ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2013, Publication : 102ème session CIT (2013)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - Fidji (Ratification: 2002)

Autre commentaire sur C087

Cas individuel
  1. 2019
  2. 2013

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

2013-Fiji-C87-Fr

Le gouvernement a communiqué les informations écrites suivantes.

S’agissant des règles de gouvernance transparentes, en mars de cette année, le projet de Constitution, qui garantit les principes universellement acceptés et les valeurs d’égalité et de justice à tous les Fidjiens, a été publié. Des consultations ont été tenues, et de nombreuses soumissions ont été reçues sur le projet de Constitution. Une fois qu’elles auront toutes été examinées et que les améliorations nécessaires auront été apportées, le projet de Constitution sera adopté d’ici à août 2013. Ce projet contient un chapitre complet sur les droits fondamentaux de l’homme, qui garantit la promotion et la protection des droits et libertés de tous les Fidjiens, y compris des travailleurs; pour la première fois aux Fidji, il existe des dispositions garantissant les droits sociaux et économiques. En vertu du projet de Constitution, des élections doivent être tenues le 30 septembre 2014 au plus tard. Le système de vote prévu par le projet de Constitution est un système de représentation proportionnelle à liste ouverte qui garantira la tenue d’élections parlementaires véritablement libres et équitables en 2014. Un Comité de coordination internationale, rassemblant des ambassadeurs et des représentants d’Australie, de République de Corée, des Etats-Unis d’Amérique, de France, d’Inde, d’Indonésie, du Japon, de Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni, ainsi que des représentants de l’Union européenne, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et du secrétariat du Commonwealth, s’est réuni aux Fidji le 10 juin 2013 pour discuter la question de l’assistance pour les élections. Il incombera au Comité de coordination d’organiser et de coordonner l’assistance des pays membres pour les élections de 2014. Ce partenariat avec la communauté internationale par le biais de ce comité aidera les Fidji à tenir des élections sans heurts, de manière transparente et apolitique, en utilisant les meilleures pratiques internationales, contrairement à ce qui s’est passé pour les élections précédentes.

En ce qui concerne les réformes du travail, des réformes importantes ont été entreprises par le gouvernement pour préserver l’emploi et créer des emplois, pour soutenir les industries essentielles pour l’économie et pour améliorer le niveau de vie de tous les Fidjiens. Cela comprend une diminution substantielle de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur les sociétés pour plus de 99 pour cent de toutes les organisations fidjiennes de travailleurs et d’employeurs. La législation du travail est en cours d’examen par les partenaires tripartites afin d’en garantir la conformité avec les instruments de l’OIT ratifiés. Un rapport de l’organisme tripartite sera présenté au ministère du Travail dans le courant de l’année. Le barème d’indemnisation des travailleurs est également en cours d’examen afin de mettre en place un système performant. Le gouvernement a également mis sur pied un Centre national pour l’emploi afin de créer des emplois.

S’agissant des procédures juridiques et institutionnelles, le gouvernement affirme que, dans le domaine des droits syndicaux et des libertés civiles, il existe des procédures d’enquête et judiciaires adaptées et efficaces pour garantir la protection des droits fondamentaux de tous les Fidjiens. Tous les cas d’infraction au droit pénal feront l’objet d’enquêtes et de poursuites indépendantes menées par le Bureau indépendant du Procureur général.

Dans le domaine de la liberté syndicale et liberté de mouvement, les règlements relatifs à l’état d’urgence ont été abrogés en janvier 2012. Tous, y compris les syndicats, les travailleurs, les partis politiques et les groupes de la société civile, peuvent se réunir dans un lieu public sans en demander l’autorisation.

En ce qui concerne les principes et droits fondamentaux au travail des agents de l’Etat, la loi garantit le droit de s’affilier à un syndicat et le droit de contester devant un tribunal toute décision préjudiciable pour l’agent concerné, y compris le licenciement. Des conventions collectives ont été récemment conclues entre le gouvernement et les syndicats du service public sur les salariés de la fonction publique.

S’agissant du décret sur les industries nationales essentielles, il convient de signaler que ce décret consacre les principes de la liberté syndicale et de la négociation collective. Les travailleurs des industries essentielles jouissent du droit d’organisation et du droit de constituer des unités de négociation de leur choix, du droit d’élire en toute indépendance leurs représentants, du droit de négociation collective, du droit de grève et du droit d’établir leurs propres procédures de règlement des différends. Ce décret ne s’applique qu’à certaines industries essentielles pour l’économie fidjienne et ne couvre pas la majorité des travailleurs aux Fidji, qui ne fait pas partie de ces industries. Il a été mis en œuvre avec succès sans ingérence du gouvernement. Dans une industrie essentielle, les travailleurs ont pu négocier des hausses de salaire allant jusqu’à 25 pour cent, la garantie d’augmentations salariales; ils participent également aux bénéfices. Quoi qu’il en soit, le projet de Constitution autorise le prochain Parlement, en 2014, à modifier ou à abroger toute loi existante, y compris celles mentionnées dans le rapport de la commission d’experts.

En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental fait état des réformes importantes que le gouvernement a entreprises pour mettre en place des règles de gouvernance transparentes et un système juridique fondé sur l’égalité et la justice. Ces réformes se caractérisent par la publication du projet de Constitution qui garantit à tous les Fidjiens les principes universellement acceptés, notamment une citoyenneté commune et égale pour tous, l’interdiction de toutes les formes de discrimination, un Etat séculaire, l’élimination de la corruption systémique, la protection et la promotion des droits de l’homme, un système judiciaire indépendant, un système de vote fondé sur le principe «une personne, une voix, une valeur». Lorsque le projet de Constitution a été présenté en mars 2013, tous les Fidjiens ont eu la possibilité de faire des propositions entre avril et mai. Pendant cette période, plus de 1 000 propositions écrites ont été enregistrées et plusieurs consultations publiques ont eu lieu dans toutes les Fidji. Ces propositions seront examinées en profondeur et des améliorations seront apportées au projet de Constitution si nécessaire, et il sera ensuite promulgué en août 2013. Le projet contient un chapitre important sur les droits de l’homme, notamment des dispositions interdisant l’esclavage et la servitude, le travail forcé et la traite des personnes; les traitements cruels et dégradants, ainsi que des dispositions garantissant le droit à une justice exécutive et administrative, la liberté d’expression, la liberté de réunion, la liberté syndicale, le droit à des pratiques d’emploi équitables, le droit à des conditions de travail humaines et appropriées, et le droit de tous les travailleurs de participer à l’économie et de percevoir un salaire minimum juste. Pour la première fois, la discrimination fondée sur l’état de grossesse et sur la situation maritale, entre autres motifs, est interdite, et le projet de Constitution accorde à tous les travailleurs fidjiens des droits socio-économiques, notamment des droits à la nourriture et à l’eau, au logement et aux services d’assainissement, à la santé et à la sécurité sociale. Les Fidji progressent considérablement dans la mise en place d’élections véritablement démocratiques et transparentes, qui doivent se tenir avant le 30 septembre 2014, conformément au projet de Constitution. En juillet 2012, les Fidji ont lancé un programme de registre électoral électronique. Sur les 900 000 habitants que compte le pays, plus de 500 000 personnes de plus de 18 ans ont été enregistrées. Par ailleurs, l’orateur s’est référé à un certain nombre de réformes importantes dans le domaine du travail. Par exemple, le gouvernement œuvre actuellement pour instaurer un salaire minimum; il a lancé un processus tripartite de révision de la législation du travail, dans le cadre du Conseil consultatif tripartite sur les relations d’emploi (ERAB). Celui-ci présentera un rapport courant 2013 au ministre du Travail pour examen. Le gouvernement envisage aussi d’adopter les amendements nécessaires à la législation du travail pour en assurer la conformité avec les nombreuses conventions de l’OIT que les Fidji ont ratifiées récemment.

