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Solicitud directa (CEACR) - Adopción: 2024, Publicación: 113ª reunión CIT (2025)

Portugal

Convenio sobre el trabajo forzoso, 1930 (núm. 29) (Ratificación : 1956)
Protocolo de 2014 relativo al Convenio sobre el trabajo forzoso, 1930 (Ratificación : 2020)

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Solicitud directa
  1. 2024

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La commission salue la ratification du protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, et prend note du premier rapport du gouvernement ainsi que des informations transmises en réponse à ses commentaires sur la convention. Elle note également les observations de la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP-IN) et de l’Union générale des travailleurs (UGT) communiquées avec le rapport du gouvernement.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention, et article 1, paragraphe 2, du protocole. Action systématique et coordonnée de lutte contre le travail forcé. La commission note que le gouvernement indique dans son rapport que la lutte contre le travail forcé prend place dans le cadre d’une action globale qui s’appuie sur des plans d’action spécifiques de lutte contre les différentes formes de travail forcé mais aussi sur des plans d’action plus globaux dans les domaines de l’emploi, la sécurité, l’encadrement et la protection des migrants ou la lutte contre la pauvreté qui contribuent à prévenir et combattre les causes du travail forcé. La commission prend note des informations concernant le rapport final de suivi du quatrième Plan national contre la traite des êtres humains (PNPCTSH) selon lequel 75 pour cent des actions prévues ont été mises en œuvre. L’objectif stratégique «sensibiliser l’opinion à la traite des personnes» obtient un taux de réalisation de 77 pour cent, celui de «garantir aux victimes l’exercice de leurs droits» un taux de 84 pour cent et celui de «renforcer la lutte contre les réseaux criminels organisés» un taux de 42 pour cent. Le gouvernement indique qu’un nouveau plan d’action a été ouvert à la consultation publique en octobre 2022 et que celui-ci envisage le renforcement des actions dans une logique de continuité et d’approfondissement du plan précédent. À cet égard, la commission observe, d’après les informations disponibles sur le site internet du gouvernement, qu’une nouvelle consultation publique a été ouverte en novembre 2024 et que le communiqué de presse y relatif reconnaît qu’après la mise en œuvre de quatre plans entre 2007 et 2021, il y a depuis 2021 une rupture dans la continuité stratégique qu’il convient de rétablir avec l’adoption du 5ème plan qui couvrira la période 2025-2027.
La commission espère que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires en vue de l’adoption rapide du 5ème Plan d’action pour la prévention et la lutte contre la traite des êtres humains et de sa mise en œuvre. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard ainsi que sur l’action menée par la Commission pour la citoyenneté et l’égalité de genre (CIG), entité chargée de coordonner les activités dans ce domaine, pour assurer une action systématique et coordonnée au niveau national et la surveillance de la mise en œuvre du Plan d’action. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les résultats des évaluations menées à cet égard. Enfin, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment est mise en œuvre une action systématique et coordonnée pour lutter contre les autres formes travail forcé.
Article 2 du protocole. Mesures de prévention. Alinéa a) Données et sensibilisation. La commission note que l’Observatoire de la traite des êtres humains (OTSH) collecte et diffuse, à travers ses rapports annuels, des données qualitatives et quantitatives sur le phénomène de la traite des personnes à partir des signalements transmis par la police criminelle et les ONG qui utilisent les indicateurs d’identification des victimes développés par l’OTSH. D’après le dernier rapport publié par l’OTSH, on observe une augmentation constante du nombre de signalements de cas de traite entre 2019 et 2023. En 2023, 650 signalements ont été enregistrés avec 410 victimes présumées confirmées, ce qui constitue une augmentation de 72 pour cent par rapport à 2022. Les victimes sont à plus de 80 pour cent des hommes et 82,7 pour cent des cas concernent la traite à des fins d’exploitation au travail en très grande majorité dans l’agriculture. La commission note que, dans ses observations, l’UGT observe qu’il y a des disparités entre les données publiées par les différentes entités et considère qu’il est nécessaire d’améliorer la qualité des données collectées, d’harmoniser les indicateurs et les analyses, ainsi que la diffusion régulière des résultats dans la mesure où la sous-estimation du phénomène dans les statistiques officielles contraste avec sa dimension réelle et la recrudescence des cas de travail forcé dans le pays. La commission encourage le gouvernement à continuer de s’assurer que des données complètes sont produites, publiées et largement diffusées pour sensibiliser la population et les acteurs étatiques concernés à la recrudescence des cas de travail forcé dans le pays. Elle le prie d’indiquer de quelle manière les cas d’exploitation au travail qui relèvent du travail forcé sans constituer le délit de traite sont également inclus et analysés dans les données publiées.
