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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2016, Publication : 105ème session CIT (2016)

Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 - El Salvador (Ratification: 2006)

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Cas individuel
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 2016-El Salvador-C087-Fr

Une représentante gouvernementale a indiqué que sa participation à la Conférence, en sa qualité de ministre du Travail et de la Prévoyance sociale, démontre l’importance que son gouvernement donne aux activités de l’OIT, notamment les progrès en matière de liberté syndicale, la promotion du travail décent, le dialogue social et la consultation tripartite, lesquelles sont la pierre angulaire de sa gestion et une garantie pour les droits du travail. Concernant l’application de la convention et les questions soulevées dans l’observation de la commission d’experts, il est regrettable que, à ce jour, le bureau du Procureur général du pays n’ait pas été en mesure de déterminer les causes et d’identifier les responsables de l’assassinat de M. Abel Vega. Plusieurs réunions ont été réalisées, tant avec le Procureur général précédent qu’avec l’actuel, et les deux ont démontré la volonté de résoudre le cas et de mener à bien l’investigation. Cependant, il est reconnu que le gouvernement prend des mesures pour combattre le crime et poursuivre les responsables de délits, avec la finalité de donner au peuple salvadorien de meilleures conditions de sécurité. Tous les efforts seront pris pour que le cas de M. Vega ne reste pas impuni. En ce qui concerne les 19 décrets adoptés pour étendre et démocratiser la représentation des organisations d’employeurs et de travailleurs dans les instances tripartites et paritaires, une analyse a été réalisée, et il a été constaté qu’à aucun moment ces mesures ont limité l’autonomie des organisations d’employeurs ou des organisations syndicales, dans la mesure où il s’agit de légers changements dans le processus d’élection. Au contraire, ces instances fonctionnent pleinement avec la participation de diverses organisations d’employeurs et de travailleurs. S’agissant des institutions tripartites, il est regrettable que l’Association nationale de l’entreprise privée (ANEP) continue de manifester son désaccord car cette organisation détient actuellement la représentation active dans ces institutions. Afin de garantir cette participation, le gouvernement réalise annuellement d’importantes dépenses afin d’octroyer des indemnités aux représentants du secteur privé et aux syndicats. Cependant, afin de donner réponse à l’observation de la commission d’experts, des consultations auront lieu au sujet des réformes demandées.

En ce qui concerne l’activation du Conseil supérieur du travail (CST), la résolution du différend constitue une priorité du gouvernement, cependant celle-ci n’est pas possible en raison du désaccord persistant entre les organisations syndicales les plus représentatives du pays. A cet égard, plusieurs mesures ont été prises dont notamment la demande d’une médiation pour laquelle le BIT a fourni une assistance technique pour qu’une personne externe complètement neutre puisse contribuer à l’identification d’une solution consensuelle au différend. La médiation a eu lieu en février dernier, avec la participation du BIT et d’un consultant qui a mené des réunions avec les diverses fédérations et confédérations qui ont présenté leurs listes respectives de représentants au CST. A la demande des organisations syndicales le consultant a constaté dans son rapport la complexité du problème et la difficulté d’arriver à un accord. Le consultant a aussi indiqué que ce différend devait se résoudre de manière directe avec le ministère du Travail en raison de son caractère autonome et qu’une médiation n’était pas nécessaire. En vue de la mise en œuvre des suggestions du consultant, des réunions bilatérales avec chaque organisation de travailleurs ont eu lieu la première semaine d’avril de cette année avec le bureau du procureur pour la défense des droits de l’homme en tant que médiateur et le BIT. Une réunion conjointe a également été convoquée et facilitée par le bureau du procureur et le BIT afin de trouver une entente et un accord, mais à ce jour aucune solution n’a été trouvée. Face à l’absence d’un mécanisme d’élections des représentants du secteur syndical, il a été demandé aux organisations participantes de créer une commission transitoire pour la révision et la formulation d’une proposition d’un nouveau règlement concernant spécifiquement la procédure d’élection des représentants des organisations syndicales. Cette dernière fut toutefois rejetée par les organisations syndicales demandeuses dans ce cas, considérant que l’unique manière de réviser le règlement doit s’effectuer au sein du CST. Bien que la commission ait exhorté de ne pas exiger une liste unique, il est important de ne pas oublier en ce qui concerne le droit à l’autonomie des organisations syndicales, que ne pas prendre compte de la représentation des organisations au différent et convoquer sans accord commun de toutes les parties serait complétement contreproductif. A aucun moment le gouvernement n’a fait obstacle à l’activation du CST. Au contraire, des solutions viables, démocratiques et conformes aux conventions de l’OIT et à la norme en vigueur ont été cherchées afin de résoudre la situation. Le gouvernement continuera ses efforts à cet égard.