Le représentant gouvernemental a indiqué que, étant donné les réformes constitutionnelles et du travail susmentionnées, de nombreux points soulevés dans le rapport de la commission d’experts ne reflètent pas correctement la situation juridique et factuelle des Fidji. Concernant les droits syndicaux et les libertés publiques, le gouvernement a déjà mis en place les processus qui garantissent la protection et l’application appropriées des droits fondamentaux à tous les travailleurs. Le non-respect du droit pénal et de l’ordre public donne lieu à des enquêtes et des poursuites judiciaires, conformément aux procédures juridiques établies. Toute plainte pour une infraction pénale présentée à la police fait l’objet d’une enquête approfondie et indépendante. Les poursuites pénales sont conduites par le Bureau du Procureur général sans aucune ingérence, et les décisions sont rendues par un organe judiciaire indépendant. L’orateur a rappelé que les règlements d’urgence d’ordre public (PER) ont été abrogés en janvier 2012. La loi sur l’ordre public a été améliorée pour y inclure des dispositions actualisées internationalement acceptées pour lutter contre le terrorisme et d’autres délits à l’ordre public. Les personnes ou les entités, quelles qu’elles soient, peuvent désormais former des associations, des organisations et se réunir dans des lieux publics sans avoir à obtenir une autorisation préalable. De fait, les syndicats, les partis politiques et les groupes de la société civile tiennent déjà régulièrement des réunions publiques, et expriment librement leurs opinions dans les médias. Toute forme de censure des médias a été supprimée. En ce qui concerne les fonctionnaires, le décret sur le service public (amendement) de juillet 2011 garantit expressément les principes et droits fondamentaux au travail de tous les fonctionnaires du gouvernement, y compris le droit de s’affilier à un syndicat. Les fonctionnaires ont aussi accès aux tribunaux pour faire réexaminer les décisions les concernant, comme l’a récemment décidé la Haute Cour des Fidji. En outre, le décret sur les industries nationales essentielles (ENID) vise à créer de la croissance, à favoriser la viabilité des industries essentielles sur le long terme et à protéger les emplois tout en garantissant les droits fondamentaux des travailleurs. Il reconnaît le droit des travailleurs de former et de rejoindre des unités de négociation de leur choix, qui peuvent être enregistrées comme syndicats, ainsi que le droit d’élire leurs propres représentants qui sont habilités à négocier collectivement. L’employeur est obligé de reconnaître ces représentants et de négocier avec eux. Ce décret est comparable aux lois similaires d’autres pays. Il y a lieu de se féliciter du fait que les travailleurs des industries essentielles ont pu librement s’organiser, constituer des unités de négociation et élire des représentants. Ces travailleurs ont conclu des conventions collectives avec les employeurs et conçu leurs propres processus de résolution des différends. Tout cela s’est fait sans l’intervention du gouvernement ou d’une autre partie.

Le représentant gouvernemental a réaffirmé le ferme engagement de son gouvernement de non seulement promouvoir et garantir les droits des travailleurs et des employeurs aux Fidji, mais aussi de maintenir et créer emplois et croissance économique. Considérant qu’il est important que l’OIT ait pleinement connaissance de la situation actuelle aux Fidji, l’orateur s’est réjoui d’annoncer que le Premier ministre a annoncé au Directeur général du BIT, en mai, que son pays acceptait d’accueillir une mission de contacts directs. Au vu de la promulgation prévue de la Constitution, ainsi que de la nécessité de poursuivre l’harmonisation des lois nationales et de préparer les élections parlementaires de 2014, le gouvernement se réjouit d’accueillir cette mission en décembre 2013, après finalisation de son mandat. Le gouvernement est actuellement en contact avec le Bureau pour finaliser ce mandat afin de veiller à ce qu’il soit acceptable par toutes les parties.

Les membres travailleurs ont pris note des commentaires formulés par l’Organisation internationale des employeurs (OIE) en 2012 et des discussions sur le mandat de la commission d’experts et sur le lien entre liberté syndicale et droit de grève qui ont eu lieu lors de la discussion générale. Après avoir rappelé les dispositions de la convention no 87, ils ont souligné que la liberté syndicale est un droit de l’homme et constitue une condition préalable à une négociation collective et à un dialogue social sains au profit des employeurs, des travailleurs et de la paix sociale. Cette commission et le Comité de la liberté syndicale (CLS) contribuent à résoudre les difficultés d’application de ce droit fondamental dans le monde entier. Les membres travailleurs ont également souligné qu’ils soutiennent pleinement la commission d’experts et les conséquences juridiques de ses commentaires ainsi que l’existence du droit de grève tel qu’il résulte de la lecture conjointe des articles 3 et 10 de la convention no 87.

