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Cas individuel (CAS) - Discussion : 1995, Publication : 82ème session CIT (1995)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Myanmar (Ratification: 1955)

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Le gouvernement a communiqué les informations suivantes:

Dans le cadre de l'évolution récente concernant l'application de la convention, il faut noter une mission du spécialiste pour les normes du BIT pour la région Asie en mai 1994. En vue de faciliter les discussions entre les autorités gouvernementales et les experts du Bureau, le ministère du Travail a décidé de prendre des mesures pour assurer la traduction en anglais du projet de loi sur les syndicats, qui était rédigé en langue nationale. Le gouvernement a demandé une assistance complémentaire du BIT pour obtenir des conseils techniques dans ses efforts dans l'application de la convention. Une mission supplémentaire du BIT a été réalisée en janvier 1995 par le directeur régional du Bureau de l'OIT pour la région Asie et un spécialiste du Département des normes internationales du travail. Au cours de cette mission, des réunions ont été organisées entre le ministre du Travail et le directeur général du département du Travail. Le gouvernement regrette l'annulation d'une mission supplémentaire consultative du BIT, ayant pour objet la modification de la loi sur les syndicats de 1926 en vue de l'adapter au nouveau système politique et économique, et a formulé l'espoir de la voir agencée à une date ultérieure.

En outre, un représentant gouvernemental a souligné le désir sincère de son gouvernement de coopérer avec l'OIT, dont l'assistance technique serait bienvenue pour l'élaboration d'une nouvelle législation sur les syndicats. Après la mission accomplie en mai 1994 par le conseiller technique de l'OIT pour la région asienne sur les questions touchant à la convention no 87, le ministère du Travail a décidé de faire traduire les projets de loi sur les syndicats en anglais pour faciliter les discussions entre les autorités du pays et les experts du BIT. Une visite de suivi a été accomplie à Yangon en janvier 1995 par des fonctionnaires du Bureau de l'OIT à Bangkok. Pendant les discussions avec la mission du BIT, les autorités du Myanmar furent informées qu'une autre mission du Service de la liberté syndicale arriverait à Yangon en avril ou mai 1995. Le ministre du Travail espérait accueillir cette mission. Malheureusement, elle n'a pu avoir lieu comme prévu. Le gouvernement estime que les contacts doivent être maintenus afin d'obtenir l'assistance technique qui débouchera sur l'application des principes de la liberté syndicale. Les autorités souhaitent que les discussions sur ce point s'engagent à la date la plus opportune. L'orateur a fait valoir que des progrès appréciables ont été accomplis par la Convention nationale, dont la mission consiste à formuler les principes qui doivent être consacrés par la nouvelle Constitution. Actuellement, le contenu des titres relatifs à la structure de l'Etat, au chef de l'Etat et aux régions autonomes a été arrêté. Les titres concernant le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire doivent être discutés en octobre 1995, lors de la prochaine session. La procédure suivant son cours, les principes fondamentaux des droits du citoyen et des droits des travailleurs seront examinés en détail. Au nombre des principes devant être consacrés par la nouvelle Constitution, il existe des dispositions concernant les travailleurs des différents secteurs. L'Etat aura pour mission de prendre les lois nécessaires à la protection des droits des travailleurs agricoles, des droits des paysans et des droits des intellectuels. Il appartiendra à l'Etat de promouvoir les intérêts de ces catégories ainsi que des fonctionnaires. Il est prévu que les employés de l'Etat devront être libres de tout engagement à l'égard d'un parti politique tout en conservant le droit de voter pour le parti de leur choix. L'Etat adoptera la législation nécessaire pour garantir que son personnel bénéficie d'une sécurité suffisante dans l'emploi et de conditions d'alimentation, de logement et de subsistance satisfaisantes.

Les membres travailleurs ont rappelé que ce cas se pose depuis près de 40 ans, qu'il a fait l'objet de 11 observations de la commission d'experts, de sept longues discussions de la Commission de la Conférence et de deux paragraphes spéciaux, en 1982 et 1993. Année après année ont été entendues des promesses de nouvelle Constitution ou d'une nouvelle législation du travail. Cette année, la commission d'experts a, en plus, signalé le cas no 1752 (novembre 1994) du Comité de la liberté syndicale au sujet des gens de mer de ce pays. Sans qu'il soit nécessaire de rentrer dans le détail des innombrables violations en cause, le fait est qu'il n'y a pas de syndicat à l'heure actuelle au Myanmar. Il s'agit d'organismes fantoches, entièrement manipulés par le gouvernement, dans des conditions qui les rendent tout à fait étrangers au syndicalisme.