Une récente décision de la chambre constitutionnelle de la cour suprême a analysé un recours en amparo présentée par les organisations demandeuses afin d’être nommées comme les uniques représentants syndicaux au sein du CST et que la demande des autres organisations syndicales représentatives du pays ne soit pas prise en compte. Cette dernière a indiqué dans sa décision no 951-2013 que, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale n’a pas le pouvoir de désigner les membres du CST, de modifier la liste des organisations de travailleurs en question, ni de les destituer lorsqu’ils font déjà partie dudit conseil. La chambre a également considéré que la présentation d’une liste unique des nominés au conseil est le résultat espéré d’un processus d’élections démocratiques et représentatives que mènent à bien les fédérations et les confédérations syndicales afin de garantir la participation des travailleurs dans le CST. Elle a aussi insisté sur le fait que, en exigeant un accord concernant la procédure d’élection et la prévalence d’une liste définitive de nominés, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale n’impose pas une exigence ou une condition arbitraire qui porte atteinte à l’exercice de la liberté syndicale des organisations mentionnées ou directement aux personnes nominées ou à certaines d’entre elles dans les termes déjà mentionnés, pour cette raison le recours en amparo n’est pas recevable. En mêmes temps, les mesures et les demandes d’accompagnement et de coopération technique du BIT concernant l’identification de solutions tant pour le CST que pour d’autres questions formulées par la Commission de l’application des normes vont se poursuivre. Les demandes relatives à la réforme de plusieurs dispositions de la Constitution, du Code du travail et de la loi sur le service public sont à l’étude. Récemment, le Groupe parlementaire du «Frente Farabundo Martí» (FMLN) de l’Assemblée nationale a présenté un projet de réforme des articles 204, 211, 212, 219, 529 et 533 du Code du travail afin d’étendre les droits concernant la liberté syndicale. Ces initiatives seront complétées avec la coopération technique qui sera demandée au BIT et les équipes de travail interinstitutionnel qui ont été créées à cet égard. S’agissant des rejets des demandes d’enregistrement des syndicats, de juin 2015 à cette date 45 organisations syndicales ont obtenu la personnalité juridique. Seulement 5 organisations ne l’ont pas obtenue en raison de non-application des conditions prévues par la loi. Ce qui ne signifie pas qu’ils ne puissent pas refaire une demande. Pour cette raison, la loi prévoit six mois pour modifier et représenter la demande. Les demandes des 45 organisations mentionnées ont été traitées dans une moyenne de 20 à 25 jours ouvrables. El Salvador s’engage à appliquer les conventions de l’OIT, tant la convention no 87 que d’autres instruments qui contribuent à l’avancement du droit du travail dans le pays et à la promotion du dialogue social, ce qui est cohérent avec la politique du gouvernement, ainsi qu’avec d’autres espaces de discussion sur des sujets d’intérêt national comme, par exemple, le Conseil de sécurité des citoyens et de la vie commune, où participent plusieurs acteurs nationaux dont l’ANEP, et d’autres relatifs à la promotion de l’investissement et le développement économique inclusif du pays. Plusieurs mesures ont été prises pour l’accès à l’emploi digne et décent: par le biais du système national de l’emploi, 35 248 emplois ont été créés par 3 000 entreprises privées, dont 75 pour cent pour des jeunes et 45 pour cent pour des femmes. Deux cent vingt-trois personnes ont été formées en matière d’employabilité et 27 241 inspections ont été réalisées, ce qui a permis de couvrir plus de 500 000 travailleuses et travailleurs. L’aspiration est de construire un pays productif, éduqué et sécuritaire pour la population salvadorienne, ce pourquoi des politiques publiques, dont le centre d’intérêt est le bien-être et l’amélioration des conditions de vie des gens, sont créées. Le ministère du Travail et de la Prévoyance social s’engage à mettre tout en œuvre afin d’appliquer les observations et recommandations formulées par la commission d’experts, en conformité avec la législation en vigueur et la vision de l’OIT concernant la valorisation des droits des travailleuses et travailleurs, la création d’emploi décent, l’emploi productif et l’engagement ferme d’unir les efforts avec les travailleurs et les employeurs pour appliquer de manière efficace la liberté syndicale dans le pays.

Les membres travailleurs ont exprimé à nouveau, s’agissant de la situation politique et des assassinats, leur grande inquiétude au sujet des questions relatives à la convention no 87 en El Salvador. Rappelant que la situation ne s’est pas améliorée depuis 2015, ils ont indiqué que le pays demeure le foyer d’une intense violence et incitent le gouvernement à poursuivre ses efforts afin de la réduire. Cette situation est à mettre en lien avec la liberté syndicale. Les violences à l’égard des représentants des travailleurs sont courantes, menées par des gangs, particulièrement dans les zones franches d’exportation. En janvier 2010, M. Victoriano Abel Vega, secrétaire général du Syndicat des travailleurs et des employés municipaux de la municipalité de Santa Ana, a été assassiné. La commission d’experts a condamné cet acte, le Comité de la liberté syndicale (CLS) en a été saisi et la Commission de l’application des normes en 2015 a prié le gouvernement de prendre sans délai toutes les mesures pour identifier les responsables. Malgré l’accélération de la procédure, les autorités n’ont toujours pas identifié les auteurs et les complices de cet acte abject. Le cas no 2957 ainsi que 8 autres cas sont également examinés devant le CLS. Ils concernent la détention d’un représentant syndical et des actes antisyndicaux. Se référant à l’article 2 de la convention no 87, les membres travailleurs sont d’avis que la réglementation nationale ne respecte pas cet article, en particulier le délai nécessaire pour introduire une nouvelle demande lorsqu’un enregistrement a été refusé; la possibilité pour un travailleur de s’affilier à plusieurs organisations; la question de la procédure d’enregistrement; et la nécessité pour l’organisation syndicale de certifier le statut de leurs membres. S’agissant du délai pour une nouvelle demande, l’article 248 du Code du travail prévoit qu’une nouvelle demande de constitution d’un syndicat doit être formulée au moins six mois après la précédente. En 2008, la commission d’experts avaient pris acte que le ministère était en train de mettre en place une commission spéciale chargée d’élaborer une proposition de réforme à cet égard. En 2009, le gouvernement a indiqué s’être engagé, comme le démontre le rapport connu sous le nom de «Livre blanc», à réformer la législation du travail dans le pays, et à modifier l’article 248 du Code du travail. Un projet de décret en ce sens a été soumis au Conseil supérieur du travail pour consultation. A la suite de la Commission de l’application des normes de 2015, le gouvernement a fait état d’une proposition de réforme, pourtant, en 2016, l’article 248 du Code du travail demeure inchangé. Vu les engagements récurrents du gouvernement et l’absence de modification de l’article 248 du Code du travail, les membres travailleurs expriment leur inquiétude et souhaitent que ce problème soit réglé dans les plus brefs délais. S’agissant de la possibilité d’affiliation à plusieurs organisations, ils ont rappelé la nécessité de modifier l’article 204 du Code du travail qui interdit de s’affilier à plus d’un syndicat et est en contradiction avec la convention no 87. A la suite de l’examen par cette commission en 2015, bien que le gouvernement ait fait part d’un projet de réforme de l’article 204 du Code du travail, aucune information au sujet d’une modification législative n’a été fournie. Pour ce qui est de la procédure d’enregistrement, l’article 219 du Code du travail dispose que, dans le cadre d’une telle procédure, l’employeur doit certifier le statut de salariés des membres fondateurs. Comme en 2015, les membres travailleurs demandent au gouvernement de prendre des mesures pour modifier cette disposition, par exemple en permettant au ministère du Travail d’établir le certificat. Pour conclure, les membres travailleurs ont attiré l’attention de la commission sur la non-conformité des articles 47 de la Constitution, 225 du Code du travail et 90 de la loi sur la fonction publique avec l’article 3, paragraphe 1, de la convention no 87. En effet, ces articles disposent qu’il faut être «salvadorien de naissance» pour être membre du conseil de direction d’un syndicat. Rappelant que la législation nationale devrait permettre aux travailleurs étrangers d’accéder aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil, les membres travailleurs constatent que, à ce jour, le gouvernement n’a pas modifié les dispositions susmentionnées. Tout en exprimant leur vive inquiétude à ce sujet, ils soulignent qu’une modification législative rapide est plus que nécessaire et espèrent que l’assistance technique que le gouvernement a sollicitée pourra y contribuer.