Depuis les deux dernières années, le message de l’OIT et de ses mandants ne peut pas être plus clair: le gouvernement va dans la mauvaise direction et doit immédiatement revenir sur le droit chemin. Et pourtant, chaque fois, le gouvernement resserre davantage l’étau autour du mouvement syndical, adopte de nouvelles dispositions encore plus répressives, interdit les réunions et poursuit les syndicalistes exerçant des activités syndicales légitimes. Les membres travailleurs ont dressé un historique détaillé des nombreuses critiques formulées par les organes de contrôle de l’OIT, le Conseil d’administration du BIT et le Directeur général du BIT, en l’espace de seulement deux ans. En juin 2011, la commission avait appelé le gouvernement à «mettre en place, avec l’assistance du BIT, les conditions nécessaires à un véritable dialogue tripartite». La même année, la Commission de vérification des pouvoirs avait estimé que, délibérément, le gouvernement n’avait pas désigné le délégué des travailleurs, M. Anthony, lequel avait d’ailleurs été agressé par des membres des forces armées lors de son retour dans le pays. En août 2011, le Directeur général du BIT a publiquement exprimé sa profonde préoccupation au sujet des arrestations et des poursuites judiciaires à l’encontre de deux dirigeants syndicaux, et une mission de haut niveau s’est rendue dans le pays. En septembre 2011, le Directeur général a regretté la publication par le gouvernement du règlement d’application de l’ENID et lui a demandé de rétablir le dialogue avec les organisations de travailleurs et d’employeurs. En décembre 2011, la quinzième Réunion régionale de l’Asie et du Pacifique a fermement condamné les actes du gouvernement et l’a également exhorté à accepter une mission de contacts directs. La commission d’experts, dans l’observation qui aurait dû être examinée par cette commission en juin 2012, s’est déclarée profondément préoccupée par les nombreuses allégations d’agressions, de harcèlement et d’intimidation et les restrictions à la liberté syndicale résultant de l’ENID. En septembre 2012, la mission de contacts directs qui s’était rendue dans le pays a été expulsée. Puis, le Conseil d’administration de novembre 2012 a demandé au gouvernement d’accepter une nouvelle mission de contacts directs dotée du mandat précédemment convenu sur la base des conclusions et des recommandations du CLS (cas no 2723), et de trouver, avec les partenaires sociaux, des solutions appropriées et conformes, en droit et dans la pratique, aux principes de la liberté syndicale. Le CLS a souligné que le cas des Fidji est un des cinq cas les plus graves et urgents de violations en matière de droit d’organisation, de négociation collective et de dialogue social. Ayant noté l’absence de coopération de la part du gouvernement, le Conseil d’administration a, en mars 2013, renouvelé sa demande de trouver des solutions appropriées et d’accepter une mission de contacts directs. Le gouvernement n’a pas accepté que la mission se rende dans le pays à temps pour qu’un rapport puisse être soumis au Conseil d’administration de mars 2013, et il déclare maintenant qu’il pourrait recevoir cette mission en décembre. Tout ceci est inacceptable, car le gouvernement ne cherche qu’à retarder la discussion au sein du Conseil d’administration et trouvera certainement d’autres prétextes par la suite comme, par exemple, l’organisation des élections en 2014. Non seulement aucun progrès n’a été accompli pour mettre la législation et la pratique en conformité avec la convention mais la situation s’est encore aggravée, notamment en raison de modifications constitutionnelles susceptibles de porter atteinte aux droits fondamentaux des travailleurs, y compris à la liberté syndicale.

En ce qui concerne les actes de violence envers les syndicalistes, la commission d’experts a demandé au gouvernement de diligenter sans délai une enquête indépendante sur les actes allégués de violence, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de M. Felix Anthony, M. Mohammed Khalil, M. Attar Singh, M. Taniela Tabu et M. Anand Singh. Aucune mesure n’a été prise par le gouvernement, alors que, contrairement à ce qu’il a déclaré dans son rapport, des plaintes ont été déposées en juillet 2012. S’agissant des arrestations et de la détention de syndicalistes (M. Felix Anthony, M. Daniel Urai et M. Nitendra Goundar), ces affaires sont toujours en cours. En ce qui concerne la législation, un bon nombre des pouvoirs octroyés par le PER, qui a été abrogé, ont été repris et accrus dans le décret de 2012 sur l’ordre public (amendement) (POAD), et que, contrairement à ce qu’a demandé la commission d’experts, le gouvernement n’a pas abrogé le POAD. Tout en notant que l’article 8 du POAD a été suspendu pendant le processus de révision constitutionnel, les membres travailleurs se sont déclarés préoccupés par le fait que cet article sera bientôt de nouveau applicable et que d’autres dispositions répressives demeurent en vigueur. Non seulement l’ENID n’a pas été abrogé ni modifié, mais il semble que le gouvernement soit sur le point d’en étendre le champ d’application. S’agissant des dispositions de la promulgation de 2007 sur les relations d’emploi (ERP), que la commission d’experts demande au gouvernement de modifier depuis de nombreuses années pour les mettre en conformité avec la convention, le gouvernement n’a pris aucune mesure en ce sens et la réunion du sous-comité du Conseil consultatif tripartite sur les relations d’emploi (ERAB) qui s’est tenue en août 2012 à cette fin n’a donné aucun résultat.

Les membres travailleurs ont fait part de nouvelles préoccupations concernant le décret sur les partis politiques et le projet de nouvelle Constitution qui présentent des risques pour l’exercice de la liberté syndicale. Il est clair que la dictature fidjienne traite l’OIT avec mépris. La dérive autoritaire contre laquelle l’Organisation avait mis en garde dès 2011 n’a fait que s’accentuer, et aucune des informations communiquées par le gouvernement à la commission ne permet de penser que la situation va réellement changer.

Les membres employeurs ont déclaré que la commission d’experts a entrepris une analyse solide de cas, identifié comme un cas de «double note de bas de page» en 2012, sur la base de nombreux faits troublants. Ils ont convenu avec les membres travailleurs que le gouvernement n’est pas sur la bonne voie. S’agissant de la mission de contacts directs du BIT de septembre 2012, il est absolument inacceptable que le gouvernement sape le mandat accordé par la communauté internationale à cette mission. Tout en étant encouragés par la volonté du gouvernement d’accepter une nouvelle mission de contacts directs, les membres employeurs ont déclaré qu’ils n’en demeurent pas moins préoccupés par le calendrier prévu et la demande du gouvernement de renégocier le mandat de la mission, ce qui est, d’une manière générale, inacceptable. En outre, il y a lieu de partager les préoccupations de la commission d’experts au sujet des actes d’agression, de harcèlement, d’intimidation et des arrestations de dirigeants syndicaux dans l’exercice de leurs activités syndicales légitimes, ainsi qu’à propos du POAD qui impose des restrictions à la liberté de réunion et d’expression et prévoit des peines d’emprisonnement allant jusqu’à cinq ans pour l’organisation de réunions sans autorisation. Les membres employeurs ont exprimé leur préoccupation au sujet de certaines dispositions de l’ERP, en particulier celles qui limitent la gouvernance interne des syndicats, et notamment l’obligation pour les syndicalistes d’avoir travaillé dans la branche concernée pendant un certain temps. Se référant aux observations de la commission d’experts concernant certaines dispositions de l’ERP relatives aux actions revendicatives, les membres employeurs ont rappelé leur position sur le droit de grève. Enfin, ils ont déclaré qu’ils sont encouragés par le fait que la nouvelle Constitution reflétera les conventions fondamentales et ont exprimé l’espoir que l’ERAB sera en mesure de poursuivre ses travaux.

