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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2015, Publication : 104ème session CIT (2015)

Convention (n° 122) sur la politique de l'emploi, 1964 - Italie (Ratification: 1971)

Autre commentaire sur C122

Cas individuel
  1. 2015
  2. 2007
  3. 1991

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 2015-Italy-C122-Fr

Le gouvernement a communiqué les informations écrites suivantes.

D’après les données les plus récentes de l’Institut national de statistique (ISTAT) (juin 2015), le taux d’emploi a augmenté entre avril et mars 2015. En avril, le nombre de personnes ayant un emploi a augmenté de 0,7 pour cent (159 000 salariés de plus que le mois précédent), le niveau d’emploi revenant à ceux de 2012 et le taux d’emploi atteignant 56,1 pour cent. Le taux de chômage a chuté pour s’établir à 12,4 pour cent. Selon l’ISTAT, le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans, qui recherchent activement un emploi, est tombé à 40,9 pour cent. L’OCDE a également fourni des estimations concernant l’emploi en Italie, a fait bon accueil à la loi sur les emplois et espère une baisse du chômage en 2016.

Principaux indicateurs du marché du travail par sexe, régions géographiques et âge (2012, 2013, 2014)

 

2012

2013

2014

Taux d’emploi

Taux de chômage

Taux d’activité

 

Taux d’emploi

Taux de chômage

Taux d’activité

 

Taux d’emploi

Taux de chômage

Taux d’activité

Sexe

Hommes

53,4

9,8

59,2

51,9

11,5

58,6

51,7

11,9

58,7

Femmes

35,0

11,8

39,7

34,5

13,1

39,7

34,6

13,8

40,1

Région

Nord-ouest

48,7

8,0

52,9

48,3

8,9

53,0

48,2

9,3

53,1

Nord-est

50,7

6,6

54,3

49,6

7,7

53,7

49,7

7,7

53,9

Centre

46,6

9,4

51,4

45,9

10,7

51,4

46,4

11,4

52,3

Sud

34,7

17,1

41,9

33,2

19,7

41,3

32,8

20,7

41,3

Tranches d’âge

15-24

18,5

35,3

28,6

16,3

40,0

27,1

15,6

42,7

27,1

25-29

57,3

18,1

69,9

52,7

22,2

67,7

51,7

23,6

67,6

15-29

32,3

25,4

43,3

29,1

29,8

41,5

28,3

31,6

41,5

30-44

72,5

9,7

52,9

70,8

11,1

79,6

70,2

11,7

79,5

45-54

72,0

6,7

77,1

70,9

8,0

77,0

70,3

8,4

76,7

55 et plus

17,3

4,9

18,2

18,2

5,3

19,2

19,5

5,0

20,5

15-64

56,6

10,8

63,5

55,5

12,3

63,4

55,7

12,9

63,9

Total

43,9

10,7

49,1

42,9

12,1

48,8

42,8

12,7

49,1

Source: ISTAT, RCFL media annuale.

 

Taux de chômage par régions géographiques et âge (2012 et 2014)

 

2012

2014

15-24

25-29

15-29

15 et plus

15-26

25-31

15-31

15 et plus

Piémont

32,1

12,6

20,9

9,2

42,2

19,8

29,3

11,3

Vallée d’Aoste

25,6

6,0

14,2

7,1

34,9

14,4

22,7

8,9

Lombardie

26,5

10,9

17,2

7,4

31,2

12,8

20,3

8,2

Ligurie

30,2

13,5

20,7

8,1

45,0

24,8

32,9

10,8

Total nord-ouest

28,4

11,5

18,5

8,0

35,5

15,7

23,8

9,3

Trentin-Haut-Adige

15,1

7,3

11,1

5,1

18,4

8,9

13,4

5,7

Vénétie

23,3

8,8

15,0

6,4

27,6

10,9

18,0

7,5

Frioul-Vénétie julienne

29,7

11,1

18,1

6,7

27,1

19,2

22,4

8,0

Emilie-Romagne

26,7

11,2

17,5

7,0

34,9

15,7

23,7

8,3

Total nord-est

24,0

9,8

15,8

6,6

29,0

13,2

19,9

7,7

Toscane

29,4

13,1

19,9

7,8

35,7

18,8

25,9

10,1

Ombrie

34,6

15,9

23,8

9,5

42,5

21,6

30,0

11,3

Marches

28,6

16,5

21,4

9,1

36,4

15,0

23,4

10,1

Latium

40,0

20,9

28,4

10,6

49,0

25,4

34,2

12,5

Total centre

34,7

17,6

24,5

9,4

42,4

21,8

29,9

11,4

Abruzzes

34,0

17,7

24,9

10,8

47,4

22,0

31,6

12,6

Molise

41,5

27,8

33,5

12,0

49,3

35,3

40,9

15,2

Campanie

48,4

33,1

40,3

19,2

56,0

38,2

46,4

21,7

Pouilles

41,6

25,3

32,6

15,7

58,1

34,1

44,9

21,5

Basilicate

49,9

27,4

36,9

14,5

46,6

31,3

37,5

14,7

Calabre

53,9

30,9

40,8

19,4

59,7

45,8

51,9

23,4

Sicile

51,2

33,3

41,7

18,4

57,0

42,5

49,2

22,2

Sardaigne

47,5

28,0

36,5

15,4

50,0

39,8

44,3

18,6

Total sud et îles

47,1

29,5

37,5

17,1

55,9

37,8

45,9

20,7

Total Italie

35,3

18,1

25,4

10,7

42,7

23,6

31,6

12,7

Source: ISTAT, RCFL media annuale.

 

Ces dernières années, l’Italie a adopté d’importantes réformes du marché du travail (la réforme Fornero de 2012, la réforme de 2013 sur le plan jeunes et la loi sur les emplois de 2014). Toutes ces réformes visent à faire baisser le taux élevé de chômage, et plus particulièrement le taux de chômage des jeunes, au moyen d’une révision structurelle des services publics de l’emploi et d’une simplification des types de contrats de travail. La réforme Fornero (loi no 92/2012) a établi plusieurs mesures de protection concernant les conditions de travail des femmes et des jeunes travailleurs et a relancé l’apprentissage et la formation professionnelle. Le «Plan jeunes» (décret no 34/2013), converti en loi no 99/2013), assure le suivi d’une réforme antérieure, conformément à la Stratégie «Europe 2020». Il introduit des mesures destinées à réduire l’inadéquation entre la demande et l’offre de travail et à lutter contre le chômage des jeunes par la mise en œuvre du Programme européen de garanties pour les jeunes et d’incitations économiques à l’intention des employeurs qui recrutent des travailleurs. La loi no 147/2013 a également établi le fonds pour les politiques actives afin d’améliorer l’employabilité des travailleurs et leur réinsertion dans le marché du travail. La dernière mesure est la réforme de la loi sur les emplois (lois nos 78/2014 et 183/2014) qui prévoit, au moyen de législations ultérieure: la réforme du système des services publics de l’emploi et l’établissement d’une agence nationale de l’emploi; la révision du système de couverture sociale et des dispositions relatives au licenciement des travailleurs; la simplification des types de contrats (voir, ci-après, la réforme du contrat d’apprentissage); et la création de perspectives propres à améliorer l’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle, en particulier pour les femmes. Deux de ces réformes ont été mises en œuvre via les récents décrets-lois nos 22/2015 et 23/2015. Les autres seront adoptées prochainement, conformément au calendrier législatif. Il faudrait mettre l’accent sur le «contrat de remplacement» (section 17 du décret-loi no 22/2015), qui permet à des personnes sans emploi, à la suite d’une procédure que les services publics de l’emploi suivent pour déterminer leur profil, de recevoir une prime liée à leurs conditions particulières d’employabilité, en signant un contrat de remplacement avec des services privés ou publics de l’emploi. Au titre de cet accord, les personnes sans emploi bénéficient de services renforcés afin d’améliorer leur intégration sur le marché du travail. Le contrat est financé par le fonds pour les politiques actives du travail, conformément à la section 17 du décret-loi no 22/2015. S’agissant de la création d’une agence nationale de l’emploi, l’objectif de la réforme consiste à améliorer la coordination des services du marché du travail sur tout le territoire national, à mettre en œuvre les politiques actives du marché du travail et à créer un réseau renforcé de tous les organes compétents dans le domaine du marché du travail. La loi no 183/2014 prévoit la participation des partenaires sociaux à la définition des grandes orientations politiques de l’agence. L’Italie a également adopté une série de mesures (loi no 92/2012, section 4(11)) afin de renforcer l’employabilité des femmes, grâce à l’introduction d’incitations destinées à embaucher des femmes sans emploi (notamment des chômeuses de longue durée ou des femmes vivant dans des régions enregistrant un taux de chômage élevé). Tout récemment, un décret ministériel adopté en décembre 2014 a établi, sur la base des données de l’ISTAT, une liste des secteurs économiques et des professions pour 2015 qui présentent un taux élevé d’inégalité en matière d’emploi entre hommes et femmes (plus de 25 pour cent), en vue de mettre en place des incitations (dans le secteur privé), conformément à la loi no 92/2012. On trouve les principales inégalités en matière d’emploi dans l’industrie (en particulier la construction, le secteur minier, la gestion des eaux, l’énergie et le secteur manufacturier), les services (transport et entreposage, informatique), ainsi que dans les activités professionnelles suivantes: armée, artisanat, agriculture, professions techniques, ingénieurs et entrepreneurs. La loi sur la stabilité de 2015 (loi no 190/2014) a également établi une «prime bébé» (d’un montant de 80 euros par mois) à l’intention des familles à faible revenu pour chaque enfant de moins de 3 ans. Enfin, en vue de lutter contre les déséquilibres régionaux, les fonds structurels (Plan d’action et de cohésion) sont utilisés de manière plus rationnelle.

