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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2018, Publication : 107ème session CIT (2018)

Convention (n° 138) sur l'âge minimum, 1973 - Bolivie (Etat plurinational de) (Ratification: 1997)

Autre commentaire sur C138

Cas individuel
  1. 2018
  2. 2015

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 2018-BOL-C138-Fr

Un représentant gouvernemental, ministre du Travail, de l’Emploi et de la Prévision sociale, a indiqué que l’Etat plurinational de Bolivie se présente devant la commission au motif qu’en 2014 un nouveau Code de l’enfance et de l’adolescence a été adopté, dans une optique beaucoup plus protectrice et intégrale de l’enfance et de l’adolescence. Compte ayant été tenu de la demande expresse de divers secteurs de la société, il reconnaît exceptionnellement le travail indépendant d’enfants afin de mieux les protéger et reconnaît aussi l’existence d’une réalité qui, globalement, est dissimulée. L’article 129 du Code de l’enfance et de l’adolescence fixe à 14 ans l’âge minimum d’admission à l’emploi. A titre exceptionnel, les services de défense des enfants et des adolescents peuvent autoriser le travail pour leur propre compte d’enfants et d’adolescents âgés de 10 à 14 ans, ainsi que le travail pour le compte d’un tiers d’adolescents âgés de 12 à 14 ans, à condition que ce travail ne menace pas le droit à l’éducation, la dignité ou le développement général de l’enfant, qu’il ne soit pas dangereux et insalubre ou qu’il ne soit pas expressément interdit par la loi. Cette disposition a fait l’objet d’observations de la commission d’experts en 2015 et 2017. Cela a abouti à la discussion devant la commission. Dans le cadre de l’indépendance des pouvoirs, le 21 juillet 2017 le Tribunal constitutionnel plurinational, par sa décision 0025/2017, a déclaré inconstitutionnels l’article 129.II du code et d’autres articles connexes (articles 130.III; 131.I, III et IV; 133.III et IV; et 138.I du code). Par conséquent, la mention faite à l’âge exceptionnel d’admission à l’emploi (10 ans) n’a plus d’effet. La décision susmentionnée est contraignante, a force obligatoire et a un effet abrogatoire (conformément à l’article 203 de la Constitution politique de l’Etat et à l’article 78.4 du Code de procédure constitutionnelle). Au vu de ces éléments, sans aucun doute les dispositions auxquelles la commission d’experts se réfère ont été expressément abrogées, et l’âge minimum d’admission à l’emploi (14 ans) fixé à l’article 129.I du code est en vigueur, sans autres exceptions que celles prévues dans la convention. Il convient de souligner que, dans sa décision, le Tribunal constitutionnel se réfère expressément à la convention en tant qu’élément d’appréciation de la constitutionnalité de ces dispositions et considère que l’Etat plurinational de Bolivie respecte ses engagements internationaux. Afin d’éliminer le travail des enfants dans le pays de manière effective, outre ce cadre normatif, des mesures institutionnelles élaborées par les directeurs et les inspecteurs du travail sont mises en œuvre sur la base de trois stratégies: i) la Stratégie de prévention, en développant des capacités pour veiller à l’application des droits fondamentaux, qui est orientée sur les enfants et les adolescents de centres éducatifs, sur les parents, les enseignants, les travailleurs et les employeurs; ii) la Stratégie de contrôle, dans le cadre de laquelle sont effectuées des inspections du travail et des inspections intégrales, d’office ou à la demande d’une partie, là où des enfants et des adolescents travaillent; iii) la Stratégie d’action directe visant à protéger l’intégrité des enfants et des adolescents en situation de travail: dans le cadre de cette stratégie, des auditions sont réalisées dans le but de rétablir les droits fondamentaux et au travail des enfants et des adolescents. De plus, le travail des adolescents est régi par la résolution ministérielle 442/04, qui régit les droits et obligations des adolescents qui travaillent (entre 14 et 18 ans), et établit les garanties au travail et de protection de leur santé, la sécurité industrielle, les droits concernant l’alimentation, les loisirs et la formation et prévoit des sanctions en cas d’infractions aux normes de protection des normes de protection des adolescents qui travaillent.

