande et en Malaisie, pour le travail dans la pêche, l’agriculture, le bâtiment, les manufactures et autres travaux. Certains d’entre eux sont sauvagement assassinés par leurs trafiquants et abandonnés dans des fosses communes sur leur route. Malgré des réformes législatives menées pour sanctionner les exactions de travail forcé au Myanmar, rares sont ceux qui ont été sanctionnés, essentiellement des soldats de grade inférieur ayant été condamnés à de simples sanctions administratives, dérisoires au regard des crimes qu’ils ont perpétrés.

Au cours des dernières années, nous avons vu un gouvernement toujours hostile à la transparence, emprisonnant des reporters sous l’inculpation d’entrave au suivi international, y compris celui de l’ONU. Nous notons que le Protocole d’accord complémentaire, qui avait posé des engagements clairs en 2007, est maintenant devenu caduc sans avoir été remplacé par un système national opérationnel qui bénéficierait de la confiance des partenaires sociaux et des victimes. Bien que l’établissement d’un nouveau mécanisme géré par le gouvernement doive être développé en vertu du PPTD de 2018, il reste à voir si cela sera efficace, étant donné que le l’armée elle-même a recours au travail forcé et que le gouvernement n’a, à ce jour, pas démontré sa capacité ou sa volonté de prendre des mesures efficaces pour prévenir le travail forcé, tenir pour responsables ceux qui y recourent et leur appliquer des sanctions efficaces, et fournir aux survivants une réparation appropriée.

Nous sommes profondément préoccupés par le fait que, six ans à peine après la dernière séance spéciale de la commission sur le Myanmar, nous discutions une fois de plus des exactions de travail forcé généralisées. La commission d’experts a exprimé dans sa double note de bas de page concernant le cas du Myanmar sa profonde préoccupation devant la persistance du travail forcé imposé par l’armée nationale dans les Etats de Kachin et de Shan ainsi qu’au sein des ethnies rakhine et rohingya.

Le rapport de 2018 de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur le Myanmar fournit des informations abondantes et crédibles sur le recours au travail forcé au cours des dernières années, en particulier par l’armée nationale. En ce qui concerne le travail forcé dans les Etats de Kachin et de Shan, la mission a vérifié la tendance à la persistance d’un recours systématique au travail forcé par les forces armées. La mission a également signalé des atrocités dans l’Etat de Rakhine, y compris contre des enfants et des femmes.

La mission a également signalé des récits concordants d’hommes et de femmes tués par la Tatmadaw (armée nationale) dans un contexte de travail forcé, soit parce qu’ils ont refusé de travailler, essayé d’échapper aux soldats ou parce qu’ils étaient tout simplement incapables de continuer à travailler. Il est vrai que le gouvernement a déployé des efforts pour empêcher la conscription forcée d’enfants dans l’armée. Cependant, il existe des rapports crédibles selon lesquels une telle conscription se poursuivrait. Dans son rapport au Conseil d’administration de février 2019, le bureau de liaison de l’OIT a signalé 116 cas de recrutement forcé en 2018, tout en observant que le nombre de cas avait diminué. Le BIT a également signalé que 75 enfants recrutés ont été libérés en août 2018, dont 42 cas soumis par le BIT. Il existe malheureusement des rapports indiquant que le gouvernement a pris des mesures punitives contre d’anciens enfants soldats. Le rapport de 2018 sur la traite des personnes aux Etats-Unis explique par exemple que, plutôt que de les orienter vers des services de protection, la Tatmadaw a porté plainte pour fraude contre un groupe de mineurs accusés d’avoir menti sur leur âge.

Dans un autre cas, un ancien enfant soldat a été reconnu coupable de diffamation et condamné à deux ans de prison en avril 2018 pour s’être entretenu avec des médias internationaux. Comme le groupe des travailleurs l’a toujours souligné, les auteurs d’infractions en matière de travail forcé ne sont pas sanctionnés à la mesure de leur crime.

La commission d’experts souligne que, depuis 2007, seuls 377 soldats, dont seulement 17 pour cent étaient des officiers, ont été confrontés à des mesures de discipline militaires de divers degrés en vertu du mécanisme des plaintes. Cependant, des rapports antérieurs indiquent que de telles mesures disciplinaires peuvent consister, par exemple, en une suspension temporaire de fonction ou en une rétrogradation.

En outre, une seule personne a été sanctionnée en vertu du Code pénal et le rapport ne précise pas la sanction. Cela n’est tout simplement pas acceptable.

Nous nous souvenons d’un précédent rapport du bureau de liaison de l’OIT au sujet des plaintes qu’il avait reçues sur la pratique de travail forcé dans les camps de travaux forcés. Là, les prisonniers avaient été amenés à travailler dans des carrières et des plantations gérées par les autorités pénitentiaires à des fins privées, dans un but mercantile. Ou encore, des prisonniers étaient assignés au travail dans des plantations privées à proximité des centres de redressement au profit des autorités, sans être rémunérés.

Le Rapporteur spécial pour le Myanmar a également exprimé sa profonde préoccupation devant le recours à l’emploi pour des travaux pénitentiaires pénibles, comme l’enchaînement de prisonniers, à titre de sanction. D’autres sources ont signalé de graves abus de travail pénitentiaire. Ceci est déjà profondément troublant en soi, mais c’est d’autant plus troublant que le gouvernement a continué d’appréhender et d’emprisonner de nombreuses personnes ces dernières années, simplement parce qu’elles avaient exercé leur droit à la liberté d’expression, leur droit de réunion et leurs droits syndicaux.

En outre, le travail forcé est également persistant dans le secteur privé. En 2016, le BIT a mené une étude détaillée sur le travail des enfants dans l’agriculture, en particulier la pêche, la canne à sucre et les haricots, dans les régions de l’intérieur du pays. Les résultats de cette enquête sont alarmants et révèlent que, dans ces trois sous-secteurs, des enfants étaient soumis au travail forcé. Des rapports crédibles indiquent que des hommes, des femmes et des enfants se trouvaient dans des situations de travail forcé dans l’agriculture, la pêche et la prospection de jade et autres pierres précieuses.

L’emploi du travail forcé dans l’industrie du jade a suscité une attention particulière au cours des dernières années. Un rapport publié par Global Witness en 2015 fait état de violations des droits de l’homme dans l’industrie du jade dans l’Etat de Kachin. Les mines sont gardées par la Tatmadaw et leur présence, ainsi que la présence de groupes ethniques armés, a conduit à l’augmentation des abus, tels le viol et le travail forcé, autour des sites miniers. Ceux qui risquent leur vie pour extraire le jade dans cette industrie perçoivent des gains dérisoires au regard des énormes bénéfices récoltés par l’armée et les négociants.

Nous sommes par ailleurs préoccupés devant les politiques et pratiques discriminatoires de l’Etat contre la population rohingya. Les soi-disant opérations de dédouanement, qui ont commencé en 2017, ont eu pour conséquence une catastrophe humanitaire avec l’expulsion de plus de 700 000 personnes de l’Etat de Rakhine. L’extrême vulnérabilité des Rohingya a conduit, entre autres problèmes, à une exposition considérablement accrue au travail forcé de la part d’acteurs nationaux, mais aussi d’autres acteurs étrangers à l’Etat. Par exemple, beaucoup de femmes et de filles qui ont fui l’armée vers le pays voisin, le Bangladesh, ont été victimes de trafic sexuel tandis que d’autres sont victimes de la traite à des fins de travail domestique. Des enfants rohingya fuyant la violence ont également été enlevés en transit et vendus pour des mariages forcés en Indonésie, en Malaisie et en Inde. Ceux qui sont déplacés à l’intérieur du pays encourent également un risque accru de travail forcé.

Enfin, nous évoquerons ceux qui ont été exposés au travail forcé, notamment dans l’Etat de Rakhine, et qui ont été emprisonnés par les autorités. Par exemple, en octobre 2017, Kyaw Moe Tun, qui a signalé des cas de travail forcé dans l’Etat de Rakhine a été inculpé de diffamation et incitation en vertu de l’article 505 du Code pénal et condamné à dix-huit mois de prison. L’évolution de la situation au Myanmar exige une attention urgente du gouvernement et de la communauté internationale.

Membre employeuse, Myanmar – Je voudrais remercier la commission de nous avoir donné la possibilité de commenter les observations contenues dans le rapport et de donner un aperçu de la contribution de la Fédération des chambres de commerce et d’industrie du Myanmar en général pour assurer que le Myanmar respecte la convention.

Le PPTD signé en septembre 2018 produit des effets significatifs dans le domaine du renforcement de la protection contre les formes inacceptables de travail, en particulier le travail forcé et le travail des enfants. Les employeurs sont fermement résolus à éliminer le travail forcé dans le pays, et nous travaillons avec les partenaires sociaux, le gouvernement et le BIT à montrer les progrès accomplis en ce qui concerne les deux principaux indicateurs identifiés, à savoir le nombre de cas de travail forcé communiqué au gouvernement et au BIT qui ont été résolus et le nombre de recrues mineures libérées.

Grâce aux efforts du BIT et des partenaires tripartites, le nombre de plaintes reçues en vertu du Protocole d’accord complémentaire a fortement baissé. Bien que l’objectif d’éradication totale du travail forcé n’ait pas encore été atteint, les employeurs n’en ont pas moins noté les chiffres très encourageants, déjà connus.

Ces progrès doivent être salués. Il convient également de noter un certain nombre de réalisations récentes et de jalons posés au cours des dix derniers mois. Soixante-quinze recrues mineures, dont 42 cas soumis par le BIT, ont été affranchies et libérées de la Tatmadaw en septembre. Un consultant à durée déterminée a été chargé de fournir un appui pour le processus de soumission des plaintes pendant trois mois.

En ce qui concerne le Plan d’action sur le travail forcé, un manuel de formation sur les choses à faire et à ne pas faire, des directives et des programmes de formation ont été convenus, et la première session du TOT a eu lieu du 14 au 15 janvier de cette année. Plusieurs dialogues ont eu lieu tant au niveau de la direction que du responsable politique pour renforcer la collaboration.

Le Myanmar traverse en ce moment une phase cruciale car, après de nombreuses années de soutien par le BIT, il est essentiel d’établir un mécanisme national institutionnalisé de traitement des plaintes pour traiter les cas de travail forcé. Le système doit gagner la confiance de toutes les parties prenantes. A cet égard, l’appui du BIT reste indispensable.

