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Caso individual (CAS) - Discusión: 2018, Publicación: 107ª reunión CIT (2018)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - México (Ratificación : 1950)

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 2018-MEX-C087-Fr

Le gouvernement a fourni les informations écrites ci-après.

Le gouvernement du Mexique a dûment respecté la convention no 87 et en a informé en temps utile le Bureau international du Travail (BIT) dans les rapports qu’il a soumis. De même, il a répondu aux demandes d’informations du Comité de la liberté syndicale.

Partie 1. Libertés publiques et droits syndicaux

Allégations de la CSI et d’IndustriALL sur les actes de violence à l’encontre de syndicalistes dans le cadre d’un conflit collectif dans le secteur de l’éducation à Oaxaca

Le gouvernement du Mexique déplore et condamne les faits survenus, mais nie catégoriquement que ces faits constituent des actes de violence à l’encontre de syndicalistes et encore moins une violation de la convention no 87 de l’Organisation internationale du Travail (OIT).

Pour appuyer cette affirmation, nous mettons à la disposition de la commission les rapports sur l’affaire Nochixtlán, élaborés par une commission spéciale du Sénat de la République, comme pouvoir souverain et autonome du gouvernement du Mexique, et par la Commission nationale des droits de l’homme, organe constitutionnel autonome, rapports rendus publics respectivement le 31 août 2016 et le 17 octobre 2017.

Il est admis, dans ces deux rapports, que les faits relèvent d’un conflit de nature sociopolitique et qu’ils ont donné lieu à un usage excessif de la force que l’Etat mexicain a reconnu et contre lequel il a pris les mesures nécessaires.

Nous nous déclarons préoccupés que ce type de cas soit utilisé pour tenter de noircir le tableau en dénonçant un prétendu manquement à la convention no 87, alors que rien ne prouve qu’ils sont liés à des violations de la liberté syndicale et à la protection du droit syndical.

Partie 2. Réforme en matière de justice du travail

Ce paragraphe répond aux point soulevés par la commission d’experts dans les commentaires qu’elle a adressés au gouvernement du Mexique, en ce qui concerne: i) la communication de la CSI, reçue le 1er septembre 2017, où il est indiqué que la réforme constitutionnelle a été approuvée sans aucune consultation, de quelque type que ce soit, avec les partenaires sociaux; ii) la consultation tripartite concernant l’état d’avancement des travaux législatifs concernant la mise en application de la réforme de la Constitution; iii) l’état d’avancement de la législation secondaire de mise en application de la réforme constitutionnelle; et iv) l’impact de la réforme constitutionnelle et de la création de l’organe décentralisé.

i) Consultations sur la réforme constitutionnelle. Le gouvernement du Mexique informe que la réforme constitutionnelle a été présentée par le Président de la République dans le cadre du document intitulé «Dialogues pour la justice quotidienne. Observations conjointes et solutions» , établi par le Centro de Investigación y Docencia Económicas, un des centres d’investigation les plus réputés dans le pays. Pour l’élaboration de ce document, neuf tables rondes ont été organisées, dont une dans le domaine du travail, et plus de 200 spécialistes et 26 institutions ont participé aux travaux durant quatorze semaines, 123 séances ayant eu lieu.

Ladite réforme constitutionnelle a été approuvée à l’unanimité par la Chambre des sénateurs, étant approuvée par la Chambre des députés avec 377 voix en faveur et seulement 2 voix contre, soit 99,5 pour cent du total des votes exprimés.

ii) Consultation tripartite pour le développement législatif de la réforme. Cette année, le secrétariat du Travail et de la Prévoyance sociale a organisé 91 réunions avec des représentants des travailleurs, des employeurs, des universitaires, des ordres et des associations d’avocats, en vue de recueillir le consensus nécessaire pour l’approbation de la réforme. De la même manière, les commissions mixtes du travail et de la prévoyance sociale, de la justice et des études législatives (deuxième) du Sénat de la République ont approuvé, le 27 avril 2018, la tenue d’auditions publiques pour prendre connaissance des suggestions, observations et propositions d’organisations de travailleurs, d’employeurs, universitaires et organisations de la société civile sur l’avant-projet d’avis concernant la législation secondaire. Ces auditions publiques auront lieu dans quatre bureaux régionaux où se présenteront les acteurs du monde du travail.

iii) Evolution relative à la législation secondaire. Durant la période écoulée entre l’approbation de la réforme constitutionnelle et la date d’aujourd’hui ont été présentés au Sénat de la République quatre projets de réforme de la législation secondaire en matière de justice du travail: le premier a été présenté le 7 décembre 2017 par les sénateurs Tereso Medina et Isaías González, du Parti révolutionnaire institutionnel; le deuxième a été présenté le 14 décembre 2017 par le sénateur Luis Sánchez, du Parti de la révolution démocratique; le troisième a été présenté le 22 février 2018 par la sénatrice María del Pilar Ortega, du Parti action nationale; et le quatrième a été présenté le 24 avril 2018 par le sénateur Alejandro Encinas Rodríguez, indépendant.

Les projets ont été soumis aux commissions mixtes du travail et de la prévoyance sociale, de la justice et des études législatives (deuxième) pour donner suite au processus législatif, des auditions publiques étant organisées en vue de leur examen et approbation ultérieure.

Au niveau local, neuf entités fédérales ont modifié leur Constitution pour l’harmoniser avec les dispositions de la Constitution fédérale: i) Campeche; ii) Chiapas; iii) Estado de México; iv) Guanajuato; v) Hidalgo; vi) Morelos; vii) Nuevo León; viii) Quintana Roo; et ix) Sonora. De même, deux entités fédérales ont approuvé les lois portant création de centres de conciliation: Chihuahua et Hidalgo.

iv) Impact de la réforme constitutionnelle et de la création de l’organe décentralisé. Il s’agit d’une réforme historique dans le domaine du travail, laquelle transforme le système d’administration de la justice du travail en vigueur depuis plus de cent ans.

Pour ce qui concerne la création de l’organisme public décentralisé pour la conciliation des conflits de compétence fédérale et l’enregistrement national des organisations syndicales et des conventions collectives, le secrétariat du Travail et de la Prévoyance sociale a préparé divers instruments administratifs, organisationnels, technologiques et logistiques pour la mise en œuvre de l’organisme.

Pour la création des tribunaux du travail, le Pouvoir judiciaire de la fédération, quant à lui, a décidé la création de l’Unité de mise en œuvre de la réforme en matière de justice du travail et dispose à cet effet d’un budget de 324 millions de pesos. Au niveau local, la Commission nationale des tribunaux supérieurs et suprêmes de la justice a approuvé, en mai 2017, la mise en place d’une Commission du travail pour donner suite aux travaux de mise en œuvre de la réforme.

Partie 3. Représentativité syndicale et transparence

Le présent paragraphe vise à répondre aux points soulevés par la commission d’experts dans ses observations et dans sa demande directe adressée au gouvernement du Mexique concernant la communication de la CSI, reçue le 1er septembre 2017, signalant: i) le nombre élevé de contrats de protection patronale et la complicité des autorités du travail dans l’enregistrement de ces contrats; ii) les mesures législatives et pratiques visant à régler ce que la CSI a nommé le «phénomène de syndicats et de contrats de protection», y compris pour ce qui est de l’enregistrement des syndicats; iii) la publication des enregistrements et des statuts des syndicats; et iv) l’application du Protocole d’inspection du travail sur la liberté en matière de négociation collective.

i) «Contrats de protection patronale». Nous réitérons notre préoccupation concernant le fait que des observations sont formulées sur la base d’allégations génériques qui ne se réfèrent pas à des cas concrets et ne produisent pas d’éléments objectifs qui permettraient de présumer l’existence d’une pratique «habituelle» portant atteinte à la liberté syndicale et à la négociation collective, et encore moins de présumer de la complicité du gouvernement en faveur d’une telle pratique.

Le gouvernement du Mexique a fourni des informations de manière continue sur les mesures concrètes qui ont été prises pour garantir la représentativité syndicale. Ces mesures sont notamment la réforme constitutionnelle de 2017, qui a été saluée par la commission d’experts, et sa future application, les décisions rendues par la Conférence nationale des secrétaires du travail (CONASETRA), la présentation et l’application du Protocole opérationnel sur la liberté en matière de négociation collective, des mesures que le gouvernement a communiquées à chaque occasion.

Il importe de reconnaître que, s’agissant des cas relatifs à des situations concrètes de violations alléguées liées à l’existence des supposés «contrats de protection», le gouvernement du Mexique a fourni des informations en temps utile, en menant les enquêtes pertinentes et en donnant des informations propres à assurer la justice du travail. Ce point fait l’objet d’un examen dans le cadre du Comité de la liberté syndicale, notamment le cas no 2694.

A cet égard, dans son 382e rapport de juin 2017 (paragr. 128 à 130), le Comité de la liberté syndicale a décidé de ne pas poursuivre l’examen de l’allégation faisant état d’une généralisation des contrats collectifs de protection patronale. Il a au contraire décidé de se pencher uniquement sur l’analyse d’allégations concrètes concernant des secteurs et des syndicats spécifiques, ainsi que des situations concrètes où l’existence présumée de contrats de protection est alléguée.

ii) Mesures législatives et pratiques visant à régler le «phénomène de syndicats et de contrats de protection». Afin de repérer des pratiques de faux contrats et de vérifier que les travailleurs connaissent la convention collective applicable, depuis 2016 le Protocole d’inspection du travail sur la libre négociation collective est appliqué, qui permet aux inspecteurs du travail de vérifier que la convention collective a été portée à la connaissance des travailleurs et que la relation de travail se déroule dans les termes et conditions conclus.

Pour ce qui concerne la législation, il convient de souligner que, en vertu de la réforme constitutionnelle en matière de justice du travail, un paragraphe a été ajouté au point XVIII de l’article 123(A), au titre duquel la représentativité des travailleurs est garantie.

De même, un point supplémentaire (XXIIbis) a été ajouté audit article pour garantir les principes de représentativité des organisations syndicales ainsi que la signature, l’enregistrement et le dépôt des conventions collectives. Il est également précisé que le vote des travailleurs est personnel, libre et secret lorsqu’il s’agit de la résolution de conflits entre syndicats, de la demande de convention collective et de l’élection de représentants syndicaux.

iii) Publication des enregistrements et des statuts des syndicats. Au titre des avancées, au 30 avril 2018, des informations relatives aux 3 422 organisations syndicales (syndicats, fédérations et confédérations) enregistrées de compétence fédérale ont été publiées dans le «Système de consultation des organisations syndicales». A ce jour, 254 512 recherches ont été effectuées dans le système.