Le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Prévision sociale, par le biais de l’Unité chargée des droits fondamentaux, a commencé à mettre en place un système de bureaux mobiles temporaires dans des zones reculées où il n’y a pas de bureaux permanents du ministère, le principal objectif étant de restituer les droits des travailleurs. Dans ce cadre, des plaintes sont reçues, des inspections effectuées, des auditions organisées, des informations fournies et des activités de formation menées pour veiller à l’application des droits fondamentaux au travail des adolescents, des jeunes, de leurs parents et de la population en général. En 2016 et 2017, 26 bureaux mobiles temporaires ont été mis en place dans des municipalités rurales de l’Oriente et du Chaco bolivien. De plus, dans le cadre de l’Agenda patriotique 2025, du Plan de développement économique et social (PDES) et du Système de planification intégrale de l’Etat, le gouvernement a défini les grandes orientations pour le développement intégral du pays dans la perspective du «bien vivre». L’un des objectifs du PDES est d’éliminer les causes du travail des enfants et l’exploitation au travail. Pour faire reculer le travail des enfants d’ici à 2025, le gouvernement s’est proposé de progresser vers au moins huit cibles (éradication de l’extrême pauvreté; socialisation et universalisation des services; santé, éducation et sport; souveraineté productive et diversifiée; et souveraineté alimentaire). Le travail des enfants est la conséquence des politiques économiques et sociales qui ont prévalu en Bolivie jusqu’en 2005 et qui découlaient d’un héritage colonial discriminatoire, de dictatures violentes et de politiques néolibérales dans lesquelles la défense des intérêts des oligarchies primaient les intérêts du peuple. Ces modèles ont débouché sur des niveaux élevés d’inégalité et d’extrême pauvreté, laquelle touchait jusqu’en 2005 près de 40 pour cent de la population et plus de 60 pour cent de la population des zones rurales. Jusqu’à 2004, les niveaux d’accès à l’éducation, au logement, à des services de base et à des emplois dignes étaient très bas. Depuis 2005, le gouvernement, sous la conduite du Président Evo Morales Ayma, a mené à bien un modèle de développement inclusif qui vise à éliminer les inégalités historiques et la pauvreté et à éradiquer les causes fondamentales du travail des enfants. A cette fin, on a promu un modèle de développement intégral, social, communautaire et productif dans lequel existent simultanément et se complètent les rôles des sphères publique, privée, communautaire et sociale afin de réduire la pauvreté et de promouvoir le bien-être et le bien vivre. Grâce à ce modèle, le travail des enfants a diminué de plus de 50 pour cent entre 2008 et 2016 selon l’Enquête sur l’enfance et l’adolescence de l’Institut national de statistique. De plus, le nombre d’inspections du travail a augmenté de manière exponentielle, et l’on a mené des politiques comme celle des bureaux mobiles pour prévenir le travail des enfants et rétablir leurs droits, en coordination avec les organes judiciaires correspondants. En outre, depuis 2005, ce modèle économique inclusif qui met l’économie au service du développement social a eu les résultats suivants: 1) le taux d’extrême pauvreté est passé de 38,2 pour cent en 2005 à 17,9 pour cent en 2017; 2) l’inégalité a baissé aussi, de manière exponentielle (en 2005, le revenu du segment le plus riche de la population était 128 fois plus élevé que celui du segment le plus pauvre); 3) le coefficient de Gini qui, en 2005, atteignait 0,60 pour cent, était de 0,48 pour cent en 2014; 4) le taux de chômage (4,48 pour cent) est l’un des plus bas de la région; 5) le salaire minimum a été accru de plus de 300 pour cent entre 2005 et 2018. Le niveau des salaires et les politiques d’investissement productif, qui ont permis d’accroître la demande intérieure, ont également été très bénéfiques pour le secteur privé, dont les gains ont quadruplé depuis 2005. Toutes ces avancées se sont traduites par une amélioration des conditions économiques et de vie des parents et des enfants; 6) aussi, plus de 4 000 unités éducatives ont été construites. L’Etat plurinational de Bolivie fait partie des pays de la région où les niveaux de scolarisation dans le primaire sont les plus élevés. Divers programmes sont mis en œuvre à l’échelle nationale et locale, par exemple l’allocation «Juancito Pinto» et l’allocation «Madre-Niño-Niña Juana Azurduy Padilla», qui relèvent de la responsabilité du gouvernement central, ainsi que des programmes sociaux au moyen d’initiatives locales, comme des programmes de petits déjeuners à l’école et des programmes locaux de mesures d’incitation pécuniaire et/ou en nature menés dans différentes instances et à différents niveaux de l’Etat pour répondre aux besoins en matière de travail, d’éducation, de santé et d’environnement, dans le cadre du Système plurinational de protection intégrale de l’enfance et de l’adolescence (SIPPROINA). Avec tous ces investissements publics, depuis 2005, on a pu ramener de 4,5 à 2 pour cent le taux d’abandon scolaire dans le primaire et faire en sorte que plus de 41 000 enfants n’abandonnent pas l’école, et que le nombre de jeunes ayant terminé le secondaire s’accroît de plus de 40 000, en parvenant aussi à l’équilibre entre garçons et filles. Par ailleurs, la qualité de l’éducation s’est améliorée substantiellement. Le nombre d’enseignants permanents a augmenté de plus de 15 pour cent (en formant plus de 15 000 enseignants stagiaires), et un modèle d’éducation inclusive a été mis en application, qui a été reconnu et salué par différentes entités internationales. De plus, la population bénéficie d’un meilleur accès à la santé. Plus de 1 000 établissements de santé ont été créés (on en comptait seulement 2 800 en 2005), et ces infrastructures ont été complétées par des équipements professionnels neufs. Tous ces progrès ont eu une influence très positive sur la santé infantile. Entre 2008 et 2016, on a réduit de près de moitié la malnutrition chronique des enfants de moins de 5 ans, ce que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a considéré comme une réduction accélérée. De même, ces huit dernières années, la mortalité des enfants âgés de moins de 1 an a diminué de plus de moitié, grâce à l’amélioration des soins prénatals et d’accouchement. Tout cela est le résultat d’un investissement public et social qui a augmenté neuf fois par rapport à 2005 et qui fait de l’Etat plurinational de Bolivie le pays dont le taux d’investissement public est le plus élevé de la région (12 pour cent du PIB). Enfin, l’orateur a souligné que, grâce à ce modèle économique inclusif, entre 2015 et 2017 la classe moyenne a augmenté de plus de 3 millions de personnes, et 58 pour cent de la population a des revenus moyens qui lui permettent de «bien vivre».

Les membres travailleurs ont rappelé que c’est la deuxième fois en quelques années que la commission discute ce cas. Chaque fois, il a fait l’objet d’une double note de bas de page, la commission d’experts ayant pris note avec préoccupation et de manière répétée de la situation du travail des enfants dans le pays. Dans ses conclusions de 2015, la commission avait appelé le gouvernement à entreprendre une réforme de la législation en concertation avec les partenaires sociaux en vue de relever l’âge minimum d’admission à l’emploi, et à allouer à l’inspection du travail davantage de moyens humains et techniques. La commission avait également invité le gouvernement à solliciter l’assistance technique du BIT. Entre-temps, le Tribunal constitutionnel a déclaré inconstitutionnel l’article 129 du Code de l’enfance et de l’adolescence qui autorise, dans des circonstances exceptionnelles, à travailler à titre indépendant à partir de l’âge de 10 ans et, dans une relation d’emploi, à partir de 12 ans. Siégeant toutes chambres réunies, le Tribunal constitutionnel a prononcé l’inconstitutionnalité de cette disposition au motif qu’elle est «incompatible et en contradiction» avec la Constitution politique de l’Etat, la Convention relative aux droits de l’enfant et la convention no 138. Les membres travailleurs félicitent le Tribunal constitutionnel pour cette décision basée sur les obligations légales internationales de la Bolivie. Le gouvernement doit maintenant prendre sans retard des mesures afin d’aligner sa législation sur la convention. Bien que la convention autorise les Etats qui l’ont ratifiée et dont l’économie et les institutions scolaires ne sont pas suffisamment développées à invoquer la clause de souplesse de l’article 2, paragraphe 4, pour spécifier un âge minimum de 14 ans, cet instrument ne les autorise en aucune manière à descendre sous ce seuil. En fait, il était attendu des pays ayant ratifié la convention qu’ils relèvent progressivement l’âge minimum général à 16 ans et éradiquent le travail des enfants. La convention dispose que l’âge minimum spécifié ne doit pas être inférieur à l’âge auquel cesse la scolarité obligatoire. La fréquentation régulière d’une école ou la participation à des programmes approuvés d’orientation ou de formation professionnelles devraient être exigées et garanties dans les faits jusqu’à un âge égal au moins à celui spécifié pour l’admission à l’emploi. Le fait de priver les enfants de possibilités d’éducation et de formation les condamne à ne jamais pouvoir acquérir de qualifications et perpétue ainsi la pauvreté d’une société. Il est à porter au crédit du gouvernement bolivien d’avoir, ces dernières années, rendu l’enseignement obligatoire jusqu’à la fin du cycle secondaire. En règle générale, l’enfant est ainsi obligé de suivre douze années de scolarité ce qui, par conséquent, porte à 16 ans minimum l’âge de fin de la scolarité obligatoire. Autoriser les enfants à travailler à partir de 10 ans aurait inévitablement des répercussions sur la scolarité obligatoire. De ce fait, le Code de l’enfance et de l’adolescence contredit la législation nationale sur l’enseignement et viole clairement la convention. Les membres travailleurs se disent préoccupés par le nombre élevé d’enfants employés dans l’économie informelle. Quoiqu’il faille reconnaître les résultats des mesures prises par le gouvernement pour réduire la part de l’économie informelle, elle emploie encore trop d’enfants sans protection. Dans les pires cas, ils se retrouvent dans des situations de mendicité forcée, de servitude pour dettes, de services domestiques et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales.