En tant que partenaires sociaux et représentants du secteur privé, nous devons jouer notre rôle dans le plaidoyer pour un système absolument transparent, avec un rapport publié des données relatives aux cas. Nous sommes conscients que c’est extrêmement délicat et sensible – le travail forcé étant perpétré à la fois par des acteurs étatiques et non étatiques, dans des contextes de conflit ou exempts de conflit. Le ministère du Travail a récemment présenté, lors du dernier Forum national du dialogue tripartite – vers la fin du mois de mai 2019 –, un projet de schéma pour l’établissement du mécanisme national de traitement des plaintes. Les plaintes pourraient être reçues par les partenaires sociaux et de nombreuses organisations de la société civile. Le système devrait encore être affiné; des demandes de commentaires adressées par le gouvernement au sujet du mécanisme envisagé circulent actuellement et cela semble aller dans la bonne direction.

Pour renforcer le processus, un atelier de partage des connaissances sur les plaintes nationales et les mécanismes de règlement des griefs a été organisé par le BIT avec l’appui du Service des principes et droits fondamentaux au travail (FUNDAMENTALS) à Genève, mettant en lumière les modèles adoptés par plusieurs pays tels que le Royaume-Uni, le Brésil, le Qatar et l’Ouzbékistan.

En ce qui concerne l’absence d’action relative à la modification de l’article 359 de la Constitution, lequel exclut de l’interdiction des travaux forcés les tâches assignées par l’Union en conformité avec la loi – dans l’intérêt du public –, qui pourrait être interprétée comme une exemption généralisée du travail forcé, il n’a pas encore été possible de réexaminer la Constitution, mais le Conseiller d’Etat a récemment annoncé que le pays avait l’intention d’en entreprendre la révision. Si cette intention se concrétise, nous ferons en sorte d’attirer l’attention sur l’article 359.

S’agissant du rapport sur les conclusions détaillées de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits, nous réitérons l’engagement fort du secteur privé pour l’élimination totale du travail forcé et jugeons inacceptable le recours au travail forcé dans le pays. Le gouvernement devrait veiller à la pleine application de la législation nationale et du Code pénal, y compris des sanctions appropriées pour les auteurs.

En ce qui concerne la formation et le renforcement des capacités, le pays doit absolument adapter ses efforts de manière à atteindre toutes les régions et tous les Etats. A cet égard, une approche plus décentralisée serait très certainement utile.

L’UMFCCI, la Chambre de commerce et l’Association des fabricants de vêtements du Myanmar (MGMA) ont fortement développé, avec le soutien du projet OIT-ACT/EMP, les départements de relation de travail et des relations professionnelles. Le 23 mai 2019, un nouveau service d’audit du travail qui comporte un chapitre spécifique sur le travail forcé a été lancé: le service contribuera à sensibiliser et aider les entreprises à évaluer la présence de toute forme de travail forcé dans le contexte de leurs activités. Les premières visites sur les lieux de travail sont programmées dans la semaine du 24 au 28 juin. L’UMFCCI et la MGMA ont également dédié des lignes téléphoniques dédiées aux entreprises afin que leurs membres dispensent des conseils sur les bonnes pratiques en matière de travail supplémentaire et afin d’éviter toutes violations qui pourraient éventuellement aboutir à des formes de travail forcé ou obligatoire.

En outre, la chambre a organisé avec le soutien du BIT et la participation de l’OIE un grand forum sur les entreprises responsables au Myanmar et les droits de l’homme, les 30 et 31 mai, ce qui a encore une fois été utile pour mettre en lumière les initiatives et sensibiliser à l’importance de la mobilisation des entreprises pour prévenir toute forme de travail obligatoire ou forcé.

Je suis également heureuse d’annoncer que l’UMFCCI a adhéré officiellement en tant que partie prenante à l’OIE le 9 juin, un jour avant la Conférence. Faire partie de ce réseau mondial aidera la chambre dans ses travaux de conception des meilleurs plans et stratégies visant à éliminer définitivement le travail forcé dans toutes les pratiques industrielles et commerciales.

L’UMFCCI estime précieux le statut de figurer parmi les mandants tripartites. Avec confiance et respect, avec un seul objectif pour l’amélioration pour tous, nous avons établi une relation forte avec les organes tripartites.

Nous avons réussi à recevoir l’initiative Fonds Vision Zéro, attribué par le G20, en février 2017 à Hambourg, Allemagne. Mme Angela Merkel, Chancelière de l’Allemagne, l’a mentionné hier lors de son discours en séance plénière, et nous avons obtenu le financement pour la construction du Centre de formation à la sécurité et à la santé au travail, récemment achevé. Le centre commencera à dispenser des formations dans le domaine de la sécurité et santé au travail (SST), au bénéfice de tous les partenaires sociaux, ce qui n’aurait pas été possible sans les efforts des mandants tripartites. Bien qu’étant une jeune démocratie et une jeune économie, cette réalisation tripartite a été applaudie par le ministère allemand du Travail, à Berlin, en Allemagne, il y a une semaine lorsque nous nous sommes rencontrés pour faire le point sur l’avancement de l’initiative Fonds Vision Zéro.

Une autre réalisation importante de la chambre consiste dans le projet du Fonds mondial de partenariat public-privé bisannuel (2019-20) dédié à l’accès à la santé, avec la participation de deux ONG locales et une entreprise pharmaceutique internationale basée en Suisse, Novartis. L’UNOPS est notre principal interlocuteur. La candidature pour le projet a été lancée en mars 2018 et a été approuvée en août 2018 pour les zones affectées par des conflits et où l’infrastructure pour l’acheminement des médicaments en vue des traitements est insuffisante. Les zones ciblées sont Rakhine, Chin et Sagaing pour cette année, et Kachin, Shan, Mon et Mandalay pour l’année prochaine. L’objectif est d’utiliser un service rapide de transport des biens de consommation via le réseau de la Chambre de commerce fourni par des entreprises privées pour l’acheminement des médicaments nécessaires vers les zones isolées, reliant la source de médicaments aux zones qui en manquent.

Des activités se développeront en marge de ce projet: la promotion du Pacte mondial des Nations Unies auprès des entreprises, la sensibilisation au respect des droits du travail et des droits de l’homme, au travail forcé, au travail des enfants, à la sécurité et à la santé au travail, etc.

Je suis le point focal de l’UMFCCI pour ce projet. Je me suis rendue dans la région de Sagaing début mars pour le projet et pour promouvoir le Pacte mondial des Nations Unies. J’avais prévu d’effectuer deux visites à Rakhine entre la troisième semaine de mars et début avril, mais des événements imprévus se sont produits dans les zones à visiter, m’amenant à reprogrammer ces visites pour fin juin.

L’UMFCCI travaille en étroite collaboration avec le ministère de l’Education du Myanmar dans le cadre du développement du capital humain, fortement soutenu par le BIT, en vue de fournir une formation professionnelle de courte durée aux personnes déplacées dans les camps de Kachin et de Rakhine selon le principe d’inclusivité, de créer un accès à l’entrepreneuriat et aux emplois et d’empêcher l’exploitation, grâce au BIT. Nous avons participé aux travaux conjoints du BIT et du ministère de l’Education sur l’évaluation du marché du travail à Rakhine. Le rapport en a été officiellement présenté au public le 22 mai, le but étant de fournir des emplois décents aux nécessiteux, en rapprochant l’enseignement professionnel et les industries, et d’éviter le recours à l’exploitation.

Nous nous sommes réunis au Forum national de dialogue tripartite tous les quatre mois, en tout 13 fois déjà. Nous rencontrons souvent les partenaires sociaux à l’occasion du processus de réforme de la législation du travail, ce qui renforce encore notre partenariat.

Le développement continu du processus tripartite représente la garantie d’un engagement ferme de la part des partenaires sociaux à investir toute leur énergie et tout le temps nécessaire pour en finir avec le travail forcé au Myanmar. Nous allons continuer à œuvrer dans ce sens.

Alors que nous travaillons sans relâche au renforcement des partenariats, le surgissement de la double note de bas de page concernant ce cas est très décourageant. Il est possible que nous manquions d’informations; il se peut aussi que la commission n’ait pas été au fait des développements du processus. Quoiqu’il en soit, ce qui importe, c’est que nous gardions le bon cap.

Parions que le cas du Myanmar sur la convention no 29 sera entendu comme un cas de progrès la prochaine fois.

Membre travailleuse, Myanmar – Les travailleurs du Myanmar sont exposés à des violences et coercitions de toute nature au sein des communautés ou sur le lieu de travail. Nous luttons âprement pour l’instauration d’une société moderne fondée sur l’égalité pour toutes les ethnies et sur le dialogue social.

L’application de cette convention au Myanmar a été évoquée pour la première fois dans une réclamation en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT en 1994. La Confédération des syndicats du Myanmar (CTUM), alors connue en tant que Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), documentait les cas de travail forcé et les atrocités de la junte militaire pour aider le BIT dans son examen des cas. A cette époque, l’accès aux zones contrôlées par l’armée birmane et les organisations ethniques armées était interdit. Ces zones sont en outre riches en ressources naturelles telles que le bois, l’or, les pierres précieuses, le pétrole et le gaz dans les Etats de Kachin, Shan, Karen et Rahkine, où se pratiquent des exactions de travail forcé.

Aujourd’hui, la libre circulation est acquise, même s’il existe des limites d’accès aux zones touchées. Des plaintes indiquent que des agriculteurs et des villageois sont encore contraints de construire des routes pour des projets non budgétés ou pour générer des bénéfices au profit d’entreprises appartenant au personnel de l’armée impliqué dans des infractions de travail forcé. Le Myanmar doit encore travailler plus dur pour devenir un pays où le travail forcé, sous toutes ses formes, aura été éradiqué.

L’application de la loi, l’inspection du travail et la liberté syndicale n’existent pas dans les zones sous contrôle militaire et dans les zones de conflit. Dans certains secteurs de l’industrie et de la confection, on trouve encore du temps supplémentaire de travail involontaire et non rémunéré. Nous avons eu quelques cas où les inspecteurs du travail interprètent souvent à tort la loi pour plafonner le nombre d’heures supplémentaires dont le paiement peut être réclamé.