Alinéa d). Protection des travailleurs migrants au cours du processus de recrutement et de placement. La commission note les informations communiquées par le gouvernement concernant les mesures générales de protection des travailleurs migrants dans le cadre du contrôle de leurs conditions de travail et de séjour. Elle note que l’un des objectifs du Plan national de mise en œuvre du Pacte mondial sur les migrations vise à faciliter le recrutement juste et éthique des migrants et leur garantir un travail décent. Une des mesures prévues à cette fin consiste à renforcer la capacité des inspecteurs du travail et des inspecteurs de l’Agence pour l’Intégration, les Migrations et l’Asile (AIMA.IP) en ce qui concerne les mécanismes de contrôle et de certification des recruteurs, employeurs et prestataires de services.
Le gouvernement se réfère au régime juridique régissant les agences privées de placement et les entreprises de travail temporaire (décret-loi no 260/2009) et aux changements apportés en 2016 (loi no 28/2016) pour renforcer et pénaliser l’ensemble de la chaine de recrutement et de sous-traitance de la main d’œuvre dans le cadre de la lutte contre le travail forcé, notamment les entreprises qui ont recours à la main d’œuvre temporaire, les exploitations agricoles, les chantiers de construction, en étendant la responsabilité civile et administrative à tous les intervenants du processus de recrutement. La commission observe également que le Code du travail contient un certain nombre de dispositions concernant les obligations des entreprises de travail temporaire et prévoit la suspension temporaire de la licence notamment quand l’entreprise exige des sommes d’argent de la part des candidats à l’emploi ou en cas de non-paiement ou retard des salaires. De telles dispositions existent aussi pour les agences de placement privées (DL 260/2009). La commission note que, dans ses observations, la CGTP-IN indique que les travailleurs migrants sont attirés au Portugal par des agences de recrutement, souvent liées à des réseaux de traite des personnes et opérant sous le couvert d’agences de travail temporaire, et sont ensuite abusivement contraints de vivre et de travailler dans des conditions inhumaines. La GCTP- IN observe que bien que la loi 28/2016 ait été adoptée depuis plus de huit ans, aucune sanction n’a été appliquée.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour renforcer le contrôle des activités des agences de placement et des entreprises de travail temporaire qui interviennent dans le processus de recrutement et de placement des travailleurs migrants pour éviter que ces derniers ne soient victimes de pratiques frauduleuses ou abusives. Elle prie le gouvernement de fournir des données statistiques sur les contrôles menés, les infractions constatées et les sanctions imposées.
Alinéas e) et f). Appui à la diligence raisonnable des secteurs public et privé. La commission note que selon l’évaluation de la mise en œuvre du PNPCTSH, le taux de réalisation des mesures visant à sensibiliser les entreprises à la thématique de la traite des personnes a été évalué à 17 pour cent. La commission prie le gouvernement de fournir des informations concrètes sur les mesures prises pour appuyer les secteurs public et privé, dans le cadre de la diligence raisonnable dont ils doivent faire preuve, pour identifier, prévenir et atténuer les risques de travail forcé et y faire face. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les résultats obtenus à cet égard.
Article 3 du protocole. Identification et protection des victimes. La commission prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement pour les années 20192022 concernant le nombre et les caractéristiques des victimes de traite accueillies dans les structures spécialisées (Centre d’accueil et de protection (CAP), l’assistance qui leur a été prodiguées (médicale, juridique, professionnelle, octroi de titres de résidence, aide au retour volontaire) et les différents services mis à leur disposition. La commission prend également note des informations transmises sur le système de signalement des victimes, les indicateurs développés par l’OTSH à cet égard, le mécanisme national d’orientation des victimes ainsi que le réseau pour le soutien et la protection des victimes de traite (RAPVT). Ce dernier a établi un protocole de collaboration et de partage d’informations qui réunit les ONG et les entités officielles afin de garantir aux victimes une protection et des mesures visant à leur réintégration. La commission note qu’au titre de la loi no 23/2007, les ressortissants étrangers victimes d’infractions pénales liées à la traite des êtres humains ont droit à un titre de séjour d’une durée d’un an (renouvelable), même s’ils sont entrés illégalement dans le pays, s’ils coopèrent avec la justice. Ce titre est octroyé à la fin du délai de réflexion accordé automatiquement par l’AIMA.IP aux victimes présumées de traite pour se rétablir et se soustraire à l’influence des auteurs des infractions (entre trente et soixante jours).
