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Demande directe (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Burundi (Ratification: 1993)

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La commission prend note des observations de la Confédération des syndicats du Burundi (COSYBU), reçues les 29 août 2022 et 29 août 2023.
Article 1 de la convention. Champ d’application. Secteur privé et fonction publique. La commission note l’adoption: 1) le 24 novembre 2020, de la loi no 1/11 portant révision du décret-loi no 1/037 du 7 juillet 1993 portant révision du Code du travail du Burundi; et 2) le 8 février 2023, de la loi no 1/03 portant modification de la loi no 1/28 du 23 août 2006 portant Statut général des fonctionnaires. Elle note cependant qu’aux termes du dernier alinéa de l’article 2 du Code du travail, la main-d’œuvre agricole, d’élevage, commerciale et industrielle familiale est exclue du champ d’application du Code du travail et que, en vertu de l’article 3 du Statut général des fonctionnaires, ce statut ne s’applique pas aux personnes occupant des emplois publics soumis à des régimes juridiques propres. À cet égard, la commission rappelle que la convention s’applique à tous les travailleurs, qu’ils soient ou non des ressortissants nationaux, dans tous les secteurs d’activité, qu’ils soient publics ou privés, dans l’économie formelle et dans l’économie informelle (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 733). En conséquence, la commission prie le gouvernement d’indiquer comment les catégories de travailleurs exclues du champ d’application du Code du travail et du Statut général des fonctionnaires sont spécifiquement protégées contre la discrimination dans l’emploi et la profession fondée sur l’ensemble des motifs énumérés dans la convention et, en l’absence de texte applicable, d’indiquer s’il est envisagé d’adopter une législation pour couvrir ces catégories spécifiques de travailleurs.
Article 1, paragraphe 1, alinéa b). Autres motifs de discrimination. Faisant suite à son commentaire précédent, la commission prend note avec intérêt des indications figurant dans le rapport du gouvernement selon lesquelles, aux termes de l’article 22, alinéa 2, de la Constitution du 17 mai 2018, nul ne peut être l’objet de discrimination du fait, notamment, de sa langue, de ses convictions philosophiques, d’un handicap physique ou mental, ou encore du fait d’être porteur du VIH/sida ou de toute autre maladie incurable. La commission prend également note avec intérêt que l’article 14 du Code du travail interdit aussi toute distinction, exclusion ou préférence directe ou indirecte fondée sur la langue, l’opinion philosophique, l’activité syndicale, l’état de handicap physique ou mental, le statut de porteur du VIH/sida ou de toute autre maladie incurable en ce qui concerne l’embauche, la promotion, la rupture du contrat, l’accès à la formation professionnelle, l’accès à l’emploi et aux différentes professions ainsi que les conditions d’emploi de manière générale. Le gouvernement ajoute que, selon le Code du travail, les licenciements prononcés pour ces motifs sont abusifs (article 156), que les travailleurs bénéficient d’une protection appropriée contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d’emploi (article 588) et que tout employeur qui subordonne l’emploi d’un travailleur ou le congédie en raison de son affiliation ou de sa participation à des activités syndicales est puni d’une amende (article 632). En outre, la commission prend aussi note avec intérêt qu’aux termes de l’article 20, paragraphe 1, du Statut général des fonctionnaires, ce statut «s’oppose à toute distinction, exclusion ou préférence» fondée sur l’activité syndicale, le statut sérologique réel ou supposé, la promotion, la cessation définitive des services, et que cette liste n’est pas exhaustive.