Les membres travailleurs ont rappelé que c’est la deuxième fois en quelques années que la commission discute ce cas. Chaque fois, il a fait l’objet d’une double note de bas de page, la commission d’experts ayant pris note avec préoccupation et de manière répétée de la situation du travail des enfants dans le pays. Dans ses conclusions de 2015, la commission avait appelé le gouvernement à entreprendre une réforme de la législation en concertation avec les partenaires sociaux en vue de relever l’âge minimum d’admission à l’emploi, et à allouer à l’inspection du travail davantage de moyens humains et techniques. La commission avait également invité le gouvernement à solliciter l’assistance technique du BIT. Entre-temps, le Tribunal constitutionnel a déclaré inconstitutionnel l’article 129 du Code de l’enfance et de l’adolescence qui autorise, dans des circonstances exceptionnelles, à travailler à titre indépendant à partir de l’âge de 10 ans et, dans une relation d’emploi, à partir de 12 ans. Siégeant toutes chambres réunies, le Tribunal constitutionnel a prononcé l’inconstitutionnalité de cette disposition au motif qu’elle est «incompatible et en contradiction» avec la Constitution politique de l’Etat, la Convention relative aux droits de l’enfant et la convention no 138. Les membres travailleurs félicitent le Tribunal constitutionnel pour cette décision basée sur les obligations légales internationales de la Bolivie. Le gouvernement doit maintenant prendre sans retard des mesures afin d’aligner sa législation sur la convention. Bien que la convention autorise les Etats qui l’ont ratifiée et dont l’économie et les institutions scolaires ne sont pas suffisamment développées à invoquer la clause de souplesse de l’article 2, paragraphe 4, pour spécifier un âge minimum de 14 ans, cet instrument ne les autorise en aucune manière à descendre sous ce seuil. En fait, il était attendu des pays ayant ratifié la convention qu’ils relèvent progressivement l’âge minimum général à 16 ans et éradiquent le travail des enfants. La convention dispose que l’âge minimum spécifié ne doit pas être inférieur à l’âge auquel cesse la scolarité obligatoire. La fréquentation régulière d’une école ou la participation à des programmes approuvés d’orientation ou de formation professionnelles devraient être exigées et garanties dans les faits jusqu’à un âge égal au moins à celui spécifié pour l’admission à l’emploi. Le fait de priver les enfants de possibilités d’éducation et de formation les condamne à ne jamais pouvoir acquérir de qualifications et perpétue ainsi la pauvreté d’une société. Il est à porter au crédit du gouvernement bolivien d’avoir, ces dernières années, rendu l’enseignement obligatoire jusqu’à la fin du cycle secondaire. En règle générale, l’enfant est ainsi obligé de suivre douze années de scolarité ce qui, par conséquent, porte à 16 ans minimum l’âge de fin de la scolarité obligatoire. Autoriser les enfants à travailler à partir de 10 ans aurait inévitablement des répercussions sur la scolarité obligatoire. De ce fait, le Code de l’enfance et de l’adolescence contredit la législation nationale sur l’enseignement et viole clairement la convention. Les membres travailleurs se disent préoccupés par le nombre élevé d’enfants employés dans l’économie informelle. Quoiqu’il faille reconnaître les résultats des mesures prises par le gouvernement pour réduire la part de l’économie informelle, elle emploie encore trop d’enfants sans protection. Dans les pires cas, ils se retrouvent dans des situations de mendicité forcée, de servitude pour dettes, de services domestiques et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales.

Les capacités de l’Etat plurinational de Bolivie en matière d’inspection du travail restent faibles malgré le nombre élevé d’enfants employés à un travail dangereux. On compte à peine 90 inspecteurs du travail pour tout le pays, comme l’indique le rapport du gouvernement. Dans le rapport remis au titre de la convention (nº 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999, le gouvernement indiquait que seuls six inspecteurs du travail sont spécialisés dans l’élimination du travail des enfants. Rien n’indique que ce chiffre ait augmenté. Etant donné le nombre d’enfants mis au travail et la taille de l’économie informelle, le nombre d’inspecteurs du travail reste insuffisant. Une inspection du travail insuffisante a pour effet non seulement de réduire la possibilité de détecter les violations relatives au travail des enfants, mais aussi d’empêcher de sanctionner les contrevenants comme il le faudrait. Les membres travailleurs ont pris note des mesures positives adoptées par le gouvernement afin d’éradiquer le travail des enfants, comme la Sous-commission interinstitutions pour l’élimination des pires formes de travail des enfants, dont le but est la mobilisation des efforts et la création de synergies pour prévenir le travail des enfants ainsi que la prise en charge des victimes. En outre, le plan de développement économique et social du gouvernement vise à éradiquer les causes du travail des enfants par une augmentation des dépenses publiques pour la protection de l’enfance. Des progrès ont effectivement été constatés dans ce domaine, les dépenses publiques étant passées de 3,5 pour cent en 2005 à 7,8 pour cent en 2015. Ces initiatives en matière de politiques sont louables, mais elles sont encore en retrait par rapport à ce qui devrait se faire pour être en conformité avec la convention. Le système mis en place par le Code de l’enfance et de l’adolescence doit être réformé sans délai. De même, le gouvernement doit mettre immédiatement en application l’arrêt du Tribunal constitutionnel en engageant une réforme de la législation en concertation avec les partenaires sociaux. Les membres travailleurs expriment le ferme espoir que les discussions au sein de la Commission de l’application des normes contribueront à attirer l’attention du gouvernement sur l’urgence de la situation, de telle sorte que de nouveaux progrès puissent être accomplis.