La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour identifier et assurer une protection adéquate à toutes les victimes de travail forcé en vue de leur rétablissement et réadaptation. Elle prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard et d’indiquer si les mécanismes mis en place pour les victimes de traite mentionnés ci-dessus s’appliquent également aux victimes d’exploitation au travail qui relèvent du travail forcé sans constituer le délit de traite.
Article 4, paragraphe 1, du protocole. Accès à des mécanismes de recours et de réparation. La commission prend dûment note des informations du gouvernement concernant les dispositifs légaux en place pour favoriser l’accès des victimes de travail forcé à la justice. Elle note en particulier le système de plaintes électroniques (SQE), hébergé sur le réseau national de sécurité intérieure (RNSI), qui permet de fournir conseil et appui aux victimes présumées; le système d’assistance juridique aux personnes en carence économique; l’exonération des frais de justice pour les victimes de traite et d’esclavage tout au long de la procédure pénale.
S’agissant de la réparation du préjudice subi, la commission note que la loi qui définit les objectifs de la politique criminelle (loi no 51/2023) précise que la protection des victimes et la réparation des dommages subis suite à une infraction constituent une priorité, et que les victimes doivent recevoir des informations appropriées et le soutien dont elles ont besoin pour exercer leurs droits. De manière générale, la réparation doit être demandée par la victime, dans le cadre de la procédure judiciaire pénale, qui en informe la police ou le ministère public lors de l’enquête. La loi no 104/2009 sur le régime de concession de l’indemnisation des victimes de crimes graves prévoit que ces victimes peuvent bénéficier d’une avance d’indemnisation par l’État, même si elles n’ont pas comparu ou ne peuvent pas comparaître dans le cadre de la procédure pénale. Cette indemnisation sera versée par la Commission de protection des victimes de crimes. La commission note également que le gouvernement indique qu’en 2021 aucune demande d’indemnisation n’a été présentée devant cette commission que ce soit par les victimes, le ministère public ou les ONG. Le gouvernement ne fournit pas d’information pour les autres années. La commission observe d’après le rapport annuel (2023) de l’OTSH qu’en avril 2023 le tribunal de première instance de Porto a condamné une personne reconnue coupable de faits de traite, en plus de la peine de prison, au versement d’une indemnité aux victimes pour réparation des préjudices causés à hauteur de 90 000 euros.
Face au faible nombre de victimes de travail forcé ayant reçu une indemnisation, la commission prie le gouvernement de poursuivre ses efforts pour s’assurer que toutes les victimes de travail forcé bénéficient effectivement d’une réparation. Elle le prie de fournir des informations à cet égard en distinguant les indemnisations versées par l’auteur de l’infraction dans le cadre d’une procédure pénale ou civile, des indemnisations octroyées par l’État.
Article 25 de la convention, et article 1, paragraphe 1, du protocole. Répression et application de sanctions efficaces. La commission prend note des informations détaillées fournies par le gouvernement sur les différents organes chargés du contrôle de l’application de la loi qui interviennent dans la lutte contre le travail forcé et la manière dont elles coopèrent. Elle note notamment en particulier l’action de l’Autorité pour les conditions de travail (ACT) qui contrôle non seulement les lieux de travail mais également les agences de placement et les entreprises de travail temporaire; le rôle du Département central d’investigation et d’action criminelle (DCIAP), organe chargé de coordonner et de gérer les enquêtes et la prévention de la criminalité violente; ainsi que l’AIMA.IP.
La commission note que, dans ses observations, la CGTP-IN estime que l’exploitation au travail, en particulier dans les zones agricoles, est fondamentalement hors de contrôle, notamment en raison du manque de capacité des autorités à contrôler les conditions dans lesquelles les travailleurs vivent et travaillent, et les abus dont ils sont victimes. L’UGT se réfère également au manque d’efficacité de l’action de l’Autorité des conditions de travail.
S’agissant des procédures judiciaires engagées, la commission note les informations fournies par le gouvernement, qui proviennent des rapports annuels de l’OSTH, sur les procédures judiciaires engagées et les condamnations obtenues dans les affaires de traite des personnes. Elle note que le gouvernement ne fournit aucune information sur les affaires concernant des cas de travail forcé qui ne relèvent pas du crime de traite des personnes. La commission observe par ailleurs que le Code pénal prévoit en plus des peines de prison devant être imposées aux auteurs de crimes relevant du travail forcé, d’autres peines accessoires qui peuvent être imposés tant aux individus qu’aux personnes morales collectives comme l’interdiction ou la suspension de l’exercice des fonctions, la privation du droit aux subventions ou aux aides publiques, l’obligation de rembourser tout ou partie des prestations, aides ou subventions publiques reçues, la fermeture de l’établissement, la publicité de la décision de condamnation, la saisie ou la confiscation de l’argent et les biens pour les affecter à la prévention de la traite des personnes.
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour renforcer les capacités de l’inspection du travail et des acteurs de la chaîne pénale afin qu’ils soient pleinement en mesure d’identifier les cas de traite des personnes et de toute autre forme de travail forcé notamment dans les secteurs identifiés à risque tels que l’agriculture ou la construction. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard ainsi que sur les poursuites judiciaires engagées et les décisions de justice rendues concernant la traite des personnes et les cas d’exploitation au travail non liée à la traite ainsi que sur les peines principales et accessoires imposées aux individus et aux entreprises responsables, y compris la confiscation de leurs avoirs et de leurs biens.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1. Incidence du refus de participer à un travail socialement nécessaire sur le droit à des prestations de chômage. S’agissant de l’obligation pour les chômeurs d’accepter un travail socialement nécessaire sous peine de perdre leur droit aux prestations de chômage, la commission note l’argumentaire déjà développé par le gouvernement selon lequel le travail socialement utile est une alternative à l’existence d’un emploi convenable, que les bénéficiaires en tirent des avantages professionnels, pécuniers et personnels, qu’ils peuvent déposer un recours non contentieux, et qu’ils disposent de quatre jours pour poursuivre leur recherche d’emploi. La commission note que, d’après les statistiques communiquées par le gouvernement, le nombre de bénéficiaires de prestations de chômage à qui il a été demandé de réaliser un travail socialement nécessaire dans le cadre du contrat insertion emploi (CEI) est en baisse constante depuis 2016 passant de 42 149 personnes à 18 642 en 2022. Dans le cadre de ces 18 642 demandes, 9 518 chômeurs ont effectivement réalisé un travail socialement nécessaire, 287 ont refusé et 155 ont perdu leur droit aux prestations de chômage. Le gouvernement indique par ailleurs que les motifs de refus ne sont pas connus et qu’il n’est pas non plus possible de déterminer le moment auquel les services de l’emploi demandent aux bénéficiaires de prestations de chômage d’accepter un travail socialement utile mais que ce travail est proposé en priorité aux personnes en situation de handicap, aux chômeurs de longue durée ou aux personnes âgées de plus de 45 ans. Enfin, le gouvernement réitère que les services de l’Institut de l’emploi et de la formation professionnelle (administré de manière tripartite) vérifie entre autres si le travail socialement nécessaire relève bien d’activités temporaires et ne correspond pas à un poste de travail
La commission note que, dans ses observations, la CGTP-IN se réfère de nouveau à la pression exercée sur les bénéficiaires d’allocations de chômage pour qu’ils acceptent un travail socialement nécessaire dans le cadre des CEI, au fait que le gouvernement n’a pas entamé de négociations avec les partenaires sociaux (du moins à la connaissance de la CGTP-IN) pour modifier les modalités des CEI, et que ces derniers permettent de remplir des emplois permanents, y compris dans l’administration et les services publics.
La commission observe que le nombre de chômeurs à qui il est demandé d’accepter le travail socialement nécessaire est en baisse constante depuis 2016, que la différence entre le nombre de ceux qui réalisent le travail et ceux à qui on l’a demandé est de moitié, et que des refus sont acceptés. Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour s’assurer que l’obligation d’accomplir le travail socialement nécessaire dans le cadre des CEI concerne les chômeurs en fin de droits de manière à ce que ceux qui viennent de perdre leur emploi disposent d’une période raisonnable pour rechercher à plein temps et choisir librement un emploi convenable, sans crainte de perdre leur droit aux prestations de chômage. La commission prie également le gouvernement d’indiquer si des consultations spécifiques avec les partenaires sociaux sur ce point sont envisagées.
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