National Legislation on Labour and Social Rights
Global database on occupational safety and health legislation
Employment protection legislation database
Display in: English - SpanishView all
A. COMPTES RENDUS DE LA DISCUSSION DE LA COMMISSION DE L'APPLICATION DES NORMES
Un représentant gouvernemental du Myanmar a indiqué que le Myanmar traverse actuellement une phase décisive de son histoire contemporaine. Le référendum national organisé en vue de l'adoption de la nouvelle Constitution de l'Etat s'est déroulé avec succès le 10 mai 2008 dans 278 des 325 cantons que compte le pays et, le 24 mai 2008, dans les autres cantons des districts de Yangon et Irrawaddy qui ont été frappés par le cyclone Nargis. D'après les résultats, plus de 26,8 millions d'électeurs inscrits se sont prononcés en faveur de la Constitution, ce qui représente 92,48 pour cent des voix exprimées. On peut donc dire que cette nouvelle Constitution est déjà approuvée par une écrasante majorité de la population du Myanmar. Le Conseil d'Etat pour la paix et le développement a publié, le 29 mai 2008, le communiqué no 7/2008 annonçant que la Constitution de l'Etat avait été ratifiée et promulguée par le référendum national. Le Myanmar a ainsi réalisé le quatrième point de la feuille de route qui en compte sept. Les élections générales démocratiques et pluralistes, qui constituent le cinquième point, auront lieu en 2010. Il s'agit en fait d'un jalon majeur sur la voie de la transition politique du Myanmar vers une société démocratique.
La visite effectuée conjointement, à des fins de sensibilisation, par le ministère du Travail et le chargé de liaison du BIT dans le canton de Nyaung Lay Bin du district de Bago, les 20 et 21 mai 2008, a démontré que ce dernier est libre de ses mouvements pour s'acquitter de ses responsabilités. Un autre domaine dans lequel des progrès significatifs ont été réalisés est celui de la sensibilisation et de l'éducation du public. Le ministère du Travail a organisé une conférence de presse spéciale le 26 mars 2007 à Nay Pyi Taw. Le directeur général du Département du travail y a expliqué en détail la teneur du Protocole d'entente complémentaire et a répondu aux questions des rapporteurs et des journalistes. Par ailleurs, le 31 mars 2007, le ministère du Travail a également publié dans la presse locale, à savoir le New Light of Myanmar, des informations à propos de l'interdiction du travail forcé dans le pays.
De plus, il faut indiquer que, en réponse à la demande du Conseil d'administration, le texte du Protocole d'entente complémentaire a été traduit en langue nationale et est disponible sur le site Internet du ministère du Travail; il a également été communiqué au chargé de liaison du BIT.
Depuis la 301e session du Conseil d'administration, le chargé de liaison a reçu 78 plaintes dont 45 ont été transmises au groupe de travail pour suite à donner après enquête préliminaire du chargé de liaison. Sur ces 45 cas, 29 ont été classés après enquête du ministère du Travail. Les 16 cas restants sont toujours à l'examen et les enquêtes correspondantes devraient aboutir incessamment. A la fin du mois de février 2008, le chargé de liaison a transmis au président du groupe de travail, le vice-ministre du Travail, 19 plaintes visant les autorités militaires. Le ministère du Travail les a soumises aux bureaux de l'adjudant général du ministère de la Défense. Des informations détaillées à propos de ces plaintes ont déjà été communiquées à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations en date du 28 février 2008. Par la suite, le ministère du Travail a encore reçu six autres plaintes du chargé de liaison, qu'il a aussi transmises au bureau de l'adjudant général pour qu'il leur réserve la suite nécessaire. Le nombre total des plaintes visant les militaires s'élève à 25, dont 16 sont déjà classées et neuf sont toujours en instance. Sur les neuf plaintes restantes, des réponses ont déjà été fournies au chargé de liaison pour quatre d'entre elles, les cinq autres étant toujours à l'enquête.
Le Myanmar attache beaucoup d'importance à la question de la protection et de la promotion des droits de l'enfant. Le pays est l'un des Etats signataires de la Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant et a promulgué un Code de l'enfance ainsi que des lois et règlements sur le recrutement dans les forces armées qui interdisent de recruter des enfants mineurs de moins de 18 ans. De plus, l'équipe locale des Nations Unies au Myanmar a apporté sa coopération et son soutien aux efforts du gouvernement visant à empêcher le recrutement de mineurs. La coopération avec cette équipe ainsi qu'avec le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés se poursuivra.
S'agissant de Su Su Nway, il a indiqué qu'elle fait l'objet de deux chefs d'inculpation. Le premier en application des articles 124(a), 130(b) et 505(b) du Code pénal, le deuxième relève des articles 143 et 147 du Code pénal. Le procès, devant le tribunal du district de Yangon Ouest, est en cours. Dans les deux cas, les articles du Code pénal en vertu desquels elle a été inculpée sont sans rapport avec le Protocole d'entente complémentaire ou les droits des travailleurs.
Pour ce qui est du cas de Min Aung, il a été inculpé, en vertu de l'article 143 du Code pénal, du chef d'appartenance à une association illicite, en application de l'article 295 du même code pour outrage à l'encontre d'un groupe destiné à heurter ses sentiments religieux, sa religion ou ses convictions religieuses, ainsi qu'en application de l'article 505(b) pour des déclarations constitutives de délit contre l'ordre public. Il a été reconnu coupable des chefs d'inculpation précités et condamné en conséquence par le tribunal pénal du district de Thandwe. Sa peine a été réduite en appel par la Cour pénale de l'Etat de Rakhine. Les matières faisant l'objet de ces sections du Code pénal sont étrangères aux questions des travailleurs et ne relèvent pas du Protocole d'entente complémentaire. La Cour suprême a confirmé les arrêts de la Cour pénale de l'Etat de Rakhine. Dans une autre affaire, Min Aung a été inculpé par le tribunal pénal du district de Thandwe en application de l'article 6 de la loi sur la constitution d'associations et a été reconnu coupable et condamné. Sa peine a été réduite en appel par la Cour de l'Etat de Rakhine.
Il faut rappeler que le cas de Thet Wai n'est en aucune manière associé à des activités s'opposant au travail forcé. Il a été inculpé en application de l'article 353 du Code pénal, pour agression ou violence en vue d'empêcher un fonctionnaire public d'accomplir ses fonctions, et de l'article 189 du même code pour menaces ou insultes à l'adresse d'un fonctionnaire public. Son procès est toujours en cours.
Parmi les principes fondamentaux inscrits dans la nouvelle Constitution du Myanmar figure explicitement, au chapitre VIII, paragraphe 359, une disposition relative au travail forcé qui montre clairement que le gouvernement a mis en place un cadre d'ensemble de mesures législatives afin d'éliminer cette pratique dans le pays. S'agissant du violent cyclone tropical qui a durement frappé le pays, quelques informations sur la situation au Myanmar doivent être fournies. Au début du mois, le Myanmar a subi la catastrophe naturelle la plus grave de son histoire. Le cyclone Nargis a frappé les districts de Ayeyawady et Yangon les 2 et 3 mai avec des effets dévastateurs. Dans les deux jours précédents, la radio et la télévision nationales n'avaient cessé de mettre en garde les populations de la région. Cependant, le cyclone a été d'une extrême violence, avec une marée et des vents très forts qui ont empêché les habitants de fuir la région. C'est ainsi que la mort de 77 738 personnes a été confirmée, 55 917 personnes sont toujours portées disparues et 19 359 ont été blessées.
Le gouvernement, en collaboration avec la communauté internationale, a organisé l'aide et les secours d'urgence, notamment par l'établissement de camps de réfugiés et la distribution de nourriture aux victimes du cyclone. Par ailleurs, il collabore étroitement avec les pays voisins de l'Association des Nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE) et avec la communauté internationale. Le 19 mai, l'ANASE a institué un mécanisme de coordination placé sous sa direction et destiné à faciliter la distribution et l'utilisation efficaces de l'aide envoyée par la communauté internationale. Une équipe spéciale dirigée par le Secrétaire général de l'ANASE a été constituée pour assurer le fonctionnement du mécanisme de coordination. A la date du 25 mai 2008, le Myanmar avait reçu 3 273,20 tonnes de fournitures humanitaires acheminées par 221 vols cargos en provenance de divers pays et organisations. En outre, des secours alimentaires d'urgence arrivent chaque jour par mer et par terre. Ces provisions sont immédiatement distribuées aux victimes.
Le gouvernement a annoncé un deuil national de trois jours pour les victimes du cyclone, les 20, 21 et 22 mai 2008. Le président du Conseil d'Etat pour la paix et le développement s'est rendu en visite dans les régions sinistrées du 19 au 21 mai 2008 afin de réconforter les victimes du cyclone. Les 17, 21 et 22 mai 2008, le gouvernement a organisé une visite des camps de secours des districts de Yangon et de Ayeyawady pour les diplomates et les agences des Nations Unies ainsi que les représentants des pays donateurs et des organisations internationales. Le 22 mai, le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Kimoon, a visité des camps de réfugiés dans la zone la plus touchée, celle du delta, et les autorités locales lui ont expliqué les mesures prises en matière de remise en état, de services sanitaires et de réponse aux besoins des victimes. Il a été reçu par le Chef de l'Etat et le Premier ministre.
Le 25 mai 2008, s'est tenue à Yangon une Conférence internationale d'appel de fonds sous l'égide de l'ANASE et des Nations Unies. Cinquante et un pays et 24 organisations internationales ont participé, en présence de M. Ban Ki-moon, à cette conférence qui a surtout traité de la coopération pour l'apport d'aide aux victimes du cyclone.
En conclusion, le représentant gouvernemental a exprimé ses vifs remerciements aux gouvernements, aux Nations Unies, y compris l'Organisation internationale du Travail, aux organisations internationales, aux ONG, aux particuliers et aux sympathisants, ici et ailleurs, pour la sympathie et les condoléances qu'ils ont exprimées et pour la générosité des secours d'urgence et de l'aide financière et pour l'aide apportée à la réinstallation de victimes des régions frappées par le cyclone. Il a également exprimé sa gratitude à M. Marshall et au personnel du bureau de liaison de l'OIT qui, dans le cadre de l'équipe locale des Nations Unies, ont coopéré activement aux efforts du gouvernement. Les membres travailleurs ont souligné que, depuis de nombreuses années, la Commission de l'application des normes de la Conférence doit tenir une séance spéciale concernant ce cas grave et persistant qu'est celui du travail forcé ou obligatoire au Myanmar. Cette année toutefois, et contrairement aux années passées où la commission a dû se contenter de petits pas en avant ou en arrière, l'état des choses se trouve bouleversé par des événements aussi bien dramatiques, politiques qu'humanitaires.
Il convient de rappeler que la commission d'enquête, nommée en 1997, a conclu que la convention no 29 était violée dans le droit national et dans la pratique, et ce d'une manière généralisée et systématique. En juillet de cette année, cela fera dix ans que la commission d'enquête a formulé les trois recommandations suivantes:
1) que les textes législatifs pertinents soient mis en conformité avec la convention no 29;
2) que, dans la pratique, aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et, en particulier, par les militaires; et
3) que les sanctions prévues pour le fait d'exiger du travail forcé ou obligatoire soient strictement appliquées.
