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Observation (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 182) sur les pires formes de travail des enfants, 1999 - République-Unie de Tanzanie (Ratification: 2001)

Autre commentaire sur C182

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La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 27 septembre 2023. La commission prie le gouvernement de lui faire part de ses commentaires à ce sujet.
Articles 3, alinéa a), 5 et 7, paragraphe 1, de la convention. Pires formes de travail des enfants, mécanismes de surveillance et sanctions. Traite des enfants. La commission avait pris note de la création du comité contre la traite, qui est chargé de l’application de la loi de 2008 contre la traite des personnes. Elle avait également pris note des mesures menées par le Secrétariat à la lutte contre la traite des personnes pour combattre ce phénomène, notamment de la formation organisée à l’intention de responsables clés de la mise en œuvre de la loi contre la traite, qui avait porté sur la détection, les enquêtes, les poursuites et la prise en charge des victimes de la traite ainsi que sur les moyens de les secourir et leur prêter assistance.
La commission note que, d’après le rapport du gouvernement, des clubs scolaires chargés de la sensibilisation à la traite ont été mis en place dans les écoles primaires et secondaires et sont chargés de mieux faire connaître ce phénomène aux enfants; des réunions de dialogue communautaire ont été organisées afin de débattre de la lutte contre la traite avec les autorités locales dans les zones les plus touchées; des comités locaux de protection des femmes et des enfants contre la violence et l’exploitation ont été créés; les bureaux de la police chargés des femmes et des enfants ont été renforcés afin qu’ils soient à même de traiter les cas de traite signalés aux postes de police avec efficacité et selon une procédure accélérée. La commission note également que le gouvernement indique qu’il continue de renforcer les capacités des responsables de l’application des lois en matière de détection, d’enquête et de poursuites dans le domaine de la traite, et que 1 650 fonctionnaires ont bénéficié des programmes mis en place à cette fin. En outre, 810 enfants des zones rurales qui risquaient d’être victimes d’un trafic à destination des zones urbaines ont été secourus et 379 enfants victimes de la traite ont été soustraits à l’exploitation. La commission prend note de l’information communiquée par le gouvernement selon laquelle la loi de 2008 contre la traite a été modifiée afin d’y introduire une nouvelle disposition relative à la tentative de traite, d’alourdir les peines réprimant les infractions liées à la traite et d’abroger les dispositions en vertu desquelles une amende pouvait être imposée en lieu et place d’une peine d’emprisonnement.
La commission prend note des observations de la CSI selon lesquelles la traite touche dans une large mesure les enfants défavorisés des zones rurales, qui en sont victimes à des fins de travail forcé dans des secteurs tels que le travail domestique et l’agriculture ainsi qu’à des fins de mendicité forcée et d’exploitation sexuelle dans des centres urbains, notamment à Arusha, Dar es Salaam, Dodoma, Mbeya et Mwanza. La CSI relève en outre que les enfants burundais, qui sont issus pour la plupart des communautés agricoles hutues de Mwimbango, Mkididing et Jerusalema, sont victimes de la traite ou introduits clandestinement en Tanzanie afin d’y être exploités comme domestiques. Selon la CSI, les membres de la police et les fonctionnaires des services de l’immigration sont insuffisamment sensibilisés à la traite et, en conséquence, diverses autorités considèrent et traitent ces enfants comme des migrants en situation irrégulière plutôt que comme des enfants vulnérables nécessitant une protection. La CSI souligne en outre l’absence en Tanzanie de collaboration interinstitutionnelle en matière de protection des enfants contre la traite transfrontière ainsi que l’absence d’enquêtes approfondies et de poursuites menées en bonne et due forme contre les personnes impliquées dans la traite et l’exploitation des enfants. De plus, la corruption et la complicité des autorités dans les infractions liées à la traite, qui entravent l’action menée pour faire respecter la loi, demeurent un motif de préoccupation majeure. La commission prie instamment le gouvernement de redoubler d’efforts pour combattre la traite des enfants en veillant à ce que des enquêtes approfondies soient menées et des poursuites engagées contre les personnes qui se livrent à la traite des enfants, y compris les fonctionnaires corrompus et complices de ces pratiques, et de communiquer des informations sur le nombre d’enquêtes menées, de poursuites intentées et de condamnations prononcées, en précisant la nature des peines imposées.À ce propos, elle prie le gouvernement de continuer à prendre les mesures nécessaires pour: i) renforcer les capacités des forces de l’ordre en matière de détection des cas de traite des enfants et de lutte contre ce phénomène, notamment en leur dispensant une formation sur la législation relative à la lutte contre la traite et en leur allouant des ressources adéquates; et ii) renforcer la coopération et la coordination interinstitutionnelle dans le domaine de la lutte contre la traite transfrontière des enfants. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cette fin.
