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Observation (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - Serbie (Ratification: 2003)

Autre commentaire sur C182

Observation
  1. 2024

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La commission prend note des observations de la Confédération des syndicats autonomes de Serbie (CATUS) qui ont été communiquées avec le rapport du gouvernement.
Article 3, alinéas a) et b) et article 7, paragraphe 1, de la convention. Pires formes de travail des enfants et sanctions. Traite et exploitation sexuelle à des fins commerciales. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que, de janvier 2017 à décembre 2022, 344 plaintes pénales en tout ont été déposées contre 272 personnes ayant commis 514 infractions pénales de nature sexuelle contre des mineurs, y compris liées à l’utilisation d’enfants à des fins de pornographie, au sens de l’article 185 du Code pénal. Le gouvernement ajoute que, pour la période 2017-2022, la police a enregistré un total de 122 plaintes pénales contre 241 personnes pour lesquelles des indices suffisants laissaient penser qu’elles s’étaient livrées à la traite des êtres humains, une infraction pénale au sens de l’article 388 du Code pénal; 193 personnes ont été victimes de cette traite. Selon les informations du gouvernement, les motifs de la traite étaient les suivants: 1) la mendicité (7 garçons et 3 filles); 2) l’exploitation sexuelle (1 garçon et 34 filles); 3) l’utilisation à des fins de pornographie (8 filles); 4) l’exploitation à des fins multiples (1 garçon et 5 filles); et 5) l’exploitation par le travail (2 garçons et 7 filles).
Par ailleurs, la commission note que la CATUS, dans ses observations, regrette l’absence d’informations sur le nombre de poursuites réellement intentées et menées à terme, et sur les sanctions imposées. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts visant à éliminer dans la pratique la traite des enfants, en particulier en s’assurant que des enquêtes approfondies sont entamées et des poursuites menées pour les cas de traite des enfants, et que des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives sont imposées dans la pratique à l’encontre de leurs auteurs. Elle le prie de continuer à fournir des informations sur l’application des articles 185 et 388 du Code pénal, relatifs à la traite et à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales d’enfants de moins de 18 ans, et à veiller à ce que ces informations contiennent des données sur le nombre d’enquêtes, de poursuites et de condamnations, et sur les types de sanctions imposées.
Article 4, paragraphe 1. Travaux dangereux. La commission prend bonne note que le gouvernement communique le nombre d’enfants de moins de 18 ans dont l’inspection du travail a constaté qu’ils travaillaient pour la période 2019-2022. Il indique que parmi ces enfants, les inspecteurs du travail ont découvert que certains travaillaient sans contrat, sans être inscrits auprès d’une assurance sociale obligatoire, sans accord parental et parfois sans l’autorisation de l’autorité de santé compétente. La commission prend note des sanctions que les inspecteurs du travail ont imposées dans ces cas, mais note toutefois que les informations transmises ne portent pas sur l’application dans la pratique du règlement no 53/2017, sur la détermination des travaux dangereux interdits aux enfants de moins de 18 ans.
La commission note que, selon l’étude nationale sur le travail des enfants de 2021, publiée en collaboration avec l’OIT, 14 000 enfants de 5 à 14 ans (soit 2,2 pour cent des enfants de ce groupe d’âge) et 21 000 enfants de 15 à 17 ans (soit 10,1 pour cent des enfants de ce groupe d’âge) sont engagés dans des formes dangereuses de travail des enfants. Parmi les enfants de 15 à 17 ans occupés à des travaux dangereux, 41,1 pour cent sont exposés à de la poussière, 30,7 pour cent travaillent avec des machines et des équipements dangereux (comme des tracteurs), 19,7 pour cent travaillent dans des positions inconfortables pendant de longues périodes et 11,2 pour cent sont exposés à des températures extrêmes (froides ou chaudes) ou à une forte humidité. Pour les plus jeunes, âgés de 5 à 14 ans, 41,7 pour cent sont exposés à des températures extrêmes (froides ou chaudes) ou à une forte humidité, 32,9 pour cent sont exposés à de la poussière, 25,2 travaillent dans des positions inconfortables pendant de longues périodes et 23,8 pour cent travaillent avec des machines dangereuses. L’étude révèle aussi que, même si la majorité des enfants âgés de 5 à 14 ans ne sont pas occupés à des tâches ménagères dangereuses, 5 800 enfants effectuent quand même des tâches ménagères pendant des heures extrêmement longues. Étant donné que des enfants continuent d’effectuer des travaux dangereux, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour protéger ces enfants des formes dangereuses de travail, y compris en assurant l’application effective du règlement no 53/2017. À cet égard, elle le prie de fournir des informations sur l’application dans la pratique dudit règlement, y compris sur le nombre d’enfants occupés à des formes dangereuses de travail, ainsi que sur le type d’infractions signalées et de sanctions imposées.