De plus, pour assurer la mise en œuvre de ces trois recommandations, la commission d'experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures concrètes doivent être prises. En outre, le manquement continu du gouvernement à mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête a mené le Conseil d'administration à utiliser l'article 33 de la Constitution de l'OIT en mars 2000, une décision sans précédent. Toutefois, malgré cette décision et année après année, la commission d'experts ainsi que cette commission n'ont pu que constater la persistance flagrante des violations de la convention no 29 et la négation systématique des recommandations de la commission d'enquête. En effet, après dix ans aucune de ces recommandations n'a été mise en œuvre. Et pendant tout ce temps, un grand nombre de sociétés multinationales n'ont toutefois pas hésité à rester dans le pays.
Quelle est la situation aujourd'hui? Selon la dernière observation formulée par la commission d'experts ainsi que par le rapport du chargé de liaison et les faits nouveaux rapportés dans les documents D.5 et D.6 de cette commission, le gouvernement, bien qu'ayant élaboré un projet de nouvelle Constitution, n'y a pas inclus le principe de la liberté syndicale et l'interdiction claire de tout travail forcé. Ainsi, la liberté syndicale est toujours entièrement soumise aux lois sur la sécurité de l'Etat. La convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ne sera pas plus respectée à l'avenir que par le passé. De plus, la disposition incluse dans le projet de la nouvelle Constitution interdisant le recours au travail forcé contient de telles restrictions qu'elle est contraire à la convention no 29.
En outre, aucune déclaration de haut niveau sur le travail forcé n'a été faite de la part des autorités birmanes, et ce malgré le fait que le Conseil d'administration l'ait demandé à plusieurs reprises. S'agissant des moyens budgétaires adéquats pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée, le gouvernement a indiqué qu'une allocation budgétaire est prévue pour tous les ministères afin de couvrir les coûts de la main-d'œuvre. Cependant, tout comme la commission d'experts l'a mentionné dans son observation, il est difficile de comprendre pourquoi le recours à une main-d'œuvre forcée ou non rémunérée reste généralisé, en particulier de la part de militaires et des administrations civiles locaux.
Quant à la diffusion et au contrôle de l'interdiction du travail forcé, le Protocole d'entente complémentaire de février 2007 constitue un développement intéressant en ce qu'il contient une nouvelle procédure de plaintes par l'intermédiaire du chargé de liaison. Cette procédure est une avancée. Néanmoins, il s'agit d'une avancée très limitée en ce que le chargé de liaison ne peut que recevoir des plaintes et assister les plaignants, et non présenter luimême des cas d'infractions. De plus, cette procédure reste peu connue, pour au moins deux raisons. En premier lieu, même après quinze mois, il n'y a toujours pas de version compréhensible du protocole, à défaut d'une traduction approuvée par la Junte. En second lieu, les personnes ne vivant pas près de Rangoon ont des difficultés très pratiques à présenter des plaintes, à défaut d'un réseau de transmission couvrant tout le pays. Enfin, nombre de personnes relatant des plaintes et travaillant à l'application du protocole sont harcelées ou mises en détention.
Dans ce contexte, le nombre de plaintes reçues ne peut être considéré comme reflétant l'ampleur du travail forcé dans le pays. En outre, il ne faut pas confondre le moyen - c'est-à-dire la procédure de plaintes - avec l'objectif - à savoir l'abolition du travail forcé. Il ne faut également pas restreindre la mission du chargé de liaison à l'application du protocole. En effet, cette mission est d'œuvrer toujours et en priorité pour la mise en œuvre des trois recomman- dations formulées par la commission d'enquête.
La nouvelle procédure est néanmoins révélatrice de deux choses, à savoir la persistance du travail forcé et le déficit criant de démocratie et de liberté d'expression. En ce qui concerne la persistance du travail forcé, la Confédération syndicale internationale (CSI) a transmis une documentation abondante à la commission d'experts. S'agissant du degré de démocratie, certains faits et événements doivent être rappelés, tels:
- la dure répression par le gouvernement des manifestations pacifiques de septembre 2007, et un nombre de morts plus élevé qu'initialement rapporté;
- la détention et l'emprisonnement de personnes ayant exercé leurs droits fondamentaux d'expression, notamment Min Aung, Su Su Nway et les six militants syndicaux condamnés en septembre 2007, ainsi que l'inculpation de l'un des facilitateurs de la nouvelle procédure de plaintes, U Thet Wai, pour de simples contacts avec le BIT;
- l'arrestation cette semaine de 18 personnes manifestant pacifiquement contre la prolongation de l'assignation à résidence de Mme Aung San Suu Kyi, et ceci malgré le projet de la nouvelle Constitution garantissant la liberté d'expression;
- le référendum sur le projet de la nouvelle Constitution qui a été préparé et élaboré de manière autoritaire, sans aucun dialogue avec l'opposition, en excluant de toute participation les moines, nonnes, dirigeants hindous et chrétiens, ainsi que Aung San Suu Kyi et d'autres;
- l'imposition de trois ans d'emprisonnement pour diffusion de tracts, panneaux, discours et autres critiques contre le référendum; et finalement
- la réservation aux militaires de 25 pour cent des sièges au parlement et d'un droit de veto.
Cette restriction de la démocratie s'est manifestée de manière dramatique après le passage du cyclone Nargis. Les zones sinistrées ont été fermées à toute aide humanitaire extérieure. La population n'a pu faire état ni de ses souffrances ni de ses besoins urgents, de sorte que, d'après des estimations, au moins un tiers de la population sinistrée attend toujours une aide indispensable. Les membres travailleurs ont exprimé toute leur sympathie et leur solidarité au peuple birman.
Cette catastrophe humanitaire ne doit pas détourner l'attention de la question du travail forcé en Birmanie. En effet, la Junte pourrait très bien profiter de cette catastrophe pour recourir davantage au travail forcé et au travail des enfants dans la longue phase de reconstruction du pays. C'est pourquoi il incombe à toutes les organisations internationales et à tous les gouvernements de veiller à ce que leur aide respecte les droits fondamentaux des travailleurs en Birmanie. Dans un même temps, l'OIT doit faire en sorte que la reconstruction du pays puisse se faire dans le respect des droits des travailleurs et en prévoyant le travail décent.
Depuis bientôt dix ans, la commission organise des séances spéciales sur le Myanmar et le cas de ce pays y est examiné depuis plus de vingt-six ans. La cause des travailleurs birmans et leur combat contre le régime d'esclavage imposé dans leur pays sont aussi la cause et le combat du mouvement syndical international, en dépit des propos diffamatoires et inacceptables proférés par le régime, accusant la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB) d'être une organisation terroriste. Il n'est pas possible d'examiner ce cas hors de tout contexte. Il faut donc rappeler la répression brutale de septembre 2007 contre le plus grand mouvement démocratique connu depuis 1988, pendant laquelle 110 personnes au moins ont été tuées et des milliers d'autres blessées, des peines de vingt à vingt-huit ans de prison prononcées l'an dernier contre six militants syndicaux - Thurein Aung, Kyaw Kyaw, Shwe Joe, Wai Lin, Aung Naing Tun et Nyi Nyi Zaw - pour s'être simplement réunis pour discuter des droits du travail, et l'écœurante opposition du régime à l'arrivée du personnel humanitaire international dans le pays et la confiscation de produits alimentaires et de médicaments vitaux en pleine tragédie nationale du cyclone Nargis. De plus, pas plus tard que la semaine précédente, le régime a été jusqu'à violer sa propre loi et sa Constitution en allongeant la peine de détention de Aung San Suu Kyi de cinq années supplémentaires et en arrêtant par la même occasion les manifestants pacifiques qui protestaient contre cette mesure. Ces événements ne font que s'ajouter aux preuves irréfutables de la mauvaise foi chronique du régime lorsqu'il s'agit des droits de l'homme internationalement reconnus et des conventions fondamentales de l'OIT, ainsi que de son mépris absolu pour la quasi-totalité de sa population.
Les membres travailleurs ont également rappelé leurs remarques de l'année précédente sur les mérites relatifs, mais aussi les limites du Protocole d'entente complémentaire, notamment la crainte de réelles représailles du Conseil d'Etat pour la paix et le développement; les entraves à la libre circulation des plaignants des régions reculées et des milliers de victimes birmanes vivant au Bangladesh, en Malaisie, en Thaïlande et dans d'autres pays et qui ne peuvent avoir accès au système. Le fondement même du Protocole d'entente complémentaire est qu'il ne doit plus y avoir de représailles contre les plaignants ou les plaignants potentiels. Or, malgré les protestations du représentant gouvernemental, il y a quelques mois à peine, U Thet Wei, de la Ligue nationale pour la démocratie, a été arrêté pour avoir été en possession de rapports sur le travail forcé qu'il devait remettre au chargé de liaison du BIT. Les médias ont également signalé que plus d'une trentaine d'activistes qui enquêtaient sur des questions liées au travail ont été arrêtés et sont toujours détenus.
Le mépris et l'impunité, en droit et en pratique, ont été la principale réponse du régime militaire aux recommandations de la commission d'enquête approuvées par le Conseil d'administration il y a plus de dix ans. Premièrement, s'agissant de la recommandation d'émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires, comme le note la commission d'experts, le gouvernement n'a toujours pas fourni ne fûtce que des détails minimes sur la teneur de ces instructions. En fait, au vu de la volumineuse documentation rassemblée par la CSI à propos de la persistance du travail forcé dans pratiquement chaque région, il est clair que de telles instructions n'ont pas été données. Deuxièmement, pour ce qui est de s'assurer que l'interdiction du travail forcé est largement rendue publique, et bien qu'il soit affirmé que de la publicité a été donnée au Protocole d'entente complémentaire, il n'y a toujours pas eu de déclaration publique univoque selon laquelle toutes les formes de travail forcé étaient interdites sur l'ensemble du territoire et seraient réprimées au plus haut niveau. Troisièmement, la recommandation demandant au gouvernement de prévoir les budgets adéquats pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée et non rémunérée reste sans suites. Quatrièmement, pour ce qui est d'assurer le respect de l'interdiction du travail forcé, la commission d'experts a conclu que le régime n'a toujours pas abrogé les clauses de la loi autorisant le travail forcé, alors qu'il promet de le faire depuis plus de quarante ans. Le régime n'a pas non plus adopté une législation positive interdisant le travail forcé et la servitude pour dettes des enfants, y compris dans les forces armées. La commission d'experts a en outre noté que les autorités n'ont intenté aucune action administrative ou pénale contre des militaires pour avoir imposé des conditions de travail forcé à la population. Suite aux 24 plaintes transmises par le chargé de liaison au gouvernement, seuls deux fonctionnaires civils ont fait l'objet de poursuites sérieuses et efficaces. C'est pourquoi les membres travailleurs réitèrent leurs vives préoccupations devant l'absence de responsabilité pénale.