Concernant les enregistrements au niveau local, il convient de souligner que les conseils de conciliation et d’arbitrage s’acquittent de leurs obligations en matière de transparence, au moyen des différents mécanismes énoncés au point V de l’article 124 de la loi générale en matière de transparence et d’accès à l’information publique. Ces obligations seront du ressort de l’organisme public décentralisé après approbation et entrée en vigueur de la législation secondaire, conformément aux dispositions de la réforme constitutionnelle, au regard notamment des principes de transparence et de publication dont il devra faire preuve.

iv) Application du Protocole d’inspection du travail sur la liberté en matière de libre négociation collective. Depuis la date d’entrée en vigueur du protocole et jusqu’à avril 2018, il a été procédé à 196 inspections, suivies de 528 mesures techniques, au profit de 68 285 travailleurs.

Partie 4. Dispositions législatives et mesures pratiques observées par la commission d’experts

Le présent paragraphe vise à répondre aux points soulevés par la commission d’experts dans ses observations adressées au gouvernement du Mexique concernant: i) le pluralisme syndical et la réélection de dirigeants syndicaux; ii) les mesures prises pour modifier l’article 372 II de la loi fédérale sur le travail; iii) les informations sur la possibilité, pour les étrangers, d’accéder aux fonctions de dirigeant syndical.

i) En matière de pluralisme syndical dans les services de l’Etat et de réélection de dirigeants syndicaux, le gouvernement du Mexique fait savoir que, de 2013 à ce jour, cinq projets de réforme en matière de pluralisme syndical et deux en matière de réélection des dirigeants syndicaux au sein d’organisations de travailleurs au service de l’Etat ont été présentés au Congrès de l’Union, sans qu’aucun ait été encore adopté. Cependant, il est nécessaire de préciser que le Tribunal fédéral de conciliation et d’arbitrage, garant de l’autonomie syndicale, a systématiquement accordé la reconnaissance (toma de nota) correspondante dès lors qu’il est notifié d’un changement au sein de la direction d’un syndicat.

ii) En ce qui concerne l’observation qui entend modifier l’article 372 de la loi fédérale sur le travail, le gouvernement du Mexique redit que l’interdiction faite aux étrangers de participer à la direction de syndicats n’est pas appliquée dans la pratique. De plus, pareil cas ne s’est jamais produit et aucune plainte ni réclamation n’ont été formulées sur ce point. Au contraire, certains statuts de syndicat reconnaissent expressément que les étrangers peuvent participer à leur direction.

En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental a réaffirmé l’engagement du Mexique en faveur du dialogue social et présenté les avancées réalisées sur les points soulevés par la commission d’experts. En ce qui concerne les allégations faisant état de violences à l’encontre de syndicalistes du secteur de l’éducation, lors des affrontements du 19 juin 2016 qui se sont produits à Asunción Nochixtlán, dans la province d’Oaxaca, tout en regrettant et condamnant les faits survenus, l’orateur a catégoriquement nié que ces actes constituent des actes de violence à l’encontre de syndicalistes et une violation de la convention. Sur la base des rapports élaborés par une commission spéciale du Sénat de la République et de la Commission nationale des droits de l’homme, respectivement publiés les 31 août 2016 et 17 octobre 2017, et regrettant que des faits de cette nature soient utilisés pour appeler l’attention de la commission, l’orateur a souligné que les faits relèvent en réalité d’un conflit à caractère sociopolitique et non d’un conflit syndical. En effet, aucun des deux rapports précités n’a établi l’existence d’une relation de cause à effet entre les actes de violence et une éventuelle restriction à la liberté syndicale ou le fait que les victimes étaient syndiquées. En ce qui concerne la réforme constitutionnelle du système de justice du travail, l’orateur a salué le fait que, dans son rapport, la commission d’experts a reconnu l’importance de cette réforme, entrée en vigueur en février 2017. Il s’agit d’une transformation historique qui établit un nouveau paradigme en matière de justice du travail au Mexique, fondé sur un large processus consultatif. Sa mise en œuvre, au niveau local, progresse de manière homogène dans les Etats de la République, dont nombre ont déjà modifié leur Constitution afin de l’harmoniser avec les dispositions de la Constitution fédérale; deux Etats ont adopté des lois portant création d’un centre de conciliation. Afin d’élaborer la législation secondaire en matière de justice du travail, le Sénat analyse quatre propositions présentées par des groupes parlementaires de différents bords, en veillant particulièrement à ce que l’élaboration de cette législation secondaire soit ouverte à tous, acteurs du secteur du travail et organisations de la société civile. Le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale a quant à lui commencé à mettre au point neuf outils visant à faciliter la création des organismes publics décentralisés aux niveaux fédéral et local. Au niveau fédéral, un organisme sera chargé d’assurer le service de conciliation auquel travailleurs et employeurs devront s’adresser avant toute procédure en justice, afin de pouvoir régler les différends rapidement. Cet organisme sera également chargé d’enregistrer les organisations syndicales et les conventions collectives ainsi que de conduire les procédures administratives y afférentes au niveau national. Le nouveau mandat prévu par la Constitution renforce également le pouvoir judiciaire fédéral et les tribunaux supérieurs de justice des Etats de la République, compétents en matière de différends de travail collectifs et individuels, au moyen de la création de tribunaux du travail. Dans le respect du mandat établi, le secrétariat au Travail a lancé une analyse des dossiers du Conseil fédéral de conciliation et d’arbitrage et de chaque conseil de conciliation et d’arbitrage des 32 Etats du pays. Le pouvoir judiciaire de la fédération a créé l’Unité de mise en œuvre de la réforme en matière de justice du travail, en vue de créer les tribunaux du travail. A cette fin, il dispose d’un budget de 324 millions de pesos pour 2018. Au niveau local, la Commission nationale des tribunaux supérieurs et des cours suprêmes de justice a décidé de créer une commission du travail chargée de donner suite aux activités de mise en œuvre de la réforme.

En ce qui concerne les observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), du 1er septembre 2017, signalant un nombre élevé de contrats de protection patronale et la complicité des autorités du travail dans leur enregistrement, le gouvernement a redit sa préoccupation quant au fait que ces observations sont fondées sur des allégations générales et non sur des cas concrets. Il a également souligné son attachement à la justice du travail, que reflète l’adoption de nouvelles lois et de mesures concrètes qui visent à garantir la représentativité syndicale. Dans les cas où ont été dénoncées des situations concrètes de violations présumées et liées à l’existence des «contrats de protection», le gouvernement a toujours agi en concertation, mené les enquêtes nécessaires et fourni les informations propres à assurer la justice du travail. Rappelant que les allégations de la CSI ont été présentées dans le cadre des travaux du Comité de la liberté syndicale, en particulier en ce qui concerne le cas no 2694, l’orateur a réaffirmé que le gouvernement tient à continuer de fournir au comité des informations sur les allégations faisant état de situations concrètes. En outre, le gouvernement fournira à la commission d’experts les dernières informations disponibles sur les mesures législatives prises pour donner effet à la réforme constitutionnelle, ainsi que sur les mesures concrètes engagées pour garantir la représentativité syndicale et la libre négociation collective. En ce qui concerne les dispositions relatives à la transparence syndicale qui découlent de la réforme de la loi fédérale du travail de 2012, l’orateur a indiqué que, au 30 avril 2018, l’enregistrement de 3 422 organisations syndicales (syndicats, fédérations et confédérations) avait été publié dans le «Système de consultation des organisations syndicales». A ce jour, le système a reçu plus d’un demi million de visites. Afin de repérer des pratiques de faux contrats et de vérifier que les travailleurs connaissent la convention collective applicable, depuis 2016 le Protocole d’inspection du travail sur la libre négociation collective est appliqué, qui permet aux inspecteurs du travail de vérifier que la convention collective a été portée à la connaissance des travailleurs et que la relation de travail se déroule dans les termes et conditions conclus. En matière de pluralisme syndical dans les services de l’Etat et de réélection de dirigeants syndicaux, le gouvernement fait savoir que, de 2013 à ce jour, cinq projets de réforme en matière de pluralisme syndical et deux en matière de réélection des dirigeants syndicaux au sein d’organisations de travailleurs au service de l’Etat ont été présentés au Congrès de l’Union. Trois de ces projets sont à l’étude au congrès. En ce qui concerne le dernier point des observations de la commission d’experts, dans laquelle celle-ci demande au gouvernement de prendre des mesures pour modifier l’article 372 de la loi fédérale du travail afin d’éliminer l’interdiction faite aux étrangers d’occuper des postes de direction au sein d’un syndicat, il a été rappelé que cette interdiction n’est pas appliquée dans la pratique, puisque la nationalité mexicaine n’est pas un préalable à l’enregistrement des membres de la direction d’un syndicat. De plus, il n’y a jamais eu ni cas concret ni plainte ou réclamation à ce propos. Au contraire, certains statuts de syndicat reconnaissent expressément que les étrangers peuvent occuper des postes de direction.

