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Observation Générale (CEACR) - adoptée 2015, publiée 105ème session CIT (2016)

Convention (n° 115) sur la protection contre les radiations, 1960

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Introduction
Contexte
1. A sa session de novembre-décembre 2014, la commission a différé son examen de l’application de la convention (no 115) sur la protection contre les radiations, 1960, en raison de la préparation d’une nouvelle observation générale relative à cette convention. La présente observation générale met à jour sa précédente observation à ce sujet, publiée en 1992, pour tenir compte des recommandations de 2007 de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR), qui font l’objet de sa publication 103 (ci-après: les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103)); de la déclaration de ce même organisme parue en 2012 dans sa publication 118 sur les réactions tissulaires/effets précoces et tardifs des rayonnements sur les tissus et organes normaux du corps humain – seuils de dose de réaction tissulaire dans un contexte de protection radiologique; et de la publication en juillet 2014 par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) d’une édition révisée du document intitulé Radioprotection et sûreté des sources de rayonnement: Normes fondamentales internationales de sûreté (partie 3: Prescriptions générales de sûreté) (ci-après: les «Normes de sûreté de 2014») (1), document qui tient compte des recommandations de la CIPR. Les recommandations contenues dans ces divers documents ont une influence déterminante sur l’application de la convention puisque celle-ci se réfère, dans ses articles 3, paragraphe 1, et 6, paragraphe 2, de la convention, à «l’évolution des connaissances» et aux «connaissances nouvelles». Cette observation générale est organisée en deux parties. La première partie (paragraphes 4 à 29) contient une synthèse des recommandations et des normes de l’AIEA et de la CIPR. La seconde partie, relative aux conclusions (paragraphes 30 à 41), contient des orientations précises relatives à l’application de la convention.
Référence aux connaissances disponibles – articles 3, paragraphe 1, et 6, paragraphe 2, de la convention
2. L’article 3, paragraphe 1, de la convention prévoit: «A la lumière de l’évolution des connaissances, toutes les mesures appropriées seront prises pour assurer une protection efficace des travailleurs contre les radiations ionisantes, du point de vue de leur santé et de leur sécurité.» Ce même article dispose dans son paragraphe 2 que: «à cet effet, les règles et mesures nécessaires seront adoptées [...]». Le troisième paragraphe de la recommandation (no 114) sur la protection contre les radiations, 1960, énonce que «en vue de l’application des dispositions du paragraphe 2 de l’article 3 de la convention, chaque membre devrait tenir compte des recommandations formulées de temps à autre par la Commission internationale de protection contre les radiations et des normes adoptées par les autres organisations compétentes». De plus, parmi les mesures de protection qui doivent être prises en vertu de l’article 3, paragraphe 1, l’article 6, paragraphe 1, prévoit que seront fixées, pour les différentes catégories de travailleurs, «les doses maximales admissibles de radiations ionisantes provenant de sources extérieures ou intérieures à l’organisme ainsi que les quantités maximales admissibles de substances radioactives introduites dans l’organisme», et l’article 6, paragraphe 2, précise que «ces doses et quantités maximales admissibles devront être constamment revues à la lumière des connaissances nouvelles». Aux fins de l’évaluation du respect de ces prescriptions, la commission a pour pratique de se référer aux connaissances actuelles telles qu’exprimées dans les recommandations de la CIPR et autres sources de référence internationales fondées sur les mêmes recommandations, comme les Normes de sûreté (coparrainées par un certain nombre d’organisations internationales, dont l’OIT à partir de 1982) et le Recueil de directives pratiques du BIT sur la radioprotection des travailleurs (rayonnements ionisants), dont la publication a été approuvée par le Conseil d’administration du Bureau international du Travail à sa 234e session (novembre 1986).
Champ du concept de l’exposition professionnelle
3. L’article 2, paragraphe 1, de la convention dispose que cet instrument s’applique à toutes les activités entraînant l’exposition de travailleurs à des radiations ionisantes au cours de leur travail. De même, les Normes de sûreté de 2014 définissent l’exposition professionnelle comme étant l’exposition subie par les travailleurs au cours de leur travail, et le Recueil de directives pratiques du BIT sur la radioprotection des travailleurs se réfère à l’exposition reçue ou engagée à laquelle un travailleur est soumis pendant une période de travail.
Partie I – résumé des recommandations et des normes de l’AIEA et de la CIPR
Système de protection des travailleurs contre les radiations ionisantes
Principes généraux du système de protection
4. L’objectif fondamental du système de protection contre les radiations (2) est de protéger les êtres humains et l’environnement contre les effets néfastes des rayonnements ionisants. Cet objectif doit être atteint sans restreindre indûment le fonctionnement d’installations ou le déroulement d’activités dès lors que les avantages qui en résultent l’emportent sur les risques inhérents aux rayonnements dont ces installations ou ces activités sont à l’origine. Si, jusqu’à présent, l’accent a été placé sur la limitation de la dose individuelle d’exposition, cette limitation est désormais perçue comme ne constituant simplement qu’un parmi plusieurs principes de sûreté d’un système de protection radiologique qui doit être applicable à toute situation d’exposition. Les trois principes généraux de la protection radiologique sont la justification des expositions, l’optimisation de la protection radiologique et l’application de limites de dose (3):
a) La justification d’une action ou activité. Pour toute situation d’exposition (4), il s’agit de savoir si les avantages que retirent les personnes et la collectivité de l’engagement ou de la poursuite d’une action ou activité l’emportent sur les inconvénients (notamment les détriments causés par les rayonnements) résultant de cette même action ou activité. Si les informations disponibles sont suffisantes, le détriment associé à l’action ou activité envisagée doit inclure aussi bien le détriment inhérent à des expositions potentielles que le détriment inhérent à des expositions certaines. Le processus de justification doit nécessairement tenir compte des connaissances scientifiques nouvelles disponibles sur l’efficacité ou les conséquences des actions ou activités. Si l’action ou activité ne peut plus être considérée comme apportant un avantage suffisant au regard du détriment total qu’elle engendre, des mesures pouvant aller jusqu’à l’interdiction ou le retrait devraient être envisagées.