S’agissant de l’emploi des jeunes, le décret législatif no 104/2013 instaure de nouveaux instruments visant à renforcer l’orientation professionnelle dans les établissements d’enseignement secondaire et un programme pilote (prévoyant des contrats d’apprentissage) pour les élèves des deux dernières années d’enseignement secondaire. Le Programme de garantie pour la jeunesse, doté d’un financement de 1,5 milliard d’euros, a été lancé l’année dernière (1er mai 2014) et, au 4 juin 2015, 604 854 jeunes y participaient, dont 51 pour cent de garçons et 49 pour cent de filles. Environ 8 pour cent des participants sont âgés de 15 à 18 ans, 53 pour cent sont âgés de 19 à 24 ans et 39 pour cent ont plus de 25 ans. Parmi eux, 329 656 ont souscrit au «pacte de services» et ont été regroupés selon le profilage (168 009 garçons et 161 647 filles). Ce programme représente pour l’Italie une nouvelle façon de coordonner et d’administrer les services du marché du travail, de créer un système concurrentiel/ coopératif entre les services privés et publics de l’emploi, compte tenu des réformes structurelles en cours dans ces domaines, dans le cadre de l’application de la loi no 183/2014 (loi sur l’emploi). Le ministère du Travail et de la Politique sociale a engagé, avec les régions, plusieurs mesures et démarches pour combattre le chômage des jeunes. Un site Internet a été créé pour le Programme de garantie pour la jeunesse (www.garanziagiovani.it). Une «méthode de profilage» des jeunes a été élaborée afin de les rassembler en groupes et de les orienter vers des mesures spécifiques et adaptées (par exemple, une formation professionnelle, un stage, un apprentissage, le service civil, l’auto-emploi, les mesures incitatives pour les employeurs). Les plans régionaux d’activation sont dotés de ressources financières et de stratégies actives réservées aux jeunes. Des mesures financées par le Fonds social européen ou des ressources nationales/régionales sont en place ou prévues. Le réseau européen de services de l’emploi, conçu pour faciliter la libre circulation des travailleurs au sein de l’Espace économique européen (EEE), est un autre outil important d’amélioration de l’emploi des jeunes. Les services publics de l’emploi, les syndicats et les organisations d’employeurs sont membres de ce réseau, dont les principaux objectifs sont d’informer, d’orienter et de conseiller les travailleurs mobiles éventuels quant aux possibilités d’emploi et aux conditions de vie et de travail au sein de l’EEE, ainsi que d’aider les employeurs qui souhaitent recruter les travailleurs originaires d’autres pays. Dans le cadre du Programme européen pour l’emploi et l’innovation sociale, il convient de mentionner le projet «Ton premier emploi EURES», qui aide les jeunes âgés de 18 à 35 ans à acquérir une expérience à l’étranger (apprentissages, stages et entretiens d’embauche). Conformément à la stratégie «UE 2020», le système d’action «Welfare to work», comprenant notamment des plans de politique active du marché du travail pour l’emploi des jeunes, des travailleurs de plus de 50 ans, des femmes et des chômeurs administrés par les régions et les provinces, a été mis en œuvre entre 2012 et 2014.

S’agissant des politiques éducatives et de formation, il convient de souligner que le concept général du Système national pour la certification des compétences a été établi par le décret législatif no 13/2013. En tant que condition préalable à l’accès au Fonds social européen pour la période 2014-2020, et conformément à la recommandation émise pour le pays le 8 juillet 2014 (point 6), l’Italie s’efforce de poursuivre la mise en œuvre du Répertoire national qui fait office de référence unique pour la reconnaissance et la normalisation des certifications au niveau national. Dans le cadre de cette action, un accord a été conclu au sein de la Conférence des Etats-régions en janvier 2015 pour mettre en place un système de références opérationnelles pour les certifications professionnelles régionales, au travers d’un cadre de référence nationale de certifications régionales et de normes minimales pour la validation et la certification des compétences. Cet accord a été traduit dans un décret interministériel publié par les ministères du travail et de l’éducation. La pierre angulaire de ce système est la création du cadre national de certifications régionales, au travers duquel sont organisées, regroupées et reconnues dans tout le pays plus de 2 600 certifications professionnelles régionales. Ce système a été conçu de manière à prévoir l’élargissement des classifications types (activité économique et classifications des emplois), avec une cartographie du marché du travail et des emplois. Ce système présente des données descriptives et permettra leur extension progressive (formation professionnelle, système éducatif, diplômes universitaires, qualifications professionnelles, profils d’apprentissage), ainsi que des mises à jour dynamiques. Le répertoire est aussi un outil précieux en ce qui concerne les systèmes d’information sur l’emploi, dans la mesure où il servira en fin de compte à créer des services plus ciblés et plus adaptés aux réalités du marché du travail. Il contribuera aussi à mettre au point des mesures de politique active personnalisées et à renforcer la formation tout au long de la vie, ainsi que la mobilité géographique et sectorielle. Le recours systématique aux classifications types permettra d’améliorer l’interopérabilité complète et systématique de toutes ces mesures avec les systèmes d’information sur l’emploi des autres Etats membres de l’Union européenne, des pays de l’OCDE et du réseau EURES. En outre, dans le cadre du Programme européen de garantie pour les jeunes, un groupe de travail interinstitutionnel a été mis en place au ministère du Travail pour se charger de la validation et de la certification des compétences acquises dans des contextes informels, comme le service civique national. Pour améliorer l’emploi des jeunes, le gouvernement, via la réforme de la loi sur les emplois, met aussi l’accent sur des mesures visant à la formation en entreprises, notamment par des contrats d’apprentissage. L’objectif global est d’encourager l’utilisation de ces contrats en redéfinissant: la formation dispensée tant au sein qu’à l’extérieur des entreprises; le contenu de la formation et les obligations des employeurs; les critères généraux d’apprentissage dans les écoles techniques et professionnelles, en indiquant en particulier le nombre d’heures passées à l’école pendant l’apprentissage. Un décret législatif spécifique sera adopté pour rationaliser les mesures d’incitation à l’emploi, y compris l’apprentissage. En 2013, une réforme a aussi été lancée dans le domaine de l’éducation des adultes en vue de la réorganisation des centres de formation pour adultes, ces centres relevant désormais du système éducatif italien et habilités à délivrer des attestations et des certifications (règlement no 263/2012). Dans le domaine de l’éducation et de la formation professionnelle, des normes nationales ont été définies pour 22 certifications (trois ans) et 21 diplômes (quatre ans), déclinées en compétences, conformément aux dispositions du Cadre européen des certifications. Ces dernières années, l’accent a été mis sur l’amélioration de la qualité de l’enseignement supérieur et de l’enseignement technique supérieur, et sur la formation, afin de créer une offre de formation qui corresponde davantage aux besoins en constante évolution du marché du travail.

S’agissant des coopératives, le ministère du Développement économique a adopté en 2014 plusieurs mesures visant à promouvoir l’emploi par le biais de coopératives. Plus particulièrement, en vertu du décret ministériel du 4 décembre 2014, un fonds d’incitation a été créé pour promouvoir la création et le développement de petites et moyennes coopératives. Ce fonds peut servir à financer les coopératives mises en place par des travailleurs issus d’entreprises en crise, les coopératives gérant les entreprises confisquées à des organisations criminelles organisées, ou la rénovation de coopératives en Italie du Sud.