Les membres travailleurs ont indiqué que le non-respect répété de la convention par le gouvernement a conduit la commission à examiner ce cas à trois reprises ces dernières années. Lors du dernier examen en 2016, la commission a appelé le gouvernement à adopter les réformes de la Constitution et de la loi fédérale du travail proposées et à renforcer le dialogue social en adoptant une législation complémentaire. Ils ont rappelé que leurs critiques concernent les syndicats de protection, qui sont des syndicats dominés par les employeurs et qui portent atteinte au système de relations de travail au Mexique. Ces syndicats ont négocié «des contrats de protection par l’employeur», sans la participation des travailleurs et sans même les informer que ce syndicat est censé les représenter. Ces contrats fixent de faibles salaires et «protègent» les employeurs contre la mise en place de syndicats indépendants sur le lieu de travail. L’aspect tragique de cette situation est que des millions de travailleurs mexicains ne disposent pas de moyens efficaces pour défendre leurs droits au travail. Une fois qu’un syndicat de protection a été mis en place, il est extrêmement difficile pour les travailleurs de former un syndicat indépendant. Et lorsque des travailleurs tentent de se débarrasser eux-mêmes d’un syndicat de protection par une élection («recuento»), il y a souvent collusion entre l’employeur, le syndicat de protection et le gouvernement pour intimider les travailleurs au moyen de retards, menaces verbales, violence physique et licenciements. La situation reste la même. Comme l’a indiqué la commission d’experts en février 2017, le gouvernement a adopté des réformes significatives de la Constitution qui donnaient suite à certaines grandes questions soulevées par l’OIT et le Mouvement syndical mondial. On pouvait alors espérer certains changements. Cependant, comme l’a aussi indiqué la commission d’experts, le gouvernement doit encore adopter une législation complémentaire. Malheureusement, les propositions présentées par le gouvernement affaiblissent la lettre et l’esprit de la Constitution et de la convention. Pendant une grande partie de l’année 2017, le gouvernement a élaboré à huis clos, avec des chefs d’entreprise, des modifications à la législation du travail, visiblement pour donner effet à la réforme constitutionnelle, sans consulter les responsables de syndicats indépendants pendant le processus. Début 2018, le congrès a rejeté un projet de loi que le gouvernement a malgré tout tenté de faire adopter lors d’une session extraordinaire du congrès en juin 2018. Bien que le gouvernement indique avoir mené des consultations, la seule proposition encore à l’examen est ce projet de loi rejeté par le congrès, ce qui démontre que le gouvernement a capitulé devant les intérêts cachés, notamment des confédérations syndicales de protection, dont les responsables ont présenté le texte de loi au Sénat. Les membres travailleurs ont abordé leurs préoccupations point par point, à commencer par les conseils de conciliation et d’arbitrage, largement critiqués depuis de nombreuses années pour leur inefficacité, leur parti pris politique et leur corruption. La réforme constitutionnelle a été proposée pour supprimer ces conseils et: i) transférer les fonctions juridiques de ces conseils au pouvoir judiciaire, en prévoyant un processus de conciliation mené par des centres «spécialisés et impartiaux» de conciliation aux niveaux fédéral et local, avant que les affaires ne soient renvoyées devant les tribunaux; ii) transférer les fonctions administratives de ces conseils, par exemple pour l’enregistrement des syndicats, à la nouvelle entité fédérale décentralisée et autonome, dont le président serait désigné par un vote du Sénat. Le projet de loi actuellement devant le Sénat propose de créer: i) un nouvel Institut fédéral de conciliation au travail et d’enregistrement; ii) un nouveau «conseil technique» qui aurait des pouvoirs étendus sur le programme, le budget et le personnel. Si l’indépendance de l’institut fédéral pouvait mettre fin à la mainmise des syndicats de protection sur les procédures d’enregistrement des syndicats, la négociation collective et les conflits collectifs, le contrôle tripartite proposé par l’intermédiaire du conseil technique passerait par les mêmes syndicats de protection qui ont perpétué les contrats de protection via les conseils de conciliation et d’arbitrage. En outre, le secrétaire du Travail a indiqué que les tribunaux du travail indépendants ne seraient pas opérationnels tant que les conseils de conciliation et d’arbitrage n’auront pas statué sur toutes les affaires en suspens. Ces affaires se comptent par milliers et il faudrait des années pour en venir à bout. Dans l’attente, les syndicats indépendants continueront de pâtir du système corrompu actuel et devront attendre des années pour voir la promesse d’une justice du travail neutre se réaliser. Cela compromet les engagements précédemment pris pour assurer une transition rapide vers le nouveau système constitutionnel de justice du travail. Une autre préoccupation concerne la proposition contenue dans le projet de loi selon laquelle une convention collective prendrait automatiquement effet si l’institut fédéral ne se prononce pas sur l’enregistrement d’une convention collective dans les vingt jours. Cela permettrait aux employeurs de disposer d’un mécanisme d’enregistrement des conventions collectives qui ne respecte pas les nouvelles prescriptions légales. Et cela permettrait aux employeurs de poursuivre leur collusion avec les «syndicats de protection» de leur choix, plutôt que de s’engager de bonne foi dans la négociation avec des syndicats indépendants.

Le second problème que pose ce projet de loi concerne la soi-disant procédure de recuento. Le projet rend pratiquement impossible pour les travailleurs de remplacer des syndicats non représentatifs par voie de scrutin, car il impose de satisfaire à des exigences en matière de preuves via un long processus administratif, avant même qu’une date n’ait été accordée pour le vote, ce qui rend le processus inutilement contraignant. Comme cette procédure est le seul moyen pour les travailleurs d’établir un syndicat indépendant lorsqu’un syndicat illégitime existe déjà, la nouvelle procédure permettrait à des syndicats non démocratiques de continuer de leur refuser la possibilité de choisir leurs représentants. Dans la mesure où le nouvel institut serait contrôlé par les employeurs et des syndicats de protection, les travailleurs ont aussi de bonnes raisons de craindre que les employeurs se livreront à des représailles et à des licenciements. Troisièmement, au Mexique, la loi générale sur la transparence et l’accès à l’information publique prévoit la publication des certificats d’enregistrement des syndicats et de leurs statuts. Les travailleurs et le grand public peuvent accéder aux informations relatives aux syndicats, y compris en ce qui concerne leur structure interne, leurs responsables et toutes conventions collectives existantes. Cette transparence est essentielle pour garantir l’accès des travailleurs aux informations relatives aux entités qui prétendent les représenter et à toute convention susceptible d’avoir été conclue par ces entités avec les employeurs. Il s’agit d’un outil fondamental pour lutter contre les syndicats de protection. Le gouvernement a indiqué avoir progressé dans ce domaine, en avançant un taux de conformité de 85 pour cent. Si ce chiffre est exact, cela constituerait un réel progrès. Le projet de loi affaiblira néanmoins considérablement les dispositions relatives à la transparence, notamment en ce qui concerne l’exigence de diffuser des informations sur l’enregistrement des syndicats et les conventions collectives existantes, et de continuer à priver la plupart des travailleurs mexicains couverts par des conventions collectives du droit d’en obtenir une copie. Quatrièmement, dans le cadre de la réforme constitutionnelle, les travailleurs doivent approuver les conventions collectives par un vote à bulletin secret. Cette mesure a été introduite pour s’assurer qu’aucune convention ne sera signée sans que les travailleurs concernés en aient pris connaissance et sans leur consentement. Toutefois, le projet de texte d’application ne prévoit pas d’exiger que des inspecteurs vérifient que les travailleurs ont approuvé la convention collective par un vote à bulletin secret. Le texte ne contient qu’une disposition qui exige vaguement que les entités prétendant représenter les travailleurs doivent démontrer qu’ils bénéficient d’un appui, sans énoncer de critères spécifiques en la matière. La proposition accorde aussi à l’institut un vaste pouvoir discrétionnaire pour déterminer s’il existe ou non des éléments démontrant un tel appui. Ces dispositions sont d’autant plus préoccupantes que la législation du travail actuelle dispose que les conventions collectives sont automatiquement renouvelées si aucune des parties n’en demande la modification. Ces règles s’appliquent de la même manière aux contrats de protection et permettraient donc de contourner les exigences minimales en matière de représentation. Mais la question des syndicats de protection et l’absence de législation secondaire ne sont pas les seuls problèmes. Comme l’a de nouveau indiqué la commission d’experts, la prévalence d’une violence antisyndicale est source de profonde préoccupation. D’autres actes de violence antisyndicale ont été commis depuis la dernière session de la commission d’experts. En novembre 2017, des travailleurs miniers se sont mis en grève pour réclamer leur droit d’adhérer à un syndicat légitime et démocratique. Des dizaines d’agents de police ont investi la mine. Un groupe armé a attaqué les grévistes dans l’enceinte de la mine et deux syndicalistes ont été tués. En janvier 2018, un militant syndical qui avait fait le voyage pour rencontrer les grévistes a été frappé et menacé d’autres actes de violence s’il continuait à soutenir la création d’un nouveau syndicat et d’un nouveau contrat. Il a été assassiné le mois dernier. Enfin, les amendements de 2012 à la législation du travail ont eu pour effet d’étendre considérablement le recours à la sous-traitance, bien que la loi dispose que les entreprises ne peuvent pas externaliser la tâche d’un travailleur affecté à des fonctions essentielles de l’entreprise. En dépit de ce processus illégal, le gouvernement n’a rien fait pour mettre fin à ces pratiques. Le recours à la sous-traitance est une tactique courante pour empêcher les travailleurs de s’affilier à un syndicat ou pour démanteler les syndicats en remplaçant la main-d’œuvre par des travailleurs sous contrat. Les membres travailleurs ont instamment prié le gouvernement de retirer la proposition existante. Des élections nationales devant bientôt se tenir, le prochain gouvernement devra statuer sur la question après consultation de toutes les parties prenantes, de sorte que l’on tienne compte de leur point de vue.

Les membres employeurs ont déclaré que ce cas a déjà été examiné à trois reprises, notamment en 2015 et en 2016. Les progrès accomplis par le gouvernement avaient alors été soulignés avec l’espoir qu’une réforme constitutionnelle serait approuvée. Cette réforme qui a été réalisée a entraîné des changements. La commission examine le cas du Mexique eu égard à la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais l’Etat n’a pas ratifié la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Certains aspects de ce cas sont en lien avec la liberté d’association et de constitution des syndicats. Cela étant, la commission de la Conférence, compte tenu des observations de la commission d’experts, doit se montrer prudente dans la manière de traiter le cas et ne pas donner d’orientations sur une norme qui n’a pas été ratifiée. Il en va de même en relation avec les articles 2 et 3 de la convention, qui sont des dispositions assez générales, et sur lesquelles la commission d’experts est entrée dans toute une série de détails qui pourraient dépasser le cadre de ces dispositions. L’article 2 dispose que les travailleurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières; et l’article 3 dit que les organisations de travailleurs ont le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action. Tel est le cadre dans lequel doit s’inscrire la discussion de ce cas. En premier lieu, les organisations qui examinent le présent cas sont des organisations internationales et ne sont pas les organisations de travailleurs du Mexique. Par conséquent, il faut garder à l’esprit que la vision de la situation du pays peut être de nature plus globale par rapport à la façon dont les partenaires sociaux fonctionnent au niveau interne, à savoir les organisations syndicales. En ce qui concerne la question des libertés publiques et des droits syndicaux, les membres employeurs condamnent tout acte portant atteinte à la vie humaine. Cela dit, dans le cadre de l’OIT, il faut qu’il y ait un lien avec la liberté syndicale. Dans sa réponse, le gouvernement a déclaré que deux commissions spéciales ont vérifié que les actes ne sont pas d’origine syndicale, mais qu’il s’agit d’un conflit de nature sociopolitique et d’un usage excessif de la force, ce qui a été reconnu par les pouvoirs publics qui ont pris les mesures qui s’imposent. En conséquence, il s’agit d’un cas qui, s’il est regrettable sur le plan de la vie humaine, ne doit pas être approfondi et analysé plus avant par la Commission de la Conférence ni par la commission d’experts ni par tout autre organe de contrôle de l’Organisation.

En deuxième lieu, s’agissant de la conciliation, de l’arbitrage et de la justice du travail, la réforme constitutionnelle établit que ce sera la branche du pouvoir public correspondant qui traitera une série de points, la commission d’experts ayant noté «avec satisfaction» son adoption et son entrée en vigueur. A cet égard, il est important de rappeler ce que signifie «prendre note avec satisfaction», car ce n’est pas fréquent et cela revêt beaucoup d’importance pour l’Organisation. La commission d’experts prend note avec satisfaction dès lors que le gouvernement prend des mesures, que ce soit en adoptant une nouvelle législation ou en modifiant la législation existante, ou qu’il procède à des changements significatifs de la politique ou de la pratique nationales. De même, la commission d’experts exprime sa satisfaction lorsqu’elle indique aux gouvernements et aux partenaires sociaux que le problème a été réglé et que cela peut servir de modèle ou d’exemple pour d’autres Etats. Cette réforme offre une sécurité juridique pour les raisons suivantes: 1) la justice du travail sera rendue par des organes du pouvoir judiciaire fédéral ou local; 2) les processus de conciliation seront plus souples et efficaces; 3) l’instance fédérale de conciliation sera un organisme décentralisé; 4) une nouvelle législation sera adoptée relative, à la procédure et aux organes décentralisés dans le cadre de la conciliation. Comme l’a signalé le représentant gouvernemental, c’est ce qui se passe au Mexique où le congrès envisage une série d’initiatives législatives. Bien évidemment, il est bon que des consultations aient lieu sur tous ces changements législatifs. Dans les dernières conclusions de la commission sur ce cas, il est demandé qu’un vaste dialogue social soit engagé sur cette question. A cet égard, le gouvernement a fait état de la décision du congrès d’organiser des auditions au niveau régional dans quatre forums, avec une large participation, indiquant que la réforme déjà en vigueur a fait l’objet d’une large discussion. Les membres employeurs veulent croire que ces réformes seront dûment poursuivies.