Le membre travailleur des Fidji a indiqué que, depuis 2009, le gouvernement réaffirme constamment à la communauté internationale son attachement aux droits des travailleurs et aux normes fondamentales du travail. Parallèlement à cela, il promulgue décret sur décret pour priver les travailleurs de leurs droits fondamentaux ou les limiter, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé. Ces décrets ont privé les travailleurs de la fonction publique de leur droit de négocier collectivement et d’obtenir réparation en cas de conflit ou de litige; ils ont aussi abrogé toutes les conventions collectives en vigueur et interdit le système de prélèvement automatique des cotisations syndicales. En outre, la mission de contacts directs a été expulsée dès qu’elle a entamé ses activités aux Fidji. De nombreuses tentatives, dont deux résolutions du Conseil d’administration appelant le gouvernement des Fidji à accepter cette mission, sont restées sans suite. Le gouvernement veut dicter à l’OIT les conditions dans lesquelles il accepterait une mission de contacts directs, comme le montre la dernière communication du Premier ministre à l’OIT. Le processus de révision de la Constitution tel qu’il avait été annoncé auparavant par le gouvernement a été abandonné. Le gouvernement a désormais pris entièrement en charge la réécriture de la Constitution des Fidji au mépris des 7 000 propositions que le public avait adressées à la Commission de révision de la Constitution. La liberté des médias reste entravée, et la communauté internationale, favorable à des élections libres et équitables, reste gravement préoccupée par ce processus. On attend toujours l’ouverture d’enquêtes sur les intimidations et les agressions à l’encontre de syndicalistes et d’autres citoyens, en particulier les assassinats et les autres violations des droits de l’homme, alors que les auteurs ont été identifiés. Le gouvernement s’est accordé une totale immunité pour les actes ou les crimes qui pourraient avoir été commis ou qui pourront l’être avant la première session du nouveau Parlement. Les discours du gouvernement en matière de responsabilité, de transparence et de lutte contre la corruption sont restés lettre morte.

L’ERAB s’est réuni et a décidé à l’unanimité de recommander au gouvernement d’abroger les décrets qui violent les conventions fondamentales de l’OIT. Il s’agit notamment du décret sur l’administration de la justice et son amendement, de l’ENID, du décret sur la fonction publique, du POAD, et du décret sur les médias. Les réunions de l’ERAB ont été brutalement interrompues sans explication et, jusqu’à présent, le gouvernement n’a tenu aucun compte de ses recommandations. Juste avant la Conférence, le gouvernement a repris les discussions sur la révision de la législation du travail, mais il a refusé d’abroger les décrets en question. Une révision de la législation du travail qui ait du sens n’est pas envisageable sans l’abrogation de ces décrets. Alors que le PER était abrogé en janvier 2012, le POAD était promulgué une semaine plus tard. Ce décret, encore plus draconien, réduit fortement les droits et les libertés et étend la définition de la trahison et de la sédition à pratiquement tous les actes ou propos hostiles au régime. L’obligation d’obtenir une autorisation pour la tenue de réunions a été temporairement levée mais la police et l’armée continuent de surveiller tous les rassemblements. Pour ce qui est du secteur public, le gouvernement prétend que ses salariés jouissent des mêmes garanties de recours que les autres salariés couverts par l’ERP, ce qui est démenti par les faits. Les fonctionnaires n’ont pas accès à un tribunal du travail ni à un tribunal arbitral indépendants. En outre, le 6 mai 2013, soit un mois avant la Conférence, le gouvernement a publié une circulaire instituant un groupe d’étude chargé de faire rapport sur la possibilité d’étendre la couverture de l’ENID au personnel de l’administration locale, y compris les jardiniers, agents de nettoyage et ceux chargés des menus travaux. L’industrie sucrière a aussi été avisée qu’elle pourrait dorénavant relever du champ d’application de l’ENID. Pour encore réprimer davantage les syndicats et les travailleurs, le gouvernement a promulgué, en janvier 2013, des décrets qualifiant tout responsable, salarié ou consultant d’un syndicat d’«officier public», un statut similaire à celui de fonctionnaire qui leur interdit par conséquent d’avoir une quelconque activité politique.

La plupart des syndicats arrivent à peine à survivre et certains ont même dû fermer leurs bureaux et fonctionner depuis des domiciles privés à cause des décrets précités. De nombreux syndicats sont dans l’impossibilité de fonctionner normalement et de répondre aux attentes de leurs membres, en raison des nombreuses restrictions qui leur sont imposées ainsi que des pertes financières résultant de la suppression du prélèvement automatique des cotisations. Il est interdit aux responsables syndicaux de pénétrer dans les lieux de travail. Aux Fidji, la négociation collective est maintenant un luxe que ne peuvent s’offrir que quelques syndicats. La plupart des travailleurs des Fidji n’ont plus le droit de négocier collectivement et, pour la première fois dans l’histoire du pays, on estime que 60 pour cent des travailleurs syndiqués vivent sous le seuil de pauvreté. Depuis la dernière Conférence, la situation s’est effectivement détériorée; le gouvernement reste déterminé à détruire le mouvement syndical aux Fidji.