Les membres employeurs ont apprécié les informations fournies et ont rappelé que la discussion porte sur une convention fondamentale et qu’il faut donc remédier au plus vite à toute discordance avec son contenu. Par ailleurs, il convient de rappeler que la commission d’experts a prévu une double note de bas de page pour le présent cas. Conformément à l’article 1 de la convention, les Etats s’engagent à poursuivre une politique nationale visant à assurer l’abolition effective du travail des enfants et à élever progressivement l’âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail à un niveau permettant aux adolescents d’atteindre le plus complet développement physique et mental. L’OIT définit le travail des enfants comme l’ensemble des activités qui privent les enfants de leur enfance, de leur potentiel et de leur dignité, et qui nuisent à leur développement physique et mental. Il est donc fait référence à des travaux dangereux pour le bien-être physique et mental ou moral des enfants et qui les privent de toute scolarisation. Selon l’enquête nationale sur le travail des enfants de 2012 de l’Institut national de statistique, 491 000 enfants n’ayant pas atteint l’âge minimum travaillent dans le pays et 437 000 d’entre eux effectuent des travaux dangereux. De même, 309 000 adolescents âgés de 14 à 17 ans sont employés à des tâches dangereuses. Ces chiffres révèlent l’ampleur du travail des enfants dans le pays. Les membres employeurs ont également fait référence aux observations de la commission d’experts relatives: i) à l’abaissement de l’âge minimum du travail des enfants de 14 à 10 ans pour les travailleurs indépendants et à 12 ans pour les enfants engagés dans une relation d’emploi conformément à l’article 129 du nouveau Code de l’enfance et de l’adolescence; ii) au niveau élevé de l’économie informelle dans le pays (70 pour cent) qui favorise le travail des enfants, n’étant pas soumise à l’inspection du travail générale et régulière; iii) à la distinction qu’effectue le nouveau Code de l’enfance et de l’adolescence entre l’âge minimum pour les enfants travailleurs indépendants, fixé à 10 ans, et l’âge minimum pour les enfants engagés dans une relation d’emploi, fixé à 12 ans. Face à cette situation, la commission d’experts a prié le gouvernement d’adopter une série de mesures, dont l’élaboration d’une nouvelle loi, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, afin de mettre la législation nationale en conformité avec les dispositions de la convention, ainsi que la formation du personnel des services d’inspection du travail et l’augmentation de leurs moyens humains et matériels.

En outre, dans sa décision de 2017, le Tribunal constitutionnel a déclaré les articles 129, 131, 133 et 138 du Code de l’enfance et de l’adolescence inconstitutionnels, car contraires aux dispositions de la convention. Les traités internationaux faisant partie intégrante du droit constitutionnel, les dispositions en question du Code de l’enfance et de l’adolescence, qui s’écartent de la convention, sont donc contraires à la Constitution du pays. La décision du Tribunal constitutionnel a exhorté le gouvernement à développer et à mettre en œuvre des politiques publiques visant à abolir le travail des enfants en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs comme le prévoit la convention. Pour conclure, si la décision du Tribunal constitutionnel dont il est fait mention précédemment annule bien les dispositions ne respectant pas la convention, elle laisse également un vide juridique, de sorte que nul ne sait quelle norme s’applique désormais. Par conséquent, il continue d’être nécessaire que le gouvernement modifie la législation de manière explicite pour la rendre conforme à la convention. Les membres employeurs ont donc demandé à ce que de telles modifications s’effectuent en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives conformément aux dispositions de la convention.

Le membre travailleur de l’Etat plurinational de Bolivie a souligné le fort taux d’exploitation enregistré par le passé, conséquence de l’application du décret suprême no 21060 du 29 août 1985 privatisant des entreprises publiques stratégiques. En vertu de ce décret, de nombreuses usines et sociétés minières ont fermé, et nombre de travailleurs ont été licenciés. Aujourd’hui, le travail des enfants est principalement présent dans le secteur privé (secteur minier de Potosí, et dans les récoltes et l’élevage dans la région de l’Oriente), alors que son ampleur a diminué dans le secteur public. Tout en soulignant l’importance de travailler de façon coordonnée avec le gouvernement à l’abolition du travail des enfants, l’orateur a signalé qu’un accord conclu en 2016 entre les travailleurs et le gouvernement prévoit que l’adoption de tout projet de loi doit faire l’objet d’un consensus avec la Centrale ouvrière bolivienne (COB). Le respect de cet accord est essentiel. Enfin, il convient de féliciter l’Etat plurinational de Bolivie et, en particulier, le Tribunal constitutionnel pour sa décision d’abroger et de rendre inopérants les articles 129 et 138.I, entres autres, du Code de l’enfance et de l’adolescence.

Le membre employeur de l’Etat plurinational de Bolivie a déclaré que le non-respect de la convention revêt deux aspects, l’un de forme et l’autre de fond. Concernant le problème de forme, la décision du Tribunal constitutionnel, en s’appuyant sur les dispositions de la convention, permet un retour à la légalité pour ce qui est du maintien de l’âge minimum d’accès à l’emploi. Il convient de souligner que le gouvernement n’avait pas été en mesure d’effectuer une restitution de la sorte lors de l’élaboration de la norme ou au moment où la communauté internationale lui a adressé ses critiques. Un tel comportement jette des doutes sur la volonté du gouvernement d’appliquer et de respecter les conventions internationales, en ce sens qu’il laisse entendre que le gouvernement ne respecte que les conventions qui s’inscrivent dans la ligne de son critère idéologique, au risque de porter préjudice à des thèmes sensibles tels que le développement humain des enfants. S’agissant du problème de fond, l’absence de politiques efficaces permettant d’éviter le travail des enfants dans l’économie informelle soulève des préoccupations. Ce secteur représente plus de 70 pour cent de l’activité économique, recèle différentes formes de travail indignes et a des répercussions sur l’accès approprié à des conditions de travail décentes dès les premières années de travail. Le Code de l’enfance et de l’adolescence n’est rien d’autre que l’instrument qui permet d’appliquer les politiques publiques décidées par le gouvernement. De fait, la disposition initiale qui autorisait le travail des enfants en deçà des limites fixées par la convention ne tenait malheureusement pas compte du contenu des normes internationales visant à protéger les droits des enfants et à maintenir leurs droits d’accéder à des perspectives de développement et de croissance. En conclusion, des préoccupations sont exprimées concernant l’adoption d’une norme qui, à l’évidence, ne répond pas aux lacunes ni aux besoins structurels des enfants. Dans ce contexte, le gouvernement doit s’engager à créer les organismes et les conditions nécessaires pour: i) pallier les lacunes législatives découlant de la décision constitutionnelle; ii) élaborer des programmes étatiques visant à mettre fin au travail des enfants de manière réelle et efficace; et iii) établir des mécanismes de maintien des droits des enfants, qui favorisent le développement et la croissance, dans des conditions respectueuses d’une réalité comptant environ 800 000 enfants.