Les membres employeurs ont exprimé leurs remerciements pour les informations communiquées par le gouvernement en précisant que le groupe des employeurs juge ce cas important. La convention no 87 a été ratifiée en 2006. La Commission de l’application des normes a examiné le cas en 2015 et le CLS a examiné l’application de la convention à plusieurs reprises. En 2015, la Confédération syndicale internationale (CSI), l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et l’ANEP ont transmis des observations à propos de la convention. Dans sa dernière observation en date, la commission d’experts se réfère à diverses questions et fait suite aux conclusions de l’examen du cas par la Commission de l’application des normes en 2015. S’agissant de l’assassinat du dirigeant syndical Victoriano Abel Vega en 2010, qui fait l’objet du cas no 2923 dont est saisi le CLS, plus de cinq ans sont passés sans que les coupables aient été identifiés. Il faut insister auprès du gouvernement pour qu’il prenne les mesures nécessaires afin de déterminer les responsabilités pénales et pour que soient punis au plus vite les auteurs de ce crime.

Quant au respect de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs pour ce qui est de la désignation de leurs représentants dans les organes décisionnels paritaires ou tripartites, c’est le Président qui continue à nommer sur base de ses critères les représentants du secteur privé dans ces organes. Depuis la discussion de ce cas devant la Commission de l’application des normes en juin 2015, la situation s’est dégradée et la personne qui a été nommée au conseil d’administration de la Banque de développement d’El Salvador n’est pas représentative du secteur privé. Pour ce qui est des 19 décrets adoptés le 22 août 2012 (les décrets nos 81 à 99) et qui prévoient que les représentants du secteur des employeurs devant siéger dans les conseils d’administration seront élus et nommés par le Président de la République à partir d’une liste ouverte de candidats des organisations patronales ayant la personnalité juridique en bonne et due forme, ces dernières devant sélectionner leurs candidats en fonction de leur règlement d’ordre intérieur, il est déplorable que rien n’ait été fait pour sortir de cette situation. Il s’agit d’un acte d’ingérence très grave qui compromet l’indépendance du secteur privé et constitue une violation de l’article 3 de la convention no 87. De même, est repoussé l’argument du gouvernement suivant lequel l’ANEP n’est pas représentative des petites et moyennes entreprises du pays. En matière de représentativité, le critère à prendre en compte est celui appliqué par l’OIT. Comme l’a indiqué la commission d’experts, il faut que des progrès soient faits, en droit comme dans les faits, en concertation avec les organisations de travailleurs et d’employeurs, pour modifier les 19 décrets adoptés le 22 août 2012.

Quant au fait que des représentants des travailleurs n’aient pas été nommés au Conseil supérieur du travail (CST), le règlement de ce conseil indique que ce sont les fédérations et confédérations qui peuvent désigner leurs représentants. En 2013, deux fédérations ont présenté une liste de représentants, mais le gouvernement est depuis à la recherche d’un consensus. En novembre 2015, le gouvernement a sollicité la médiation du BIT, laquelle est restée sans résultat. Cette situation constitue aussi une violation de l’autonomie des organisations de travailleurs et de l’article 3 de la convention no 87. Il faut appliquer le critère de la plus grande représentativité en se basant sur des critères précis, prédéfinis et objectifs. Il existe d’autres sujets de préoccupation, comme les difficultés que suscite la fixation du salaire minimum national. La question s’est politisée et des actes de violence se sont produits au sein de l’organe de discussion et au siège même de l’ANEP. Par ailleurs, outre la violation de la convention no 87, la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, est également concernée de par la distorsion et l’absence de mise en œuvre et de promotion du dialogue social dans le cadre du système de relations de travail du pays, ce qui enlève toute légitimité aux normes et pratiques du pays en matière de travail. La demande directe de la commission d’experts mentionne la question du droit de grève. La position du groupe des employeurs sur la question est connue et il s’y tient. Cependant, il est préoccupant que non seulement des informations soient demandées au gouvernement mais aussi que des lignes d’action lui soient suggérées quant à la modification de divers aspects de sa législation.

