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Caso individual (CAS) - Discusión: 2013, Publicación: 102ª reunión CIT (2013)

Convenio sobre el trabajo forzoso, 1930 (núm. 29) - Malasia (Ratificación : 1957)
Protocolo de 2014 relativo al Convenio sobre el trabajo forzoso, 1930 - Malasia (Ratificación : 2022)

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2013-Malaisie-C29-Fr

Le gouvernement a communiqué les informations écrites suivantes.

Le gouvernement a indiqué que le Plan national d’action contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants (2010-2015) est en place. Le plan d’action couvre les huit domaines fondamentaux suivants: i) mise en place d’un Conseil de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants (le conseil); ii) renforcement de la législation existante sur la lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants; iii) établissement de centres d’accueil; iv) collaboration avec des groupes de la société civile; v) renforcement des capacités des organes chargés de faire appliquer la loi; vi) élaboration de documents sur les procédures normalisées relatives à la lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants; vii) coopération internationale/bilatérale; et viii) sensibilisation. Le Conseil de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants, mis en place en 2008 et présidé par le secrétaire général du ministère de l’Intérieur, a pour objet de formuler le Plan national d’action pour la prévention et la suppression de la traite des personnes, et d’en superviser la mise en œuvre, y compris d’appuyer et de protéger les personnes victimes de la traite.

En 2010, la loi de 2007 contre la traite des personnes (loi no 670) a été modifiée pour y inclure les éléments suivants: i) définition de la traite des personnes, consistant en toute action visant à obtenir d’une personne le travail ou des services et à les maintenir par la coercition à des fins d’exploitation. Les profits de la traite des personnes n’émanent pas de la circulation des personnes mais de la vente de leurs services ou de leur travail dans le pays de destination; et ii) trafic illicite de migrants, qui signifie mettre au point, faciliter ou organiser directement ou indirectement l’entrée ou la sortie illégale d’une personne de tout pays dont la personne n’a pas la nationalité ou dans lequel elle n’est pas résidente permanente. Il y a actuellement six centres d’accueil officiels pour les victimes de la traite à des fins de travail. Chaque centre peut accueillir 200 personnes en même temps et fonctionne depuis le 15 août 2010. Outre les centres d’accueil gérés par le gouvernement, ce dernier coopère aussi activement à des groupes de la société civile pour mettre en place d’autres centres d’accueil et fournir des conseils et une formation aux victimes de la traite. Le renforcement des capacités constitue également un élément essentiel des efforts déployés pour accroître les opérations d’enquête et de renseignement des organes chargés de l’application de la loi. Pour ce faire, les organes directement impliqués tels que le Département de l’immigration, la Police royale malaisienne, la garde côtière malaisienne, les douanes royales malaisiennes et le Département du travail suivent activement des cours de formation au niveau local ou en coopération avec d’autres pays, tels l’Australie et le Brésil.

La paix, la prospérité et le développement rapide du pays ont attiré des étrangers dont la majorité est à la recherche de possibilités d’emploi, en particulier ceux qui viennent de pays connaissant une instabilité politique et économique. Dans le même temps, la Malaisie a besoin de travailleurs étrangers dans certains secteurs d’activités, notamment les services, les plantations, l’industrie, le bâtiment et l’industrie manufacturière. L’existence d’une législation contre la traite complétée par la loi sur l’emploi de 1955 et d’autres lois relatives au travail répond au problème de l’exploitation au travail. Afin de réglementer le recrutement de main-d’œuvre étrangère, le gouvernement a signé des mémorandums d’accord avec au moins 13 pays d’origine, y compris un mémorandum d’accord spécifique sur le recrutement et le placement des travailleurs domestiques. Tous les mémorandums d’accord visent à bénéficier également aux travailleurs et aux employeurs. Une illustration est le mémorandum d’accord sur le recrutement de travailleurs indonésiens étrangers, signé en 2003, et les négociations qui s’ensuivirent pour renforcer davantage la coopération bilatérale entre la Malaisie et l’Indonésie. Le gouvernement ne tolère aucune transgression de la loi contre la traite des personnes. En avril 2013, 442 cas de cette nature avaient été portés devant les tribunaux et 174 cas étaient en attente de jugement en vertu de la loi contre la traite des personnes de 2007. En conclusion, la mise en application de celle-ci restera au cœur de l’engagement du gouvernement en matière de traitement des aspects relatifs au travail forcé.

En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental, se référant, en les complétant, aux informations écrites fournies à la commission, a insisté sur le fait que son gouvernement a pris diverses mesures, dans le cadre de ses efforts constants pour contrôler, prévenir et supprimer le problème de la traite des personnes. Parmi ces mesures, il convient de citer la ratification de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son protocole additionnel, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Protocole sur la traite). De plus, 30 procureurs d’Etat spécialisés ont été nommés, et des directives ont été publiées sur la gestion des cas de traite des personnes. Diverses mesures ont été prises pour éviter que les crimes de traite des personnes soient confondus avec ceux de trafic illicite de migrants. Le renforcement des capacités est indispensable pour garantir que le personnel de toutes les institutions et les organisations non gouvernementales (ONG) qui prennent part aux efforts de lutte contre la traite des personnes aient les connaissances et les compétences requises, en particulier dans les domaines de la politique à suivre, de la prévention, de la protection, de la réinsertion et des poursuites. A cet égard, il est très important de veiller au partage des connaissances et des expériences avec les partenaires étrangers. Des procédures opérationnelles standardisées ont également été mises au point pour les comités du Conseil de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants, tandis qu’un système d’orientation nationale été élaboré pour filtrer les cas et les rapports de traite de personnes et de transfert illicite de migrants. Parmi les actions menées par le gouvernement dans le domaine du renforcement des capacités, on citera le séminaire organisé en 2011 par les services du procureur général à l’intention des participants d’ONG, d’institutions privées, d’universités et d’institutions publiques sur les droits des travailleurs et les rôles et responsabilités des employeurs.

Il a insisté sur le fait que la traite des personnes est un crime complexe qui implique souvent des syndicats du crime opérant en réseaux organisés, structurés et bien établis. Il convient donc de prévoir une réponse complète et coordonnée, accompagnée d’une coopération et d’une collaboration aux échelles nationale, régionale et internationale. Le problème de la traite des personnes étant relativement nouveau dans le pays, il a fallu se concentrer sur la diffusion constante et vaste de l’information et investir dans le renforcement des capacités et l’obtention du soutien des chefs de communauté afin de forger l’opinion publique. Des efforts sont déployés afin d’assurer une collaboration et une coordination étroites entre les organes chargés de faire respecter les lois, les ministères et les agences concernés, y compris les gouvernements d’Etat et les autorités locales, pour assurer le partage de l’information, le contrôle des points d’entrée, la prévention, les enquêtes et les poursuites, le but étant de garantir la protection en temps utile des victimes et la condamnation des coupables. Le gouvernement met également l’accent sur la mise en place d’un système de gestion de l’information qui soit systématique et effectif afin d’améliorer la coordination entre les institutions et de sensibiliser le public grâce à la diffusion des informations pertinentes.

Les membres employeurs ont souligné leur soutien inconditionnel à la convention et leur détermination à éliminer le travail forcé, dont la traite des personnes à des fins de travail forcé. Ils ont également exprimé leur soutien à l’initiative visant à fixer de nouvelles normes pour compléter la convention. La Malaisie est, pour l’essentiel, un pays de destination pour les travailleurs migrants et, comme d’autres pays dans ce cas-là, un certain nombre de problèmes semblent se poser en ce qui concerne les travailleurs migrants. Certaines informations font état de travailleurs migrants victimes de pratiques telles que la confiscation de leur passeport par leur employeur, le non-paiement des salaires et la privation de liberté, ce qui n’est pas conforme à la convention et au droit en général. Deux gouvernements, Indonésie et Cambodge, avaient suspendu l’envoi de leurs citoyens en Malaisie afin d’y occuper un emploi. Le gouvernement de l’Indonésie vient de lever cette suspension après la conclusion d’un accord avec le gouvernement de la Malaisie, en vertu duquel les travailleurs migrants indonésiens peuvent conserver leur passeport, toucher des salaires correspondant aux cours du marché du travail et bénéficier d’une journée de repos par semaine. De l’avis des membres employeurs, des progrès auraient donc été accomplis dans ce domaine, notamment dans le cadre de l’accord conclu avec le gouvernement de l’Indonésie. Il convient également de noter l’adoption de la loi de 2007 contre la traite des personnes, qui prévoit des sanctions pénales contre toute personne reconnue coupable de traite à des fins de travail forcé. Le gouvernement semble prendre des mesures concrètes pour lutter contre les violations de la loi et appliquer les sanctions prévues. Les membres employeurs ont exprimé l’espoir que les condamnations prononcées soient assorties des sanctions adéquates et souhaité recevoir des données statistiques à ce sujet. Les nombreuses autres mesures mentionnées par le représentant gouvernemental sont également source d’intérêt.

Les membres travailleurs ont rappelé que le travail forcé est interdit par la Constitution et la législation du pays. En 2007, une loi contre la traite des personnes a été adoptée pour lutter contre un phénomène qualifié déjà en 2001 comme un fléau grandissant et évoluant rapidement avec les avancées technologiques en matière de transport et celles de la criminalité organisée. La Malaisie est un pays de destination et, dans une moindre mesure, d’origine et de transit pour les hommes, les femmes et les enfants victimes de la traite, en particulier à des fins de prostitution et de travail forcé. Bien que la nouvelle législation prévoie des sanctions sévères, force est de constater que le gouvernement ne donne pas d’informations sur les sanctions prononcées en la matière. Un rapport d’Interpol met d’ailleurs l’accent sur la prostitution forcée des femmes ougandaises en Malaisie, dont certaines ont été détournées durant leur voyage vers la Chine ou la Thaïlande où elles ont été contraintes de se livrer à la prostitution. Les chiffres exacts demeurent cependant inconnus. La majorité écrasante des victimes de la traite de personnes font partie des 2 millions de travailleurs en situation régulière et des quelque 1,9 million de travailleurs en situation irrégulière en provenance essentiellement d’Indonésie, du Népal, d’Inde, de Thaïlande, de Chine, des Philippines, de Birmanie, du Cambodge, du Bangladesh, du Pakistan et du Viet Nam. Des enfants sont même souvent exploités en tant que main-d’œuvre très bon marché, pour l’exploitation sexuelle, à des fins de mariages forcés, pour leur faire exécuter des activités criminelles, participer à des conflits armés ou se livrer à la mendicité. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) attire pour sa part l’attention sur le fait que la traite des enfants est considérée comme chose normale dans le pays. Les cas de tromperie et de fraude salariale, de confiscation de passeports, de servitude pour dettes ou encore l’aménagement de logements dans des entrepôts sont fréquents. La traite des personnes à des fins de travail forcé représente en effet l’une des industries les plus rentables au monde. Or le gouvernement ne fait état que de 844 personnes victimes de la traite bénéficiant d’une protection judiciaire, accordée en vertu de l’article 51 de la loi de 2007, et de 2 289 autres ayant bénéficié d’une protection temporaire de quatorze jours en vertu de l’article 44 de la même loi. Dès lors, soit le gouvernement ne dispose pas d’informations statistiques correctes en la matière, soit il fait une présentation trop optimiste des faits. Dans tous les cas, il y a un fossé entre les informations qu’il a fournies et celles provenant d’ONG et d’institutions internationales.

Rappelant que la convention exige de sanctionner pénalement par le biais de sanctions réellement efficaces et strictement appliquées l’imposition de travail forcé ou obligatoire, les membres travailleurs ont regretté de ne trouver aucune information dans le rapport du gouvernement sur les sanctions prononcées dans la pratique. Cela démontre que le gouvernement ne fait pas assez d’efforts pour combattre le problème et n’essaie pas d’éradiquer véritablement le travail forcé, qui a des effets traumatisants tant moraux que physiques sur les individus, dont un grand nombre éprouve de grandes difficultés à se réinsérer par la suite. Pourtant, en tant qu’Etat partie depuis 2009 au Protocole sur la traite, le gouvernement devrait connaître les dispositions de l’article 6 de ce texte adopté en 2000. Les membres travailleurs ont considéré qu’il apparaît clairement que le gouvernement ne respecte ni la lettre ni l’esprit de la convention et que davantage d’efforts sont nécessaires pour mettre en œuvre les observations de la commission d’experts. Il s’agit d’un cas grave, qui ne représente probablement à ce stade que la pointe de l’iceberg.

Le membre travailleur de la Malaisie a insisté sur le fait que les quelque 2,2 millions de travailleurs migrants en situation régulière en Malaisie et les quelque 2 millions de travailleurs en situation irrégulière travaillent non seulement dans les plantations, qui étaient auparavant leur principal secteur d’emploi, mais aussi dans l’industrie manufacturière, les services et les travaux domestiques. Les migrants sont originaires des pays voisins et sont arrivés par le biais des agences de recrutement. Toutefois, il n’existe pas de mécanisme de suivi adéquat pour les travailleurs migrants, il n’y a jamais eu de politique globale concernant la main-d’œuvre étrangère, et le gouvernement ignore le nombre exact de travailleurs concernés. Même si, dans la plupart des cas, il n’existe aucun accord entre le gouvernement de la Malaisie et les gouvernements des pays d’origine des migrants, en 2011, un accord a été signé avec le gouvernement de l’Indonésie en vertu duquel les travailleurs migrants indonésiens ont le droit de conserver leur passeport, de toucher des salaires au niveau du marché du travail et de bénéficier d’un jour de congé par semaine. Même si le gouvernement a semblé considérer que l’accord conclu avec le gouvernement de l’Indonésie répondait aux problèmes rencontrés par les travailleurs migrants, la réalité est tout autre. On ne parle toujours pas ni honnêtement ni ouvertement du caractère institutionnalisé des abus dont ces travailleurs sont victimes, alors que les discussions entre les gouvernements concernés sont généralement axées sur la maximisation des profits, la réduction des coûts au minimum et le maintien des taux du marché à des niveaux compétitifs. Et pourtant les travailleurs migrants domestiques indonésiens subissent diverses formes de violence. Plus de la moitié d’entre eux ont été victimes de violences physiques, 15 pour cent ont été victimes de violences sexuelles, et leurs conditions de travail sont mauvaises, notamment pour les raisons suivantes: aucun jour de repos hebdomadaire rémunéré n’est prévu, les salaires ne sont pas payés, des déductions injustifiées sont faites sur les salaires, les logements ne sont pas adaptés, l’horaire de travail quotidien est élevé, les travailleurs ont plusieurs emplois et ils sont sous-alimentés. Les enquêtes effectuées par les ONG montrent que près de la moitié des travailleurs domestiques migrants ont moins de 21 ans, âge minimum légal pour le travail domestique en Malaisie. Les agences de recrutement soumettent les travailleurs domestiques migrants à de mauvais traitements: elles leur confisquent leurs passeports, les fouillent et leur confisquent les coordonnées de leur ambassade et des ONG qui pourraient les protéger, entre autres abus. L’accord conclu avec le gouvernement de l’Indonésie serait sans doute plus efficace s’il existait un véritable mécanisme de suivi de sa mise en œuvre.

Les travailleurs migrants originaires du Bangladesh sont également victimes de graves maltraitances. Après la levée du gel de leur recrutement au bout de dix ans par le gouvernement de la Malaisie en 2006, des milliers de travailleurs bangladais ont été recrutés et trompés par des sociétés d’externalisation agréées, qui leur ont confisqué leur passeport et qui n’ont pas fait renouveler leur permis de travail, les plaçant ainsi en situation irrégulière. Dans le cadre d’un programme lancé en 2011, le gouvernement a habilité 340 agents à enregistrer et à légaliser les travailleurs migrants, notamment en leur délivrant de nouveaux passeports et des permis de travail. Cependant, de nombreux agents sont en réalité ces mêmes sociétés d’externalisation qui les maltraitent. Un an et demi après le lancement du programme et six mois après la dernière date limite pour la fin du processus de régularisation, des milliers de travailleurs sont toujours dans une situation irrégulière. Ils ont non seulement perdu une année de salaire, mais également leurs passeports; ils vivent dans la crainte des arrestations et des détentions, subissent souvent des menaces de la part des agents. Même si des plaintes ont été déposées, aucun agent n’a été arrêté. Parmi ces derniers figure le cas d’un agent qui, d’après les informations fournies par les travailleurs concernés, a procédé à l’enregistrement de plus de 5 000 travailleurs, recueilli des fonds auprès d’eux et confisqué leurs passeports et continué de les menacer. Rien n’a été fait malgré les nombreuses plaintes déposées auprès des autorités bangladaises. Il conviendrait donc de demander aux autorités malaisiennes et bangladaises d’enquêter immédiatement sur la situation, de récupérer les passeports des travailleurs et de les leur rendre. L’orateur a demandé au gouvernement d’établir une feuille de route claire garantissant les droits de tous les travailleurs domestiques et migrants dans le pays, d’améliorer les moyens d’identifier les victimes de violences et de traite et d’offrir aux victimes une assistance juridique, des conseils et d’autres formes d’assistance. Le gouvernement doit avoir la volonté politique d’imposer des sanctions sévères en vertu de la loi sur la lutte contre la traite des personnes afin de dissuader les trafiquants, les agents et les employeurs de commettre des abus. La discussion du cas par la commission est dans ce contexte particulièrement bienvenue et donne espoir aux travailleurs concernés.

Le membre employeur de la Malaisie, déclarant que le travail forcé ne saurait être admis, a entièrement soutenu les initiatives et les actions positives prises par le gouvernement dans la lutte contre le travail forcé et son éradication, notamment la traite des personnes. Il convient de rechercher de toute urgence les raisons profondes pour lesquelles les travailleurs étrangers ont des dettes très importantes avant même de quitter leur pays. Par conséquent, le BIT et les agences des Nations Unies concernées devraient travailler étroitement avec les pays d’origine pour étudier la situation des recruteurs informels qui imposent des frais élevés aux travailleurs étrangers. Les gouvernements des pays d’origine devraient veiller à ce que des frais exorbitants ne soient pas imposés à leurs ressortissants à la recherche d’un emploi à l’étranger, dans la mesure où ces travailleurs apportent déjà une très forte contribution à leur pays par les fonds qu’ils envoient. Son organisation a demandé des politiques plus claires et plus cohérentes en matière de recrutement des travailleurs étrangers en vue de réduire le rôle des recruteurs informels. A cet égard, il a mentionné deux initiatives menées dans le cadre du projet TRIANGLE de l’OIT auxquelles la Fédération des employeurs de Malaisie a participé, à savoir l’étude commandée par la Confédération des employeurs (ACE) de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) en vue d’élaborer un recueil des meilleures pratiques à l’usage des pays d’origine et de destination pour ce qui est de la phase préalable au départ, l’emploi proprement dit et la phase post-emploi des travailleurs étrangers, et les «lignes directrices à destination des employeurs malaisiens relatives à la gestion de l’emploi des travailleurs étrangers»; l’orateur a dit espérer que des collaborations similaires à celle entreprise avec le Bureau régional de l’OIT à Bangkok seraient reproduites dans d’autres pays de la région. Il a exprimé le sincère espoir que, grâce aux initiatives en place, les questions relatives au travail forcé, en particulier celles concernant l’emploi des travailleurs étrangers, seraient mieux gérées et finalement éliminées une fois pour toutes.

La membre travailleuse de l’Indonésie a souligné que la Malaisie est un des principaux pays de destination des travailleurs migrants en Asie du Sud-Est et qu’elle compte près de 2 millions de travailleurs migrants indonésiens. Du fait des taux d’intérêt exorbitants des emprunts, la plupart n’ont pas les moyens de rentrer dans leur pays d’origine et certains sont en situation de servitude pour dettes. Beaucoup de travailleurs migrants travaillent dans des conditions dangereuses, notamment du fait des très longs horaires de travail, et sont victimes d’abus physiques et sexuels. Evoquant plus particulièrement la situation des travailleuses domestiques et leur vulnérabilité face à des abus tels que le harcèlement et le viol, elle a rappelé que le gouvernement de l’Indonésie avait interdit l’envoi de travailleurs domestiques indonésiens en Malaisie. Cette interdiction a été levée en 2011, après la signature par les gouvernements malaisien et indonésien d’un mémorandum d’accord sur l’âge minimum, les périodes de repos et la conservation des pièces d’identité. Cependant, dans la pratique, des employeurs et des recruteurs privés continuent à enlever leurs passeports aux travailleurs domestiques, le mémorandum d’accord n’étant donc pas correctement appliqué. En outre, il permet à l’employeur de compenser la journée de repos sous forme d’heures supplémentaires, sans qu’existe un mécanisme adéquat de contrôle du paiement desdites heures. Ces carences dans l’application du mémorandum d’accord pourraient encourager des pratiques assimilables à l’esclavage, et l’oratrice a considéré que le gouvernement doit encore faire la preuve de sa détermination à protéger les travailleurs domestiques contre le travail forcé.

Le membre travailleur du Cambodge a attiré l’attention sur le travail forcé que subissent des femmes et des jeunes filles qui émigrent en Malaisie pour y être employées comme travailleuses domestiques. Le manque de possibilités d’emploi pousse de nombreuses femmes à émigrer en Malaisie et, sur les 20 909 travailleurs y ayant émigré en 2010, 18 038 étaient des travailleurs domestiques. Il a souligné les situations de travail forcé, imputables à des employeurs ou à des recruteurs de main-d’œuvre informels basés tant en Malaisie qu’au Cambodge, et qui prennent la forme de prélèvements illégaux sur les salaires, de non-paiement des salaires et de confiscation de passeports. La protection offerte par la loi contre des durées de travail excessives, les mauvais traitements psychologiques, physiques et sexuels subis par les travailleurs domestiques est elle aussi insuffisante dans la mesure où les travailleurs domestiques sont exclus du bénéfice d’importantes dispositions protectrices de la législation du travail. Les travailleurs qui veulent quitter un employeur qui abuse d’eux perdent leur statut juridique et s’exposent souvent à des sanctions au titre de la loi sur l’immigration. Cette situation les dissuade souvent de mettre fin à ces relations de travail abusives, ce qui les rend vulnérables à des pratiques de travail forcé. Notant par ailleurs l’annonce par le gouvernement du Cambodge du gel de l’envoi de travailleurs migrants en Malaisie en réaction aux violations précitées, l’orateur a espéré aussi que le gouvernement de la Malaisie ne tolérera plus à l’avenir les pratiques de travail forcé imposées aux travailleurs domestiques migrants.

Le membre travailleur des Philippines a souligné que la Malaisie était devenue à la fois un pays d’origine, de destination et de transit de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. La majorité des victimes de la traite sont des travailleurs migrants originaires d’Indonésie, du Népal, d’Inde, de Thaïlande, de Chine, des Philippines, de Birmanie, du Cambodge, du Bangladesh, du Pakistan et du Viet Nam. En 2009, il y avait environ 2 millions de travailleurs migrants en situation régulière dans le pays et presque autant de travailleurs migrants en situation irrégulière dans le pays. Les travailleurs migrants dans les plantations, sur les chantiers de construction et dans les usines textiles, ainsi que les travailleurs migrants domestiques subissent des restrictions à la liberté de mouvement, sont victimes de fraude en matière de salaire, leurs passeports sont confisqués et ils sont soumis à la servitude pour dettes. Un nombre important de jeunes femmes sont recrutées dans des restaurants et hôtels puis forcées à travailler dans l’industrie du sexe; de nombreuses sociétés de sous-traitance recrutent des travailleurs qui sont ensuite soumis à des conditions de travail forcé. L’orateur a attiré l’attention sur le très faible nombre de poursuites engagées en application de la loi contre la traite des personnes et sur l’absence d’informations sur les sanctions spécifiques appliquées ainsi que sur l’expulsion de certaines victimes de traite qui avaient dans un premier temps bénéficié d’une ordonnance de protection. L’orateur a exhorté le gouvernement à redoubler d’efforts pour: i) enquêter sur les infractions de traite de main-d’œuvre et engager des poursuites contre leurs auteurs; ii) repérer les victimes de la traite de main-d’œuvre; iii) engager des poursuites en cas de corruption des agents du gouvernement liée à la traite; et iv) améliorer la collaboration avec les syndicats, les organisations non gouvernementales et les organisations internationales afin d’améliorer les services aux victimes dans les centres d’accueil.

Le représentant gouvernemental a affirmé une nouvelle fois que son gouvernement a la volonté ferme de régulariser et d’accroître sa collaboration avec les partenaires sociaux dans le pays, et de collaborer avec les gouvernements et la communauté internationale afin de réduire, voire éliminer, la traite des personnes transfrontalière. Comme indiqué dans le Plan national d’action contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants (2010-2015), le gouvernement a établi des politiques destinées à réduire les possibilités de traite des personnes, en collaboration avec les partenaires sociaux et la société civile, et par le biais d’un dialogue constructif. La collaboration régionale avec les pays d’Asie destinée à régir la migration transfrontalière des travailleurs, en particulier ceux qui ont des documents d’identité appropriés, est également importante dans le cadre des efforts de lutte contre la traite des personnes. Par le biais du Conseil de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite des migrants, le gouvernement a mis en place au cours des trois dernières années un nouveau mécanisme et de nouvelles méthodes appropriés et viables pour faire face au problème et le gérer. Si le gouvernement partage les préoccupations exposées à la commission, il ne peut porter seul la responsabilité de régler la question de la traite des personnes. Il faut plutôt que toutes les parties concernées, y compris les partenaires sociaux, fassent des efforts en commun. Insistant sur l’importance du respect de la loi, l’orateur a assuré que les organes qui en ont la charge collaboreront pleinement avec les parties concernées pour traiter et résoudre ce problème dans les meilleurs délais.

Les membres employeurs ont déclaré que c’est la première fois que ce cas est discuté au sein de la commission et qu’ils ne partagent pas l’avis des membres travailleurs selon lequel l’observation de la commission d’experts ne ferait que décrire «la pointe de l’iceberg». Le gouvernement ne nie pas le fait que des problèmes de travail forcé se posent dans le pays. Il a d’ailleurs fourni des informations sur les mesures constructives qu’il a prises pour faire face à ces problèmes. Les membres employeurs ont encouragé le gouvernement à collaborer avec les partenaires sociaux et avec d’autres pays de la région, en particulier les pays d’origine des travailleurs concernés, pour traiter la question du travail forcé. A cet égard, il convient d’attacher plus d’importance aux mémorandums d’accord tels que celui qui a été signé avec le gouvernement de l’Indonésie en vue d’assurer la protection des droits des travailleurs provenant des pays avec lesquels ils ont été signés, en termes d’heures de repos, de congés et de salaires, et pour que les travailleurs puissent garder leur passeport. Ils ont demandé au gouvernement de présenter en 2014 un rapport à la commission d’experts sur les progrès accomplis.

Les membres travailleurs, après avoir rappelé que la Malaisie a ratifié la convention en novembre 1957, ont constaté que la traite des personnes à des fins de travail de forcé s’est fortement accrue en Malaisie. Ce phénomène, lié à la mondialisation, est visible dans de nombreux pays de la planète. En 2007, la Malaisie a adopté la loi contre la traite des personnes qui prévoit des sanctions pénales allant jusqu’à vingt ans d’emprisonnement. Cependant, aucune information n’est disponible sur les sanctions spécifiques qui auraient été prononcées en application de cette loi. Dans leur très grande majorité, les victimes de la traite des personnes en Malaisie appartiennent aux 4 millions de travailleurs étrangers présents dans le pays, qu’ils soient en situation régulière ou irrégulière, essentiellement en provenance de pays d’Asie du Sud-Est et d’Asie du Sud. Ils sont très nombreux à être trompés sur le type de travail qu’ils seront amenés à faire, sur le montant de leurs salaires ainsi que sur les traitements qu’ils devront subir tels que l’exploitation sexuelle, la servitude pour dettes ou plus grave encore. Les victimes de travail forcé sont souvent traitées comme des criminelles lorsqu’elles se trouvent en situation irrégulière.

Les membres travailleurs ont considéré que le gouvernement de la Malaisie ne respecte ni la lettre ni l’esprit de la convention, que ce cas devrait être suivi de très près par la commission et que le gouvernement doit sans délai mettre en œuvre les observations de la commission d’experts. Ils ont prié le gouvernement de poursuivre ses efforts de lutte contre la traite, notamment dans le cadre de son Plan national d’action contre la traite des personnes et le trafic illicite des migrants (2010-2015) et de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard et sur les résultats obtenus. Rappelant que l’article 25 de la convention oblige les Etats à appliquer de manière stricte des sanctions pénales efficaces en cas d’imposition de travail forcé, ils ont prié le gouvernement de fournir des informations sur les sanctions spécifiques prononcées contre les personnes condamnées en vertu de la loi contre la traite des personnes. Les membres travailleurs ont signalé qu’en juin 2009 le gouvernement indonésien avait instauré un moratoire sur le placement des travailleurs domestiques en Malaisie afin de protéger ses ressortissants et que, depuis lors, un mémorandum d’accord révisé sur l’emploi des travailleurs domestiques indonésiens a été signé entre les deux pays. A la différence de l’accord antérieur, l’accord révisé prévoit que les travailleurs domestiques indonésiens ont le droit de conserver leur passeport en Malaisie. Ils ont de plus le droit de bénéficier d’une journée de repos par semaine et de percevoir des salaires correspondants aux cours du marché du travail. Relevant toutefois que le contenu de l’accord ne semble pas du tout respecté, les membres travailleurs ont insisté pour que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour l’application du mémorandum, tant en droit que dans la pratique. Ils ont invité le gouvernement à solliciter l’assistance technique du BIT à ce sujet.