 

Dernière mise à jour: 26 mai 2015

Catégorie

Nombre de coopératives

Autres types de coopératives

8 960

Banque de crédits coopératifs

394

Consortia agricoles

57

Consortia/fédérations coopératifs

304

Unions de crédits et d’assurances coopératifs

478

Coopératives de pêche

1 326

Coopératives de production agricole et d’élevage

5 568

Coopératives de consommateurs

1 381

Coopératives de distributeurs

156

Coopératives d’exploitants agricoles

3 875

Coopératives de travailleurs/producteurs

51 108

Coopératives de transport

2 155

Coopératives d’habitation

10 585

Coopératives sociales

21 650

Sociétés d’aide mutuelle

222

Sans catégorie

1 539

Montant total

109 758

Avec «mutualité prévalente»

101 739

Sans «mutualité prévalente»

5 313

 

Région

Nombre de coopératives

Abruzzes

2 195

Basilicate

1 775

Calabre

3 849

Campanie

11 612

Emilie Romagne

8 877

Frioul-Vénétie julienne

1 145

Latium

16 226

Ligurie

2 049

Lombardie

13 370

Marches

2 784

Molise

628

Ombrie

1 225

 

Piémont

4 810

Pouilles

9 138

Sardaigne

4 119

Sicile

14 504

Toscane

4 227

Trentin-Haut-Adige

1 984

Vallée d’Aoste

299

Vénétie

4 942

Total

109 758

 

Le montant total des coopératives a considérablement augmenté ces quinze dernières années. En 2013, par exemple, l’Italie comptait 106 970 coopératives. Coopératives ayant un impact positif sur l’augmentation de l’emploi (coopératives de travailleurs/producteurs, coopératives d’exploitants agricoles, coopératives de transport, coopératives de pêche, 70 pour cent des coopératives sociales): 45 pour cent en 2008, plus de 65 pour cent en 2015.

En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental s’est référé aux informations fournies dans la déclaration écrite du gouvernement. Durant les cinq dernières années, l’Italie a été confrontée à une crise économique grave, le taux de chômage atteignant 12,7 pour cent en 2014. Les jeunes travailleurs sont les plus touchés par la crise: en 2014, le taux de chômage des travailleurs âgés de 15 à 24 ans était de 42,7 pour cent, et le nombre de jeunes qui n’étaient ni employés ni étudiants, ni en formation était de 22,1 pour cent. Est ensuite mentionnée la réforme du marché du travail Fornero, qui inclut notamment: la réforme de la législation relative à la protection de l’emploi, visant à réduire la segmentation du marché du travail; la réforme du système d’indemnisation du chômage, dont la couverture et la cohérence ont été renforcées; l’introduction d’instruments destinés à faciliter la transition entre l’école et le travail; des mesures d’incitation pour l’emploi des travailleurs âgés et des femmes dans des secteurs où le taux de chômage des femmes est élevé ou dans des secteurs caractérisés par des inégalités entre les sexes importantes. Qui plus est, la réforme Fornero introduit un système permanent de contrôle avec la participation des partenaires sociaux et de toutes les institutions qui prennent part à la fois à la mise en œuvre de la réforme ou à la collecte et le traitement de données statistiques. La stratégie Emploi jeunesse prévoit un ensemble d’interventions visant à encourager l’emploi des jeunes, dont une incitation à l’emploi, des ressources pour le soutien financier d’expériences de travail et des incitations pour l’emploi indépendant et l’entrepreneuriat. Le programme de garantie pour les jeunes constitue un défi très important; il est l’occasion de mettre à l’essai une nouvelle approche pour assurer les services publics de l’emploi et les politiques actives du marché du travail, en créant un système compétitif de coopération entre les services publics de l’emploi et les agences privées, en élaborant une méthodologie nationale de «profilage» afin d’assurer aux jeunes des moyens de placement mieux ciblés et mieux adaptés, en introduisant des coûts normalisés à l’échelle nationale et en versant aux opérateurs du marché du travail une rémunération en fonction des résultats. La réforme «Jobs Act» (loi sur les emplois) de 2014 est la plus ambitieuse des trois réformes, donnant au gouvernement le pouvoir de réformer nombre d’aspects de la législation du marché du travail; elle prévoit notamment la création d’une agence nationale de l’emploi. A cet égard, des lois ultérieures ont déjà été approuvées et seront adoptées dans les prochaines semaines. Une réduction des cotisations sociales de trois ans est établie par la loi no 190 de 2014 pour les nouveaux contrats à durée indéterminée, le but étant d’encourager un redressement énergique du marché de l’emploi avec des emplois plus stables. Les données statistiques font apparaître une certaine amélioration des principaux indicateurs de l’emploi après la mise en œuvre de ces réformes. Le nombre de personnes employées a augmenté de 0,7 pour cent en avril 2015 par rapport à mars 2015. Le taux d’emploi a atteint 56,1 pour cent alors que le taux de chômage est tombé à 12,4 pour cent. Durant les trois premiers mois de 2015, le nombre de nouveaux contrats d’emploi a progressé de 3,8 points de pourcentage: le nombre de nouveaux contrats à durée indéterminée a augmenté de 24,6 pour cent par rapport à la même période de 2014. Pour ce qui est du chômage des jeunes, les derniers chiffres montrent une augmentation de 5,7 points de pourcentage du nombre de personnes employées âgées de 15 à 24 ans en mars 2015. Leur taux de chômage est aujourd’hui de 40,9 pour cent, soit 2,4 points de pourcentage de moins qu’en avril 2014. En ce qui concerne les politiques d’éducation et de formation, le représentant gouvernemental a indiqué que, conformément au Système national de certification des compétences, une direction nationale pour les qualifications est actuellement mise en place, et la réforme de la «Jobs Act» se focalise sur l’apprentissage sur le tas, en particulier au moyen de la réforme du contrat d’apprentissage. En ce qui concerne les données relatives aux coopératives, leur nombre s’est accru depuis 15 ans, y compris les coopératives ayant un impact positif sur l’emploi. Enfin, le gouvernement souligne l’importance donnée à la supervision, qui s’appliquera aussi à la réforme des politiques actives du marché du travail. Une attention toute particulière sera accordée au système de supervision et à la capacité de l’administration publique de tirer des leçons de son expérience, en adaptant continuellement les mesures et les services.

Les membres employeurs ont fait observer que la commission d’experts a formulé 16 observations sur la mise en œuvre de la convention depuis 1990. C’est la première fois que la commission peut examiner le cas au motif d’avancées substantielles réalisées par le gouvernement. Citant l’article premier de la convention, qui impose à tout Membre de formuler et d’appliquer, comme un objectif essentiel, une politique active visant à promouvoir le plein emploi, productif et librement choisi, les membres employeurs ont rappelé que les disparités régionales et les écarts entre hommes et femmes, un taux de chômage des jeunes excessivement élevé et un niveau élevé de travail non déclaré constituaient les principaux problèmes relatifs à la situation de l’emploi en Italie. Ces problèmes ont des causes structurelles et persistent quelle que soit la situation économique, comme le montrent également les commentaires de la commission d’experts de ces vingt-cinq dernières années. La profonde crise économique de 2008 qui a touché tous les pays européens a posé des difficultés particulièrement grandes à l’économie italienne et à la situation de l’emploi. Même si les institutions du marché du travail ne sont pas la cause de la crise, leurs faiblesses et leur manque d’efficacité, y compris des lourdeurs administratives excessives, ont contribué à l’aggravation de la crise et donc compromis la création d’emplois et la relance économique. En outre, les défaillances des juridictions du travail, où les différends ne sont réglés qu’au bout de plusieurs années, dissuadent les employeurs d’offrir des contrats à durée indéterminée. On constate les mêmes lacunes dans les services publics de l’emploi qui ne peuvent, de ce fait, pas jouer leur rôle dans la politique active du marché du travail. De même, le système de formation et d’orientation professionnelle ne peut intégrer pleinement les jeunes au marché du travail. Afin de résoudre ces problèmes, le gouvernement a engagé des réformes structurelles approfondies des institutions qui sont utiles pour l’emploi et le marché du travail afin qu’elles soient plus efficaces et plus propices à la création d’emplois. La réforme du marché du travail Fornero de 2012, le plan pour la jeunesse de 2013 et la «Jobs Act» de 2014 suivent exactement l’approche globale requise. La «Jobs Act», en particulier, rend les réglementations relatives au marché du travail plus favorables à l’emploi, ce qui a donné naissance à une nouvelle forme de contrats à durée indéterminée bénéficiant d’une protection accrue. Cette mesure a été assortie d’une réforme du système de formation professionnelle en emploi et d’apprentissage, essentielle pour accroître l’emploi des jeunes. Le système public de l’emploi a également été réformé, et des mesures visant à concilier vie professionnelle et vie privée ont été mises en place afin de promouvoir l’intégration des femmes dans le marché du travail. Les membres employeurs ont souligné qu’il fallait toujours du temps pour que les effets des réformes structurelles deviennent visibles. Déjà, on note les premiers effets positifs, notamment la hausse significative de l’emploi, y compris celui des jeunes. Aussi, le nombre de femmes en emploi a augmenté plus vite que celui des hommes. Chose très importante, le nombre de contrats à durée indéterminée a fortement augmenté depuis l’adoption de la «Jobs Act». En ce qui concerne l’article 3 de la convention, qui prévoit que les représentants des milieux intéressés par les mesures à prendre, et en particulier les représentants des employeurs et des travailleurs, devront être consultés au sujet des politiques de l’emploi, les membres employeurs ont fait observer que, pendant plusieurs années, le gouvernement a étudié les mesures proposées avec les partenaires sociaux. Cependant, au moment où la situation de l’emploi s’est fortement dégradée, le gouvernement a assumé, à juste titre, ses responsabilités et proposé un projet de loi conforme aux recommandations du Conseil européen dans le cadre du Semestre européen. Les partenaires sociaux ont été consultés pendant les délibérations au Parlement et ont exprimé leur point de vue sur le train de réformes que le Parlement a par la suite adopté. Les mesures d’application de la réforme sont en cours d’élaboration et font l’objet de larges consultations avec les partenaires sociaux. A cet égard, les membres employeurs ont espéré que les opposants à la modernisation du marché du travail adopteront enfin une attitude positive et que tous les partenaires sociaux participeront activement aux consultations. Pour conclure, les membres employeurs ont salué les réformes structurelles d’ensemble du gouvernement, qui vont dans le sens des objectifs de la convention et reflètent l’esprit de la Déclaration d’Oslo de 2008 qui invite à promouvoir le travail décent et la création d’emplois par un environnement favorable aux entreprises et au moyen de stratégies adaptées visant à améliorer la compétitivité et le développement durable. Il faudra peut-être beaucoup de temps pour combler les écarts de taux d’emploi entre les régions, les deux sexes et les jeunes. Toutefois, les membres employeurs ont réaffirmé que la démarche globale qui a été adoptée a montré de premiers effets positifs. Par conséquent, le gouvernement devrait poursuivre cette voie de réformes.