b) L’optimisation de la protection. L’optimisation de la protection et de la sûreté est un processus visant à assurer que la probabilité et l’ampleur d’une exposition et le nombre de personnes exposées sont aussi faibles que ce qui est raisonnablement praticable, compte tenu des facteurs économiques et sociétaux. Dans le processus d’optimisation, on recourt à la notion de contraintes de dose (5).
c) La limite d’exposition. L’exposition des individus dans toute situation d’exposition doit être soumise à la dose individuelle et aux critères de risque. Les limites de dose ou de risque sont une forme juridique particulière de ces critères, liées à la personne et établies dans le cadre de la mise en place du système de protection, pour définir les expositions qui doivent être considérées comme inacceptables. Pour assurer que les limites de dose (6) sont respectées, d’autres critères applicables à la dose pourraient être utilisés, comme les contraintes de dose ou les niveaux de référence (7).
Application de limites maximales admissibles (8) dans le cadre du système de protection contre les radiations ionisantes
5. La commission rappelle que, au cours des dernières décennies, la compréhension des effets des radiations a considérablement évolué, tant en ce qui concerne les niveaux de limites de dose recommandés que leur finalité et leurs fonctions dans le cadre du système de protection recommandé par la CIPR. Initialement, leur principale finalité était perçue comme étant d’éviter des effets non malins directement observables; puis l’apparition des cancers et les effets héréditaires causés par les rayonnements furent également pris en considération, et la limite annuelle d’exposition professionnelle de l’organisme entier fut abaissée plusieurs fois, à la lumière des nouvelles connaissances scientifiques.
6. La position de la CIPR est que, pour de faibles doses de rayonnement (en deçà de 100 millisieverts (mSv) par an), l’accroissement dans l’apparition des «effets stochastiques» (9) peut survenir avec une faible probabilité et à proportion de l’accroissement de la dose de rayonnement par rapport au rayonnement naturel. Ces effets stochastiques incluent ceux dont la survenance est aléatoire, comme le cancer ou les dommages génétiques. En l’état actuel des connaissances, les effets stochastiques ne peuvent être complètement évités et aucun seuil de dose de rayonnement ne peut être invoqué en ce qui les concerne. Ainsi, la fixation de limites de dose ne peut reposer sur les seules considérations sanitaires et doit également s’appuyer sur des considérations économiques et sociétales. D’un autre côté, les effets sur la santé associés aux doses les plus élevées sont qualifiés d’«effets déterministes» (10) (ou de «réactions tissulaires» lorsque la gravité des effets est proportionnelle à la dose au-delà d’un niveau donné). Les effets déterministes peuvent être évités en contenant les doses auxquelles les personnes sont exposées en deçà d’un certain niveau de dose.
7. Dans les situations d’exposition planifiée, l’exposition ne doit pas excéder les limites de dose et, s’agissant de l’exposition en deçà des limites de dose, la protection doit être optimisée. En outre, il est recommandé d’associer toutes les parties concernées au processus d’optimisation.
8. Par conséquent, le respect des limites de dose pour les personnes n’est pas le seul indice d’une protection satisfaisante contre les radiations, et il convient de souligner qu’il est nécessaire d’optimiser la protection en maintenant toutes les expositions à un niveau aussi faible que ce qui est raisonnablement praticable, compte tenu des facteurs économiques et sociétaux. Cette approche est reflétée dans l’article 5 de la convention, aux termes duquel «Tous les efforts doivent être faits pour réduire au niveau le plus bas possible l’exposition des travailleurs à des radiations ionisantes et toute exposition inutile doit être évitée par toutes les parties intéressées.»
Limites de dose dans le cadre d’une exposition professionnelle
Limites d’incorporation (11)
9. Conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la convention, les doses maximales admissibles provenant de sources extérieures ou intérieures à l’organisme ainsi que les quantités maximales admissibles de substances radioactives introduites dans l’organisme seront fixées pour les différentes catégories de travailleurs. L’élaboration de la notion de dose efficace fournit le mécanisme permettant d’inclure la somme des expositions de sources extérieures et intérieures, et c’est à cette quantité que s’appliquent les limites de dose.
Précédentes recommandations concernant les limites de dose
10. Les recommandations de la CIPR de 1990 (publication 60, appendice B) comportaient une discussion détaillée des effets biologiques des radiations ionisantes. Sur la base des informations contenues dans cette publication, la CIPR concluait en 1990 que les limites de dose devaient être déterminées de telle manière et être fixées à un tel niveau que la dose efficace totale (12) induite tout au long de la vie active ne puisse excéder une dose d’environ 1 sievert (Sv) induite de manière relativement uniforme selon une moyenne annuelle de 20 mSv. La CIPR soulignait néanmoins que l’application de son système de protection radiologique devrait être telle que ce chiffre ne serait que rarement approché. Elle recommandait une limite de dose efficace de 20 mSv par an selon une moyenne calculée sur des périodes de cinq ans (soit 100 mSv sur cinq ans), avec cette restriction que la dose efficace ne devrait pas dépasser 50 mSv au cours d’une année. Il était indiqué que, si en raison des circonstances, une dose cumulée approchant 1 Sv était atteinte, il faudrait alors envisager les possibilités de réduire toute exposition ultérieure. La valeur de 1 Sv n’est pas une limite et, de ce fait, ne constitue pas une démarcation à partir de laquelle une personne ne pourrait plus travailler sous radiations. Il en va ainsi que la dose cumulée résulte d’accumulations annuelles ou bien qu’elle résulte d’une exposition en situation d’urgence. La CIPR recommandait également de prévoir des limites de dose annuelles spécifiques, exprimées en doses équivalentes, pour le cristallin de l’œil (150 mSv par an) et pour la peau (500 mSv par centimètre carré par an) pour prévenir les effets déterministes.
