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Caso individual (CAS) - Discusión: 2015, Publicación: 104ª reunión CIT (2015)

Convenio sobre la libertad sindical y la protección del derecho de sindicación, 1948 (núm. 87) - El Salvador (Ratificación : 2006)

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 2015-El Salvador-C87-Fr

Une représentante gouvernementale a souligné l’importance que le gouvernement attache aux activités relatives à l’OIT, en particulier la promotion de la liberté syndicale et du dialogue tripartite. En ce qui concerne les faits déplorables qui se sont soldés par la mort d’un représentant du mouvement syndical, l’oratrice a assuré que le gouvernement les a fermement condamnés et ordonné une enquête afin d’identifier les responsables. L’oratrice a assuré qu’il s’agit de faits isolés. Le cas est examiné par le Procureur général de la République qui, dans le souci de faciliter la procédure d’enquête, l’a transmis de la ville de Santa Ana à la ville de San Salvador. Selon les dernières notifications, le procureur a demandé de nouveaux éléments de preuve et informations à la police nationale civile. L’oratrice a indiqué que, malheureusement, les taux élevés de criminalité et de violence dans le pays font que les services du ministère public ont beaucoup de travail, ce qui retarde les enquêtes. L’oratrice a réaffirmé la détermination du gouvernement à renforcer le système judiciaire, à lutter contre l’impunité et à agir pour garantir le respect de la vie et l’intégrité du peuple salvadorien. Quant à la participation des travailleurs et des employeurs aux instances de décision paritaires ou tripartites, l’oratrice a indiqué qu’effectivement 19 institutions publiques et autonomes ont fait l’objet d’une profonde réforme qui permettra d’accroître la participation des organisations de petites, moyennes et grandes entreprises ainsi que des syndicats, des fédérations et des confédérations syndicales, qui en étaient autrefois exclues. Cela est particulièrement important dans des instances déterminantes pour défendre les droits des travailleurs, par exemple l’Institut salvadorien de la sécurité sociale (ISSS), le Fonds social pour le logement (FSV) et l’Institut salvadorien de la formation professionnelle (ISAFORP), entre autres. La structure paritaire et tripartite, prévue dans le décret législatif du 2 juillet 1993, n’a pas été modifiée, pas plus que ne l’ont été les espaces tripartites auxquels participent des organisations d’employeurs comme l’Association nationale des entreprises privées (ANEP). Celles-ci continuent d’y participer effectivement, par exemple au Conseil du salaire minimum et à d’autres entités tripartites. En ce qui concerne le Conseil supérieur du travail (CST), l’oratrice a indiqué qu’il n’est pas en fonction, en raison d’un désaccord de la représentation syndicale. Le ministère du Travail n’épargne pas ses efforts pour résoudre ce problème, comme le montre le fait qu’il a organisé des réunions de mai à octobre 2013 pour former le CST, ainsi que les trois réunions qui se sont tenues pour élire les représentants syndicaux respectifs. Lors de la première réunion, deux blocs se sont constitués; ils ont soutenu deux listes de représentants élus, mais il n’a pas été possible d’élire une seule liste. Suite à ce désaccord, une seconde réunion s’est tenue avec les représentants des organisations syndicales; 37 fédérations et 8 confédérations y ont participé. Elle n’a pas débouché non plus sur un accord. En juillet 2013, il y a eu une réunion de la direction du CST. En l’absence de représentants élus des travailleurs, afin de trouver une solution, les représentants syndicaux de la période précédente ont été convoqués. Pendant cette réunion, les représentants des travailleurs, dont le mandat s’était terminé, ont exigé du ministre du Travail qu’il accepte l’une des listes qu’ils avaient présentées, en affirmant qu’elle était la plus représentative des intérêts de l’ensemble des travailleurs. L’assesseur des employeurs représentés au CST avait approuvé cette désignation, mais cela n’a pas été possible, la procédure d’élection n’étant pas conforme à la procédure établie dans le règlement applicable. Etant donné que la réactivation du CST reste une priorité importante depuis juin 2014 et jusqu’à juin 2015, seize réunions bilatérales et conjointes se sont tenues avec les différents représentants syndicaux afin de continuer à chercher une solution, mais cela n’a pas abouti. Ces éléments démontrent que le gouvernement est résolu à ce que le CST fonctionne.

En ce qui concerne le droit syndical des fonctionnaires, l’oratrice a indiqué que le nombre de syndicats créés et légalement enregistrés a augmenté ces cinq dernières années. Sur les 464 syndicats actifs dans le pays, on dénombre 99 syndicats dans le secteur public et 35 dans les institutions autonomes. Elle a également indiqué que le premier syndicat de travailleuses domestiques rémunérées a été enregistré. L’objectif est que les procédures de formation des syndicats soient souples, efficaces et conformes à la législation et à la convention. Elle a souligné néanmoins qu’il fallait de nouveau examiner les dispositions législatives qui continuent de restreindre l’exercice effectif de la liberté syndicale. En ce qui concerne la législation établissant un délai maximum de six mois pour obtenir la personnalité juridique d’un syndicat, elle a indiqué que, dans la pratique, cette législation n’est pas un obstacle puisque les organisations syndicales reçoivent une réponse bien avant le terme de ce délai, quel que soit le type de procédure engagé. L’oratrice a fait état de la mise en place récente, à l’initiative du Président de la République, de la Commission présidentielle chargée des affaires du travail, en vertu du décret exécutif no 86, pour répondre à la demande des travailleurs de pouvoir communiquer directement avec la présidence de la République. Cette commission, principalement axée sur le secteur public, constitue un espace de dialogue qui ne cherche aucunement à remplacer les mécanismes de participation tripartite déjà en place dans le pays. Ainsi, les propositions examinées par cette commission seront transmises aux instances respectives. Elle a regretté que le secteur des employeurs discrédite cette initiative et s’ingère dans les affaires et les espaces légitimement réservés aux travailleurs. De même, elle a déploré que l’ANEP s’avance à donner un avis sur des points qui n’étaient pas inscrits à l’ordre du jour des discussions, comme le salaire minimum. Elle a souligné que le gouvernement a ouvert des espaces de dialogue social avec tous les secteurs sociaux, y compris les entreprises du secteur privé qui sont essentielles au développement économique et à la création d’emplois dans le pays, comme indiqué dans le Plan quinquennal pour le développement 2014-2019. Elle a salué les propositions d’assistance technique du BIT et a réaffirmé l’engagement du ministère du Travail à réaliser tous les efforts nécessaires pour donner effet aux dispositions de la convention, à la lumière des observations et des recommandations de la présente commission.

