Allégations: Les organisations plaignantes font état d’une dégradation des droits
du travail dans le pays, caractérisée par de nombreux cas d’exécutions extrajudiciaires de
dirigeants et de membres de syndicats, de tentatives d’assassinat, d’arrestations et de
détentions illégales, d’inscription sur liste rouge, de harcèlement, d’intimidation et de
menaces à l’encontre de syndicalistes, ainsi que de répression et d’ingérence dans les
affaires syndicales. Les organisations plaignantes dénoncent l’incapacité du gouvernement à
enquêter de manière appropriée sur ces cas et à traduire les auteurs en justice, ce qui
renforce le climat d’impunité, de violence et d’insécurité et nuit par conséquent à
l’exercice des droits syndicaux
- 324. Le comité a examiné pour la dernière fois le présent cas, soumis
initialement en février 2016, à sa réunion de mars 2024, où il a présenté un rapport
intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 405e rapport, paragr. 477-509, approuvé
par le Conseil d’administration à sa 350e session.]
- 325. Le gouvernement a présenté ses observations dans des communications
datées du 16 avril 2024 et du 10 janvier 2025.
- 326. Les Philippines ont ratifié la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le
droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 327. A sa réunion de mars 2024, le comité a formulé les recommandations
suivantes [voir 405e rapport, paragr. 509]:
- a) Le comité exhorte à nouveau le gouvernement à tout mettre en œuvre pour
traduire en justice et condamner les auteurs des meurtres de M. Antonio «Dodong»
Petalcorin, M. Emilio Rivera et M. Kagi Alimudin Lucman et, si cela n’est plus
possible en raison du classement des cas concernant M. Petalcorin et M. Rivera, à
engager le dialogue avec les syndicats concernés afin de garantir l’examen complet
de ces cas par un organe non judiciaire spécialisé, éminent et indépendant, en vue
d’envisager toute indemnisation appropriée. Le comité prie instamment le
gouvernement de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard.
- b) S’agissant des allégations de répression antisyndicale formulées par l’ITF,
l’UMA et la NFSW-FGT en mars et juin 2021 (allégations faisant état d’exécutions
extrajudiciaires, d’arrestations illégales, de mises en détention, d’accusations
mensongères, d’intimidations, de harcèlement, d’inscriptions sur liste rouge et de
menaces visant des membres et dirigeants syndicaux), le comité s’attend à nouveau
fermement à ce que les enquêtes et les procédures judiciaires en cours prennent
pleinement en considération tout lien direct ou indirect entre ces agissements
violents et les activités syndicales des victimes et à ce que les auteurs des
violences contre les syndicalistes soient identifiés et traduits en justice dès que
possible, qu’il s’agisse de particuliers ou d’agents de l’État, afin de lutter
contre l’impunité et de prévenir la répétition de tels agissements. Le comité prie
instamment le gouvernement de continuer à lui communiquer des informations à jour
sur les progrès accomplis à cet égard.
- c) Le comité exhorte le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que
toutes les allégations faisant état d’assassinats et de tentatives d’assassinat
formulées par le KMU en septembre 2021 fassent l’objet d’une enquête approfondie,
menée par un mécanisme indépendant afin d’identifier et de punir les coupables, et
de fournir des informations sur toute avancée réalisée à cet égard. Constatant que
le gouvernement n’a encore fourni aucune information au sujet des incidents ayant
trait à l’assassinat de M. Danny Boy Bautista et de M. Reynaldo Malaborbor, le
comité le prie instamment de lui fournir des précisions sur les démarches
entreprises et les enquêtes effectuées pour faire la lumière sur ces affaires.
- d) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de lui communiquer des
observations détaillées et concrètes au sujet des graves allégations supplémentaires
formulées par le KMU en septembre 2021, dénonçant une répression antisyndicale et
une criminalisation des activités syndicales. Le comité prie instamment le
gouvernement de veiller à ce que tous les cas présumés de violences physiques,
d’arrestations, de détentions, de menaces et d’intimidations fassent rapidement
l’objet d’enquêtes approfondies et que les auteurs de violences contre des
syndicalistes soient identifiés et traduits en justice, y compris lorsqu’il s’agit
d’agents de l’État, afin de lutter contre l’impunité et de prévenir la répétition de
tels agissements.
- e) Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de veiller à ce que toutes
les poursuites pénales en instance soient abandonnées et que tous les syndicalistes
placés en détention soient immédiatement libérés, s’il devait s’avérer que leur
arrestation ou leur détention sont liées à l’exercice légitime de leurs droits
syndicaux.
- f) Le comité prie également à nouveau instamment le gouvernement de prendre les
mesures nécessaires pour répondre aux allégations dénonçant des pressions exercées
sur des syndicalistes pour les contraindre à renoncer à leur affiliation syndicale,
afin d’empêcher la répétition de tels incidents, et de veiller à ce que les grèves
menées par les travailleurs, pour autant qu’elles restent pacifiques, ne donnent pas
lieu à un usage disproportionné de la force par la police ou l’armée.
- g) Le comité prie instamment le gouvernement de continuer à faire tout ce qui est
en son pouvoir, en pleine consultation avec les organisations de travailleurs et
d’employeurs, pour répondre et remédier aux allégations extrêmement graves selon
lesquelles la violence et la répression syndicales s’inscrivent dans le cadre d’un
programme commandité par l’État visant à réduire au silence les syndicats légitimes.
Il prie également instamment le gouvernement d’intensifier encore ses efforts pour
combattre la violence contre les syndicalistes en adoptant, y compris dans le cadre
du Comité interinstitutionnel créé en vertu du décret-loi no 23, toutes les mesures
nécessaires à cet effet, telles que la diffusion d’orientations et d’instructions
claires à l’intention de tous les agents de l’État et rendre pleinement
opérationnels les mécanismes nationaux de surveillance et d’enquête. Le comité prie
le gouvernement de continuer à fournir des informations sur tout progrès accompli à
cet égard.
- h) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil d’administration sur le
caractère extrêmement grave et urgent du présent cas.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 328. Dans ses communications datées du 16 avril 2024 et du 10 janvier
2025, le gouvernement fournit des informations détaillées sur les questions en suspens
et souligne, outre le fait qu’il a continué de coopérer avec les mécanismes de contrôle
de l’OIT, sa détermination à régler les affaires en suspens conformément aux
recommandations de l’OIT.
- 329. En ce qui concerne les meurtres d’Antonio Petalcorin, d’Emilio
Rivera et de Kagi Alimudin Lucman, qui étaient à l’origine du présent cas, le
gouvernement souligne avoir pris toutes les mesures raisonnables et concrètes possibles
pour enquêter comme il se doit sur les faits et traduire les responsables en justice. Il
souligne qu’en dépit des circonstances difficiles (absence de témoins directs,
non-coopération des familles des victimes à l’enquête, temps écoulé) les affaires
restent suivies par les mécanismes tripartites et gouvernementaux existants. En
particulier, il rappelle que les actions pénales à l’égard des accusés du meurtre de
MM. Petalcorin et Rivera ont été classées par le tribunal sans préjudice de leur
réouverture lorsque les accusés seront placés en détention. En juillet 2024,
l’ordonnance no 23 du Comité interinstitutionnel chargé de promouvoir et de protéger la
liberté syndicale et le droit des travailleurs de s’organiser (EO 23-IAC) a ordonné à la
police de réexaminer et de valider les résultats de son enquête précédente, mais elle
n’a été en mesure d’obtenir aucune information supplémentaire justifiant une conclusion
autre que celle selon laquelle les meurtres constituaient des crimes ordinaires, dont la
motivation n’était pas liée au rôle de dirigeants syndicaux des victimes. De même,
d’après l’enquête de la Commission des droits de l’homme (CDH), rien n’indiquait que les
meurtres commis dans ces affaires aient été liés à l’exercice de la liberté syndicale,
et les efforts pour localiser et appréhender les accusés se poursuivaient. L’Organe
régional tripartite de surveillance (RTMB) – Région XI a également réitéré, dans une
décision d’avril 2024 (dont une copie en partie expurgée a été communiquée avec le
rapport du gouvernement), sa recommandation antérieure de radier de sa liste de suivi
les affaires relatives à M. Petalcorin et à M. Rivera, étant donné que les services de
l’État avaient épuisé le travail d’enquête et de poursuites concernant ces affaires et
que ni l’implication de l’État ni une atteinte à la liberté syndicale n’avaient été
établies. Le RTMB a donc considéré que l’allégation d’absence d’enquête suffisante de la
part des pouvoirs publics n’était pas exacte, mais il a également recommandé à la police
d’intensifier son «opération chasse à l’homme» et ses «opérations conjointes en matière
de répression de la criminalité» afin de délivrer des mandats tous les deux mois grâce
au système renforcé de mandats électroniques. Concernant le meurtre de M. Lucman, le
gouvernement indique que les enquêtes n’ont pas progressé en raison de l’absence de
témoins directs et du départ de la famille pour un lieu non divulgué.
