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Demande directe (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Guinée-Bissau (Ratification: 1977)

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Article 1, paragraphe 1, alinéa a) de la convention. Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission note que le nouveau Code du travail (loi no 7/2022): 1) interdit à l’employeur, dans le cadre de la relation de travail, d’accomplir des actes ou d’adopter des comportements, lors de l’accès à l’emploi, dans l’emploi lui-même, le travail ou la formation professionnelle, sous forme verbale, non verbale ou physique, qui ne sont pas souhaitables ou qui vont à l’encontre de la liberté sexuelle du travailleur (article 8.1(b)); et 2) dispose que les travailleurs ont des droits fondamentaux, dont le contenu et la portée sont fixés par la loi, la convention collective ou le contrat de travail, tels qu’être traités avec respect et considération ou être protégés contre les offenses verbales ou physiques, ou contre les offenses à caractère sexuel (article 48.1(l)).
La commission relève que ces dispositions ne donnent pas une définition du harcèlement sexuel, lequel inclut expressément le harcèlement qui s’apparente à un chantage sexuel (quid pro quo) et le harcèlement sexuel dû à un environnement de travail hostile. Sans une définition claire de ce qu’est le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession, il demeure peu probable que la législation puisse en réprimer efficacement toutes les formes et tous les effets (voir Étude d’ensemble de 2023, Atteindre l’égalité des genres au travail, paragraphes 111 et 113). La commission rappelle que le harcèlement sexuel est une forme grave de discrimination fondée sur le sexe et doit donc être traité dans le cadre de la convention, et souligne l’importance qu’il y a à prendre des mesures efficaces pour prévenir et interdire le harcèlement sexuel au travail sous ces deux formes. En outre, elle tient à souligner que s’agissant de l’étendue de la responsabilité en cas de harcèlement sexuel, celle-ci devrait certes comprendre celle des employeurs, mais également englober celles des superviseurs et des collègues de travail et, éventuellement, les clients ou d’autres personnes rencontrées dans le cadre du travail, dont les fournisseurs, les sous-traitants ou les patients (observation générale de la commission sur le harcèlement sexuel adoptée en 2002). La commission note que la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a adopté en 2021: 1) la Stratégie régionale de la CEDEAO pour la prévention et la réponse aux violences sexuelles et basées sur le genre, qui repose sur l’élaboration, la mise en œuvre et le renforcement des lois et politiques pertinentes en matière de violence sexuelle et basée sur le genre (VSBG) aux niveaux régional et national; et 2) la Politique de la CEDEAO sur la prévention et la réponse au harcèlement sexuel dans les lieux de travail et les établissements d’enseignement, qui propose un cadre d’action pour éradiquer le harcèlement sexuel dans la région et dont les principes directeurs sont la tolérance zéro du harcèlement sexuel sur le lieu de travail et dans les établissements d’enseignement de la région, ainsi que l’approbation officielle et l’adoption de cette politique comme un outil pour réduire le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et dans les établissements d’enseignement. Par ailleurs, la commission note que le projet d’Acte uniforme relatif au droit du travail de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), contenant des dispositions sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, et qui aura force de loi directe en Guinée-Bissau une fois adopté n’a toujours pas été adopté. Enfin, dans son premier Examen national volontaire de 2022 sur la mise en œuvre du Rapport sur les objectifs de développement durable (ODD) (ci-après Rapport sur les ODD), le gouvernement indique qu’entre le 19 et le 28 mars 2022, la société civile a exprimé ses recommandations dans le cadre de la mise en œuvre par l’État de l’Agenda 2030, selon lesquelles les femmes et les filles, en plus de souffrir de multiples formes de discrimination, continuent d’être victimes de multiples formes de violence, telles que les mariages forcés et précoces, les mutilations génitales féminines, le harcèlement et d’autres abus sexuels. La commission demande à nouveau au gouvernement: i) d’adopter une définition complète du harcèlement sexuel en matière d’emploi et de profession; et ii) d’étendre la responsabilité de l’employeur en cas de harcèlement sexuel, à ses représentants et aux collègues de travail et de fournir des informations sur tout progrès réalisé à ce propos. Elle prie également le gouvernement de faire rapport sur: i) les progrès réalisés relativement à l’adoption du projet d’Acte uniforme relatif au droit du travail de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), lequel contient entre autre des dispositions sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail; et ii) les mesures adoptées pour mettre en œuvre la Politique de la CEDEAO sur la prévention et la réponse au harcèlement sexuel dans les lieux de travail et les établissements d’enseignement. En l’absence d’information sur les mesures et activités mises en œuvre par le Conseil du travail et du dialogue social, pour prévenir et traiter le harcèlement sexuel dans l’emploi et la profession, y compris en ce qui concerne les travailleurs domestiques, la commission réitère sa demande sur ce point.