Les syndicats sont profondément préoccupés de ce que le projet d’amendement de la loi sur l’organisation du travail continue d’exclure le secteur informel et le secteur public. Les projets d’amendements limitent toujours l’enregistrement des syndicats à des professions extrêmement restreintes et selon des procédures d’application intrusives. Ceci exposerait davantage les travailleurs au travail forcé.

La pauvreté, les conflits armés perpétuels et les déplacements forcés poussent des milliers d’agriculteurs dépossédés, de villageois et de travailleurs à accepter des conditions de travail forcé. Ils n’ont pas le choix. La Chambre haute du Parlement a estimé en 2016 à 2 millions d’acres les terres confisquées à travers le pays. Environ 11 000 acres de terres ont été restituées à des agriculteurs.

Une procédure de retour et de restitution des terres plus inclusive et plus transparente serait nécessaire au niveau des cantons. La procédure reste compliquée à cause des concessions commerciales complices, d’une mauvaise classification ainsi que du manque de documentation. Il reste encore beaucoup à faire pour restaurer les droits légitimes à la terre et l’indemnisation des agriculteurs et villageois dépossédés.

Avant tout, il incombe au gouvernement de veiller à ce que les villageois déplacés par les conflits armés ne perdent pas leurs terres. Aujourd’hui, environ 5 millions de travailleurs originaires du Myanmar sont employés à l’étranger. Ils sont exposés à des frais d’embauche illégaux, à une administration inefficace, à la corruption syndicale qui les soumet à des conditions de travail forcé, à la migration illégale et à la traite des êtres humains.

Bien que nos lois fixent un plafond d’environ 100 dollars des Etats-Unis (dollars E.-U.) aux travailleurs du Myanmar cherchant à obtenir un emploi à l’étranger, de nombreux travailleurs s’endettent après avoir payé un montant de 600 à 800 dollars E.-U. à des agences ou des courtiers. Les faux contrats et les contrats de substitution sont courants.

Par exemple, une travailleuse migrante citoyenne du Myanmar a été placée à Singapour pour un travail auprès de deux ménages, sans vacances ni congés. Elle n’a pas été autorisée à quitter son emploi ou à changer les conditions et lieux de travail, à moins de s’acquitter d’une indemnité de six mois de salaire auprès du courtier. Dans d’autres cas, des travailleurs envoyés en Thaïlande ont été rapatriés, aucun travail n’ayant été convenu. D’autres sont devenus des travailleurs sans papiers après avoir réalisé que le visa et le permis de travail délivrés par les courtiers étaient des faux.

La servitude domestique involontaire, les mariages forcés de l’autre côté de la frontière, en Chine, et le trafic de personnes à des fins sexuelles persistent et représentent 70 pour cent des cas signalés par la police de surveillance de la traite des êtres humains en 2018. Ces femmes victimes, estimées à plusieurs milliers, ne peuvent pas se plaindre et sont considérées comme des cas de dépassement de séjour dans le pays d’accueil, sans droit à une juste réparation et réintégration

Le Myanmar est un pays en transition. Les syndicats participent au conseil tripartite chargé d’examiner les plaintes avec les associations d’agences de recrutement de migrants et la police de la traite des êtres humains. A ce jour, 22 agences ont été mises sur liste noire, et des dédommagements ont été accordés aux plaignants. C’est un tout petit pas accompli par rapport à la gravité du problème. Nous avons besoin de l’appui du BIT.

Il est nécessaire de garantir la cohérence et la mise en œuvre effective de cette convention dans toute la législation nationale, et l’idéal serait que les règlements internes des organismes publics soient inclus dans les codes disciplinaires de l’armée.

Pour ce faire, nous demandons instamment la création d’une commission parlementaire sur le travail forcé. La commission devrait être dotée de pouvoirs d’investigation pour contrôler la mise en œuvre des recommandations formulées par les institutions internationales en ce qui concerne le travail forcé et la traite des êtres humains, y compris des conclusions de cette commission.

Membre gouvernemental, Thaïlande – J’ai l’honneur de prononcer cette déclaration au nom de l’ASEAN. L’ASEAN reconnaît que le processus de réformes démocratiques au Myanmar avance de manière dynamique et qu’il produit des résultats tangibles dans le domaine de la promotion et de la protection des droits du travail, y compris en vue de l’élimination du travail forcé.

L’ASEAN estime que la coopération durable entre le Myanmar et l’OIT contribue aux efforts du gouvernement pour éliminer le travail forcé. L’ASEAN se félicite de la signature par le Myanmar et l’OIT du PPTD en septembre 2018, car il en résultera des réformes plus positives et plus efficaces pour la promotion et la protection des droits du travail. L’ASEAN espère également que le plan d’action préparé dans le cadre du PPTD sera bientôt finalisé, en particulier la mise en place d’un mécanisme national de plainte du gouvernement du Myanmar pour mettre fin au travail forcé.

Tout en reconnaissant les mesures effectives prises par le Myanmar en coopération avec l’OIT pour éliminer le travail forcé, l’ASEAN souhaiterait proposer que des mesures plus innovantes soient prises pour renforcer les activités de sensibilisation dans l’ensemble du pays afin de prévenir l’exaction du travail forcé non seulement dans le secteur public, mais également dans le secteur privé. L’ASEAN demande à l’OIT et à la communauté internationale de continuer à travailler avec le Myanmar de manière constructive et à assister le gouvernement dans ses efforts pour éliminer le travail forcé.

Membre gouvernemental, Roumanie – Je m’exprime au nom du groupe de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres. Les pays candidats, la Macédoine du Nord et l’Albanie, le pays du processus de stabilisation et d’association, candidat potentiel, la Bosnie-Herzégovine, le pays candidat de l’Association européenne de libre-échange (AELE), la Norvège, membre de l’Espace économique européen, ainsi que la République de Moldova et la Géorgie s’associent à cette déclaration. L’UE et ses Etats membres se sont engagés à promouvoir, à protéger et à respecter les droits de l’homme et les droits du travail, y compris la liberté d’association, de réunion et l’abolition du travail forcé. Nous soutenons le rôle indispensable du BIT dans le développement, la promotion et la supervision de l’application des normes internationales du travail et des conventions fondamentales en particulier. L’UE et ses Etats membres se sont également engagés à promouvoir la ratification universelle et l’application et la mise en œuvre effective des normes fondamentales du travail. Nous souhaitons rappeler l’importance que nous attachons aux progrès en matière de droits de l’homme, de démocratie et d’état de droit au Myanmar. Le respect de la convention no 29 est essentiel à cet égard. Tout en reconnaissant les progrès accomplis ces dernières années, nous notons avec regret que ce cas est aujourd’hui examiné comme un cas grave pour ce qui touche à l’élimination de toutes les formes de travail forcé.

Sur la base du rapport de la commission d’experts, des cas de travail forcé, y compris des recrutements de mineurs par l’armée, la Tatmadaw, sont toujours signalés et sont confirmés par la Mission indépendante d’établissement des faits, créée par le Conseil des droits de l’homme, en particulier dans les Etats de Kachin et de Shan, ainsi qu’au sein des communautés ethniques rakhine et rohingya. Souvent, les victimes reçoivent une nourriture insuffisante, de mauvaise qualité, n’ont pas accès à l’eau et sont maintenues dans des logements impropres, certaines d’entre elles ont subi des violences en cas de résistance, si leur travail est jugé trop lent ou si elles sont surprises en train de se reposer. Les femmes victimes sont également exposées à des violences sexuelles.

Le travail forcé est un phénomène persistant dans le pays malgré l’engagement continu de l’OIT et des Etats Membres depuis plus de deux décennies. Le protocole d’accord sur une stratégie commune pour l’élimination du travail forcé a été signé en 2012, puis un autre protocole d’accord en janvier 2018, qui a approuvé un nouveau plan d’action pour l’élimination de toutes les formes de travail forcé la même année 2018, et a été suivi par la transition vers les PPTD en septembre 2018.

L’UE et ses Etats membres collaborent aussi activement avec le gouvernement pour améliorer les droits du travail dans le pays – y compris par le biais de l’initiative du Myanmar pour les droits du travail. Nous réaffirmons notre ferme engagement à apporter notre soutien au pays à cet égard. En octobre 2018 et février 2019, l’UE a effectué des missions de haut niveau dans le pays dans le contexte de l’engagement renforcé en vertu de l’Accord sur le régime général préférentiel à l’égard des pays les moins avancés (Tout sauf les armes). Le régime général européen préférentiel de l’UE impose aux pays de se conformer aux principes des conventions fondamentales du travail. Il fournit des opportunités de dialogue constructif avec les autorités nationales, notamment sur les questions relatives au travail. Les discussions se sont poursuivies pendant une rencontre de hauts fonctionnaires à Bruxelles à la mi-mai et se tiendront par ailleurs dans le pays à l’occasion du dialogue national sur les droits de l’homme, le 14 juin.

Dans le contexte de la discussion d’aujourd’hui sur la persistance du travail forcé, nous nous félicitons de ce que le gouvernement semble continuer à collaborer avec le BIT sur le mécanisme existant de traitement des plaintes dirigé par l’OIT sur le travail forcé jusqu’à la mise en place d’un mécanisme de traitement des plaintes et que le forum national de dialogue tripartite est consulté lors de la mise en place du mécanisme national des plaintes approprié. Cependant, nous voudrions exprimer notre profonde préoccupation sur un certain nombre de questions:

- Progrès accomplis dans l’établissement du mécanisme national des plaintes sur le travail forcé – Tout en notant la nouvelle version d’un plan d’action national pour la mise en place du mécanisme, approuvée par le ministre du Travail, de l’Immigration et de la Population, on constate que ce document n’a pas été approuvé par d’autres ministères, et en particulier par le ministère de la Défense, administrateur de la Tatmadaw. Une fois mis en place, il est absolument vital que ce mécanisme soit, en pratique, accessible en particulier aux victimes des zones de conflit, que les plaintes fassent l’objet d’enquêtes indépendantes et que les victimes soient protégées. Pendant ce temps, la coopération avec le système de dépôt des plaintes au BIT doit se poursuivre.

- Absence de poursuite pénale des contrevenants – Alors qu’un certain nombre de militaires ont été sanctionnés par une mesure disciplinaire, une seule personne a été condamnée en vertu du Code pénal. L’application stricte des dispositions du Règlement administratif de 2012 sur les comtés ou villages et du Code pénal est essentielle pour qualifier d’infraction pénale l’emploi du travail forcé et en dissuader les auteurs. De plus, les sanctions doivent être appropriées et strictement appliquées.