Les membres travailleurs ont exprimé leur grande inquiétude face à la situation de violence dans laquelle le pays est plongé. Ils indiquent que, au mois de mai 2015, 20 travailleurs ont été assassinés. Une telle violence est inédite depuis la fin de la guerre civile en 1992. La situation est extrêmement préoccupante, d’autant plus que les actes de violence sont dirigés contre des représentants syndicaux. En janvier 2010, M. Victoriano Abel Vega, secrétaire général du Syndicat des travailleurs et des employés municipaux de la municipalité de Santa Ana, a été assassiné. La commission d’experts a condamné cet acte, et le Comité de la liberté syndicale en a été saisi. Les cas nos 2957 et 2896 sont également examinés devant ce comité. Ces cas concernent la détention d’un représentant syndical et la dissolution d’un syndicat de branche ainsi que la création d’un syndicat d’entreprise contrôlé par l’employeur. Se référant à l’article 2 de la convention no 87, les membres travailleurs affirment que la réglementation nationale ne respecte pas cet article de la convention, en particulier le délai nécessaire pour l’introduction d’une nouvelle demande lorsqu’un enregistrement a été refusé; la possibilité pour un travailleur de s’affilier à plusieurs organisations; la question de la procédure d’enregistrement; et la nécessité pour l’organisation syndicale de certifier le statut de ses membres. S’agissant du délai, l’article 248 du Code du travail prévoit qu’une nouvelle demande de constitution d’un syndicat doit être formulée au moins six mois après la précédente. En 2009, le gouvernement s’est engagé, comme le démontre le rapport connu sous le nom de «Livre blanc», à réformer la législation du travail dans le pays et à modifier l’article 248 du Code du travail. Vu les engagements récurrents du gouvernement et l’absence de modification de l’article 248 du Code du travail, les membres travailleurs expriment leur inquiétude et souhaitent que ce problème soit réglé dans les plus brefs délais. S’agissant de la possibilité d’affiliation à plusieurs organisations, ils ont rappelé qu’il est nécessaire de modifier l’article 204 du Code du travail qui interdit une telle affiliation. Pour ce qui est de la procédure d’enregistrement, ils soulignent que l’article 219 du Code du travail dispose que, dans le cadre d’une telle procédure, l’employeur doit certifier le statut de salariés des membres fondateurs et, par conséquent, il est nécessaire que le gouvernement prenne des mesures pour modifier cette disposition, par exemple en permettant au ministère du Travail d’établir le certificat. Pour conclure, les membres travailleurs ont attiré l’attention de la commission sur la non-conformité des articles 47 de la Constitution, 225 du Code du travail et 90 de la loi sur la fonction publique avec l’article 3, paragraphe 1, de la convention no 87. En effet, ces articles exigent que le travailleur doit être «salvadorien de naissance» pour être membre du conseil de direction d’un syndicat. A ce jour, le gouvernement n’a toujours pas modifié les dispositions susmentionnées. Face à une telle situation, il est important que le gouvernement agisse dans les plus brefs délais pour apporter les modifications législatives nécessaires qui pourront garantir le respect de la liberté syndicale et de la négociation collective.

Les membres employeurs ont indiqué que ce cas était considéré comme un cas très grave de par la nature des actions attribuées au gouvernement et parce qu’il est récurrent depuis trois ans. En dépit des commentaires des organes de contrôle de l’OIT, la situation, loin de s’améliorer, s’est aggravée. En 2012, le Président de la République a déposé un projet de loi au Congrès, amendant 19 lois organiques sur les institutions autonomes officielles et modifiant la participation des employeurs à leurs conseils d’administration respectifs en donnant au Président de la République la possibilité de nommer et désigner les représentants employeurs à ces organes. Ces questions portent sur l’octroi de cette possibilité de nomination et de désignation, et non sur la modification de la structure des organes concernés, contrairement à ce qui a été exposé par le représentant gouvernemental. Parmi ces institutions autonomes se trouvent l’Institut salvadorien de sécurité sociale (ISSS), l’Institut salvadorien de formation professionnelle (ISAFORP) et le Fonds social pour le logement (FSV). De tels agissements constituent une violation flagrante de la convention car ils entravent l’exercice par les organisations d’employeurs du droit d’élire librement leurs représentants. Les réformes mentionnées violent en outre la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et les mesures visant à placer les organisations sous la tutelle du gouvernement constituent un acte d’ingérence. Il en va ainsi de la désignation par le Président de la République des représentants des employeurs aux organes susmentionnés. Dans le cadre de l’examen du cas no 2980, le Comité de la liberté syndicale a attiré l’attention du gouvernement sur les principes concernant la libre désignation des représentants des employeurs et de consultation tripartite, et lui a demandé de les respecter pleinement à l’avenir. A cette occasion, le comité a également demandé au gouvernement de mener des consultations approfondies avec les organisations de travailleurs et d’employeurs dans le cadre du CST. La réponse du gouvernement ne peut être plus décevante. Le fait de renoncer à la convocation du CST sous prétexte qu’un des partenaires sociaux n’est pas parvenu à s’entendre sur le nombre de ses représentants – ce qui n’est pourtant pas stipulé en tant qu’obligation dans le règlement du CST – ne fait qu’aggraver la situation. Le gouvernement semble avoir utilisé cette excuse pour ne pas inclure le CST dans les débats et ne pas avoir à respecter l’application de ses recommandations. De plus, le gouvernement a créé un nouvel organe bipartite qui exclut les employeurs, conformément au décret no 86 de la présidence de la République. A nouveau, les employeurs regrettent de devoir exprimer leur désaccord à la déclaration de la déléguée gouvernementale puisque la lecture du décret laisse entendre une interprétation contraire. Dans la pratique, la Commission présidentielle sur les questions du travail assure les fonctions du CST et de la Commission des salaires, qui sont des entités tripartites jouissant d’un statut juridique supérieur. Selon eux, le but visé est d’empêcher que les représentants des employeurs participent aux prises de décisions. Ceci revient à dire que la création des organes susmentionnés a eu lieu sans consultation, dans le non-respect total de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976.

C’est pourquoi une demande d’intervention urgente a récemment été adressée au Directeur général du BIT, de la part de l’ANEP et de l’Organisation internationale des employeurs (OIE). Malgré cela, le gouvernement n’a à ce jour donné aucun signe d’un moindre changement positif. Ce n’est pas la première fois que la commission doit traiter un cas où un gouvernement tire à son avantage la discussion avec les partenaires sociaux, en désignant de façon arbitraire ceux qui participeront à la table ronde tripartite. Selon les employeurs, il est urgent de mettre fin à cette situation, dans le cas contraire, une telle attitude conduit irrémédiablement à une forme d’autoritarisme, qui ne fait que détruire ce qui constitue la pierre angulaire de l’OIT. Le gouvernement se montre totalement indifférent envers les recommandations des organes de contrôle de l’OIT et celles qui sont destinées à offrir aux partenaires sociaux la possibilité d’être représentés dans les différentes instances tripartites du pays. Cette possibilité incombe actuellement, par voie législative, au Président de la République, ce qui est en violation flagrante de la convention et au détriment du dialogue social dans le pays. Pour conclure, la commission devrait demander la prise d’une série de mesures urgentes, dont éventuellement l’envoi d’une mission de contacts directs.

La membre travailleuse d’El Salvador a fait observer que les organisations syndicales ont élaboré des propositions et participé au débat public dans le but de contribuer à l’édification et au renforcement des institutions démocratiques, malgré la lenteur des procédures destinées à garantir de véritables changements structurels. Elle a précisé que l’inefficacité du fonctionnement du CST tient à différents facteurs. Le règlement du CST ne définit ni clairement ni tacitement les procédures à suivre pour élire le groupe des travailleurs. En outre, le mouvement syndical ne s’est pas entendu sur la composition de ce conseil, dans la mesure où ceux qui occupent ces espaces de longue date rendent impossibles la démocratisation et la transparence du processus d’élections qui pourraient permettre à d’autres organisations apparues ces dernières années d’y participer. L’oratrice a condamné l’ingérence de l’ANEP qui a demandé publiquement au précédent ministère du Travail de reconnaître la liste proposée par un groupe de travailleurs alliés aux employeurs ou qui en sont proches, dans le but d’ôter toute légitimité à des organisations licites et représentatives. Cette situation avait alors été portée à la connaissance du Directeur général du BIT. Elle a demandé que l’ANEP respecte l’autonomie et l’indépendance des organisations syndicales lorsqu’elles élisent leurs représentants et a demandé aussi au gouvernement de chercher les moyens de mettre en place le CST le plus rapidement possible, en y garantissant une plus grande participation des organisations syndicales. Elle s’est référée à la plainte présentée par l’ANEP devant le Comité de la liberté syndicale (cas no 2980) et a indiqué que le décret ayant motivé cette plainte avait pour objectif d’établir les mécanismes propres à garantir la participation d’autres organisations d’employeurs, entre autres, celle des petites et moyennes entreprises. Elle estime que l’ANEP est principalement préoccupée par la perte du contrôle qu’elle avait jusque-là sur les instances tripartites.

L’oratrice reconnaît l’initiative prise par le gouvernement d’instaurer un espace bipartite, par le bais de la création d’une table ronde sur les relations professionnelles, dans le but de faire progresser la mise en place d’un véritable dialogue social et la participation des citoyens. Cet espace a pour objectif de formuler et d’élaborer des propositions de politiques publiques et de réformes juridiques, tout en améliorant les relations professionnelles dans le secteur public; les différentes expressions du mouvement social sont appelées à y participer. Dans ce sens, elle déplore la position prise par l’ANEP, qui, désapprouvant la création de tels espaces, affirme qu’elle compte porter plainte auprès du BIT, sous prétexte que ces thèmes doivent être débattus au sein d’espaces tripartites. Or, à ce jour, aucun thème nécessitant la compétence d’instances tripartites n’a été abordé. Même si de nouveaux syndicats ont vu le jour, ces derniers relèvent pour la plupart du secteur public et de l’économie informelle alors que, dans le secteur privé, les syndicats ont tendance à disparaître. Elle insiste auprès des entreprises du secteur privé pour que les dispositions de la convention soient respectées et qu’elles autorisent la création de syndicats, sans restriction, limitation ou répression quelle qu’elle soit. L’Etat doit obligatoirement respecter l’exercice de la liberté syndicale, en particulier pour ce qui est du droit de grève. D’après l’oratrice, dans l’histoire du pays, seules deux grèves ont été déclarées légales, ce qui prouve le degré d’impunité et l’existence d’un système judiciaire défectueux. Les travailleurs attendent du gouvernement actuel que son administration du travail soit juste et qu’il applique un mécanisme efficace de protection des travailleurs. Pour conclure, elle exige de l’Etat qu’il accélère l’enquête judiciaire menée en lien avec l’assassinat du syndicaliste Victoriano Abel Vega, afin d’élucider les motifs du crime et de sanctionner les auteurs.

Le membre employeur d’El Salvador a indiqué que, le 12 août 2012, le gouvernement a introduit un projet de loi portant 19 réformes qui ont été ultérieurement adoptées par le Congrès sans consultation, afin d’évincer les représentants du secteur privé de 19 institutions autonomes, dont certaines ont une composition tripartite. Parmi ces institutions autonomes se trouvent l’ISSS, au sein duquel le secteur privé est le principal contributeur, et l’ISAFORP, au sein duquel les employeurs sont les uniques contributeurs. Il a ajouté que des institutions, bien que n’étant pas de formation tripartite bénéficient des apports du secteur privé. Les fonds en question sont actuellement gérés par le gouvernement et utilisés pour organiser des campagnes internes et verser des primes à des malfaiteurs. Par ailleurs, les 19 réformes susmentionnées ont permis la modification des règles de désignation des représentants du secteur privé. Depuis août 2012, ils sont désignés par le Président de la République, et non plus sur liste présentée par les organisations professionnelles ou à la majorité simple d’une assemblée convoquée à cet effet. Cette situation a contraint l’ANEP à présenter une plainte devant le Comité de la liberté syndicale pour violation des conventions nos 87 et 144 (cas no 2980). Dans ses recommandations, le Comité de la liberté syndicale a attiré l’attention du gouvernement sur les principes concernant la libre désignation des représentants des employeurs et de consultation tripartite, et lui a demandé de les respecter pleinement à l’avenir. Le comité a également demandé au gouvernement de mener des consultations approfondies avec les organisations de travailleurs et d’employeurs dans le cadre du CST, afin d’aboutir à une décision commune garantissant une composition tripartite équilibrée des conseils d’administration des institutions autonomes mentionnées dans la plainte. Après que le Comité de la liberté syndicale ait formulé ses recommandations, le ministre du Travail a cessé de convoquer le CST, faisant valoir qu’il n’y avait pas de consensus entre les travailleurs, et qu’aucun accord n’avait donc été conclu. L’exigence de parvenir à un consensus plutôt que de procéder à l’élection à la majorité simple comme le prévoit le règlement du CST permet à toute fédération complice du gouvernement de pouvoir opposer son véto à un accord majoritaire. Il est regrettable que la nouvelle ministre du Travail ait conservé cette position sur le consensus, un subterfuge visant à maintenir le dialogue tripartite au sein du CST dans une situation de paralysie. A l’occasion de la désignation des candidats à la direction de l’ISSS, les organisations professionnelles de l’ANEP ont proposé des noms, mais le Président de la République a décidé de choisir une autre personne qui avait été rejetée par l’ANEP en raison de ses liens avec le secteur pharmaceutique et de l’existence d’un conflit d’intérêts. Cette personne représente le secteur privé au comité de l’achat de médicaments de l’ISSS, où elle a réalisé des achats directs (sans appel d’offres) pour un total de 50 millions de dollars; on peut donc se demander qui, en cas de révélation d’actes de corruption, en assumerait la responsabilité. Au cours du mois de janvier 2015 a été instituée la Commission présidentielle des affaires sociales, à travers laquelle le gouvernement a entamé un dialogue bipartite avec les syndicats de travailleurs, du secteur public comme du secteur privé. Il convient de préciser toutefois que les organisations du secteur privé, bien que convoquées, ont ensuite été informées que le décret de création de ladite commission ne s’appliquait qu’aux salariés du secteur public. Ceci contredit le texte du décret susmentionné et la déclaration du Président de la République, qui a indiqué que grâce à cette commission sera élaborée une stratégie d’augmentation progressive du salaire minimum et de renforcement des organisations de travailleurs. Ces éléments ont des conséquences, entre autres l’apparition d’un nouveau dispositif d’ingérence dans les organisations de travailleurs et la disparition du dialogue social tripartite au Conseil national du salaire minimum. L’orateur a soutenu la demande exprimée par les membres employeurs aux fins de l’approbation par la commission de l’envoi d’une mission de contacts directs pour vérifier l’application des conclusions du Comité de la liberté syndicale. Il faut espérer que cette mission puisse avoir lieu avant la réunion de la commission d’experts, afin de pouvoir prendre connaissance de ses conclusions lors de la prochaine session de la Conférence.

Le membre gouvernemental du Mexique, s’exprimant au nom du Groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a indiqué qu’il avait écouté avec intérêt ce qu’a déclaré la représentante gouvernementale à propos du respect de la liberté syndicale et de la protection du droit d’organisation en droit et dans la pratique. Sont ensuite mentionnés les arguments présentés par le gouvernement d’El Salvador concernant les actions et les enquêtes réalisées par la police et la situation qui règne au sein du CST; ces arguments figurent dans le rapport de la commission d’experts. Il a également pris note des déclarations concernant l’ouverture du gouvernement et sa volonté de dialoguer avec tous les secteurs économiques et sociaux du pays. Compte tenu des dispositions du paragraphe 1 de l’article 8 de la convention no 87, il a réitéré l’engagement du GRULAC de mettre en application ladite convention et de respecter la liberté syndicale. Il s’est dit convaincu que le gouvernement continuera à se conformer à ladite convention.