Travailleurs en situation de handicap. La commission accueille favorablement l’interdiction de la discrimination à l’égard de ces travailleurs et les indications du gouvernement faisant état 1) de la mise en place en 2019 du Comité national pour les droits des personnes handicapées au Burundi; 2) de l’adoption de la Politique nationale sur les droits des personnes handicapées et de son plan d’action pour la période 2020-2024; et 3) de l’adoption de la loi no 1/14 du 28 avril 2022 portant ratification par la République du Burundi du Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, relatif aux droits des personnes handicapées en Afrique. Néanmoins, la commission note que la stratégie de mise en œuvre de la Politique nationale de l’emploi (PNE) 2018-2022 faisait apparaître que l’inaccessibilité des milieux de travail restait un défi important pour les personnes vivant avec un handicap puisque le certificat d’aptitude physique exigé dans les dossiers de demande d’emploi constitue un aspect de la discrimination à l’emploi de ces personnes, et que les pouvoirs publics ne prennent pas de mesures incitatives pour encourager les employeurs publics et privés à embaucher cette catégorie de la population. La commission note que l’axe no 5 de cette stratégie concernait, notamment, la promotion de l’emploi des personnes vivant avec un handicap et leur inclusion sur le marché du travail par le biais, par exemple, de mesures incitatives et de discrimination positive. En outre, la commission note que le rapport de priorisation des objectifs de développement durable (ODD) au Burundi 2016-2030 fait apparaître que, d’ici 2030, l’un des objectifs à atteindre est d’assurer l’égalité d’accès des personnes vulnérables, y compris les personnes en situation de handicap, à tous les niveaux d’enseignement et de formation professionnelle. Quant au plan sectoriel de l’éducation (PSE) 20222030, il fait état de l’élaboration d’une stratégie nationale de l’éducation inclusive en direction des enfants en situation de handicap. La commission note également que la COSYBU, dans ses observations, dénonce le caractère discriminatoire de l’article 286 du Code du travail, qui dispose qu’une ordonnance ministérielle «détermine la nature des travaux et les catégories d’emplois interdits aux personnes vivant avec handicap ainsi que la nature des handicaps physiques ou mentaux n’ouvrant aucune possibilité à l’embauche». La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur: i) l’application pratique sur les lieux de travail des mesures concernant les droits des personnes en situation de handicap, y compris toute mesure positive prise ou envisagée pour leur assurer l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession (adaptation des locaux, campagnes de sensibilisation, etc…), que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public; ii) le nombre de personnes en situation de handicap employées dans les secteurs public et privé, si possible ventilées par sexe; et iii) toute mesure prise ou envisagée en vue de l’adoption d’une stratégie en faveur de l’accès des enfants en situation de handicap à tous les niveaux d’enseignement et de formation professionnelle. La commission prie également le gouvernement de faire part de ses commentaires au sujet des observations de la COSYBU relatives à l’article 286 du Code du travail et de communiquer une copie de l’ordonnance ministérielle en cause.
Statut VIH réel ou supposé. Tout en prenant note de l’interdiction de la discrimination à l’égard des travailleurs séropositifs ou perçus comme pouvant l’être, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur: i) toute mesure prise ou envisagée pour garantir que, dans la pratique, les travailleurs en question sont effectivement protégés contre la discrimination dans tous les aspects de l’emploi et de la profession, et qu’ils peuvent accéder à des mécanismes de signalement et de réparation; et ii) toute mesure concrète mise en œuvre pour prévenir et combattre la stigmatisation et la discrimination dans l’emploi et la profession fondées sur le statut VIH réel ou supposé, y compris les mesures de sensibilisation aux dispositions applicables en la matière et les activités de formation destinées aux travailleurs, aux employeurs, à leurs organisations respectives, aux inspecteurs et contrôleurs du travail et aux magistrats.
Articles 1 et 2. Non-discrimination et égalité de chances et de traitement. Faisant suite à son commentaire précédent, la commission note que, selon les indications du gouvernement, le quota de 30 pour cent de femmes qui est requis au sein du gouvernement, de l’Assemblée nationale et du Sénat (articles 128, 169, 185, paragraphe 2, respectivement, de la Constitution) est respecté. La commission note que les conclusions de la Commission sénatoriale d’enquête sur l’état du respect des équilibres exigés par la Constitution au sein de l’administration publique et parapublique, des administrations de l’État, et des services décentralisés et déconcentrés font apparaître que les femmes occupent 35 pour cent, 63 pour cent et 43 pour cent des postes de direction, de collaboration et d’exécution, respectivement. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le pourcentage de femmes dans les effectifs du secteur public, y compris dans la magistrature (article 213, alinéa 3, de la Constitution).
Concernant le secteur privé, la commission note que le rapport de priorisation des objectifs de développement durable (ODD) susmentionné met aussi l’accent sur la promotion de l’égalité de genre et la création des conditions favorables à un meilleur accès aux ressources, à un meilleur contrôle de ces ressources, à une meilleure contribution des femmes au développement socioéconomique du pays et au renforcement de leurs capacités afin de leur permettre de profiter davantage des retombées du développement. Par ailleurs, la commission note que, dans son rapport pour 2023, la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH) souligne que le gouvernement met la femme au centre du développement familial et économique du pays mais que plusieurs défis subsistent, notamment le problème de leur accès à la terre. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour promouvoir l’accès des femmes aux ressources et leur participation aux différents secteurs de l’économie.
Observation générale de 2018. La commission prend note des informations que le gouvernement fournit en réponse à son commentaire précédent, y compris sa référence à la stratégie de mise en œuvre de la PNE 2018-2022, ainsi qu’au rôle joué par l’inspection du travail, les tribunaux du travail et le Comité national du travail.
Article 3, alinéa a).Collaboration avec les organisations de travailleurs pour favoriser l’acceptation et l’application de la politique nationale visant à promouvoir l’égalité de chances et de traitement. La commission note que, dans ses observations, la COSYBU mentionne à plusieurs reprises le fait que le gouvernement ne la tient pas informée des démarches entreprises pour mettre en œuvre la convention et ne l’associe pas à celles-ci. La COSYBU indique en outre qu’un cadre de collaboration est à promouvoir, en plus du Comité national du travail. La commission prie le gouvernement de faire part de ses commentaires à ce sujet.