- L’article 359 de la Constitution reste inchangé malgré les promesses des gouvernements précédents – Cet article exclut de l’interdiction du travail forcé «les tâches assignées par l’Union, en conformité avec la loi, dans l’intérêt du public». Ceci peut être interprété comme une imposition généralisée du travail forcé à la population.

Nous observons que la discussion au sujet des modifications de la Constitution se poursuit au Parlement, et nous espérons que l’article 359 sera amendé à cette occasion. Toutefois, nous sommes préoccupés par le fait que, en dépit des progrès atteints au cours des dernières années sur les questions relatives au travail, nous soyons à présent à un tournant décisif. Nous demandons en conséquence instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires, notamment de renforcer les capacités de divers acteurs, de donner des instructions précises aux militaires pour qu’ils cessent de recourir au travail forcé, de mener des enquêtes appropriées et d’appliquer des sanctions suffisamment dissuasives, ainsi que de finaliser le Plan d’action sur le travail forcé, actuellement en cours d’élaboration avec l’assistance du BIT, et de répondre rapidement aux préoccupations de la commission.

Bien que l’élimination du travail forcé soit au centre de cette discussion, nous exhortons en outre le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour:

- veiller à ce que les projets actuels de la loi sur l’organisation du travail et de la réglementation de la loi sur les conflits du travail soient conformes aux normes internationales du travail. Tout en notant que cette dernière loi a été adoptée en mai, même si elle n’a pas encore été pleinement évaluée, nous saluons quelques progrès, tels que l’élimination des sanctions d’emprisonnement. Cependant, plusieurs lacunes subsistent, notamment l’absence de couverture du secteur public. De plus, nous n’avons pas encore vu les progrès attendus du projet de loi sur l’organisation du travail. En fait, s’il était adopté, le projet actuel représenterait un pas en arrière. Nous demandons instamment au gouvernement de réviser le projet de manière tripartite et en faisant appel à l’assistance technique du BIT pour combler les lacunes actuelles par rapport aux normes internationales du travail;

- ratifier la convention (nº 138) sur l’âge minimum, 1973. Nous notons qu’un consensus tripartite s’est dégagé sur la question. Nous exhortons le gouvernement à ratifier rapidement la convention no 138, étape très importante vers la ratification de l’ensemble des cinq conventions fondamentales de l’OIT restantes;

- aligner le projet actuel de la loi sur les droits de l’enfant sur les normes internationales du travail. Nous notons que cela va être discuté au cours de la session parlementaire;

- adopter la liste finalisée des travaux dangereux pour lutter efficacement contre le travail des enfants;

- mettre en œuvre des mesures fondées sur la base du dialogue tripartite pour résoudre les problèmes qui restreignent la liberté d’association dans la pratique;

- prendre des mesures efficaces pour garantir le respect des libertés civiles des travailleurs, notamment en révisant la loi sur les réunions et les assemblées pacifiques, conformément aux recommandations de la mission de contacts directs de l’OIT d’octobre 2018. Ceci demeure vital compte tenu des accusations portées en février 2019 contre des syndicalistes à Mandalay;

- prendre de nouvelles mesures pour améliorer la sécurité et la santé au travail. Tout en reconnaissant l’amélioration récente de la loi comme un pas positif, nous demandons instamment au gouvernement d’appliquer de manière efficace la loi et de la réviser régulièrement, en particulier pour en élargir le champ d’application.

L’UE et ses Etats membres continueront d’aider le gouvernement à cet égard, et nous continuerons à suivre de près la situation dans le pays.

Membre gouvernementale, Chine – Nous notons qu’avec l’assistance du BIT le gouvernement du Myanmar a activement mené plusieurs activités visant à promouvoir l’élimination du travail forcé et formulé un certain nombre de règlements et de lois, et le travail forcé a diminué de manière substantielle. En 2018, le gouvernement du Myanmar a signé avec l’OIT le PPTD, le développement et la coopération étant très importants pour l’instauration du travail décent dans les pays Membres.

Le gouvernement chinois demande au BIT et à la communauté internationale d’aider le gouvernement du Myanmar à éradiquer le travail forcé et à accentuer son assistance au développement. Nous soutenons la demande du gouvernement du Myanmar d’élever le bureau de liaison de l’OIT au rang de bureau permanent du Myanmar et nous encourageons également le gouvernement du Myanmar à adopter de nouveaux plans d’action visant à mettre en place un mécanisme de plainte pour travail forcé.

Membre travailleuse, Japon – Tout en notant les efforts du gouvernement du Myanmar pour supprimer le travail forcé, au moyen de la prolongation du Protocole complémentaire et avec l’approbation du premier PPTD en 2018, nous aimerions partager notre préoccupation au sujet de la situation du travail forcé au Myanmar, décrite dans le rapport de la Mission indépendante d’établissement des faits du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et aux réfugiés de 2018.

Premièrement, s’agissant du cas du travail forcé imposé par la Tatmadaw du Myanmar et les organisations armées ethniques, pour les travaux publics, la mission a constaté l’emploi systématique d’hommes, de femmes et d’enfants pour du travail forcé dans les Etats de Kachin et de Shan au cours de la période de référence, y compris dans les zones des Etats non affectées par un conflit. Dans plusieurs cas, la Tatmadaw est arrivée dans un village et a arrêté de nombreuses personnes qui ont ensuite été détenues pour être soumises au travail forcé, et ce sans préavis ni consultation. Elles sont détenues aux abords des villages ou obligées de parcourir de longues distances, d’exécuter différents travaux tels que la cuisine pour l’armée, le portage, le creusage de tranchées, l’abattage d’arbres, la construction de routes ou sont chargées de marcher devant pour ouvrir la route ou utilisées en tant que détecteurs de mines antipersonnelles pour la Tatmadaw.

La période de recrutement forcé varie d’un jour à plusieurs mois. Le recrutement forcé s’applique aux femmes, aux enfants dès l’âge de 12 ans, ainsi qu’aux enseignants. En 2012, le gouvernement et les Nations Unies ont signé un plan d’action commun pour mettre fin au recrutement et à l’emploi d’enfants soldats. Il a été signalé en 2018 que plus de 924 enfants ont été libérés depuis la signature du plan. Ils étaient détenus dans des conditions inhumaines, sans nourriture appropriée, sans eau ou autres commodités. Leur travail ne donnait lieu à aucune rémunération. Des violences, des tortures, des violences sexuelles et des viols ont été signalés. De telles situations subsistent toujours dans les Etats de Kachin et Shan. Bien qu’il existe des cas graves de travail forcé, nous reconnaissons à nouveau les efforts du gouvernement pour éliminer le travail forcé.

Je saisis cette occasion pour rappeler la principale décision du dernier Conseil d’administration du BIT en mars sur le cas dans ces termes: «ayant examiné le rapport soumis par le Directeur général, le Conseil d’administration s’est déclaré gravement préoccupé par la persistance du travail forcé et demande instamment au gouvernement d’intensifier sa coopération étroite avec le BIT pour l’élimination du travail forcé. Il encourage par ailleurs le gouvernement à promouvoir le travail décent au moyen de politiques d’investissement responsables en conformité avec la Déclaration de principes tripartite concernant les entreprises multinationales et la politique sociale».

Nous espérons que le gouvernement redoublera d’efforts pour améliorer la situation en vue de l’élimination du travail forcé.

Membre gouvernementale, Etats-Unis – En mars 1997, le Conseil d’administration de l’OIT a institué une commission d’enquête chargée de l’examen des allégations sérieuses de travail forcé généralisé au Myanmar. Le BIT a, depuis, étroitement travaillé avec le gouvernement pour traiter les conclusions de l’enquête, en commençant par la conclusion d’un accord sur le recrutement d’un chargé de liaison de l’OIT en 2002. Des progrès significatifs ont été accomplis. Le Protocole d’entente complémentaire de 2007 a établi un mécanisme mixte des plaintes BIT/gouvernement pour les victimes de travail forcé. L’adoption en 2012 de la loi régissant les villes et villages a défini le recours au travail forcé par quelque personne que ce soit comme une infraction pénale susceptible de sanctions d’emprisonnement et d’amendes.

Malgré les progrès atteints au cours des années, des rapports récents, y compris le rapport de septembre 2018 sur les conclusions détaillées de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits pour le Myanmar, soulignent le recours continu par l’armée au travail forcé, en particulier dans les Etats de Kachin et de Shan, ainsi que parmi les ethnies rakhine et rohingya.

Le Protocole d’entente complémentaire, servant de base juridique au rôle du BIT, à savoir celui de recevoir les plaintes pour travail forcé et de les signaler, est devenu caduc en décembre 2018 en l’absence de mécanisme de plainte gouvernemental sur place. Alors que le gouvernement s’est réuni récemment avec le BIT sur les cas en suspens et qu’il élabore actuellement une proposition quant à son propre mécanisme des plaintes, la proposition actuelle n’apporte pas une protection suffisante aux victimes, pas plus qu’elle ne prévoit une procédure fiable pour des enquêtes indépendantes.

Des efforts significatifs sont nécessaires pour l’établissement de conditions propres à un mécanisme des plaintes sous contrôle du gouvernement qui soit efficace. A ce jour, presque tout le personnel militaire impliqué dans le travail forcé n’a écopé que de mesures disciplinaires internes. Un seul auteur a été condamné de manière appropriée en vertu de l’article 374 du Code pénal. Quel que soit le mécanisme des plaintes, une mauvaise application persistante de la loi constituera un obstacle à son efficacité. En outre, alors qu’un plan d’action a été négocié en 2019 avec le BIT, le gouvernement n’a toujours pas obtenu l’aval de tous les ministères et organismes intéressés, notamment de l’armée. Nous demandons instamment au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour l’éradication totale de toutes les formes de travail forcé, notamment:

- de développer et de rendre opérationnel, en coopération étroite avec le BIT, un mécanisme accessible, crédible et efficace pour recevoir et résoudre les plaintes pour travail forcé;

- d’approuver et de mettre en œuvre le plan d’action de 2019;

- d’absorber tout l’arriéré des cas relevant du mécanisme du Protocole d’entente complémentaire;

- de poursuivre les coupables en vertu de l’article 374 du Code pénal;

- de modifier l’article 359 de la Constitution;

- de poursuivre le travail de sensibilisation et de renforcement des capacités dans le domaine du travail forcé, en particulier dans les régions où sévissent des violences persistantes, notamment en intensifiant les campagnes de sensibilisation du public.