Le membre employeur des Fidji a remercié le bureau de pays de l’OIT à Suva qui, inlassablement, s’efforce de réunir les partenaires sociaux pour qu’ils examinent, en ces temps difficiles, les questions concernant le monde du travail. Le 23 mai 2012, le Premier ministre a adressé un courrier au Directeur général du BIT pour expliquer la position des Fidji et les raisons pour lesquelles le pays a adopté les politiques qui ont suscité des préoccupations, et pour présenter la voie qu’il suit et ses objectifs, à savoir une constitution qui ne soit pas fondée sur l’appartenance ethnique, des élections libres et régulières et la modernisation de la législation du travail. A ce sujet, l’ERAB s’est réuni la première fois le 11 avril 2012 pour prendre les premières initiatives axées sur la réforme et la modernisation de la législation du travail des Fidji. Un sous-comité de l’ERAB a été constitué, et le BIT a fourni une assistance technique et financière aux partenaires sociaux afin de garantir la qualité des délibérations. Les partenaires tripartites se sont réunis à huit reprises entre le 16 mai et le 13 août 2012. Les réunions ont repris en 2013, du 15 au 17 mai, et les 27 et 28 mai. Le sous-comité a été institué dans le but spécifique d’aider l’ERAB à prendre les premières mesures pour réformer et moderniser la législation du travail actuellement en vigueur en tenant compte des huit conventions fondamentales de l’OIT et d’autres conventions que les Fidji ont ratifiées, et pour modifier l’ERP, afin d’incorporer dans le droit interne quatre conventions récemment ratifiées: la convention (no 142) sur la mise en valeur des ressources humaines, 1975, la convention (no 181) sur les agences d’emploi privées, 1997, la convention (no 183) sur la protection de la maternité, 2000, et la convention du travail maritime, 2006 (MLC, 2006). Le sous-comité de l’ERAB a réexaminé l’ENID et le décret sur les relations d’emploi (amendement) de 2011. D’une manière générale, on considère que l’ENID favorise les employeurs, et la Fédération du commerce et des employeurs des Fidji a reconnu que certains de ses membres sont favorables à l’ENID. Le décret sur les relations d’emploi (amendement) exclut tous les fonctionnaires du champ d’application de l’ERP et, par conséquent, des dispositions qui garantissent la négociation collective et des mécanismes de règlement des différends. Le sous-comité de l’ERAB a estimé que certaines dispositions de ces deux décrets ne sont pas conformes aux conventions nos 87 et 98. Il a convenu de recommander l’abrogation des deux décrets, tout en intégrant dans l’ERP en vigueur certaines des préoccupations légitimes du gouvernement qui sont reflétées dans l’ENID. Une instance tripartite examine les commentaires du gouvernement sur les modifications proposées; ses réunions ont été suspendues le 28 mai 2013 et devraient reprendre en juillet. L’orateur a estimé que le dialogue tripartite peut être utile aux partenaires sociaux, et assuré que les employeurs des Fidji continueront à y recourir pour traiter les questions du travail. Les mandants de l’OIT devraient faire preuve de compréhension et d’empathie à l’égard des Fidji: il ne serait pas dans l’intérêt de la communauté internationale d’isoler davantage les Fidji. En outre, le gouvernement devrait être félicité pour avoir entrepris de nombreuses réformes positives.

La membre travailleuse de l’Indonésie s’est dite préoccupée par le fait que les libertés publiques aux Fidji sont de plus en plus menacées. Elle a rappelé les problèmes soulevés dans l’observation formulée par la commission d’experts, par exemple le nombre important d’actes de violence, de harcèlement, d’intimidation et d’arrestation à l’encontre de dirigeants syndicaux et de membres de syndicats pour leur exercice du droit à la liberté syndicale. Soulignant en outre que le PER donne aux autorités les excuses nécessaires pour empêcher un syndicat de tenir une réunion publique, l’oratrice a demandé à la communauté internationale d’agir.

Le membre gouvernemental de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a rappelé que le gouvernement avait chargé l’ERAB et son sous-comité de réviser la législation du travail en vigueur pour en garantir la conformité avec toutes les conventions de l’OIT ratifiées, notamment la convention no 87. Le gouvernement a réalisé des avancées importantes pour résoudre les problèmes soulevés par la commission d’experts concernant l’application de la convention, comme le montrent les avancées de l’ERAB et de son sous-comité, qui se sont réunis 16 fois l’an dernier. Il y a lieu d’espérer que gouvernement tiendra dûment compte des commentaires de la commission d’experts, ainsi que des amendements recommandés par l’ERAB, afin de résoudre les problèmes concernant l’application de la convention. Le gouvernement a lancé un processus d’élaboration de la nouvelle Constitution ouvert à tous qui doit s’achever en août 2013. Celle-ci rétablira les libertés publiques des travailleurs et de l’ensemble de la population et ouvrira la voie à une élection démocratique d’ici septembre 2014. L’orateur a encouragé l’OIT à définir le mandat de la mission de contacts directs aux Fidji en des termes qui soient acceptables pour toutes les parties afin de les aider à résoudre, de manière objective et transparente, les problèmes soulevés.

Le membre employeur de l’Australie s’est dit préoccupé par les observations de la commission d’experts et a exprimé le soutien des employeurs australiens au secteur privé des Fidji, tant aux employeurs qu’aux employés ou à leurs représentants, dans les efforts qu’ils déploient afin de pouvoir travailler dans un environnement où règne une entière liberté. Ces dernières années, les employeurs australiens se sont à plusieurs reprises unis aux mandants de l’OIT pour manifester leur appui à l’adoption de mesures destinées à remédier aux violations de la liberté syndicale aux Fidji. Malheureusement, malgré l’action collective du Conseil d’administration, du Comité de la liberté syndicale et de la Réunion régionale de l’Asie et du Pacifique en 2011, les violations signalées par la commission d’experts n’ont pas été corrigées. Les violations sont graves, notamment les cas d’ingérence dans l’exercice des droits syndicaux et des libertés publiques; les actes de violence, d’arrestation et de détention; les restrictions à la liberté de réunion et à la liberté d’expression; et les diverses questions législatives. Même si les membres employeurs et les membres travailleurs ont des désaccords en ce qui concerne la convention no 87, il n’y a aucun flou concernant ce cas spécifique. Les violations sont avérées, il ne s’agit pas d’une question de nuance; elles sont graves et se poursuivent. L’orateur a exhorté la mission de contacts directs du BIT à retourner rapidement aux Fidji dans le cadre du mandat attribué par la communauté internationale.

La membre travailleuse du Japon a rappelé que l’ENID a désigné 11 entreprises dans le secteur des finances, des télécommunications, de l’aviation, et les services publics de distribution comme étant des industries essentielles. Dans le cadre de l’ENID, des conventions collectives ont été abrogées et des unités de négociation ont été supprimées, puisqu’elles ne remplissaient pas les nouveaux critères liés au nombre de membres minimum requis. L’ENID a aussi empêché les syndicats déjà en place de représenter leurs membres dans les négociations, et les nouvelles unités ne peuvent être enregistrées qu’avec l’accord personnel du Premier ministre. En outre, les dirigeants des syndicats réenregistrés doivent être employés par les entreprises qu’ils représentent, cette pratique étant incompatible avec le droit des travailleurs d’élire les représentants de leur choix. Ces mesures, ainsi que l’annulation des retenues de cotisations syndicales dans les industries essentielles, constituent un recul important des droits des travailleurs, et ont des effets extrêmement négatifs sur le fonctionnement du Syndicat des employés des secteurs bancaire et financier des Fidji. Se référant au projet de Constitution précédemment cité qui a été retiré, l’orateur a indiqué que ce projet contenait des dispositions favorables aux droits des travailleurs, notamment l’abrogation de l’ENID.