Enfin, les membres travailleurs ont rappelé que le Conseil d'administration a décidé, en mars 2007, de différer au moment opportun la question d'un avis consultatif de la Cour internationale de Justice. Le dernier rapport de la commission d'experts montre à l'évidence que la coopération et les progrès effectivement réalisés pour satisfaire aux recommandations de la commission d'enquête ne répondent pas, même de loin, aux critères qui avaient été retenus comme une des conditions de base d'un examen par la Cour internationale de Justice.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental de s'être présenté une nouvelle fois devant la Commission de la Conférence à l'occasion de l'examen du manquement persistant de son pays à appliquer la convention no 29. Après les dévastations causées par le cyclone Nargis, la communauté internationale est de tout cœur avec la population du Myanmar. Toutefois, la réaction du pays devant cette tragédie, en particulier la lenteur à accepter l'aide de la communauté internationale et le manque de transparence, illustre certaines causes fondamentales du travail forcé, qui demeure une pratique courante. Parmi les causes du travail forcé figure l'absence de libertés civiles fondamentales, et en particulier le droit des personnes à la liberté et la sécurité, la liberté de pensée et d'expression, la liberté de réunion et d'association, le droit à un procès équitable devant une juridiction indépendante et impartiale et la protection de la propriété privée.
Deux événements ont eu un impact significatif sur le contexte dans lequel l'OIT travaille dans ce pays, à savoir l'agitation sociale et sa répression à l'automne 2007 et les dévastations causées par le cyclone Nargis. Lors de la discussion de son cas, les organes de contrôle de l'OIT se sont concentrés sur les recommandations de la commission d'enquête, au regard desquelles la commission d'experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé est largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé.
Les membres employeurs se sont félicités de la proro- gation de la période d'essai du Protocole d'entente complémentaire et reconnaissent que le nombre des plaintes a augmenté. En revanche, des problèmes pratiques fondamentaux semblent persister s'agissant des possibilités matérielles données aux victimes et à leur famille de déposer plainte et au chargé de liaison et à son équipe de s'acquitter de leurs tâches. Il est vivement préoccupant que certaines personnes associées au fonctionnement du mécanisme de présentation des plaintes soient toujours en détention et les membres employeurs sont d'avis que le nombre peu élevé de plaintes indique que la population pourrait ne pas avoir suffisamment accès à ce mécanisme ou ne pas avoir le sentiment d'être autorisée à déposer plainte. De plus, évoquant les propos du représentant gouvernemental selon lesquels le droit pénal n'est pas du ressort du Protocole d'entente complémentaire, les membres employeurs ont insisté sur le fait que l'important est de garantir que le droit pénal n'outrepasse pas les droits de l'homme, viole la liberté d'association et facilite ou justifie le travail forcé.
Les membres employeurs se sont félicités de l'approbation par le gouvernement d'une traduction du Protocole d'entente complémentaire. Il semble que le texte proposé pour un projet de brochure est actuellement examiné par le gouvernement. Une publicité ininterrompue pour le mécanisme est vitale pour que l'interdiction du travail forcé et de sa pratique soit connue de tous, de façon à envoyer à ceux qui seraient tentés d'y recourir un message leur signifiant qu'ils ne peuvent agir impunément. Il est à espérer que le texte de l'OIT destiné à la brochure sera approuvé et diffusé dans tout le pays sans retard. Une formation ciblée et des missions conjointes en vue d'assurer le suivi de certaines plaintes en particulier auraient aussi leur utilité. Il faut toutefois souligner qu'une déclaration publique de haut niveau sur la politique du gouvernement quant à l'interdiction du travail forcé reste vitale si l'on veut témoigner d'une réelle volonté d'éradiquer le travail forcé.
Bien qu'il soit trop tôt pour évaluer les conséquences du cyclone Nargis, le travail forcé ne doit pas être utilisé et d'autres violations des droits de l'homme ne doivent pas être commises pendant la phase de reconstruction. A ce propos, le travail effectué par le chargé de liaison et d'autres institutions des Nations Unies dans des situations difficiles doit être souligné et le gouvernement doit être exhorté à leur faciliter la tâche.
La Constitution qui a été récemment adoptée contient des articles se rapportant à la liberté syndicale, à la liberté d'expression et au droit d'organisation. Toutefois, l'article interdisant le recours au travail forcé contient des dispositions qui amènent à s'interroger sur sa conformité avec la convention. L'avenir dira si et comment les droits inscrits dans les deux conventions fondamentales ratifiées par le Myanmar seront appliqués dans la pratique après l'adoption de la Constitution. Les mots ne suffisent pas. Une mise en pratique entière et totale s'impose conformément aux obligations contractées en vertu de la convention no 29.
L'OIT n'a cessé d'exhorter le gouvernement à appliquer la convention tant en droit que dans la pratique et à mettre un terme à un climat d'impunité intolérable. Le gouvernement est loin d'appliquer les mesures recom- mandées par la commission d'enquête ou de donner effet aux quatre mesures d'action définis par la commission d'experts. Il est préoccupant que le gouvernement n'ait pas répondu de manière détaillée à la demande d'information contenue dans la précédente observation de la commission d'experts ni à la dernière communication en date de la CSI. Les membres employeurs ont invité une fois pour toutes le gouvernement à fournir des informations complètes et détaillées à la commission d'experts en tant que preuve sans équivoque de sa volonté d'entamer une véritable coopération avec les organes de contrôle de l'OIT. Il faut rappeler au gouvernement que le Protocole d'entente complémentaire et la mise en place d'une procédure de plaintes ne le dispensent en rien de son obliga- tion d'éliminer le travail forcé aux termes de la convention.
En conclusion, les membres employeurs ont invité le gouvernement à apporter des améliorations tangibles à sa législation nationale et à prévoir des budgets suffisants pour faire en sorte qu'une main-d'œuvre rémunérée remplace le travail forcé dans les activités sous administration civile comme militaire en tant que preuve de sa volonté sans équivoque de lutter contre le travail forcé et contre le climat d'impunité inacceptable qui règne de longue date. Cette situation dure depuis trop longtemps. Il est temps que le gouvernement adopte un sens de l'humanité, mette un terme au travail forcé et reconstruise le pays sans recourir au travail forcé, comme le réclament ses ressortissants et le reste du monde.
Le membre gouvernemental de la Slovénie, s'exprimant au nom des membres gouvernementaux des Etats membres de l'Union européenne (UE), de pays candidats, à savoir la Croatie, l'ex-République yougoslave de Macédoine et la Turquie, ainsi qu'au nom de l'Arménie, de la Géorgie, de l'Islande, de la République de Moldova, du Monténégro, de la Norvège, de la Suisse et de l'Ukraine, a réaffirmé leur solidarité avec le peuple de la Birmanie/Myanmar, qui a été affecté par le cyclone Nargis, et a salué la Conférence internationale qui s'est tenue à Yangon le 25 mai 2008, organisée par les Nations Unies et l'ANASE, afin de répondre aux besoins urgents de ceux ayant été affectés par ce terrible désastre naturel. Les efforts déployés par les Nations Unies, les agences internationales et locales, les organisations non gouvernementales, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les donateurs et tous les autres dans le but d'apporter l'aide essentielle au peuple de ce pays doivent être appuyés fermement. Il est urgent de permettre un accès libre et sans entrave aux bénévoles afin de prévenir une tragédie encore plus grande. Il faut rappeler aux autorités que les visas et permis de travail doivent être rapidement octroyés à tous les bénévoles travailleurs humanitaires internationaux et prendre note des avancées qui ont été faites jusqu'à maintenant. L'UE exprime le ferme espoir que les autorités n'auront pas recours au travail forcé ou au travail des enfants dans la phase de reconstruction du pays, comme cela a été le cas après le tsunami de décembre 2004.
Le présent cas est l'un des plus sérieux et des plus anciens que l'OIT a eu à traiter jusqu'à maintenant. Par conséquent, le travail accompli par le l'OIT et par le chargé de liaison dans le but d'aider le gouvernement à abolir la pratique du travail forcé doivent être appuyés fermement. A cet égard, il faut rappelé les conclusions de la commission d'enquête, la résolution adoptée lors de la 89e session de la Conférence internationale du Travail, les conclusions des sessions antérieures du Conseil d'administration et les quatre mesures identifiées par la commission d'experts et devant être prises par le gouvernement pour répondre aux recommandations de la commission d'enquête, à savoir: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé est largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé. Les autorités doivent s'assurer que les enfants ne sont pas recrutés pour le service militaire, que tous ceux qui ont recours au travail forcé soient punis adéquatement et que les sanctions soient strictement appliquées.
Tout en saluant la conclusion entre l'OIT et les autorités nationales du Protocole d'entente complémentaire du 26 février 2007, dont le but est d'éliminer le travail forcé et de mettre en place une procédure efficace de plaintes pour les victimes du travail forcé afin d'obtenir réparation, sans crainte de harcèlement ou de représailles, il faut également noter avec intérêt que la période d'essai du Protocole d'entente complémentaire a été prolongée pour une autre année. Néanmoins, il faut indiquer qu'il est profondément préoccupant que la population vivant à l'extérieur de Yangon ne connaisse pas la procédure de plaintes mise en place par le Protocole d'entente complémentaire, en raison de l'absence de traduction, de diffusion et d'activités de sensibilisation. Les autorités doivent donc être à nouveau priées de faire en sorte que le Protocole d'entente complémentaire et les autres outils de sensibilisation soient pleinement mis en œuvre, qu'ils soient traduits dans d'autres langues locales et qu'ils soient compréhensibles et largement diffusés.
Le rapport de la commission d'experts conclut que la procédure de plaintes, bien qu'elle soit valable, ne traite pas des causes profondes du problème du travail forcé qui ont été identifiées par la commission d'enquête et l'équipe de haut niveau. En particulier, elle ne traite pas des relations gouvernementales de base qui prévalent dans le pays, du rôle de l'armée et de ses politiques d'autosuffisance, ainsi que de l'absence de liberté syndicale, et, de façon plus générale, de liberté de réunion.
Manifestement, la mise en œuvre du Protocole d'entente complémentaire n'est ni et ne peut être suffisante. Afin d'accomplir des progrès substantiels et durables en matière d'élimination du travail forcé, les autorités nationales doivent prendre de nombreuses mesures allant au-delà de la mise en œuvre du protocole, lequel ne constitue qu'une étape vers l'accomplissement de la conformité avec la convention no 29. Il est primordial que les autorités réaffirment, dans une déclaration publique et sans ambiguïté, l'interdiction et l'illégalité de toute forme de travail forcé, y inclus le recrutement des enfants soldats, et qu'elles remplacent les dispositions légales contradictoires par une structure législative et réglementaire appropriée afin de donner effet aux recommandations de la commission d'enquête. L'orateur a déclaré partager la préoccupation du chargé de liaison quant à l'article de la nouvelle Constitution portant interdiction du recours au travail forcé et contenant des restrictions qui pourraient soulever la question de sa conformité avec la convention no 29. Enfin, les pays voisins doivent être encouragés à poursuivre leurs efforts pour guider le pays vers la cessation de la pratique du travail forcé et encourager la réconciliation nationale.
La représentante gouvernementale de la Nouvelle-Zélande a exprimé l'appréciation sincère de son gouvernement du dévouement continu du bureau de liaison de Yangon pour la promotion du respect par le gouvernement de la convention no 29, particulièrement en dépit des défis additionnels suscités par les manifestations de septembre 2007 au Myanmar, le référendum sur l'adoption d'une nouvelle Constitution tenu en mai 2008, ainsi que le passage du cyclone Nargis, désastre naturel majeur. Le bureau de liaison a accompli un travail considérable et est même parvenu à élargir son champ d'activités, incluant une formation de formateurs portant sur le recrutement militaire.