Enfin, saluant l’acceptation d’une assistance technique par le gouvernement, nous exhortons le BIT à cibler en priorité le travail forcé, notamment dans le cadre du PPTD, et à solliciter activement le soutien des donateurs au besoin.

Membre employeur, Sri Lanka – La Fédération d’employeurs de Ceylan au Sri Lanka s’exprime en tant que membre du groupe des employeurs et s’associe aux déclarations faites par le porte-parole des employeurs ainsi que par notre homologue employeur du Myanmar, la Fédération des chambres de commerce et d’industrie du Myanmar.

Nous tenons à saluer les interventions de nos collègues plaidant pour la diminution et, dans l’idéal, l’éradication du travail forcé, en particulier les interventions axées sur le respect des lois et des normes internationales du travail, telle la référence à l’audit spécial qui cible en particulier l’élimination des pratiques liées au travail forcé. Il s’agit d’une contribution remarquable.

Les efforts déployés par des chambres de commerce du Myanmar, conjointement avec les partenaires tripartites et tendant à l’amélioration des conditions socio-économiques du pays, y compris au bien-être des travailleurs, sont constants et méritent une plus grande reconnaissance ainsi que des encouragements. Nous espérons que la prochaine fois, si une discussion sur le Myanmar a lieu au sein de cette commission, cela sera pour citer un cas de progrès.

Membre gouvernemental, République bolivarienne du Venezuela – Le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela salue la présentation des distingués représentants du Myanmar concernant l’application de la convention. Nous apprécions les progrès importants accomplis par le gouvernement du Myanmar en étroite collaboration avec le BIT pour éradiquer le travail forcé.

Nous soulignons à cet égard que le processus des réformes démocratiques produit des résultats tangibles au Myanmar dans le domaine de la promotion et de la protection des droits du travail, y compris en vue de l’élimination du travail forcé. Nous apprécions le PPTD, signé en septembre 2018 entre le Myanmar et l’OIT, conscients qu’il ne s’agit pas seulement d’une avancée significative dans l’Agenda du travail décent, mais également d’une contribution effective aux réformes visant à promouvoir et à protéger les droits du travail.

Nous sommes heureux que les cas de travail forcé aient diminué de manière significative et nous appelons le BIT et la communauté internationale à continuer d’accompagner le gouvernement du Myanmar dans la poursuite des efforts qu’il déploie pour éradiquer le travail forcé.

Le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela espère que les conclusions de la commission à l’issue des débats seront objectives et équilibrées et que le gouvernement du Myanmar pourra ainsi s’acheminer vers la pleine application de la convention.

Membre travailleur, Canada – Dans ses efforts pour parvenir à se conformer à la convention, le gouvernement du Myanmar doit remédier aux faiblesses des politiques foncières qui risquent de laisser des communautés entières exposées aux conditions et aux pratiques que la convention cherche à éliminer.

Le gouvernement classe environ le tiers de la superficie totale du pays comme terres vacantes, en jachère ou vierges. Une grande partie de ces terres est activement gérée par les communautés comme terres agricoles ou forêts productives, conformément au droit coutumier et à la pratique. Ceux qui exploitent ces terres manquent généralement de documents officiels pour cela.

En vertu de la loi sur la gestion des terres vacantes, en friche et vierges, modifiée en septembre 2018, toute personne occupant ou exploitant ces terres dispose d’un délai de six mois pour présenter sa demande de permis officiel d’exploitation de la terre, sous peine d’expulsion et d’emprisonnement jusqu’à deux ans, pour occupation abusive de terres sur lesquelles elle a vécu ou travaillé toute sa vie.

Un grand nombre de personnes au Myanmar ignorent ces amendements et les délais impartis et ne peuvent pas déposer de demandes. D’autres personnes déplacées par un conflit armé ne sont pas en mesure de demander de permis pour leurs terres.

Cette politique risque d’entraîner une escalade des conflits fonciers dans des régions telles que les Etats de Kachin et de Shan où il y a plus de 100 000 personnes déplacées. Il y a un risque important que de vastes étendues de terres désignées comme vacantes, en jachère ou vierges, mais appartenant à des personnes qui ont été déplacées à l’intérieur de leur propre pays ou sont devenues des réfugiés soient attribuées à des investisseurs.

Bien que la loi modifiée exclue «les terres coutumières désignées selon la culture traditionnelle des peuples ethniques», le régime foncier coutumier n’est toujours pas défini légalement, ni dans cette loi ni dans aucune autre, laissant les décisions sur ce qui est considéré comme «coutumier» aux fonctionnaires, qui peuvent eux-mêmes être impliqués dans l’accaparement des terres.

La loi incite les autorités à s’approprier des terres des communautés traditionnelles et ouvre des portes permettant à des compagnies privées de revendiquer ces terres. Par exemple, les revendications par les entreprises et les particuliers pour utiliser des terrains vacants déclenchent un délai d’opposition d’une période de trente jours, aux termes d’avis affichés à l’extérieur des bureaux du gouvernement local. Il est peu probable que ces avis soient vus par un grand nombre de résidents des camps, et encore moins probable que ces derniers puissent agir avec les «preuves» requises.

A Kachin, Etat marqué par des décennies de guerre civile, les terres vacantes se font rares et sont en voie d’être perdues pour l’extension des champs de bananes. Il est de plus en plus difficile de gagner sa vie. Il y a des cas documentés où la milice gouvernementale a obligé les agriculteurs à faire des cultures commerciales et à accepter ensuite de «louer» leurs terres à des entreprises pour des plantations de bananes. On promet aux locaux des compensations pour l’utilisation de leurs terres, mais les 36 dollars E.-U. perçus par acre comprenaient à la fois les cultures et tout leur travail. En outre, les entreprises utilisent des pesticides qui entraînent la contamination de l’eau, et les agriculteurs craignent un impact irréversible sur leurs terres, seule source de revenu.

Il est difficile de prendre des mesures contre les entreprises, car la majorité des sites de plantations sont dans des zones de conflit et elles opèrent sous la protection des forces armées.

Les politiques foncières doivent s’attaquer à ces problèmes et ne pas priver les populations de moyens de subsistance stables ou exposer des communautés entières aux pratiques d’exploitation auxquelles la convention cherche à remédier.

Membre gouvernementale, Canada – Le Canada remercie le gouvernement du Myanmar pour les informations fournies aujourd’hui. Rappelant la déclaration du Canada sur le Myanmar, prononcée lors de la 335e session du Conseil d’administration en mars 2019, le Canada prend note des efforts du gouvernement pour lutter contre le recours au travail forcé et pour l’éradiquer ainsi que des progrès accomplis dans le domaine de la réforme de la législation du travail à ce jour.

Cependant, il est clair qu’il reste encore beaucoup à faire pour mettre fin efficacement à l’emploi du travail forcé dans le pays. En particulier, le Canada reste profondément préoccupé par la persistance du travail forcé au Myanmar dans les conditions violentes et inhumaines imposées par la Tatmadaw dans les Etats de Kachin, de Shan et de Rakhine. Nous observons aussi avec dépit que les militaires qui imposent du travail forcé ne sont sanctionnés en majorité que par des mesures disciplinaires et non par des sanctions pénales telles que prévues par le Code pénal.

Nous notons qu’aucune mesure n’a encore été prise pour modifier l’article 359 de la Constitution du Myanmar, qui permet potentiellement une pratique arbitraire ou généralisée du travail forcé sur la population. Le Canada réitère également ses préoccupations quant à l’absence d’un mécanisme officiel indépendant pour traiter les plaintes relatives au travail forcé et fournir un soutien aux victimes.

En conséquence, nous demandons instamment au gouvernement du Myanmar de prendre des mesures immédiates pour: premièrement, intensifier ses efforts pour assurer l’élimination du travail forcé sous toutes ses formes, tant en droit qu’en pratique, conformément aux normes internationales, y compris le travail forcé imposé par les autorités militaires, publiques ou civiles; deuxièmement, redoubler d’efforts pour garantir que les auteurs seront poursuivis et qu’il sera mis fin à l’impunité, et veiller à ce que les sanctions prévues par la loi pour exaction de travail forcé soient appropriées et qu’elles soient strictement et uniformément appliquées contre les auteurs; troisièmement, modifier l’article 359 de la Constitution pour préciser que le travail forcé ne peut être imposé à la population en aucune circonstance; et enfin assurer, en coordination avec le BIT, la mise en place en temps utile d’un mécanisme de plainte indépendant, de portée nationale, accompagné d’un suivi diligent et efficace et de la protection des victimes.

Nous exhortons le gouvernement du Myanmar à veiller à ce que toutes les réformes soient conformes aux normes internationales du travail et qu’elles soient le résultat d’un dialogue tripartite authentique et effectif. Nous notons à cet égard l’extension du processus tripartite national et la tenue du Forum de dialogue tripartite national en mai 2019 et nous encourageons le gouvernement à prendre en compte les préoccupations et les commentaires des partenaires sociaux lors du processus de développement législatif et des politiques.

Enfin, nous encourageons le gouvernement du Myanmar à poursuivre une coopération étroite avec le BIT pour atteindre ces objectifs.

Observateur, Fédération internationale des transports (ITF) – Je veux parler de la question de la traite des êtres humains et du travail forcé dans les pêcheries dans le double contexte des migrations internes et externes. Le secteur de la pêche est l’une des composantes majeures de l’économie du Myanmar. Il emploie 3,3 millions de personnes. Un rapport du BIT de 2015 sur les migrations internes de la main-d’œuvre au Myanmar montre que les conditions de travail dans l’industrie de la pêche locale impliquent la violence physique, la servitude pour dettes, des salaires qui ne respectent pas les conditions initiales et le manque de nourriture. Environ 39 pour cent des personnes interrogées au cours de l’enquête du BIT dans le secteur de la pêche étaient dans une situation de travail forcé, contre 26 pour cent dans l’ensemble, et 26 pour cent se trouvaient en situation de trafic, contre 14 pour cent dans l’ensemble. Les décideurs feraient bien d’adopter une approche sectorielle dans la formulation des plans d’action pour lutter contre le trafic d’êtres humains et le travail forcé dans l’industrie de la pêche domestique.

J’en viens maintenant à la situation des pêcheurs birmans migrants. Les travailleurs migrants du Myanmar constituent une grande partie de la main-d’œuvre de la pêche en Thaïlande. Le réseau pour les droits des pêcheurs, une initiative de l’ITF visant à créer un syndicat indépendant des pêcheurs en Thaïlande, protège principalement les droits syndicaux des pêcheurs migrants. A l’heure actuelle, plus de 90 pour cent des pêcheurs birmans, que le FRN a interrogés au cours des douze derniers mois seulement, sont en servitude pour dettes pour plus de 20 000 baht, soit environ 600 dollars E.-U., ce qui représente une dette suffisamment importante pour qu’ils ne puissent pas la rembourser rapidement. L’exploitation des pêcheurs birmans est monnaie courante.

Le journal The Guardian a également signalé que des migrants rohingya, victimes de la traite dans des camps mortels de la jungle ont été vendus aux navires de pêche thaïlandais comme esclaves. Le recrutement trompeur et coercitif, impliquant des agents ou des courtiers peu scrupuleux, y compris le Myanmar lui-même, est une des causes principales de la mise des pêcheurs sous servitude.

Le gouvernement du Myanmar a pris quelques mesures positives pour remédier à ce problème. En 2018, la Thaïlande et le Myanmar ont signé un protocole d’accord pour une coopération en matière d’emploi de travailleurs, qui comprend des mesures concernant la traite. Le Myanmar est aussi membre du Forum de l’Asie du Sud-Est pour mettre fin au trafic et au travail forcé des pêcheurs, organisé par le BIT; et, depuis février de cette année, le BIT, en collaboration avec le ministère du Travail et l’ITF, a contribué au travail d’orientation des pêcheurs se rendant en Thaïlande pour travailler, avant leur départ. Toutefois, malgré ces initiatives, comme le suggèrent nos statistiques, il reste encore beaucoup à faire. Le gouvernement du Myanmar devrait, au minimum, ratifier et mettre en œuvre de manière effective la convention (nº 188) sur le travail dans la pêche, 2007, et se conformer strictement aux Principes généraux et directives opérationnelles concernant le recrutement équitable de l’OIT. Le gouvernement devrait également continuer à travailler avec le BIT et l’ITF sur la formation préalable au départ et sur les questions connexes.

Membre gouvernemental, Inde – Nous remercions la délégation du Myanmar pour sa communication sur ce point de l’ordre du jour ainsi que pour la mise à jour exhaustive fournie dans ce contexte. Nous prenons note avec satisfaction des progrès importants accomplis par le gouvernement du Myanmar pour, entre autres, promouvoir l’Agenda du travail décent de l’OIT, renforcer le dialogue social tripartite et entreprendre des réformes du travail tenant compte du contexte et des priorités nationales.

En tant que pays voisin ami, nous sommes pleinement conscients du contexte de l’agenda ambitieux de politique économique et sociale poursuivi par le gouvernement civil du Myanmar démocratiquement élu, et nous comprenons les défis auxquels ce dernier est confronté pour faire avancer le processus de paix, pour la mise en place d’institutions et le renforcement du rôle du droit, y compris pour la protection et la promotion du travail, afin de créer une société juste et équitable pour tous ses citoyens.

Nous apprécions sincèrement l’engagement soutenu du gouvernement du Myanmar à créer des emplois décents, promouvoir des investissements responsables, renforcer la culture du tripartisme et le partenariat social, y compris la liberté syndicale; à entreprendre des réformes du travail; et à éliminer le travail forcé sous les auspices du PPTD récemment signé.

Le développement d’un plan d’action actualisé, qui prévoit notamment la mise en place d’un mécanisme national de traitement des plaintes, en coopération étroite et en consultation avec les partenaires sociaux, ainsi que les efforts soutenus en matière de sensibilisation et de renforcement des capacités, par la formation, pour l’élimination du travail forcé constituent d’autres initiatives positives du gouvernement. La pratique du travail forcé a considérablement diminué au Myanmar et est clairement sur une tendance en baisse, du fait des mesures prises non seulement par le gouvernement du Myanmar, mais également par son Parlement, à travers une modification appropriée de la Constitution.

Nous soutenons la coopération et l’engagement constructif du Myanmar avec le BIT. L’OIT et la communauté internationale devraient s’engager de manière constructive avec le gouvernement du Myanmar et lui apporter une assistance technique renforcée dans ses efforts visant à réaliser ses objectifs nationaux en matière de politique économique et sociale, en passant par la promotion du travail décent et l’élimination du travail forcé. Nous souhaitons au gouvernement du Myanmar un plein succès dans ses entreprises.

Membre travailleuse, Malaisie – Le rapport The Global Slavery Index (GSI) sur le Myanmar estime à 575 000 le nombre de personnes vivant dans une situation d’esclavage moderne. Onze personnes sur 1 000 sont victimes d’esclavage au Myanmar. Selon le rapport GSI, les déplacements en masse, les enlèvements, les violences sexuelles et les meurtres commis contre la population rohingya sont les causes flagrantes de cette situation.

Il y a quatre mois, le secrétaire permanent du ministère du Travail, de l’Immigration et de la Population du Myanmar, M. U. Myo Aung, a déclaré aux médias que le nombre de travailleurs du Myanmar employés à l’étranger atteint 5 millions. Le chiffre réel est cependant, à mon avis, beaucoup plus important, parce que, seulement en Malaisie, il y avait déjà plus de 450 000 travailleurs du Myanmar en 2017. Un grand nombre de ces travailleurs avaient fui le pays pour se rendre dans des pays voisins comme la Thaïlande et la Malaisie, où l’herbe leur semblait plus verte, mais où ils n’ont trouvé que le harcèlement et la victimisation.

Au Myanmar, il existe un guichet unique pour le traitement des visas de sortie pour les travailleurs. Ce guichet unique se prétend le fournisseur exclusif de services pour tout ce qui concerne les visas et les services consulaires pour les ambassades du Myanmar en Chine, en France, en Italie, au Japon, en Malaisie et à Singapour. Les coûts des visas ont augmenté à plusieurs reprises, et les travailleurs doivent s’acquitter en plus des frais de visa, de la rémunération du service.

Des rapports indiquent qu’avant décembre 2015 les travailleurs du Myanmar se rendant en Malaisie payaient 6 dollars E.-U. pour le visa mais que, depuis 2016, les travailleurs paient 83 dollars E.-U. pour les frais de service, le système de redevance et les frais liés au droit d’immigration, en sus des frais de visa. Les frais de visa ont été multipliés par dix, et les contrôles de santé sont passés de 10 à 56 dollars E.-U. Ces sommes excluent les centaines de dollars versés aux agences de placement qui s’occupent des emplois. Très peu de travailleurs peuvent se permettre de payer ces nouveaux frais supplémentaires. Ils contractent alors des prêts à intérêt élevé, ou hypothèquent leurs biens ou les vendent en totalité pour payer le voyage à l’étranger à la recherche de meilleurs moyens de subsistance. Cela les conduit à la servitude pour dettes et ils vivent de leur revenu emprunté tout le reste de leur existence. Des corporations d’entreprises ou de futurs employeurs, dans certains cas, sont à l’origine de cette tendance à la servitude pour dettes. Ils agissent comme prêteurs ou facilitateurs de prêt. Une fois à l’étranger, les travailleurs perdent leur liberté et doivent travailler longtemps pour supporter et rembourser leurs dettes.

Malgré les efforts déployés par le BIT au moyen de divers programmes, la servitude pour dettes continue à se développer. C’est pourquoi le Myanmar, pays ayant ratifié la convention, devrait négocier un accord de gouvernement à gouvernement (G2G) avec la Malaisie, dès que possible, pour mettre fin à la servitude pour dettes et protéger les travailleurs migrants qui vont en Malaisie pour améliorer leurs moyens de subsistance.

Membre employeur, Singapour – Je pense que nous avons beaucoup entendu de commentaires de la commission et aussi de cas présentés, ou de cas passés, mais je pense que nous pouvons voir que les statistiques sont en baisse. C’est un bon signe, et je fais confiance aux employeurs et même aux syndicalistes qui travaillent en coopération très étroite avec le gouvernement. Nous devons aboutir ici à une déclaration juste, et je pense que ce qui est plus important est d’aller de l’avant. Quels sont les plans d’action qui seront mis en place par les partenaires sociaux avec l’aide du BIT? Je pense que ceux-ci sont importants. Nous devons mettre l’accent sur cela, travailler sur cela, et je pense que nous pourrons voir un peu de lumière au bout du tunnel.

Il y a quelques points sur lesquels je voudrais insister à nouveau. La formation des employeurs à propos de la question du travail forcé devrait se poursuivre. Il faut également créer des normes et directives à suivre par les employeurs dans le pays. Je pense que c’est important d’aller de l’avant. De même, les dirigeants syndicaux, vous qui êtes sur le terrain, vous devez conseiller les employeurs. Il faut aussi que des gens aillent sur le terrain pour alerter les employeurs.

Enfin, il ne faut pas oublier que le gouvernement du Myanmar joue un rôle important. Nous pouvons voir que le tripartisme s’est développé, même si le pays compte moins de trois années de démocratie, mais je pense que nous constatons un tripartisme en action, et c’est nécessaire pour résoudre, avec le BIT, ces questions nationales.

Membre gouvernementale, Nicaragua – Nous remercions les représentants du gouvernement pour le rapport présenté à cette commission, en ce qui concerne la convention. De même, nous apprécions les efforts déployés par le gouvernement pour appliquer la convention, démontrant ainsi son engagement à se conformer à toutes les obligations au titre de ladite convention.

Nous saluons par ailleurs le Protocole d’accord pour le plan d’action en vue de l’élimination du travail forcé, signé en 2018 entre le gouvernement et l’OIT, et nous encourageons l’Organisation à continuer à collaborer avec le gouvernement et à fournir toute la coopération et l’assistance technique nécessaires à la réalisation de progrès concrets dans le pays. Nous saluons le gouvernement du Myanmar pour ses efforts en vue de la mise en œuvre continue du plan de développement durable du Myanmar (2018-2030), conforme aux ODD, y compris l’ODD 8.

Nous nous félicitons de ce que le gouvernement, en étroite collaboration avec le BIT, intensifie et encourage le processus de réforme du droit du travail, renforce la culture du dialogue tripartite et fournisse une formation aux personnes principalement chargées de la protection et de la promotion des droits du travail. Nous encourageons le gouvernement à continuer à œuvrer en vue de la réalisation de progrès plus significatifs dans la voie de l’éradication du travail forcé et nous lui souhaitons le meilleur pour la réalisation de tous les objectifs à cet égard.