- 330. En réponse à la recommandation du comité d’ouvrir un dialogue avec
les syndicats concernés afin de garantir l’examen complet de ces cas par un organe non
judiciaire, le gouvernement fournit des détails sur les mécanismes existants et les
moyens d’indemnisation prévus. En particulier, il indique que, par l’intermédiaire du
RTMB – Région XI tripartite, il a pleinement engagé le dialogue avec les syndicats pour
examiner les cas, et que l’organe national indépendant habilité par la Constitution, la
CDH, a également examiné les cas. Le gouvernement précise que la CDH est compétente pour
accorder une aide financière aux victimes de violations des droits de l’homme et à leurs
familles et qu’en août 2023 le Conseil national tripartite pour la paix sociale (NTIPC)
a adopté une résolution demandant que la CDH soit dotée d’un budget suffisant pour
renforcer la capacité de celle-ci de promouvoir et de protéger les droits de l’homme, y
compris la liberté syndicale, en particulier s’agissant des enquêtes sur les violations
et de l’octroi d’une aide financière aux victimes et à leurs familles. Le gouvernement
précise aussi que la commission des réclamations, sous l’égide du ministère de la
Justice, administre un programme d’indemnisation des victimes de crimes violents. En
mars 2024, la CDH et le ministère de la Justice ont conclu un mémorandum visant à
renforcer l’aide offerte aux victimes de violations des droits de l’homme et à leurs
familles pour l’obtention d’une indemnisation, notamment par le biais d’un système
d’orientation, en vertu duquel la CDH enquêtera sur les violations des droits de l’homme
et orientera tous les demandeurs intéressés éligibles à une aide financière vers la
Commission des réparations qui, pour sa part, facilitera l’évaluation des demandes qui
lui sont renvoyées par la CDH.
- 331. En ce qui concerne les allégations supplémentaires de répression
antisyndicale dont les plaignants ont fait part en mars, juin et septembre 2021, le
gouvernement apporte des précisions sur la plupart des incidents mais se déclare à
nouveau fermement opposé à l’examen de ces allégations par le comité. Selon le
gouvernement, les allégations n’ont pas été étayées par les plaignants et elles
procèdent de circonstances factuelles distinctes des allégations initiales et sans lien
avec celles-ci, et dès lors ne constituent pas des nouvelles preuves pertinentes pour
l’affaire. Le gouvernement estime que le comité n’a pas dûment pris en considération les
informations par lesquelles le gouvernement a montré que les allégations ne se
rapportaient pas véritablement ou raisonnablement à l’exercice de la liberté syndicale,
mais étaient liées, dans bien des cas, à des litiges fonciers ou agraires. Le
gouvernement soutient également que ces allégations supplémentaires ont été résolues
judiciairement ou ont donné lieu à une enquête par une autorité compétente (la CDH ou le
RTMB), qui n’a pas constaté de liens avec la liberté syndicale, même si une aide
financière a été recommandée pour les cas de possibles violations des droits de l’homme.
Il souligne que les renseignements ci-après sur les affaires en cours ou tranchées
montrent que le système judiciaire est indépendant et fonctionne, et que le seul fait
d’appartenir à un syndicat n’exonère pas un syndicaliste qui se livrerait à des
activités criminelles de la responsabilité pénale.
- 332. En ce qui concerne les cas de meurtre rapportés par les plaignants,
le gouvernement fournit les informations suivantes sur l’état des procédures judiciaires
ou des enquêtes entreprises par la CDH et le RTMB, selon le cas:
- - La police a recommandé le classement de l’affaire concernant le meurtre de
Leonardo Escala, estimant que les preuves étaient insuffisantes pour établir
l’identité des responsables, tandis que la famille et les collègues de la victime
demeuraient réticents à coopérer à l’enquête. La CDH a enquêté sur l’affaire; elle a
constaté une violation des droits de l’homme et a recommandé l’octroi d’une aide
financière à la famille.
- - L’enquête de la police sur l’affaire du meurtre d’Ariel Diaz a révélé que celui-ci
aurait pu être motivé par un litige foncier. Une procédure pénale pour meurtre a été
ouverte et un mandat d’arrêt a été émis contre des particuliers, mais en mars 2019
l’affaire a été classée par le tribunal, sans préjudice de sa réouverture lorsque
les accusés seront placés en détention. En novembre 2023, la police a demandé un
portrait-robot de l’accusé pour faciliter l’arrestation, mais le seul témoin
oculaire était gravement malade et n’a pas pu donner les informations. Lorsque le
RTMB – Région II a invité le syndicat auquel était affiliée la victime à des
réunions en septembre et novembre 2023, puis mars et juin 2024 pour obtenir des
informations supplémentaires, aucun de ses agents n’y a assisté. La CDH a constaté
une privation arbitraire du droit à la vie de la victime, recommandé l’octroi d’une
aide financière à la famille et classé l’affaire, tout en recommandant un suivi
continu de la procédure pénale.
- - L’affaire des 9 agriculteurs de Sagay («9 de Sagay») (d’Hacienda Nene Barbara) a
été classée par le tribunal en attendant l’arrestation des accusés. La CDH a
constaté que les victimes avaient été arbitrairement privées de leur droit à la vie
et a recommandé l’octroi d’une aide financière aux familles (qui a été accordée sauf
pour une victime). La CDH ne s’est pas prononcée catégoriquement sur le motif des
assassinats, même si mention a été faite du droit des peuples à la terre et de
l’obligation incombant à l’État de protéger le droit de réunion pacifique.
- - Dans le cas d’Alexander Ceballos, son épouse a identifié un régisseur comme étant
l’agresseur, mais n’a pas souhaité porter plainte contre ce dernier. D’après son
témoignage, la police a conclu qu’un litige foncier était peut-être à l’origine du
meurtre. En décembre 2018, la CDH a constaté une violation des droits de l’homme et
estimé probable que la victime ait été tuée en raison de son travail de dirigeant
syndical. L’identité du responsable n’ayant pu être établie à cette époque, la CDH a
clos l’affaire sans préjudice de sa réouverture et a recommandé l’octroi d’une aide
financière à la famille de la victime.
- - L’affaire concernant Flora Gemola a été classée par la CDH, qui a conclu à une
violation des droits de l’homme et a recommandé l’octroi d’une aide financière,
laquelle a été accordée à la famille en février 2021.
- - En octobre 2020, le RTMB – Région VI a recommandé que le cas de Ronald Manlanat
soit retiré de sa liste de suivi parce que l’affaire était liée à un litige foncier
et que la famille de la victime ne souhaitait pas engager de poursuites contre les
auteurs de l’infraction. La CDH a constaté une violation des droits de l’homme,
peut-être motivée par un litige foncier, et a recommandé l’octroi d’une aide
financière à la famille en juillet 2024.
- - Dans l’affaire du meurtre de Julius Broce Barellano, l’enquête de police a révélé
que le motif possible était que la victime ait été impliquée dans un litige foncier.
L’accusé (un particulier) est en détention et fait l’objet actuellement d’un procès
pour meurtre. La CDH a constaté des violations des droits de l’homme et recommandé
de garder à l’examen l’instruction du procès et d’envisager une mesure d’aide
financière.
- - Dans l’affaire du meurtre de Felipe Dacal-Dacal, la CDH a constaté des violations
des droits de l’homme et a recommandé une aide financière. L’épouse de la victime a
indiqué ne pas souhaiter porter plainte contre les agresseurs.
- - Dans les affaires concernant le meurtre de Jose Jerry Catologo, une enquête de la
CDH est en cours.
- - En juin 2024, la CDH a constaté une violation des droits de l’homme, en
particulier du droit à la vie, dans l’affaire concernant le meurtre d’Antonio Cano
Arellano, mais a recommandé de classer l’affaire, les auteurs n’ayant pu être
identifiés.
- - La CDH a enquêté sur le cas présumé de menaces de mort contre Jerry Alicante en
2019, estimé qu’une violation du droit à la vie avait été commise, et classé
l’affaire.
- - Dans l’affaire concernant Paul John Dizon, la CDH a estimé que l’allégation de
menaces de mort n’était pas suffisamment étayée et a classé l’affaire.
- - Dans l’affaire concernant le meurtre de Reynaldo Malaborbor, l’épouse de la
victime s’en est remise à la police de Laguna pour l’enquête en faisant savoir
qu’elle ne souhaitait pas y être associée. En mars 2022, le bureau régional de la
police de Calabarzon a indiqué que le suspect du meurtre avait été retrouvé mort en
août 2020; l’affaire pénale a donc été classée. En mars 2021, la CDH a classé
l’affaire sans préjudice de sa réouverture si de nouvelles preuves matérielles
devaient être produites. Elle a estimé que, si la victime était bien affiliée à une
organisation syndicale, l’hypothèse que son décès soit lié à une affaire ou un
différend syndicaux n’était pas suffisamment étayée. La CDH a recommandé l’octroi
d’une aide financière à l’épouse de la victime.