Les membres travailleurs ont rappelé l’objectif de plein emploi, productif et librement choisi, s’appuyant sur la consultation des partenaires sociaux, ainsi que l’importance d’autres documents essentiels faisant consensus, comme l’Agenda du travail décent, la Déclaration de 2008 sur la justice sociale, la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, le Pacte mondial pour l’emploi de 2009 et la résolution de la CIT de 2010 concernant la discussion récurrente sur l’emploi, sans oublier la Déclaration d’Oslo de 2008. Au-delà de l’existence d’un cadre, la convention no 122 requiert des initiatives de la part du gouvernement, et la commission d’experts est habilitée à analyser que les mesures prises auront un impact sur l’emploi compatible avec les objectifs de la convention. Rappelant les conclusions adoptées en 2013 lors du précédent examen de ce cas ainsi que les commentaires subséquents de la commission d’experts, les membres travailleurs ont estimé que le problème de ce cas réside à présent ailleurs, car les données ont en grande partie changé depuis que le gouvernement a publié une série de lois et de décrets-lois nouveaux afin de réduire le chômage. Ainsi, la «Jobs Act», adoptée en 2014 sans réelle consultation des partenaires sociaux afin de faciliter l’augmentation du taux d’emploi, constitue la troisième réforme du marché du travail en trois ans sans que soient nécessairement évalués les effets des précédentes. Or informer ce n’est pas consulter au sens de la convention qui exige des consultations en temps opportun, permettant des échanges, de dégager des compromis et l’échange d’amendements. Le droit du travail n’est pas au service du marché comme le souligne la Déclaration de Philadelphie. Or la dernière réforme constitue une libéralisation totale du contrat à durée déterminée puisque celui-ci peut être prolongé jusqu’à trente-six mois, introduit le concept de «rétrogradation» autorisant que les travailleurs soient assignés à des tâches de niveau inférieur à celles pour lesquelles ils ont été engagés, autorise le recours à des contrats de travail partiel avec une élasticité plus grande de l’horaire de travail ou le travail occasionnel pour tout type de tâches ou, pour ce qui est de l’apprentissage, annule la rémunération durant les heures de formation et, enfin, met en place un «contrat à protection croissante» qui inquiète les milieux syndicaux. A défaut d’une concertation, qui aurait eu le mérite de clarifier les doutes et aurait permis des aménagements, les travailleurs sont mis devant le fait accompli d’une mise à mal du droit du travail; le gouvernement faisant du travail, du salaire, de la protection sociale au sens large un facteur d’orthodoxie budgétaire sans plus, à l’opposé de la Déclaration de Philadelphie sur laquelle la convention se fonde. Les derniers chiffres présentés ne sont pas surprenants car l’emploi dans le pays est fortement saisonnier, ce qui se reflète dans la forte utilisation de contrats à durée déterminée, et doivent être mis en rapport avec le fait que les entreprises profitent des subventions pour trois années. Il convient néanmoins de s’interroger sur la pérennité de ces aides transitoires sur l’emploi. Le risque est grand de mettre à mal la cohésion d’un pays qui souffre déjà de déséquilibres économiques et sociaux entre ses différentes régions et d’un taux élevé de chômage des femmes. Bien que le gouvernement fonde de grands espoirs sur la garantie jeunes de l’UE, celle-ci souffre de moyens limités et ne suffira pas à solutionner le problème de tous les jeunes auxquels il faut aussi offrir des transitions de qualité entre l’école et le travail. Pour conclure, les membres travailleurs ont déclaré partager les soucis des travailleurs italiens qui craignent une recrudescence de la précarité existante et une pauvreté croissante également au sein du monde du travail. La voie de sortie de la crise réside dans la création de plus d’emplois de qualité, avec des efforts pour la formation des travailleurs.

La membre employeuse de l’Italie a indiqué que l’environnement actuel était différent de celui de 1964, lorsque la convention a été adoptée. La mondialisation des économies, les changements technologiques et démographiques, des moyens de production différents ainsi que de nouvelles exigences des travailleurs et des entreprises ont transformé le marché du travail. Cependant, les objectifs de la convention demeurent valables et doivent être poursuivis. En effet, des politiques actives du marché du travail qui favorisent la croissance, l’emploi, le développement et la cohésion sociale sont plus que jamais nécessaires. Les gouvernements et les partenaires sociaux devraient s’engager à adopter des réformes pour adapter le marché du travail à la situation. A cet égard, il est encourageant d’examiner des pays qui relèvent maintenant de manière positive ce défi, en particulier l’Italie où les réformes structurelles du marché du travail ont pris du retard depuis des années. Les chiffres alarmants concernant l’emploi, en particulier celui des femmes et des jeunes, pourraient être expliqués par le retard dans la lutte contre les faiblesses structurelles de l’économie et du marché du travail qui ont été exacerbées par la crise. Aujourd’hui, des améliorations dans les derniers chiffres doivent être soulignées, en particulier en ce qui concerne la création d’emplois permanents. Il convient de rappeler néanmoins que l’Italie est restée derrière les autres pays de l’UE dans l’utilisation de contrats à durée déterminée. L’Italie est aussi le pays où les personnes engagées par le biais d’agences de travail temporaire jouissent d’un traitement tout à fait égal à celui des travailleurs occupant un emploi permanent. La «Jobs Act» mise en place par le gouvernement contient un ensemble de réformes qui a simplifié et modernisé la relation de travail, renforcé les politiques actives du marché du travail et surmonté les rigidités qui décourageaient la création d’emplois. Un cadre réglementaire qui favorise l’emploi ainsi que des politiques qui encouragent l’investissement pourraient contribuer à la reprise. Les partenaires sociaux ont un rôle actif à jouer dans cette stratégie et ils ont eu la possibilité de faire valoir leurs points de vue à travers les institutions existantes, y compris le Parlement. Ils pourraient également contribuer à la modernisation du marché du travail par la négociation collective qui, même pendant la crise, a contribué à trouver des solutions équilibrées pour protéger l’emploi et soutenir la compétitivité. Les résultats déjà obtenus devraient encourager le gouvernement à adopter de nouvelles réformes dans le cadre de la convention.

La membre travailleuse de l’Italie a déclaré que la «Jobs Act» censée faciliter l’augmentation du taux d’emploi constitue la troisième réforme du marché du travail en trois ans, sans évaluation de ses effets respectifs et avec un manque de vision globale. L’augmentation du travail précaire dérive de la réforme du marché du travail de 2003, et du processus entamé depuis 1993 au nom de la «modernisation du marché du travail» et la création d’emplois. Cependant, la «Jobs Act» s’oriente vers davantage de flexibilité plutôt que de sécurité du travail, considérant les contrats à durée indéterminée comme à «protection croissante» et remplaçant, dans les faits, le régime actuel de protection contre le licenciement illicite. Désormais, même en cas de licenciement manifestement non fondé, seule une compensation financière pourra être imposée, mais pas une réintégration dans l’emploi; seul le montant de l’indemnisation augmentant avec les années d’ancienneté. Le développement équilibré des relations professionnelles qui a prévalu jusque-là est ainsi remplacé par la monétisation du travail et de sa valeur, en violation de la Charte sociale européenne en son article 24 et la convention (nº 158) sur le licenciement, 1982, de l’OIT selon lesquelles tout licenciement doit être justifié. Or la réintégration dans le poste de travail en cas de licenciement illicite exprimait un choix de principe garantissant la dignité de la personne et permettant de revendiquer l’application des autres droits fondamentaux du travail. Il est à craindre que ces nouvelles mesures ne génèrent des pressions contre les travailleurs et de possibles chantages à l’emploi. Les embauches effectuées en 2015 seront ainsi exemptées du paiement des charges sociales pendant au maximum trente-six mois et une limite maximale de 8 060 euros par an indépendamment de savoir si l’entreprise en question a investi dans la formation, l’innovation ou la recherche. Cette réforme a été pensée en faveur des entreprises. La pérennité à long terme de ces embauches est cependant incertaine car elles ne sont pas la conséquence d’interventions structurelles, et il est à craindre qu’elles aient pour conséquence une stabilisation des travailleurs précaires. Selon l’OCDE, l’Italie garde le taux de chômage des jeunes le plus élevé en Europe, après la Grèce, avec 49 pour cent, et la voie de sortie durable de la crise semble encore longue. L’augmentation de la productivité que cherche à obtenir la réforme est essentiellement liée à la possibilité de licencier plus facilement les travailleurs, ce qui est plus avantageux pour les employeurs qui peuvent embaucher de nouveau des travailleurs moins chers et profitant de réductions fiscales et de sécurité sociale sans qu’aucune mesure ne soit prise pour recycler les travailleurs au moyen de mesures susceptibles d’accroître l’employabilité. Les mesures nécessaires en matière d’enseignement et de formation requis depuis 2013 n’ont jamais été réalisées, et les centres territoriaux permanents auprès des centres provinciaux d’éducation des adultes n’ont jamais vu le jour; le système est sous-financé et le gouvernement reste défaillant au niveau de la mise en œuvre. Un travail sans droits n’est pas un travail. Or c’est vers cela qu’on avance avec, pour résultat, une dégradation économique mais aussi sociale du travail. Le sud du pays a perdu 800 000 postes de travail entre 2004 et 2014, et on enregistre une vague d’émigration vers le nord du pays avec 700 000 personnes qui ont migré entre 2011 et 2013. L’Italie n’avait-elle pas davantage besoin d’un ambitieux programme d’investissements publics et privés donnant au pays de véritables chances de croissance basée sur des emplois de qualité? La Constitution nationale commence en effet en affirmant que «L’Italie est une République démocratique fondée sur le travail», fondement de la vie et principal instrument d’inclusion sociale, et ce principe doit être traduit en termes de respect de la dignité de tous.

Le membre gouvernemental de la France, s’exprimant également au nom des membres gouvernementaux de l’Allemagne, de Chypre, de la Croatie, de l’Espagne, de la Grèce, du Luxembourg, du Portugal, de la Roumanie et de la Slovénie, a indiqué qu’à l’image de l’Italie tous ces gouvernements sont engagés dans une démarche coordonnée au niveau de l’UE. Cette démarche vise à lutter contre le chômage, dans un contexte difficile pour les finances publiques, dans le but de réduire un taux de chômage sans précédent, assurer une croissance forte et durable et renforcer la cohésion sociale. La stratégie Europe 2020 pour une croissance intelligente, durable et inclusive, définissant l’orientation macroéconomique de l’UE repose sur ces mêmes objectifs et vise un taux d’emploi de 75 pour cent pour les 20-64 ans et la possibilité pour chacun de saisir les opportunités et de développer ses compétences pour être en mesure de trouver un emploi, d’être éduqué, formé et de pouvoir bénéficier d’une protection sociale adaptée aux différents risques rencontrés tout au long de la vie. La pauvreté au travail demeure un défi que doivent relever les Etats membres, et développer l’accès à l’emploi demeure un défi significatif, plus particulièrement pour les femmes et les populations vulnérables. La recherche d’un juste équilibre entre les objectifs macroéconomiques, d’une part, ceux de la croissance inclusive, d’autre part, ainsi que la mise en place d’un environnement favorable au développement des investissements doivent faire l’objet d’une attention accrue comme le préconise le récent programme d’investissements de la Commission européenne. Une meilleure utilisation du capital humain à travers des marchés du travail plus inclusifs devrait contribuer à la croissance et au progrès social. Compte tenu de leur représentativité au sein de l’Europe sociale, les organisations syndicales et professionnelles au niveau européen jouent un rôle particulier, notamment dans les domaines social et de l’emploi. L’Italie poursuit des politiques actives qui visent au plein emploi, productif et librement choisi, et il convient de faire confiance au gouvernement pour poursuivre ses efforts en ce sens, conformément aux valeurs et aux principes de l’OIT. En outre, sans le dialogue social, il ne peut y avoir de solution durable aux problèmes du marché du travail en Europe. L’OIT doit occuper toute sa place dans le système multilatéral pour y porter les enjeux sociaux des normes internationales du travail à travers une collaboration accrue avec les autres organisations internationales, en particulier économique et financière.

La membre travailleuse du Canada a indiqué, s’agissant du projet d’accord commercial entre le Canada et l’Union européenne, que, sous prétexte de promouvoir le plein emploi, les deux pays encouragent un programme de flexibilité du marché du travail caractérisé par une dérégularisation ou un retour à la régulation dans le but de baisser les salaires ou de les maintenir bas, une stimulation de l’investissement privé et un encouragement de la demande extérieure. Même si l’adoption d’approches semblables à celle de la «Jobs Act» est parfois présentée comme ayant permis une réduction du chômage, le tableau qui se cache en réalité derrière les statistiques se caractérise plutôt par une augmentation des contrats à court terme, du travail précaire et de l’inégalité, une stabilité sociale moindre, une plus grande insécurité dans l’emploi et une protection sociale plus faible – ce qui est contraire aux principes de l’Agenda du travail décent de l’OIT. Dans ces deux pays, la planification en matière d’emploi a lieu sans aucune consultation ni aucun engagement significatif des partenaires sociaux. Tandis que l’Italie met fin à une longue tradition de consultation des partenaires sociaux en matière d’emploi, le Canada lance actuellement des attaques frontales contre la liberté syndicale et la négociation collective. Il semble que l’objectif de la convention ait été mis de côté sans que des politiques de l’emploi significatives soient mises en œuvre et sans aucun dialogue avec les partenaires sociaux.

Le membre employeur de l’Espagne a affirmé que, comme c’est le cas dans son pays, la crise de 2008 a eu des répercussions néfastes sur l’économie italienne, qui ont entraîné un ralentissement de la croissance économique et la destruction de l’emploi, ainsi que l’aggravation des déséquilibres structurels déjà à l’œuvre avant la crise. Dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance, le gouvernement de l’Italie a adopté des mesures importantes visant à surmonter ces difficultés. Si la réforme du travail ne peut pas résoudre à elle seule les problèmes de l’emploi, elle représente, avec le reste des réformes, une pièce essentielle au redressement vigoureux de l’emploi à la faveur du prochain cycle ascendant de l’économie. Les employeurs espagnols appuient cette réforme et défendent l’adoption de mesures supplémentaires qui permettent d’éliminer les rigidités inutiles du marché du travail et d’établir un cadre favorable pour que les entreprises soient capables de générer un emploi de qualité. La «Jobs Act», entre autres mesures adoptées par le gouvernement, traduit sa détermination à relancer la création d’emplois.

La membre travailleuse de la France a rappelé le taux particulièrement préoccupant de 42 pour cent de jeunes au chômage en Italie, avec une situation dramatique dans le sud du pays, le fait qu’une majorité de jeunes sont confrontés au travail précaire dans de nouvelles formes d’emploi peu contractualisées ainsi que l’absence de débouchés professionnels, y compris pour les jeunes diplômés, ceci malgré les mesures prises par le gouvernement dans le domaine de l’apprentissage qui est considéré, tant par les partenaires sociaux que par le gouvernement, comme la forme contractuelle d’intégration à valoriser. Or la nouvelle réforme du marché du travail, en introduisant le «contrat aidé», qui confère aux entreprises une exonération des contributions pour une durée de trois ans, a eu pour conséquence que les employeurs ne recourent plus au contrat d’apprentissage, privant les jeunes de parcours de formation. En outre, le nombre de jeunes bénéficiant de ces contrats est déjà en diminution et personne ne sait ce qui se passera après les trois années d’exonération. Par ailleurs, seulement 20 pour cent des inscrits se sont vu octroyer la possibilité d’une insertion dans le monde du travail. L’oratrice a souligné que le problème du chômage des jeunes ne se limite pas à un problème de ressources puisque l’UE a fourni une aide substantielle à l’Italie, mais réside plutôt dans le choix des priorités dans la distribution des ressources disponibles. C’est pourquoi les travailleurs demandent une véritable politique active de création d’emplois qui privilégie les entreprises investissant dans la formation et qui renforce les services de l’emploi. Il est également nécessaire de familiariser les jeunes avec le travail et l’entreprise en valorisant le service civil et la formation.