En troisième lieu, concernant la représentativité syndicale et les contrats de protection, les membres employeurs ont indiqué qu’il faut être très prudent. Une chose est de constituer des syndicats qui puissent être considérés comme des syndicats de protection, à savoir qui détiennent en exclusivité de la prérogative de la négociation collective, et une autre les négociations collectives pour la protection. Il ne convient pas de faire référence à ce deuxième point, étant donné qu’il relève de la convention no 98, qui n’a pas été ratifiée par l’Etat mexicain. Par ailleurs, la commission d’experts, à l’époque, a pris note avec intérêt de toute une série de propositions, étant donné la modification de la loi fédérale du travail qui a eu lieu en 2012. A cet égard, la commission d’experts a demandé au gouvernement qu’il indique les raisons pour lesquelles il n’avait pas envoyé d’informations plus détaillées. Si le gouvernement n’a pas répondu, et il serait bon qu’il le fasse dans sa deuxième intervention, peut-être est-ce dû au fait qu’il n’a pas ratifié la convention no 98. Les membres employeurs, soulignant qu’il ne faut pas se tromper d’approche, ont exprimé leur désaccord avec la commission d’experts qui a pris note avec préoccupation des observations de la CSI concernant d’autres points qui sont décrits de manière générale et à propos desquels il serait intéressant d’en connaître un peu plus, dès lors que des informations supplémentaires pourraient aboutir à une conclusion différente. En attendant, cela ne justifie pas une demande d’informations supplémentaires à ce sujet. Quant à la publication de l’enregistrement des organisations syndicales, le gouvernement indique qu’un nouveau système d’information est à l’œuvre, lequel indique, de façon détaillée, le nombre de syndicats qui existent au Mexique. Le gouvernement donne par ailleurs une réponse adéquate à une demande, formulée en son temps, qui figure dans le document D.10. Concernant le pluralisme syndical et la réélection de dirigeants syndicaux, la commission d’experts se réfère à des dispositions législatives qui pourraient ne pas être conformes avec la convention. Or il est indiqué, tant dans les commentaires de la commission d’experts que dans la réponse du gouvernement, qu’en vertu de la jurisprudence de la Cour suprême de justice, ainsi que des us et coutumes, ces normes ne sont pas applicables. C’est un peu comme les normes obsolètes de l’OIT qui n’ont pas été abolies. Certaines normes ont été abolies l’année dernière, et d’autres cette année. Pour autant, le Groupe Cartier a identifié près de 65 lois obsolètes qui sont en vigueur, mais non applicables. Par conséquent, le concept de non-applicabilité, qui est examiné dans cette Organisation, devrait être aussi examiné pour les Etats Membres, et c’est la réponse que donne le gouvernement. Il n’y a pas d’atteinte à la liberté syndicale si certaines normes existantes ne s’appliquent pas, ce que les organes mêmes du pouvoir judiciaire de l’Etat du Mexique reconnaissent. Qui plus est, c’est un fait reconnu par le gouvernement qui informe qu’il s’agit de l’élection libre de représentants syndicaux, à savoir de nationalité étrangère, déclarant qu’il n’y a eu aucun cas concret ni aucune plainte à ce propos. Le gouvernement déclare en outre que des syndicats reconnaissent dans leurs statuts la possibilité pour les étrangers d’occuper des postes de direction. A cet égard, les membres employeurs se demandent pourquoi se préoccuper de changer une législation qui n’est pas applicable; si elle n’est pas applicable, on peut être sûr qu’au Mexique cette liberté est largement utilisée comme le reconnaissent les organisations comme la CSI, IndustriALL et la commission même lorsqu’elle examine ces cas. C’est la raison pour laquelle ces demandes concernant le nombre d’étrangers appartenant à des syndicats et leurs fonctions peuvent être jugées excessives dès lors que le gouvernement a déclaré qu’il n’y a pas un seul cas de réclamation. Cette demande, probablement faite à l’intention d’observateurs internationaux, n’a pas de sens dans la pratique où ce problème n’existe pas. Les membres employeurs ont estimé que, dans l’examen de ce cas, certains points soulevés ont été réglés, ce qui aurait mérité d’être accueilli avec satisfaction. Ils ont déclaré que l’orientation donnée par le gouvernement à sa réforme législative est la bonne, dépassant les attentes, situation qui depuis longtemps suscitait la préoccupation de la commission, notamment dans le cas no 2694 du Comité de la liberté syndicale.

Le membre employeur du Mexique a remercié le gouvernement pour les informations qu’il a communiquées sur les sujets abordés par la commission d’experts, et, tout en regrettant le manque d’informations objectives de la part des membres travailleurs, a déclaré qu’il n’y a ni cas de harcèlement ni licenciement dans son pays, que plus de 20 millions de travailleurs y opèrent dans l’économie formelle, couverte par la négociation collective, et que, malgré les problèmes, la paix sociale y règne. La commission d’experts a jugé la réforme satisfaisante et n’a suscité aucune opposition ouverte à l’échelle du pays. La réforme de la loi fédérale du travail a été menée à bien en 2012, tandis que la réforme constitutionnelle a eu lieu entre 2015 et 2017. Les textes d’application sont actuellement devant le Sénat, dans le cadre de l’examen de différents projets de loi présentés par divers bords. Conformément au cadre constitutionnel, des forums de discussion et des consultations ont été organisés, et il a été décidé de convoquer des auditions publiques dans le respect du dialogue social et en réponse à la demande expresse formulée par la Commission de la Conférence en 2016. Des éléments complexes et ambitieux ont été ajoutés sur les sujets suivants: la justice du travail, la transparence des syndicats et de la négociation collective; et l’octroi du vote à bulletin secret pour les travailleurs. Les changements en cours exigent des mesures d’ordre législatif, budgétaire et matériel, ainsi que la tenue d’activités de formation et de formation professionnelle. Quant à l’enregistrement des syndicats et des conventions collectives, la réforme prévoit qu’il revient à un organisme public décentralisé, dirigé par une personne proposée par le pouvoir exécutif et acceptée par le Sénat, ce qui le rendrait entièrement autonome. De la même manière, des organismes de conciliation seront créés dans les entités fédérales en vue d’un règlement efficace des différends et dans le respect de la convention. Le remplacement des conseils de conciliation et d’arbitrage par des tribunaux relevant du pouvoir judiciaire répond à une proposition de la Commission de la Conférence. La réforme constitutionnelle prévoyait un délai d’un an pour l’adoption des textes d’application, délai désormais échu. Cependant, certains éléments sont entrés en vigueur dès le lendemain de la publication de la réforme, par exemple l’obligation d’établir la représentation des travailleurs pour conclure des contrats collectifs, tel que prévu à l’article 123, point XXII bis de la Constitution. Cet article dispose que les procédures et les conditions fixées par la loi pour garantir la liberté de négociation collective et défendre les intérêts légitimes des travailleurs et des employeurs doivent préserver: a) les principes de représentativité des organisations syndicales; et b) l’authenticité de la signature, de l’enregistrement et du dépôt des conventions collectives. En outre, pour ce qui concerne le règlement des conflits entre syndicats, la demande d’adoption d’une convention collective ou l’élection des dirigeants syndicaux, le vote des travailleurs est personnel, libre et secret. Le pouvoir judiciaire et la réforme devraient être conformes aux dispositions constitutionnelles établies. Cette situation doit être un exemple pour d’autres pays et, même s’il serait préférable que le processus législatif soit achevé, il est encore en cours du fait de sa complexité. Il convient d’encourager le gouvernement à terminer les travaux en suspens et de reconnaître les avancées réalisées. Le cas en question devrait être traité dans les conclusions de cette commission comme étant un cas de progrès.

Un membre travailleur du Mexique a signalé combien il est important de rappeler le contexte dans lequel s’inscrit l’examen de la réforme du travail au Mexique. Il convient de souligner que deux réformes importantes ont été menées: la réforme du travail de 2012, et la réforme constitutionnelle entrée en vigueur en 2017. Cette dernière est le fruit d’une série de consultations menées précédemment par le Centre d’investigation et d’études économiques (CIDE), à la demande expresse de l’exécutif fédéral, auprès de juristes spécialisés, d’universitaires et d’un échantillon représentatif de la société civile. Toutefois, les organisations de travailleurs n’y ayant pas été associées, elles n’y ont pas participé, raison pour laquelle leurs avis n’ont pas été pris en compte. En avril 2016, à la suite de ces consultations, le Président de la République a adressé au Congrès de l’Union un projet de loi sur la «justice du quotidien», qui modifie en profondeur la Constitution, notamment en ce qui concerne le travail. L’orateur a rappelé que, en 2016 déjà, il avait dénoncé ces réformes et dit sa préoccupation concernant différents éléments qu’elles contiennent, notamment: a) le fait que la justice du travail relève du pouvoir judiciaire fédéral ou local, ce qui rompt l’équilibre social garanti par le tripartisme; b) le recours à la conciliation comme procédure préjudicielle obligatoire, par l’intermédiaire de centres de conciliation spécialisés et autonomes; et c) la création d’un organisme décentralisé chargé de l’enregistrement des conventions collectives et des organisations syndicales, en sus de la conciliation au niveau fédéral, dont le titulaire est désigné par l’exécutif fédéral. Au terme de cette série de modifications, la réforme constitutionnelle a été approuvée à l’unanimité le 13 octobre 2016, ce qui a marqué un tournant sans précédent dans l’histoire du droit du travail au Mexique. La réforme du travail proposée plus récemment découle de la réforme constitutionnelle susmentionnée. Il convient de ne pas oublier que des consultations ont été annoncées le 27 avril 2018 par le Sénat. Il incombe aux organisations syndicales et à leurs dirigeants de passer de manière responsable et éclairée au nouveau modèle de justice du travail, afin d’offrir aux personnes qu’ils représentent une véritable sécurité juridique dans la défense de leurs droits. En conclusion, le gouvernement est instamment prié de donner toutes les garanties pour que la loi fédérale du travail soit le fruit de la concertation et du dialogue entre les acteurs du tripartisme.