Contrôle de l’application. En réponse à la demande antérieure de la commission concernant les mesures prises pour aider les inspecteurs du travail, les juges et autres autorités compétentes à mieux identifier et traiter les situations de discrimination en matière d’emploi et de profession, le gouvernement indique que les inspecteurs n’ont pas reçu de formation depuis longtemps. La commission note par ailleurs que dans son Rapport sur les ODD, le gouvernement reconnait que: 1) la faible réponse du secteur judiciaire, de la justice traditionnelle et des prestataires de services de protection en matière de prévention et de traitement des cas accroît le manque de confiance, la frustration et la déception; 2) la faible participation des femmes et des filles à la résolution des conflits au niveau communautaire, en particulier dans les cas de violence fondée sur le genre, entrave la lutte contre cette violence, car les mécanismes en place sont gérés par des hommes; 3) le niveau de formation des juges, des procureurs et du personnel judiciaire reste limité en raison de l’insuffisance des ressources financières; 4) le fonctionnement des tribunaux, notamment ceux situés à l’intérieur du pays, est affecté par l’absence de personnel désigné ou par l’absentéisme, ainsi que par un manque important d’infrastructures et d’équipements; et 5) les mécanismes d’inspection judiciaire ne sont pas opérationnels en raison d’un manque de ressources financières et matérielles de base. La commission note en outre, que: 1) selon le Rapport annuel sur les résultats des équipes de pays des Nations Unies de 2023 pour la Guinée-Bissau, suite à la tentative de coup d’état 2023, une crise sans précédent a entrainé la démission du président de la Cour suprême de justice; et 2) la Rapporteuse spéciale des Nations unies sur l’indépendance des juges et des avocats a déclaré dans un communiqué de presse du 14 décembre 2023, qu’une crise de cette ampleur à la Cour suprême limite l’accès de chacun à la justice et peut avoir un impact sur la possibilité de faire appel dans les affaires civiles et pénales, ainsi que sur d’autres fonctions clés du pouvoir judiciaire, et érode les garanties en place pour garantir une procédure régulière et la protection des droits humains. Tout en reconnaissant la complexité de la situation qui prévaut dans le pays, et sa situation économique,la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées pour surmonter les nombreux obstacles qu’il a identifiés en matière d’accès à la justice dans son Rapport sur les ODD, notamment: i) pour aider les inspecteurs du travail, les juges et autres autorités compétentes à mieux identifier et traiter les situations de discrimination en matière d’emploi et de profession; et ii) pour sensibiliser le grand public aux procédures et recours disponibles en matière de lutte contre la discrimination en matière d’emploi et de profession. Prière de fournir dans la mesure du possible des informations sur tout cas de discrimination traité par les inspecteurs du travail, les tribunaux ou toute autre autorité compétente, ainsi que sur les sanctions infligées et les réparations octroyées et, enfin, sur le retour à la normale du fonctionnement de l’institution judiciaire.
Statistiques. La commission prend note du Rapport de l’Institut national des statistiques (INE) sur les statistiques de genre 2023 intitulé «Femmes et hommes en Guinée-Bissau», disponible sur le site internet de l’INE, qui contient des données statistiques pour la période 2017-2019. Il ressort dudit rapport et de l’Enquête sur l’emploi et l’économie informelle que durant cette période: 1) 51,3 pour cent de la population féminine n’avait reçu aucune instruction, contre 36,8 pour cent pour les hommes. Le taux de scolarisation des femmes était inférieur à celui des hommes à tous les niveaux: 43,4 pour cent au niveau primaire; 4,4 pour cent au niveau secondaire; et 0,9 pour cent au niveau supérieur; 2) le taux de chômage était de 6,9 pour cent pour les femmes et 7,2 pour cent pour les hommes; 3) le secteur privé représentait 85,8 pour cent de l’emploi, et employait 92,3 pour cent de femmes et 80,3 pour cent d’hommes; et 4) le secteur public ne représentait que 12 pour cent de l’emploi et employait trois fois plus d’hommes (17,2 pour cent) que de femmes (5,9 pour cent). La commission note en outre que durant les discussions pour la préparation du Rapport sur les ODD, des recommandations ont été faites en vue d’améliorer et de renforcer le système statistique telles que par exemple la promulgation et la publication de la loi de base sur les statistiques, la création de points focaux de l’INS dans les différentes institutions publiques et privées et les organisations de la société civile, ou encore la formation et le renforcement des capacités du personnel de l’INS. La commission prie le gouvernement de la tenir informée de la suite donnée aux recommandations du Rapport sur les ODD en vue de renforcer le système statistique, et de tout progrès réalisés en matière de collecte et analyse de données statistiques sur l’emploi et la profession des hommes et des femmes dans les différents secteurs de l’économie, ventilées par catégories professionnelles dans le secteur public comme dans le secteur privé, ainsi que dans l’économie informelle.
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