La membre employeuse de la France a indiqué que, compte tenu de la grave récession économique, l’Italie a dû entreprendre d’importantes réformes du marché du travail, par exemple celle de la «Jobs Act», pour faire face au taux de chômage élevé. Ce pays a notamment adopté la réforme Fornero qui établit plusieurs mesures de protection concernant les conditions de travail des femmes et des jeunes; il a relancé l’apprentissage et la formation professionnelle; et il a adopté le «Plan jeunes», lequel est devenu une loi conforme à la stratégie pour 2020, ainsi que des mesures pour réduire l’inadéquation entre la demande et l’offre de travail visant, par exemple, à améliorer l’employabilité des chômeurs âgés et leur réinsertion, avec des mesures spécifiques pour les femmes. En 2014, les services publics de l’emploi ont été réformés et l’Agence nationale de l’emploi a été établie. L’accent a également été mis sur la formation avec la réorganisation des centres de formation pour adultes, relevant désormais du système d’éducation national, et l’amélioration de la qualité de l’enseignement supérieur et technique en vue d’une adéquation avec l’évolution du marché du travail. Toujours en 2014, le ministère du Développement économique a adopté des mesures pour promouvoir l’emploi par le biais des coopératives et du développement des petites et moyennes coopératives. En conclusion, il y a lieu d’encourager l’Italie à poursuivre les efforts déjà déployés afin de réduire le chômage et de retrouver le plein emploi, dans le respect de la convention.

Le membre travailleur du Brésil a rappelé l’importance de la convention dont le principal objectif est de donner corps aux principes énoncés dans la Déclaration de Philadelphie en ce qui concerne le plein emploi et la justice sociale. La convention promeut la création d’emplois grâce à l’adoption de politiques de croissance et de développement économique et oblige tous les Etats à mettre en œuvre des politiques relatives au chômage et au sous-emploi. La mise en œuvre de la convention en Italie a été compromise par les politiques économiques et sociales restrictives promues par la Commission européenne. Dans ce contexte, fin 2014, a été adoptée la «Jobs Act» qui crée de nouvelles formes de contrats de travail et facilite le licenciement des travailleurs. On comprend des mesures recommandées par la Commission européenne, appelées recommandations spécifiques à chaque Etat membre, que la faible productivité et compétitivité des entreprises italiennes sont des maux causés par une soi-disant protection excessive de la relation de travail. Toutefois, la réalité montre que les entreprises n’embauchent pas davantage uniquement parce qu’il est plus facile de licencier les travailleurs, mais parce qu’il existe une politique économique orientée vers la croissance économique, et donc l’expansion de leurs affaires. Même si les premiers chiffres montrent une légère diminution du chômage, il est important d’alerter sur les effets que les politiques de flexibilité ont eus en Amérique latine, où elles ont été largement appliquées. A long terme, la flexibilisation du licenciement, l’incitation à la conclusion de contrats à temps partiel et la sous-traitance ont entraîné la création d’emplois précaires ou le sous-emploi, ce qui est en pleine contradiction avec la convention. La vie des travailleurs ne sera de toute évidence pas améliorée sur le long terme si les mesures prises ne consistent pas en des politiques macroéconomiques tournées vers une croissance économique axée sur l’investissement, l’innovation technologique et vers l’augmentation des salaires et de l’investissement public.

Le membre employeur de la Turquie a indiqué que les commentaires de la commission d’experts donnent une image trompeuse de la situation en Italie et que l’évaluation de la situation ne doit pas se fonder uniquement sur des analyses quantitatives. La crise économique profonde a provoqué de grands dégâts dans l’économie et le marché du travail, et la réponse de l’Italie a été courageuse et réactive. Les réformes structurelles dans les domaines tels que la formation professionnelle, l’apprentissage, les services publics de l’emploi, les contrats de travail et la flexibilité ont été menées de manière cohérente. Ces mesures montrent un engagement clair pour surmonter la crise à travers des politiques de création d’emplois. Des effets positifs peuvent déjà partiellement être constatés, mais davantage de temps est nécessaire pour obtenir de plus amples résultats. Les employeurs turcs saluent les progrès accomplis par le gouvernement de l’Italie et son engagement à respecter la convention.

La membre travailleuse de la Belgique a fait référence à l’impact de la crise et des mesures d’austérité sur l’emploi et la vie des femmes en Italie. Ainsi, les jeunes, même très qualifiées, sont confinées dans des emplois précaires sans stabilité et les femmes âgées de plus de 40 ans ont du mal à se situer de manière satisfaisante sur le marché du travail. Selon le rapport annuel de 2014 de la Commission européenne sur l’égalité des chances, sans changement radical de politique en matière d’emploi, l’Italie n’atteindra l’objectif de 75 pour cent de taux d’emploi féminin que dans trente ans, l’égalité de traitement entre hommes et femmes ne deviendra réalité que dans soixante-dix ans et la représentation paritaire au Parlement national ne sera pas possible avant vingt ans. Le taux d’emploi masculin est supérieur de 22 pour cent au taux d’emploi féminin, alors que la moyenne de cet écart dans l’UE est de 12 pour cent. Les femmes quittent le marché de l’emploi parce que certains types de contrats ne leur offrent pas de protection de la maternité adéquate. En outre, la pratique des «démissions en blanc» est courante, aux termes de laquelle au moment de son engagement la travailleuse signe une lettre de démission que l’employeur utilisera si celle-ci est enceinte ou se trouve en congé de maternité.

La membre employeuse de la Belgique a souligné que, face à la crise financière et économique que traverse l’Europe depuis 2008, il existe un objectif commun de rétablir la croissance afin de créer des emplois durables, ce qui passe nécessairement par des réformes structurelles du marché du travail. Ces réformes, parfois douloureuses, commencent cependant à porter leurs fruits. Les gouvernements s’attaquent avec détermination aux faiblesses structurelles et consultent de manière régulière, voire permanente, les partenaires sociaux tant avant d’adopter les réformes que pour leur mise en œuvre. Les divergences de vues entre les partenaires sociaux sur les mesures à prendre, surtout lorsqu’elles sont peu populaires, existent et, en l’absence d’entente, les gouvernements n’ont d’autre choix que de trancher. A cet égard, l’obligation de consultation au sujet des politiques de l’emploi, prévue à l’article 3 de la convention, ne porte pas atteinte à la souveraineté des Etats. Ces derniers doivent poursuivre les réformes structurelles nécessaires qui permettront de sauvegarder la compétitivité des entreprises, de préserver l’emploi et, par voie de conséquence, le système de sécurité sociale. En conclusion, les pratiques en Italie sont conformes à l’article 3 de la convention.

La membre travailleuse de la Pologne, faisant observer que la réforme de la législation italienne du travail a entraîné une diminution des droits des travailleurs, a présenté la situation des enfants les plus défavorisés. Le travail des enfants pourrait devenir une réalité au sein de l’UE suite aux mesures d’austérité qui ont des répercussions importantes sur les groupes vulnérables du fait de la réduction des revenus des familles et des coupes budgétaires publiques dans les domaines de la santé, de l’éducation et des services sociaux. L’Italie a l’un des taux d’abandon scolaire les plus élevés d’Europe. Une étude de Save the Children de 2013 a révélé qu’au moins un enfant sur 20 est exploité. En octobre 2011, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU a instamment prié l’Italie d’instituer des mécanismes efficaces capables de garantir l’accès des enfants à l’éducation, à la santé et à l’aide sociale et a demandé qu’une analyse complète des ressources allouées à cette fin soit menée. Dans ce contexte, le gouvernement aurait dû faire de la mise en œuvre de l’enseignement universel gratuit une priorité en vue de créer de nouveaux emplois de qualité et de générer des investissements publics pour favoriser le développement et la croissance du pays. Ces éléments devraient être au cœur des débats de la communauté internationale et de la politique de l’UE pour enfin mettre un terme aux déficits de travail décent, à la pauvreté et à l’inégalité.