Un autre membre travailleur du Mexique a rappelé que la modification de l’article 123 de la Constitution est entrée en vigueur le 24 février 2017. Cette réforme donne suite à plusieurs recommandations: transférer la justice du travail de l’exécutif au pouvoir judiciaire, en supprimant les conseils de conciliation et d’arbitrage et en créant des tribunaux du travail; rendre la procédure de conciliation obligatoire avant de saisir les tribunaux du travail et créer un organe décentralisé au niveau fédéral, chargé d’assurer la fonction de conciliation, l’enregistrement de toutes les conventions collectives et des organisations syndicales, ainsi que de conduire toutes les procédures administratives y afférentes. L’orateur s’est toutefois déclaré préoccupé par le retard pris dans la réforme du texte d’application de cet article 123, qui devait être menée avant le 24 février 2018. Le délai a donc expiré sans que le gouvernement se soit dûment penché sur ce point, laissant une vive incertitude en ce qui concerne la justice du travail et la réalité de la situation. En avril 2018, le Sénat a conclu un accord avec les partenaires sociaux, mais après les délais impartis. Il est inquiétant que le gouvernement n’ait pas pris les mesures nécessaires pour engager le processus de mise en conformité de la législation. Enfin, l’orateur a demandé au nouveau gouvernement, issu d’un vote démocratique et populaire, d’adopter les mesures nécessaires pour adapter la législation du travail aux principes établis dans la convention et de se conformer aux observations de la commission d’experts en vue d’éliminer les pratiques indues qui portent préjudice aux travailleurs mexicains et de mettre un terme à la persécution des dirigeants syndicaux et à la mort de travailleurs.

Un troisième membre travailleur du Mexique a indiqué que, après presque trente ans d’application de politiques néolibérales par les organismes financiers du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque mondiale et de la Commission trilatérale, les conditions de travail des travailleurs du monde entier se sont précarisées, et le Mexique n’est pas une exception. Il a dénoncé le recours abusif à la sous-traitance, qui fragilise non seulement l’application de la convention, mais aussi la Constitution mexicaine et les droits de l’homme, et ce chaque fois que sont refusés le droit d’organisation, le droit à la négociation collective ou le droit de grève. Conformément à la Constitution nationale, les Mexicains ont droit à la santé, à une alimentation nutritive, au logement, à la culture, au sport, à l’éducation et au travail socialement utile. La sous-traitance en tant que telle transgresse ces droits. Certains dirigeants de micro, petites et moyennes entreprises nationales respectent l’ensemble des obligations prévues en termes de prestations du travail et de sécurité sociale, alors que d’autres ne le font pas. L’abus de la sous-traitance crée des problèmes sociaux qui ne manqueront pas de s’accroître dans un avenir proche, en particulier en ce qui concerne les pensions, car, faute de cotisations à la sécurité sociale, les générations futures n’auront pas droit au logement, à la santé et à une retraite digne. La sous-traitance permet également de mettre les machines utilisées au nom d’une autre entreprise afin d’éviter que, en cas de conflit du travail, les travailleurs puissent bénéficier des indemnisations auxquelles ils ont droit au regard de la loi.

La membre gouvernementale du Paraguay, s’exprimant au nom d’une grande majorité des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, se félicite des informations communiquées par le gouvernement ces dernières années au sujet des actions menées et des mesures adoptées pour répondre aux observations de la commission d’experts. A ce sujet, en 2016, la commission d’experts a noté avec satisfaction l’adoption et l’entrée en vigueur de la réforme constitutionnelle, qui vise, entre autres mesures, à confier la justice du travail aux organes du pouvoir judiciaire indépendants du pouvoir exécutif. Cette réforme avait également comme objectif de renforcer l’instance de conciliation et de créer un organisme autonome chargé, à l’échelle nationale, de l’enregistrement des conventions collectives et des syndicats. De même, le gouvernement donne des informations sur les processus de consultation et les tables rondes organisés pour élaborer les réformes législatives qui permettent de donner pleinement effet à la réforme constitutionnelle, en particulier l’accord du Sénat concernant l’organisation d’auditions publiques afin de connaître les suggestions, les observations et les propositions des travailleurs, des employeurs, du corps enseignant et des organisations de la société civile sur l’avant-projet d’avis de législation secondaire. Compte tenu de la bonne volonté exprimée et des résultats obtenus, l’oratrice a souhaité plein succès au gouvernement dans le processus de réforme ambitieux et dans la transformation historique que connaît aujourd’hui l’administration de la justice sociale.

Le membre gouvernemental du Panama a souscrit à la déclaration de la membre gouvernementale du Paraguay et salué le fait que le gouvernement s’est employé à fournir régulièrement des informations actualisées sur l’application de la convention. Il convient de souligner la judiciarisation des procédures du travail, qui étaient réglées par les instances exécutives. De même, les commentaires formulés par la commission d’experts sont particulièrement pertinents et pèsent de manière positive sur les progrès que le gouvernement a réalisés en matière de justice du travail et qui s’inscrivent dans le droit fil de ce que promeut l’OIT. La transformation est en cours, en tenant compte des acteurs tripartites du pays, ce qui a montré au gouvernement que le dialogue social est un outil indispensable pour la liberté sociale et la matérialisation de la justice sociale. Enfin, l’orateur a réitéré son appui au gouvernement en ce qui concerne le processus d’amélioration régulière qui est mis en œuvre et a souligné l’importance du tripartisme, au sein de l’OIT, en faveur du bien commun.

Un observateur, représentant la Confédération syndicale internationale (CSI), a déclaré qu’en février 2017 un décret portant modification de l’article 123 de la Constitution relatif à la justice du travail a été publié. Il s’agit de la plus grande réforme de la Constitution en cent années d’existence. En 2016, la commission a offert l’assistance technique du BIT au gouvernement et l’a prié d’engager le dialogue social en vue d’élaborer la législation secondaire. Toutefois, le gouvernement n’a ni promu de dialogue ni demandé cette assistance technique. Des sénateurs membres de la Confédération des travailleurs du Mexique (CTM) et de la Confédération révolutionnaire des ouvriers et paysans (CROC) ont alors lancé un projet de réforme, jugé inconstitutionnel, qui dérogerait au droit du travail mexicain puisque celui-ci ne réglemente pas tous les thèmes prévus dans la réforme constitutionnelle. Ce projet remet en question le rétablissement du faux tripartisme au sein des conseils de conciliation et d’arbitrage et l’octroi de pouvoirs juridictionnels à des organes administratifs décentralisés, comme le traitement d’affaires relatives au droit de grève, qui ne devraient revenir qu’aux instances judiciaires en application de l’article 123, point XX, de la Constitution. En outre, le Sénat a publié un projet de décret validant ce projet. La semaine dernière, le Sénat a invité de soi-disant partenaires sociaux pour qu’ils se prononcent exclusivement sur ce décret, passant sous silence d’autres projets portés par d’autres sénateurs, en vue d’une réglementation cohérente de la réforme constitutionnelle. La justice et la paix sociales passent par le remplacement du processus législatif vicié en ce qui concerne les réformes secondaires entreprises par le gouvernement.

Le membre gouvernemental du Honduras a accueilli favorablement les mesures que le gouvernement a prises depuis février 2017 en matière de justice du travail, dans le cadre du processus de réformes en cours. Par ailleurs, il a exprimé ses préoccupations quant au fait que l’on tente de poser des cas qui ne constituent pas une violation de la convention comme des actes de violence à l’encontre de syndicalistes. Enfin, le gouvernement est instamment prié de continuer de mettre en place de nouveaux mécanismes de dialogue interinstitutionnels, conformément aux dispositions de la convention, qui défendent les droits fondamentaux des travailleurs, afin de garantir le respect de la liberté syndicale dans le pays.

La membre travailleuse de l’Allemagne a déclaré que les progrès évoqués par le gouvernement au sujet de la mise en œuvre de la convention ne sont que des progrès sur papier, et que peu de choses ont changé dans la pratique. La constitution de syndicats indépendants ainsi que leurs activités sont entravées de manière alarmante par une combinaison fatale entre: i) une procédure d’enregistrement arbitraire; ii) la prévalence de contrats de protection; et iii) la non publication de l’enregistrement des syndicats et des accords conclus. Les conseils de conciliation et d’arbitrage, qui restent l’autorité compétente aux niveaux fédéral et des Etats, ne sont ni indépendants ni impartiaux, comme le montre leur composition, et trouvent toujours de nouveaux moyens pour faire obstacle à l’enregistrement et aux activités des syndicats indépendants. Les contrats de protection sont négociés à l’insu des travailleurs, parfois pour des entreprises allemandes, avant même la construction d’une usine ou le lancement des activités d’une entreprise. Si une entreprise est déjà entre les mains d’un soi-disant syndicat de protection ou s’il existe un contrat de protection, les conseils de conciliation et d’arbitrage disposent de différents moyens pour rejeter les demandes de syndicats indépendants. Il est pratiquement impossible de faire appliquer une véritable convention collective s’il existe un «syndicat de protection». La procédure est occultée par le manque de transparence, des obstacles bureaucratiques, des licenciements, des menaces ainsi que des actes d’intimidation et de violence. Pour démontrer qu’il progresse sur la voie de la réalisation de la convention, le gouvernement ne doit plus simplement évoquer la durée du processus de réforme, les discussions entre les différentes parties prenantes ou le fait que la législation secondaire n’est toujours pas encore entrée en vigueur et qu’elle a été conçue pour neutraliser les impératifs fondamentaux de la réforme constitutionnelle. L’oratrice a donc demandé au gouvernement de se conformer pleinement aux conclusions des organes de contrôle de l’OIT et, à cette fin: i) de démontrer, par des actions concrètes, de quelle manière un enregistrement rapide et indépendant des syndicats est garanti; ii) de fournir la preuve de la publication des conventions collectives, ainsi que de l’enregistrement, de la reconnaissance et des statuts des syndicats; iii) d’expliquer en détail les mesures spécifiques prises et mises en œuvre pour résoudre tous les problèmes liés aux contrats de protection; et iv) d’envisager de contraindre, en droit, les employeurs de faire connaître la convention collective applicable.

Le membre gouvernemental de l’Algérie a déclaré soutenir les efforts du gouvernement pour réformer la justice du travail, renforcer l’organe de conciliation et promouvoir le droit d’organisation et de négociation collective. Toutes les dispositions nécessaires ont été prises pour respecter les droits fondamentaux, y compris les droits à la liberté d’expression et d’association, ainsi que les garanties procédurales, tout en renforçant les prérogatives du système d’inspection du travail. Rien ne prouve qu’il y ait eu des violations de la liberté syndicale. Il s’est réjoui des avancées enregistrées dans le renforcement des instruments nationaux existants pour donner plein effet à la réforme constitutionnelle et a souhaité que la commission tienne compte des progrès réalisés.