Il faut accueillir favorablement la prolongation du Protocole d'entente complémentaire pour douze autres mois, en espérant que cela ait pour effet de continuer à produire des résultats et contribue à une meilleure compréhension du problème. Néanmoins, les besoins sont plus vastes. Dans cet objectif, le gouvernement doit mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête et s'engager de manière ferme à mettre fin à la pratique du travail forcé. L'approbation récente d'une traduction du Protocole d'entente complémentaire constitue une étape dans la bonne direction. Il est à souhaiter que le document en question ainsi que d'autres documents informatifs sous étude soient utilisés de manière efficace, incluant une brochure explicative, dans le cadre d'une campagne de sensibilisation portant sur ce qui constitue du travail forcé, expliquant quels sont les droits des citoyens en vertu de la loi et décrivant la manière dont sont faites les plaintes dans le cadre de la procédure de l'OIT.
L'oratrice a exprimé, au nom de son pays, ses sympathies au peuple du Myanmar à la suite des dévastations causées par le cyclone Nargis. Le risque de voir augmenter la traite des personnes et le recours au travail forcé à la suite du cyclone, est préoccupant. Le gouvernement doit donc être prié de travailler avec l'OIT et les autres intervenants qui participent dans les efforts de secours afin de s'assurer que la reconstruction du pays n'implique pas l'usage du travail forcé. L'engagement absolu du gouvernement dans ce processus est primordial. Une coopération plus profonde entre les autorités et l'OIT doit se développer dans les mois et les années à venir, dans le but d'éradiquer le travail forcé, et ce sous toutes ses formes.
La membre travailleuse du Japon s'est référée aux statistiques de diverses organisations s'agissant des conditions de vie en Birmanie. Selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le taux de mortalité infantile demeure élevé, avec 1 décès pour 10 naissances. La malnutrition est très répandue chez les enfants, dont près d'un tiers accusent des retards de croissance ou des insuffisances pondérales modérées ou graves. Plus de 25 pour cent de la population n'ont pas accès à un approvisionnement en eau potable saine et la contamination par l'arsenic est une préoccupation majeure.
De plus, la mise en garde lancée par le directeur du Programme alimentaire mondial (PAM), en octobre 2007, selon laquelle 5 millions de personnes au moins étaient en situation de pénurie alimentaire et l'aide humanitaire ne suffisait pas à satisfaire leurs besoins. Le PAM a aussi indiqué dans une proposition de projet soumise à son conseil d'administration qu'un tiers des enfants souffrent de malnutrition et qu'un sur cinq accuse un poids insuffisant à la naissance. Le taux de mortalité maternelle est de 230 pour 10 000 naissances en vie.
Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a récemment effectué une enquête sur les ménages avec l'accord du gouvernement. Elle a montré que 95 pour cent de la population vivent avec moins de 1 dollar E.-U. par jour et 90 pour cent avec moins de 65 cents. Le ménage moyen consacre près de 75 pour cent de son revenu à l'alimentation.
Tout le monde doit s'inquiéter d'une situation dans laquelle, alors que le gouvernement n'alloue que 0,5 pour cent de son budget à la santé, 40 pour cent de celui-ci vont aux forces armées. De plus, le gouvernement aurait dépensé plus de 300 millions de dollars E.-U. pour la construction de sa nouvelle capitale, Naypyidaw.
La population du pays a besoin de l'aide internationale. Or, dans les faits, en raison du bilan déplorable du gouvernement dans le domaine des droits de l'homme, et en matière de droits des travailleurs et de travail forcé notamment, l'aide publique au développement en provenance de l'étranger stagnait à 147 millions en 2006, soit un léger recul de 2 millions de dollars E.-U. par rapport à l'année précédente. Le Japon était le premier donateur, avec une contribution de 25,49 millions de dollars E.-U., c'est-à-dire 33 pour cent de l'aide totale reçue par le pays. Pourtant, ces chiffres ne disent pas tout. D'après les statistiques de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les contributions des puissances économiques émergentes limitrophes restent incertaines.
Il ne faut pas négliger le rôle de la Banque asiatique de développement (BAsD). Dans son rapport annuel de 2007, on pouvait lire que la banque continuait à surveiller l'évolution économique et qu'elle énoncerait une stratégie opérationnelle le moment venu, et qu'aucun prêt ou projet d'assistance technique n'avait été approuvé depuis 1987. Ceci est en contradiction avec le fait que, dans l'élaboration de la Stratégie de l'énergie pour la sous- région du Grand Mékong - un programme de coopération régionale associant six pays, dont la Birmanie - la BAsD est l'élément moteur du programme depuis son lancement, en 1992. Dans bon nombre de projets de développement s'inscrivant dans son cadre, de nombreux problèmes ont été signalés s'agissant des études d'impact sur l'environnement, des moyens d'existence des populations affectées et des dégâts à la diversité biologique et culturelle. L'oratrice fait part des préoccupations de son pays quant aux déplacements forcés et au recours au travail forcé en Birmanie.
S'agissant des secours d'urgence qui ont suivi le cyclone Nargis, il n'est aucunement question de s'opposer à l'aide humanitaire fournie ou promise par de nombreux gouvernements étrangers pour répondre aux premiers besoins des victimes. Elle invite le gouvernement et les bailleurs de fonds à veiller à ce que l'aide arrive aux populations qui en ont cruellement besoin ainsi qu'aux organisations démocratiques du pays, et à ce que, lorsque l'aide d'urgence cèdera progressivement la place à la reconstruction dans les préoccupations, il ne soit pas fait recours au travail forcé.
Le gouvernement doit être instamment invité à revoir la répartition de son budget pour allouer plus à la santé, à l'alimentation, à l'eau et à l'éducation. L'oratrice a demandé aussi à d'autres gouvernements de respecter et d'appliquer la résolution adoptée par la 88e session de la CIT en 2000, de revoir leurs relations avec ce pays et de faire rapport au Conseil d'administration.
Le membre gouvernemental du Canada a exprimé la sympathie de son gouvernement à l'égard des milliers de Birmans qui ont perdu des êtres chers et dont la vie a été gravement affectée par le cyclone Nargis. La qualité des Nations Unies, y compris celle du Secrétaire général de mener, en matière de coordination des efforts de l'aide avec l'ANASE et les autorités nationales doit être recon- nue. De plus, le chargé de liaison de l'OIT et son équipe doivent être remerciés pour leur travail effectué dans des conditions difficiles. Bien que modeste, un nombre croissant de travailleurs d'aide internationale a pu avoir accès à des zones ravagées. Les défis rapportés par le personnel humanitaire sont préoccupants.
Le mois de mai 2008 n'a pas été un mois encourageant pour le peuple birman. Le régime réticent demeure lent pour offrir au personnel humanitaire un accès libre et total à la population touchée. Le régime doit offrir un tel accès sans délai. Une nouvelle constitution a été adoptée sans consultation crédible des citoyens et l'assignation à domicile d'Aung San Suu Kyi, qui a été détenue plus de douze ans ces derniers dix-huit ans, a été prolongée une fois de plus. Le Canada condamne cette décision. Cette situation est tellement décevante, entièrement prévisible. Elle offre néanmoins un contexte crucial et édifiant pour ce que le BIT doit faire dans le pays concernant le travail forcé.
Lors de sa 301e session, en mars 2008, le Conseil d'administration a formulé des conclusions appelant, entre autres, à ce que des mesures soient prises par les autorités pour communiquer à son peuple l'action convenue avec la communauté internationale, représentée par l'OIT. La mesure la plus simple est la reproduction et la diffusion du Protocole d'entente complémentaire dans les langues locales. Que le gouvernement fasse une déclaration sans ambiguïté, au plus haut niveau, en réaffirmant l'interdiction de toute forme de travail forcé et son actuel engagement de mettre en œuvre cette politique est autrement plus difficile. Le Protocole d'entente complémentaire est à présent traduit en langue birmane et des discussions sont en cours concernant sa promulgation effective. Bien que ce développement soit modeste, il doit être favorablement accueilli et il est à espérer que le Protocole d'entente complémentaire sera très bientôt diffusé dans tout le pays. Pour ce qui de la déclaration de haut niveau dépourvue de toute ambiguïté, elle n'a toujours pas été faite. Le gouvernement doit être prié de faire de cette déclaration la prochaine étape, et de mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête pour éradiquer le travail forcé.
La référence au travail forcé dans la nouvelle Constitution n'est pas seulement insuffisante, mais il semble qu'elle soit problématique et qu'elle soulève des questions sur sa conformité aux dispositions de la convention no 29. Il faut saluer le travail accompli par la commission d'experts et attirer particulièrement l'attention sur le dernier paragraphe de son rapport qui se lit comme suit: "la commission conserve l'espoir que, ayant souscrit au Protocole d'entente complémentaire, le gouvernement prenne enfin les mesures requises pour assurer l'application de la convention en droit et dans la pratique et permettre ainsi de résoudre l'un des cas les plus graves et les plus anciens que cette commission ait jamais eu à connaître".
La membre gouvernementale de la Chine a pris note de la déclaration faite par le membre gouvernemental et s'est dite enchantée que le gouvernement du Myanmar travaille étroitement avec l'OIT depuis la conclusion du Protocole d'entente complémentaire. Depuis l'examen de la situation par le Conseil d'administration en mars de cette année, le gouvernement a pris des mesures concrètes.
Un référendum a été organisé en mai concernant la nouvelle Constitution qui interdit clairement toute forme de travail forcé, résolvant ainsi le problème juridique. Le bureau de liaison de l'OIT travaille étroitement avec les points focaux qui sont sur place pour prévenir le recours au travail forcé. La procédure de présentation de plaintes fonctionne bien. Le Protocole d'entente complémentaire est traduit et diffusé par le ministère du Travail. De plus, des instructeurs sont formés, en collaboration avec l'UNICEF et avec d'autres agences. Tous ces efforts témoignent de la bonne volonté politique du gouvernement pour éradiquer le travail forcé.
La coopération entre le gouvernement et l'OIT montre une collaboration effective basée sur la confiance mutuelle pour le bien-être durable du peuple. Il faut espérer que l'OIT et la communauté internationale maintiendront leur engagement dans le dialogue constructif, encouragent et fournissent de l'assistance, notamment dans les domaines d'infrastructure. Ceci peut contribuer à éradiquer le travail forcé et à garantir les droits fondamentaux et l'égalité d'accès au développement et à ses avantages.
Le membre travailleur de la Malaisie s'est dit préoccupé de ce que parmi les Etats membres de l'ANASE, il existe des standards différents de pratique en matière de droits humains. La Charte de l'ANASE énonce que ses Etats membres adhèrent au principe de démocratie, à la primauté du droit et à la bonne gouvernance, au respect pour et à la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les droits de l'homme fondamentaux doivent être respectés, défendus et pratiqués, et il est à espérer que cela contribuera à établir les conditions nécessaires à la réalisation d'un travail décent pour tous les êtres humains, de manière à faire valoir l'équité et la dignité humaine dans le domaine de l'ANASE.
Depuis 1991, l'Assemblé générale des Nations Unies a adopté 16 résolutions sur la Birmanie portant directement sur une série de problèmes, incluant le déni des droits humains, le manque de progrès en matière de démocratie, ainsi que la détention continue de prisonniers politiques. Des déclarations percutantes ont été faites année après année, souligna la nature militaire du régime birman et le défaut par le Conseil national pour la paix et le développement (CNPD) d'aborder, de manière significative, les préoccupations exprimées par les Nations Unies. Depuis 1992, la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et le Conseil des droits de l'homme ont adopté 15 résolutions sur le refus par le CNPD de respecter les droits de l'homme, incluant le travail forcé et les déplacements forcés, ainsi que le respect des libertés fondamentales, incluant les libertés de réunion, d'association, d'expression et de mouvement.
Ces organes des droits de l'homme des Nations Unies reconnaissent que le respect des droits de l'homme, de la primauté du droit, de la démocratie et de la bonne gouvernance sont essentiels au développement durable et à la croissance économique, et soutiennent que l'établissement d'un gouvernement démocratique véritable est essentiel à la réalisation des droits humains et des libertés fondamentales. Le travail forcé ne peut être réellement éradiqué que lorsque la dignité de l'être humain et les droits humains sont garantis. Il faut également combattre l'impunité et, pour ce faire, il est nécessaire d'enquêter, de traduire en justice et de punir les militaires et les autres fonctionnaires qui commettent des violations, incluant le travail forcé, et ce, dans toutes les circonstances.
Malgré les tentatives par la communauté internationale de faire accélérer le processus visant à trouver une solution politique au problème, et alors qu'elle tentait d'aider en initiant un dialogue politique substantiel entre le CNPD et la Ligue nationale pour la démocratie (LND), le CNPD a établi, à titre de condition préalable au dialogue avec la dirigeante de la LND, Aung San Suu Kyi, que la LND laisse tomber son appel aux sanctions économiques, lequel perdure depuis longtemps. Bien que le Rapporteur spécial du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies pour le Myanmar ait été autorisé, pour la première fois en quatre ans, à visiter le pays afin d'accomplir son mandat, celui-ci énonce dans son rapport final, de mars 2008, que la bonne volonté démontrée initialement par le CNPD a par la suite disparu lorsque est venu le temps de traiter les problèmes relevant de son mandat et, malheureusement, plusieurs recommandations formulées n'ont pas été mises en application.
Le haut niveau d'engagement dont font preuve les principales institutions internationales démontre une ferme volonté de la part de la communauté d'appuyer un processus visant à restaurer la démocratie et la réconciliation nationale, ainsi que l'établissement du respect des droits humains. Cependant, malgré son support et ses initiatives, les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies ne sont pas parvenus à une entente concernant une résolution liant la Birmanie.
En décembre 2007, le Secrétaire général des Nations Unies a établi un "Groupe d'amis" constitué de pays particulièrement intéressés. A la suite des ravages causés par le cyclone Nargis en mai 2008, le Secrétaire général des Nations Unies et de l'ANASE sont intervenus pour négocier l'accès afin que soient délivrés les secours humanitaires et l'accès par les travailleurs humanitaires internationaux. Le membre travailleur a exprimé sa satisfaction face à cette réussite de l'équipe ONU-ANASE, laquelle a finalement permis de fournir les secours humanitaires dont la population avait un besoin urgent.
La communauté internationale a rencontré plusieurs frustrations au cours des années lors de ses tentatives visant à entraîner une réforme politique et le respect pour les droits de l'homme. Des mesures telles que des embargos sur les armes, le commerce et les investissements, des sanctions ciblées, des interdictions sur des visas et le gel d'actifs ont été prises par divers gouvernements et doivent être renforcées. Rappelant les conclusions des 300e et 301e sessions du Conseil d'administration et la séance spéciale de la Commission de la Conférence de 2007, le membre travailleur a souligné que le pays n'a fait aucun progrès en ce qui concerne l'accomplissement de ses obligations en vertu de la convention no 29 visant à éliminer la pratique répandue du travail forcé. Toutes les options disponibles en droit international afin d'assurer la mise en œuvre complète de la convention devraient être envisagées, incluant la possibilité de renvoyer le cas à la Cour internationale de Justice. La dignité et les droits du peuple birman ne demandent rien de moins.
Le membre gouvernemental du Japon a exprimé la profonde sympathie de son gouvernement pour la tragédie causée par le cyclone qui a fait tant de morts au début de ce mois.
Depuis la réussite de la conclusion du Protocole d'entente complémentaire l'année dernière, des progrès ont été réalisés pour son application, incluant l'approbation de sa traduction laquelle est indispensable à la sensibilisation des citoyens et des travailleurs à leurs droits octroyés par ce protocole. L'activité éducative entreprise conjointement par le ministère du Travail et le bureau de liaison de l'OIT doit être accueillie, laquelle a aussi été utile à l'accroissement de la conscience. L'engagement de principe du gouvernement de mener une seconde vague de formation bientôt doit également être salué. De plus, Il est à espérer que les efforts destinés à l'accroissement de la conscience mèneront à l'application effective du Protocole d'entente complémentaire.
Les explications détaillées du représentant gouvernemental sur la mise en œuvre des lois et règlements contre le travail forcé sont appréciables. En ce qui concerne l'application du Protocole d'entente complémentaire, il faut noter avec préoccupation que, selon le rapport du chargé de liaison, un certain nombre de plaintes concernant le travail forcé ont été reçues et soumises au gouvernement. Il est à espérer que le gouvernement examine sincèrement ces cas et prenne de bonnes et promptes mesures pour améliorer la situation.
Un référendum sur le projet de la nouvelle Constitution a eu lieu récemment. Tout en reconnaissant l'inclusion dans celle-ci d'un article interdisant l'utilisation du travail forcé, il est inquiétant de noter que, selon le chargé de liaison, cette disposition contient des restrictions qui pour- raient soulever un problème de conformité au regard la convention no 29. Il est à espérer que cette inquiétude sera dissipée le plus tôt possible.
En ce qui concerne le récent cyclone, bien qu'espérant sincèrement que le pays se relèvera aussi rapidement que possible de ce désastre et indiquant que le gouvernement japonais est prêt à maintenir son assistance, le gouvernement du Myanmar doit être prié d'assurer qu'il n'y ait aucun risque que l'utilisation du travail forcé, le travail des enfants, la traite des personnes et le travail des migrants augmentent lors du processus de redressement et de reconstruction du pays.
En conclusion, avec le renforcement de la présence et des activités du BIT au Myanmar, il est à espérer que le gouvernement et l'OIT, particulièrement par son chargé de liaison, continueront leur étroite collaboration et coopération pour traiter cette question et améliorer la situation.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a félicité le Bureau pour le rapport détaillé et le travail admirable effectué par le chargé de liaison malgré des circonstances très difficiles. En cherchant à maintenir le dialogue avec le régime militaire tout en le gardant au niveau élevé des droits du travail et de l'homme que soutient l'Organisation, l'OIT fait preuve d'un jugement exceptionnel.
Il y a dix ans maintenant que la commission d'enquête a formulé des recommandations claires et spécifiques aux autorités birmanes, à savoir: que la législation nationale soit mise en conformité avec la convention no 29; qu'aucun travail forcé ou obligatoire ne soit plus imposé par les autorités et, en particulier, par les militaires; et que les sanctions qui peuvent être imposées pour le fait d'exiger du travail forcé soient strictement appliquées. En outre, la commission d'experts a identifié quatre domaines dans lesquels des mesures devaient être prises par les autorités pour répondre aux recommandations de la commission d'enquête soit: émettre des instructions spécifiques et concrètes à l'adresse des autorités civiles et militaires; assurer que l'interdiction du travail forcé soit largement rendue publique; prévoir les inscriptions budgétaires adéquates pour le remplacement de la main-d'œuvre forcée ou non rémunérée; et assurer le respect de l'interdiction du travail forcé.
A la lumière de ces recommandations, les mesures, bien que modestes, prises au cours des derniers mois en matière de traduction, diffusion et publication du Protocole d'entente complémentaire doivent être notées. Le manque de progrès significatifs est toutefois à regretter. Bien qu'un certain nombre de plaintes aient été enregistrées et examinées selon la procédure mise en place par le protocole, il ne fait aucun doute que le travail forcé demeure un problème sérieux et très répandu dans le pays, et que la possibilité de porter plainte sur l'imposition de travail forcé reste une activité à haut risque. De plus, selon le rapport du Bureau, il semble que les sanctions imposées aux militaires infligeant du travail forcé ne soient pas crédibles et que l'article du projet de la nouvelle Constitution interdisant le travail forcé contient des restrictions qui pourraient soulever la question de sa conformité avec la convention no 29. Il est également inquiétant de constater que des militants syndicaux soient encore détenus, que des enfants soient toujours victimes de recrutement forcé dans le service militaire et que les autorités n'aient toujours pas fait de déclaration publique de haut niveau visant à interdire le travail forcé.
Bien qu'il soit indéniable que le Protocole d'entente complémentaire soit une mesure importante, il existe des contraintes et des limites évidentes quant à la participation de celui-ci et de la procédure de plaintes à l'abolition du travail forcé dans le pays. En particulier, ils ne traitent pas de l'origine de ce problème. En outre, le régime doit une fois de plus être prié de mettre pleinement en œuvre et sans délai les recommandations de la commission d'enquête et de la commission d'experts.
Cette séance spéciale de la commission a lieu suite au tragique et dévastateur cyclone Nargis. A cet égard, l'oratrice a exprimé la plus profonde compassion de son gouvernement aux victimes et a indiqué que le Président de son pays a promis que tous les efforts seront faits pour aider le peuple birman à se relever de ce désastre. Toutefois, au vu des antécédents du régime, il est crucial d'assurer que le processus de reconstruction n'implique pas ou n'ait pas recours à l'utilisation du travail forcé sous toutes ses formes.
L'élimination du travail forcé est liée de manière inextricable au progrès accompli en ce qui concerne la garantie de la liberté syndicale et le rétablissement de la démocratie dans le pays. De plus, des inquiétudes profondes demeurent quant au manque général de respect des droits fondamentaux des travailleurs et de l'homme. En conséquence, au moyen de plusieurs mesures législatives et politiques, le gouvernement des Etats-Unis a imposé des sanctions variées contre le régime. La pertinence de ces mesures sera évaluée et d'autres seront considérées si le gouvernement ne met pas fin à la brutale répression de son propre peuple. Tous les prisonniers politiques doivent être remis en liberté et un vrai dialogue avec Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie et les autres groupes démocratiques et ethniques dans une transition vers la démocratie doit être établi. Un tel dialogue peut seulement avoir un effet positif sur l'élimination du fléau du travail forcé dans le pays.
Le membre travailleur de la République de Corée a appelé tous les mandants de l'OIT à prendre action conformément à la résolution de 2000. Il est regrettable que plus de 400 entreprises multinationales continuent d'appuyer directement ou indirectement la répression du peuple birman par le régime militaire, le recours au travail forcé, l'interdiction de la liberté syndicale et la violation d'autres droits humains en maintenant des relations économiques avec la Birmanie. Depuis les vingt dernières années, les investissements étrangers affluent en Birmanie, 98 pour cent d'entre eux se concentrant dans les secteurs du pétrole, du gaz et de l'énergie en 2007. Les exportations de gaz ont compté pour la moitié des exportations nationales en 2006, et les ventes à son principal acheteur, la Thaïlande, ont rapporté 2,16 milliards de dollars E.-U. Ces revenus renforcent la capacité de répression de la Junte puisque la majorité de ces affaires sont réalisées conjointement avec la participation des militaires ou directement par des compagnies appartenant et opérant sous la direction des militaires. Un contrat de partage de la production entre des compagnies étrangères, dont plusieurs sont partiellement ou entièrement des sociétés d'Etat, et la Myanmar Oil and Gas Enterprise (MOGE) précise les frais et taxes que la compagnie doit verser au régime.
A titre d'exemple, le gazoduc Yadana, un projet mené par la compagnie Chevron pour transporter du gaz en Thaïlande, constitue la source vitale de revenus pour le régime militaire. La production gazière du projet Yadana en 2007 totalisait environ 758 millions de pieds cube par jour, dont 650 millions ont été exportés. Le budget projeté des militaires birmans, qui doit notamment soutenir d'importantes forces armées comptant 428 000 troupes, pourrait être complètement financé par les revenus du projet Yadana (environ 972 millions de dollars E.-U. par année). De plus, plusieurs violations des droits humains se sont produites dans la région du gazoduc, incluant des meurtres, des viols commis par des soldats responsables de la sécurité du gazoduc, le recrutement forcé de porteurs pour la patrouille de sécurité, des confiscations de terres, des programmes de plantations forcées ainsi que des vols de biens à grande échelle. Un autre exemple est celui du projet gazier de Shwe qui a rapporté entre 600 et 850 millions de dollars E.-U. au régime militaire. Le consortium gazier Shwe est composé de la compagnie sud-coréenne Daewoo International et de sociétés d'Etat de l'Inde et de la République de Corée, ainsi que du MOGE.
L'économie birmane éprouve de nombreux problèmes parce que les investissements dans les secteurs gazier et pétrolier et les autres industries d'exploitation ne créent pas un nombre significatif d'emplois ni n'assure un transfert substantiel de savoir-faire ou de technologie à la population locale. Il en découle donc des bénéfices importants pour le régime mais très limités pour le peuple birman.
Alors que de plus en plus de gouvernements ont imposé des sanctions à la Birmanie, particulièrement à la suite des mesures brutales prises contre les manifestants birmans en septembre 2007, les pays voisins et d'autres puissances économiques dans la région semblent encore plus impatients de faire affaire avec le régime. La République de Corée, la Fédération de Russie et Singapour étaient quelques-uns des plus importants investisseurs dans le secteur du pétrole et du gaz en 2007, et la Chine était le principal investisseur étranger dans le secteur de l'énergie (281 milliards de dollars E.-U.). En ce qui concerne le commerce, les investissements, la coopération économique et l'influence politique pris comme un tout, les trois voisins immédiats de la Birmanie sont les principaux soutiens du régime et détiennent donc la clé de la liberté de son peuple.
Il est donc d'une importance capitale que tous les gouvernements, les institutions internationales et les organisations de travailleurs et d'employeurs appliquent pleinement la résolution de 2000, que des sanctions économiques largement ciblées soient imposées, en particulier en ce qui concerne l'importation et l'exportation de biens, afin de mettre un terme au financement du régime militaire et qu'un embargo total sur les armes soit mis en œuvre comme l'a suggéré l'Union européenne. Les conclusions de la commission devraient demander l'adoption d'un mécanisme de rapport renforcé ainsi que la tenue d'une conférence avec toutes les parties prenantes sous l'égide de l'OIT afin d'assurer la pleine application de la résolution de 2000.
Le membre gouvernemental de l'Inde a exprimé la satisfaction de son gouvernement au regard des progrès tangibles effectués, progrès qui se sont consolidés par la suite en une coopération entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT. Il s'est réjoui de la traduction du Protocole d'entente complémentaire et de sa publication sur le site Internet du ministère du Travail ainsi que des progrès réalisés avec le chargé de liaison dont le travail a été facilité par le gouvernement du Myanmar. La résolution de cas de travail forcé par le biais de mécanismes issus d'un accord mutuel entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT est un domaine de satisfaction. Le mécanisme institutionnel permettant d'aborder la question du recrutement des enfants soldats fonctionne en pratique. L'Inde a constamment encouragé le dialogue et la coopération entre l'OIT et les Etats Membres pour résoudre toutes les questions en suspens. Les efforts du Directeur général du BIT pour assister le Myanmar à éradiquer le travail forcé ont été rappelés. L'Inde reste fermement opposée au travail forcé, dont le recours est expressément interdit dans sa Constitution. Le gouvernement de l'Inde se réjouit par conséquent des récents développements et des progrès effectués sur la question de l'éradication du travail forcé au Myanmar.
La membre travailleuse de l'Italie a exprimé sa préoccupation au sujet de la mise en œuvre du Protocole d'entente complémentaire et de l'impact de la récente crise humanitaire sur le recours au travail forcé. Les personnes concernées par le mécanisme de plainte ont exprimé leurs inquiétudes au sujet d'informations sur des harcèlements et des détentions malgré le fait que le Conseil d'administration ait noté à sa session de novembre 2007 un certain progrès dans la mise en œuvre du Protocole. A la session de mars 2008, le groupe des travailleurs s'était félicité de la prorogation de la période d'essai du Protocole d'entente complémentaire et avait indiqué que des progrès rapides devraient être constatés à la présente session de la Conférence, ceci conformément aux décisions déjà prises par le Conseil d'administration. Malheureusement, ces décisions n'ont pas encore été suivies d'effet. Le gouvernement n'a approuvé la traduction du Protocole d'entente complémentaire et sa publication sur le site Web du ministère que le 2 mai 2008.
Les conclusions de la commission d'experts soulignent qu'il y a des contraintes et des limites évidentes à la contribution du mécanisme de plainte à l'éradication du travail forcé. Cela tient aux limites structurelles et au fait que "tout en étant très utile", il "n'aborde pas les causes profondes du problème du travail forcé". Les membres travailleurs partagent cette préoccupation. Le rapport du chargé de liaison indique que ses activités se concentrent sur la mise en œuvre du Protocole d'entente complémentaire alors que son travail devrait davantage se concentrer sur la mise en œuvre des recommandations de la commission d'enquête. Il y a lieu de souligner la nécessité de lui accorder des ressources humaines et financières supplémentaires de manière à surmonter ces obstacles.
A ce jour, et malgré l'augmentation du recours au travail forcé, seulement 89 plaintes ont été déposées, parmi lesquelles un grand nombre a été rejeté par les autorités au motif qu'il s'agissait de menus travaux communautaires ou qu'elles ne relevaient pas du mandat. Selon les travailleurs, le rejet de telles plaintes pourrait être contraire à la jurisprudence de la commission d'experts, notamment en ce qui concerne la confiscation des terres que cette dernière a toujours considérée comme étant une forme de travail forcé. De plus, si la Junte déclare recevables des plaintes pour le recrutement forcé d'enfants au travail, les militaires sont très peu sanctionnés et, s'ils le sont, les peines sont inappropriées.
Face à de telles situations, l'absence d'engagement politique, l'absence d'information et donc d'initiatives pour la sensibilisation, l'incapacité physique des victimes à porter plainte et la peur de représailles constituent des obstacles majeurs à la dénonciation. Par ailleurs, il est inacceptable que le chargé de liaison ne soit pas lui-même autorisé à communiquer des plaintes. En conséquence, les conclusions de la commission devraient réaffirmer les décisions antérieures suivantes: que le gouvernement publie dans toutes les langues locales une déclaration formelle au plus haut niveau selon laquelle toutes les formes de travail forcé sont interdites et qu'elles seront sévèrement punies; qu'un large réseau de facilitateurs chargés des plaintes soit rapidement mis en place, y compris dans les zones de combat; que le gouvernement assure de manière urgente la disponibilité du texte du Protocole d'entente complémentaire dans toutes les langues locales et s'assure de leur diffusion et de la publication de matériaux de sensibilisation; que le mécanisme du Protocole d'entente complémentaire demeure pleinement opérationnel sans détention ou harcèlement des facilitateurs ou autres, que des sanctions adéquates soient prononcées à l'encontre des coupables et que les victimes de travail forcé aient un accès facile au mécanisme de plainte; et que le chargé de liaison puisse librement circuler dans le pays et ait la capacité de soumettre des plaintes.
La population birmane vit aujourd'hui dans une nouvelle situation intolérable qui ne résulte pas seulement du cyclone mais aussi de l'action inhumaine de la Junte, de l'imposition d'un référendum aux résultats connus à l'avance, de son refus d'agir et de son obstruction à l'aide de la communauté internationale, causant une crise humanitaire encore plus grande.
Des informations ont été reçues sur le recours au travail forcé par les militaires et les autorités locales dans la région du delta d'Irrawaddy. Le cas du camp de déplacés de Maubin, où 1 500 hommes et femmes ont été forcés de travailler dans des carrières, en est un exemple. Dans le village de Ngabyama au sud de la ville de Bogale, les autorités ont forcé des survivants à couper des arbres et à reconstruire des routes. A Bogalay, les militaires ont forcé la population locale à travailler. Tous ces exemples confirment l'alerte lancée par le rapport du chargé de liaison qui souligne les risques accrus de travail forcé, de travail des enfants, de traite des personnes et de migration de main-d'œuvre dans la région du delta d'Irrawaddy. Le chargé de liaison est à louer pour son important travail, en particulier au regard de la situation, et également pour le rôle qu'il a joué dans l'organisation rapide avec les autres agences des Nations Unies présentes en Birmanie d'un groupe de travail de reconstruction.
A cet égard, les conclusions de cette commission devraient souligner la nécessité de promouvoir la convention sur le travail forcé et les bonnes pratiques de travail dans les activités de redressement et de reconstruction, à travers des procédures permettant au BIT de garantir le respect de la convention no 29 ainsi que la nécessité d'inclure les organisations démocratiques dans le processus de reconstruction. Des ressources humaines et financières supplémentaires devraient être allouées au BIT pour de telles activités. Il est inacceptable que la crise humanitaire serve d'alibi pour refuser à une population victime à la fois de la dictature et de la crise humanitaire le bénéfice des droits de l'homme fondamentaux.
La tragédie qui voit le peuple birman lutter pour sa survie, pour sa liberté et ses droits de l'homme nécessite une réponse constante et claire de la part de cette commission et de la Conférence en général. Comme la commission d'enquête l'a indiqué, le travail forcé en Birmanie est un crime contre l'humanité. Il y a lieu de toujours agir en utilisant tous les moyens disponibles dans le droit pénal international et à travers les décisions antérieures du Conseil d'administration. Le Bureau devrait préparer une demande d'avis consultatif à l'attention de la Cour internationale de Justice sur la violation de la convention no 29, car le peuple birman le mérite.
Le membre gouvernemental de l'Australie a exprimé la sympathie de son gouvernement et du peuple australien au peuple du Myanmar pour les souffrances, les pertes de vies humaines et les ravages causés par le cyclone Nargis. Son gouvernement reste prêt à apporter son aide au peuple du Myanmar en ces temps de besoins terribles et est heureuse d'avoir pu contribuer à cet effort. Les dommages causés par le cyclone sont étendus, et la reconstruction des régions affectées, et particulièrement celle du delta d'Irrawady, sera une énorme tâche. Il est important de ne pas avoir recours au travail forcé des enfants dans cet effort de reconstruction. La communauté internationale a d'ores et déjà apporté une contribution généreuse à l'effort d'aide dans les zones affectées. Si le gouvernement du Myanmar s'engage de manière constructive avec la communauté internationale et autorise le plein accès aux régions affectées aux agences chargées de distribuer l'aide, une assistance encore plus importante sera possible.
Il a exprimé les remerciements de son gouvernement pour les efforts constants de l'OIT pour pousser le gouvernement du Myanmar à respecter ses obligations internationales issues de la convention. A cet égard, son gouvernement aimerait rendre hommage aux efforts déployés par le Directeur exécutif, M. Kari Tapiola, le Conseiller spécial, M. Francis Maupin, et le chargé de liaison, M. Steve Marshall. Ils n'ont eu de cesse de chercher à obtenir des progrès sur cette question vitale pour le peuple du Myanmar. Son gouvernement souhaiterait leur apporter son soutien et l'encourager.
Le mécanisme mis en place par le Protocole d'entente complémentaire a joué un rôle dans la possibilité offerte à un nombre limité de personnes au Myanmar de dénoncer les violations de leur droit de ne pas être contraint au travail. Grâce au dévouement et à l'attention du chargé de liaison, plusieurs personnes ont bénéficié du fonctionnement de ce mécanisme. Toutefois, les résultats obtenus à ce jour sont au mieux modestes.
Le gouvernement australien reste préoccupé par le fait que le nombre limité de cas dénoncés traduit un manque de connaissance au Myanmar du fonctionnement du mécanisme mis en place par le Protocole d'entente complémentaire et du droit de chacun de déposer plainte ainsi que des difficultés logistiques auxquelles les personnes sont confrontées lors de l'enregistrement des plaintes et leur crainte de représailles. Le gouvernement est fortement inquiet du bien-être de six syndicalistes activistes, emprisonnés en 2007 pour sédition, et de celui de U Thet Wai, arrêté le 24 février 2008 pour avoir été en possession d'informations relatives au travail forcé. Les résultats de nombreux cas portés à l'attention de l'OIT sont par ailleurs loin d'être satisfaisants. Seul un cas a conduit à l'ouverture de poursuites par le gouvernement. Le fait que l'OIT estime que "des divergences de vues subsistent quant à la réparation qui doit être accordée aux plaignants et quant aux sanctions à infliger aux coupables" est inquiétant et indique un manque continu de volonté du gouvernement et des autorités du Myanmar à ce que justice soit faite.
Le gouvernement de l'Australie partage l'opinion de l'OIT selon laquelle le mécanisme établi dans le Protocole d'entente complémentaire pourrait jouer un rôle important pour aider la population du Myanmar et pour s'occuper du fléau que représente le travail forcé. Cependant, un engagement plus important du gouvernement du Myanmar est nécessaire pour atteindre ce but.
Comme preuve immédiate d'engagement, son gouvernement recommande instamment au gouvernement du Myanmar de rendre accessible à l'ensemble de ses citoyens une déclaration interdisant sans équivoque toute forme de travail forcé. Il recommande également au gouvernement du Myanmar de s'assurer qu'une publicité suffisante est donnée au Protocole d'entente complémentaire dans les langues appropriées. A cet égard, il est très important que le gouvernement rende disponible une traduction adéquate du Protocole dans les langues parlées au Myanmar, et ce dès que possible. Tout retard supplémentaire pour mettre en œuvre ces mesures ne pourra être interprété que de façon négative.
Il a noté pour conclure que le mécanisme établi par le Protocole d'entente complémentaire ne peut être qu'un élément d'une solution plus large, les recommandations de la commission d'enquête de 1998 montrent la voie à prendre au gouvernement pour satisfaire à ses obligations internationales. Pour rappel, la commission d'enquête avait recommandé au gouvernement du Myanmar de prendre des mesures sans délai pour:
- mettre sa législation en conformité avec la convention sur le travail forcé;
- ne plus imposer aucun travail forcé, en particulier de la part des militaires;
- assurer l'information du public quant à l'illégalité du travail forcé; et
- appliquer strictement les sanctions pénales prévues dans la législation pour le fait d'exiger du travail forcé.
Le membre travailleur du Bangladesh a exprimé sa solidarité à l'égard du peuple birman qui lutte pour la défense de ses droits légitimes et pour la démocratie. Récemment, le pays a été gravement touché par le cyclone Nargis et, malheureusement, le gouvernement du Myanmar a fait obstacle aux efforts que l'aide internationale a déployés pour secourir la population, tandis que les violations de la convention no 29 avaient toujours cours. Le Bangladesh, en tant que pays voisin, accueille aujourd'hui un grand nombre de réfugiés birmans. Cela fait peser une lourde charge sur les moyens de ce pays, qui figure lui-même parmi les moins avancés. Toutes les organisations syndicales, toutes les organisations d'employeurs, tous les gouvernements et le Directeur général du BIT sont appelés à prendre les mesures qui s'imposent pour qu'il soit mis un terme au travail forcé au Myanmar.
Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a exprimé la sympathie de son gouvernement envers le peuple du Myanmar pour les souffrances et les pertes de vies humaines causées par le cyclone et espère une reconstruction rapide des régions affectées. Il a noté avec satisfaction que le Protocole d'entente complémentaire a été prorogé pour un an et s'est réjoui des développements qui confirment l'instauration d'un dialogue constructif entre le gouvernement du Myanmar et l'OIT: la création d'un groupe de travail au sein du ministère du Travail chargé d'examiner les plaintes concernant le travail forcé et l'implication du ministère de la Défense dans l'examen de ces plaintes; l'affectation au Myanmar de deux fonctionnaires du BIT, ce qui accroît l'effectivité des actions de l'OIT; la Constitution récemment adoptée, dans laquelle l'interdiction du travail forcé est expressément prévue, et la publication du texte du Protocole d'entente complémentaire sur le site Internet officiel du ministère du Travail. Le BIT et le gouvernement du Myanmar doivent toutefois poursuivre leur coopération dans le but d'assurer l'application de la convention no 29.
Le membre gouvernemental de Cuba a salué les progrès obtenus jusqu'à aujourd'hui pour atteindre les objectifs posés par la convention no 29. Il ressort que ces progrès sont uniquement dus à l'esprit de coopération entre l'OIT et les autorités du Myanmar. Les mesures coercitives, les condamnations publiques, les blocus et autres actions punitives, loin de contribuer à l'amélioration des conditions nécessaires pour atteindre les objectifs inscrits dans les conventions de l'OIT, ont un effet totalement contraire. Toute conclusion de cette commission devra avoir comme fondement la continuité de la coopération technique et le dialogue ouvert et inconditionnel avec les autorités du Myanmar.
Le membre travailleur de l'Indonésie a déclaré que le travail forcé demeure parmi les violations des droits humains les plus répandues en Birmanie et s'accompagne de harcèlement, de menaces et d'abus physiques. Le travail forcé sape les sources de survie de communautés entières et mène à l'effondrement complet de l'économie des villages, au déplacement à grande échelle de populations et à des afflux de réfugiés. L'armée et les autorités locales continuent de contraindre des milliers de personnes au travail forcé pour le transport de matériaux, la construction de routes et d'installations militaires et dans l'agriculture, notamment la plantation de biocarburants. Les services de porteurs à des fins militaires continuent également. De nombreux travailleurs forcés qui ont échappé à l'armée ont rapporté que des centaines de personnes ont été utilisées comme porteurs après avoir purgé des peines d'emprisonnement.
En octobre 2007, dans le district de Tangoo, le commandement militaire no 9 a contraint les villageois de Play Has Loh à conduire des opérations pour l'armée, notamment la coupe de tiges de bambous et le transport de terre. Le commandement militaire no 5 a forcé des centaines de villageois à transporter des stocks militaires, à déménager un campement militaire et à dégager les routes. Le 14 novembre 2007, le bataillon d'infanterie légère 599 a forcé des centaines de villageois à construire des bureaux et des campements militaires dans le district de Kler Law Htoo. D'autres cas de travail forcé ordonné par l'armée ont eu lieu en décembre 2007 dans les municipalités de Hakha et Mantaw dans l'Etat de Chin et, en janvier 2008, à Mong Hsat, dans l'Etat de Shan. Le travail forcé est vital pour le régime militaire, et une volonté politique sérieuse est nécessaire afin de mettre un terme à ce cercle vicieux.
En novembre 2007, l'armée a décidé d'implanter un nouveau village modèle à Nurullah, dans l'Etat d'Arkan. A la suite de la confiscation de terres, les villageois ont été forcés de préparer le terrain pour la construction et de transporter des matériaux de construction. En janvier 2008, on a ordonné aux villageois d'achever la construction de 120 maisons en un mois. A la fin d'avril 2008, 200 maisons avaient été construites. Aucun des 200 à 270 travailleurs provenant de neuf villages ayant participé à ce projet n'ont été payés.
L'approche de la saison de la mousson pourrait créer une situation catastrophique dans la région du delta. Les autorités ont ramené les victimes du cyclone dans leurs villages détruits sans aucun approvisionnement d'aide, et on a rapporté de nouveaux cas de travail forcé imposé par l'armée et les autorités locales dans les régions dévastées.
L'OIT et ses Membres sont instamment priés de prendre les mesures les plus efficaces pour assurer le respect immédiat et entier de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Le monde ne peut demeurer inactif pendant que le peuple birman souffre. Le gouvernement doit pleinement mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête. Les militaires, particulièrement les commandants régionaux et les autorités locales, doivent de manière urgente modifier les lois existantes, les comportements et les pratiques. Il est primordial que les autorités fassent une déclaration publique sans ambiguïté dans toutes les langues locales sur l'interdiction du travail forcé et que, en conséquence, un budget pour les travaux publics soit établi. De plus, le respect de la liberté syndicale doit être garanti pour tous les travailleurs afin de leur permettre de s'organiser et de dénoncer le travail forcé. Le gouvernement et les institutions internationales ont été sollicités afin de prendre part aux programmes de secours et de reconstruction. Tous les militants syndicaux et les prisonniers politiques, y compris Mme Aung San Suu Kyi, doivent être remis en liberté.
Le représentant gouvernemental du Myanmar a noté qu'un certain nombre d'intervenants reconnaissent les efforts des autorités et les progrès effectués jusqu'à aujourd'hui. Selon lui, ceux qui ont exprimé différents points de vue ont leur propre programme et tentent de saper les efforts du gouvernement. Il a exprimé l'espoir que les membres de la commission se réfèrent désormais à son pays sous le nom officiel inscrit dans la nouvelle Constitution approuvée par référendum.
Les membres travailleurs ont tenu à se concentrer sur les conclusions, qui devraient, à leur avis, inclure les points suivants: la libération de Mme Aung San Suu Kyi ainsi que des militants syndicaux et les prisonniers politiques qui ont exercé leurs droits à la liberté d'expression et d'association; la reconnaissance de la Fédération des syndicats de Birmanie (FTUB), qui ne devrait plus être considérée par les autorités comme une organisation terroriste; l'arrêt immédiat des harcèlements et la libération des personnes qui soumettent des plaintes liées au travail forcé. Enfin, les conclusions devraient déplorer le fait que les auteurs du recours au travail forcé n'encourent pas de sanction au titre de la responsabilité pénale.