Le membre travailleur de l’Allemagne a constaté avec préoccupation que les récentes réformes du marché du travail mises en place par le gouvernement sont socialement déséquilibrées et qu’elles ont des conséquences désastreuses sur l’économie et la société. Alors que le gouvernement fait face à de nombreux défis pour surmonter la crise économique ayant entraîné la perte de milliers d’emplois, il y a lieu de se demander si la «Jobs Act» permettra réellement de parvenir à la croissance et au développement économiques, d’élever le niveau de vie et de réduire le taux de chômage. La «Jobs Act» a introduit un nouveau contrat assorti de garanties supplémentaires remplaçant les anciens contrats standard à durée indéterminée. Par conséquent, il est désormais plus difficile d’engager des procédures judiciaires contre un licenciement pour raisons économiques. Dans le cadre des contrats récemment conclus, où des entreprises ont plus de 15 employés, il n’existe pas de droit à la réintégration, sauf lorsque les tribunaux ont jugé que le licenciement est discriminatoire. En outre, le montant de l’indemnisation en cas de licenciement abusif a été fortement réduit, notamment en cas de licenciements collectifs. L’article 18 du Statut des travailleurs italiens, qui prévoyait auparavant la protection des travailleurs syndiqués contre les licenciements abusifs, a été modifié. Ceci équivaut à une ingérence dans la liberté syndicale. L’introduction de nouveaux contrats assortis de garanties supplémentaires signifie que les entreprises peuvent procéder à des licenciements abusifs ou collectifs en versant simplement une maigre indemnisation. Il est préoccupant que d’autres réglementations en vertu de la «Jobs Act» puissent générer davantage de précarisation des travailleurs et renforcer encore les disparités existant entre différentes catégories de travailleurs. Même s’il semble que, d’après certaines déclarations faites au cours de la discussion, les réglementations sur la protection contre le licenciement sont la principale cause de la crise du marché du travail en Italie, peu de données étayent cette idée. En réalité, les pays qui prévoient des garanties importantes contre les licenciements abusifs obtiennent de meilleurs résultats économiques et taux d’emploi que les autres. Le gouvernement aurait dû consulter les travailleurs dès le début du processus de réforme, et il devrait tenir compte des objectifs sociaux dans ses mesures de promotion de l’emploi.

Le membre travailleur du Japon, renvoyant au rapport du Directeur général à la Conférence, a indiqué que le travail devrait contribuer à surmonter les problèmes sociaux en reliant les individus et en établissant un lien entre les lieux de travail et la société. Cependant, ce lien est de plus en plus faible en raison de l’augmentation du travail précaire et de la détérioration de la qualité de l’emploi. Bien que la crise constitue une occasion de reconnaître qu’il est important d’assurer une plus forte cohérence entre les stratégies de croissance et les politiques de l’emploi, peu d’enseignements ont été tirés de cette crise, comme en témoignent les politiques mises en œuvre partout dans le monde, y compris en Italie. La «Jobs Act» donne plus de flexibilité au marché du travail, supprimant les contraintes auxquelles font face les employeurs au moment de l’embauche et du licenciement des travailleurs en redéfinissant les tailles des entreprises, en établissant de nouvelles règles relatives aux contrats à durée déterminée et en révisant l’article 18 du Statut des travailleurs italiens qui empêche les entreprises de réduire leurs effectifs pendant une crise. De telles mesures créent assurément plus d’emplois, dont la plupart seront néanmoins précaires, entraînant un cercle vicieux d’emplois précaires, avec des salaires inférieurs; une diminution de l’épargne; une consommation encore plus faible; un arrêt des investissements et une croissance stagnante, entre autres. Pour interrompre cette spirale déflationniste, des investissements devraient être faits pour créer des emplois décents, et les politiques de l’emploi devraient viser le renforcement de la protection des travailleurs et l’augmentation des salaires. Enfin, malgré les dispositions de l’article 3 de la convention, dans de nombreux pays, la priorité est souvent accordée aux consultations avec les entreprises plutôt qu’avec les syndicats. Sans consultation adéquate des représentants de travailleurs, les mesures ne seront pas efficaces ou ne serviront pas les intérêts de ceux à qui elles sont destinées.

Le membre travailleur de l’Argentine a déclaré que la réforme du travail italienne a lancé un processus considéré comme étant une «contre-réforme du travail», dans la mesure où la réforme a fait régresser nombre de droits et garanties acquis pour les travailleurs au cours des cinquante dernières années du siècle dernier. Cette «contre-réforme» découle de la conception erronée des employeurs et du gouvernement selon laquelle moins de droits pour les travailleurs et davantage de pouvoir pour les entreprises se traduiront par un meilleur niveau d’emploi. Pourtant, la réalité démontre tout autre chose: le chômage en Italie a atteint des niveaux record, en particulier dans le sud du pays, et touche plus fortement les femmes et, dans des proportions encore plus dramatiques, les jeunes. Outre le fait de nuire gravement à la stabilité de la relation de travail, en supprimant la possibilité de réintégrer les travailleurs en cas de «licenciement économique illégitime», la réforme, par la révision de l’article 2103 du Code civil, a sapé les bases mêmes du système de protection des travailleurs. En vertu de cet article, l’employeur ne pouvait pas affecter le travailleur à des fonctions inférieures à celles qu’il exerçait au moment de son entrée dans l’entreprise. Avec la réforme, les possibilités pour l’employeur d’exercer des pratiques abusives se sont considérablement accrues. D’une part, ce dernier peut affecter le travailleur à des fonctions inférieures et, d’autre part, le pouvoir du juge de rééquilibrer les conditions d’emploi, lorsque l’attribution de fonctions de niveau inférieur était excessive au regard de la situation économique réelle de l’entreprise, a été restreint. Ainsi, toute référence au devoir de l’employeur d’affecter ses salariés à des fonctions équivalentes à ce qu’elles étaient alors a été supprimée; la détermination des conditions d’emploi du travailleur est donc maintenant laissée au libre arbitre de l’employeur, quelles que soient les compétences et les capacités personnelles du travailleur. Les répercussions de ces mesures sur la dignité du travailleur sont incompatibles avec la convention et la Déclaration de Philadelphie de 1944.

Une observatrice représentant l’Internationale des services publics (ISP) a indiqué que la réforme du système de l’emploi public par le biais de la création de l’Agence nationale pour l’emploi a eu pour effet de supprimer 550 centres pour l’emploi. Ceci a eu pour effet de mettre plus de 8 000 travailleurs dans une situation d’incertitude et a laissé un vide béant dans les services de l’emploi. Les services publics sont actuellement sévèrement frappés par une série de réductions des dépenses publiques. Il convient de rappeler que ces réductions entraînent notamment l’abolition des services nationaux de foresterie, dont les fonctions seront alors confiées à d’autres services de la police, qui sont déjà largement en sous-effectif et sont gravement sous-financés. Le secteur de la santé représente 14 pour cent du total des dépenses publiques; en 2015, 2 069 hôpitaux et 8 718 services de premiers secours ont été fermés, ainsi que plusieurs centres de services d’urgence. De telles réductions des dépenses conduisent immanquablement à une réduction des emplois, une augmentation des heures supplémentaires et à moins de sécurité pour les patients. En outre, trois millions de travailleurs du service public n’ont pas connu d’augmentation de salaire depuis 2008. Depuis lors, les salaires ont été gelés, la négociation collective suspendue jusqu’à 2018 et aucun mécanisme n’a été prévu pour compenser l’augmentation du coût de la vie. La Cour constitutionnelle doit décider si la pratique du gel des salaires pour une durée de dix ans est compatible avec la Constitution, sachant qu’un verdict d’incompatibilité entraînerait le paiement d’arriérés de salaires à l’ensemble des fonctionnaires correspondant à un montant de 35 milliards d’euros pour les sept dernières années. Enfin, rappelant que, d’une part, les employeurs soutiennent la flexibilité et la flexisécurité et, d’autre part, remettent en cause le rôle de la commission d’experts et ignorent les arguments avancés par les syndicats, l’oratrice a exprimé sa crainte face à des travailleurs lassés d’être exploités. Dans un monde confronté à de graves conflits sociaux et politiques, ce mécontentement peut engendrer de graves conséquences.