Conclusions

La commission a pris note des informations orales et écrites communiquées par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi en ce qui concerne la traite des personnes et la vulnérabilité des travailleurs migrants à l’imposition du travail forcé.

La commission a noté les informations fournies par le représentant gouvernemental énumérant les diverses mesures prises pour lutter contre la traite des personnes et le trafic illicite des migrants, notamment la mise en œuvre du Plan national d’action contre la traite des personnes et le trafic illicite des migrants (2010-2015) qui comprend des activités de renforcement des capacités des agents chargés du contrôle de l’application de la loi et de sensibilisation, et des mesures pour mettre en place des centres d’accueil pour les victimes de la traite. Elle a également noté l’information du gouvernement selon laquelle, considérant le nombre élevé de travailleurs migrants dans certains secteurs, tels que les services, les plantations, la construction, l’industrie manufacturière et le travail domestique, le gouvernement a signé des mémorandums d’accord avec 13 pays d’origine, y compris un mémorandum d’accord spécifique sur les travailleurs migrants domestiques.

Tout en prenant note des politiques et programmes adoptés par le gouvernement pour lutter contre la traite des personnes, et d’un certain nombre de procédures engagées en vertu de la loi contre la traite des personnes, la commission a noté la préoccupation exprimée par plusieurs orateurs en ce qui concerne l’ampleur de ce phénomène. La commission a donc prié instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts pour lutter contre la traite des personnes. A cet égard, elle a prié le gouvernement de poursuivre ses efforts en vue de renforcer les capacités des autorités publiques pertinentes, notamment l’inspection du travail, afin de leur permettre d’identifier les victimes et de traiter efficacement les plaintes reçues. En outre, elle a prié le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour assurer aux victimes de la traite une protection adéquate et une indemnisation. Notant l’absence d’information à cet égard, la commission a également prié le gouvernement de fournir des informations sur les sanctions spécifiques infligées aux personnes condamnées en vertu de la loi contre la traite des personnes.

Tout en prenant note des accords bilatéraux conclus entre le gouvernement de la Malaisie et d’autres pays en vue de réglementer les conditions d’emploi des travailleurs migrants, la commission a noté avec regret l’absence d’information de la part du gouvernement concernant toute mesure supplémentaire visant à protéger les nombreux travailleurs migrants dans le pays. A cet égard, la commission a pris note des informations fournies par plusieurs orateurs selon lesquelles les travailleurs, qui sont volontairement entrés en Malaisie en quête d’opportunités économiques, avaient par la suite été soumis au travail forcé par les employeurs ou agents de recrutement informels qui utilisaient certaines méthodes telles que la restriction de mouvement, le non-paiement des salaires, le retrait des passeports et la privation de liberté. La commission a rappelé l’importance de prendre des mesures efficaces afin d’assurer que le système d’emploi des travailleurs migrants ne place pas les travailleurs concernés dans une situation de vulnérabilité accrue, en particulier quand ils sont soumis à des pratiques abusives de la part de leur employeur, ce qui pourrait transformer leur relation d’emploi en une situation relevant du travail forcé. La commission a donc prié instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées pour assurer que, dans la pratique, les victimes ne soient pas traitées comme des criminels et soient en mesure de s’adresser aux autorités judiciaires compétentes en vue d’obtenir réparation en cas d’abus et d’exploitation. En outre, notant l’absence d’information sur le nombre de poursuites judiciaires concernant les conditions de travail des travailleurs migrants relevant de l’exploitation, la commission a prié instamment le gouvernement de prendre des mesures immédiates et efficaces afin de s’assurer que les auteurs soient poursuivis et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives soient imposées. La commission a encouragé le gouvernement à continuer à négocier des accords bilatéraux avec des pays d’origine, à assurer leur mise en œuvre pleine et efficace, pour que les travailleurs migrants soient protégés contre les pratiques abusives et les situations relevant du travail forcé une fois dans le pays, et à collaborer avec les pays d’origine afin que des mesures soient prises pour les protéger avant leur départ.

La commission a demandé au gouvernement d’accepter une mission d’assistance technique pour assurer pleinement l’application effective de cette convention fondamentale. Elle a prié le gouvernement de fournir un rapport détaillé à la commission d’experts traitant de toutes les questions soulevées par cette commission et la commission d’experts, pour examen à sa prochaine session. La commission a exprimé l’espoir qu’elle sera en mesure de constater, dans un très proche avenir, des progrès tangibles dans l’application de la convention.

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