Membre gouvernemental, Bélarus – Le Bélarus est favorable à une approche universelle et équitable pour tous les pays, et nous voudrions remercier la délégation du Myanmar pour le rapport qu’elle a présenté. Nous saluons ses efforts pour améliorer la situation des travailleurs et le système législatif. Nous apprécions l’ouverture du Myanmar à la coopération avec l’OIT, y compris pour l’élaboration et l’application d’un plan d’action national. Nous soutenons les activités du gouvernement visant à promouvoir la paix, à poursuivre le dialogue social et à remplir ses obligations en vertu des principes de l’OIT; nous nous félicitons des efforts du gouvernement et encourageons la communauté internationale à intensifier son soutien au Myanmar.

Membre gouvernemental, Suisse – La Suisse soutient la déclaration faite par l’Union européenne et souhaite ajouter quelques points. La Suisse salue les diverses mesures prises par le gouvernement en collaboration avec l’OIT, ainsi que les progrès significatifs accomplis ces dernières années en ce qui concerne l’élimination du travail forcé. Cependant, la Suisse regrette profondément que, malgré les efforts faits par le gouvernement, des cas de recours au travail forcé perdurent au Myanmar.

Le recours au travail forcé par les forces armées du Myanmar (Tatmadaw) à l’encontre de certaines ethnies minoritaires est très préoccupant et doit être fortement condamné. Les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre toute forme de travail forcé sont positives, mais les efforts doivent continuer et être intensifiés afin d’éliminer le recours au travail forcé dans l’ensemble des Etats du Myanmar. En ce sens, la délégation suisse encourage le gouvernement à continuer ses actions de formation et de sensibilisation ainsi que la collaboration avec l’OIT.

Par ailleurs, l’efficacité de la mise en œuvre des lois et leur application stricte sont des éléments indispensables à une lutte pleine et entière contre le travail forcé. Des enquêtes approfondies doivent être menées, et les cas d’infractions pénales doivent faire l’objet de sanctions suffisamment dissuasives et strictement appliquées aux auteurs dans tous les cas. La Suisse invite donc le gouvernement du Myanmar à prendre les mesures nécessaires pour assurer la stricte application de la législation nationale.

Finalement, la Suisse invite le gouvernement du Myanmar à ratifier la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, ainsi que le protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930. La Suisse continuera de soutenir des programmes de l’OIT au Myanmar.

Membre gouvernemental, Fédération de Russie – Tout d’abord, nous souhaitons exprimer notre gratitude au gouvernement du Myanmar pour les explications détaillées qu’il a fournies aujourd’hui sur les mesures qui ont été prises pour remplir ses obligations découlant de la convention. Nous avons vu dans le rapport que le gouvernement accomplit un travail considérable en étroite coopération avec le BIT. Au Myanmar, des efforts sont faits pour mener à bien les réformes démocratiques. L’un des plus importants domaines est la protection des droits des travailleurs et, malgré les difficultés, un travail constant est en cours pour fournir des garanties contre le travail forcé. Nous prenons note en particulier des mesures qui ont été prises pour mettre en œuvre le PPTD signé en septembre 2018 et nous notons également les réformes qui ont été apportées à la législation du travail.

Nous saluons la contribution du BIT et sa coopération étroite avec le gouvernement du Myanmar. Nous saluons également l’élaboration, avec les partenaires sociaux, d’un nouveau plan d’action visant à créer un mécanisme national de traitement des plaintes. Toutes ces mesures, prises ensemble, ont déjà eu un effet positif à nos yeux. Le nombre de cas de travail forcé a été réduit et continue de chuter. Nous espérons que cette tendance se maintiendra.

Nous appelons l’OIT et la communauté internationale dans son ensemble à poursuivre leur coopération avec le gouvernement du Myanmar pour assurer le plein respect des obligations du pays en vertu de cette convention.

Représentant gouvernemental – Nous avons écouté toutes les interventions très attentivement. La délégation du Myanmar rapportera ces points de vue, conseils et préoccupations au Myanmar pour examen en vue de parvenir à une meilleure application de la convention. Je tiens à réaffirmer que l’établissement d’un mécanisme national des plaintes dans le cadre du PPTD est en phase finale d’approbation. Le consentement de tous les ministères, y compris le ministère de la Défense, à l’établissement de ce mécanisme est déjà acquis. Nous avons également les procédures provisoires pour recevoir en permanence les plaintes formulées par toute personne et par toute organisation. Nous poursuivrons une étroite coopération avec le BIT à cet égard.

Comme nous l’avons mentionné dans nos remarques introductives, nous avons en effet besoin d’une Constitution conforme aux principes démocratiques. La commission parlementaire mixte a été créée dans le but de modifier la Constitution. Elle s’est réunie presque 20 fois depuis sa création en février de cette année. Comme nous l’avons déjà mentionné, les contraintes constitutionnelles figurent parmi les défis auxquels nous sommes confrontés; c’est pourquoi le gouvernement actuel a inscrit la modification de la Constitution au plus haut rang des priorités pour le pays. Nos efforts visent à transformer le pays en une union fédérale démocratique. Comme l’a souligné le conseiller d’Etat, nous avancerons de manière progressive, et non révolutionnaire. Tout le monde au Myanmar a convenu que nous voulions vivre dans une union fédérale démocratique, et non sous un régime autoritaire. Une coopération constructive de la part de la communauté internationale est en effet nécessaire pour maintenir le Myanmar sur la bonne voie en matière de démocratisation. Par conséquent, nous prenons au sérieux toutes les allégations d’infractions au travail forcé. Nous sommes disposés, et en capacité, à résoudre ces problèmes. Le gouvernement est pleinement déterminé à engager des poursuites contre les auteurs s’il existe des preuves tangibles de toute infraction des droits de l’homme, y compris de travail forcé.

Certains intervenants ont évoqué le rapport de la Mission d’établissement des faits du HCR. En ce qui concerne cette mission, notre position est claire. Le Myanmar s’est formellement opposé à la mission d’enquête depuis sa création. Nous rejetons également son rapport basé sur des récits. Cependant, nous prenons au sérieux toutes les allégations, y compris celles contenues dans le rapport de la mission. Le gouvernement du Myanmar a déclaré à plusieurs reprises qu’il ne tolérera pas les violations des droits humains et qu’il engagera des poursuites judiciaires conformément à la loi si les allégations sont étayées par des preuves suffisantes. Par conséquent, le gouvernement du Myanmar a créé une commission d’enquête indépendante chargée d’enquêter sur toutes les allégations de violations des droits de l’homme à la suite de l’attaque terroriste de l’ARSA en août 2017 dans le nord de Rakhine. Le mandat de la commission est la recherche des responsabilités et de la réconciliation. La commission remplit son mandat en toute indépendance, impartialité et objectivité. La commission d’enquête indépendante enquêtera sur les allégations de violation des droits de l’homme fondées sur des preuves solides. Par conséquent, elle instituera une sous-commission à laquelle elle soumettra toutes les informations qu’elle aura rassemblées pour analyse. Elle recherchera le soutien technique d’experts externes dans des domaines tels que l’information et la communication, les enquêtes légales et criminelles. Chaque membre de la commission nommera ses propres collaborateurs et experts. La commission a lancé un appel public à soumettre des communications sur des allégations de violations de droits de l’homme. Elle a reçu 40 communications concernant des allégations d’abus en matière de droits de l’homme. La commission a par ailleurs exigé un accès aux camps de réfugiés de Cox’s Bazar au Bangladesh. Nous exhortons le gouvernement du Bangladesh à faciliter la visite de la commission dans les camps pour rencontrer les victimes d’abus présumées. Les travaux de la commission s’appuieront sur des preuves. La communauté internationale devrait les soutenir. La porte est ouverte à toutes les plaintes constructives. Les plaintes peuvent être déposées via différents canaux, ceux qui existent déjà, les médias sociaux, la commission nationale des droits de l’homme, le bureau du Président et le Parlement, pour n’en citer que quelques-uns. Nous voudrions réaffirmer notre engagement pour l’élimination du travail forcé. A cet égard, nous poursuivrons notre coopération avec l’OIT et nos partenaires. Par conséquent, nous voudrions demander à tous nos partenaires d’apporter leur aide et leur coopération constructives aux efforts du gouvernement pour l’élimination du travail forcé.

Membres travailleurs – Malheureusement, il semble que la communauté internationale soit trop pressée d’exiger la victoire s’agissant de l’éradication du travail forcé au Myanmar. Alors que des mesures ont été prises, l’omniprésence du travail forcé reste un sujet de grave préoccupation, compte tenu en particulier de l’implication d’acteurs étatiques. Ce cas mérite un suivi rigoureux de la part de l’OIT et de la communauté internationale. Nous exprimons à nouveau notre profonde préoccupation concernant la caducité du Protocole d’accord complémentaire, alors qu’aucun autre mécanisme crédible ne le remplace. Ce n’est pas le moment de perdre tout contrôle indépendant sur les exactions de travail forcé dans le pays.

En ce qui concerne la situation des Rohingya, cette question nécessite une attention urgente et un véritable leadership. Le travail forcé persistera tant qu’une population aussi nombreuse reste dans une situation hautement vulnérable – en tant que citoyens sans papiers dans leur propre pays. Plus de 700 000 personnes vivent actuellement de l’autre côté de la frontière, au Bangladesh, dans des camps sordides, sans aucune perspective de retour chez eux à court terme, dans des conditions qui garantiraient leur sécurité. Leur expulsion forcée du Myanmar a créé une crise des droits de l’homme, y compris une extrême exposition à la traite des êtres humains, compte tenu de leur situation désespérée. Ceux qui sont déplacés à l’intérieur du pays sont également exposés à un risque élevé d’exploitation brutale par l’armée et par les trafiquants d’êtres humains, en particulier pour l’extraction des ressources naturelles.

Evidemment, nos préoccupations concernant le travail forcé ne s’arrêtent pas là. Comme nous l’avons entendu, de nombreuses autres personnes, y compris des travailleurs d’autres régions ethniques, sont confrontées au travail forcé par l’armée ou par des particuliers, notamment dans l’agriculture, la pêche et les mines. En effet, le rapport sur le travail forcé et d’autres violations des droits de l’homme dans les mines de pierres précieuses est particulièrement sombre, évoquant notamment la dépendance des travailleurs à de puissants opiacés pour les empêcher de quitter l’exploitation.