La membre gouvernementale de la Bulgarie, s’exprimant au nom de l’Union européenne (EU) et des Etats membres, ainsi que de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine, de la Géorgie, du Monténégro, de la Norvège, de l’ex-République yougoslave de Macédoine et de l’Ukraine, a déclaré que tous les enfants, filles et garçons, ont droit à une enfance et à une éducation digne de ce nom, quels que soient leur origine ethnique, leur genre, leur religion et leur lieu de résidence. L’élimination et la prévention du travail des enfants constituent une grande priorité de l’UE. Le respect des droits de l’enfant est inscrit dans le Traité sur l’Union européenne et la Charte des droits fondamentaux. De plus, les normes fondamentales du travail sont mentionnées explicitement dans tous les accords commerciaux que l’UE a négociés récemment avec des pays partenaires. L’UE et l’Etat plurinational de Bolivie entretiennent une coopération bilatérale très étroite. L’Etat plurinational de Bolivie est le premier bénéficiaire de l’aide au développement de l’UE en Amérique latine. Elle bénéficie aussi du système de préférences généralisées (SPG+) par lequel, en échange de régimes douaniers préférentiels, elle s’est engagée à ratifier et mettre en pratique dans les faits les conventions fondamentales de l’OIT et d’autres instruments internationaux. Ce cas a déjà été discuté par cette commission en 2015, après l’adoption du Code de l’enfance et de l’adolescence, qui permettait aux enfants de travailler pour un employeur à partir de l’âge de 12 ans et pour leur propre compte à partir de l’âge de 10 ans. La commission d’experts avait conclu que ces nouvelles dispositions n’étaient pas en conformité avec la convention. Elle avait souligné que les enfants travaillant pour leur propre compte devaient avoir la garantie, au minimum, de la même protection légale que les enfants engagés dans une relation de travail, d’autant que beaucoup de ces enfants travaillent dans l’économie informelle dans des conditions dangereuses. La commission d’experts avait donc exhorté le gouvernement à abroger ces dispositions, à préparer immédiatement une nouvelle loi en concertation avec les partenaires sociaux, et à donner à l’inspection du travail davantage de moyens humains et techniques. Le gouvernement n’a pris aucune mesure à cet égard, malgré le fait que le travail des enfants soit un phénomène persistant dans le pays, surtout en zone rurale, dans l’agriculture et le secteur minier. La membre gouvernementale reconnaît les progrès accomplis par le gouvernement dans le but d’éradiquer la pauvreté et d’améliorer l’accès à l’éducation, à la santé, à l’alimentation et au logement, et de concrétiser les engagements pris en matière de droits humains. La Constitution, l’Agenda patriotique 2025 et le Plan national pour les droits de l’homme 2014-2018 constituent ensemble une base solide pour améliorer la promotion et la protection des droits de l’homme. Le Code de l’enfance et de l’adolescence énonce aussi un large éventail de mesures pour la protection des enfants, mais les dispositions permettant de déroger à l’âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail sont extrêmement préoccupantes. L’oratrice mentionne la décision du Tribunal constitutionnel qui déclare ces dispositions inconstitutionnelles, et elle se réjouit de la voir rapidement mise en pratique. Le gouvernement doit être invité à préparer, en concertation avec les partenaires sociaux, un nouveau texte de loi qui relève l’âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail. Le gouvernement pourrait solliciter à cette fin l’assistance technique du BIT. Il faut aussi inciter le gouvernement à renforcer les services de l’inspection du travail et à poursuivre ses efforts d’investissement dans les services sociaux afin de permettre une détection efficace du travail des enfants et de les protéger à la fois dans le secteur formel et le secteur informel. L’UE poursuivra sa coopération avec l’Etat plurinational de Bolivie afin d’éliminer durablement le travail des enfants sous toutes ses formes.

La membre gouvernementale du Paraguay, s’exprimant au nom du groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a accueilli avec satisfaction les informations fournies par le représentant gouvernemental relatives au respect de la convention. Le Programme de développement durable à l’horizon 2030, en particulier sa cible 8.7 qui vise à mettre fin au travail des enfants sous toutes ses formes d’ici à 2025, offre une occasion unique d’accélérer l’éradication des inégalités et de la pauvreté. La persistance du travail des enfants perpétue les inégalités et l’exclusion de larges segments de la population, met en péril la croissance durable de la région et menace la productivité des futurs adultes en limitant les possibilités d’accéder à un travail décent. La région a lancé une série d’initiatives afin de réduire le travail des enfants suivant un rythme accéléré. L’oratrice s’est félicitée des actions menées par le gouvernement ainsi que de l’information selon laquelle, conformément à la décision contraignante rendue par le Tribunal constitutionnel, les dispositions sur lesquelles portait l’observation de la commission d’experts sont rendues inopérantes et, partant, annulées. Etant donné que la réglementation s’inscrit dans le droit fil de la convention, le GRULAC considère que la Commission de la Conférence devrait exprimer sa satisfaction au regard du présent cas. Elle devrait en outre mettre en exergue les progrès que le gouvernement a réalisés afin de réduire la pauvreté et les inégalités, qui sont des causes structurelles du travail des enfants, et l’encourager à poursuivre ses efforts en vue de mettre fin au travail des enfants.

La membre travailleuse de l’Espagne a déploré l’adoption du nouveau Code de l’enfance et de l’adolescence qui modifie l’article 129 du code précédent, abaissant l’âge minimum du travail des enfants, ce qui, de toute évidence, n’est pas compatible avec la convention. L’existence du travail des enfants, quelles que soient les circonstances, est inacceptable et propre aux sociétés où les inégalités ne cessent de s’aggraver. Les conséquences que subit un enfant qui est obligé de travailler sont irréversibles. L’oratrice a rappelé l’engagement que contient la Déclaration de Buenos Aires sur le travail des enfants, le travail forcé et l’emploi des jeunes, du 16 novembre 2016, qui invite les gouvernements, les partenaires sociaux et la société civile dans son ensemble à faire preuve de détermination en exigeant l’éradication du travail des enfants. Enfin, face aux informations fournies par le gouvernement concernant l’existence d’une décision du Tribunal constitutionnel qui suspend l’application de l’article en question du Code de l’enfance et de l’adolescence, elle a conclu que l’adoption d’une nouvelle loi conforme aux dispositions de la convention est nécessaire, établissant clairement les critères d’âge pour accéder au travail et ayant pour objectif d’éradiquer le travail des enfants.

Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela, appuyant la déclaration du GRULAC, a salué les progrès accomplis par le gouvernement, notamment le Plan de développement économique et social et la décision du Tribunal constitutionnel qui déclare inconstitutionnelle la disposition du Code de l’enfance et de l’adolescence mise en cause par la commission d’experts. Conformément à cette décision, la législation de l’Etat plurinational de Bolivie est en conformité avec la convention. Compte tenu des explications présentées par le représentant gouvernemental, il ne fait aucun doute que le gouvernement poursuivra ses politiques de protection dans le but d’éradiquer définitivement le travail des enfants. En conséquence, l’orateur a estimé que, dans ses conclusions, la commission devrait noter avec satisfaction les progrès réalisés dans ce cas.

Le membre travailleur de l’Uruguay, tout en saluant le processus politique de l’Etat plurinational de Bolivie en faveur de l’inclusion sociale et du respect des différentes minorités ethniques, a indiqué que l’adoption d’une loi qui porte atteinte à une convention fondamentale témoigne d’une certaine incohérence. Cela dit, grâce à l’exercice d’une véritable démocratie, celle-ci a été abrogée. Pour autant, des inégalités sociales persistent dans le pays, qui, durant de nombreuses années, ont abouti à l’exclusion. Il convient de s’attaquer aux causes de cette situation et d’éradiquer le travail des enfants selon les règles établies dans la convention. Enfin, l’orateur s’est dit convaincu que le gouvernement créerait les conditions nécessaires pour mener à bien les consultations avec les partenaires sociaux afin d’établir une législation qui permette d’assurer une éducation aux enfants en vue de garantir le développement du pays.

La membre gouvernementale de l’Equateur s’est associée à la déclaration faite au nom du GRULAC et a salué les informations fournies par le représentant gouvernemental. En Equateur, l’élimination des inégalités et de la pauvreté est une priorité, et une grande importance est accordée à la lutte contre le travail des enfants. L’encadrement, la protection et le développement des enfants figurent parmi les facteurs du développement général visé pour les populations. Tout en saluant les progrès et les actions menées pour garantir l’intérêt supérieur de l’enfant, l’oratrice a encouragé le gouvernement de l’Etat plurinational de Bolivie à continuer à travailler sans relâche sur les causes structurelles du travail des enfants.

Le membre gouvernemental de l’Egypte a indiqué que, en tant que convention fondamentale, la question de l’application de la convention revêt une grande importance. Il a évoqué les efforts du gouvernement visant à éradiquer de manière efficace le travail des enfants, notamment la modification de la législation afin de la rendre conforme à la convention; la position du Tribunal constitutionnel au sujet de certaines dispositions du code relatives aux enfants et aux jeunes personnes; les mesures économiques visant à l’éradication de la pauvreté, une des causes principales du travail des enfants; l’amélioration des soins de santé au profit des enfants; et les mesures destinées à développer la scolarisation des enfants. La commission d’experts doit tenir compte de ces mesures positives. L’assistance technique devrait être fournie au gouvernement pour une meilleure application de la convention.

Le membre gouvernemental des Etats-Unis a salué la décision du Tribunal constitutionnel de déclarer inconstitutionnelles certaines dispositions du Code de l’enfance et de l’adolescence en vertu desquelles, et en contradiction avec les obligations internationales du pays, le travail des enfants de moins de 14 ans est autorisé. Il a encouragé le gouvernement à prendre, avec l'assistance technique du BIT, toute mesure appropriée visant à mettre la législation et la pratique en conformité avec la convention.

Le membre gouvernemental de l’Algérie a noté avec satisfaction les efforts déployés par le gouvernement de l’Etat plurinational de Bolivie pour améliorer la mise en œuvre des politiques permettant de réduire les causes structurelles du travail des enfants, telles que la pauvreté, qui est passée de 38,6 à 16,8 pour cent, la lutte contre l’échec scolaire qui a été réduit de 4 à 2 pour cent entre 2006 et 2014, ou la généralisation de l’enseignement qui atteint 80 pour cent. Il convient de soutenir l’engagement et l’action menée par le gouvernement en vue d’adapter la législation nationale et de mener une politique économique et sociale ayant comme objectif la lutte contre le travail des enfants. L’orateur a considéré qu’il ne faut pas occulter les avancées obtenues dans ce domaine, mais au contraire tenir compte des efforts et des résultats atteints.

Le membre employeur du Chili a regretté que le gouvernement n’ait pas modifié sa législation et sa pratique nationales pour les rendre conformes à la convention, malgré l’appel en ce sens de la commission d’experts en 2015. Le gouvernement indique que les exceptions à l’âge minimum de 14 ans prévues dans le Code de l’enfance et de l’adolescence ne sont autorisées qu’à la condition qu’elles ne portent pas atteinte à des droits fondamentaux, comme le droit à l’éducation. Mais il est évident que de telles exceptions sont préjudiciables à ce droit, surtout sachant que la scolarité obligatoire dure douze ans, c’est-à-dire qu’elle s’applique au moins jusqu’à 16 ans. De plus, il convient de rappeler que l’adoption du code s’est faite sans consultation préalable des organisations d’employeurs et de travailleurs, ce qui est une autre regrettable erreur. La décision du Tribunal constitutionnel a laissé un vide normatif et il revient donc au gouvernement, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs, d’ajuster sa législation nationale pour la rendre conforme à la convention dans les plus brefs délais.

Le membre gouvernemental de la République dominicaine a salué la volonté de l’Etat plurinational de Bolivie et les actions qu’il a menées, montrant son souci de garantir les intérêts supérieurs des garçons, des filles et des adolescents. Les informations fournies par le gouvernement au sujet du caractère contraignant de la décision du Tribunal constitutionnel prouvent son engagement et constituent une réponse adéquate aux recommandations de cette commission.

La membre gouvernementale du Canada s’est référée à la IVe Conférence mondiale sur l’éradication soutenue du travail des enfants de 2017, à l’occasion de laquelle les parties se sont engagées à œuvrer pour l’élimination du travail des enfants. En 2015 déjà, le gouvernement était appelé à prendre des mesures immédiates visant à modifier les dispositions du Code de l’enfance et de l’adolescence relatives à l’âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail indépendant, ainsi qu’à l’engagement dans une relation de travail, afin que ces dispositions soient mises en conformité avec la convention. Tout en saluant les informations fournies par le gouvernement en ce qui concerne la décision d’inconstitutionnalité de ces dispositions, l’orateur a instamment demandé au gouvernement de modifier de toute urgence le code afin d’assurer que l’âge minimum adéquat soit clair pour tous les mandants. Le gouvernement est par ailleurs instamment prié de renforcer les capacités et les efforts de son inspection du travail pour l’application de la loi et la prévention de l’utilisation abusive du travail des enfants, notamment dans l’économie informelle.