Article 6. Programmes d’action en vue d’éliminer les pires formes de travail des enfants. Traite des enfants et exploitation sexuelle d’enfants à des fins commerciales. La commission prend note des informations du gouvernement sur les mesures adoptées pour mettre en œuvre la Stratégie nationale 2017-2022 de prévention et d’élimination de la traite des être humains, en particulier des femmes et des enfants: 1) la mise en œuvre d’un programme sur les principes fondamentaux de la sécurité des enfants, pour éduquer les enfants aux risques et aux méthodes de prévention, notamment par la diffusion de vidéos sur la traite des enfants; 2) la mise en œuvre de programmes de prévention de la traite des enfants à l’école primaire; 3) la mise en œuvre d’une activité opérationnelle, baptisée «Armageddon», visant à combattre la traite des enfants à des fins de pornographie; 4) la diffusion sur les plateformes de médias sociaux d’une campagne vidéo «Dites non!» contre l’exploitation sexuelle des enfants; et 5) la publication d’un guide sur l’application d’indicateurs révisés pour l’identification préliminaire des élèves qui sont des victimes potentielles de la traite des êtres humains, distribué à tout le personnel des écoles primaires et secondaires afin de fournir au personnel des outils pour identifier les enfants victimes de la traite. La commission note aussi que le gouvernement a mis en place un programme de lutte contre la traite dans tout le pays, en coopération avec la Croix rouge nationale, afin de faire connaître ce phénomène et d’y sensibiliser la population en insistant sur les enfants et les adolescents, surtout les groupes particulièrement vulnérables.
La commission note que, dans ses observations, la CATUS considère que le rapport du gouvernement manque d’informations sur l’efficacité des mesures prises, et plus spécifiquement sur les mesures concrètes adoptées pour mettre en œuvre la Stratégie nationale 2017-2022 de prévention et d’élimination de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, ainsi que sur les résultats obtenus. La commission prie le gouvernement de continuer à prendre des mesures pour en finir avec la traite et l’exploitation sexuelle à des fins commerciales des enfants de moins de 18 ans. Elle le prie également de fournir des informations spécifiques sur les résultats des mesures adoptées à cet égard et d’envisager de mettre à jour la stratégie nationale 2017-2022.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces prises dans un délai limité. Alinéas a) et b). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants et prévoir l’aide directe pour soustraire les enfants de ces pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale. Enfants victimes de la traite. La commission prend note des informations communiquées par le gouvernement relatives aux mesures qu’il a adoptées pour prévenir la traite des enfants, dont: 1) la création d’un groupe de travail pour préparer un nouveau document stratégique sur la lutte contre la traite des êtres humains, dont un volet sera consacré à la protection des enfants; et 2) la mise en œuvre de la Stratégie nationale 2017-2022 de prévention et d’élimination de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et la protection des victimes, et son plan d’action qui prévoit une série d’activités pour améliorer la capacité du système de protection et exercer les droits des victimes de la traite conformément aux normes internationales.