La membre travailleuse des Etats-Unis a déclaré que les conseils de conciliation et d’arbitrage entravent la liberté syndicale des travailleurs et a cité en exemple la grève du syndicat indépendant des mineurs, entamée en 2008, sur la légitimité de laquelle le Conseil de conciliation et d’arbitrage fédéral ne s’est jamais prononcé. En 2013, un syndicat d’entreprise, géré par le propriétaire de la mine, a revendiqué des droits de négociation collective et occupé la mine pour tenter de mettre fin à la grève. Au lieu de protéger la grève, le conseil de conciliation et d’arbitrage a accédé à la demande illégale de ce syndicat et autorisé la tenue d’élections en 2017, pour lesquelles l’employeur et le syndicat d’entreprise ont présenté la même liste d’électeurs qualifiés au conseil de conciliation et d’arbitrage. Sur cette liste figurait non seulement le nom de mineurs recrutés pour qu’ils votent en faveur de l’entreprise, mais aussi de travailleurs qui n’auraient pas dû y figurer, notamment des mineurs retraités, des mineurs ayant perçu des indemnités de licenciement et même des mineurs décédés. Malgré ces irrégularités – collusion entre le syndicat d’entreprise et l’employeur, attestée par le caractère identique de la liste que chacun a produite et incapacité à prouver quels travailleurs sont des électeurs qualifiés –, le conseil de conciliation et d’arbitrage a autorisé ces élections, remportées par le syndicat d’entreprise. Toutefois, en janvier 2018, un tribunal a annulé ces élections et a contraint le syndicat d’entreprise à abandonner sa requête, offrant finalement une certaine protection à la grève légitime du syndicat indépendant. Cet exemple montre les problèmes liés aux conseils de conciliation et d’arbitrage, à savoir: i) leur manque d’impartialité et leurs préjugés à l’endroit des syndicats indépendants; et ii) leurs liens étroits avec les syndicats de protection et les employeurs. Au moment où le Conseil de conciliation et d’arbitrage fédéral a autorisé la deuxième élection, le secrétaire du conseil chargé des questions collectives avait été préalablement employé comme avocat par l’entreprise; fonction qu’il occupait de nouveau. De plus, les travailleurs ont dû attendre des années avant de bénéficier de la protection des droits à la liberté syndicale. Comme l’assure la réforme constitutionnelle, les conseils de conciliation et d’arbitrage doivent être remplacés par un système de justice du travail totalement indépendant du pouvoir exécutif qui autorise les travailleurs à exercer pleinement leur liberté syndicale. Ces changements doivent être accomplis pour que tout accord de libre-échange nord-américain (ALENA) renégocié ou tout autre accord de libre-échange, voire le Mexique lui-même, puissent respecter la convention.

Le membre gouvernemental de l’Uruguay a souscrit à la déclaration de la membre gouvernementale du Paraguay et s’est arrêté, parmi les mesures prises par le gouvernement, sur la réforme de 2012 relative à la procédure en matière d’affaires liées au travail et sur la promotion de la réforme de la procédure. La mise en œuvre complète des lois de cette nature prend du temps, divers ajustements étant généralement nécessaires pour atteindre les objectifs visés. La réforme du travail a permis de réduire de plus de 60 pour cent la durée habituelle des procès relatifs au travail, ce qui présente un avantage indéniable pour le justiciable, qui accède désormais à une justice plus rapide et plus efficace. Quelques aspects mineurs de la réforme restent à ajuster. Il est raisonnable qu’un délai suffisant soit nécessaire pour qu’elle soit entièrement mise en œuvre. A cet égard, et compte tenu de l’expérience de l’Uruguay en la matière, l’orateur a offert la coopération technique de son pays et a encouragé le gouvernement à poursuivre sur la voie du dialogue social.

Un membre travailleur de la Colombie a reproché au Mexique les violations de la liberté syndicale, notamment ses dérives liées à l’existence de contrats de protection. Tous les organes de contrôle de l’OIT ont signalé que ces contrats engendrent une violation de droits. Face à la gravité et au caractère répétitif de ces violations, l’OIT doit prendre des mesures drastiques. Au lieu de supprimer la figure juridique qui dénature en soi les organisations syndicales et la visée de la négociation, la réforme législative de 2012 et la réforme constitutionnelle de 2017 modifient les dispositions relatives à l’enregistrement, à la publication et au vote, entre autres dispositions. Ainsi, cinq ans après la réforme législative et quinze mois après la réforme constitutionnelle, les conseils de conciliation et d’arbitrage continuent d’enregistrer des syndicats et des contrats de protection. Le gouvernement doit respecter les recommandations et les observations formulées par les organes de contrôle de l’OIT au sujet des syndicats et des contrats de protection et empêcher que les pratiques précitées soient possibles, moyennant des lois issues de véritables consultations avec les organisations représentatives de travailleurs et un contrôle efficace exercé par les autorités, afin d’empêcher que ne perdurent des syndicats non démocratiques et des simulacres de négociation.

Un autre membre travailleur de la Colombie a souligné que tout acte qui limite la liberté syndicale, surtout au regard de la convention, est absolument inacceptable. Un syndicalisme exempt de toute forme de pression est indispensable au développement d’un pays. L’orateur a demandé en conséquence au gouvernement comme aux partenaires sociaux des informations plus détaillées sur les contrats de protection. Il prie également le gouvernement de se mettre d’accord, avec les organisations syndicales et les employeurs, sur la loi fédérale du travail, afin d’éviter toute manipulation pouvant nuire à l’application de la convention.

Le membre gouvernemental du Brésil a salué les progrès accomplis par le gouvernement, et reconnus dans le rapport de la commission d’experts au sujet de la modernisation de l’administration de la justice du travail, ainsi que l’appui marqué de la Chambre des députés et du Sénat à la réforme constitutionnelle. Il convient de souligner les mesures législatives prises et les pratiques appliquées pour régler le «phénomène des syndicats de protection et des contrats de protection» ainsi que les processus de consultation ambitieux et les tables rondes que le gouvernement a organisés pour donner plein effet à la réforme constitutionnelle au moyen de la législation secondaire. En ce qui concerne la représentativité syndicale et la transparence, il y a lieu de signaler que des observations ont été formulées sur la base d’allégations générales qui ne se réfèrent pas à des cas concrets et qu’on ne peut admettre que les organes de contrôle formulent des commentaires sans disposer d’éléments objectifs. Le Mexique n’ayant pas ratifié la convention no 98, on ne peut accepter que la commission examine des commentaires sur l’application de cette convention. Les discussions de la commission doivent se cantonner aux termes techniques relatifs à l’application de la convention en question. En conclusion, le gouvernement est invité à continuer de concrétiser ses objectifs de réforme du travail, dans le respect de ses engagements internationaux.

Le membre travailleur de l’Argentine a indiqué que le gouvernement a présenté à plusieurs reprises devant la commission des informations sur des avancées jamais concrétisées. La durée de l’application de la loi fédérale sur les travailleurs au service de l’Etat constitue un bon exemple de ces pratiques dilatoires. Cette loi a été adoptée en 1963 et, cinq ans plus tard, la commission d’experts a relevé que le gouvernement était en train de réviser les éléments de la loi contraires à la convention. Cinquante ans plus tard, ces éléments sont toujours en vigueur. Le gouvernement a indiqué que ces dispositions ne sont pas applicables en vertu de la jurisprudence de la Cour suprême de justice. Toutefois, les arrêts de la cour n’entraînent pas l’abrogation des articles de la loi contraires à la convention, et les travailleurs continuent de saisir la justice sur ces points. Cette situation illustre clairement que la violation de la convention perdure. Les travailleurs du secteur de l’éducation qui luttent contre la «réforme éducative» qui restreint la liberté d’association et de négociation sont également concernés par les atteintes à la liberté syndicale. Ceux qui s’opposent à cette réforme subissent la répression, comme cela fut le cas en juin 2016, dans l’Etat d’Oaxaca. La répression a fait 10 morts et 100 blessés; 30 personnes ont été placées en détention. Les auteurs de ces faits n’ont toujours pas été punis, comme sont restés impunis les auteurs de la disparition de 43 étudiants à Ayotzinapa. Le gouvernement doit prendre des mesures concrètes pour aligner la législation et la pratique nationales sur les dispositions de la convention. De plus, la commission doit instamment prier le gouvernement de mettre un terme aux pratiques qui portent atteinte à la liberté syndicale depuis des décennies.

Le membre travailleur du Paraguay a fait remarquer que le gouvernement a tenu compte de certaines recommandations de la commission d’experts, mais pas d’autres. Le Mexique a procédé à des réformes constitutionnelles en matière de travail, portant suppression des conseils de conciliation et d’arbitrage et création des tribunaux du travail. Cependant, le délai légal pour modifier la loi portant réglementation de ces organismes et tribunaux est échu, et le congrès a suspendu le processus de réforme afin d’organiser des consultations avec les partenaires sociaux. La procédure ne s’inscrit pas dans les termes prévus par la Constitution. L’orateur a rappelé que les réformes doivent garantir la représentativité des organisations syndicales et la transparence en ce qui concerne la signature, l’enregistrement et le dépôt des conventions collectives afin que celles-ci correspondent à une organisation qui représente véritablement les intérêts et les droits des travailleurs. Des mécanismes favorisant la vie syndicale et autorisant le droit de grève sont nécessaires. L’orateur a donc recommandé au gouvernement et au congrès d’adopter les mesures nécessaires, par voie de dialogue avec les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives, en vue d’aligner la législation sur les principes établis dans la convention.

La membre travailleuse du Canada a regretté l’utilisation généralisée d’accords collectifs illégitimes signés entre un employeur et un syndicat sur lequel l’employeur a la mainmise, avec la bénédiction des autorités gouvernementales. Les travailleurs qui tentent de constituer des syndicats indépendants et démocratiques sont harcelés, menacés et assassinés: en novembre 2017, Victor et Marcelino Shaunitla Peña ont été assassinés alors qu’ils participaient à un arrêt de travail dans une mine d’or et qu’ils refusaient de s’affilier à un syndicat imposé par l’entreprise. Cela avait mis en lumière la corruption du système des contrats de protection du travail, ainsi que son caractère antidémocratique. En janvier 2018, Quintin Salgado a été assassiné après avoir reçu des menaces de mort s’il continuait à soutenir la création d’un nouveau syndicat. Ces meurtres n’ont fait l’objet d’aucune enquête. Toujours en janvier 2018, après avoir reçu des menaces du syndicat de l’entreprise, la maison d’un mineur, Eli Manuel Robelledo, a été incendiée. Quelques jours plus tard, une autre travailleuse, Monica Lopez, a été battue et laissée pour morte. Aucune enquête n’a été menée. L’oratrice a rappelé que les droits des organisations de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence et qu’il incombe aux gouvernements de veiller à ce que ce principe soit respecté. Le libre choix des travailleurs de constituer des organisations et de s’y affilier est tellement fondamental pour la liberté syndicale dans son ensemble qu’il ne saurait être compromis par des retards et des simulacres de réformes. L’oratrice a demandé au gouvernement de réformer et de faire respecter l’état de droit afin de protéger les revendications des travailleurs en faveur de syndicats démocratiques, de meilleurs salaires et conditions de travail, et de bonnes conditions de santé et de sécurité au travail. Le Mexique est tenu de modifier sa législation et sa pratique afin de rétablir les droits des travailleurs, conformément à la convention, avant la signature d’un quelconque accord de libre-échange.