Le recours au travail forcé, en tant que sanction dans les prisons, en particulier à des fins privées, est très préoccupant et doit cesser immédiatement. L’emprisonnement de dissidents pour exercice de libertés fondamentales doit également cesser. Je voudrais aussi faire écho aux préoccupations soulevées par le délégué des travailleurs du Myanmar à propos de la situation délétère en matière de liberté syndicale, en droit et en pratique. Comme l’a expliqué la commission d’experts, et la présente commission lui en a fait écho, il existe un lien direct entre l’absence de liberté syndicale et l’exaction de travail forcé. Nous sommes profondément troublés par la direction prise par le gouvernement en ce qui concerne la liberté syndicale, comme nous l’avons expliqué au sein de cette commission l’année dernière, et craignons que l’hostilité du gouvernement à l’égard des organisations de travailleurs n’expose ces derniers à un risque accru de travail forcé. Nous avons en outre entendu dire que la confiscation des terres a entraîné de gros risques d’expositions au travail forcé.

Nous craignons que le Myanmar redevienne un cas récurrent au sein de cette commission si les choses ne changent pas. En conséquence, nous demandons instamment au gouvernement du Myanmar de respecter les conclusions de cette commission et de les mettre en œuvre dans les meilleurs délais. Nous pensons en outre qu’une mission de contacts directs devrait être envoyée au Myanmar pour le suivi des conclusions de la commission et pour lui en faire rapport l’année prochaine. Nous encourageons vivement le secrétariat du BIT et le bureau de liaison à continuer de travailler de manière intensive avec le gouvernement pour s’attaquer à ces très graves violations et à continuer d’en faire rapport au Conseil d’administration.

Membres employeurs – Je pense, et ce que nous avons entendu de la part de nombreux gouvernements, que le Myanmar est en train d’émerger de ce qui était, de réputation mondiale, depuis de nombreuses années, un pays de répression et d’oppression et qu’on perçoit, ces dernières années, les premiers rayons de soleil de la démocratie; mais il est toujours en train d’émerger. Si vous voulez utiliser l’analogie d’une chrysalide se transformant en papillon, nous sommes encore loin du papillon, mais on va vers cet ultime but, qu’à mon avis le monde finira par reconnaître.

Cela dit, et je pense que personne ne dira le contraire, il y a encore beaucoup trop de choses qui ne vont pas bien. Les cas notamment, ceux que la commission d’experts a notés, de recrutement dans les forces armées restent l’aspect principal et le plus rapporté des préoccupations soulevées par cette commission, et je note que le gouvernement a déclaré qu’il agirait sur la base de preuves crédibles. Je pense que, tout au moins dans le cas des forces armées, c’est un ensemble de processus bien documenté, et un nombre significatif de personnes en possède des documents pertinents. Nous demandons donc au gouvernement de reconnaître sa propre responsabilité et de continuer à faire ce qu’il affirme être déjà en train de faire.

Toutefois, ce qui reste, ce sont les cas impliquant d’autres domaines que celui de l’armée, qui ne sont pas documentés, et nous avons entendu un certain nombre d’anecdotes et de faits partiellement avérés en référence à des problèmes concernant le travail dans d’autres domaines, tels que l’agriculture. J’observe qu’une grande partie des faits se produisent à l’extérieur du pays, mais certainement pas en dehors de la responsabilité du pays, uniquement au-delà de ses frontières physiques; et bien sûr ces faits donnent lieu à de nouveaux problèmes.

L’une des choses que les employeurs diraient, c’est que ces problèmes ne concernent pas le Myanmar seul, car lorsqu’ils se produisent hors du Myanmar, même s’ils touchent des citoyens du Myanmar, ils ont un impact à l’intérieur, dans et au vu des juridictions des autres pays. C’est pourquoi j’appelle tout le monde, et en particulier les voisins du Myanmar, à jouer également leur rôle pour identifier, supprimer ou, sinon, aider à l’élimination de ces types de pratiques. Par exemple, la pêche en mer au-delà du Myanmar relève de la responsabilité de nombreux autres pays. Donc tout le monde a un rôle à jouer en la matière, et nous appelons chacun à jouer son rôle.

L’autre chose par rapport à la portée de cet exercice, et j’ai mentionné juste avant que l’armée semble constituer la principale et la plus évidente source d’oppression, à mesure que nous avançons, est d’espérer que, lorsque ces faits sont dénoncés et des sanctions envisagées, l’examen sera abordé de manière équilibrée et équitable. Et nous avons eu vent de quelques inquiétudes, parfois preuve à l’appui, avançant que les sanctions appliquées aux militaires coupables d’emploi de travail forcé sont plutôt légères et de nature disciplinaire plutôt que punitives ou pénales, tandis qu’il existe des preuves selon lesquelles, par exemple, des civils impliqués dans le même type d’activités sont condamnés notamment à d’importantes peines d’emprisonnement. La préoccupation est légitime quant à ce déséquilibre en la matière, et les employeurs voudraient appeler le gouvernement à garantir que tout régime et toute institution de répression dissuasive de la traite et du travail forcé sont équitables et justes, dans toute l’économie, sans restriction.

Ce que nous pensons et que nous avons entendu, c’est que pour combattre le travail forcé il faut pouvoir l’identifier comme tel. Pour cela, le mécanisme le plus efficace dont nous avons entendu parler est le développement d’un mécanisme national des plaintes, et je dis, là encore, que nous en parlons au singulier, alors que nous avons entendu le gouvernement affirmer que le mécanisme proposé est en fait un ensemble hétéroclite de portes par lesquelles n’importe qui peut entrer et exposer ses préoccupations.

La création et l’achèvement de ce processus sont de la plus haute priorité, et nous notons que, selon le gouvernement, le plan d’action sera présenté au Cabinet, ce plan d’action étant le moyen par lequel le reste du processus de traitement des plaintes sera mis en avant. C’est, à notre avis, de la plus haute priorité possible. A côté de ça, il faut veiller à ce que la législation en vigueur dans le pays soit mise en harmonie. Nous avons entendu dire que la Constitution n’est pas en phase avec certaines des autres initiatives qui sont prises. Pour que l’alignement de la législation et de la Constitution fasse partie de cette priorité, il faut créer un mécanisme de traitement des plaintes

Pour ce faire, nous exhortons le gouvernement du Myanmar à poursuivre et à renforcer ses liens avec l’OIT qui, comme tout le monde l’a admis, a fourni un appui considérable au cours des dernières années. L’existence du bureau de liaison dans le passé et aujourd’hui a toujours été jugé grandement bénéfique. Ces mécanismes peuvent encore être renforcés, de même que les capacités en interne des employeurs, des travailleurs et du gouvernement et des organes chargés de ces questions au sein du gouvernement. C’est pourquoi nous insistons pour que le processus de coopération engagé au sein de l’OIT et avec les partenaires sociaux se concentre sur ce problème et le traite en priorité.

Cela résume le genre de choses que nous voudrions souligner. Premièrement, nous félicitons le gouvernement pour ses progrès; nous demeurons préoccupés par les questions en suspens; nous reconnaissons que ces questions sont de plus en plus ciblées dans certains domaines, ce qui laisse présumer que d’autres domaines seront traités avec le temps. Nous encourageons la continuité de ce processus. Nous recommandons au gouvernement de prendre des mesures immédiates pour réformer les programmes législatifs nationaux, y compris l’introduction du plan d’action sur la mise en conformité de la Constitution. Nous exhortons le gouvernement à communiquer régulièrement des rapports, pas seulement à l’OIT par le biais de l’un des mécanismes de rapport existants, mais à travers l’établissement de mécanismes de rapport transparents au sein de son propre pays afin que tous les citoyens puissent voir que ces problèmes sont soulevés ou que des plaintes sont déposées et traitées, et alors tout le pays pourra avoir une vision du processus et s’y fier, ce qui, je pense, est aussi un aspect extrêmement important de toute démocratie. Et, en dernier lieu, nous recommandons que le gouvernement continue à travailler en étroite collaboration avec ses partenaires sociaux pour établir un mécanisme national permanent et efficace de traitement des plaintes concernant le travail forcé dans le cadre d’un système de sanctions efficace et dissuasif.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations fournies oralement par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a pris note des efforts déclarés du gouvernement pour éliminer le travail forcé, s’est félicitée de ces efforts et a prié instamment le gouvernement de les poursuivre. Toutefois, la commission s’est déclarée préoccupée par le recours persistant au travail forcé.

Prenant en compte la discussion du cas, la commission prie instamment le gouvernement:

- de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer que, dans la pratique, le travail forcé n’est plus imposé par les autorités militaires ou civiles;

- d’appliquer strictement la loi de 2012 portant modification de la loi concernant l’administration des circonscriptions et des villages ainsi que le Code pénal pour s’assurer que les responsables de travail forcé font l’objet d’enquêtes et de poursuites effectives et, que dans tous les cas, les peines infligées sont proportionnelles à leurs actes;

- de s’assurer que les victimes de travail forcé ont accès à des voies de recours efficaces et à un soutien complet, sans crainte de représailles;

- de s’abstenir d’imposer des sanctions à ceux qui ont dénoncé des cas de travail forcé ou qui en ont fait état;

- de faire mieux connaître au grand public et aux autorités administratives les activités de sensibilisation et de renforcement des capacités afin de dissuader le recours au travail forcé;

- de fournir des informations détaillées sur les progrès accomplis dans le cadre du programme par pays de promotion du travail décent;

- d’intensifier sa coopération avec le BIT en élaborant un plan d’action assorti de délais pour la mise en place d’une procédure efficace de traitement des plaintes et pour la transition vers cette procédure.

A cet égard, la commission encourage le gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour donner suite aux recommandations.

Représentant gouvernemental – Nous prenons note de la recommandation formulée par la commission et souhaitons exprimer notre reconnaissance à l’Organisation internationale du Travail (OIT) et aux pays qui soutiennent le Myanmar dans ses efforts pour éliminer le travail forcé. Je souhaiterais réaffirmer notre engagement à éliminer le travail forcé. Je souhaiterais également demander à l’OIT et aux Etats Membres de continuer à aider le Myanmar à éliminer le travail forcé.

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