La membre travailleuse d’El Salvador a fait part de son indignation face à l’indolence de l’Etat salvadorien dans l’enquête sur l’assassinat de M. Victoriano Abel Vega. Six ans plus tard, les responsables ne sont toujours pas traduits en justice. M. Vega a reçu des menaces de mort de la part de maires de l’ouest du pays en raison de ses activités visant à organiser les travailleurs dans les municipalités et que l’on tente de dévier l’enquête vers la délinquance de droit commun perpétrée par les gangs. Autre exemple de la culture antisyndicale qui prévaut dans le pays. Celui de Juan Antonio Hernandez, secrétaire général de la Fédération syndicale générale des travailleurs du Salvador qui, le 25 décembre 2015, a été attaqué dans son local syndical par des hommes fortement armés, blessé et conduit dans une zone contrôlée par les gangs. Sa voiture a été retrouvée dans un lieu où la police stocke les objets saisis. Le gouvernement continue de s’ingérer dans l’élection des représentants des travailleurs au sein des organes de dialogue tripartite, ce qui a entravé le fonctionnement du Conseil supérieur du travail. Contrevenant clairement à l’autonomie syndicale, le gouvernement refuse de faire prêter serment aux membres de la liste qui, au cours du processus électoral, ont obtenu légalement la majorité des voix des fédérations et des confédérations et exige une liste unique. La médiation de l’OIT sollicitée par le ministère du Travail a permis d’établir une série de recommandations très positives qui ne pourront être mises en place qu’une fois le Conseil supérieur du travail établi. De la même manière, la décision rendue par la Cour suprême de justice dans ce cas ne pourra être mise en œuvre que lorsque le conseil sera fonctionnel. Elle pourrait en outre contrevenir à la convention car elle conclut qu’un consensus devrait être recherché lors des futures élections. Comme il n’est pas établi, le conseil ne peut ni rendre des avis sur les avant-projets de réforme de la législation du travail et de la prévoyance sociale ni recommander au gouvernement de ratifier les conventions de l’OIT qu’il juge appropriées. Le gouvernement a récemment présenté à l’Assemblée législative une proposition de réforme du système des pensions qui n’a pas fait l’objet de consultations avec les partenaires sociaux et il refuse d’établir une table de négociation tripartite qui, avec l’aide du BIT, pourrait définir un nouveau système des pensions basé sur la ratification de la convention (nº 102) concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952. L’exercice de la liberté syndicale est également entravé par l’établissement, dans le Code du travail, d’une obligation visant à organiser chaque année l’élection des membres de tous les comités directeurs de syndicats, en sus des exigences fantasques qui sont imposées chaque jour par le ministère du Travail, par l’intermédiaire du Département national des organisations sociales. En outre, à partir du 1er juin, il faudra présenter une liste de présence dûment signée par les personnes présentes aux assemblées générales, de section, fédérales ou confédérales sous peine pour les organisations de se voir refuser l’enregistrement. A l’heure actuelle, de nombreux syndicats se retrouvent sans dirigeant parce qu’ils ne respectent pas les exigences qui n’entrent pas dans le cadre des normes qui sont expressément énoncées dans le Code du travail. Le ministère du Travail est en train de s’arroger la possibilité d’interpréter, à sa convenance, le contenu de différentes décisions rendues par la Cour suprême de justice, et de légiférer en établissant de nouvelles règles sans réformer la législation du travail. Le gouvernement doit réformer la législation nationale afin d’éliminer les entraves à la liberté syndicale, notamment celles qui ont été mentionnées précédemment, et faire en sorte de réduire le nombre de membres requis pour constituer un syndicat afin que les employés municipaux des mairies comptant un nombre d’employés inférieur à 35 puissent jouir de leurs droits syndicaux. En outre, la condition selon laquelle il faut être salvadorien de naissance pour pouvoir être dirigeant syndical empêche les travailleurs migrants du Honduras et du Nicaragua qui travaillent dans le secteur de la construction et dans l’agriculture d’être dirigeant syndical. Par ailleurs, ils ne peuvent s’affilier qu’à un seul syndicat. Les Salvadoriens se heurtent à des violations systématiques de leur liberté syndicale commises par des institutions publiques et privées dans le pays.

A la demande du Syndicat des employés du service du procureur pour la défense des droits de l’homme d’El Salvador (SEPRODEHES), une plainte a été déposée, le 30 mai 2016, auprès du BIT pour violation des conventions nos 87, 98, de la convention (no 135) concernant les représentants des travailleurs, 1971, et de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, à l’initiative des titulaires du service du procureur, ce qui constitue un fait sans précédent, le service du procureur étant l’organisme créé en vertu des accords de paix aux fins de la protection des droits de l’homme. Le gouvernement est en train de faire le vide dans les membres des organisations syndicales afin de favoriser d’autres organisations et ainsi affaiblir l’autonomie et la liberté de ces organisations. Ces cas soulignent qu’il n’existe pas de volonté de promouvoir le dialogue social ni de politique du travail démocratique. Les travailleurs doivent mener en priorité un combat pour le travail décent, et des conditions doivent être établies pour contribuer à éliminer la précarité du travail. L’oratrice a conclu en indiquant qu’il est nécessaire d’établir des relations professionnelles et de respecter le cadre légal, de manière à garantir la promotion de la liberté syndicale, la négociation collective et le renforcement des relations professionnelles; d’élaborer des conventions collectives entre employeurs et travailleurs par branche d’activité, sous les auspices des pouvoirs publics dans le cadre de la politique nationale de l’emploi; et d’installer et renforcer le Conseil supérieur du travail en tant qu’instance du tripartisme pour la discussion de la politique de l’emploi et des questions qui ont trait au marché du travail.