- - Dans le cas du meurtre de Danny Boy Bautista, l’enquête de police a établi que le
mobile du meurtre était un vol présumé. Une plainte pénale a été déposée pour
meurtre, mais le procureur l’a rejetée en février 2019, et aucun témoin ne s’est
présenté lorsque la police a mené une enquête plus approfondie en avril 2022, tandis
que l’épouse de la victime n’a pas exprimé le souhait que la procédure soit
poursuivie. La CDH a également estimé que le meurtre avait probablement été motivé
par un vol, en s’appuyant sur un entretien avec l’épouse de la victime, et a déclaré
le dossier clos en septembre 2019, sans préjudice qu’il soit réouvert en cas de
preuve d’une responsabilité de l’État. Le RTMB – Région XI a recommandé, en décembre
2023 et en avril 2024, de radier l’affaire de sa liste de suivi, estimant que, après
enquête aussi bien de l’État que de la CDH sur l’incident, il avait été conclu à
l’absence de preuves permettant de rattacher la mort de la victime à une question de
liberté syndicale, et à l’absence de preuves d’une responsabilité de l’État.
Néanmoins, le RTMB a recommandé à la police de mener un complément d’enquête dans
l’optique d’une possible réouverture du dossier.
- - En ce qui concerne le meurtre de Dandy Miguel, la CDH a constaté une privation
arbitraire du droit à la vie et, tout en relevant que la victime était un dirigeant
syndical, a estimé ne pas disposer de preuves suffisantes pour établir que
l’intéressé ait été ciblé ou tué en raison de son affiliation syndicale. L’affaire a
été classée en mai 2022 et une aide financière a été accordée à l’épouse de la
victime.
- - En ce qui concerne l’affaire des perquisitions dans le sud de Luçon, une enquête a
été diligentée pour le cas d’Emmanuel «Manny» Asuncion par une équipe d’enquête
spéciale constituée en vertu de l’ordonnance administrative no 35, qui a recommandé
le dépôt d’un acte d’accusation de meurtre. Une plainte pénale a été déposée contre
17 agents des forces de l’ordre impliqués dans l’incident, mais a été rejetée par un
collège de procureurs en janvier 2023 (le plaignant ne s’étant pas acquitté de
l’obligation de prouver l’existence d’un crime et l’identité des responsables). Une
demande de réexamen a également été rejetée en août 2023. L’enquête de la CDH sur
les exécutions a été classée sans suite en septembre 2022 et une aide financière a
été accordée à l’épouse de la victime. Les dossiers relatifs à Puroy Dela Cruz,
Randy Dela Cruz, Ariel Evangelista, Chai Lemita Evangelista, Mark Lee Bacasno,
Melvin Dasigao, Abner Esto et Edward Esto ont été clos par une constatation de
violation des droits de l’homme et une recommandation d’octroi d’aide
financière.
- 333. S’agissant des cas d’arrestations et détentions illégales présumées
de syndicalistes, ainsi que des accusations criminelles fabriquées de toutes pièces dont
ces personnes auraient fait l’objet, le gouvernement indique ce qui suit:
- - Les affaires pénales visant John Milton Lozande, Lindy Perocho, Roberto Lachica et
Ramir Corcolon, ainsi que Joel Guillero, Leon Charito, Rolly Hernando et Kenneth
Serando (membres du Teatro Obrero), ont été classées de même que celles visant Rene
Manlangit et Rogelio Arquillo.
- - L’affaire relative à Joseph Canlas, qui avait été arrêté en mars 2021, a été close
en mai 2024 après son décès en détention des suites de la COVID-19. La CDH a estimé
qu’il n’y avait pas eu de violation des droits de l’homme, que le mandat d’arrêt et
le mandat de perquisition avaient été régulièrement délivrés et que Canlas, selon
son propre témoignage, avait été bien traité et qu’il n’avait pas subi de
préjudice.
- - Les actions pénales engagées contre Marklen Maojo Maga pour possession illégale
d’armes à feu et meurtre ont été rejetées par le tribunal en septembre 2022 et en
juillet 2024. Les circonstances de son arrestation et de sa détention sont en cours
d’enquête par la CDH pour déterminer s’il y a eu violation des droits de
l’homme.
- - Imelda Sultan a été acquittée en juillet 2024 des chefs d’accusation dont elle
faisait l’objet.
- Selon la CDH, Alfredo Omandan a été libéré en novembre 2019 et le dossier en
instance devant le RTMB a été clos en l’absence de preuves concernant l’atteinte
présumée à la liberté syndicale.
- - Les dossiers en instance devant le RTMB concernant Ricky Omandam et Angelica
Pavorada Regasajo ont été clos, l’atteinte présumée à la liberté syndicale n’ayant
pas été étayée. Par ailleurs, Ricky Omandam a confirmé qu’il s’était rendu
volontairement aux autorités et n’avait pas porté plainte au sujet de son
arrestation supposée.
- - En octobre et novembre 2023 et en septembre 2024, le RTMB – Région X a recommandé
la radiation des cas de Julie Belvastamen, Susanu Aguaron, Ariel Ronido et Edgardo
Andales, estimant ne pas disposer de preuves suffisantes pour établir que ces cas
étaient imputables à des actes ayant pour but de réprimer la liberté syndicale et le
droit d’association ou en rapport avec l’affiliation syndicale des victimes. Julie
Belvastamen et Susanu Aguaron n’ont pu être localisées pour être interrogées par la
CDH.
- - Dennise Velasco a été libérée après qu’un tribunal ait fait droit à sa demande
d’annulation du mandat de perquisition la concernant. Selon l’enquête de la CDH,
l’arrestation pourrait avoir été contraire aux droits de l’homme. La CDH a donc
recommandé un suivi continu de l’affaire devant les tribunaux et l’octroi d’une aide
financière.
- - Dans l’affaire concernant l’arrestation illégale présumée sur la base
d’accusations fabriquées de toutes pièces à l’encontre de Rowena Rosales et d’Oliver
Rosales, la CDH a diligenté une enquête, mais les intéressés n’ont pas fait preuve
de coopération pendant celle-ci. Il a donc été difficile pour la CDH de déterminer
si une violation des droits de l’homme s’était produite, raison pour laquelle elle a
classé l’affaire en mai 2024.
- - Les procédures pénales visant Gaspar Davao, Danilo Tabura, Juan Alexander Reyes,
ainsi que Buenvinido Ducay, Carlo Apurado et Reynaldo Saura (membres du Teatro
Obrero) sont en cours d’instance. Dans une autre affaire concernant un mineur (nom
non divulgué) qui avait été placé dans un programme d’intervention, le tribunal a
ordonné que la mesure soit levée.
- - Les procédures pénales visant Romina Astudillo, Mark Ryan Cruz et Jaymie Gregorio
sont en cours d’instance et la CDH poursuit son enquête concernant ces
incidents.
- - Dans l’affaire concernant Arnedo «Nedo» Lagunias, sa demande de libération de
l’intéressé est en cours d’instance depuis octobre 2024. L’affaire a été renvoyée au
RTMB pour faire valider et pour recueillir divers éléments.
- Les affaires concernant Steve Mendoza et Elizabeth Camoral sont en instance. Elles
ont été renvoyées au RTMB pour validation et pour recueillir divers éléments.
- - La procédure visant Eugene Eugenio a été renvoyée pour décision au tribunal, qui
doit se prononcer.
- - Les procédures diligentées contre Ricky Cañete pour meurtre et tentative de
meurtre sont en cours d’instance.
- - L’arrestation illégale et les fausses accusations dont Ramon Rescovilla aurait
fait l’objet ont donné lieu à une enquête de la CHR, mais le gouvernement n’est pas
en mesure de communiquer des informations sur les résultats de cette enquête, la
victime ayant refusé que les informations issues de l’entretien soient divulguées à
des services ou des parties autres que le ministère du Travail et de l’Emploi. Les
actions pénales dont cette personne est l’objet pour meurtre présumé d’un militaire
en janvier 2020 et possession illégale d’une arme à feu, d’un engin explosif et de
munitions réelles, sont en cours.
- - D’après un rapport de police de mai 2024, Jose Bernardino est visé actuellement
par une procédure (pour rébellion), tandis qu’une autre procédure à son égard a été
classée et qu’il a été acquitté dans une autre affaire.
- - En ce qui concerne les allégations relatives à la fouille du domicile de la fille
de Joel Demate, selon un entretien avec un représentant du KMU, il pourrait s’agir
d’une erreur d’écriture, et l’incident pourrait concerner la fouille du domicile de
Demate lui-même et non de sa fille. Cela a été confirmé par le Groupe des enquêtes
pénales et de lutte contre la criminalité de la région de la capitale nationale de
la police nationale des Philippines (CIDG-NCR) et il a été précisé que la police
avait strictement respecté les règles et la jurisprudence en vigueur dans
l’exécution du mandat de perquisition. Le tribunal de première instance et la cour
d’appel ont tous deux confirmé la validité du mandat de perquisition. La question
est en cours d’instance devant la Cour suprême.