Articles 3, alinéa d), et 5. Travaux dangereux et mécanismes de surveillance. Inspection du travail. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de l’information fournie par le gouvernement selon laquelle en Tanzanie, des enfants étaient soumis aux pires formes de travail des enfants, notamment dans les mines, les carrières et le secteur du travail domestique. Elle relève que, d’après le rapport de l’OIT intitulé Child Labour and the Youth Decent Work Deficit in Tanzania (Le travail des enfants et le déficit de travail décent des jeunes en Tanzanie), publié en 2018, environ 41 pour cent des enfants (1 467 000 enfants) de 14 à 17 ans étaient occupés à des travaux dangereux et la surveillance de l’application de la législation posait des difficultés considérables en raison des ressources limitées consacrées à l’inspection.
Renvoyant à ses commentaires précédents concernant les mesures prises pour renforcer les capacités de l’inspection du travail, la commission prend note de l’information fournie par le gouvernement selon laquelle environ 35 fonctionnaires du travail ont été formés à l’utilisation de méthodes d’inspection du travail visant spécifiquement à combattre le travail des enfants et 30 nouveaux véhicules et du matériel neuf de protection de la sécurité et de la santé au travail ont été mis à la disposition des fonctionnaires du travail. En outre, des formations de sensibilisation et des campagnes d’information sur la lutte contre le travail des enfants et leur affectation des travaux dangereux ont permis de soustraire 119 enfants du travail des enfants dans des conditions dangereuses, y compris dans le secteur extractif. La commission note que, d’après les conclusions du rapport analytique concernant l’Enquête intégrée sur la main-d’œuvre 2020-21, on estime que 4,85 millions des 5,02 millions d’enfants de 5 à 17 ans qui sont soumis au travail des enfants sont occupés à des travaux dangereux. La commission fait de nouveau part de sa profonde préoccupation face au nombre considérable d’enfants occupés à des travaux dangereux en Tanzanie. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie de nouveau instamment le gouvernement de continuer à prendre les mesures voulues pour renforcer et adapter les capacités de l’inspection du travail, notamment en la dotant de ressources suffisantes et en dispensant la formation nécessaire aux inspecteurs du travail afin qu’ils puissent se rendre sur les sites difficiles d’accès et repérer les enfants qui y sont occupés à des travaux dangereux, en particulier dans les mines et les carrières, et effectuer des visites sur les lieux de travail de l’économie informelle afin de prendre des mesures efficaces pour combattre les pires formes de travail des enfants. La commission prie également le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour promouvoir la collaboration entre l’inspection du travail et les autres parties prenantes concernées en vue de détecter les cas d’enfants occupés à des travaux dangereux et de soustraire ces enfants à cette pire forme de travail des enfants. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises à cette fin et sur les résultats obtenus.
Article 7, paragraphe 2. Mesures efficaces à prendre dans un délai déterminé. Alinéa a). Empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants. Accès à l’éducation de base gratuite. La commission avait noté que, d’après le rapport de pays 2018 de l’UNICEF sur la Tanzanie, le nombre d’enfants de 7 à 17 ans non scolarisés dans le pays s’établissait à 3,9 millions et que, parmi ces enfants, 1,7 million étaient en âge de fréquenter l’école primaire et environ 400 000 étaient en âge de fréquenter une école secondaire du premier cycle et n’étaient jamais allés à l’école. La commission note également que, d’après les statistiques de l’UNESCO, en 2018, le taux net de scolarisation dans l’enseignement primaire s’établissait à 81,33 pour cent, contre 26,55 pour cent dans l’enseignement secondaire. Elle avait prié instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour améliorer le fonctionnement du système éducatif de façon à garantir l’accès de tous les enfants à une éducation de qualité.
La commission prend note des informations fournies par le gouvernement sur les diverses mesures prises dans ce domaine, à savoir: i) la politique en faveur de la gratuité de l’éducation de base du niveau pré-primaire au niveau secondaire, introduite par la politique nationale de 2014 et de 2023 relative à l’éducation et à la formation; ii) la publication de la Circulaire sur l’éducation no 2 de 2018, qui vise à autoriser les élèves à redoubler et à repasser des branches aussi bien à l’école primaire qu’à l’école secondaire; iii) l’adoption des directives nationales sur les services scolaires d’alimentation et de nutrition destinés aux élèves des établissements d’enseignement de base; iv) la mise en place dans les établissements scolaires de clubs de conseil et d’orientation chargés de suivre et de repérer les élèves qui risquent d’abandonner l’école; v) l’adoption de lignes directrices sur la rescolarisation des élèves qui abandonnent l’école primaire ou secondaire, qui s’inscrit dans le cadre du programme de rescolarisation des élèves et d’enseignement selon d’autres méthodes pédagogiques; et vi) la mise en œuvre de programmes de transfert en espèces en faveur de groupes défavorisés grâce au Fonds tanzanien d’action sociale.
En outre, en collaboration avec d’autres parties prenantes, le gouvernement et des organisations de la société civile ainsi que d’autres partenaires de développement ont exécuté plusieurs programmes visant à assurer que tous les élèves achèvent leur scolarité, parmi lesquels le programme mondial Educate a Child Programme de la fondation Education above All; le projet d’amélioration de la qualité de l’enseignement secondaire, qui vise à doter les filles des moyens de prendre leur vie en main par la poursuite de leur scolarité dans le secondaire et par l’acquisition de compétences de la vie courante ainsi qu’à améliorer le taux de filles et de garçons qui parviennent jusqu’au terme d’un enseignement secondaire de qualité; le programme du Qatar et de l’UNICEF visant à garantir à tous les enfants tanzaniens une éducation équitable, accessible et de qualité à tous les niveaux.
La commission note que, d’après un rapport publié en 2024 par l’UNICEF, intitulé Data Must Speak: Unpacking Factors Influencing School Performance in Mainland Tanzania (les données doivent parler: analyse des facteurs qui influent sur les résultats scolaires en Tanzanie continentale), depuis l’introduction de la politique en faveur de l’éducation de base gratuite, les taux nets de scolarisation au niveau primaire s’étaient considérablement accrus pendant la période considérée, passant de 84 pour cent en 2016 à 95,3 pour cent en 2020. Cependant, environ 3,2 millions d’enfants d’âge scolaire ne fréquentaient pas l’école primaire et, parmi eux, 1,2 million n’étaient jamais allés à l’école. Près de 25 pour cent des élèves avaient abandonné l’école primaire ou n’avaient pas poursuivi leur scolarité dans une école secondaire du premier cycle. D’après les statistiques de l’UNESCO, en 2021, le taux d’abandon scolaire chez les enfants en âge de fréquenter une école secondaire du premier cycle et une école secondaire du deuxième cycle s’établissait à 50,51 et à 83,6 pour cent, respectivement. Tout en prenant note des mesures prises par le gouvernement, la commission ne peut qu’exprimer une nouvelle fois sa préoccupation face au nombre considérable d’enfants en âge de fréquenter l’école primaire et secondaire qui ne sont pas scolarisés. Rappelant que l’éducation est essentielle pour empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants, la commission prie instamment le gouvernement d’intensifier ses efforts pour améliorer le fonctionnement du système éducatif et faciliter l’accès de tous les enfants à une éducation de base gratuite. Elle le prie de continuer à prendre des mesures efficaces et dans un délai déterminé à cet effet, en particulier pour accroître les taux de scolarisation et de fréquentation scolaire et réduire les taux d’abandon scolaire, et de fournir des données statistiques récentes actualisées sur les résultats obtenus, ventilées par âge et par sexe.
Alinéa d). Identifier les enfants particulièrement exposés à des risques et entrer en contact avec eux. Enfants orphelins du VIH/sida et autres enfants vulnérables. La commission avait noté que le gouvernement avait indiqué que la Stratégie nationale 2018-2022 pour l’élimination du travail des enfants, le Plan d’action national 2017-2022 sur la violence à l’égard des femmes et des enfants (NAP VAWC) et le programme par pays de promotion du travail décent prévoyaient des mesures visant à remédier aux problèmes rencontrés par les enfants vulnérables et à éliminer les pires formes de travail des enfants, y compris à améliorer leur accès à d’autres types d’éducation. Toutefois, ayant constaté que, d’après les estimations de l’ONUSIDA pour 2019, environ 860 000 enfants de moins de 17 ans étaient orphelins du VIH/sida, la commission avait instamment prié le gouvernement de poursuivre ses efforts pour empêcher que ces enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants.
La commission prend note de l’information fournie par le gouvernement selon laquelle un programme a été mis en place dans le cadre du NAP VAWC et du Plan d’action national chiffré en faveur des enfants les plus vulnérables en vue de détecter et d’enregistrer les enfants en situation de vulnérabilité, y compris les enfants devenus orphelins en raison de la pandémie de VIH/sida. En collaboration avec d’autres parties prenantes, le gouvernement évalue les besoins de ces enfants et pourvoit à leurs besoins en matière d’éducation, d’alimentation et de logement. En conséquence, de 2021 à 2023, pas moins de 1 028 872 enfants en situation de vulnérabilité, dont 505 443 garçons et 523 429 filles, ont été recensés et enregistrés. La commission relève de nouveau que, d’après les estimations de l’ONUSIDA pour 2022, environ 890 000 enfants de 17 ans et moins étaient orphelins en raison des décès causés par la pandémie de VIH/sida en Tanzanie. Rappelant une fois encore que les enfants devenus orphelins en raison du VIH/sida courent un risque accru d’être engagés dans les pires formes de travail des enfants, la commission exhorte le gouvernement de poursuivre les efforts qu’il déploie pour empêcher que ces orphelins ne soient soumis à ces pires formes, en particulier en élargissant leur accès à l’éducation et à la formation professionnelle et en leur apportant une aide et un soutien appropriés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures concrètes prises à cette fin et sur les résultats obtenus pour ce qui est du nombre d’orphelins et d’enfants vulnérables soustraits aux pires formes de travail des enfants et ayant bénéficié de mesures de réadaptation.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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