Le membre employeur d’El Salvador a résumé les demandes formulées par le secteur employeur au gouvernement en ce qui concerne le non-respect de la liberté syndicale (cas nos 2930 et 2980); demandes pour lesquelles il existe des recommandations du CLS datant de 2015. Ces violations, qui ont été portées à la connaissance de la commission d’experts, constituent la base des observations qu’elle formule au sujet de l’application de la convention. En violation de la convention, le gouvernement d’El Salvador a présenté à l’Assemblée législative des projets de législation qui ont donné lieu à l’adoption de 19 décrets réformant les institutions autonomes du pays, dans le but de donner au Président de la République le pouvoir discrétionnaire de nommer les représentants du secteur privé dans l’administration de ces institutions, et particulièrement ceux qui sont minoritaires. Un changement de gouvernement a eu lieu mais, malheureusement, la nouvelle ministre du Travail a maintenu la même posture que le précédent gouvernement, à savoir de ne pas respecter les dispositions du règlement du Conseil supérieur du travail. Elle continue à exiger le consensus de tous les syndicats malgré le fait qu’en 2015 cette commission a demandé clairement au gouvernement, dans ses conclusions, de ne pas appliquer la méthode du consensus dans l’élection des représentants des travailleurs. Il importe aux employeurs de mentionner ces irrégularités dans le processus d’élection des représentants des travailleurs, dans la mesure où elles ont des répercussions sur les organisations privées et que, depuis 2013, le Conseil supérieur du travail n’a pas pu être convoqué. Ainsi, la question des institutions autonomes, dans lesquelles les représentants privés continuent à être nommés par le Président de la République, n’a pas pu être résolue. De l’avis des employeurs, le fait que le gouvernement ne convoque pas de réunions du Conseil supérieur du travail relève du stratagème pour éviter que ce conseil n’adopte des accords, en particulier sur la façon de parer à la violation de la liberté d’association des employeurs, et pour que les représentants des employeurs dans les 19 organisations autonomes aient la possibilité d’être nommés librement. En juin 2015, au sein de cette commission, les employeurs ont sollicité l’assistance technique du BIT dans le but de rechercher un médiateur qui puisse aider la ministre du Travail à relancer le Conseil supérieur du travail en tant qu’institution découlant des accords de paix destinée à promouvoir le dialogue social tripartite sur les questions relatives au travail. En février 2016, un consultant du BIT a visité le pays en vue de rechercher une solution internationale au problème. Cependant, malgré les résultats de cet échange et les conclusions de la Commission de l’application des normes de 2015, la ministre du Travail a poursuivi sa stratégie de paralysie du Conseil supérieur du travail, prétextant le fait que, en dépit de leurs efforts, les organisations syndicales ne sont pas parvenues à un accord.

L’orateur a également souhaité dénoncer d’autres actions relevant de l’ingérence du gouvernement dans les organisations du travail, qui entravent le fonctionnement des entités tripartites. Selon les médias, les autorités du ministère du Travail ont manipulé à leur guise le registre des personnes affiliées aux entités syndicales, qu’elles soient proches ou non du gouvernement. Ces derniers mois, le gouvernement a retardé l’adoption des accords relatifs à l’augmentation du salaire minimum, par son refus d’assister aux réunions du Conseil national sur le salaire minimum, empêchant ainsi que le quorum ne soit atteint à temps. Il a lancé une campagne politique, qu’il a accompagnée de manifestations de rue d’activistes proches du parti FMLN. Enfin, il y a un mois, la ministre du Travail a laissé un groupe d’activistes pénétrer dans les locaux du conseil susmentionné, lesquels ont menacé les membres du secteur employeur, affirmant qu’ils connaissaient leur lieu de résidence. Ceci est une manifestation de haine de classes. L’orateur a indiqué qu’un accord entre employeurs et travailleurs sur le salaire minimum vient d’être obtenu et il a exprimé l’espoir que le ministère du Travail ne ferait pas obstacle à son approbation par le Président de la République. Pour conclure, il a demandé à ce qu’une mission de contacts directs aille vérifier les nombreux manquements commis par le gouvernement d’El Salvador.

Le membre gouvernemental des Pays-Bas, s’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses Etats membres ainsi que de la Norvège, a tenu à rappeler les engagements pris par le gouvernement d’El Salvador au titre du pilier sur le commerce de l’accord d’association entre l’UE et l’Amérique centrale pour la mise en œuvre effective des conventions fondamentales de l’OIT, y compris de la convention no 87. Bien que des progrès aient été accomplis en El Salvador ces dernières années, le gouvernement doit être appelé à traduire rapidement en justice les auteurs de l’assassinat du dirigeant syndical M. Abel Vega, crime resté non élucidé pendant cinq ans. Le retard pris dans l’enquête et dans la sanction des auteurs engendre un climat d’impunité. Le gouvernement devrait être encouragé à respecter l’autonomie des organisations de travailleurs et d’employeurs dans la désignation de leurs représentants dans les instances décisionnelles paritaires et tripartites. Il devrait également accélérer le processus de médiation afin que des représentants des travailleurs puissent être désignés auprès du Conseil supérieur du travail. La modification de la législation concernant le droit de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s’affilier à ces organisations est essentielle pour parvenir à la pleine application de la convention. Saluant la demande du gouvernement de recevoir l’assistance technique du BIT, l’orateur a exprimé l’espoir que des actions concrètes puissent débuter prochainement. En conclusion, l’UE et ses Etats membres sont toujours résolus à collaborer avec le pays pour lui permettre de traiter les questions soulevées par la commission d’experts.

Le membre gouvernemental du Mexique, s’exprimant au nom du groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a remercié le gouvernement pour les informations qu’il a fournies au sujet de l’exercice de la liberté syndicale et de la protection du droit d’association dans le cadre de la Constitution, de la législation nationale et de la convention. En ce qui concerne l’observation formulée par la commission d’experts, il convient de souligner les procédures et les enquêtes de police qui sont menées ainsi que l’action des services du Procureur général de la République et le rôle de facilitateur joué par le gouvernement, avec l’appui de l’OIT, dans le conflit existant au sein du Conseil supérieur du travail en organisant des réunions conformes à la réglementation et en promouvant la médiation. En outre, le gouvernement se dit ouvert et décidé à dialoguer avec tous les secteurs sociaux et économiques. Réaffirmant son engagement en faveur du respect de la liberté syndicale, le GRULAC a exprimé l’espoir que le gouvernement poursuivra ses efforts pour faire appliquer la convention.