La membre travailleuse de l’Australie a indiqué que les travailleurs et les syndicats australiens sont profondément préoccupés et horrifiés de constater que la situation des droits de l’homme et des droits des travailleurs aux Fidji ne cesse de se détériorer. Des syndicalistes d’Australie et de Nouvelle-Zélande ont voulu se rendre aux Fidji en décembre 2011 pour rencontrer des syndicalistes, des groupes communautaires et d’autres personnes et essayer de se faire une idée plus précise de la situation qui y règne mais ils n’ont pas été autorisés à entrer dans le pays. Il est difficile de croire que le gouvernement a la moindre intention de restaurer les droits des syndicats et des travailleurs des Fidji ou la démocratie dans le pays. Le décret sur les partis politiques interdit à tout responsable syndical élu ou désigné, ou responsable de toute fédération, congrès, conseil ou organisme affilié à un syndicat de demander son affiliation, de devenir membre ou d’occuper une fonction au sein d’un parti politique. Le décret interdit également aux responsables syndicaux d’exprimer leur soutien à un parti politique. Le gouvernement a écarté par ailleurs le projet de Constitution préparé par la commission indépendante d’examen de la Constitution, qui demandait expressément l’abrogation de l’ENID. L’oratrice a demandé au gouvernement d’abroger sans délai le décret sur les partis politiques et autres décrets qui ont pour résultat de priver les citoyens des Fidji de leurs droits fondamentaux.

La membre gouvernementale des Etats-Unis s’est déclarée vivement préoccupée face à la situation de la démocratie ainsi que des droits de l’homme et des droits du travail dans le pays, notamment dans les domaines suivants: mesures prises par le gouvernement pour restreindre les droits des syndicats de se réunir, de s’organiser et d’exercer leurs droits fondamentaux; informations faisant état d’actes de harcèlement et de discrimination; restrictions à la liberté de réunion et à la liberté d’expression; et lacunes de la législation se traduisant par des violations graves des principes de la liberté syndicale, du droit de se syndiquer et de la négociation collective. Il est décevant de constater que la mission de contacts directs de septembre 2012 n’ait pas été autorisée à terminer son travail. Le mandant de cette mission a été fixé en fonction de procédures établies de longue date pour les missions de contacts directs du BIT, et incluent la garantie pleine et entière que toutes les parties concernées et tous les points de vue seront entendus de manière objective et impartiale. C’était l’occasion de clarifier les faits sur le terrain et d’aider le gouvernement, en collaboration avec les partenaires sociaux, à trouver des solutions appropriées. Etant donné que le gouvernement est en train d’adopter une nouvelle constitution, et qu’il procède à un examen de la législation sur le travail, le conseil et l’assistance du BIT seraient particulièrement utiles. Il est donc regrettable que le gouvernement ait de nouveau proposé que la mission de contacts directs soit repoussée jusqu’à décembre 2013. L’oratrice a donc recommandé instamment au gouvernement de coopérer de manière constructive avec le BIT en vue d’envoyer une mission de contacts directs dans le pays le plus tôt possible, dont le mandat lui permettra d’aider comme il convient le gouvernement.

La membre travailleuse de la France a déclaré que les services publics sont très sérieusement menacés aux Fidji. Sous prétexte de réduire les dépenses, le gouvernement a supprimé plus de 2 000 emplois dans la fonction publique de façon unilatérale en abaissant l’âge de la retraite de 60 à 55 ans, sans consultation ni négociation avec les syndicats. Les contrats des travailleurs de la fonction publique sont des contrats individuels, qui ne sont pas négociés collectivement et qui offrent moins de garanties. Les syndicats de la fonction publique sont privés de la possibilité de représenter ou défendre leurs membres car ils sont maintenant exclus du champ d’application de l’ERP. Le décret sur le service public (amendement), dont le gouvernement se prévaut, n’aborde en fait que la question du traitement égal. Il n’apporte aucune garantie en ce qui concerne la négociation collective ou les mécanismes compensatoires. La circulaire publiée par le gouvernement, qui prévoit la mise en place de procédures de médiation et de conciliation dans la fonction publique, n’a aucune effectivité puisqu’aucune commission indépendante n’a été établie pour traiter des plaintes concernant les mutations, les nominations, les promotions et les mesures disciplinaires. Aucune mention n’est faite de la participation des syndicats dans ce processus. En outre, contrairement à ce qu’a affirmé le gouvernement, en s’appuyant sur le décret sur le service public (amendement), dans la pratique, les possibilités de recours n’existent pas pour les travailleurs de la fonction publique.

Le membre gouvernemental de la Nouvelle-Zélande a indiqué que, en dépit de légers écarts par rapport à la feuille de route qui avait été annoncée, les Fidji ont fait des progrès dans la préparation des élections de l’année prochaine, notamment l’enregistrement de quatre partis politiques et l’intensification de la couverture médiatique et des débats publics sur les questions politiques. La poursuite de ces efforts contribuera à rendre ces élections crédibles et fera que leur résultat sera accepté par la population des Fidji. Ceci suppose de garantir que les libertés fondamentales, dont les droits du travail, seront respectées durant ce processus et également consacrées dans la Constitution, qui est en cours d’élaboration. Il est regrettable que la mission de contacts directs du BIT n’ait pas pu encore retourner aux Fidji. L’orateur a réitéré le soutien de son gouvernement et sa volonté d’aider les Fidji à rétablir la démocratie.

Le membre gouvernemental du Japon a indiqué que son gouvernement encourage le gouvernement à promouvoir la démocratisation grâce à un dialogue constant. Les Fidji devraient recevoir la mission de contacts directs du BIT, et ainsi montrer à la communauté internationale le processus de démocratisation en cours, notamment les récents progrès sur la voie de la promulgation d’une nouvelle constitution. L’orateur a salué l’intention du gouvernement d’accepter une visite de la mission de contacts directs. Il a exprimé l’espoir que le gouvernement la recevrait le plus rapidement possible, dans le cadre d’un mandat préalablement convenu et fondé sur la décision du Conseil d’administration.

Le membre travailleur du Brésil a rappelé qu’aux Fidji plusieurs décrets empêchent les travailleurs des secteurs public et privé d’exercer leurs droits syndicaux. Les activités syndicales légitimes peuvent être considérées comme délictueuses dans la mesure où elles peuvent être assimilées à des activités terroristes. Les enseignants ont été exclus du champ d’application de la législation du travail et ne disposent donc pas de moyens de recours lorsqu’ils sont victimes d’injustice, de discrimination ou d’inégalité de traitement. Les professeurs syndiqués sont contrôlés et harcelés sans cesse et leurs conversations sont placées sur écoute. Les enfants et les jeunes grandissent dans un milieu scolaire dans lequel ils sont parfaitement conscients que leurs professeurs sont privés des droits fondamentaux. En 2012, le gouvernement a décidé unilatéralement de réformer le système de pensions des professeurs, lesquels ont été obligés d’abandonner leur emploi dans les écoles et les institutions éducatives. Ces travailleurs qualifiés n’ont pas été remplacés ou, quand ils l’ont été, ils ont été substitués par des personnes sans formation préalable, ce qui est d’autant plus désastreux pour la qualité de l’enseignement. Un système éducatif de qualité, avec des professeurs bien formés, bénéficiant de conditions de travail décent, et pouvant exercer leurs droits syndicaux et en bénéficier, est indispensable pour le développement productif de toutes les nations. Les étudiants doivent évoluer dans un contexte de respect des droits civils, et par conséquent de respect des droits syndicaux.