Recommandations actuelles concernant les limites de dose
11. Les limites de dose contenues dans les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103) reflètent une continuité significative avec les recommandations de 1990, mais ont été calculées sur la base d’estimations réactualisées des risques. La CIPR reprend, dans ses recommandations de 2007 (publication 103), les limites de dose préconisées antérieurement dans la publication 60. Ces limites sont de 20 mSv par an en moyenne sur des périodes définies de cinq ans, avec une dose efficace maximale de 50 mSv au cours d’une seule et même année. Une valeur de dose équivalente, fixée à 500 mSv par an, est spécifiquement prévue pour la peau, les mains et les pieds. Dans sa publication 118, partie I (2012), la CIPR produit une déclaration en ce qui concerne les réactions tissulaires et, modifiant la recommandation concernant la limite de dose pour le cristallin de l’œil, elle fixe, pour cet organe, une dose équivalente de 20 mSv par an, dont la moyenne est calculée sur une période de cinq ans, sous réserve que l’exposition n’excède jamais 50 mSv par an. Cette nouvelle valeur annule et remplace la limite qui était fixée dans les recommandations de la CIPR de 1990 et de 2007 et représente le seul changement concernant la limite de dose établie dans les recommandations de 1990 et les recommandations actuelles. Ces limites de dose recommandées par la CIPR et adoptées dans les Normes de sûreté de 2014 sont destinées à servir aux gouvernements et aux autorités de réglementation aux fins de l’établissement des mesures de contrôle de l’exposition professionnelle (13).
Protection des travailleuses enceintes ou allaitantes
12. Dans ses recommandations de 2007 (publication 103), la CIPR énonce le principe selon lequel les méthodes de protection au travail des travailleuses enceintes devraient prévoir un niveau de protection pour l’embryon/le fœtus sensiblement comparable à ce qui est prévu pour la population (comme indiqué au paragraphe 14 ci-dessous, la limite annuelle de dose efficace pour la population est de 1 mSv). A cet égard, dès lors que l’employeur est informé de l’état de grossesse d’une travailleuse, des contrôles supplémentaires doivent être envisagés afin d’atteindre ce niveau de protection. Selon les Normes de sûreté de 2014, les conditions de travail d’une travailleuse enceinte, après déclaration de son état de grossesse, devraient être de nature à assurer que l’embryon/le fœtus bénéficie du même degré de protection que ce qui est prescrit pour la population. Afin d’assurer le même degré de protection pour les nourrissons, le même principe s’applique à l’égard des travailleuses qui allaitent.
Limites de dose pour les personnes de 16 à 18 ans
13. L’article 7, paragraphe 1, de la convention prévoit que des niveaux appropriés de protection doivent être fixés en ce qui concerne les travailleurs qui sont directement affectés à des travaux sous radiations et qui sont âgés de moins de 18 ans, tandis que l’article 7, paragraphe 2, prévoit qu’aucun travailleur âgé de moins de 16 ans ne doit être affecté à des travaux comportant la mise en œuvre de radiations ionisantes. Ces principes sont reflétés dans les Normes de sûreté de 2014. S’agissant de l’exposition professionnelle des apprentis de 16 à 18 ans dans le cadre de leur formation à un emploi impliquant une exposition à des radiations ou encore de l’exposition d’étudiants âgés de 16 à 18 ans utilisant des sources de rayonnement dans le cadre de leurs études, les limites de dose spécifiques sont fixées à un niveau inférieur à la dose établie dans le cadre d’une exposition professionnelle pour les travailleurs de 18 ans ou plus. L’annexe 3 des Normes de sûreté de 2014 prévoit que, dans le cadre d’une exposition professionnelle pour les apprentis de 16 à 18 ans dans le cadre de leur formation à un emploi impliquant une exposition à des radiations ainsi que pour les étudiants âgés de 16 à 18 ans utilisant des sources de rayonnement dans le cadre de leurs études, les limites de dose sont les suivantes: a) une dose efficace de 6 mSv par an; b) une dose équivalente pour le cristallin de l’œil de 20 mSv par an; c) une dose équivalente pour les extrémités (les mains et les pieds) ou pour la peau de 150 mSv par an. A cet égard, il convient de rappeler que, en référence aux articles 1, 3 d) et 4 de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, dans la mesure où les travaux entraînant une exposition aux radiations ionisantes ont été définis par la législation nationale ou l’autorité compétente comme constituant un type de travail qui est susceptible de nuire à la santé ou la sécurité de l’enfant par les Etats Membres qui ont ratifié cette convention, les personnes de moins de 18 ans ne doivent pas être affectées à de tels travaux.
Limites de dose pour les travailleurs non directement engagés à des travaux sous radiations
14. Aux termes de l’article 8 de la convention, «des niveaux appropriés doivent être fixés conformément aux dispositions de l’article 6 pour les travailleurs qui ne sont pas directement affectés à des travaux sous radiations, mais qui séjournent ou passent en des lieux où ils peuvent être exposés à des radiations ionisantes ou à des substances radioactives». Les Normes de sûreté de 2014 prescrivent à l’employeur ou au titulaire d’un enregistrement ou d’une licence (14) de veiller à ce que les travailleurs exposés à des radiations résultant de l’exercice d’une activité qui n’est ni requise par leur travail ni directement liée à celui-ci bénéficient du même degré de protection contre l’exposition que la population. La limite annuelle de dose efficace pour ces personnes reste fixée à 1 mSv dans les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103). Comme énoncé dans ces recommandations (15), dans des circonstances particulières, une valeur plus élevée de dose efficace pourrait être admise pour une année donnée, sous réserve que la moyenne sur cinq ans n’excède pas 1 mSv par an. Afin de prévenir les effets déterministes, des limites annuelles de dose équivalente ont été fixées spécifiquement pour le cristallin de l’œil (15 mSv par an) et pour la peau (50 mSv par an). L’optimisation de la protection devrait s’appliquer à l’exposition des personnes qui ne sont pas directement affectées à des travaux sous radiations de la même manière qu’elle s’applique à l’exposition des personnes directement affectées à ces travaux. Les contraintes de dose appropriées pour l’optimisation de la protection des travailleurs qui ne sont pas directement affectés à des travaux sous radiations devraient être inférieures à 1 mSv.
Principes généraux dans les situations d’urgence
15. La commission rappelle que, conformément à son article 2, la convention s’applique à toutes les activités entraînant l’exposition de travailleurs à des radiations ionisantes, y compris les travailleurs intervenant dans une situation d’urgence (16). Comme indiqué par la commission dans son observation de 1992, une exposition exceptionnelle de travailleurs ne se justifie ni aux fins de la préservation ou de la sauvegarde d’objets de grande valeur ni, d’une manière plus générale, par le fait que des techniques d’intervention alternatives n’impliquant pas une telle exposition des travailleurs entraîneraient des dépenses excessives. Par conséquent, il est essentiel que les activités qui impliquent des expositions potentielles importantes soient étudiées et qu’une réponse y soit apportée au stade de la procédure d’autorisation, que les ressources appropriées soient identifiées et que les plans d’urgence soient établis afin de réduire ou d’éliminer l’exposition des travailleurs.
16. Conformément au paragraphe 4.7 des Normes de sûreté de 2014, il est essentiel que la préparation et l’intervention dans les situations d’urgence soient planifiées à l’avance, sur la base de l’optimisation d’une stratégie de protection radiologique pouvant comporter une multiplicité d’actions spécifiques susceptibles de répondre à ce qu’exigent les circonstances.
Limitation de l’exposition professionnelle en situation d’urgence et de rétablissement d’une situation normale
En situation d’urgence
17. En situation d’urgence, toute action spécifique de protection (élaborée lors de la planification des mesures de préparation et d’intervention en cas d’urgence) peut être mise en œuvre indépendamment, et l’optimisation de l’ensemble de la stratégie doit tenir compte de toutes les hypothèses d’exposition possibles, afin de garantir que la dose résiduelle (17) est aussi faible que ce qui est raisonnablement praticable. La stratégie de protection optimisée doit être mise en œuvre dès lors que les critères génériques, fixés dans le cadre des stratégies de protection et compatibles avec les niveaux de référence, ont été dépassés, afin d’assurer une action rapide. De telles actions sont souvent nécessaires lorsque l’on ne dispose pas des informations radiologiques détaillées habituellement associées aux situations d’exposition planifiée, dans lesquelles la source est maîtrisée. Dans les situations d’urgence, les niveaux de référence retenus devraient être fixés à l’intérieur, ou si possible en deçà, de l’intervalle des 20 à 100 mSv (18) préconisés dans les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103).
18. Les expositions professionnelles en situation d’urgence et dans les situations d’exposition existante doivent être soumises aux arrangements d’ordre opérationnel et procédural existants, y compris en termes d’évaluation, de suivi, d’engagement et de formation. L’exposition individuelle doit être optimisée au moyen de limites appropriées des niveaux de référence. Selon les circonstances, ces niveaux de référence peuvent être plus élevés que les valeurs recommandées pour les limites de dose qui sont applicables dans les situations d’exposition planifiée. Pour les situations d’exposition d’urgence et d’exposition existante, les niveaux de référence correspondent aux niveaux de dose ou de risque au-delà desquels on estime inapproprié de prévoir d’autoriser l’exposition des personnes et pour lesquels, par conséquent, des actions de protection doivent être planifiées et optimisées. L’intention initiale serait de ne pas dépasser, ou de se maintenir, à ces niveaux.
19. Des niveaux d’exposition plus élevés en situation d’urgence peuvent être nécessaires et appropriés sur une courte durée, eu égard aux circonstances, sous réserve d’une optimisation de la protection. De tels niveaux d’exposition ne devraient pas se poursuivre sur des durées prolongées dans la mesure où la réduction de l’exposition serait réalisable dès lors que des informations supplémentaires deviennent disponibles et que certaines mesures de contrôle de la source et de la situation d’exposition sont instaurées. Les recommandations pertinentes de la CIPR ont été conçues pour prévenir les réactions tissulaires, et leur but est l’abaissement de toutes les doses à des niveaux qui soient aussi faibles que ce qui est raisonnablement praticable, compte tenu des facteurs économiques et sociétaux.
20. Dans des situations exceptionnelles, des travailleurs intervenant dans des situations d’urgence et dûment informés peuvent se porter volontaires pour intervenir alors qu’il existe une probabilité de recevoir des doses qui pourraient dépasser 50 mSv (limite annuelle de dose professionnelle pour les travailleurs). Les seules situations dans lesquelles cette hypothèse est applicable sont énumérées au paragraphe 21 ci-dessous.
21. Selon le paragraphe 4.17 des Normes de sûreté de 2014, les organismes de réponse (19) et les employeurs devraient assurer qu’aucun travailleur intervenant dans une situation d’urgence n’est soumis, lors d’une telle intervention, à une exposition dépassant 50 mSv, si ce n’est dans les cas suivants: a) afin de sauver des vies ou de prévenir des lésions graves; b) lorsqu’ils entreprennent des actions visant à prévenir des effets déterministes graves et à empêcher le développement de situations catastrophiques susceptibles d’avoir des effets considérables pour la population et l’environnement; ou c) lorsqu’ils entreprennent des actions visant à empêcher une exposition collective à une dose de radiations élevée.
22. Les organismes de réponse et les employeurs devraient assurer que les travailleurs intervenant en situation d’urgence qui entreprennent des actions au cours desquelles les doses reçues peuvent excéder 50 mSv agissent volontairement, qu’ils ont été préalablement informés, de manière claire et exhaustive, des risques encourus pour leur santé et des mesures de protection et de sûreté disponibles, et qu’ils ont été, dans la mesure du possible, formés pour les actions qu’il leur est demandé de prendre.
23. Dans les situations exceptionnelles visées au paragraphe 21 ci-dessus, les organismes de réponse et les employeurs devraient déployer tous les efforts raisonnables de manière à maintenir en deçà des valeurs de référence fixées à l’annexe IV des Normes de sûreté de 2014 (20) les doses auxquelles les travailleurs intervenant dans l’urgence sont exposés. En outre, les travailleurs intervenant dans les situations d’urgence, qui sont chargés d’entreprendre des actions par suite desquelles les doses auxquelles ils seront exposés peuvent approcher ou dépasser les valeurs fixées à l’annexe IV, ne doivent le faire que si les avantages qui en sont attendus pour autrui l’emportent manifestement sur les risques qu’ils encourent (21).
En période de rétablissement d’une situation normale
24. Les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103) prévoient que les travailleurs procédant à des opérations de rétablissement et de restauration, à un stade ultérieur dans le cadre d’une situation d’exposition d’urgence, devraient être considérés comme des travailleurs exposés professionnellement aux radiations et bénéficier à ce titre d’une protection conforme aux normes de protection radiologique établies, et que l’exposition à laquelle ils sont soumis ne devrait pas excéder les limites de dose professionnelle recommandées par la CIPR. Les travailleurs qui procèdent à des opérations telles que des réparations d’installations et de bâtiments, ou qui entreprennent des activités de gestion des déchets radioactifs ou des actions de remédiation afférentes à la décontamination d’un site et de ses environs, doivent être soumis aux prescriptions pertinentes relatives à l’exposition professionnelle dans les situations d’exposition planifiée, comme souligné dans la partie 3 des Normes de sûreté de 2014 (22).
Surveillance des lieux de travail
25. Aux termes de l’article 11 de la convention, un contrôle approprié des travailleurs et des lieux de travail doit être effectué afin de mesurer l’exposition des travailleurs aux radiations ionisantes et aux substances radioactives pour vérifier que les niveaux fixés sont respectés. A cet égard, le paragraphe 3.37 des Normes de sûreté de 2014 prévoit que l’organisme de réglementation devrait établir des prescriptions quant à la surveillance et aux mesures auxquelles il y aura lieu de procéder pour vérifier le respect des règles de protection et de sûreté. L’organisme de réglementation devrait être responsable de l’examen et de l’approbation des programmes de surveillance et de mesure des titulaires d’enregistrements et de licences. En outre, le paragraphe 3.96 des Normes de sûreté de 2014 prévoit que les titulaires d’enregistrements ou de licences, en coopération avec les employeurs, le cas échéant, devraient élaborer, maintenir et réexaminer périodiquement un programme de surveillance des lieux de travail sous la supervision d’un responsable de la protection radiologique ou d’un expert qualifié. Conformément au paragraphe 3.97, la nature et la fréquence des contrôles des lieux de travail devraient être telles qu’elles permettent: i) une évaluation des conditions radiologiques sur tous les lieux de travail; ii) une évaluation des expositions dans les zones contrôlées et les zones surveillées; et iii) le réexamen périodique de la classification des zones contrôlées et des zones surveillées. Ce contrôle devrait être basé sur le débit de dose, la concentration de l’activité ambiante et la contamination de surface, y compris leurs fluctuations prévisibles, ainsi que sur la probabilité et l’ampleur des expositions dans le cadre d’incidents de fonctionnement anticipés et en cas d’accident.
Surveillance de la santé des travailleurs
26. Aux termes de l’article 12 de la convention, «Tous les travailleurs directement affectés à des travaux sous radiations doivent subir un examen médical approprié avant ou peu de temps après l’affectation à de tels travaux et subir ultérieurement des examens médicaux à intervalles appropriés.» L’article 13 prévoit que seront déterminés les cas où, en raison de la nature ou du degré de l’exposition, ou une combinaison des deux, les mesures ci-après doivent être prises rapidement: a) le travailleur doit subir un examen médical approprié; b) l’employeur doit aviser l’autorité compétente conformément aux directives données par cette dernière; c) des personnes compétentes en matière de protection contre les radiations doivent étudier les conditions dans lesquelles le travailleur effectue le travail; d) l’employeur doit prendre toutes dispositions correctives nécessaires sur la base des constatations techniques et des avis médicaux. A cet égard, le paragraphe 3.76 f) des Normes de sûreté de 2014 prévoit que les employeurs et les titulaires d’enregistrements ou de licences devraient veiller à ce que les mesures nécessaires de surveillance de la santé des travailleurs et les services sanitaires soient prévus pour tous les travailleurs engagés dans des activités au cours desquelles ils sont ou peuvent être l’objet d’une exposition professionnelle aux radiations. Selon le paragraphe 3.108 des Normes de sûreté de 2014, ces programmes de surveillance de la santé des travailleurs devraient reposer sur les principes généraux de la santé au travail et devraient être conçus pour évaluer l’aptitude physique initiale des travailleurs, et le maintien de cette aptitude, au regard des tâches auxquelles ils doivent être affectés.
Cessation d’une affectation à un emploi impliquant une exposition à des radiations ionisantes suite à un avis médical et offre d’un autre emploi
27. Aux termes de l’article 14 de la convention, «aucun travailleur ne doit être affecté ou continuer à être affecté à un travail susceptible de l’exposer à des radiations ionisantes contrairement à un avis médical autorisé». L’élément essentiel ici réside dans l’avis médical autorisé sur la base duquel toute décision en la matière doit être prise.
28. Conformément au paragraphe 27 de la recommandation no 114, si, à la suite d’un avis médical donné dans le cadre de l’article 14 de la convention, il apparaît inopportun de continuer à exposer un travailleur à des radiations ionisantes du fait de son emploi normal, tous les moyens raisonnables devraient être mis en œuvre pour muter ce travailleur à un autre emploi convenable. A cet égard, le paragraphe 3.112 des Normes de sûreté de 2014 prévoit que les employeurs devraient déployer tous les efforts raisonnables pour offrir aux travailleurs un autre emploi convenable lorsqu’il aura été établi, soit par l’organisme de réglementation, soit dans le cadre du programme de surveillance de la santé des travailleurs conformément aux dispositions desdites Normes, que les travailleurs ne peuvent plus, pour des raisons de santé, continuer à exercer un emploi où ils sont ou pourraient être soumis à une exposition professionnelle. Par ailleurs, il convient de noter que certains des instruments relatifs à la sécurité et santé au travail plus récents (la convention (nº 148) sur le milieu de travail (pollution de l’air, bruit et vibrations), 1977, et la convention (nº 162) sur l’amiante, 1986) indiquent que, lorsqu’une affectation aux activités couvertes par ces instruments est déconseillée pour des raisons médicales, tous les efforts doivent être faits, d’une manière compatible avec la pratique et les conditions nationales, pour fournir au travailleur intéressé d’autres moyens de conserver son revenu.
Relevés des doses individuelles
29. Le paragraphe 26 de la recommandation no 114 prévoit que, dans la mesure où cela est possible, un relevé complet de toutes les doses reçues au cours de son travail par tout travailleur devrait être tenu, afin que les doses cumulées puissent être évaluées en relation avec l’emploi de l’intéressé. Le paragraphe 3.83 d) des Normes de sûreté de 2014 souligne que les travailleurs devraient fournir à l’employeur ou au titulaire d’un enregistrement ou d’une licence les informations sur leur emploi antérieur et leur emploi actuel qui sont pertinentes pour assurer une protection efficace et complète et des conditions de sécurité pour eux-mêmes comme pour autrui.
Partie II – Conclusions
30. Rappelant que, en application de l’article 3, paragraphe 1, de la convention, toutes les mesures appropriées devront être prises, à la lumière de l’évolution des connaissances, pour assurer une protection efficace des travailleurs contre les radiations ionisantes, du point de vue de leur santé et de leur sécurité, et en vertu de l’article 6, paragraphe 2, les doses et quantités maximales admissibles devront être constamment revues à la lumière des connaissances nouvelles, la commission invite les gouvernements à examiner leur système de protection des travailleurs contre les radiations ionisantes à la lumière des conclusions de la CIPR, reflétées dans ses recommandations de 2007 (publication 103), et des Normes de sûreté de 2014, et qui sont résumées aux paragraphes 2 à 29 du présent document. En particulier, la commission veut croire que les lois, règlements, directives, recueils de directives pratiques ou autres instruments applicables dans ce domaine seront réexaminés de manière à assurer, en droit et dans la pratique, la protection efficace des travailleurs en ce qui concerne leur santé et leur sécurité. La commission prie les gouvernements d’indiquer, dans leurs futurs rapports, les mesures qu’ils auront éventuellement prises ou qui seraient à l’étude dans les domaines suivants.
Système de protection radiologique (voir paragraphes 4 à 8 ci-dessus)
31. Afin de donner effet à l’article 3 de la convention, la commission considère que les gouvernements devraient assurer la mise en place et le maintien d’un système de protection radiologique inspiré par les principes de sûreté et, en particulier, par les trois principes généraux de la protection radiologique: la justification des expositions; l’optimisation de la protection radiologique; et l’application de limites de dose d’exposition.
Recommandations en vigueur concernant les limites de dose (voir paragraphes 9 et 11 ci-dessus)
32. La commission considère que, lorsqu’ils fixent les doses maximales admissibles de radiations ionisantes, conformément à l’article 6 de la convention, les gouvernements devraient tenir compte du fait que les limites de dose recommandées pour une exposition professionnelle sont les suivantes:
- 20 mSv par an en moyenne sur des périodes définies de cinq ans, avec un maximum de 50 mSv de dose efficace au cours d’une année;
- une dose équivalente de 500 mSv par an pour la peau, les mains et les pieds;
- une dose équivalente pour le cristallin de l’œil de 20 mSv par an en moyenne sur une période définie de cinq ans, sans que la valeur de 50 mSv ne puisse être dépassée au cours d’une année.
Protection des travailleuses enceintes ou allaitantes (voir paragraphe 12 ci-dessus)
33. La commission considère que les méthodes de protection au travail concernant les femmes enceintes devraient prévoir un niveau de protection de l’embryon/du fœtus sensiblement similaire à ce qui est prévu d’une manière générale pour la population (la limite annuelle de dose efficace pour la population est de 1 mSv). Pour assurer le même degré de protection pour les enfants nourris au sein, le même principe devrait s’appliquer à l’égard des travailleuses allaitantes.
Limites de dose pour les personnes de 16 à 18 ans (voir paragraphe 13 ci-dessus)
34. Afin de donner effet à l’article 7, paragraphe 1 b), de la convention, la commission considère que, s’agissant de l’exposition professionnelle des apprentis de 16 à 18 ans dans le cadre de leur formation à un emploi impliquant une exposition à des radiations ou s’agissant de l’exposition des étudiants âgés de 16 à 18 ans utilisant des sources de rayonnement dans le cadre de leurs études, les limites de dose sont les suivantes: a) une dose efficace de 6 mSv par an; b) une dose équivalente pour le cristallin de l’œil de 20 mSv par an; et c) une dose équivalente pour les extrémités (mains et pieds) ou la peau de 150 mSv par an. La commission rappelle que, en vertu de l’article 7, paragraphe 2, de la convention, aucun travailleur âgé de moins de 16 ans ne doit être affecté à des travaux comportant la mise en œuvre de radiations ionisantes. La commission rappelle également que, en référence aux articles 1, 3 d) et 4 de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, dans la mesure où les travaux entraînant une exposition professionnelle aux radiations ionisantes ont été définis par la législation nationale ou l’autorité compétente comme constituant un type de travail dangereux par les Etats Membres qui ont ratifié cette convention, les personnes de moins de 18 ans ne doivent pas être affectées à de tels travaux.