Le représentant gouvernemental a répondu à certaines des questions soulevées lors de la discussion. Premièrement, s’agissant du dialogue social, les partenaires sociaux ont été régulièrement impliqués: ils ont été entendus par le Parlement sur différents aspects de la «Jobs Act»; ils ont été impliqués dans la discussion des dispositions contractuelles pertinentes qui avaient été laissées à la négociation collective; ils ont été consultés sur les politiques du marché du travail, en participant à la gouvernance des institutions, notamment la nouvelle Agence nationale pour les politiques actives du marché du travail et l’Institut national italien de sécurité. En outre, les partenaires sociaux ont été impliqués dans la gestion des politiques du marché du travail, à travers la gestion des nouveaux fonds de solidarité en cas de réduction ou de suspension d’activité professionnelle. Enfin, les partenaires sociaux ont également été chargés de gérer des fonds bilatéraux internationaux pour la formation des employés. Cependant, c’est au gouvernement qu’incombe la responsabilité du fonctionnement du marché du travail et du redressement économique. Il doit donc adopter les réformes qu’il juge nécessaires. En ce qui concerne le programme «Garantie pour les jeunes», cette initiative stratégique n’est pas un programme extraordinaire mis en place pour quelques années seulement mais un véritable projet pilote destiné à introduire une nouvelle approche des politiques publiques de l’emploi et des politiques actives du marché du travail. Ce programme a été cofinancé par le Fonds social européen, et il serait souhaitable que des ressources financières permanentes et stables soient fournies par l’UE. S’agissant de la nécessité, exprimée au cours de la discussion, de prodiguer des services à la collectivité afin d’entretenir les compétences des travailleurs, il y a lieu de rappeler que les stages, la formation et l’emploi font partie intégrante des plans stratégiques se rapportant à l’initiative «Garantie pour les jeunes». Les services publics de l’emploi n’ont pas été supprimés même si, dans le cadre de la réforme administrative, les services de l’emploi ne sont plus représentés au niveau provincial. A cet égard, le soutien des régions est indispensable pour lutter contre le chômage des jeunes, dans le cadre du programme «Garantie pour les jeunes». S’agissant de la question qui oppose contrats à durée déterminée et contrats à durée indéterminée, le succès de la stratégie du gouvernement se reflète dans les chiffres. Le nombre de nouveaux contrats à durée indéterminée a augmenté d’environ 24 pour cent au cours du premier trimestre de 2015 par rapport aux années précédentes. Il est préférable de mettre en place des incitations économiques plutôt qu’une législation stricte et difficile à mettre en œuvre. Le gouvernement est décidé à favoriser les contrats à durée indéterminée dans une perspective à long terme. En ce qui concerne la protection des travailleurs, le représentant gouvernemental a cité certains chiffres tirés des indicateurs de l’OCDE sur la législation en matière de protection de l’emploi. Des calculs concernant la législation en matière de protection de l’emploi ont été faits après l’adoption de la réforme Fornero. En 2013, l’Italie avait un indicateur de 2,79 pour la protection des travailleurs permanents contre le licenciement collectif, soit un chiffre supérieur à la moyenne dans l’OCDE (2,29). Concernant la réglementation sur l’emploi temporaire, l’indicateur de l’Italie est de 2,71, tandis que l’indicateur moyen de l’OCDE est de 2,08. S’il est vrai que le taux d’emploi global a diminué suite à la crise économique, le taux d’emploi des femmes a augmenté.

Les membres employeurs ont indiqué qu’il est important de rappeler que l’emploi ne saurait être créé par décret et qu’il dépend des conditions économiques. Par conséquent, il y a lieu de féliciter le gouvernement de s’être attaqué aux obstacles réglementaires qui freinaient l’accès à l’emploi, là où ces obstacles étaient excessifs ou avaient des effets négatifs à long terme sur l’emploi. Il est surprenant d’entendre des critiques au sujet du nouveau contrat de travail mis en place dans le cadre de la «Jobs Act» qui, certes, supprime la possibilité de réintégrer les travailleurs licenciés, mais accorde en revanche des droits d’indemnisation plus importants. De fait, la plupart des Etats membres de l’UE disposent de cadres réglementaires comparables, et il ne serait pas sérieux de prétendre que les travailleurs de tous ces pays sont exploités ou placés dans des situations précaires ou, encore, qu’ils ont des emplois mal rémunérés. Le gouvernement a démontré des progrès importants vers la réalisation des objectifs de la convention, en adoptant et en mettant progressivement en œuvre un ensemble complet de mesures visant à corriger les faiblesses structurelles en matière d’emploi. Le gouvernement devrait poursuivre son approche globale de réforme structurelle, de manière à améliorer la situation de l’emploi et à favoriser une croissance inclusive et riche en emplois. Etant donné l’adoption récente de la «Jobs Act», élément phare de la réforme et, puisqu’un laps de temps est nécessaire pour que les réformes structurelles portent leurs fruits au regard de la situation de l’emploi, la commission devrait continuer à évaluer la mise en œuvre de cette loi sur la base de données actualisées concernant le marché du travail. Le gouvernement devrait communiquer un rapport détaillé sur l’application de la convention pour examen par la commission d’experts en 2015.

Les membres travailleurs ont indiqué qu’ils sont satisfaits de constater que les membres employeurs ont souligné la pertinence de la convention dans le contexte de crise, le fait qu’il est important que cette commission en examine la mise en œuvre et la nécessité d’analyser les politiques de l’emploi pas uniquement à travers un prisme quantitatif mais également qualitatif. En outre, s’agissant du bien-fondé et de la nécessité de réformes structurelles, les membres travailleurs ont considéré que faire porter tous les efforts et sacrifices sur les travailleurs revenait à transférer sur ces derniers le coût d’une crise dont ils n’étaient pas responsables. De même, il est surprenant de constater que certains orateurs acceptent de s’en remettre à la souveraineté de l’Etat en abdiquant le rôle des partenaires sociaux dans le contexte du dialogue social. Face au risque de recrudescence de la précarité et d’une pauvreté croissante, la voie de sortie de la crise réside dans la création de plus d’emplois de qualité et des efforts accrus en matière de formation. Toutefois, face aux mesures prises jusqu’ici par le gouvernement et qui sont susceptibles de ne donner des résultats qu’à court terme, il est indispensable que le gouvernement continue à fournir des informations, notamment pour examen par la commission d’experts à sa prochaine session, sur: les résultats des réformes entreprises pour lutter contre le chômage élevé, le chômage de longue durée et le chômage des jeunes, en particulier en termes de création d’emplois de qualité et durables; la simplification des types de contrats et l’évolution du nombre de contrats à durée indéterminée bénéficiant d’aides publiques; l’évolution de l’emploi des femmes et la lutte contre les disparités dans l’emploi en fonction des régions; la révision des politiques et des mesures adoptées en vue d’atteindre les objectifs de plein emploi, productif et librement choisi; et la promotion de l’emploi productif à travers les coopératives. Le gouvernement devra en outre tout mettre en œuvre pour restaurer et renforcer la concertation sociale.

Conclusions

La commission a pris note des informations détaillées fournies oralement et par écrit par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi sur les questions soulevées par la commission d’experts au sujet des mesures relatives à la politique de l’emploi prises pour atténuer les effets de la crise en 2012-13, sur le contrôle des mesures mises en œuvre avec les partenaires sociaux, sur le fort taux de chômage, qui s’élevait à 12,6 pour cent en mai 2014 et touche fortement les jeunes, sur la persistance des différences entre les taux d’emploi dans les régions septentrionales et les régions méridionales du pays, ainsi que sur les mesures prises pour promouvoir un emploi productif grâce aux coopératives.

La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental indiquant que le taux de chômage est tombé à 12,4 pour cent en avril 2015 et que le taux de jeunes chômeurs âgés de 15 à 24 ans en recherche active d’emploi est tombé à 40,9 pour cent. La commission a également pris note des informations fournies sur la «Jobs Act» de 2015, qui a porté création d’une agence nationale pour l’emploi, revu les prestations de chômage et inclus de nouvelles dispositions sur le licenciement et la réintégration des travailleurs, entraînant une hausse du nombre de contrats à durée indéterminée de 24,6 pour cent par rapport à la même période en 2014. Plus de 600 000 jeunes participent au programme «Garantie pour la jeunesse», lancé en mai 2014. Le représentant gouvernemental a également indiqué qu’un accord a été conclu entre les régions en janvier 2015 qui prévoit un cadre national de qualification régionale afin de coordonner la reconnaissance nationale de plus de 2 600 qualifications professionnelles régionales.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu, la commission a prié le gouvernement:

■  de garantir, en consultation avec les partenaires sociaux, une approche globale des politiques de l’emploi afin d’améliorer la situation de l’emploi et de promouvoir une croissance inclusive et riche en emplois, conformément à la convention;

■  de garantir une consultation tripartite sur le développement et la mise en œuvre de politiques de l’emploi, fondées sur des données relatives au marché du travail régulièrement actualisées, notamment en ce qui concerne le nombre d’emplois, leur nature et leur durée, les questions relatives à la jeunesse, les questions de genre et les disparités régionales;

■  d’examiner les mesures visant à promouvoir un emploi productif et durable par le biais de coopératives;

■  de fournir un rapport détaillé pour examen par la commission d’experts en 2015 sur les questions soulevées dans les présentes conclusions.

 

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