Le membre gouvernemental de l’Australie a déclaré que le gouvernement et les partenaires sociaux de son pays ont de nouveau exprimé leur préoccupation face à la persistance des violations des droits de l’homme et des droits du travail aux Fidji. La législation contrevient clairement aux principes qui sont à la base du droit à la liberté syndicale et à la négociation collective, tels que consacrés par les conventions nos 87 et 98. Il a réitéré l’appel lancé par l’OIT et la communauté internationale au gouvernement en vue de l’abrogation des lois qui violent les conventions de l’OIT. Les décrets restreignant sévèrement les droits des travailleurs de s’organiser librement sont toujours en vigueur. En particulier, le POAD reprend des dispositions fondamentales du PER qui ont été retirées le 7 janvier 2012, allant ainsi à l’encontre des recommandations de la mission de haut niveau d’août 2011. L’orateur a salué la décision des autorités fidjiennes d’autoriser la réunion biennale du Congrès des syndicats des Fidji, en mai 2012, à condition que la police soit présente. Les travailleurs fidjiens sont parmi les plus touchés par les décrets imposés par le gouvernement. Les cas de harcèlement, d’arrestation et d’intimidation des représentants syndicaux constituent un affront au principe fondamental de la liberté syndicale. Le gouvernement australien et les partenaires sociaux exhortent vivement le gouvernement fidjien à répondre en détail aux observations de la commission d’experts, ainsi qu’à mettre en œuvre ses recommandations et celles du Comité de la liberté syndicale afin d’être en conformité avec les obligations qui découlent des conventions de l’OIT ratifiées. L’orateur a également exhorté le gouvernement à œuvrer avec le BIT pour organiser une mission de contacts directs le plus rapidement possible, reflétant le mandat de l’OIT.

Le membre gouvernemental du Canada a noté avec une vive préoccupation le niveau de répression de la liberté syndicale et de la protection du droit d’organisation aux Fidji en droit et en pratique. Les allégations de violence, de harcèlement et d’intimidation, l’arrestation de syndicalistes et le contexte d’impunité, fruit de l’absence d’enquêtes et de sanctions contre les auteurs d’actes de cette nature, sont alarmants. Il est également préoccupant de constater que la mission de contacts directs de 2012 n’ait pas été en mesure de poursuivre ses travaux. En outre, les violences signalées à l’égard d’un dirigeant syndical en représailles aux déclarations faites par un collègue à la session de 2011 de la Conférence constituent une menace sérieuse pour la liberté de parole de tous les délégués et pour le fonctionnement de la Conférence. L’orateur a exhorté le gouvernement à prendre des mesures concrètes et fermes pour garantir et protéger la liberté de parole, la liberté syndicale et le droit d’organisation. Le gouvernement doit également être instamment prié de coopérer avec le BIT pour définir et mettre en œuvre les mesures nécessaires à la satisfaction de ses obligations en vertu de la convention, et notamment pour effectuer les modifications législatives qui s’imposent.

Le représentant gouvernemental, se référant à la mission de contacts directs de 2012, a indiqué que son mandat était trop vague, indéfini et qu’il n’était pas axé sur les résultats. Le gouvernement est résolu à accepter une mission de contacts directs qui pourra rencontrer toutes les parties, et proposer des solutions adaptées à la situation réelle en droit et en pratique. Le fait que le mandat de la mission en 2012 ne soit pas acceptable ne doit pas empêcher une mission d’avoir lieu en 2013. A cet égard, le gouvernement a réitéré son engagement à accueillir une mission de contacts directs du BIT en décembre 2013, sur la base d’un mandat acceptable pour tous. S’agissant des restrictions imposées aux réunions publiques, toutes les personnes et entités peuvent aujourd’hui s’organiser, se syndiquer et se rencontrer dans quelque endroit public que ce soit sans avoir besoin d’une autorisation. Des syndicats, des partis politiques et des groupes de la société civile tiennent régulièrement des réunions publiques, et expriment librement leurs points de vue dans la presse. Les allégations selon lesquelles des procès-verbaux des réunions et des interventions doivent être établis sont fausses. Quant aux questions soulevées à propos de plusieurs textes législatifs, les dispositions relatives aux graves violations que renferme la loi sur l’ordre public ne s’appliquent qu’à des infractions telles que la trahison, la sédition et le dénigrement racial et religieux. Qui plus est, la définition du terme «terrorisme» dans la loi sur l’ordre public est très semblable à la législation d’un grand nombre d’autres pays. Par ailleurs, le décret sur les partis politiques n’enlève aucun droit aux travailleurs. Ce décret cherche à maintenir la neutralité politique des fonctionnaires, mais n’empêche pas les travailleurs qui ne sont pas responsables syndicaux de s’affilier à un parti politique. Le décret introduit en outre une plus grande transparence et responsabilité de la part des partis politiques. Le projet de Constitution, qui prévoit les droits fondamentaux civils et politiques ainsi que les droits socio-économiques, consacre également le droit de toute personne concernée par une décision exécutive et administrative de faire appel de cette décision devant une juridiction ou devant un tribunal indépendant. Le projet de Constitution prévoit également des dispositions qui contribueront à la création de règles de gouvernance transparentes. S’agissant des libertés publiques, dès lors qu’une plainte ou une allégation concernant une infraction pénale est déposée, cette plainte fait l’objet d’une enquête approfondie, des éléments de preuve étant recueillis afin de déterminer si des poursuites doivent être engagées. Ces charges doivent être prouvées au-delà de tout doute raisonnable, et toutes les infractions aux lois feront l’objet d’une enquête conformément aux procédures juridiques établies, sur la base d’éléments de preuve produits devant un tribunal.

