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Observation (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Kazakhstan (Ratification: 1999)

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La commission prend note des observations du Syndicat des travailleurs du complexe pétrolier et énergétique (FEWU) reçues le 30 août 2023, qui traitent de la discrimination et de son interdiction législative, des normes discriminatoires dans le monde du travail, de l’égalité de genre, de l’honneur et la dignité des travailleurs, des migrants et de la protection contre la discrimination.
Article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Motifs de discrimination interdits. La commission note qu’en réponse à son commentaire précédent et à la préoccupation de la Confédération syndicale internationale (CSI), exprimée dans ses observations de 2020, quant au fait que le Code du travail ne prévoit pas la possibilité d’établir d’autres motifs de discrimination, et en particulier la discrimination fondée sur la couleur de peau, le gouvernement indique dans son rapport qu’en 2023, le Code du travail a été aligné sur l’article 14(2) de la Constitution de la République du Kazakhstan, dans le cadre de la loi du 27 juin 2022 sur les modifications et les ajouts à certains textes législatifs de la République du Kazakhstan relatifs à l’amélioration de la qualité de vie des personnes en situation de handicap. L’article 6(2) du Code du travail, qui énumère les motifs de discrimination interdits par la loi, a été complété par la mention «ou d’autres circonstances» et stipule désormais que personne ne peut faire l’objet d’une quelconque discrimination dans l’exercice de ses droits au travail en raison de son origine, de son statut social, officiel ou patrimonial, de son sexe, de sa race, de sa nationalité, de sa langue, de son attitude à l’égard de la religion, de ses convictions, de son lieu de résidence, de son âge ou de ses handicaps physiques, de son appartenance à des associations publiques, ou d’autres circonstances. Le gouvernement indique en outre que l’expression «d’autres circonstances» signifie tout autre motif de discrimination, y compris la couleur, et que ces dispositions permettent de prévenir la discrimination à l’encontre des salariés sur le lieu de travail, au motif de la couleur. Tout en prenant note de ces informations, la commission observe que le motif de la «couleur» n’est pas expressément mentionné dans la liste figurant à l’article 6(2) du Code du travail révisé. À cet égard, la commission rappelle que lorsque des dispositions légales sont adoptées pour donner effet au principe de la convention, elles devraient inclure au moins tous les motifs de discrimination énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. La commission demande au gouvernement: i) d’indiquer si une interprétation concernant la couleur ou l’expression «autres circonstances» qui figure à l’article 6(2) du Code du travail modifié a été rendue par les autorités judiciaires et, dans l’affirmative, de fournir copie du texte de ces décisions; et ii) de fournir des informations sur les mesures prises pour sensibiliser les travailleurs, les employeurs et leurs organisations respectives, ainsi que les responsables de l’application des lois, aux dispositions antidiscriminatoires du Code du travail – en particulier pour prévenir la discrimination fondée sur la couleur.
Discrimination directe et indirecte. La commission note que dans ses observations, le FEWU souligne que l’interdiction générale de la discrimination en matière d’emploi dans le cadre législatif national est de nature déclarative, et que la protection contre la discrimination est insuffisamment efficace. Il indique qu’il n’existe pas de système de réglementation antidiscriminatoire, ni de législation globale spéciale définissant pleinement la notion de discrimination, l’interdisant et établissant les responsabilités en cas de discrimination, à l’exception de la loi sur les garanties de l’État en matière d’égalité de droits entre femmes et hommes et d’égalité de chances dans l’exercice de ces droits, qui définit la notion de discrimination uniquement dans le contexte du genre (article 1(3)). Alors que le Code des infractions administratives et le Code pénal établissent la responsabilité en cas de discrimination, le FEWU indique que l’absence de définition globale et universelle de la discrimination conduit souvent à une situation où les agents chargés de l’application de la loi, face à un acte de discrimination, ne sont en mesure ni de fournir une protection, ni même d’identifier l’acte pour ce qu’il est. Le FEWU indique que les perspectives d’établir une discrimination dans le cadre du droit pénal, administratif ou civil sont donc extrêmement minces, que le Kazakhstan ne dispose pas des garanties institutionnelles et procédurales suffisantes pour protéger les droits et libertés en cas de discrimination et que les actes discriminatoires ne sont considérés comme des délits que dans le droit pénal et administratif. Prenant note de l’existence d’un cadre constitutionnel et législatif relatif à la discrimination, y compris en matière d’emploi et de profession, la commission souhaite attirer l’attention du gouvernement sur le fait que l’application pleine et entière de la convention requiert dans la plupart des cas l’adoption d’une législation complète définissant et interdisant la discrimination directe et indirecte, et qu’un certain nombre d’éléments de la législation contribuent à lutter contre la discrimination et à promouvoir l’égalité en matière d’emploi et de profession de manière plus efficace, notamment: la prise en compte de tous les travailleurs (aucune exclusion); une définition précise de la discrimination directe et indirecte ainsi que du harcèlement sexuel; l’interdiction de la discrimination à tous les stades de l’emploi; l’attribution explicite de responsabilités de contrôle aux autorités nationales compétentes; l’établissement de procédures de règlement des différends aisément accessibles; l’instauration de sanctions dissuasives et de voies de recours appropriées; une redistribution ou un renversement de la charge de la preuve; la protection contre des mesures de représailles; la possibilité de prendre des mesures positives; l’adoption et la mise en œuvre de politiques ou de plans pour l’égalité sur le lieu de travail ainsi que la collecte des données pertinentes à différents niveaux (voir Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales, 2012, paragr. 854 et 855). La commission demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les travailleurs soient protégés, tant en droit que dans la pratique, contre la discrimination directe et indirecte fondée sur tous les motifs énumérés à l’article 1, paragraphe 1 a), de la convention. Elle prie également le gouvernement de fournir copie du texte de toute décision judiciaire ou administrative relative à des cas de discrimination directe et indirecte en violation de l’article 6 du Code du travail.
Égalité de chances et de traitement des minorités nationales, ethniques et religieuses. La commission note qu’en réponse à sa demande précédente, le gouvernement indique que, conformément à l’article 33(4) de la Constitution, les citoyens de la République du Kazakhstan jouissent du droit d’accéder, sur un pied d’égalité, aux fonctions publiques. Le gouvernement indique également qu’en vertu de l’article 15(1) de la loi sur la fonction publique, l’admission à un poste de la fonction publique se fait sur la base d’un concours, et qu’en vertu de l’article 17(1) de la même loi, les citoyens qui postulent à un poste de la fonction publique doivent satisfaire aux critères de qualification établis. Il indique que les citoyens ont le droit de présenter leur candidature aux vacances de poste mises au concours s’ils ont l’éducation, les compétences et l’expérience professionnelle appropriées et que, par conséquent, la sélection pour la fonction publique s’effectue uniquement sur une base compétitive et ne prévoit aucune forme de privilèges ou de quotas dans le cadre de la procédure de sélection. Tout en prenant note de ces informations, la commission observe que le gouvernement n’a pas fourni de données concernant la répartition des différentes minorités dans les secteurs public et privé. À cet égard, elle souhaite rappeler qu’en l’absence de collecte et de publication de statistiques sur l’emploi ventilées par origine nationale, ethnique et religieuse, l’impact des mesures prises pour remédier aux inégalités affectant de manière disproportionnée certains groupes et membres de ces groupes (en raison de leur race, couleur, ascendance nationale, origine sociale, religion, etc.) reste incertain dans la plupart des cas (observation générale de 2018 sur la discrimination fondée sur la race, la couleur et l’ascendance nationale). La commission tient à souligner que la recherche qualitative sur la nature et l’ampleur des inégalités en matière d’emploi, y compris leurs causes sous-jacentes, est essentielle pour concevoir et mettre en œuvre une politique nationale d’égalité pertinente et efficace au titre des articles 2 et 3 de la convention, ainsi que pour suivre et évaluer ses résultats. La commission prie instamment le gouvernement de: i) prendre les mesures nécessaires pour recueillir et analyser des données, ventilées par secteur et par profession, illustrant la répartition des femmes et des hommes appartenant à diverses minorités dans les secteurs public et privé, ainsi que leur participation aux différents niveaux de la formation et de l’enseignement professionnels; ii) fournir des informations sur les mesures prises pour garantir l’égalité de chances et de traitement aux minorités nationales, ethniques et religieuses en matière d’emploi ou de profession, y compris les mesures de sensibilisation et de lutte contre les stéréotypes; et iii) fournir des informations sur tous les cas de discrimination ethnique en matière d’emploi et de profession qui ont été signalés aux services de l’inspection du travail ou dont les tribunaux ont été saisis.
Articles 2 et 3. Politique nationale d’égalité. En réponse à sa demande précédente, la commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle tous les hommes et toutes les femmes jouissent de l’égalité de droits pour ce qui est de participer à des mesures actives de promotion de l’emploi et que, à l’heure actuelle, la création d’emplois est mise en œuvre dans le cadre du Projet national de développement de l’entrepreneuriat pour 2021-2025 (ci-après, «le Projet national»). Au 1er septembre 2023, 278 100 femmes participaient au Projet national. Le gouvernement indique également qu’en juillet 2021, un portail unique de formation en ligne de courte durée consacré aux compétences recherchées sur le marché de l’emploi a été lancé (https://skills.enbek.kz) et est à la disposition de tout citoyen de la république souhaitant acquérir des compétences recherchées sur le marché du travail ou améliorer ses qualifications. Au 1er septembre 2023, 21 900 femmes participaient à une formation en ligne, dont 19 900 ont obtenu une certification. Depuis 2022, la formation relative aux bases de l’entrepreneuriat dans le cadre du projet Bastau Business a été automatisée et mise en œuvre par l’intermédiaire du portail pour les qualifications. En ce qui concerne la situation professionnelle des personnes en situation de handicap, le gouvernement indique que trois mécanismes sont actuellement mis en œuvre. Tout d’abord, des quotas d’emploi pour les personnes en situation de handicap ont été mis en place. Conformément au Code social de la République du Kazakhstan, les autorités exécutives locales veillent à la mise en œuvre de la politique publique de promotion de l’emploi en fixant des quotas d’emploi pour les personnes en situation de handicap (2 à 4 pour cent du nombre total d’emplois, à l’exclusion des emplois liés à des travaux pénibles ou à des conditions de travail nocives ou dangereuses). À la fin du deuxième trimestre de 2023, 7 900 personnes étaient employées dans ce cadre. Deuxièmement, une procédure de subvention des coûts des employeurs liés à tout aménagement d’un lieu de travail spécial pour l’emploi de personnes en situation de handicap a été mise en place, et les salaires de ces salariés sont subventionnés pendant trois ans. Troisièmement, les mesures actives visant à promouvoir l’emploi dans le cadre du Projet national bénéficient aux demandeurs d’emploi, aux chômeurs et à d’autres catégories de citoyens, y compris les personnes en situation de handicap, qui peuvent suivre des cours de formation de courte durée sur les spécialisations et les qualifications recherchées sur le marché de l’emploi, une formation en cours d’emploi et une formation en ligne sur le portail électronique de la Bourse du travail, et obtenir des subventions de l’État pour la réalisation d’idées commerciales. Les jeunes peuvent également participer aux projets Jeunes stagiaires, Premier emploi et Contrat de générations pour acquérir une première expérience professionnelle dans leur domaine de spécialisation. Le gouvernement indique que depuis 2023, des subventions allant jusqu’à 400 fois l’indice de calcul mensuel (ICM – 1 million de tenges kazakhs (KZT)) pour le développement des entreprises ont été accordées aux groupes socialement vulnérables, dont les bénéficiaires d’une assistance sociale ciblée et de prestations pour leurs conjoints et/ou les familles nombreuses, ainsi que des prestations sociales en cas de perte du soutien de famille, mais aussi en faveur des migrants, des Kandas, des personnes en situation de handicap dont l’aptitude au travail n’est pas contre-indiquée, des personnes élevant des enfants en situation de handicap et/ou de leurs conjoints. Le gouvernement indique qu’au 1er septembre 2023, 34 316 personnes avaient demandé à participer au Projet national et que les mesures de promotion de l’emploi concernaient 24 866 personnes en situation de handicap. La commission note que dans ses observations finales de 2024, le Comité pour les droits des personnes handicapées des Nations Unies (CDPH) s’est félicité des mesures prises par l’État partie pour appliquer la convention relative aux droits des personnes handicapées, après sa ratification en 2015, notamment l’adoption, en 2019, du Plan national en faveur de la protection des droits des personnes handicapées et de l’amélioration de leur qualité de vie, qui prévoit des mesures destinées à garantir l’accessibilité de l’environnement physique et de l’éducation, et à améliorer les perspectives d’autosuffisance économique, l’accès à un emploi de qualité et les services sociaux. La commission prend toutefois note des préoccupations exprimées par le CDPH, notamment: 1) que le taux de chômage des personnes handicapées est élevé, en particulier celui des personnes handicapées victimes de formes multiples et/ou croisées de discrimination, et que ces personnes ont un accès limité à l’emploi dans le secteur privé et se heurtent à des obstacles à l’accessibilité sur leur lieu de travail; et 2) que les possibilités de formation professionnelle et de reconversion offertes aux personnes handicapées sont insuffisantes (CRPD/C/KAZ/CO/1, 19 avril 2024, paragraphes 5 et 57). La commission prie le gouvernement de: i) continuer de fournir des informations sur toute mesure juridique et pratique adoptée pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement des personnes en situation de handicap, et s’attaquer aux obstacles qu’elles rencontrent encore dans l’accès à la formation et à l’emploi dans les secteurs public et privé, ainsi que sur toute évaluation faite de l’impact de ces mesures; et ii) fournir des informations sur les mesures prises en ce qui concerne la situation professionnelle des femmes rurales, ainsi que sur leur impact, comme cela a été précédemment demandé.
Article 5. Mesures spéciales de protection. Restrictions concernant l’emploi des femmes. La commission prend note avec intérêt de l’indication du gouvernement selon laquelle la loi du 12 octobre 2021 sur les modifications et les ajouts à certains textes législatifs de la République du Kazakhstan sur la protection sociale de certaines catégories de citoyens a aboli la liste des emplois dans lesquels le travail des femmes est restreint. Elle ajoute que cela a été confirmé par l’ordonnance du ministère du Travail et de la Protection sociale de la République du Kazakhstan no 464 du 10 décembre 2021. La commission se félicite de l’indication du gouvernement selon laquelle le ministère du Travail et de la Protection sociale, de concert avec la Commission nationale des affaires féminines et de la politique familiale et démographique (ci-après, «la Commission nationale»), a organisé une réunion le 4 juin 2021 à laquelle ont participé le Médiateur des droits humains, des experts internationaux et des représentants des syndicats et du monde des entreprises afin d’examiner publiquement l’abolition de la liste avec les groupes cibles, ainsi que d’expliquer les droits et obligations tant des employeurs que des travailleuses. En outre, les inspecteurs territoriaux du travail ont organisé des activités de sensibilisation auprès de la population et des employeurs. Le gouvernement indique que 1 171 séminaires ont été organisés et que plus de 660 interventions dans les médias ont eu lieu pour expliquer la législation du travail et l’abolition de la liste. Un communiqué de presse sur l’abolition de la liste a été publié sur le site Web officiel et les réseaux sociaux du ministère du Travail et de la Protection sociale et a été transmis aux médias. La commission accueille ces informations favorablement et prie le gouvernement de fournir des informationssur le nombre de femmes dans les métiers qui figuraient sur cette liste.
Contrôle de l’application et accès des victimes de discrimination aux voies de recours légales. La commission prend note de l’indication de la CSI selon laquelle les salariés se heurtent à la discrimination lorsqu’ils tentent de protéger leurs droits en déposant plainte ou en engageant des poursuites, ou encore en organisant une action collective, etc., et que, de ce fait, leur employeur les licencie ou prend d’autres mesures de répression ou de représailles, et qu’il conviendrait donc de garantir la protection de ces travailleurs contre toute forme de persécution. La commission prend également note que le FEWU exprime des préoccupations similaires concernant le risque pour les lanceurs d’alerte d’être tenus pour responsables, ce qui en fait un obstacle important à la divulgation publique des violations, et le manque de voies de recours légales efficaces protégeant les droits des travailleurs en cas de harcèlement sur le lieu de travail. La commission prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle les questions relatives au harcèlement sexuel, y compris les accusations, la procédure d’enquête, l’établissement des faits et la détermination de la culpabilité et de la responsabilité, sont la prérogative et le devoir des autorités policières et judiciaires, et non des employeurs, qui ne possèdent pas les qualifications, l’expérience et les pouvoirs nécessaires pour conduire les procédures susmentionnées d’une manière légale, qualitative et efficace. Il indique en outre qu’un groupe d’experts composé de représentants des autorités de l’État, des partenaires sociaux, d’organisations scientifiques et publiques et de grandes entreprises a été créé, rattaché au ministère du Travail et de la Protection sociale, afin d’analyser les mesures de contrôle de l’application de la législation du travail en droit et dans la pratique, et de procéder à un examen exhaustif et à la prise en compte des vues des partenaires sociaux et du monde des entreprises. Le gouvernement ajoute que les normes proposées nécessitent une analyse préliminaire détaillée de l’expérience internationale dans ce domaine et l’organisation d’auditions publiques. La commission prie le gouvernement de: i) fournir des informations sur l’élaboration de dispositions prévoyant des sanctions et des mesures correctives, et protégeant contre la persécution; ii) prendre des mesures pour renforcer la capacité des autorités compétentes, notamment des inspecteurs du travail, à prévenir, identifier et traiter les cas de discrimination en matière d’emploi et de profession, y compris le harcèlement sexuel; et iii) prendre les mesures nécessaires pour prévenir le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, y compris des mesures visant à sensibiliser les travailleurs, les employeurs et leurs organisations aux voies de recours disponibles.
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