Le membre gouvernemental du Panama a appuyé la déclaration du GRULAC et souligné que le gouvernement d’El Salvador est résolu à respecter les engagements et à donner suite aux recommandations de la commission d’experts. En sa qualité de président en exercice du Conseil des ministres de l’Amérique centrale et de la République dominicaine, le gouvernement du Panama s’est dit préoccupé par l’inclusion d’El Salvador, ainsi que du Guatemala et du Honduras, dans la liste des cas individuels. Il n’y a toujours pas de critères objectifs et transparents pour la sélection des cas, ce qui met d’autant plus en évidence le déséquilibre de la représentation régionale. L’assistance fournie par le BIT aux pays de la région de l’Amérique centrale ne semble pas être valorisée puisque trois des sept pays qui composent la région sont inclus dans la liste des cas individuels. Les pays de la région reconnaissent les résultats positifs du soutien de l’OIT et de la promotion des échanges d’expériences en vue d’une meilleure application des conventions internationales du travail. Dans le cadre du Conseil des ministres du Travail de l’Amérique centrale et de la République dominicaine, un plan d’action régional comportant des éléments intersectoriels a été adopté. L’orateur a salué l’action menée dans ce cadre en ce qui concerne la législation du travail, l’élimination du travail des enfants, le dialogue social, la politique de l’emploi et la mobilité professionnelle.

Un observateur représentant l’Organisation internationale des employeurs (OIE) a fait part de sa profonde préoccupation face aux violations de la convention par le gouvernement d’El Salvador et, concrètement, par son ingérence grave et continue dans l’autonomie des organisations patronales et syndicales ainsi que par la désignation arbitraire par le Président de la République des membres du secteur employeur dans des institutions tripartites. En 2012, 19 décrets ont été adoptés unilatéralement et sans consultation dans le but de renforcer ces prérogatives arbitraires qui se traduisent par une ingérence dans l’autonomie des partenaires sociaux et qui sont contraires à la convention. Le gouvernement fait preuve de mépris vis-à-vis du véritable organe de dialogue social qu’est le Conseil supérieur du travail, dont les activités sont suspendues depuis 2013 pour de simples motifs de procédure, sous prétexte de l’absence de critères de représentativité. L’orateur s’est également référé à la protection insuffisante des locaux de l’ANEP, qui est l’organisation la plus représentative du secteur employeur dans le pays, à l’absence de suivi des recommandations du CLS sur cette question et à l’absence de considération des conclusions de cette commission. Voilà des actes dont on ne peut faire abstraction. Le gouvernement devrait prendre des mesures immédiates pour corriger cette situation et présenter un rapport détaillé à la commission d’experts afin que celle-ci l’examine à sa prochaine session. Par ailleurs, étant donné la répétition des violations de la convention et le fait que la liberté syndicale et d’association est de moins en moins respectée, il est important d’envoyer une mission de contacts directs en El Salvador et d’inscrire ce cas dans un paragraphe spécial.

Le membre travailleur du Guatemala a souligné que la situation en El Salvador en ce qui concerne les atteintes à la liberté syndicale est comparable à la situation régnant au Guatemala. Parmi les violations constatées, on relève le licenciement d’une syndicaliste élue, la secrétaire générale du Syndicat de la municipalité de San Martín, et les licenciements par l’entreprise Compañía Salvadoreña de Seguridad de C.V. COSASE de dirigeants du Syndicat des travailleurs des entreprises de sécurité privée (SITESPRI). Dans les secteurs de la restauration, des transports publics et de la sécurité privée, créer un syndicat constitue presque un délit. Les journées de travail dépassent parfois douze heures pour un salaire inférieur au salaire minimum et les heures supplémentaires ne sont pas payées. Beaucoup de travailleurs n’ont pas d’assurance sociale et ne peuvent pas cotiser au système de pensions. Les conflits sociaux dans le secteur public découlent de l’absence de dialogue social et de politique de gestion démocratique des relations professionnelles. Les dirigeants syndicaux du secteur public subissent des réductions salariales arbitraires et sont l’objet de sanctions qui tiennent au fait que des congés syndicaux leur sont refusés. Certains dirigeants comme ceux du Syndicat des travailleurs de l’Hôpital Bloom (SITHBLOOM) ne touchent plus leurs salaires depuis six mois. Le ministère du Travail refuse d’inscrire le contrat collectif du travail qui a été négocié par le Syndicat de la Commission nationale des micro et petites entreprises alors que toutes les dispositions légales ont été respectées. L’orateur a conclu en soulignant que le Syndicat des travailleurs du secrétariat à l’inclusion sociale a dénoncé le fait que la direction de ce secrétariat a commis les actes suivants: propos irrespectueux, abus d’autorité, mises à l’écart, changements d’affectation, agressions physiques et inégalités salariales entre les travailleurs.

La membre gouvernementale de Cuba a adhéré à la déclaration du GRULAC et a accueilli favorablement les informations transmises par le gouvernement d’El Salvador, ainsi que sa volonté de tenir ses engagements vis-à-vis de l’OIT. Il y a lieu de souligner les développements en cours, dont le processus de médiation en vue de réactiver le Conseil supérieur du travail, les mesures législatives et la demande d’assistance formulée par le gouvernement. Il convient que l’OIT maintienne sa coopération et son assistance technique pour que le gouvernement poursuive ses efforts.

La membre employeuse de la Belgique a rappelé que la liberté syndicale est un principe fondamental de l’OIT et a considéré qu’il serait préférable d’utiliser, en français et en espagnol, le concept de «liberté d’association» comme cela est le cas en anglais. Les organisations de travailleurs et d’employeurs bénéficient d’une autonomie d’organisation, de gestion et de fonctionnement. Les pratiques étatiques qui consistent à brider l’autonomie des organisations patronales, comme c’est le cas en El Salvador où le gouvernement désigne de manière autoritaire les représentants des employeurs dans les organes tripartites, doivent être condamnées. Le pouvoir exécutif ne peut se substituer aux partenaires sociaux, et les autorités publiques doivent s’abstenir de toute entrave à l’exercice légal du droit des organisations d’employeurs et de travailleurs d’élire librement leurs représentants. La suspension par le gouvernement du Conseil supérieur du travail est une violation de l’article 3 de la convention. L’oratrice a demandé à ce que l’indépendance des représentants des employeurs et des travailleurs soit garantie, car elle constitue le prérequis essentiel à un dialogue social de qualité à tous les niveaux.

Le membre gouvernemental du Honduras a adhéré à la déclaration du GRULAC, soulignant que le gouvernement a manifesté sa volonté d’assumer ses engagements et de continuer de donner effet aux recommandations de la commission d’experts.

Le membre travailleur de l’Uruguay a rappelé que la commission examine ce cas pour la deuxième année consécutive et a déploré que la médiation n’ait porté aucun fruit. Il a fait part de sa solidarité avec les travailleurs d’El Salvador face aux plaintes pour violence à l’encontre de dirigeants syndicaux, aux menaces qui entravent le développement des organisations et aux licenciements antisyndicaux. Les conditions exigées pour l’enregistrement des syndicats sont excessives et constituent une forme d’ingérence indue de la part du gouvernement. S’il est vrai qu’il existe des mécanismes et des organes qui devraient être propices à un dialogue social de qualité, des problèmes sont toujours constatés en ce qui concerne la définition des formes de représentation au sein de ces instances. Ainsi, le Conseil supérieur du travail ne peut donner son avis sur les questions concernant le travail puisqu’il n’est pas opérationnel. La collaboration technique avec le BIT est nécessaire pour parvenir à des modifications de la législation, convenues avec les parties prenantes, afin d’établir les critères de la détermination de la représentativité qui soient transparents et s’inscrivent dans le principe d’indépendance face au gouvernement.

Le membre employeur du Guatemala s’est déclaré très préoccupé par l’intervention de la ministre du Travail car, en grande partie, elle a repris les arguments invoqués lorsque ce cas a été examiné en 2015 par la commission. Ce cas est examiné par la commission pour la deuxième année consécutive et la situation qui est dénoncée sévit depuis quatre ans. Malgré les commentaires des organes de contrôle de l’OIT, le gouvernement ne se montre pas disposé à remédier à cette situation, et les conclusions et recommandations de ces organes sont ignorées par les autorités salvadoriennes. La crise s’est apparemment gravement détériorée et porte atteinte à l’intégrité des organisations d’employeurs d’El Salvador. Il s’agit concrètement des pouvoirs que s’arroge le Président de la République pour désigner les représentants des organisations d’employeurs au sein des organes bipartites et tripartites. Le fait de placer ces organes sous le contrôle du gouvernement constitue un acte grave d’ingérence et, par là-même, une violation flagrante de la convention. L’orateur a demandé qu’une mission de contacts directs soit envoyée dans le pays et que les conclusions concernant le cas figurent dans un paragraphe spécial du rapport de cette commission.

La membre gouvernementale de la République dominicaine a adhéré à la déclaration du GRULAC et a apprécié les informations fournies à la commission par la ministre du Travail. Le gouvernement d’El Salvador fait preuve de bonne volonté et déploie des efforts pour tenir les engagements pris dans le cadre de l’OIT au travers d’actions déterminées en vue de respecter les normes, de promouvoir les droits fondamentaux et de renforcer le dialogue social et la négociation. Le BIT doit continuer d’accompagner le gouvernement et de lui fournir une assistance technique.

La représentante gouvernementale a déclaré avoir écouté avec attention toutes les interventions, qui correspondent bien aux différents intérêts représentés. En ce qui concerne l’assassinat de M. Abel Vega, le gouvernement, qui a demandé au bureau du Procureur général d’enquêter, souhaite unir tous les efforts avec les partenaires sociaux pour élucider cette affaire. Le gouvernement a fait du dialogue social la base de son action pour développer des politiques consensuelles, comme le montre la table ronde récemment établie pour fixer un programme commun avec l’ANEP, organisation qui participe à tous les espaces de dialogue tripartite du pays. Les travaux menés portent actuellement sur l’identification, à brève et moyenne échéance, de solutions en ce qui concerne la représentation des syndicats au Conseil supérieur du travail. Pour ce faire, les organisations concernées doivent foncièrement souhaiter participer, et leur représentation doit être garantie sur un pied d’égalité. Le gouvernement est prêt à ne pas tenir compte des restrictions à l’exercice des droits syndicaux, dans la limite des prescriptions et procédures nécessaires pour sauvegarder la sécurité juridique. De la même manière, les processus de désignation des participants aux instances paritaires ne vont pas à l’encontre de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs; les instances tripartites sont régies par des règlements approuvés par les administrations précédentes, avec l’accord des partenaires sociaux. Ces cinq dernières années, le gouvernement a travaillé pour permettre l’exercice plein et entier du droit à la liberté syndicale, comme le montre le fait que plus de 200 000 personnes sont syndiquées et qu’il existe plus de 450 organisations syndicales actives. Le gouvernement espère que les mesures prises dans le cadre du projet appuyé par l’OIT et que le système généralisé de préférences de l’UE contribueront à continuer de progresser dans la mise en œuvre de la convention, comme cela est déjà le cas grâce à la coopération avec l’OIT.

Les membres employeurs ont exprimé leur profonde préoccupation concernant le fait que, malgré le temps écoulé, il n’est pas possible de constater de réelles avancées pour remédier aux violations de la convention. Par conséquent, dans ses conclusions, la commission doit: 1) prendre note du manque de progrès réalisés concernant l’autonomie des organisations de travailleurs et d’employeurs pour nommer leurs représentants dans les instances décisionnelles paritaires et tripartites, et exhorter le gouvernement à prendre sans délai les mesures nécessaires pour modifier les 19 décrets adoptés en août 2012; 2) prier instamment le gouvernement de réactiver sans délai le Conseil supérieur du travail, instance principale du dialogue social et de la consultation tripartite dans le pays; 3) enjoindre le gouvernement de garantir une meilleure protection des locaux de l’ANEP, l’organisation la plus représentative du secteur employeur; 4) demander au gouvernement qu’il communique des informations sur chaque avancée dans son rapport pour examen par la commission d’experts lors de sa prochaine réunion; et 5) face à la gravité des violations et au manque d’action décidée de la part du gouvernement pour appliquer la convention, demander qu’une mission de contacts directs soit désignée et que le cas soit inclus dans un paragraphe spécial de son rapport.

Les membres travailleurs ont indiqué être en accord avec les membres employeurs quant à la haute importance que revêt ce cas. Le gouvernement a formulé une demande d’assistance auprès du BIT afin de remédier aux problèmes législatifs. Cette collaboration est nécessaire en ce qui concerne la procédure d’enregistrement des syndicats et l’obligation de certifier le statut des membres des organisations syndicales, deux points sur lesquels le gouvernement a montré une volonté positive. Le gouvernement doit également prendre des mesures rapides en ce qui concerne l’accès des travailleurs étrangers à la fonction de dirigeant syndical et l’affiliation à plusieurs syndicats. En outre, le gouvernement devra faire rapport au sujet de l’assassinat de M. Victoriano Abel Vega, car l’impunité de fait dont bénéficient les auteurs de crimes contre les dirigeants syndicaux aggrave le climat de violence et d’insécurité, qui est extrêmement préjudiciable aux activités syndicales. Les membres travailleurs ont par ailleurs exprimé leur désaccord avec les membres employeurs au sujet de la demande directe adressée au gouvernement. Le groupe des travailleurs est d’avis que le droit de grève est protégé par la convention. Les groupes des employeurs et des travailleurs ont reconnu dans la déclaration commune du 23 février 2015 que: «le droit de mener des actions collectives pour défendre leurs intérêts professionnels légitimes est reconnu par les mandants de l’OIT. Cette reconnaissance internationale par l’OIT exige des groupes des travailleurs et des employeurs qu’ils se penchent sur le mandat de la commission d’experts tel qu’il est défini dans son rapport de 2015.» La commission d’experts a défini son propre mandat en disant qu’«elle examine la portée juridique, le contenu et la signification des dispositions des conventions», ce qui a été approuvé par le Conseil d’administration. Il relève donc bien du mandat de la commission d’experts de demander toute information qu’elle estime utile au sujet de l’application par l’Etat de ses obligations dues en raison d’une convention ratifiée.

Conclusions

La commission a pris note des informations fournies par la représentante du gouvernement et de la discussion qui a suivi sur les points soulevés par la commission d’experts.

La commission a pris note avec préoccupation de l’absence de progrès tant en droit que dans la pratique au sujet de l’autonomie des organisations d’employeurs et de travailleurs pour nommer leurs représentants aux organes paritaires ou tripartites de prise de décisions et, à nouveau, a prié instamment le gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour modifier les 19 décrets adoptés le 22 août 2012 afin de les mettre en conformité avec les garanties établies par la convention.

Prenant en compte la discussion qui a eu lieu sur ce cas, la commission a prié instamment le gouvernement:

  • - de prendre sans délai toutes les mesures nécessaires afin d’identifier les responsables du meurtre de M. Victoriano Abel Vega et de punir les coupables de ce crime;
  • - de réactiver sans délai le Conseil supérieur du travail dont les travaux sont suspendus depuis 2013 et qui constitue la principale instance de dialogue social et de consultation tripartite dans le pays. Le gouvernement doit s’abstenir d’exiger un consensus entre les fédérations et confédérations syndicales pour la désignation de leurs représentants au Conseil supérieur du travail;
  • - de garantir l’autonomie totale des organisations d’employeurs et de travailleurs;
  • - d’assurer comme il convient la protection des locaux de l’Association nationale de l’entreprise privée (ANEP), qui constitue l’organisation la plus représentative des employeurs dans le pays;
  • - de soumettre à l’examen de la commission d’experts, lors de sa prochaine session, un rapport détaillé sur tout progrès réalisé sur les points de la discussion.

En l’absence d’action du gouvernement pour mettre en œuvre effectivement, en droit et dans la pratique, les dispositions de la convention, la commission a demandé à ce qu’une mission de contacts directs se rende au Salvador.

La commission a décidé d’inclure ses conclusions dans un paragraphe spécial de son rapport.

La représentante gouvernementale a regretté que les initiatives et les mesures que le pays déploie pour garantir et renforcer les droits syndicaux n’aient pas été prises en compte dans les conclusions, dont elle prend cependant note pour son analyse. S’agissant de la mission de contacts directs demandé par l’ANEP, il ressort que cette association est sérieusement remise en cause par les travailleurs et les organisations sociales, car les organisations syndicales représentées au sein du Conseil national du salaire minimum sont convenus d’une augmentation lamentable de 20 centimes par jour pour les travailleurs agricoles, de 33 centimes pour les travailleurs des maquilas, de 37 centimes pour les travailleurs du secteur du commerce et des services et de 41 centimes pour les travailleurs des industries, pendant les trois prochaines années. Cela constitue une insulte à la population qui, par sa main-d’œuvre, contribue quotidiennement au développement du pays. Cela n’est pas conforme aux dispositions de l’article 38 de la Constitution du pays et des articles 145 et 146 du Code du travail. Le gouvernement souhaite poursuivre la coopération technique déjà engagée avec la visite du médiateur concernant le conflit entre les organisations syndicales qui veulent participer au CST, et avec d’autres initiatives mises en place pour promouvoir les droits au travail des travailleurs salvadoriens. A court et à moyen terme, le gouvernement ne manquera pas de présenter de nouvelles informations qui rendront compte des résultats obtenus. En tant que gouvernement progressiste, le gouvernement s’engage à œuvrer pour que les travailleurs jouissent pleinement de leurs droits. Le dialogue social n’est pas rompu dans le pays. Il fait partie de la politique du Président et du plan gouvernemental. Le dialogue est en permanence entretenu avec tous les partenaires et secteurs sociaux, politiques et économiques du pays, et les organisations syndicales et l’ANEP y participent activement.

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