Le membre gouvernemental de la Suisse a fait part de sa préoccupation face au fait que le Code de l’enfance et de l’adolescence continue à être incompatible avec cette convention fondamentale. Il est regrettable que certaines de ses dispositions, en vigueur de manière provisoire, permettent d’abaisser l’âge minimal légal d’admission au travail à moins de 14 ans. Ceci n’est pas compatible avec les conditions nécessaires pour une scolarisation adéquate et ne permet par ailleurs pas aux adolescents d’atteindre un développement physique et mental complet. Déjà en 2016, devant cette commission, le gouvernement de la Suisse avait fait part de son inquiétude face aux dispositions de l’article 129 de ce code qui permettent aux enfants de travailler à partir de 10 ans. Il y a donc lieu de réitérer l’appel au gouvernement de mettre sa législation en conformité avec la convention, de veiller à promouvoir une scolarisation et une éducation de qualité, de poursuivre la lutte contre la pauvreté et d’éliminer le travail et l’exploitation des enfants.

Le membre gouvernemental du Nicaragua s’est associé à la déclaration faite au nom du GRULAC et a apprécié les informations fournies par le représentant gouvernemental. Il est essentiel d’éradiquer la pauvreté et les inégalités, et il est donc satisfaisant que, dans le cadre des politiques nationales de développement économique et social, l’Etat plurinational de Bolivie ait défini les grandes orientations pour le développement intégral du pays dans la perspective du «bien vivre». De la même façon, il faut souligner l’effort du gouvernement pour progresser vers les objectifs des piliers de son programme relatifs à l’éradication de la pauvreté extrême, à la socialisation, à l’universalisation des services, à la santé et à l’éducation, à la souveraineté productive et à la souveraineté alimentaire en vue d’éliminer le travail des enfants d’ici à 2025. Il faut aussi saluer la décision du Tribunal constitutionnel qui a rendu inopérantes les dispositions contestées par la commission d’experts et la formulation de politiques socio-économiques qui ont permis de réduire différentes causes structurelles du travail des enfants, comme la pauvreté extrême. Enfin, l’orateur a encouragé le gouvernement à poursuivre l’élaboration de politiques en vue de contrôler, de suivre et d’appliquer des mesures qui participent à l’élimination du travail des enfants d’ici à 2025.

La membre gouvernementale de Cuba a salué les informations fournies par le représentant gouvernemental ainsi que les progrès réalisés dans la réduction des inégalités et de la pauvreté au cours des dernières années, qui sont passées de 38,6 pour cent à 16,8 pour cent. Elle a également apprécié le travail sur les causes structurelles, permettant ainsi l’amélioration des conditions des enfants et de leurs familles. L’attention portée par le gouvernement à l’éducation a été décisive dans les changements structurels, doublant le nombre d’élèves scolarisés. Il est indéniable que les progrès sociaux accomplis se sont traduits par la réduction de la pauvreté, l’inclusion des groupes vulnérables dans la vie nationale et la prise en charge de l’enfant, de l’adolescent et de la femme. En ce qui concerne les questions du travail en général, l’Etat plurinational de Bolivie a montré qu’il continuait à œuvrer à l’éradication des pires formes de travail des enfants, nonobstant les exceptions constatées. Enfin, l’oratrice se dit confiante que les efforts nécessaires visant l’élimination des causes du travail des enfants se poursuivront à travers une approche multisectorielle et protectrice suivant le principe de l’«intérêt supérieur de l’enfant» et avec une adaptation du cadre normatif.

Le représentant gouvernemental a souligné que le Tribunal constitutionnel a abrogé, dans sa décision, les dispositions que la commission d’experts avait mentionnées dans son observation, car il ne s’est pas avéré nécessaire de modifier la législation afin de l’adapter à la convention. Le Code de l’enfance et de l’adolescence fixe aujourd’hui à 14 ans l’âge minimum d’admission au travail, conformément à l’article 2, paragraphe 4, de la convention, ainsi qu’à la loi générale du travail de l’Etat plurinational de Bolivie. Par conséquent, aucun développement juridique majeur n’est nécessaire concernant l’âge minimum d’accès au travail.

Par ailleurs, les politiques publiques adoptées par le gouvernement sont solides et ont permis de réaliser des progrès dans la réduction des causes structurelles à l’origine de la pauvreté, ainsi que dans l’abolition du travail des enfants. A cet égard, on notera que, en 2008, plus de 700 000 enfants étaient astreints au travail des enfants et au travail dangereux, tandis que, en 2012, ce chiffre était de 437 000. Selon les dernières données fournies par l’Enquête nationale sur le travail des enfants de l’Institut national de statistique, 323 000 enfants sont en situation de travail, ce qui veut dire que le nombre d’enfants astreints au travail des enfants a été réduit d’environ 50 pour cent ces dernières années. Tout ceci traduit la volonté du gouvernement non seulement de se conformer à la convention, mais aussi de faire évoluer la situation de pauvreté dans laquelle vivent les enfants du pays. Pour ce qui est de l’allégation d’absence de politiques publiques visant à éliminer le travail des enfants dans le secteur informel, les politiques mises en place par le gouvernement ont permis d’augmenter le nombre de travailleurs salariés entre 2005 et 2017, pour atteindre le chiffre de 1 500 000. De même, le nombre de travailleurs bénéficiant de la sécurité sociale est passé de 2 600 000 en 2005 à 4 200 000 en 2017. A cela, on ajoutera l’augmentation du nombre de personnes ayant droit à la retraite, celui-ci étant passé de 660 000 personnes en 2006 à plus de 1 600 000 personnes aujourd’hui. En définitive, les politiques économiques en cours actuellement offrent une base structurelle qui accorde des droits décents à la population, ce qui comprend non seulement l’accès au travail, mais également le droit à la sécurité sociale et à la retraite. Enfin, l’orateur fait part de l’engagement de l’Etat plurinational de Bolivie de déployer les efforts nécessaires en vue de l’élimination du travail des enfants. Dans ce sens, l’Agenda patriotique 2025 comprend parmi ses objectifs l’élimination du travail des enfants à l’horizon 2025. Certes, les progrès accomplis sont importants, mais ils ne sont pas suffisants. Il convient d’approfondir les changements déjà effectués dans l’intérêt des enfants et des adolescents. Sur la base de ce qui précède, la commission devrait reconnaître les efforts qui ont été déployés.