- - L’action diligentée contre Florentino Pol Viuya pour possession illégale d’armes à
feu est en cours d’instance et l’accusé a été libéré pour la durée du procès. La CDH
a mené sa propre enquête et estimé que l’allégation selon laquelle la police avait
dissimulé les armes à feu était sérieuse, mais qu’aucune preuve ne permettait de
l’étayer. Le mandat d’arrêt a été délivré par une autorité compétente, et les droits
de l’accusé à une procédure régulière et à la protection contre la détention
arbitraire et les perquisitions et saisies illégales ont été respectés tout au long
de la procédure.
- - Edilberto Sangga a été condamné pour avoir enfreint l’interdiction de port d’arme
en période d’élections.
- Le cas d’Eugene Garcia a été suivi par le RTMB, mais un représentant du KMU a
indiqué ne pas avoir eu connaissance de l’arrestation présumée de l’intéressé.
- - Selon la CDH, l’identité des six femmes membres de l’OGYON et les circonstances de
leur arrestation n’ont pas été établies avec certitude. Leur dossier au RTMB –
Région X a également été clos, car les allégations étaient trop vagues pour
permettre un examen au fond (les noms des femmes n’ont pas été indiqués).
- 334. En ce qui concerne les allégations supplémentaires d’inscription sur
liste rouge, de harcèlement, d’intimidation et de menaces à l’encontre de syndicalistes,
le gouvernement fournit les informations suivantes:
- - L’affaire judiciaire visant Teddy Canillo a été classée.
- - L’affaire judiciaire visant Ariel Casilao a été classée en septembre 2023, et la
CDH a également considéré que l’affaire était close. De même, le RTMB – Région III a
adopté en septembre 2024 une décision recommandant de radier l’affaire de sa liste
de suivi tripartite dans la mesure où les faits entourant le dépôt de la plainte
pénale ne présentaient aucun lien avec l’exercice du droit syndical et où le
tribunal avait rejeté la plainte pénale pour usurpation d’autorité.
- - Marilyn Hernandez, Carlos Sañosa, Jun Delos Reyes, Roberto Hernandez et Josefina
Castillano ont saisi la CDH d’une plainte concernant leur arrestation en 2017. La
CDH a constaté que les intéressés étaient membres d’une organisation populaire
assurant une assistance humanitaire à des civils touchés par un conflit armé.
Concernant cet aspect et les poursuites pénales engagées contre ces personnes pour
tentative de meurtre, la CDH a tranché qu’elles avaient été arrêtées et placées en
détention abusivement. La CDH a donc recommandé de leur accorder une aide
financière. L’affaire est à présent close.
- - L’enquête sur les visites présumées d’agents de l’État concernant 35 syndicalistes
de l’Union des travailleurs-NAFLU-KMU de Nexperia Philippines Inc. est en cours. La
CDH a indiqué avoir mis un conseil à la disposition des membres du syndicat et a
recommandé de classer l’affaire.
- - La CDH a enquêté sur place au sujet de l’incident concernant le président de
l’OLALIA-KMU, Hermenigildo «Hermie» Marasigan, et a constaté qu’il n’y avait aucune
preuve que le syndicaliste ait été harcelé, menacé ou placé sur liste rouge. Elle a
donc classé l’affaire sans préjudice de sa réouverture si de nouvelles preuves
convaincantes et matérielles devaient être produites.
- - La CDH a clos le cas de Guillermo «Ka Gimo» Hernandez sans recommander aucune aide
financière, la violation présumée des droits de l’homme n’ayant pas été
prouvée.
- - Bien que le président de l’Union des travailleurs d’Alcophil-Association des
organisations syndicales authentiques-KMU, Eliseo Taping, ait indiqué qu’une plainte
avait été déposée à la CDH et qu’il communiquerait les documents pertinents au RTMB,
aucun élément n’indique qu’une affaire soit en instance devant la CDH. Par ailleurs,
il a indiqué qu’il occupait un nouvel emploi et que les rondes de véhicules avaient
cessé dans cette zone.
- - Dans certains cas, les plaignants n’ont pas apporté les autres précisions
demandées par le RTMB – Région VI, ce qui a entravé l’action des autorités pour
recueillir des informations, valider les allégations, exercer un suivi et prendre
les mesures appropriées (cas concernant Theresa Aloquina, Dingding, Rebecca Bucabal,
Tioliza Iwayan, Arjie Marangga, Susan Pabalate, les membres du Pakigdaet sa
Kalambuan (PSK-NFSW), les membres de la PAMALAKAYA et de la NFSW-FGT, Grace Parreno,
Anilyn Serrondo, Chen-Chen Serrondo, Joenel Timplado, Eulando Seroondo,
l’UMA-Isabela et les 113 agriculteurs de 28 associations d’agriculteurs).
- - Esperidion Cabaltera, Richard Genabe et Ronald Rosales (responsables syndicaux du
Syndicat des travailleurs de l’exploitation Musahamat (MWLU)) n’ont pas été enlevés
mais ont accepté d’eux-mêmes une invitation de l’armée à dialoguer et ont ensuite
démissionné de leur plein gré de l’entreprise et donc du syndicat. Selon le RTMB –
Région XI, ils ont signé un document écrit indiquant qu’ils ne souhaitaient pas
porter plainte. Le cas concernant Hasil Delima a été dénoncé par l’intéressé
lui-même.
- - L’affaire relative à Godfrey Palahang dont le RTMB était saisi a été close, les
incidents ne constituant pas une violation de la liberté syndicale, et Palahang
ayant contesté les allégations soumises par les plaignants. La CDH a indiqué pour sa
part qu’elle ne se saisirait pas de l’affaire concernant son arrestation
supposée.
- - Pour ce qui est de l’affaire relative au syndicat Nagkakaisang Manggagawa ng
Supreme (NMS-NAFLU-KMU), qui concernait des allégations d’ingérence dans les
activités syndicales, le président et le trésorier du syndicat ont communiqué une
déclaration écrite indiquant qu’un vote avait été organisé pour se désaffilier de la
NAFLU-KMU et que la procédure s’était déroulée sans incident. La CDH n’a pas pu
prouver le bien-fondé des allégations selon lesquelles des membres du syndicat
auraient été harcelés ou inscrits sur liste rouge par la police et a clos l’affaire
en février 2024.
- - Dans l’affaire relative au Syndicat des travailleurs progressistes de Wyeth
Philippines–Alliance du médicament et de l’industrie alimentaire-KMU, le président
du syndicat local a indiqué au ministère du Travail et de l’Emploi que ni lui ni les
membres de son syndicat n’avaient subi une quelconque forme de harcèlement et que la
visite de l’équipe spéciale «Ugnay» n’avait consisté qu’en une conversation
pacifique. En août 2023, la CDH a prononcé la clôture de l’affaire en l’absence de
preuves que des violations des droits de l’homme avaient été commises. Si une lettre
a été adressée au KMU pour l’inviter à donner d’autres précisions, celle-ci est
restée sans réponse.
- - Jose Rex Escapalao a été condamné pour acquisition ou possession illégale d’armes
à feu et de munitions.
- - Les affaires concernant Celso Gonzales, Celso Salgado, Ernesto Tilacas et Noel
Zaragosa (membres du Syndicat des travailleurs de l’hacienda San Herman-NFSW), ainsi
que celles concernant les membres de l’Association des agriculteurs et travailleurs
agricoles de l’Aidsisa (AFFWA-NFSW) ont été rattachées à un litige foncier.
- 335. En ce qui concerne les allégations supplémentaires de dispersion
violente de grèves, le gouvernement indique ce qui suit:
- - Le Bureau du médiateur a rendu en février 2018 une décision commune rejetant les
plaintes pénales et administratives contre le policer présumé avoir été impliqué
dans la dispersion de la grève des travailleurs du Syndicat des travailleurs de Shin
Sun (SSWU) en juin 2017. L’affaire a été renvoyée à la CDH pour enquête, qui a pris
contact avec le KMU pour obtenir des renseignements mais n’a pas obtenu de
réponse.
- - Le RTMB – Région III a publié, concernant la grève d’avril 2018 du Syndicat des
travailleurs de NutriAsia, au cours de laquelle un travailleur a été licencié et
23 autres ont été arrêtés, une décision dénonçant la dispersion violente des
grévistes et des piquets de grève et invitant la police à respecter strictement les
consignes en vigueur pour le maintien de l’ordre. En ce qui concerne les
travailleurs arrêtés, le tribunal de première instance a rejeté les accusations
d’agression directe en juillet 2021, mais pour ce qui est des accusations distinctes
d’agression directe visant Jessi Villa Castin, Francis Estrella, Ronald Gillego et
Memie Bancat, le tribunal a déclaré ces personnes coupables du délit moins grave de
résistance et de désobéissance et les a condamnés à une amende de 2 000 pesos. La
grève a été déclarée illégale aussi bien par la section régionale d’arbitrage no III
de la Commission nationale des relations professionnelles en août 2019 que par la
cour d’appel en août 2020.
- 336. En ce qui concerne les autres allégations de caractère plus général,
le gouvernement conteste fermement les allégations d’absence d’état de droit et de
manque d’indépendance de la justice, et l’idée selon laquelle le ministère du Travail et
de l’Emploi transmettrait des informations sur les membres de syndicats au gouvernement
pour l’aider dans ses activités anti-insurrectionnelles. Il indique également que la
Cour suprême a estimé que la loi antiterroriste n’était pas inconstitutionnelle en soi,
mais a jugé inconstitutionnels, dans cette loi, le paragraphe 2 de l’article 25, les
deuxième et troisième modes de désignation et la condition prévue à l’article 4. Le
gouvernement précise qu’il existe trois niveaux d’enquête par le ministère de la
Justice, l’Agence nationale de coordination du renseignement et le Conseil
antiterroriste, avant qu’un groupe de personnes, une organisation ou une association ne
soit désigné comme terroriste, et que dès lors aucune entité ne peut être désignée
arbitrairement comme terroriste. En décembre 2023, la Cour suprême a publié des règles
concernant la loi antiterroriste, qui prévoient un recours judiciaire contre les
désignations émanant du Conseil antiterroriste et les ordonnances de gel du Conseil de
lutte contre le blanchiment d’argent, sans préjudice de l’existence d’autres recours,
dont les recours en habeas corpus, en amparo ou en habeas data. Le gouvernement indique
en outre qu’en avril 2024 le Conseil antiterroriste a déclaré être seul et exclusivement
habilité à désigner des individus ou des groupes comme terroristes en vertu de la loi
antiterroriste. Le Conseil antiterroriste a également demandé à tous ses membres de lui
signaler les cas de non-respect des procédures et directives concernant la désignation
comme terroriste, les désignations non autorisées ou d’autres questions connexes. Le
gouvernement indique également que des projets de loi visant à définir et réprimer
l’inscription sur liste rouge sont en cours d’instance au Congrès, et que, dans
l’intervalle, la Cour suprême a déclaré, en juillet 2023, que l’inscription sur liste
rouge, le dénigrement, la diffamation et la culpabilité par association représentaient
des menaces pour le droit des personnes à la vie, à la liberté et à la sécurité et
pouvaient justifier la délivrance d’une ordonnance d’amparo. En ce qui concerne les
allégations d’inscription sur liste rouge de membres du KMU, le gouvernement soutient
que le KMU n’a pas indiqué s’il s’était prévalu de l’un des recours mentionnés et s’est
borné à alléguer que le gouvernement lui avait arbitrairement refusé tout recours.
- 337. Le gouvernement indique en conclusion que les stratégies identifiées
dans la feuille de route adoptée par le NTIPC en août 2023 comprennent la promotion
d’une interprétation commune des principes de la liberté syndicale entre les autorités
publiques concernées et les partenaires sectoriels, le renforcement et la capacitation
des organes de contrôle tripartites existants et la promotion de partenariats
institutionnels visant à promouvoir la liberté syndicale. Le gouvernement mentionne
plusieurs activités de renforcement des capacités, dialogues et autres mesures prises à
cet effet, notamment l’approbation par le NTIPC des directives générales de 2024 sur
l’exercice de la liberté syndicale et des libertés civiles, élaborées par un groupe de
travail tripartite. Il indique également que le ministère du Travail et de l’Emploi a
entrepris de réviser la structure des mécanismes tripartites dans le contexte de la
proposition du secteur du travail de créer une commission de contrôle au sein du NTIPC
pour suivre l’exécution de la feuille de route. Le gouvernement déclare avoir utilisé
l’ensemble de ses mécanismes pour valider les signalements de violations et prendre les
mesures légales appropriées.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 338. Le comité rappelle que le présent cas concerne des allégations de
détérioration de la situation des droits du travail dans le pays, caractérisée par de
nombreux cas d’exécutions extrajudiciaires de dirigeants et de membres syndicaux, de
tentatives d’assassinat, d’arrestations et de détentions illégales, d’inscription sur
liste rouge, de harcèlement, d’intimidation et de menaces à l’encontre de syndicalistes,
ainsi que des allégations de répression syndicale et d’ingérence dans les affaires
syndicales, et l’incapacité du gouvernement à enquêter de manière appropriée sur ces cas
et à traduire les auteurs en justice, ce qui renforce le climat d’impunité, de violence
et d’insécurité et nuit par conséquent à l’exercice des droits syndicaux.
- 339. En ce qui concerne les affaires pénales relatives aux meurtres
d’Antonio «Dodong» Petalcorin, d’Emilio Rivera et de Kagi Alimudin Lucman, à l’origine
du présent cas (recommandation a)), le comité rappelle que ces syndicalistes étaient des
dirigeants de la Confédération nationale des syndicats de travailleurs des transports
des Philippines (NCTU) ou d’organisations locales affiliées à celle-ci et que les
plaignants ont allégué que leurs meurtres, survenus en 2013, avaient été motivés par
leur affiliation syndicale et leurs activités de lutte contre la corruption. Le comité
rappelle également que le gouvernement a indiqué auparavant que les affaires concernant
MM. Petalcorin et Rivera avaient été closes sans préjudice de leur réouverture si des
éléments nouveaux se faisaient jour. Le comité note que le gouvernement indique à cet
égard que, si la police a mené une nouvelle enquête sur ces meurtres en juillet 2024,
elle n’a pas pu obtenir d’éléments démontrant que les incidents étaient liés à un mobile
antisyndical et que la CDH et le RTMB étaient parvenus à des conclusions analogues,
estimant que les institutions publiques avaient épuisé le travail d’enquête et de
poursuites concernant ces affaires. Il prend également note des éléments transmis par le
gouvernement selon lesquels les enquêtes sur l’affaire concernant M. Lucman n’ont pas
progressé en raison de l’absence de témoins directs. Tout en observant avec regret que,
douze ans après les incidents, aucun progrès véritable ne semble avoir été fait, dans
aucun des trois cas, pour ce qui est de traduire les responsables en justice, le comité
prend bonne note des indications du gouvernement selon lesquelles ces affaires
continuent de faire l’objet d’un suivi de la part des mécanismes tripartites et
gouvernementaux existants malgré les circonstances difficiles (temps écoulé, absence de
témoins directs, absence de coopération des familles des victimes, suspects toujours en
fuite). Observant en outre que ni la police ni les mécanismes compétents n’ont pu
établir que les meurtres des trois dirigeants syndicaux étaient liés à un mobile
antisyndical, mais rappelant que, selon les plaignants, les meurtres étaient liés à
leurs activités syndicales, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout
progrès accompli, s’agissant notamment de redoubler d’efforts pour exécuter les mandats
d’arrêt délivrés, comme l’a recommandé le RTMB. À la lumière des éléments fournis par le
gouvernement sur l’examen de ces cas par des mécanismes non judiciaires et tripartites
et sur les moyens d’indemnisation existants, le comité prie le gouvernement d’indiquer
si des mesures concrètes ont été prises pour permettre une indemnisation adéquate des
familles des victimes dans ces affaires.
- 340. En ce qui concerne les allégations supplémentaires communiquées par
les plaignants en 2021, le comité rappelle qu’elles se réfèrent à une politique de
répression et de criminalisation des syndicats qui, selon les plaignants, s’est traduite
dans la pratique par de graves violations des droits humains et syndicaux, dont de
nombreux cas d’exécutions extrajudiciaires de syndicalistes et de dirigeants syndicaux
depuis 2016, des arrestations illégales, des mises en détention et de fausses
accusations criminelles concernant des travailleurs, des militants des droits de l’homme
et des syndicalistes, ainsi que de nombreux cas d’intimidation, de harcèlement,
d’inscription sur liste rouge et de menaces contre des syndicalistes et des dirigeants
syndicaux, dont la plupart, selon les plaignants, se caractérisent par un certain degré
d’implication d’agents de l’État, en particulier des membres de la police, des forces
armées ou d’autres organisations sous leur contrôle. Le comité note que le gouvernement
est fermement opposé à l’examen de ces allégations par le comité, faisant valoir
qu’elles procèdent de circonstances factuelles distinctes des allégations initiales et
sans lien avec celles-ci, n’ont pas été étayées suffisamment par les requérants et ont
été résolues judiciairement ou ont donné lieu à une enquête par une autorité compétente.
En outre, le gouvernement estime que le comité n’a pas dûment pris en considération les
informations fournies auparavant par lui et montrant que les allégations ne se
rapportaient pas véritablement à la liberté syndicale, que nombre d’entre elles
concernaient des litiges fonciers et que, dans certains cas, les victimes elles-mêmes ou
leurs organisations ont contesté ces allégations. S’il prend note de ces assertions, le
comité souhaite rappeler à nouveau qu’il entre dans son mandat d’examiner si, et dans
quelle mesure, des preuves sont présentées pour étayer les allégations. Cette
appréciation porte sur le fond de l’affaire et ne saurait fonder une décision
d’irrecevabilité. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale,
sixième édition, 2018, paragr. 14.] Qui plus est, il n’est pas toujours facile, voire
même possible, d’étayer de preuves certains types d’allégations. L’important est
l’acceptation des preuves présentées (ceci a lieu au moment où le comité examine le cas)
et que l’existence d’un intérêt direct à l’affaire soit avérée, en l’occurrence lorsque
les organisations plaignantes font état d’une atteinte à la liberté syndicale plus ou
moins générale. En outre, le comité a, en diverses occasions, décidé de regrouper des
allégations de nature semblable concernant le même pays en un seul cas, lorsqu’il a
estimé que cela permettrait un examen global des allégations qui lui étaient
présentées.
- 341. En ce qui concerne le fond des allégations supplémentaires, le
comité note que le gouvernement présente des informations détaillées au sujet des
nombreux cas de meurtres et de tentatives de meurtre signalés par les plaignants
(recommandations b) et c)). En particulier, il note que, dans la plupart des cas,
l’enquête de la CDH a conclu à une violation des droits de l’homme (privation arbitraire
de la vie) et a recommandé l’octroi d’une aide financière aux familles des victimes,
sans qu’un lien soit nécessairement constaté avec la liberté syndicale (Leonardo Escala,
Ariel Diaz, les «9 de Sagay», Flora Gemola, Ronald Manlanat, Felipe Dacal-Dacal, Antonio
Cano Arellano, Jerry Alicante, Dandy Miguel, Puroy Dela Cruz, Randy Dela Cruz, Ariel
Evangelista, Chai Lemita Evangelista, Mark Lee Bacasno, Melvin Dasigao, Abner Esto,
Edward Esto, Reynaldo Malaborbor, Danny «Boy» Bautista et Emmanuel «Manny» Asuncion). Le
comité note également, d’après les renseignements communiqués, que les RTMB compétents
ont recommandé le retrait de ces cas de leur liste de suivi en raison de l’absence de
preuve suffisante pour établir que les meurtres avaient été motivés par l’appartenance à
un syndicat ou résultaient d’une implication de l’État, et qu’il n’avait pas été engagé
de poursuites judiciaires pour ces affaires (la famille ayant renoncé aux poursuites) ou
que la plainte avait été rejetée, ou que l’affaire avait été classée pour diverses
raisons (manque de preuves, identité incertaine de l’auteur, accusé en fuite ou décédé,
réticence de la famille de la victime à coopérer). Le comité note en outre que: i) dans
le cas d’Alexander Ceballos, la police a conclu que le motif possible à l’origine du
meurtre tenait à un litige foncier, tandis que la CDH a constaté une violation des
droits de l’homme et jugé probable que la victime ait été tuée en raison de son action
comme dirigeant syndical; ii) dans le cas du meurtre de Paul John Dizon, la CDH avait
manqué de preuve pour étayer les menaces de mort dont il aurait fait l’objet; et iii) le
cas de Jose Jerry Catologo est en cours d’enquête par la CDH et celui de Julius Broce
Barellano est en cours d’instance.
- 342. Le comité croit comprendre de ce qui précède que, si les procédures
judiciaires relatives à ces cas, lorsqu’elles ont été engagées, n’ont pas encore permis
des poursuites efficaces contre les suspects, la CDH a, le plus souvent, constaté une
violation du droit à la vie et recommandé l’octroi d’une aide financière aux familles
des victimes, même si elle n’a pas été en mesure d’établir de lien avec la liberté
syndicale. Notant que le gouvernement indique à cet égard que les autorités compétentes
sont disposées à rouvrir les dossiers classés si de nouvelles preuves étaient
découvertes ou si les suspects étaient appréhendés, le comité prie le gouvernement de le
tenir informé de tout fait nouveau à cet égard. Le comité prie également le gouvernement
de l’informer de toute mesure prise pour rouvrir le cas d’Alexander Ceballos ou
reprendre l’enquête connexe, après que la CDH a constaté que ses activités syndicales
pourraient avoir été le motif de son assassinat. Notant, en outre, qu’un cas est en
cours d’instance, et qu’un autre est en cours d’enquête par la CDH, le comité s’attend
fermement à ce que le gouvernement fasse de ces procédures une priorité et veille à ce
que le lien possible avec la liberté syndicale soit dûment pris en considération. Enfin,
rappelant que le droit à la vie est un préalable fondamental à l’exercice de la liberté
syndicale et que les assassinats de nombreux syndicalistes, qu’il s’avère ou non par la
suite que le motif en était l’affiliation syndicale, créent un climat de peur qui a un
effet extrêmement préjudiciable sur l’exercice légitime des droits syndicaux, le comité
prie instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts pour lutter contre la violence
à l’égard des syndicalistes, notamment en concevant et en appliquant toute mesure
nécessaire à cet effet, notamment des orientations et instructions précises à
l’intention de tous les agents de l’État et une formation pour les fonctionnaires
concernés sur la gestion des situations impliquant des syndicats ainsi qu’en donnant
plein effet aux mécanismes nationaux de contrôle et d’enquête et à toute autre mesure
appropriée, y compris dans le cadre de la feuille de route de 2023 (évoquée plus
loin).
- 343. En ce qui concerne les allégations supplémentaires faisant état de
nombreux cas d’arrestations illégales et de détention et le fait que des syndicalistes
soient visés par des accusations pénales fabriquées de toutes pièces
(recommandations b), d) et e)), le comité prend note des éléments détaillés communiqués
par le gouvernement. S’il note en particulier que les actions en justice visant certains
syndicalistes ont abouti à un rejet de la plainte ou à un classement de l’affaire, ou
que les syndicalistes accusés ont été acquittés, le comité regrette d’observer qu’un
syndicaliste a été condamné pour n’avoir pas respecté une interdiction de port d’arme et
que des procédures pénales sont toujours en cours à divers stades contre plusieurs
autres syndicalistes (Ricky Cañete, Gaspar Davao, Danilo Tabura, Buenvinido Duca, Carlo
Apurado, Reynaldo Saura, Romina Astudillo, Mark Ryan Cruz, Jamie Gregorio, Juan
Alexander Reyes, Ramon Rescovilla, Jose Bernardino, Joel Demate, Dennise Velasco, Arnedo
«Nedo» Lagunias, Steve Mendoza, Elizabeth Camoral, Eugene Eugenio et Florentino Pol
Viuya). Le comité note en outre que la plupart des cas susmentionnés, qui avaient été
renvoyés au RTMB ou à la CDH à des fins de suivi ou d’enquête, ont donné lieu à un
classement ou une recommandation de radiation, soit parce que les entités n’ont pas été
en mesure d’établir un lien manifeste entre les faits et l’exercice de la liberté
syndicale, soit parce que la preuve manquait pour pouvoir évaluer l’existence d’un tel
lien, tandis qu’une enquête de ces entités est toujours en cours pour quelques cas
(Ramir Corcolon, Marklen Maojo Maga, Romina Astudillo, Mark Ryan Cruz, Jamie Gregoria,
Arnedo «Nedo» Lagunia, Steve Mendoza et Elizabeth Camoral). Rappelant à cet égard que
les mesures d’arrestation de syndicalistes et de dirigeants d’organisations d’employeurs
peuvent créer un climat d’intimidation et de crainte empêchant le déroulement normal des
activités syndicales [voir Compilation, paragr. 126], le comité prie instamment le
gouvernement de veiller à ce que toutes les poursuites pénales en instance soient
abandonnées et que tous les syndicalistes placés en détention soient immédiatement
libérés, s’il devait s’avérer que leur arrestation ou leur détention était liée à
l’exercice légitime de leurs droits syndicaux. Le comité prie le gouvernement de le
tenir informé de tout fait nouveau concernant les poursuites pénales en instance, ainsi
que les enquêtes diligentées par le RTMB et la CDH. Observant également qu’aucune
information n’a été fournie sur l’arrestation précédemment dénoncée d’Ireneo Atadero et
d’Aiza Gamao (tous deux arrêtés pour possession illégale présumée d’armes à feu) et sur
l’enquête relative à la tentative de perquisition du domicile de Ricky Chavez, le comité
prie le gouvernement de lui communiquer tout renseignement actualisé utile à cet
égard.
- 344. En ce qui concerne les allégations d’intimidation et d’inscription
sur liste rouge, le comité rappelle que cela recouvre, d’une part, des allégations de
criminalisation institutionnelle, de répression et de dénigrement des activités
syndicales et d’inscription sur liste rouge de syndicats comme organisations terroristes
et, d’autre part, des cas graves concrets de harcèlement, d’intimidation et
d’inscription sur liste rouge (recommandations b) et d)). En ce qui concerne les
allégations plus générales, le comité note que le gouvernement conteste fermement les
allégations d’absence d’état de droit et d’enquêtes indépendantes de la justice et
l’idée selon laquelle le ministère du Travail et de l’Emploi transmettrait des
informations sur les membres de syndicats pour soutenir l’action anti-insurrectionnelle.
Le gouvernement ajoute qu’il existe trois niveaux d’enquête avant qu’un individu ou une
association puissent être désignés par la justice comme terroriste, ce qui, selon lui,
permet d’éviter les désignations arbitraires ou erronées, et que la Cour suprême a
déclaré, en juillet 2023, que l’inscription sur liste rouge, le dénigrement, la
diffamation et la culpabilité par association représentaient des menaces pour le droit
des personne à la vie, à la liberté et à la sécurité et pouvaient justifier la
délivrance d’une ordonnance d’amparo. À cet égard, le comité note également, d’après les
éléments communiqués par le gouvernement et d’après les précédents examens de la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, que, à la
suite de la décision de 2021 de la Cour suprême qui a invalidé deux dispositions de la
loi antiterroriste, le terrorisme, tel que défini à l’article 4, n’inclut pas les
activités de plaidoyer, de protestation, de dissidence, d’arrêt de travail, d’action
industrielle ou de masse, et d’autres exercices similaires des droits civils et
politiques. Accueillant également favorablement d’autres mesures signalées par le
gouvernement – notamment l’adoption par la Cour suprême des règles relatives à la loi
antiterroriste prévoyant un recours judiciaire permettant de contester la désignation
comme terroriste et les ordonnances de gel, les instructions données aux membres du
Conseil antiterroriste de signaler les cas de désignation illégitime ou d’autres cas de
non-respect des directives et procédures applicables, et les initiatives législatives
visant à définir et à sanctionner l’inscription sur liste rouge –, le comité veut croire
que le gouvernement veillera à ce que la loi antiterroriste ne soit pas appliquée d’une
façon restrictive pour les activités syndicales légitimes et les libertés civiles
connexes. Il prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau à cet égard,
y compris de toute autre mesure qui serait envisagée ou prise afin de remédier à la
politique de répression, de diffamation et de dénigrement des syndicats dont font état
les plaignants.
- 345. S’agissant des cas spécifiques de harcèlement, d’intimidation et
d’inscription sur liste rouge dénoncés par les plaignants, le comité note qu’il est
indiqué par le gouvernement que: i) certains cas étaient liés à des litiges fonciers;
ii) dans plusieurs cas, le RTMB ou la CDH ne disposaient pas des éléments d’information
nécessaires pour enquêter convenablement sur ces cas; iii) dans plusieurs cas, les
allégations ont été contestées par les personnes concernées ou leurs organisations, ou
elles ont renoncé à porter plainte; les cas ont donc été déclarés clos par le RTMB ou la
CDH; iv) la CDH a aussi clos un certain nombre de cas faute d’avoir constaté une
violation des droits de l’homme ou un lien avec la liberté syndicale; v) les plaintes
visant plusieurs syndicalistes ont été rejetées ou l’affaire a été classée; vi) Jose Rex
Escapalao a été condamné pour acquisition ou possession illégale d’armes à feu et de
munitions; vii) l’enquête sur le cas du Syndicat des travailleurs de Nexperia
Philippines Inc.-NAFLU-KMU est en cours; et viii) en ce qui concerne l’arrestation de
Marilyn Hernandez, Carlos Sañosa, Jun Delos Reyes, Roberto Hernandez et Josefina
Castillano, la CDH a constaté que ces personnes étaient membres d’une organisation
populaire assurant une aide humanitaire aux civils touchés par le conflit armé et
avaient été arrêtées et placées en détention abusivement; elle a donc recommandé
l’octroi d’une aide financière de 10 000 pesos philippins à chacune. Tout en prenant
note de ces éléments, y compris de l’affirmation répétée du gouvernement selon laquelle
nombre d’incidents étaient liés à des litiges fonciers ou le lien avec la liberté
syndicale n’était pas établi, le comité se doit de rappeler la gravité des allégations
rapportées par les plaignants concernant un grand nombre de syndicalistes et l’effet
extrêmement préjudiciable que ces cas auraient eu pour l’exercice légitime des droits
syndicaux dans le pays. Il rappelle à cet égard que le fait d’assimiler purement et
simplement les syndicats à un mouvement d’insurrection a pour effet de les stigmatiser
et place souvent les dirigeants syndicaux et les syndicalistes dans une situation
d’extrême insécurité [voir Compilation, paragr. 93], et que les actes de harcèlement et
d’intimidation à l’égard de membres et de dirigeants syndicaux créent un climat
empêchant le déroulement normal des activités syndicales. Compte tenu de ce qui précède,
le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’enquête en cours et
de toute mesure prise concrètement pour répondre aux préoccupations maintes fois
exprimées par les requérants, tant en ce qui concerne l’inscription sur liste rouge que
les actes de harcèlement et d’intimidation à l’égard de syndicalistes. Il invite
également les plaignants à communiquer aux autorités compétentes toute information
pertinente en leur possession susceptible de permettre aux autorités d’enquêter de
manière approfondie sur les cas pour lesquels le gouvernement a indiqué que le RTMB ou
la CDH ne disposaient pas d’éléments suffisants (voir plus haut).
- 346. Le comité observe en outre que le gouvernement n’a pas communiqué
d’informations sur les cas suivants d’intimidation, de harcèlement et d’inscription sur
liste rouge qui auraient eu pour objet de réprimer le syndicalisme et de susciter la
peur parmi les membres de syndicats: cas d’avril 2019 relatif à des menaces à l’égard de
30 résidents de Gaway-Gaway, Jonob-Jonob, Escalante City; cas de juillet 2019 relatif à
des menaces à l’égard des résidents de Minasugang (barangay de Tabunac, Toboso);
campagnes et assemblées de porte-à-porte organisées par les militaires chez les
travailleurs du NAMASUFA et leurs proches dans la ville de Compostela; inscription sur
liste rouge et harcèlement de membres du Syndicat des travailleurs des plantations
d’huile de palme des Philippines, à la suite de quoi ils se sont désaffiliés du KMU en
juillet 2019; dénigrement, en septembre 2019, du Syndicat des travailleurs de Mindanao
Agriculture Inc. et de sa fédération affiliée; harcèlement, intimidation et menaces
d’agents du Groupe de travail national pour mettre fin au conflit armé communiste local
(NTF-ELCAC) à l’égard de membres du syndicat des employés de l’usine Coca-Cola à Santa
Rosa entre février et mai 2020; surveillance, menaces et harcèlement visant deux
responsables du Syndicat des travailleurs d’Optodev-NAFLU-KMU entre décembre 2020 et
mars 2021; surveillance régulière du domicile d’Eleanor de Guzman, directrice pour les
droits de l’homme au KMU, par des hommes du Groupe des enquêtes pénales et de lutte
contre la criminalité, organe de la police, en mars 2021; affiches et messages sur les
médias sociaux qualifiant de terroristes le KMU et son président Elmer Labog en juin
2021, ainsi que destruction de locaux et de biens syndicaux; et dénigrement de Lean
Porquia, bénévole du KMU. [Pour d’autres précisions, voir le 396e rapport, octobre 2021,
paragr. 517, et le 401e rapport, mars 2023, paragr. 649.] Le comité prie donc le
gouvernement de communiquer des informations actualisées sur ces cas.
- 347. En ce qui concerne les allégations présumées de répression violente
de grèves de travailleurs entre 2017 et 2019 (recommandation f)), la commission prend
note des informations communiquées par le gouvernement selon lesquelles: i) la
dispersion en juin 2017 de la grève des travailleurs du Syndicat des travailleurs de
Shin Sun (SSWU), à la suite de laquelle 12 travailleurs ont été arrêtés, fait l’objet
d’une enquête de la CDH, mais le KMU n’a pas communiqué les informations demandées; et
ii) dans le cas de la grève d’avril 2018 du Syndicat des travailleurs de NutriAsia, le
RTMB a dénoncé la dispersion violente de la grève et appelé la police à respecter
strictement les consignes en vigueur pour le maintien de l’ordre et, bien que les
plaintes pour agression visant 23 syndicalistes aient été rejetées, 4 syndicalistes ont
été reconnus coupables du délit de résistance et de désobéissance. Le comité observe
également que le gouvernement n’a pas communiqué d’informations au sujet des cas
suivants dénoncés par les plaignants concernant la dispersion violente présumée de
grèves: i) grève des bras croisés de travailleurs de la Force unifiée des travailleurs
de Middleby Philippines Inc., à Binan, dans la province de la Lagune, en juillet 2018,
cinq travailleurs ayant été blessés et sept grévistes arrêtés; ii) grève de travailleurs
affiliés au NAMASUFA dans une entreprise d’exportation de bananes à Compostela en
octobre 2018 et passage à tabac de membres du syndicat; iii) piquet de grève de
200 travailleurs du Syndicat des travailleurs de Pepmaco en juin 2019, plusieurs d’entre
eux ayant été grièvement blessés; et iv) grève de 400 travailleurs d’une entreprise de
production de condiments à Cabuyao dans la province de la Lagune, en juillet 2019,
19 travailleurs ayant été gravement blessés et 17 arrêtés, dont 3 dirigeants syndicaux,
et accusés de dégradation volontaire, de coercition aggravée et d’agression directe.
Rappelant que, si les travailleurs et leurs organisations ont l’obligation de respecter
les lois du pays, l’intervention des forces de sécurité dans une grève doit se borner
strictement au maintien de l’ordre public [voir Compilation, paragr. 933], le comité
prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à
ce que les grèves menées par les travailleurs, pour autant qu’elles restent pacifiques,
ne donnent pas lieu à un usage disproportionné de la force par la police ou l’armée,
notamment grâce à une formation continue et adaptée des agents de l’État concernés. Le
comité prie également le gouvernement de communiquer des informations actualisées
concernant les allégations selon lesquelles aucune information n’a été communiquée, et
le prie instamment de garantir la libération des syndicalistes arrêtés à la suite des
incidents susmentionnés s’ils sont détenus en raison de l’exercice légitime de leurs
activités syndicales.
- 348. Enfin, le comité prend note avec intérêt des renseignements
détaillés et d’ordre général communiqués par le gouvernement pour présenter un certain
nombre d’initiatives adoptées et de mesures prises afin de promouvoir le respect de la
liberté syndicale et des libertés civiles, ainsi que pour valider des éléments de fait
concernant toute violation et prendre les mesures légales nécessaires. En particulier,
il accueille favorablement la mention par le gouvernement de la feuille de route adoptée
par le NTIPC en août 2023, qui comprend une stratégie visant à promouvoir une
interprétation commune des principes de la liberté syndicale entre les autorités
publiques concernées et les partenaires sectoriels, à renforcer les organes de contrôle
tripartites existants en les dotant des capacités nécessaires et à encourager les
partenariats institutionnels visant à promouvoir la liberté syndicale. Le comité
accueille également favorablement l’approbation par le NTIPC, dans le cadre de la
feuille de route tripartite, des directives générales de 2024 sur l’exercice de la
liberté syndicale et des libertés civiles, qui régissent la conduite de l’ensemble des
parties prenantes s’agissant de promouvoir l’exercice effectif par les travailleurs du
secteur privé de la liberté syndicale et des libertés civiles. Le comité accueille en
outre favorablement les propositions visant à augmenter le budget de la CDH pour
renforcer la capacité de celle-ci de promouvoir et de protéger les droits de l’homme, y
compris la liberté syndicale, en particulier s’agissant des enquêtes sur les violations
et de l’octroi d’une aide financière aux victimes et à leurs familles, ainsi que le
mémorandum conclu entre la CDH et le ministère de la Justice pour renforcer l’aide
offerte aux victimes de violations des droits de l’homme et à leurs familles pour
l’obtention d’une indemnisation. Compte tenu de ce qui précède, le comité prie le
gouvernement de le tenir informé de la mise en œuvre des directives générales de 2024 et
de leur effet sur la liberté syndicale et les libertés civiles, et ne doute pas que leur
stricte application, conjuguée aux autres mesures et initiatives utiles mentionnées par
le gouvernement, ainsi qu’à son engagement de mener une enquête approfondie et d’exercer
un suivi rigoureux pour toute allégation grave de violation des libertés civiles et de
la liberté syndicale, contribuera à garantir le plein respect de la liberté syndicale
par tous les acteurs étatiques et non étatiques et, partant, à améliorer les conditions
d’exercice des droits syndicaux dans le pays.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 349. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Notant que les affaires des meurtres d’Antonio «Dodong» Petalcorin, Emilio Rivera
et Kagi Alimudin Lucman font toujours l’objet d’un suivi par les mécanismes
tripartites et gouvernementaux existants, le comité prie le gouvernement de le tenir
informé de tout progrès accompli, s’agissant notamment de redoubler d’efforts pour
exécuter les mandats d’arrêt délivrés, comme l’a recommandé l’Organe régional
tripartite de surveillance (RTMB). Le comité prie également le gouvernement
d’indiquer si des mesures concrètes ont été prises pour permettre une indemnisation
adéquate des familles des victimes dans ces affaires.
- b) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout fait nouveau concernant
la réouverture éventuelle de dossiers classés concernant les assassinats de
syndicalistes mentionnés dans les allégations supplémentaires, y compris le cas
d’Alexander Ceballos, à propos duquel la Commission des droits de l’homme (CDH) a
estimé que les activités syndicales de l’intéressé pourraient avoir été le motif de
son assassinat. Le comité s’attend fermement à ce que le gouvernement accorde la
priorité aux enquêtes ou procédures judiciaires en instance concernant les
assassinats de Julius Broce Barellano et de Jose Jerry Catologo et veille à ce que
le lien possible avec la liberté syndicale soit dûment pris en considération. Le
comité prie instamment le gouvernement de poursuivre ses efforts pour lutter contre
la violence à l’égard des syndicalistes, notamment en concevant et en appliquant
toute mesure nécessaire à cet effet, notamment des orientations et instructions
précises à l’intention de tous les agents de l’État et une formation pour les
fonctionnaires concernés sur la gestion des situations impliquant des syndicats
ainsi qu’en donnant plein effet aux mécanismes nationaux de contrôle et d’enquête et
à toute autre mesure appropriée, y compris dans le cadre de la feuille de route de
2023.
- c) Le comité prie instamment le gouvernement de veiller à ce que toutes les
poursuites pénales en instance contre des syndicalistes soient abandonnées et que
tous les syndicalistes placés en détention soient immédiatement libérés, s’il devait
s’avérer que leur arrestation ou leur détention était liée à l’exercice légitime de
leurs droits syndicaux. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de tout
fait nouveau concernant les poursuites pénales en instance à l’égard de
syndicalistes, ainsi que les enquêtes diligentées par le RTMB et la CDH. Il prie en
outre le gouvernement de communiquer tout renseignement actualisé utile concernant
l’arrestation précédemment dénoncée d’Ireneo Atadero et d’Aiza Gamao et l’enquête
relative à la tentative de perquisition du domicile de Ricky Chavez.
- d) Le comité veut croire que le gouvernement veillera à ce que la loi antiterroriste
ne soit pas appliquée d’une façon restrictive pour les activités syndicales
légitimes et les libertés civiles connexes, et le prie de le tenir informé de tout
fait nouveau à cet égard, y compris de toute autre mesure qui serait envisagée ou
prise afin de remédier à la politique perçue de répression, de diffamation et de
dénigrement des syndicats dont font état les plaignants.
- e) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue de l’enquête en
cours sur l’affaire du Syndicat des travailleurs de Nexperia Philippines
Inc.-NAFLU-KMU et de toute mesure prise concrètement pour répondre aux
préoccupations maintes fois exprimées par les requérants en ce qui concerne
l’inscription sur liste rouge et les actes de harcèlement et d’intimidation à
l’égard de syndicalistes. Il invite également les plaignants à communiquer aux
autorités compétentes toute information pertinente en leur possession susceptible de
permettre aux autorités d’enquêter de manière approfondie sur les cas pour lesquels
le gouvernement a indiqué que le RTMB ou la CDH ne disposaient pas d’éléments
suffisants (voir précédemment pour des éléments détaillés). Enfin, le comité prie le
gouvernement de communiquer des informations actualisées sur les allégations
mentionnées précédemment d’intimidation, de harcèlement et d’inscription sur liste
rouge pour lesquelles aucune information n’a été communiquée.
- f) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures
nécessaires pour veiller à ce que les grèves menées par les travailleurs, pour
autant qu’elles restent pacifiques, ne donnent pas lieu à un usage disproportionné
de la force par la police ou l’armée, notamment grâce à une formation continue et
adaptée des agents de l’État concernés. Le comité prie également le gouvernement de
communiquer des informations actualisées concernant les allégations de dispersion
violente de grèves pour lesquelles aucune information n’a été communiquée, et le
prie instamment de garantir la libération des syndicalistes arrêtés à la suite des
incidents susmentionnés s’ils sont détenus en raison de l’exercice légitime de leurs
activités syndicale.
- g) Notant avec intérêt les nombreuses initiatives adoptées depuis son dernier examen,
le comité prie le gouvernement de le tenir informé de la mise en œuvre des
directives générales de 2024 et de leur effet sur la liberté syndicale et les
libertés civiles. Il ne doute pas que leur stricte application, conjuguée aux autres
mesures et initiatives utiles mentionnées par le gouvernement, ainsi qu’à son
engagement de mener une enquête approfondie et d’exercer un suivi rigoureux pour
toute allégation grave de violation des libertés civiles et de la liberté syndicale,
contribuera à garantir le plein respect de la liberté syndicale par tous les acteurs
étatiques et non étatiques et, partant, à améliorer les conditions d’exercice des
droits syndicaux dans le pays.
- h) Le comité attire l’attention du Conseil d’administration sur le caractère grave et
urgent du présent cas.