Limites de dose pour les travailleurs qui ne sont pas directement affectés à des travaux sous radiations (voir paragraphe 14 ci-dessus)
35. Afin de donner effet à l’article 8 de la convention, la commission considère que les limites de dose d’exposition des travailleurs qui ne sont pas directement affectés à des travaux sous radiations sont celles qui s’appliquent à l’égard de la population, notamment la limite annuelle de dose efficace de 1 mSv. Une dose efficace d’une valeur plus élevée peut être admise au cours d’une seule et même année, à condition que la moyenne sur cinq ans n’excède pas 1 mSv par an. Afin de prévenir les effets déterministes, des limites annuelles de dose équivalente doivent être fixées spécifiquement en ce qui concerne le cristallin de l’œil (15 mSv par an) et la peau (50 mSv par an). L’optimisation de la protection devrait s’appliquer à l’exposition des personnes qui ne sont pas directement affectées à des travaux sous radiations.
Limitation de l’exposition professionnelle en situation d’urgence (voir paragraphes 15 à 24 ci-dessus)
36. La commission considère essentiel que les activités auxquelles sont associées des expositions potentielles importantes soient examinées et traitées dans le cadre du processus d’autorisation et que les ressources appropriées soient identifiées et les plans de préparation et de réponse aux situations d’urgence soient établis, afin de réduire ou d’éviter l’exposition des travailleurs. La planification par anticipation des situations d’urgence devrait se baser sur l’optimisation d’une stratégie de protection, qui devrait être mise en œuvre de manière à fournir une action rapide dès lors que les critères génériques, établis dans le cadre des stratégies de protection et compatibles avec les niveaux de référence, sont dépassés. De telles actions sont souvent nécessaires en l’absence des informations radiologiques détaillées qui accompagnent habituellement les situations d’exposition planifiée dans lesquelles la source est maîtrisée. Les expositions professionnelles dans des situations d’urgence devraient être soumises aux dispositions opérationnelles et procédurales existantes, notamment en ce qui concerne l’évaluation, le suivi, l’engagement et la formation. L’exposition individuelle devrait être optimisée par des limites appropriées des niveaux de référence.
37. Dans les situations d’urgence, les niveaux de référence retenus devraient se situer dans l’intervalle des 20 à 100 mSv ou, si possible, en deçà. Des dispositions doivent être prises pour assurer qu’aucun travailleur intervenant en situation d’urgence n’est soumis à une exposition dépassant 50 mSv. Dans des situations exceptionnelles, des travailleurs intervenant dans des situations d’urgence et dûment informés peuvent se porter volontaires pour s’exposer à une dose plus élevée dans les cas suivants: a) afin de sauver d’autres vies ou d’éviter des lésions graves; b) lorsqu’ils entreprennent des actions visant à prévenir des effets déterministes graves et à empêcher le développement de situations catastrophiques pouvant affecter gravement la population et l’environnement; ou c) lorsqu’ils entreprennent des actions destinées à empêcher une exposition collective à une dose élevée de radiations. Dans ces situations exceptionnelles, les mesures existantes de protection et de sûreté ainsi que tous les efforts raisonnables doivent être mis en œuvre afin de maintenir les doses auxquelles ces travailleurs sont exposés en deçà des valeurs de référence énoncées dans les Normes de sûreté de 2014.
Surveillance des lieux de travail (voir paragraphe 25 ci-dessus)
38. Afin de donner effet à l’article 11 de la convention, la commission considère que les gouvernements devraient instaurer des prescriptions visant à assurer la surveillance et à procéder au relevé de mesures afin de vérifier le respect des dispositions relatives à la protection et à la sûreté.
Surveillance de la santé des travailleurs (voir paragraphe 26 ci-dessus)
39. Afin de donner effet aux articles 12 et 13 de la convention, la commission considère que des mesures devraient être prises pour garantir que la surveillance de la santé des travailleurs et les services de santé nécessaires à cette fin sont prévus. Ces programmes de surveillance de la santé des travailleurs devraient reposer sur les principes généraux de la santé au travail et devraient être conçus pour évaluer l’aptitude physique initiale des travailleurs, et le maintien de cette aptitude, au regard des tâches auxquelles ils doivent être affectés.
Cessation d’une affectation à un emploi impliquant une exposition à des radiations ionisantes suite à un avis médical et offre d’un autre emploi (voir paragraphes 27 et 28 ci-dessus)
40. Afin de donner effet à l’article 14 de la convention, la commission considère que, compte tenu des orientations données au paragraphe 27 de la recommandation no 114, les employeurs devraient déployer tous les moyens raisonnables pour muter les travailleurs à un autre emploi convenable lorsqu’il aura été établi, à la suite d’un avis médical, que les travailleurs ne peuvent plus, pour des raisons de santé, continuer à exercer un emploi où ils sont ou pourraient être soumis à une exposition professionnelle.
Relevés des doses individuelles (voir paragraphe 29 ci-dessus)
41. En vue d’assurer une protection efficace et complète des travailleurs, la commission considère que, dans la mesure où cela est possible, il devrait être tenu un relevé complet de toutes les doses reçues au cours de son travail par tout travailleur, afin que les doses cumulées puissent être évaluées en relation avec l’emploi de l’intéressé, comme le prévoit le paragraphe 26 de la recommandation no 114. A cet égard, des efforts devraient être déployés afin de prévenir toute situation dans laquelle un travailleur pourrait croire qu’il doit dissimuler ses données dosimétriques ou prendre d’autres mesures en vue de préserver sa situation d’emploi.

Note

  1. 1 - Les Normes de sûreté de 2014 ont été publiées conjointement par la Commission européenne, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’Organisation internationale du Travail, l’Agence de l’OCDE pour l’énergie nucléaire, l’Organisation panaméricaine de la santé, le Programme des Nations Unies pour l’environnement et l’Organisation mondiale de la santé. NDT: L’édition 2014 des Normes de sûreté n’était pas encore parue en français au moment de l’établissement du présent document. Les mentions qui en sont faites ici n’en sont donc qu’une traduction libre. Les numéros de page indiqués font référence à la version anglaise du texte.