Tout en rappelant la nécessité de mettre en œuvre urgemment les recommandations formulées par la commission d'enquête il y a de cela dix ans, les membres travailleurs ont souligné également que le gouvernement doit mettre en œuvre toutes les décisions déjà prises par le passé par les différents organes de l'OIT, y compris les conclusions de 2006 de la Commission de proposition, et réaffirmées à plusieurs reprises par le Conseil d'administration du BIT. Certains points rappelés doivent faire l'objet d'une attention particulière: le Bureau doit demander aux gouvernements, aux employeurs, aux organisations internationales, aux institutions financières ou banques internationales ou régionales de réviser ou de suspendre, en fonction de leurs mandats, les relations et programmes directs et indirects avec les entreprises du gouvernement, des militaires ou du secteur privé de Birmanie; un mécanisme de rapport doit être mis en place, sur la base d'un questionnaire simple d'usage, en ce qui concerne les mesures à mettre en œuvre conformément aux recommandations contenues dans la résolution de 2000; des conférences regroupant les différents acteurs doivent être convoquées pour discuter des meilleures pratiques pour mettre en œuvre la résolution de 2000; les mesures disponibles en vertu du droit pénal international doivent être appliquées pour sanctionner les coupables de recours au travail forcé; le BIT et les gouvernements devraient davantage informer l'opinion publique, notamment via une page spéciale sur le site Web de l'OIT; le gouvernement de Birmanie doit mettre en place un réseau de facilitateurs pour traiter les plaintes et ainsi assurer une mise en œuvre nationale élargie du Protocole d'entente complémentaire, y compris dans les zones de combat, en même temps qu'il doit assurer la diffusion du Protocole via sa traduction dans toutes les langues locales et des activités de sensibilisation; le chargé de liaison du BIT doit avoir la capacité de soumettre des cas d'infraction et à réellement diligenter les enquêtes nécessaires.
Les membres travailleurs ont demandé aux différents gouvernements de ne pas reconnaître la nouvelle Constitution et se sont réservé la possibilité de soumettre à la Cour internationale de Justice une demande d'avis consul- tatif quant à la question des conséquences en droit international de la violation par la Birmanie de la convention no 29.
A titre de conclusion, s'agissant de la situation humanitaire dramatique en Birmanie, les membres travailleurs ont demandé au Bureau de veiller, par des mesures de promotion et d'information sur les bonnes pratiques, au respect de la convention no 29 dans le cadre des activités de reconstruction du pays. A cet égard, le Bureau devrait disposer de ressources humaines et financières accrues en même temps que de la coopération des autres agences internationales pour le contrôle du respect de la convention no 29. Le gouvernement devrait permettre à toutes les organisations démocratiques de participer aux activités de reconstruction et informer le Conseil d'administration du BIT à sa prochaine session de novembre 2008 des mesures prises pour mettre en œuvre les conclusions de cette commission.
Les membres employeurs ont déclaré que la réponse du gouvernement ne montre pas d'engagement sérieux à éradiquer le travail forcé. Le gouvernement n'a pas pris les mesures nécessaires à cette fin. Le recours généralisé au travail forcé continue, et le droit à la liberté syndicale est violé impunément, contrairement aux obligations internationales du Myanmar. Le gouvernement ne semble pas comprendre les conséquences des violations des droits de l'homme. Ces violations ne sont pas seulement dommageables pour les citoyens du pays mais affectent aussi l'autorité morale du gouvernement à gouverner le pays ainsi que sa crédibilité internationale au sein de la communauté des nations. De plus, le non-respect des droits de l'homme empêche le développement économique car des investissements de grande envergure ne se font pas là où la démocratie et les libertés publiques sont inexistantes et où le développement humain demeure à un bas niveau. Les membres employeurs ont exprimé leur profonde préoccupation de voir le recours au travail forcé continuer au Myanmar comme par le passé. Il y a une nécessité urgente à démontrer par des preuves tangibles, concrètes et véri- fiables que la pratique du travail forcé est éradiquée.
Les membres travailleurs ont déclaré qu'en acceptant les conclusions ils croient aussi comprendre la référence dans les conclusions à la discussion et aux décisions du Conseil d'administration de mars 2007, novembre 2007 et mars 2008, ainsi qu'aux décisions adoptées par la Conférence en 2000 et 2006 concernant le respect par la Birmanie de la convention no 29, incorporent de manière effective les suggestions des membres travailleurs pour les conclusions de cette année, y compris au sujet de l'avis de la Cour internationale de Justice en temps utile. Les membres travailleurs ont également réitéré la nécessité pour le Chargé de liaison du BIT d'être habilité à soumettre les plaintes et à mener les investigations nécessaires.
Documents non-reproduits:
Document D.5 B. Rapport du Chargé de liaison à la séance spéciale de la Commission de l'application des normes sur l'application par le Myanmar de la convention no 29
Document D.6 C. Séance spéciale pour l'examen des faits nouveaux concernant la question de l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930
1. Observation de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur l'exécution par le Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930
2. Conclusions de la Commission de l'application des normes lors de sa séance spéciale pour l'examen des faits nouveaux concernant l'exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930 (Conférence internationale du Travail, 96e session, juin 2007)
3. Documents soumis au Conseil d'administration à sa 300e session (novembre 2007) (documents GB.300/8 et GB.300/8(Add.)) 4. Documents soumis au Conseil d'administration à sa 301e session (mars 2008) (documents GB.301/6/1, GB.301/6/2, GB.301/6, les annexes I, II, III et IV au document GB.301/6/2, ainsi que le document GB.301/6/3)
Conclusions
La commission a exprimé sa sympathie et ses condoléances à l'égard du peuple du Myanmar après le cyclone Nargis. Elle a exprimé l'espoir sincère que les besoins humanitaires seront couverts et que les travaux de reconstruction seront entrepris sans aucun recours au travail forcé, et dans un esprit de coopération et de dialogue constructif, dans le plein respect des droits civils et des normes internationales du travail.
La commission a pris note des observations de la commission d'experts ainsi que du rapport du chargé de liaison du BIT à Yangon, qui relate les plus récents développements concernant la mise en œuvre du mécanisme de plainte relatif au travail forcé mis en place le 26 février 2007, dont la période d'essai a été prorogée le 26 février 2008 pour une nouvelle période de douze mois. La commission a également pris note des discussions et décisions prises par le Conseil d'administration à ses sessions de mars et novembre 2007 et mars 2008. Elle a également pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.
La commission a pris note de certaines mesures qui ont été prises en application du Protocole d'entente complémentaire et de certaines mesures de sensibilisation du public qui ont été prises depuis sa dernière session en juin 2007. Cependant, elle s'est déclarée préoccupée par le fait que ces mesures sont très limitées et a estimé qu'il y a bien plus à faire, à la fois avec engagement et de manière urgente. En particulier, le gouvernement devrait, comme demandé par le Conseil d'administration, déclarer sans attendre, de manière non ambiguë et au plus haut niveau, que le recours au travail forcé est interdit, que les auteurs seront poursuivis et condamnés. Elle s'est déclarée également préoccupée par les dispositions restrictives de la Constitution nouvellement adoptée qui pourraient soulever des problèmes d'application au regard des conventions nos 29 et 87 ratifiées par le Myanmar.
La commission s'est déclarée profondément préoccupée par le fait que le travail forcé au Myanmar, y compris le recrutement d'enfants dans les forces armées, reste aussi largement répandu qu'il l'a été jusqu'à présent, comme en attestent les observations de la commission d'experts. Aucune des recommandations de la commission d'enquête n'a encore été mise en œuvre, et l'exaction de travail forcé reste largement répandue, notamment de la part de l'armée. Les instructions données pour qu'il soit mis un terme à la pratique du recours au travail forcé semblent être ignorées régulièrement, et ce dans l'impunité. En outre, même s'il y a maintenant près de quinze mois que le Protocole d'entente complémentaire est en vigueur, ce n'est que récemment que la traduction en a été approuvée pour diffusion. La commission reste préoccupée par la très faible conscience de l'existence des dispositions légales interdisant le travail forcé (ordonnance no 1/99) et des mécanismes de plainte prévus dans le cadre du Protocole d'entente complémentaire. Le gouvernement est notamment prié d'approuver rapidement, en vue de sa traduction dans toutes les langues locales, une brochure facile à comprendre destinée à être largement dif- fusée dans le public, expliquant la loi et la procédure de plainte prévues par le Protocole d'entente complémentaire.
La commission a noté que le mécanisme de plainte relatif au travail forcé continue de fonctionner et que les autorités continuent d'enquêter sur les cas dont elles sont saisies par le chargé de liaison. Elle a toutefois exprimé sa préoccupation persistante du fait que les sanctions à l'égard de ceux qui ont recouru à du travail forcé ne sont en général pas imposées sur la base du Code pénal. Il s'en est suivi qu'aucune condamnation pénale n'a été prononcée contre des membres des forces armées.
La commission a noté qu'un fonctionnaire international de la catégorie professionnelle a été nommé pour assister le chargé de liaison. Elle a souligné qu'il est crucial que le chargé de liaison dispose de ressources suffisantes pour faire face à ses responsabilités. La commission a souligné également qu'il existe un besoin urgent d'un réseau renforcé de facilitateurs pour traiter des plaintes dans l'ensemble du pays. Elle a noté avec préoccupation les cas signalés de représailles/harcèlement à l'égard de plaignants et de facilitateurs volontaires qui coopèrent avec le chargé de liaison. Une telle conduite constitue un manquement fondamental au Protocole d'entente complémentaire. La commission a demandé au gouvernement de garantir que tous les actes de harcèlement et de représailles, quelle qu'en soit la base juridique ou autre, cessent immédiatement et que leurs auteurs soient poursuivis en pleine application de la loi en vigueur.
La commission a noté avec une extrême préoccupation que de nombreuses personnes demeurent emprisonnées pour avoir exercé leurs droits à la liberté d'expression et à la liberté syndicale. La commission a appelé à la libération immédiate de ces personnes, et en particulier de Daw Su Su Nway, U Min Aung, U Thurein Aung et ses cinq associés: U Kyaw Kyaw, U Schwe Joe, U Wai Lin, U Aung Naing Tun et U Nyi Nyi Zaw. Toutes ces personnes avaient des liens avec l'OIT et sont des militants qui agissent légitimement pour la reconnaissance des normes internationales du travail et, en particulier, de celles qui ont été ratifiées par le gouvernement du Myanmar. La commission a souligné à nouveau que le Conseil d'administration attend qu'U Thet Wai ne fasse pas l'objet d'autres persécutions ou autre mesure d'arrestation.
La commission a également souligné la nécessité de permettre à tous les citoyens du Myanmar d'exercer pleinement leurs droits civils et de demander au gouvernement de mettre un terme à la mesure d'assignation à résidence frappant Daw Aung San Suu Kyi. Elle a rappelé en outre les recommandations faites par le Comité de la liberté syndicale en mars 2008 à propos de la reconnaissance des droits syndicaux dans ce pays, et de toutes les organisations syndicales, y compris la FTUB.
La commission a rappelé la pertinence constante des décisions prises par la Conférence en 2000 et en 2006 en ce qui concerne le respect par le Myanmar de la convention no 29.
La commission a appelé instamment le gouvernement à prendre toutes les mesures nécessaires pour faire pleinement porter effet, sans retard, à toutes les recommandations de la commission d'enquête. Elle a insisté auprès du gouvernement pour qu'il fournisse en temps utile des informations complètes à la commission d'experts en vue de sa session de cette année, notamment des éléments concrets et vérifiables attestant des mesures prises pour mettre pleinement en œu- vre les recommandations de la commission d'enquête.