Contrôle de l’application. La commission note les indications fournies par le gouvernement en réponse à son commentaire précédent, selon lesquelles, parmi les dossiers qui font l’objet d’un recours auprès de l’inspection du travail, aucun n’est en rapport avec la promotion de l’égalité de chances et de traitement ou la discrimination dans l’emploi et la profession, et qu’aucun rapport n’a été dressé en rapport avec cette question. À cet égard, la commission rappelle que l’absence de plaintes auprès de l’inspection du travail ne signifie pas qu’une telle discrimination n’existe pas. En effet, l’absence ou le faible nombre de cas de discrimination ou de plaintes peuvent être dus à une absence de cadre juridique approprié, à une méconnaissance des droits, à un manque de confiance dans les voies de recours offertes, à l’inexistence de telles voies de recours ou à la difficulté d’y accéder dans la pratique ou encore à la crainte de représailles. Sur ce point, la commission note d’ailleurs que la stratégie de mise en œuvre de la PNE 2018-2022 mettait l’accent sur le renforcement des capacités techniques des inspecteurs et contrôleurs du travail, ainsi que sur la dotation en ressources humaines suffisantes, et en ressources matérielles et logistiques. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le nombre et la nature des infractions à la législation, la non-discrimination en matière d’emploi et de profession constatées sur le lieu de travail, les sanctions imposées, ainsi que les activités de promotion de l’égalité de chances et de traitement réalisées par l’inspection du travail.
Organisme chargé des questions de droits de l’homme et d’égalité. Faisant suite à son commentaire précédent, la commission note les indications du gouvernement selon lesquelles la CNIDH a: 1) encouragé le gouvernement à continuer à tenir compte de la question de l’équilibre en matière de genre dans le cadre des procédures de recrutement et de nomination; 2) organisé, au cours de l’année 2021, 18 activités de promotion des droits humains, dont 14 ateliers de sensibilisation et de formation, y compris un atelier d’échanges sur la mise en œuvre des droits de la femme au Burundi et un autre sur les droits des peuples autochtones au cours duquel elle a insisté sur la lutte contre l’exclusion et la discrimination des Batwa; 3) organisé, en collaboration avec le Sénat, des séances de sensibilisation dans les établissements secondaires contre les mariages précoces et forcés; et 4) participé à une conférence-atelier sur l’inclusion des femmes sourdes dans les politiques et programmes de développement au Burundi. La commission prend note de ces informations, qui répondent à sa demande précédente.
Statistiques. Faisant suite à son commentaire précédent, la commission note que, selon les indications du gouvernement, un certain nombre de progrès ont été réalisés dans la mise en place formelle du système d’information sur le genre dans chacun des secteurs de développement (conception et mise en place de la base de données genre nationale; élaboration des indicateurs genre nationaux de renseignement sur la mise en œuvre du programme d’action de Beijing+25 (Bâtir un avenir qui assure l’autonomisation de toutes les femmes et les filles); élaboration et validation des fiches de collecte des données pour chaque indicateur; renforcement des capacités des membres des cellules genre sectorielles sur l’alimentation et la gestion de la base de données genre nationale; et octroi d’ordinateurs à chaque cellule genre sectorielle). La commission note toutefois que le gouvernement indique que plusieurs défis restent à relever, à savoir la faible sensibilité à intégrer les données genre dans les systèmes statistiques sectoriels, l’insuffisance des moyens permettant l’opérationnalisation de la base de données genre nationale, ou le nombre insuffisant d’informaticiens statisticiens permettant d’assurer la gestion de cette base de données. Le gouvernement ajoute que le rapport de l’enquête intégrée sur les conditions de vie des ménages au Burundi (EICVMB) 2019-2020, qui a été réalisée par l’Institut de statistiques et d’études économiques du Burundi (ISTEEBU), fait apparaitre que le taux d’activité est de 77,2 pour cent chez les hommes et de 75,7 pour cent chez les femmes. Ce rapport indique également que des efforts importants restent à faire pour améliorer significativement la qualité et la disponibilité des données statistiques et qu’il est donc important que les actions en cours soient poursuivies en vue de renforcer davantage le système statistique national et de mobiliser les ressources nécessaires à la réalisation régulière des enquêtes sur les conditions de vie des ménages. La commission prie donc le gouvernement de continuer à travailler à la collecte de données statistiques complètes et de fournir des informations sur tout progrès réalisé à cet égard. Elle espère que le gouvernement sera en mesure de fournir dans son prochain rapport des informations sur l’emploi des hommes et des femmes dans les différents secteurs et professions.
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