Quant au fait que la Convention nationale s'emploie actuellement à l'élaboration d'une nouvelle Constitution, force est de reconnaître que le groupe des travailleurs au sein de cette institution, comme cette institution elle-même, est entièrement désigné et contrôlé par le gouvernement. En entendant le représentant gouvernemental demander une mission technique de l'OIT dans son pays, les membres travailleurs invitent le Bureau à la plus grande prudence avant d'envoyer une nouvelle mission au Myanmar. Tant qu'il n'y aura pas eu de changement concret, une telle requête doit être ignorée puisqu'il n'existe pas de syndicat et que les conditions minimales ne sont pas réunies. Une mission de l'OIT serait utilisée par le gouvernement pour essayer de donner une meilleure image de lui-même. Les fonctionnaires de l'OIT ne doivent pas se prêter à de telles manoeuvres et s'exposer, par exemple, à des citations hors contexte de leurs propos. Les membres travailleurs ont estimé qu'il est inutile de discuter davantage de ce cas puisque le gouvernement ne peut être convaincu par des paroles. Son refus persistant, au fil des ans, de prendre des mesures en réponse aux observations de la commission d'experts en ce qui concerne l'application de cette convention justifie la mention d'un paragraphe spécial.

Les membres employeurs ont considéré que les graves divergences entre la législation et la pratique suivies par le Myanmar et les prescriptions de la convention no 87 sont un sujet de préoccupation constant de la commission depuis 1981. Celle-ci est saisie de ce cas pour la neuvième fois. Si l'appel à l'assistance technique de l'OIT n'est pas une tactique dilatoire, mais un effort sincère de corriger la situation, cette possibilité doit alors être étudiée. Il reste bien entendu à savoir si un texte législatif a effectivement été élaboré et si l'appareil législatif en a effectivement été saisi. Les membres employeurs souhaiteraient que les bases légales de la liberté d'association, actuellement inexistantes, soient mises en place. Il est fondamental que les travailleurs et les employeurs aient le droit de constituer les organisations de leur choix et soient en mesure de s'affilier à des fédérations et confédérations.

Un membre travailleur du Japon a estimé que le problème tient essentiellement à un manque total de respect pour les droits de l'homme. Comme l'organisation Amnesty International l'a abondamment documenté, les violations des droits de l'homme au Myanmar sont un outrage à la dignité humaine. Cette situation est clairement illustrée par l'assignation à domicile de Mme Aung San Suu Kyi. Se référant à la liste de la délégation de ce pays à la Conférence, l'orateur a fait observer que le délégué travailleur n'est membre d'aucun syndicat, ce qui est assez représentatif de la situation du pays sur ce plan. Il a appelé le gouvernement à changer d'orientation politique et à s'engager à garantir la liberté d'association, élément essentiel de toute démocratie.

Un membre gouvernemental de la Norvège, s'exprimant au nom des membres gouvernementaux des cinq pays nordiques et des Pays-Bas, a noté avec intérêt la déclaration du gouvernement du Myanmar selon laquelle des discussions sur les questions de travail, y compris le droit d'association des travailleurs, doivent s'ouvrir. Il a donc exprimé le ferme espoir qu'avec l'assistance de l'OIT les mesures nécessaires seront prises, dès que possible, pour rendre la législation et la pratique du pays conformes à la convention.

Un membre travailleur de la Suède a considéré qu'en raison de l'absence totale de liberté syndicale au Myanmar et des violations continuelles des droits fondamentaux de l'homme dans ce pays la commission doit se demander si le gouvernement a réellement la volonté politique de remédier à la situation et de se conformer à la convention no 87. La commission d'experts a noté avec préoccupation les conclusions du Comité de la liberté syndicale, approuvées par le Conseil d'administration en novembre 1994, dans le cas no 1752. Dans cette affaire, le droit pour les marins de constituer des syndicats indépendants ou de s'affilier à une fédération internationale constitue un nouvel exemple de la manière dont la liberté d'association est bafouée dans ce pays. Les marins birmans embarqués sur des navires battant pavillon de complaisance restent sous le contrôle étroit de l'Etat et doivent signer une déclaration par laquelle ils s'interdisent de contacter des organisations syndicales internationales. En outre, lorsque les salaires de ces marins sont relevés à un niveau plus décent, leurs contrats stipulent que ces augmentations doivent être rétrocédées à l'Etat, dès leur retour, sous peine de sanction. Compte tenu de ce qui précède et de la longue tradition du déni du droit syndical dans ce pays, cette commission doit exprimer son vif mécontentement devant la situation actuelle par un paragraphe spécial.