  2. 2 - Selon les Normes de sûreté de 2014, un système de protection radiologique est fondé sur dix principes de sûreté: la responsabilité en matière de sûreté; le rôle du gouvernement; la justification des expositions; l’optimisation de la protection; la limitation des risques pour les personnes; la protection des générations actuelles et futures; la prévention des accidents; la préparation aux situations d’urgence; la réaction en cas d’urgence; les mesures de protection propres à réduire les risques radiologiques.
  3. 3 - Art. 5.6 des recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103) et p. 4 des Normes de sûreté de 2014.
  4. 4 - Dans ses recommandations de 2007 (publication 103), la CIPR définit trois situations d’exposition: l’exposition existante, l’exposition planifiée et l’exposition en situation d’urgence. Dans chacune de ces situations, la protection doit être optimisée au moyen de limites (ou restrictions) de l’exposition individuelle revêtant la forme de contraintes ou de niveaux de référence de nature à assurer des niveaux de protection appropriés dans des conditions données.
  5. 5 - La contrainte de dose est une valeur de dose individuelle prospective et liée à la source. Elle est utilisée dans les situations d’exposition planifiée en tant que paramètre de l’optimisation de la protection et de la sûreté concernant la source et qui sert de borne supérieure pour la définition de la gamme des options aux fins de l’optimisation.
  6. 6 - La limite de dose est la valeur de dose efficace ou de la dose équivalente qui ne doit pas être dépassée pour les personnes dans les situations d’exposition planifiée.
  7. 7 - Le niveau de référence est le niveau de concentration de dose, de risque ou d’activité au-delà duquel il n’est pas approprié de prévoir d’autoriser l’exposition et en deçà duquel l’optimisation de la protection et de la sûreté devrait continuer de s’appliquer. On l’utilise dans le contexte de l’exposition en situation d’urgence ou en situation existante.
  8. 8 - Dans les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103) et dans les Normes de sûreté de 2014, la notion de limites maximales admissibles est exprimée en termes de limite de dose et de niveau de référence.
  9. 9 - L’effet stochastique se réfère à l’effet sur la santé induit par les rayonnements, dont la probabilité d’occurrence est supérieure pour une dose de rayonnement plus élevée et dont la gravité (s’ils se produisent) est indépendante de la dose (p. 424 des Normes de sûreté de 2014).
  10. 10 - Sont qualifiés d’effets déterministes les effets sur la santé induits par les rayonnements pour lesquels il existe en général un niveau seuil de dose au-delà duquel la gravité de l’effet s’accroît avec la valeur de la dose (p. 387 des Normes de sûreté de 2014).
  11. 11 - L’incorporation se réfère à l’action ou processus d’incorporation de radionucléides par le corps humain par inhalation, ingestion ou à travers la peau.
  12. 12 - La dose efficace se définit comme étant une somme de doses équivalentes pour les tissus ou organes, multipliées chacune par le facteur de pondération approprié au tissu ou organe considéré.
  13. 13 - Prescription no 12 des Normes de sûreté de 2014, p. 37.
  14. 14 - Le titulaire d’un enregistrement désigne le détenteur d’un enregistrement actuel qui est une forme d’autorisation d’activités présentant des niveaux de risque faibles ou modérés et pour lesquelles la personne ou l’organisme responsable a préparé et soumis, selon ce qui convient, une évaluation de sûreté des installations et des équipements de sécurité. L’activité ou l’utilisation est autorisée sous les conditions ou avec les limitations appropriées. Le titulaire d’une licence désigne le titulaire d’une licence valide, plus spécifiquement un document légal, l’autorisant à accomplir certaines activités en lien avec une installation ou des activités.
  15. 15 - Tableau 6, note de bas de page f) des recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103).
  16. 16 - Un travailleur intervenant dans une situation d’urgence est une personne ayant des attributions spécifiques en tant que travailleur dans le cadre d’une réponse à une situation d’urgence (p. 391 des Normes de sûreté de 2014).
  17. 17 - La dose résiduelle correspond à la dose que l’on peut s’attendre à recevoir après que les actions de protection ont cessé (ou après la décision de ne pas prendre de telles actions de protection).
  18. 18 - Les recommandations de la CIPR de 2007 (publication 103) retiennent trois intervalles de valeurs aux fins de la sélection des niveaux de référence: 1) la contrainte de dose ou niveau de référence d’un maximum de 1 mSv environ, qui concerne les personnes exposées à des rayonnements d’une source dont l’intérêt pour eux n’est que minime ou inexistant mais qui peut bénéficier à la société en général; 2) les niveaux de référence de 20 à 100 mSv seraient utilisés dans le cas des personnes exposées à un rayonnement dont les sources ne sont pas maîtrisées ou pour lequel des actions visant la réduction des doses entraîneraient des perturbations disproportionnées; 3) une dose supérieure à 100 mSv reçue sur une courte période ou au cours d’une année serait considérée comme inacceptable, sauf dans des circonstances se rapportant à l’exposition de travailleurs dans une situation d’urgence, dont les circonstances sont spécifiquement prévues.
  19. 19 - Un organisme de réponse est un organisme désigné ou reconnu à un autre titre par l’Etat comme étant responsable de la gestion ou de la mise en œuvre de tout aspect d’une réponse d’urgence.
  20. 20 - Tableau IV.2 de l’annexe IV des Normes de sûreté de 2014 (p. 373).
  21. 21 - Tableau IV.2 de l’annexe IV de l’édition 2014 des Normes de sûreté de 2014 (p. 373).
  22. 22 - Partie 3 de l’édition 2014 des Normes de sûreté de 2014 (pp. 29 à 86), relative aux situations d’exposition planifiée.
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