En ce qui concerne l’identification des enfants victimes, le gouvernement indique que: 1) il a mis au point des indicateurs pour l’identification préliminaire des enfants victimes de la traite pour le système d’éducation et le système de protection sociale, afin d’identifier formellement les enfants victimes de la traite et d’évaluer le risque de traite des enfants migrants; 2) des formations sur l’identification préliminaire des victimes de la traite des êtres humains dans le système d’éducation ont été prodiguées à des représentants des administrations scolaires et deux formations étaient prévues pour un total de 50 psychologues qui travaillent dans les écoles; 3) le Centre pour la protection des victimes de la traite des êtres humains a coopéré avec l’Association des Bureaux de la jeunesse et, dans le cadre de cette coopération, des représentants des bureaux de la jeunesse ont été formés à reconnaître des situations de traite des êtres humains et à y réagir, et un forum a été organisé à Valjevo réunissant plus de 250 étudiants; et 4) de nombreuses formations ont été organisées sur la détection et l’identification de la traite des êtres humains chez les enfants, et sur la fourniture d’un soutien aux victimes.
Le gouvernement indique que, pour la période allant de janvier 2019 au 31 août 2023, 144 enfants victimes de la traite ont été identifiés, dont 122 filles et 22 garçons. Les formes les plus courantes d’exploitation des enfants sont l’exploitation sexuelle, la mendicité forcée et l’exploitation par le travail. Tous les enfants victimes identifiés ont été placés dans le Centre pour la protection des victimes de la traite des êtres humains. La commission prend note de la liste détaillée des services que ce centre offre aux enfants identifiés comme victimes; il s’agit notamment de: 1) la désignation d’un tuteur, de manière temporaire ou définitive; 2) l’attribution d’un logement; 3) le développement d’un plan de protection pour chaque enfant qui comprend systématiquement un soutien psychologique, des informations sur ses droits et une représentation juridique lors des procédures judiciaires; et 4) un soutien de plusieurs années à tous les enfants victimes de la traite aussi longtemps que le besoin s’en fait sentir, y compris après avoir atteint l’âge adulte.
La commission note, d’après les observations de la CATUS, que: 1) des mesures de protection plus efficaces sont nécessaires pour assurer l’application des lois et des plans d’action existants; 2) le gouvernement doit renforcer les capacités du Centre pour la protection des victimes de la traite des êtres humains, des institutions de protection sociale et de l’inspection du travail; 3) il est nécessaire de trouver un mécanisme pour traiter les données sur le nombre d’enfants identifiés comme des victimes de la traite et sur les types d’aides et de services prodigués par le Centre pour la protection des victimes de la traite des êtres humains et d’autres institutions de protection sociale; et 4) le gouvernement devrait augmenter le budget consacré à l’éducation, renforcer le système scolaire, et accroître le budget consacré aux services sociaux de base pour les enfants et leur famille, et celui consacré aux organismes chargés de l’application des lois, dont l’inspection du travail et l’inspection scolaire. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires en réponse aux observations de la CATUS. Elle le prie également de continuer à prendre des mesures pour prévenir la traite des enfants, y compris dans le cadre de la Stratégie nationale 2017-2022 de prévention et d’élimination de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et la protection des victimes, et son plan d’action. La commission prie en outre le gouvernement de continuer à renforcer les capacités du Centre pour la protection des victimes de la traite des êtres humains et d’autres institutions sociales en matière de réadaptation et d’intégration sociale des enfants victimes de la traite. Enfin, elle le prie de fournir des informations sur le nombre d’enfants identifiés en tant que victimes de la traite et sur les types d’assistance et de services fournis par le Centre pour la protection des victimes de la traite des êtres humains et d’autres institutions de services sociaux.
Alinéas a) et d). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants, et identifier les enfants particulièrement exposés à des risques et entrer en contact direct avec eux. Enfants en situation de rue, notamment les enfants roms. La commission prend note des indications du gouvernement selon lesquelles: 1) en 2022, il a préparé et signé un Plan de protection pour les enfants en situation de rue, dont l’objectif est de protéger les enfants contre la violence, les négligences et l’exploitation, et fournir un soutien et des alternatives aux enfants qui vivent et/ou travaillent dans les rues; 2) un projet de rapport consistant en une rapide évaluation du travail des enfants dans les rues en Serbie a été rédigé et sera diffusé une fois achevé; 3) il existe 7 fournisseurs agréés de services d’hébergement temporaire pour les enfants en situation de rue (4 foyers et 3 centres d’accueil); 4) en 2019, à Belgrade, un nouveau foyer pour enfants et adolescents s’est ouvert et peut accueillir jusqu’à 48 jeunes. Outre le foyer, une partie séparée de l’immeuble a été transformée en centre d’accueil et dispose d’équipements pour accueillir 30 enfants; et 5) le Conseil pour les droits des enfants, que le gouvernement a mis en place en 2018, est notamment chargé de suivre la situation en ce qui concerne la protection des droits des enfants en situation de rue et de coordonner le suivi de la mise en œuvre des dispositions nationales pour la prévention du travail des enfants.