Les membres employeurs ont souligné que, malgré la décision rendue par le Tribunal constitutionnel, tout n’est pas encore résolu, étant donné que des insuffisances subsistent au regard des règles internationales et en particulier de la convention. C’est le cas par exemple de l’enregistrement des enfants qui travaillent, mesure prévue par la convention afin de suivre de près le travail des enfants. De même, en dépit des amendements apportés à la suite de la décision du Tribunal constitutionnel, on ne voit pas encore clairement comment les articles 132 et 133 de la loi seront appliqués. L’absence d’un processus de consultations tripartites avec les organisations les plus représentatives d’employeurs et de travailleurs représente aussi un problème. L’Etat plurinational de Bolivie doit encore élaborer et adopter des politiques visant à mettre fin au travail des enfants, en consultation avec les acteurs sociaux du pays, ainsi qu’aligner son cadre normatif sur la convention de manière plus ferme, comme demandé depuis 2015. Il est indispensable que l’Etat intervienne dans deux domaines importants. En premier lieu, l’Etat devrait intervenir en ce qui concerne le renforcement de l’inspection du travail, tant en matière de ressources humaines et matérielles que de formation des inspecteurs, pour ce qui est du travail des enfants en général et du travail des enfants dans l’économie informelle, où cette pratique est répandue et où l’on constate les plus grandes violations. En second lieu, il est demandé instamment au gouvernement d’accepter l’assistance technique du BIT, déjà proposée dans le passé, afin que le pays puisse régler les questions normatives et qu’un plan visant à éliminer le travail des enfants puisse être élaboré, toujours en consultation avec les acteurs tripartites. En conclusion, compte tenu de la gravité du cas examiné, il est demandé que ce cas fasse l’objet d’un paragraphe spécial dans le rapport de la commission.

Les membres travailleurs ont rappelé que, à l’occasion des deux discussions de la commission sur l’application de la convention, ce cas avait fait l’objet de doubles notes de bas de page. Il est ressorti de ces deux discussions que la décision d’abaisser à 10 ans l’âge d’admission à l’emploi n’est pas conforme à la convention. Bien que le gouvernement ait pris quelques mesures positives pour éliminer le travail des enfants, une réforme législative est indispensable. Les membres travailleurs ont noté, d’après les informations fournies par le gouvernement dans ses remarques finales, que l’article 129 du Code de l’enfance et de l’adolescence a été abrogé par le Tribunal constitutionnel, puis modifié par le gouvernement. Les membres travailleurs voient cette décision comme une étape positive et invitent le gouvernement à communiquer cette information au Bureau et à la commission d’experts. Les membres travailleurs ont ensuite appelé le gouvernement à augmenter progressivement l’âge minimum d’admission à l’emploi en collaboration avec les partenaires sociaux. La privation de possibilités d’éducation et de formation des enfants en fait des personnes non qualifiées et perpétue ainsi la pauvreté de la société. Si l’âge minimum d’admission au travail ou à l’emploi est inférieur à l’âge de la fin de la scolarité obligatoire, les enfants peuvent être encouragés à se déscolariser, car cela peut signifier que le travail des enfants en âge de scolarité obligatoire est autorisé par la loi. C’est pourquoi le gouvernement doit garantir un âge minimum pour l’emploi, supérieur à celui de la fin de la scolarité obligatoire. Puisque le nombre limité d’inspecteurs du travail ne permet pas de couvrir les secteurs de l’économie informelle et de l’agriculture, où la plupart des cas de travail des enfants sont observés, les membres travailleurs appellent le gouvernement à renforcer les capacités et à élargir la couverture de l’inspection du travail. Ils suggèrent que le gouvernement fasse appel à l’assistance technique du BIT.

Conclusions

La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental de l’Etat plurinational de Bolivie sur les questions soulevées par la commission d’experts et de la discussion qui a suivi sur les articles du Code de l’enfance et de l’adolescence qui ne sont pas conformes aux dispositions de la convention no 138 de l’OIT.

La commission a également noté que le Tribunal constitutionnel, dans sa décision no 0025/2017 du 21 juillet 2017, a prononcé l’inconstitutionnalité de plusieurs des dispositions du Code de l’enfance et de l’adolescence (loi no 548 du 17 juillet 2014) et que, pour fonder sa décision, il a pris comme référence et comme base juridique les articles 1, 2 et 7 de la convention no 138 de l’OIT. En conséquence de cette décision, les articles suivants du code ont été déclarés inconstitutionnels: 129.II; 130.III; 131.I, III et IV; 133.III et IV; et 138.I.

Le gouvernement a déclaré que, suite à la décision du Tribunal constitutionnel, aucune modification de la législation n’est nécessaire compte tenu des effets abrogatoires de la décision du Tribunal constitutionnel sur les dispositions susmentionnées.

Prenant en compte les déclarations du gouvernement et la discussion qui a suivi, la commission a prié instamment le gouvernement:

  • d’adapter la législation nationale, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, à la suite de l’abrogation des dispositions du Code de l’enfance et de l’adolescence par le Tribunal constitutionnel de l’Etat plurinational de Bolivie, conformément à la convention no 138, et d’informer la commission d’experts sur ces mesures;
  • de mettre à la disposition de l’inspection du travail une formation et des ressources humaines, matérielles et techniques accrues, en particulier dans le secteur informel, afin d’assurer une application plus efficace de la convention no 138 en droit et dans la pratique;
  • de se prévaloir de l’assistance technique du BIT pour revoir le Plan national pour l’élimination du travail des enfants en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives;
  • de soumettre à la commission d’experts le projet final de dispositions du Code de l’enfance et de l’adolescence avant le 1er septembre 2018 et de rendre compte en détail des progrès réalisés dans l’application de la convention no 138, en droit et dans la pratique, en vue de leur examen à la prochaine session de la commission d’experts en 2018.
  • Le représentant gouvernemental a précisé que la déclaration d’inconstitutionnalité prononcée par le Tribunal constitutionnel porte effectivement sur l’article 129.II du code. Toutefois, en ce qui concerne les articles 130.III; 131.I, III et IV; 133.III et IV; et 138.I, la déclaration d’inconstitutionnalité n’a été prononcée qu’en ce qui concerne le caractère exceptionnel de la fixation à 10 ans de l’âge minimum d’admission aux travaux légers. L’orateur a jugé important de prendre en compte cette situation puisque le premier point des conclusions semble suggérer, à tort, que toutes les dispositions susmentionnées ont été laissées sans effet.

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