Un observateur, représentant la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF), a déclaré que les contrats de protection constituent l’obstacle le plus sérieux à l’exercice de la liberté syndicale au Mexique. La Commission de la Conférence, la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale ont tous instamment prié le gouvernement d’abolir réellement le système des contrats de protection, sans effet. Ce système prive les travailleurs de tout droit à des conditions de travail sûres, à la tenue d’inspections du travail, à des compensations ou à la sécurité sociale et vise à démanteler un syndicalisme authentique et démocratique. Telle est malheureusement la situation dans les secteurs du transport routier et portuaire. La réforme constitutionnelle passe par l’adoption d’une législation secondaire. Cependant, le projet de loi porte atteinte à l’esprit de cette réforme et contient de nombreuses dispositions préjudiciables pour les travailleurs, notamment la modification de l’article 388 de la loi fédérale du travail. Les syndicats de protection ont court-circuité les syndicats qui représentent les travailleurs du secteur aéronautique en prétendant représenter tous les travailleurs et en cherchant à négocier un accord unique. Le projet de modification de l’article 388 aggrave ce problème en interdisant aux syndicats professionnels de négocier des accords séparés avec un même employeur. Cela est incompatible avec l’obligation de promouvoir une négociation collective libre et volontaire. Les organes de contrôle de l’OIT ont clairement indiqué que, pour satisfaire la pluralité syndicale lorsqu’un seul accord est possible, les syndicats minoritaires ou professionnels doivent au moins être en mesure de conclure des conventions collectives au nom de leurs membres. Ce principe est particulièrement important au Mexique, compte tenu des effets des contrats de protection. L’orateur a demandé au gouvernement de retirer le projet de législation secondaire afin de mettre sa législation du travail en conformité avec la convention.

Une observatrice, représentant IndustriALL Global Union, a indiqué que les contrats de protection constituent depuis longtemps une part essentielle de la politique et de l’économie de l’Etat. Ce modèle s’étend désormais à tous les secteurs industriels: il garantit les coûts de main-d’œuvre les plus bas et empêche toute négociation avec les travailleurs. Depuis la privatisation des secteurs de l’énergie et du gaz, les contrats de concession et d’exploration contiennent des clauses spécifiques mentionnant le syndicat désigné, privant ainsi les travailleurs de toute liberté de choix. Malgré les promesses faites sur la scène internationale, le gouvernement ne fait rien pour éliminer ces contrats de protection. L’annonce de nouveaux investissements dans les secteurs de l’automobile, de l’énergie, de l’électronique ou du textile arrive avec une «cerise sur le gâteau», un contrat de protection déjà signé avec le syndicat dominé par l’employeur, bien avant que l’usine ne soit construite ou qu’un travailleur n’y apparaisse. La semaine précédente, une cinquantaine de travailleuses du secteur textile ont été licenciées pour avoir défendu leurs droits: la direction a déclaré qu’il n’y aurait pas d’autre syndicat que celui qui existait déjà dans l’usine. Seuls les syndicats officiels d’entreprise peuvent conclure un accord collectif. Les autorités, l’entreprise et le syndicat de protection bloquent depuis six ans la demande d’élections syndicales que le syndicat «Mineros», affilié à IndustriALL, a déposée. Même lorsque celui-ci a remporté les élections dans un site minier en avril 2016, l’entreprise et le syndicat de protection ont refusé d’appliquer la décision rendue et ont continué d’occuper les locaux du syndicat. L’oratrice a conclu qu’il incombe au gouvernement de respecter les droits des travailleurs mexicains et la liberté syndicale.

Un observateur, s’exprimant au nom de la Confédération des travailleurs des universités des Amériques (CONTUA), déclare que le gouvernement recourt systématiquement, et de manière inquiétante, à des pratiques contraires à la convention. Depuis 2015, la commission demande au gouvernement de régler la question du phénomène des syndicats de protection et d’inclure les partenaires sociaux aux discussions s’y rapportant. En 2017, la commission demandait de nouveau au gouvernement de consulter les partenaires sociaux, car l’opacité des mesures mises en place est source de grave préoccupation. Une fois encore, le gouvernement doit fournir des explications à la commission sur le fait qu’il s’est à nouveau abstenu de mener de véritables consultations tripartites, institutionnalisées et permanentes dans le cadre du processus de transition lié à la réforme constitutionnelle de la justice du travail, ce qui va à l’encontre de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976. Une telle obligation relève de la responsabilité du gouvernement, et il ne peut invoquer son droit interne pour justifier le fait qu’il ne respecte pas les dispositions de la convention. Dans le même ordre d’idée, on ne peut parler de consultation lorsqu’il s’agit d’instaurer un supposé dialogue social avec les organisations de travailleurs les plus représentatives, lorsque l’on suit généralement une pratique syndicale, corporative et antidémocratique contraire aux intérêts des travailleurs. En ce sens, une consultation ne reflète pas la réalité du travail au Mexique. Selon le Journal officiel du Sénat, les auditions publiques doivent avoir lieu en mai et juin 2018. Cependant, dans la réalité, aucune audition publique n’est inscrite au programme des quatre bureaux régionaux. Ces auditions portent sur le projet de loi que le gouvernement a présenté le 7 décembre 2017, par l’intermédiaire de la CTM et de la CROC. Elles ne font pas référence aux trois autres projets de loi qui ont également été présentés. La CTM et la CROC n’ont pas reçu à ce jour de convocation officielle. Pour prouver les procédés artificieux de l’Etat, on citera le cas de la demande formulée par le président de l’organe collégial de l’Union nationale des travailleurs (UNT) et le secrétaire général du Syndicat de travailleurs de l’Université nationale autonome du Mexique (STUNAM) qui, en mai 2018, ont demandé au Sénat le lieu, la date et l’heure prévus pour l’audition publique sur l’avant-projet d’avis en matière de justice du travail et qui n’ont reçu à ce jour aucune réponse. Ce projet est une preuve supplémentaire d’un tripartisme qui n’en est pas un, dans lequel il est proposé de créer l’Institut fédéral de conciliation au travail et d’enregistrement, constitué de 12 membres répartis comme suit: 4 membres du gouvernement, 4 représentants de travailleurs et 4 représentants d’employeurs. Cela révèle de nouveau un contrôle corporatif total puisque le mécanisme susmentionné prévoit que 4 des 12 membres doivent provenir d’organisations nationales de travailleurs, mais seulement des «plus représentatives», ce qui prouve combien le gouvernement renforce encore et toujours le syndicalisme protectionniste et antidémocratique, en privilégiant ces secteurs et en excluant les autres représentations syndicales, ce qui est contraire aux principes fondamentaux de l’OIT, en particulier de la convention. Une telle insistance prouve combien le régime va à l’encontre du bien-être des travailleurs mexicains en ce qu’il soutient, avec l’appui de la loi, des pratiques qui vont à l’encontre de la liberté syndicale. Enfin, l’orateur a appelé le Mexique à ratifier immédiatement la convention no 98.

Le représentant gouvernemental a souligné que nombre d’interventions étaient centrées sur la réforme du travail. S’il est vrai que la partie constitutionnelle déjà adoptée suppose des responsabilités pour différents acteurs, notamment les autorités fédérales et les autorités des Etats, il est également vrai que la mise en œuvre de la législation secondaire passera par l’adoption d’instruments qui permettront, tant au pouvoir judiciaire (en ce qui concerne la justice du travail) qu’à l’organisme décentralisé et aux centres de conciliation, de s’acquitter de leurs fonctions. Le Sénat analyse ce processus de réforme dans le cadre de l’examen de quatre projets, qui n’ont pas été rejetés au niveau parlementaire. A la demande de nombreux groupes, le Sénat a décidé d’ouvrir les consultations non seulement dans le cadre des travaux des commissions législatives, mais également de forums de discussion. Il revient au Sénat de décider qui sera invité à y participer. Le gouvernement tient néanmoins à insister sur le fait que des consultations tripartites sont menées en vue d’élaborer la législation secondaire et de permettre que celle-ci rassemble un consensus minimum permettant d’accomplir la réforme constitutionnelle dans les meilleures conditions. Ainsi, en 2018, le secrétariat au Travail a tenu plus de 91 réunions avec des organisations d’employeurs et de travailleurs. Le gouvernement et l’Etat tiennent à parvenir à un consensus avec les travailleurs, les employeurs et les organisations de la société civile sur ce qui est le plus adapté en matière de réforme du travail, en tenant toujours compte des droits des travailleurs. Par ailleurs, l’orateur a indiqué qu’il avait souvent été question des contrats de protection dans la discussion. Le Mexique a fait preuve de coopération sur les cas concrets posant des problèmes de cet ordre. A cet égard, l’orateur a souligné que la réforme constitutionnelle tient compte de l’origine des contrats de protection et que, d’une certaine manière, ils sont issus de la loi fédérale du travail et qu’ils évitent des problèmes tels que les «appels à la grève à des fins d’extorsion». En ce qui concerne l’enregistrement des syndicats, l’orateur a indiqué que, contrairement à ce qu’ont dit les préopinants, l’autorité fédérale répond actuellement à une demande d’enregistrement dans les trois ou quatre jours. Ainsi, le Mexique a connu la plus grande hausse du nombre d’associations syndicales jamais enregistrées. Au niveau fédéral, il existe un système électronique comptant plus de 3 400 enregistrements d’association. L’orateur a remercié des pays membres du groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes pour les efforts déployés, encourageant le gouvernement à poursuivre son action et à expliquer le mieux son action, dans le respect des dispositions de la convention.