Un observateur représentant la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) a indiqué que l’absence de jugements des personnes coupables de crimes à l’encontre de dirigeants ou de membres syndicaux a créé une situation d’impunité qui est extrêmement préjudiciable aux activités syndicales, comme le montre le cas de l’assassinat dans des conditions tragiques de Victoriano Abel Vega. Il convient de citer également le cas de Gilberto Soto, un dirigeant de la Fraternité internationale des camionneurs, qui a été assassiné en 2004 et dont le décès n’a toujours pas été élucidé. Selon les enquêtes menées par le Procureur aux droits de l’homme et l’Institut des droits de l’homme de l’Université centraméricaine: 1) Gilberto Soto a été tué par trois individus, qui ne lui ont pas dérobé ses effets personnels; 2) la police n’a pas pris la peine de sécuriser le lieu du crime ou les éléments de preuve; 3) selon le ministre de l’Intérieur, Gilberto Soto n’a pas été tué par un escadron de la mort; 4) un ambassadeur d’El Salvador a déclaré à des dirigeants syndicaux américains que la police a refusé de lui envoyer un exemplaire de son rapport; 5) la police civile nationale n’a pas accordé au Procureur aux droits de l’homme le droit garanti par la Constitution d’inspecter ses dossiers et d’observer l’état d’avancement de l’enquête; 6) la police aurait obtenu, sous la torture, des confessions de la part des trois membres de l’escadron, lesquels se seraient ensuite rétractés. Le gouvernement devrait rouvrir les dossiers relatifs à ce cas afin que ceux qui ont fomenté les crimes et les ont dissimulés puissent être identifiés. A cela, il convient d’ajouter le licenciement en 2001 de 159 membres des départements chargés du fret et de la sécurité de l’aéroport international, ce qui est en violation de la convention collective qui les gouverne. La direction a également mené une campagne d’intimidation afin de forcer les travailleurs à se retirer du Syndicat des travailleurs de l’aéroport international d’El Salvador, qui est affilié à l’ITF. Quant au cas no 2165 du Comité de la liberté syndicale, qui a été clos il y a plus de dix ans, les efforts d’organisation des travailleurs syndiqués des aéroports ont été poursuivis dans le cadre de la lutte contre les licenciements, mais le syndicat a fini par mettre un terme à toutes activités en 2013 étant donné la discrimination antisyndicale constante dont il faisait l’objet. Pour conclure, l’orateur prie instamment le gouvernement de tenir compte de l’appel du syndicat des travailleurs de l’aéroport et de veiller au respect des principes de la liberté syndicale.

Le membre employeur de l’Uruguay a appuyé les allégations présentées par l’ANEP. Les situations dénoncées à diverses occasions devant cette commission sont préoccupantes, notamment la tendance de divers gouvernements à mener un dialogue social en choisissant ses interlocuteurs. Il est essentiel de respecter le tripartisme traditionnel qui est le fondement de cette organisation, à savoir un dialogue efficace et constructif entre le gouvernement et les organisations de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives. Il n’appartient pas au gouvernement de désigner des interlocuteurs bien disposés pour mettre en pratique leurs programmes politiques; au contraire, le gouvernement doit respecter la réalité de la représentation des organisations étant donné qu’elle a un impact direct sur les niveaux de représentation et de légitimité du dialogue qui est instauré. Il est préoccupant de voir que certains types de dialogue ne visent qu’à contourner les partenaires légitimes et représentatifs tant des travailleurs que des employeurs. La commission doit se pencher sur ces questions et réclamer un dialogue tripartite selon les modalités qu’observe cette organisation. Les garanties qui existent en matière de représentativité n’auraient aucun sens si, au moment d’assister à la Conférence et de participer à la discussion et à l’adoption de normes internationales du travail, il était possible d’autoriser dans chaque pays des faux dialogues qui permettent à certains gouvernements d’imposer des solutions qu’ils conçoivent de façon unilatérale.

Le membre gouvernemental du Honduras a mis l’accent sur l’ouverture du gouvernement et sa volonté de dialogue avec tous les secteurs socio-économiques du pays, ce qui, comme l’a déclaré le gouvernement, ne remplace pas le dialogue social tripartite. De plus, l’orateur a souligné la volonté du gouvernement de continuer à œuvrer conjointement avec les travailleurs et les employeurs, en disposant de l’assistance du BIT, et de prendre les mesures nécessaires pour appliquer la convention.

La membre employeuse de la Belgique a déclaré que la Fédération des entreprises de Belgique soutient la position des employeurs du Salvador concernant la liberté de constituer des associations et de désigner leurs représentants. Il convient d’observer à cet égard que l’expression liberté d’association est celle qui correspond en langues française et espagnole le mieux à l’expression «freedom of association» utilisée en langue anglaise. L’expression liberté syndicale utilisée en langue française pourrait, en effet, laisser penser qu’elle ne protège que le droit des travailleurs de s’associer alors que la convention consacre l’égalité de traitement entre les organisations de travailleurs et d’employeurs. Or, au Salvador, les droits des organisations d’employeurs ne sont pas garantis et il convient de le déplorer. Il faut dès lors s’interroger sur la raison de cette différence linguistique pouvant induire en erreur et provoquer des erreurs d’appréciation volontaires ou involontaires.

Le membre travailleur de l’Argentine s’est référé à plusieurs dispositions de la législation nationale qui sont contraires à la convention. L’article 221 de la Constitution interdit expressément aux travailleurs publics ou municipaux de faire grève ou d’abandonner collectivement leurs fonctions, et autorise la militarisation des services publics civils en cas d’urgence nationale. Or une interdiction générale du droit de grève des travailleurs du secteur public est incompatible avec les dispositions de la convention. De plus, les articles 529 et 553 établissent une procédure fastidieuse pour pouvoir déclarer la légalité d’une grève, et exigent des majorités très strictes pour la déclarer, ce qui facilite la déclaration d’illégalité. Le Comité des Nations Unies sur les droits économiques, sociaux et culturels s’est dit préoccupé par les restrictions importantes à l’exercice du droit de grève et par le fait que beaucoup de grèves sont déclarées illégales. Ce comité a regretté aussi de ne pas avoir reçu de données précises et actualisées sur le nombre de grèves déclarées illégales et sur les raisons pour lesquelles elles ont été déclarées comme telles. Les restrictions au droit de grève n’existent pas seulement dans ces deux dispositions. Il y en a d’autres. Il suffira d’indiquer que le Code du travail prévoit aussi un arbitrage obligatoire dans le cas des services essentiels, c’est-à-dire les situations mettant en péril ou menaçant les conditions normales de vie de l’ensemble ou d’une partie de la population. La liberté syndicale n’est pas pleinement en vigueur si, chaque fois que les travailleurs veulent faire grève, celle-ci est déclarée illégale. Et il n’y a pas de négociation collective si, en même temps, les travailleurs n’ont pas le droit de recourir à la grève en tant que principal moyen d’action collective. Pour qu’il y ait un dialogue social, il faut que les travailleurs, avec toutes les garanties légales et institutionnelles, puissent exercer le droit de grève. Ces limitations favorisent exclusivement les employeurs. Les supprimer serait un signe important de progrès.

Le membre travailleur de l’Afrique du Sud a souligné que la légitimé et l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs étaient nécessaires pour prendre des mesures dans des affaires relatives à l’emploi et au marché du travail. S’agissant des cas d’homicide de dirigeants syndicaux, il est inquiétant de constater le nombre d’affaires non résolues. Il est également effroyable de constater que les auteurs de ces crimes ne sont pas arrêtés et qu’ils peuvent profiter du fruit de leurs actes sordides. Cette situation doit être condamnée avec la plus grande fermeté possible. La commission d’experts n’a pas pour première mission d’enquêter sur ces affaires mais de rappeler aux gouvernements les obligations qui leur incombent du fait de la ratification de la convention. Il conviendrait donc de prier instamment le gouvernement d’appliquer la convention qu’il a ratifiée.

Le membre travailleur de l’Uruguay a indiqué que la discussion témoigne des contradictions actuelles puisque l’ANEP dénonce ici des ingérences dans ses activités qui constituent une violation de la convention mais, de retour au pays, elle oublie que cette même convention porte sur le droit de grève. Or ce droit y est appliqué de manière très restrictive. De plus, le taux de syndicalisation est très faible. L’orateur a exprimé son indignation devant les conditions de travail dans les maquilas. S’agissant des types de dialogue proposés par le gouvernement, ceux-ci n’ont rien de comparable avec un vrai dialogue tripartite. Le dialogue doit être effectif et aborder toutes les questions. Enfin, il faut espérer que les assassinats de dirigeants syndicaux seront tirés au clair sans plus tarder.

Le membre employeur du Honduras a indiqué que le gouvernement essaie d’éliminer le tripartisme en choisissant les délégués de l’organisation des employeurs. L’objectif de la convention est de protéger le droit d’association des travailleurs et des employeurs. Cette protection couvre la création de l’organisation, la rédaction de son règlement, la détermination du mode interne de sélection de ses représentants et ses activités dans le cadre de la législation nationale. Le Comité de la liberté syndicale a recommandé au gouvernement de s’abstenir d’intervenir dans le choix des délégués des employeurs et des travailleurs. Le fait que les travailleurs du CST ne soient pas parvenus à un accord ne justifie pas que le gouvernement ne reconnaisse pas les délégués employeurs ou n’organise pas de réunions tripartites de cet organe. Le gouvernement tente de remplacer les représentants légitimes des employeurs par des représentants progouvernementaux et d’empêcher leur participation aux organes tripartites afin d’éviter le contrôle qu’ils exercent et d’utiliser indûment les budgets. La représentation légitime des employeurs a été éliminée dans 19 institutions autonomes. L’ANEP représente plus de 90 pour cent des entreprises privées, notamment des membres de petites entreprises informelles. Celle-ci a donc l’autorité morale nécessaire pour exiger du gouvernement qu’il abroge les lois contraires aux conventions nos 87 et 144. La commission devrait demander au gouvernement d’abroger immédiatement les dispositions qui lui permettent de choisir les représentants du secteur des employeurs.

Le membre employeur de la Turquie a souligné que l’intervention du Président du Salvador dans la nomination de membres des organes de direction paritaires ou tripartites constitue une violation flagrante de l’article 3 de la convention. Cette action du président compromet l’autonomie de l’organisation patronale, à savoir l’ANEP. Le droit des organisations d’employeurs d’élire leurs représentants doit être respecté et, de ce fait, les dispositions correspondantes de la loi doivent être amendées. En tant que représentant d’une organisation d’employeurs de Turquie, l’orateur a apporté son appui à l’ANEP et invité instamment le gouvernement à respecter l’autonomie de cette association.

La représentante gouvernementale a rappelé la volonté du gouvernement de travailler avec tous les secteurs qui veulent un pays prospère, qui créent des emplois décents, qui s’engagent pour l’accès à la santé et à l’éducation, le bien-être des familles salvadoriennes et qui favorisent le développement des micros, petites, moyennes et grandes entreprises. L’engagement du gouvernement pour le dialogue s’illustre, par exemple, avec le récent retrait de la plainte déposée par SITRACAÑA devant le Comité de la liberté syndicale. La création de forums paritaires et tripartites, au moyen de réformes, ne traduit pas le recul de l’exercice des libertés syndicales. Bien au contraire, le gouvernement est en train de renforcer et de démocratiser la participation des employeurs et des travailleurs, en conformité avec la Constitution. En effet, des amendements à la législation ont été promus afin de renforcer et de réaliser les droits syndicaux, en supprimant les limites que les gouvernements précédents ont imposées aux travailleurs du secteur public et qui les empêchaient de constituer des syndicats. En conséquence, le nombre de syndicats, de fédérations et de confédérations du secteur public a augmenté. Les travailleurs sont essentiels pour atteindre les transformations sociales, économiques et politiques. C’est pourquoi on cherche à ce que tous les forums tripartites et paritaires fonctionnent avec la participation et la représentation équitables de toutes les organisations syndicales et de toutes les organisations d’employeurs qui représentent aussi bien les petites et moyennes entreprises que les grandes entreprises. Dans le pays, il n’y a pas qu’une seule organisation d’employeurs, mais plusieurs. Nombre d’entre elles n’ont pas pu participer aux forums tripartites ou paritaires en raison de l’hégémonie de certaines organisations d’employeurs. Les syndicats du secteur public étaient tout aussi désavantagés car leur non-reconnaissance sur le plan juridique entrave leur participation à ces forums. Sous la direction du gouvernement précédent et du gouvernement actuel, les libertés syndicales ont été étendues, et le nombre de syndicats légalisés et actifs a augmenté, tout comme le nombre de travailleurs syndiqués. Le gouvernement souhaite que les travailleuses et les travailleurs jouissent de conditions de vie dignes et que leurs droits fondamentaux prévalent sur les intérêts essentiellement économiques pour que le pays soit un exemple de pratiques démocratiques où le droit syndical est exercé en toute indépendance et en cohérence avec les luttes historiques de la classe ouvrière; que la main-d’œuvre soit la force du développement économique et productif et qu’elle ne soit pas une marchandise gouvernée par des intérêts individuels. En reconnaissance de toutes les luttes sociales et relatives au travail qui ont traversé l’histoire du pays, le gouvernement continuera d’œuvrer pour que l’ensemble des travailleuses et travailleurs syndiqués exercent librement leurs droits syndicaux et qu’ils accèdent, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, à des conditions de travail et de vie dignes, avec des salaires dignes, des prestations sociales dignes, sans discrimination aucune. En ce qui concerne l’insécurité qui règne dans le pays, le gouvernement partage la préoccupation des travailleurs et œuvre à l’heure actuelle pleinement dans le cadre du Plan «El Salvador Seguro», élaboré avec une large participation de parties prenantes sociales et sectorielles. Ce plan est mis en œuvre par le Conseil de sécurité citoyenne, composé de représentants du gouvernement, d’entreprises privées, notamment l’ANEP, de travailleurs syndiqués, de secteurs confessionnels, de médias et d’organisations sociales avec l’aide des Nations Unies.

Les membres employeurs ont estimé que les informations fournies par le gouvernement confirment une intention délibérée de tenir à l’écart les organisations d’employeurs les plus représentatives. Le débat est d’ordre juridique: il s’agit de savoir si la législation et la pratique salvadoriennes sont conformes à la convention. La désignation, par le Président de la République, des représentants des employeurs dans les organes tripartites est contraire à la convention, comme l’a indiqué le Comité de la liberté syndicale. Or il apparaît clairement que le gouvernement ne veut pas collaborer avec les organes de contrôle. Les employeurs sont exclus de tous les organes tripartites et sont remplacés par des personnes proches du pouvoir. Ces procédés vont à l’encontre des valeurs démocratiques. Les membres employeurs ont demandé au gouvernement de prendre des mesures visant à garantir l’autonomie totale des organisations d’employeurs et de travailleurs dans les organes tripartites et paritaires; de constituer et convoquer au plus vite le CST, lequel devra être consulté sur les réformes de la législation qui s’imposent pour garantir l’autonomie des dits organes; de viser, dans le cadre du CST, le décret présidentiel no 86 instituant la Commission présidentielle sur les questions de travail; d’accepter qu’une mission de contacts directs se rende dans le pays avant la prochaine session de la commission d’experts en vue de la mise en œuvre, conjointement avec les partenaires sociaux, des points qui précèdent; d’accepter l’assistance technique du BIT afin de mettre la législation et la pratique en conformité avec la convention, et de faire rapport, à la prochaine session de la commission d’experts de novembre 2015, sur les progrès réalisés en la matière.

Les membres travailleurs ont observé que, alors qu’ils partagent l’observation faite par les membres employeurs relative à l’égalité entre organisations de travailleurs et d’employeurs, la terminologie employée depuis 1948 n’a jamais soulevé d’ambiguïté pouvant laisser penser le contraire et ne s’est jamais opposée à l’examen de ce droit dans le cadre des travaux de l’OIT. Outre la terminologie employée qui peut varier d’un pays à l’autre, il s’agit ici du droit d’organisation collective et de son corolaire, le droit d’action collective, qui pour les travailleurs se traduit dans le droit de grève. Revenant au cas à l’examen, il convient d’observer que la situation dans le pays s’est dégradée et que l’actualité requiert que le gouvernement prenne instamment des mesures en ce qui concerne notamment les irrégularités dans la législation pour lesquelles une assistance technique sera nécessaire, et il convient de noter que le gouvernement a demandé ladite assistance. Celle-ci portera particulièrement sur la procédure d’enregistrement des syndicats et sur l’exigence faite aux organisations syndicales de certifier le statut de leurs membres. Ces deux éléments requièrent en effet un travail législatif précis, efficace et rapide. En ce qui concerne la condition de nationalité afin de devenir représentant syndical et de la possibilité de s’affilier à plusieurs syndicats, le gouvernement devrait donner suite à ses nombreux engagements en la matière et y remédier au plus vite. En outre, en ce qui concerne l’assassinat de M. Victoriano Abel Vega, la justice doit faire son travail sans quoi l’on serait dans une situation d’impunité inacceptable dans un Etat démocratique et qui aggraverait le climat de violence et d’insécurité et serait préjudiciable à l’exercice des activités syndicales. Le gouvernement doit donc prendre sans délai toutes les mesures nécessaires et faire rapport sur les points soulevés à la commission d’experts en vue de sa prochaine réunion en 2015.

Conclusions

La commission a pris note des informations fournies oralement par la représentante du gouvernement et de la discussion qui a suivi.

La commission a observé que les questions soulevées par la commission d’experts ont trait à l’assassinat d’un dirigeant syndical; aux observations de la CSI et de l’OIE; au manque d’autonomie des organisations de travailleurs et d’employeurs s’agissant du choix de leurs représentants dans les instances paritaires et tripartites; aux restrictions apportées par la législation au droit de fonder des organisations syndicales pour certaines catégories d’agents de la fonction publique; à l’obligation pour l’employeur d’attester que les membres fondateurs d’un syndicat sont des salariés; à l’obligation d’être un ressortissant salvadorien de naissance pour pouvoir exercer une fonction syndicale; et, lorsque l’enregistrement d’un syndicat est refusé, au délai d’attente excessif avant de pouvoir introduire une nouvelle demande.

La commission a noté que la ministre du Travail et de la Protection sociale a indiqué que le gouvernement a condamné l’assassinat du dirigeant syndical Victoriano Abel Vega, sur lequel le ministère public continue d’enquêter activement et intensifie son action pour élucider les faits, dans le but précis d’empêcher que ce crime reste impuni. Le gouvernement entretient un dialogue social permanent avec tous les secteurs de la société, notamment celui de l’entreprise privée mais, contrairement aux pratiques hégémoniques du passé, avec toutes les organisations d’employeurs, qu’elles soient petites, moyennes ou grandes, et aussi avec toutes les organisations syndicales, y compris celles qui étaient exclues dans le passé. Le dialogue social tripartite existe dans 19 institutions publiques autonomes et, à la suite de la grande réforme qui a été entreprise et à la lumière des aspects réglementaires, on assiste à une plus grande ouverture à la participation de toutes les organisations. S’agissant des problèmes liés à la constitution du Conseil supérieur du travail, la représentante gouvernementale a évoqué de nombreuses initiatives et réunions qui ont eu lieu à l’initiative du ministère jusqu’en juin 2015, visant à sortir de l’impasse en se fondant sur des pratiques démocratiques, inclusives et représentatives et sur la législation en vigueur. Elle a indiqué que le problème actuel est la conséquence d’un désaccord de la représentation syndicale, qui est divisée en deux blocs soutenant deux listes de représentants élus et que ce blocage n’est pas le fait du gouvernement. La Commission présidentielle des questions de travail, centrée principalement sur le secteur public, est une réponse à la demande des travailleurs qui voulaient un mécanisme de communication directe en rapport avec le Plan quinquennal du gouvernement et demandaient que ce forum sur les questions de travail ne se substitue pas aux mécanismes de participation tripartite. Le gouvernement a procédé à des modifications de la législation afin de garantir les droits syndicaux des agents de la fonction publique et, au cours des cinq dernières années, le nombre de syndicats en activité est passé à 464, dont 99 dans le secteur public et 35 dans des institutions autonomes. Selon la pratique suivie par le ministère du Travail et de la Protection sociale, les syndicats dont l’enregistrement a été refusé peuvent déposer une nouvelle demande le lendemain. Le gouvernement a pris note de l’importance des dispositions et questions mentionnées par la commission d’experts et il s’est engagé à se soumettre aux observations de cette dernière dans le respect de la législation en vigueur. Des mesures sont prises s’agissant de l’enregistrement automatique de la participation de tous les travailleurs en rapport avec les diverses réformes demandées par la commission d’experts.

La commission a rappelé que l’accent a été mis pendant les discussions sur le fait qu’un climat de violence et d’insécurité est extrêmement préjudiciable à l’exercice des activités syndicales. En outre, elle a rappelé que la convention concerne le droit de tous les travailleurs et employeurs de constituer des organisations de leur choix et d’y adhérer et celui de leurs organisations de mener leurs activités sans l’ingérence du gouvernement.

Compte tenu de la discussion de ce cas, la commission a prié le gouvernement:

    - de prendre sans retard toutes les mesures nécessaires afin d’identifier les responsables du meurtre de Victoriano Abel Vega et de punir les coupables de ce crime;

    - de garantir l’autonomie totale des organisations d’employeurs et de travailleurs dans les instances décisionnelles paritaires et tripartites, ceci nécessitant la convocation et la constitution immédiate du Conseil supérieur du travail, qui doit être consulté sur les réformes légales nécessaires pour garantir cette autonomie. Pour ce faire, le gouvernement devrait s’abstenir de demander un consensus des confédérations et fédérations syndicales quant à la nomination de ses représentants au Conseil supérieur du travail;

    - de réexaminer de manière tripartite au sein du Conseil supérieur du travail le décret présidentiel no 86 instituant la Commission présidentielle des questions de travail;

    - d’accepter l’assistance technique du BIT afin de mettre sa législation et sa pratique en conformité avec les dispositions de la convention;

    - de soumettre à l’examen de la commission d’experts, lors de sa prochaine session de novembre 2015, un rapport sur les progrès réalisés en vue de la pleine application de la convention.

La représentante gouvernementale a indiqué que son gouvernement a pris note des conclusions et continuera à travailler pour la mise en œuvre de la convention et de la promotion des droits du travail. Le gouvernement est déterminé, à travers des pratiques démocratiques et l’ouverture au dialogue, à résoudre les différends, conformément à la législation nationale, et elle a réaffirmé l’intérêt du gouvernement à bénéficier de l’assistance technique du BIT.

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