Les membres travailleurs se sont dits extrêmement préoccupés par la situation syndicale aux Fidji. Le gouvernement n’a pas répondu concrètement aux points soulevés dans les observations de la commission d’experts. Le gouvernement continue de trouver de nouveaux moyens pour réprimer l’exercice par les travailleurs de leurs droits par des décrets exécutifs pris unilatéralement que les tribunaux ne peuvent pas réviser. Le projet de Constitution proposé par le gouvernement pourrait pérenniser certaines de ces mesures. Ce cas est grave et urgent car la liberté syndicale est malmenée et le sera davantage lorsque les dispositions qui ont été suspendues du POAD seront à nouveau en vigueur et exigeront une autorisation préalable du gouvernement pour tenir des réunions syndicales, autorisation qui a été rarement accordée dans le passé. Par conséquent, les membres travailleurs ont demandé instamment au gouvernement: i) d’accepter que la mission de contacts directs du BIT, telle que définie dans la résolution que le Conseil d’administration a adoptée en 2012, ait lieu suffisamment tôt pour que le Conseil d’administration puisse examiner son rapport à sa session d’octobre 2013; ii) de faire le nécessaire pour que soient abandonnées sans retard toutes les poursuites intentées contre M. Daniel Urai et M. Nitendra Goundar; iii) d’ouvrir ex officio une enquête indépendante dans les plus brefs délais sur les actes allégués d’agression, de harcèlement et d’intimidation à l’encontre de MM. Felix Anthony, Mohammed Khalil, Attar Singh, Taniela Tabu et Anand Singh, et de diligenter une enquête au sujet de la plainte déposée en 2012 par M. Felix Anthony; iv) d’abroger ou de modifier la loi sur l’ordre public afin que le droit de réunion puisse être librement exercé; et v) de charger le sous-comité de l’ERAB d’établir une procédure tripartite pour amender, dans un délai de six mois, les lois et décrets en vue de les rendre conformes aux obligations découlant des conventions nos 87 et 98. Les membres travailleurs ont demandé au bureau de l’OIT à Suva de faire le nécessaire pour faciliter le dialogue entre les employeurs, les travailleurs et le gouvernement afin de rétablir la pratique des relations professionnelles, en particulier dans l’industrie sucrière. En outre, ils ont demandé que les conclusions de ce cas soient incluses dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

Les membres employeurs ont fait observer que les faits et éléments de ce cas ne semblent pas avoir évolué depuis que la commission d’experts l’a examiné. Les conclusions de la commission devraient uniquement traiter la question du respect par le gouvernement de la convention et pas la situation politique du pays, ou l’application d’autres conventions. Etant donné les divergences entre les informations communiquées par le gouvernement et celles contenues dans le rapport de la commission d’experts, il est important de dépêcher une mission de contacts directs du BIT pour évaluer les faits sur place. Il est intolérable qu’un Etat Membre puisse tout simplement renvoyer une mission de contacts directs qui avait été invitée, au motif d’un désaccord sur son mandat, d’autant plus que celui-ci correspond au mandat standard fixé par le Conseil d’administration. Les membres employeurs ont donc demandé au gouvernement d’accepter la mission de contacts directs, investie de son mandat initial et non d’un mandat fixé ou négocié par le gouvernement. Les membres employeurs ont convenu également que les conclusions de ce cas devraient être incluses dans un paragraphe spécial du rapport de la commission.

Conclusions

La commission a pris note de la déclaration du représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

La commission a observé que les questions en suspens dans ce cas portent sur de nombreuses et graves allégations de violation des libertés fondamentales de syndicalistes, notamment des arrestations, des détentions et des agressions, ainsi que des restrictions à la liberté d’expression et de réunion. Elle a noté par ailleurs les problèmes relatifs à des divergences entre la législation du travail, plus particulièrement le décret sur l’ordre public (amendement) (POAD), la promulgation sur les relations d’emploi et le décret sur les industries nationales essentielles, et les dispositions de la convention. En outre, la commission a rappelé la résolution adoptée en novembre 2012 par le Conseil d’administration qui demandait au gouvernement d’accepter une mission de contacts directs suivant le mandat précédemment accepté sur la base des conclusions et recommandations adoptées par le Comité de la liberté syndicale dans le cas no 2723.

La commission a pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle le projet de Constitution assure la protection des droits de l’homme et des droits socio-économiques ainsi que l’indépendance du pouvoir judiciaire, et que le gouvernement prépare activement les élections démocratiques de septembre 2014. Par ailleurs, elle a pris note de l’engagement du gouvernement à mener à terme la révision de la législation du travail avec les partenaires sociaux dans le cadre du Conseil consultatif tripartite sur les relations d’emploi (ERAB) afin de la mettre en conformité avec les conventions internationales du travail ratifiées, et à veiller à ce que des enquêtes soient ouvertes et des poursuites engagées de manière indépendante par le Bureau indépendant du Procureur général pour tous les cas de violation des droits fondamentaux de citoyens fidjiens. Le représentant gouvernemental a indiqué que celui-ci serait heureux d’accueillir, en décembre 2013, la mission de contacts directs de l’OIT sur la base d’un mandat acceptable pour tous.

La commission n’a pas abordé le droit de grève dans ce cas, les employeurs n’étant pas d’accord avec le fait que la convention no 87 reconnaisse le droit de grève.

La commission a pris note avec préoccupation du décret sur les partis politiques qui a été récemment adopté et de certaines dispositions du projet de Constitution, dont il est allégué qu’elles menacent l’exercice de la liberté syndicale et les libertés fondamentales des syndicalistes et des responsables d’organisations d’employeurs. Rappelant le lien intrinsèque existant entre les libertés syndicale, d’expression et de réunion, d’une part, et la démocratie et les droits de l’homme, d’autre part, la commission a instamment prié le gouvernement d’entreprendre d’office et sans autre délai une enquête indépendante sur les allégations d’actes de violence, de harcèlement et d’intimidation commis à l’encontre de Felix Anthony, Mohammed Khalil, Attar Singh, Taniela Tabu et Anand Singh, et d’abandonner les chefs d’accusation retenus contre Daniel Urai et Nitendra Goundar. La commission a instamment prié le gouvernement de modifier le POAD de manière à garantir le libre exercice du droit de réunion, et a espéré fermement que l’ERAB finalise la révision des lois et décrets de telle sorte que les modifications qui s’imposent puissent être apportées d’ici à la fin de l’année afin de les rendre totalement conformes à la convention.

La commission a rappelé avec regret que la mission de contacts directs n’avait pas pu avoir lieu comme prévu en septembre 2012. Encouragée par la récente déclaration du gouvernement se disant favorable à une nouvelle mission de contacts directs, la commission a exprimé le ferme espoir que cette mission, mandatée par le Conseil d’administration du BIT, pourra avoir lieu dès que possible afin d’être en mesure de rendre compte au Conseil d’administration en octobre 2013.

La commission a réitéré l’espoir que cette mission sera en mesure d’aider le gouvernement et les partenaires sociaux à trouver des solutions à toutes les questions en attente soulevées par la commission d’experts. Elle a prié le gouvernement de soumettre cette année un rapport détaillé à l’examen de la commission d’experts, et a exprimé le ferme espoir d’être en mesure de constater, l’an prochain, que des progrès substantiels auront été réalisés.

La commission a décidé d’inclure ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport.

La représentante gouvernementale a indiqué que son gouvernement a pris bonne note des conclusions et que, sur la base de toutes les déclarations écrites et orales, il les examinera en détail avant de communiquer ses commentaires par écrit.

© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer