ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Demande directe (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Gabon (Ratification: 1961)

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Article 1, paragraphe 1, alinéa a), de la convention. Discrimination fondée sur le sexe. Législation. La commission note avec intérêt l’adoption, le 6 septembre 2021, de la loi no 006/2021 portant élimination des violences faites aux femmes. Cette loi, qui s’applique à toute personne de sexe féminin, quel que soit son âge, vise à protéger les femmes contre toutes les formes de violence et de discrimination, à les prévenir, à les poursuivre et à les éliminer en tout milieu. Relevant que le Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable du Gabon 2023-2027 fait état du niveau élevé de violence – notamment des violences basées sur le genre et celles faites sur les jeunes – tant dans le secteur de l’éducation que dans celui de la formation technique et professionnelle, la commission note que l’article 6 de la loi précitée prévoit l’adoption de mesures visant à inclure une politique de formation spécifique en matière d’égalité entre les sexes et de lutte contre les pratiques discriminatoires, les préjugés sexistes et les violences à l’égard des femmes dans les programmes de formation initiale et continue du corps professoral. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute mesure prise ou envisagée pour: i) mettre en œuvre la loi no 006/2021 (et sur les résultats obtenus, y compris le nombre d’infractions à cette loi et les sanctions imposées); ii) assurer l’instauration d’un secteur de l’éducation et de la formation technique et professionnelle dépourvu de violences basées sur le genre; et iii) adopter une législation visant à l’élimination de la violence, de la discrimination et du harcèlement, notamment sexuel, qui couvre tous les travailleurs, quel que soit le genre de la victime.
Harcèlement sexuel. Faisant suite à son commentaire précédent, la commission note que, selon les indications figurant dans le rapport du gouvernement, la stratégie «Gabon égalité» est déployée sur le territoire depuis 2022 dans l’objectif, notamment, de sensibiliser à l’interdiction du harcèlement en milieu professionnel et de lutter contre celui-ci. Par ailleurs, la commission note que la loi no 022/2021 du 19 novembre 2021 portant Code du travail a introduit une nouvelle définition du harcèlement sexuel. À cet égard, la commission note avec satisfaction qu’aux termes de l’article 6 du nouveau Code du travail, le harcèlement sexuel à l’encontre d’une personne est désormais défini: 1) soit comme «tout fait constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle qui, soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante»; et 2) soit comme «tout fait assimilé consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers». La commission note toutefois que l’article 2 de la loi no 10-216 du 5 septembre 2016 portant sur la lutte contre le harcèlement professionnel n’a pas été modifié et que le harcèlement sexuel y est toujours défini: 1) soit comme le fait «d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou des comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante»; et 2) soit comme le fait «d’user de toute forme de pression dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte ou des faveurs de nature sexuelle, que ceci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers». La commission note d’ailleurs que l’article 37 de la loi no 006/2021 du 6 septembre 2021 est rédigé dans des termes très similaires. Par ailleurs, la commission note que l’article 402 de la loi no 042/2018 du 5 juillet 2019 portant Code pénal définit le harcèlement sexuel comme «tout comportement, attitude ou parole assidue ou suggestive répétés, directement ou indirectement imputable à une personne qui, abusant de l’autorité ou de l’influence que lui confèrent ses fonctions ou son rang social, a pour but d’obtenir des faveurs sexuelles d’un individu de l’un ou l’autre sexe» et assortit de tels agissements d’une peine d’emprisonnement et d’une amende. À cet égard, la commission note que le Programme pays pour la promotion du travail décent (PPTD) 2024-2027 pour le Gabon fait apparaître que, même s’il faut saluer cette initiative législative, «force est de constater que l’application du texte dans le monde du travail est encore balbutiante, en l’absence d’une législation sur la violence et le harcèlement au travail». La commission considère que la référence, dans ces trois derniers articles, au caractère répété des propos ou comportements à connotation sexuelle pourrait avoir pour effet de limiter la protection contre le harcèlement sexuel. En outre, elle craint que ces divergences avec la formulation retenue dans le Code du travail ne soient source de confusion et de difficultés d’application de ce dernier. La commission prie le gouvernement d’examiner la possibilité de revoir les dispositions de l’article 2 de la loi no 10-216, de l’article 37 de la loi no 006/2021 et de l’article 402 du Code pénal afin d’éliminer la référence au caractère répété des propos ou comportements constitutifs de harcèlement sexuel, et de fournir des informations sur tout progrès réalisé en ce sens. Par ailleurs, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur: i) les mesures concrètes prises pour sensibiliser à la question du harcèlement sexuel les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives, les inspecteurs du travail, les avocats et les magistrats; ii) les mesures prises par les employeurs pour prévenir et traiter le harcèlement sexuel; iii) le nombre de plaintes pour harcèlement sexuel qui ont été déposées en vertu de l’article 402 du Code pénal et sur les sanctions imposées; et iv) la mise en œuvre de la stratégie «Gabon égalité» et les résultats obtenus en termes de lutte contre le harcèlement sexuel en milieu professionnel.
Discrimination fondée sur l’ascendance nationale, la race, la couleur ou la religion. La commission note les indications du gouvernement, selon lesquelles la politique de «gabonisation» poursuit un objectif de rationalisation dans un pays où le taux de chômage ne cesse de croître et où les travailleurs d’une autre nationalité, loin de faire l’objet d’une discrimination, semblent plutôt occuper l’essentiel des emplois au détriment des nationaux, ce qui engendre de fortes tensions sociales. Le gouvernement précise que la mise en œuvre de la politique en question ne fait l’objet d’aucune statistique. La commission prie à nouveau le gouvernement de fournir des données sur le nombre d’emplois concernés chaque année par la politique de «gabonisation».
Non-discrimination et promotion de l’égalité des chances et de traitement. Peuples autochtones. Faisant suite à son précédent commentaire, la commission note que, selon les indications du gouvernement, les peuples autochtones ont la garantie d’être traités de la même manière que les autres peuples, sans distinction d’appartenance ethnique. Le gouvernement ajoute que le Gabon a ratifié plusieurs conventions et traités internationaux garantissant aux peuples autochtones les mêmes droits que les autres citoyens. La commission prie à nouveau le gouvernement: i) de fournir des informations sur les conclusions de l’étude socioéconomique des personnes vulnérables en zone rurale et forestière menée par l’Observatoire des inégalités, en particulier sur la situation des peuples autochtones des zones rurales et forestières en matière d’éducation, d’emploi et d’exercice de leurs activités traditionnelles et de subsistance; et ii) de communiquer les données statistiques disponibles à leur sujet en faisant la distinction entre emploi salarié et activités traditionnelles. Enfin, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures de suivi prises ou envisagées afin de permettre aux peuples autochtones de bénéficier dans les faits d’une véritable égalité de chances et de traitement avec les autres composantes de la population.
Article 2. Égalité de chances et de traitement entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. La commission note que, en réponse à son précédent commentaire, le gouvernement indique que, hors secteur agricole, les femmes représentaient en 2023, 41 pour cent des travailleurs rémunérés, contre 35 pour cent en 1990. La commission note en outre qu’il ressort du rapport établi à l’issue du recensement général des entreprises qui a été réalisé en septembre 2023 que les entreprises recensées étaient davantage dirigées par des hommes (68,1 pour cent) que par des femmes (31,9 pour cent). La commission prie le gouvernement de fournir: i) des informations sur toute mesure prise ou envisagée en vue de favoriser l’égalité d’accès des hommes et des femmes à l’emploi et à la profession, de même qu’aux responsabilités professionnelles et politiques; ainsi que ii) des données chiffrées, ventilées par secteur et par sexe, sur les catégories d’emplois occupées.