Les membres travailleurs ont salué la volonté du gouvernement d’aligner sa pratique et sa législation sur la convention et ont formulé le vœu que cela se traduise par des mesures concrètes. Il est néanmoins regrettable que le gouvernement n’admette pas que ses règles et ses propositions législatives actuelles présentent de graves lacunes au regard de la convention. Les nombreux problèmes rencontrés sont ancrés dans le système relatif aux contrats de protection. En réponse aux commentaires formulés par le gouvernement selon lesquels il fournit depuis de nombreuses années des informations et des preuves détaillées à la commission d’experts et à la Commission de la Conférence, des exemples précis ont une fois de plus été donnés lors de cette discussion, venant illustrer les effets des contrats de protection. Depuis de nombreuses années, ce système entrave gravement l’exercice de la liberté syndicale et de la liberté de négociation collective. Les membres travailleurs ont contesté la déclaration selon laquelle la question des contrats de protection n’entre pas dans le champ d’application de la convention. En effet, cette pratique est étroitement liée aux conventions nos 98 et 87. L’existence de contrats de protection fait obstacle à la constitution de syndicats libres et indépendants. Il est considéré qu’un Etat Membre ne respecte par la convention no 87 s’il met en œuvre ou conserve des lois qui empêchent les travailleurs de contester l’existence de contrats de protection et qui limitent leur capacité d’élire librement des syndicats démocratiques et indépendants. La possibilité pour les travailleurs de constituer un syndicat de leur choix et d’y adhérer et la capacité qu’a ce syndicat de représenter, de défendre et de promouvoir les intérêts de ses membres, par l’intermédiaire de la négociation collective, sont au cœur même de la convention. Le gouvernement doit donc prendre toutes les mesures pour mettre fin à l’utilisation de contrats de protection. A cet égard, les membres travailleurs ont formulé un certain nombre de recommandations à l’intention du gouvernement, comme suit: i) le gouvernement est invité à soumettre des informations sur la législation proposée qui vise à appliquer la réforme constitutionnelle. Des consultations sur cette législation avec tous les partenaires sociaux, y compris des syndicats indépendants, sont essentielles. Le projet de loi porte considérablement préjudice à l’exercice du droit de liberté syndicale, et ses effets sont perceptibles partout dans le pays, et même dans la région; ii) étant donné que les conseils de conciliation et d’arbitrage n’ont pas été en mesure de garantir la liberté syndicale et le droit de négociation collective, il doivent être remplacés par des organismes véritablement indépendants et impartiaux chargés de régler les différends du travail et d’enregistrer les syndicats ainsi que leurs conventions collectives. Le gouvernement doit également indiquer comment il va garantir la création d’organismes réellement indépendants ainsi que donner des informations sur les mesures prévues pour assurer une transition efficace entre les conseils de conciliation et d’arbitrage et ces nouveaux organismes; iii) le gouvernement doit garantir la transparence des informations et l’accès à celles-ci concernant l’enregistrement des organisations syndicales et des conventions collectives conclues. Le gouvernement est tenu de transmettre toutes les informations à ce sujet; iv) les travailleurs qui souhaitent exercer leur droit de liberté syndicale et de négociation collective doivent être en mesure de le faire et de pouvoir rapidement et efficacement contester la validité des contrats de protection et des accords négociés, le cas échéant; v) le gouvernement est instamment prié d’appliquer la loi existante et de veiller à ce que l’on ne recoure pas à l’externalisation des travailleurs pour faire obstacle à l’exercice de la liberté syndicale et du droit de négociation collective; vi) la législation proposée annule aussi des garanties fondamentales en matière de licenciement et de suppression d’emploi. Le gouvernement a le devoir de protéger les travailleurs contre les licenciements arbitraires et les représailles du fait de leurs activités syndicales. Cela s’applique aussi aux cas de licenciements collectifs; et vii) le gouvernement doit expressément abolir les restrictions qui pèsent sur le pluralisme syndical et l’élection, en toute liberté, des dirigeants syndicaux. Enfin, le gouvernement est instamment prié de mettre fin aux actes de violence perpétrés à l’encontre de syndicalistes, notamment ceux qui prennent part à des débats sociaux et politiques dans l’exercice de leurs fonctions syndicales, afin de sonner le glas du règne de l’impunité pour ce genre de crimes. Les auteurs, tant matériels qu’intellectuels, de ces actes doivent être arrêtés et traduits en justice. Sinon, on ne fait qu’inviter certains employeurs et leurs agents à recourir à la violence, y compris aux meurtres, dans le cadre de conflits du travail. Pour respecter ces recommandations, et compte tenu de l’importance des questions examinées, le gouvernement est instamment prié de demander l’assistance technique du BIT concernant le projet de loi et d’accepter une mission de contacts directs. Le cas du Mexique doit faire l’objet d’un paragraphe spécial dans le rapport.

Les membres employeurs ont remercié tous les intervenants dans ce débat, lequel est riche en informations et en opinions diverses, ce qui montre qu’exprimer des positions ouvertes et franches sur les différents aspects de ce cas est possible. Les réponses complémentaires présentées par le gouvernement reprennent en grande partie les points mentionnés dans son intervention initiale et précisent également certains points soulevés par les membres employeurs. Concernant les positions des divers représentants des travailleurs, des approches et points de vue divers sont exprimés qui, comme l’ont mentionné précédemment les membres employeurs, dépassent peut-être le cadre de la convention. Dans ses observations, la commission d’experts se réfère au cas no 2694 du Comité de la liberté syndicale. Dans son rapport de juin 2017, le comité distingue les questions de caractère global des allégations concrètes. Les questions globales englobent tous les aspects législatifs qui relèvent de l’examen de la commission d’experts et de la Commission de la Conférence, comme cette dernière en a discuté aujourd’hui. Pour autant, les aspects concrets qui ont trait à des questions pouvant relever de la convention no 98 sont examinés par le Comité de la liberté syndicale pour permettre une analyse plus détaillée de nombreux points que les représentants de diverses parties prenantes ont abordés aujourd’hui. Cela dit, ni la Commission de la Conférence ni la commission d’experts ne devrait aborder les aspects liés aux principes de la négociation collective. En conséquence, la question des systèmes de négociation collective ne fait pas partie de la discussion et doit être totalement exclue des considérations et conclusions que formule cette commission. Le gouvernement s’est référé à un Protocole d’inspection du travail sur la libre négociation collective, lequel permet aux inspecteurs du travail d’exercer de multiples activités et de protéger de nombreux travailleurs au Mexique. De même, le gouvernement fait référence au système de consultation des organisations syndicales, indiquant qu’il fait l’objet de plus d’un million de recherches et qu’il contient des informations détaillées sur plus de 3 400 organisations syndicales, ce qui répond aux préoccupations de la commission concernant les systèmes d’enregistrement et d’information. Le gouvernement informe également qu’il s’emploie à mettre en place un organisme public décentralisé aux termes de la réforme constitutionnelle, mécanisme doté d’outils administratifs, organisationnels, technologiques et logistiques pour sa mise en œuvre. De même, 91 réunions ont été organisées avec des représentants des travailleurs, des employeurs, des universitaires, des ordres et associations d’avocats, en plus des auditions publiques décidées par le Sénat pour donner effet aux nouvelles lois et aux quatre projets de loi ou initiatives législatives. Il s’agit d’un processus qui ne cesse d’évoluer, à la faveur d’un large dialogue social, ce que promeut cette Organisation. L’établissement de tribunaux du travail indépendants, dotés d’un budget propre à en assurer la mise en place et le bon fonctionnement, fait partie d’un processus dans le cadre duquel des mesures claires et précises sont mises en œuvre. Le gouvernement a largement répondu aux diverses inquiétudes formulées par la commission d’experts et par la Commission de la Conférence. S’agissant des libertés civiles et des droits syndicaux, le gouvernement a présenté des informations, émanant de divers organismes indépendants, sur plusieurs actes de violence qui n’ont pas de lien avec la liberté syndicale, raison pour laquelle il n’est pas nécessaire d’entrer dans les détails. En conséquence, s’agissant de la demande de la commission d’experts concernant des commentaires du gouvernement sur ces actes de violence, il faut considérer qu’ils ont déjà été fournis et qu’il n’est nullement besoin de demander des informations supplémentaires. Quant à la réforme constitutionnelle, la recommandation invitant le gouvernement à prendre des mesures importantes et à organiser une consultation tripartite sur la réforme constitutionnelle est jugée pertinente par les membres employeurs si le gouvernement l’intègre dans le rapport qu’il doit présenter en vertu de l’article 22 de la Constitution, et non dans un rapport complémentaire ou anticipé par rapport à la pratique habituelle de présentation des rapports. Concernant la représentation et les contrats de protection, c’est une question qui sera examinée par le Comité de la liberté syndicale, et le gouvernement doit s’adresser à ce comité pour la marche à suivre. En conséquence, selon les membres employeurs, la conclusion selon laquelle le gouvernement devrait adopter des mesures avec les acteurs tripartites à cet effet est une question qui relève du Comité de la liberté syndicale et non de la Commission de la Conférence. Concernant la publication de l’enregistrement des syndicats, ce système existe déjà et fournit des informations complètes. C’est pourquoi la conclusion demandant au gouvernement de continuer à fournir des informations sur la manière dont il s’acquitte de son obligation relative à la publication des enregistrements et des statuts n’est pas non plus indispensable. Enfin, les membres employeurs ont estimé que, concernant la question des réformes législatives, il existe de nombreux points qui, en raison des explications fournies par le gouvernement et de la jurisprudence même, ne sont pas recevables, la demande adressée au gouvernement par la commission d’experts de prendre des mesures pour modifier les restrictions de la loi fédérale des travailleurs au service de l’Etat n’étant pas indispensable. N’est pas non plus pertinente la recommandation de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 372 de la loi fédérale du travail sur l’interdiction faite aux étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeant syndical, afin que la restriction en question soit abrogée de manière expresse. Les conclusions doivent viser à ce que des informations complémentaires soient fournies dans le cadre des rapports récurrents et périodiques que prévoient les procédures générales qui permettent d’assurer le suivi de toute convention. Les membres employeurs ont estimé qu’il est possible de clore le présent cas.

Conclusions

La commission a pris note des informations que le représentant gouvernemental a fournies oralement et par écrit, ainsi de la discussion qui a suivi.

La commission a également pris note des discussions qu’elle a déjà eues sur ce cas, la dernière ayant eu lieu en 2016.

Prenant en compte les exposés du gouvernement et la discussion qui a suivi, la commission a encouragé le gouvernement:

- à continuer de s’attacher à adopter les mesures législatives prévues dans le contexte de la réforme constitutionnelle, dans le cadre de consultations suivies avec les partenaires sociaux au niveau national;

- à faire en sorte que, en consultation avec les partenaires sociaux, la législation secondaire nécessaire pour lancer la réforme de la Constitution et la loi fédérale du travail soient conformes à la convention;

- à continuer de s’acquitter de son obligation légale de publier l’enregistrement des syndicats et leurs statuts, ainsi que les conventions collectives applicables; et

- à veiller à ce que les syndicats puissent exercer leur droit de liberté syndicale, en droit et dans la pratique.

La commission a invité le gouvernement à rendre compte en détail des mesures prises pour donner suite aux présentes recommandations, à la prochaine session de la commission d’experts, en novembre 2018.

La représentante gouvernementale a remercié la commission pour le dialogue constructif et ouvert qui a eu lieu. Elle a écouté avec beaucoup d’attention les commentaires faits et les questions abordées lors de la discussion, ainsi que les conclusions présentées, qui seront dûment examinées et prises en considération par les autorités. Elle a également réitéré l’attachement du gouvernement aux principes et droits fondamentaux au travail, ainsi qu’à la promotion et à la concrétisation du travail décent. Le dialogue social est le meilleur moyen de définir les mesures qui permettront de continuer à réaliser les principes fondamentaux au travail et, en particulier, les principes de la convention. Le Mexique réitère son attachement à ce dialogue et aux organes de contrôle de l’OIT, qui en facilitent la consolidation. Par conséquent, il répondra, à chaque fois et dans les meilleurs délais, aux demandes d’information qui lui seront adressées.

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