Un représentant des travailleurs de la Grèce a relevé les divergences entre les déclarations du gouvernement, qui prétend que des progrès sensibles ont été enregistrés, et le constat de la réalité. Dans ce pays, il n'existe même pas de syndicats et le gouvernement cherche manifestement à gagner du temps par des discours sans consistance réelle. Comme tous les pouvoirs militaires, il s'octroie la liberté de supprimer celle des autres. S'il convient que la commission n'exclut pas toute alternative en refusant toute nouvelle mission de l'OIT, il ne conviendrait pas non plus de laisser la porte grande ouverte en accordant un crédit excessif à un gouvernement qui persiste à bafouer les libertés et les droits les plus élémentaires.

Le membre gouvernemental, se référant au cas no 1752 du Comité de la liberté syndicale, a indiqué que de nouveaux développements sont intervenus récemment, comme précisé dans une lettre du Directeur général du Département du travail du Myanmar au directeur du Département des normes internationales du travail de l'OIT. Il s'agit des points suivants. Le gouvernement ayant été profondément préoccupé par les recommandations du Comité de la liberté syndicale, le ministère des Transports a pris les mesures détaillées ci-après en ce qui concerne les gens de mer, avec effet à compter du 9 février 1995. Le Département du contrôle des marins, qui relève du ministère des Transports, a rapidement abrogé l'obligation, pour les marins birmans, de signer une déclaration sur l'honneur avant de quitter le pays. En outre, la retenue de 25 pour cent sur le salaire, que les marins du Myanmar devraient remettre à leurs familles en monnaie nationale, a été abrogée, avec effet à compter du 1er décembre 1994. De plus, avec effet à compter de la même date, aux termes de la notification no 146/94 du ministère des Finances et des Impôts, promulguée le 16 novembre 1994, les marins et autres travailleurs du Myanmar à l'étranger ne sont plus assujettis qu'à un impôt sur le revenu de 10 pour cent sur l'ensemble des gains en devises déclarés.

Les membres employeurs sont convenus avec les membres travailleurs que ce cas devrait faire l'objet d'un paragraphe spécial puisqu'il répond clairement aux critères habituels de cette commission pour définir les cas graves et persistants qui ne semblent pas devoir connaître de solution sans qu'une attention plus soutenue leur soit accordée. Ils estiment toutefois que l'OIT pourrait apporter son assistance technique, pourvu que cette assistance se traduise rapidement par une action tangible et concrète du gouvernement du Myanmar dans le domaine législatif.

Les membres travailleurs ont déclaré que les informations concernant les développements intervenus récemment au regard du cas no 1752 soient communiquées au Bureau pour examen par le Comité de la liberté syndicale. Ils ont estimé que, si le gouvernement adresse au Bureau une demande de mission d'assistance technique, il appartiendra à celui-ci d'apprécier l'opportunité d'une telle démarche.

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental exprimant l'engagement de son gouvernement à rendre la législation et la pratique conformes à la convention no 87. Elle est toutefois gravement préoccupée par le fait que le gouvernement n'ait pas donné suite aux observations formulées par la commission d'experts depuis de nombreuses années, malgré une mention répétée de ce cas dans un paragraphe spécial, et par le fait qu'il n'existe pas de syndicats au vrai sens du terme. La commission appelle le gouvernement à prendre d'urgence les mesures nécessaires pour garantir que, dans la législation comme dans la pratique, les travailleurs et les employeurs aient le droit, sans autorisation préalable, de s'affilier aux organisations de leur choix, hors de la structure existante, et que de telles organisations aient le droit de rejoindre sans obstacle des fédérations et confédérations et de s'affilier à des organisations internationales. La commission a exprimé le ferme espoir qu'elle sera en mesure de constater, dans un proche avenir, des progrès substantiels quant à l'application de la convention dans la législation et la pratique, compte tenu de l'assistance accordée antérieurement par l'OIT, et elle prie le gouvernement de fournir un rapport détaillé à la commission d'experts sur tout nouveau développement en la matière. Elle a noté qu'une nouvelle demande d'assistance technique pourrait être adressée par le gouvernement du Myanmar à l'OIT, mais elle laisse au Bureau le soin d'apprécier l'opportunité et, éventuellement, le choix de la date d'une telle mission. La commission a décidé de faire figurer ces conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport général.

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