Du reste, la commission note que, d’après le rapport que le gouvernement a présenté au Comité des droits de l’enfant des Nations Unies, grâce à l’application de mesures d’action positive, 12 427 étudiants roms (dont 56 pour cent de filles) ont été scolarisés dans des établissements secondaires. Il fait aussi référence à l’adoption de la Stratégie pour l’inclusion sociale des hommes et des femmes roms (2022-2030) (CRC/C/SRB/4-5, 30 mai 2022, paragr. 166 et 187). Il ressort de cette stratégie que: 1) l’une des raisons expliquant que l’abandon scolaire précoce est fortement répandu dans la population rom est que les enfants roms, souvent des garçons de familles qui subissent de fortes privations, abandonnent leur scolarité pour gagner de l’argent en travaillant dans l’économie informelle (collecte de matériaux recyclables, travail sur des marchés aux puces ou vente dans les rues, lavage de voitures) ou en mendiant, ce qui est une forme d’exploitation économique; 2) dans ses rapports annuels, le Médiateur a indiqué que la situation des enfants qui vivent et travaillent dans la rue n’a pas évolué et qu’aucune activité stratégique n’a été menée pour prévenir et contrôler leurs conditions de vie et de travail dans les rues, améliorer leur situation, et réduire et éliminer des facteurs de risque pour leur vie et leur travail; et 3) la stratégie prévoit des activités qui visent des groupes précis de la population rom pour faire face au travail des enfants, au travail forcé, aux enfants en situation de rue et à la traite des êtres humains.
Tout en prenant note des mesures prises par le gouvernement, la commission note que, selon la CATUS, le plus gros problème en Serbie a trait aux enfants qui travaillent dans les rues et au manque de foyers et d’institutions spécialisés qui pourraient fournir un environnement stimulant pour leur éducation, leur protection et leur inclusion dans l’environnement social. La CATUS insiste aussi pour que le gouvernement prenne des mesures pour éviter le retour des enfants dans les rues.
Par ailleurs, la commission note que, dans ses observations finales, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies se dit préoccupé par: 1) le taux de pauvreté qui demeure à un niveau élevé, en particulier chez les Roms; 2) le nombre limité de logements sociaux fournis aux Roms et aux autres personnes et familles défavorisées et marginalisées; et 3) le nombre très élevé d’enfants roms qui abandonnent leur scolarité dans le primaire et le secondaire, et leur nombre très faible qui suit un enseignement pré-primaire et secondaire (E/C.12/SRB/CO/3, 6 avril 2022, paragr. 54, 56 et 66). La commission rappelle que les enfants en situation de rue sont particulièrement exposés au risque d’être engagés dans les pires formes de travail des enfants et prie donc le gouvernement de continuer à prendre des mesures efficaces dans un délai déterminé pour empêcher que des enfants en situation de rue, et particulièrement des enfants roms, ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants, et pour protéger ces enfants. À cet égard, la commission prie le gouvernement de:
  • prendre des mesures spécifiques à cette fin, y compris dans le cadre du Plan de protection pour les enfants en situation de rue et de la Stratégie pour l’inclusion sociale des hommes et des femmes roms (2022-2030), et fournir des informations sur les mesures prises et les résultats obtenus;
  • partager les résultats de l’évaluation rapidedu travail des enfants dans les rues en Serbie et indiquer les mesures prises au titre du suivi de cette évaluation;
  • communiquer des informations sur la réadaptation et l’intégration sociale des enfants en situation de rue, y compris le nombre d’enfants qui ont bénéficié de possibilités d’éducation et de formation professionnelle.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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