Articles 2 et 3, alinéa d). Égalité des chances entre les hommes et les femmes dans la fonction publique. La commission note que, selon les indications du gouvernement, des séances de sensibilisation sont en cours dans le cadre de la stratégie «Gabon égalité» et que l’ensemble des formations, stages et perfectionnements sont accessibles à tous les agents du gouvernement sans considération de sexe. Elle note avec intérêt que la participation des femmes dans la fonction publique est passée de 36,8 pour cent en 2016 à 41,5 pour cent en 2020. La commission prie le gouvernement de poursuivre ses efforts en faveur de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes dans la fonction publique et de fournir des données statistiques ventilées par sexe et catégorie pour 2021 et les années suivantes.
Article 5. Travailleurs en situation de handicap. La commission note qu’il ressort du PPTD 2024-2027 qu’il est prévu de mettre en œuvre, avec l’appui technique du Bureau, des programmes de développement de l’entrepreneuriat pour la création d’emplois décents et productifs pour les personnes vivant avec un handicap, afin qu’elles s’engagent dans l’entrepreneuriat et l’innovation dans le secteur de l’économie verte et bleue, ainsi que dans l’économie rurale basée sur une transition vers l’économie formelle. La commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute mesure prise ou envisagée pour mettre en œuvre ces programmes de développement et, le cas échéant, sur les résultats obtenus en termes d’insertion professionnelle des travailleurs en situation de handicap.
Sensibilisation.Notant qu’aux termes de l’article 4 de la loi no 010/2022 du 5 août 2022 portant création du Pôle national de promotion de l’emploi, celui-ci est chargé, notamment, de contribuer à la sensibilisation contre les discriminations à l’embauche, la commission prie le gouvernement de fournir des informations détaillées sur toute mesure de sensibilisation prise ou envisagée dans ce cadre et, le cas échéant, sur les résultats obtenus, en communiquant des données ventilées par sexe, secteur d’activité et profession, que ce soit dans le secteur public ou privé, y compris concernant les travailleurs autochtones.
Statistiques. La commission note encore une fois que le gouvernement n’a pas communiqué les données statistiques demandées. À cet égard, la commission note qu’il ressort du PPTD 2024-2027 que la production de statistiques de qualité permettant de renseigner en temps réel les indicateurs de travail décent reste un objectif à moyen terme et qu’elle pourrait être priorisée dans le cadre du prochain PPTD. Elle note également qu’il ressort du Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable du Gabon 2023-2027 que, d’ici 2027, le gouvernement devra adopter et rendre opérationnel un cadre juridique pour la production des statistiques et renforcer les capacités nationales en termes de production, exploitation et diffusion des données et statistiques en vue d’améliorer l’élaboration, le suivi et l’évaluation des politiques publiques et des programmes de développement permettant d’atteindre tous les objectifs de développement durable. À cet égard, la commission rappelle que, pour déterminer la nature, l’ampleur et les causes de la discrimination, il est indispensable de disposer de données et de statistiques pertinentes en vue de définir des priorités et de concevoir des mesures adaptées, de contrôler et d’évaluer l’efficacité de celles-ci et d’apporter les ajustements qui pourraient s’avérer nécessaires (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragr. 891). Encourageant le gouvernement à tout mettre en œuvre pour créer les conditions nécessaires permettant de collecter et compiler des statistiques sur l’emploi, ventilées par sexe, secteur d’activité et profession, que ce soit dans le secteur public ou privé, y compris concernant les travailleurs autochtones, la commission le prie de communiquer toute information disponible à cet égard.
Contrôle de l’application. La commission note que le gouvernement signale avoir demandé l’assistance technique du Bureau concernant le renforcement des capacités de la justice du travail (inspecteurs du travail, magistrats, avocats et autres personnes impliquées). Elle exprime l’espoir que cette assistance sera fournie dans un proche avenir. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout développement à cet égard.
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer