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Observation (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Ratification: 1931)
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 - Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Ratification: 2016)

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La commission salue la ratification du protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, et prend dûment note du premier rapport du gouvernement qui contient des informations détaillées sur les différentes mesures adoptées, notamment en ce qui concerne la prévention, l’assistance aux victimes et leur protection, l’indemnisation et la coopération internationale.
La commission prend aussi note des observations du Congrès des syndicats (TUC), reçues le 8 septembre 2023 et le 23 octobre 2023, ainsi que de la réponse du gouvernement, reçue le 17 novembre 2023.
Article 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention et article 1, paragraphes 1 et 2, du protocole. Politique nationale et action systématique. Dans ses commentaires précédents, la commission a noté le cadre juridique exhaustif mis en place pour lutter contre toutes les formes de travail forcé, complété par des stratégies qui portent essentiellement sur le renforcement des procédures d’identification et de protection des victimes, et du soutien qui leur est apporté; l’identification des responsables; et l’amélioration de la coopération internationale (Stratégie de lutte contre l’esclavage moderne de l’Irlande du Nord pour la période 2024-2027 et Stratégie écossaise de lutte contre la traite et l’exploitation de 2017). La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique qu’en 2023, une nouvelle commissaire indépendante chargée de la lutte contre l’esclavage a été désignée conformément à l’article 40 de la loi de 2015 sur l’esclavage moderne. Elle prend également note du premier rapport annuel que la commissaire indépendante a rédigé pour 2021-2022 et qui dresse un compte-rendu détaillé et complet des actions adoptées par le gouvernement dans différents domaines, dont la prise en charge et le soutien des victimes, l’application de la loi et les poursuites, la prévention et les recherches. La commissaire souligne que le nombre de victimes potentielles de l’esclavage moderne n’a cessé de croître, ce qui témoigne dans une certaine mesure du niveau accru de sensibilisation des personnes concernées.
En outre, la commission prend note du rapport sur la traite des êtres humains publié en 2023 par la Commission des affaires intérieures de la Chambre des communes selon lequel il convient de mettre à jour la Stratégie de lutte contre l’esclavage moderne de 2014. La Commission des affaires intérieures fait aussi remarquer que le gouvernement a transféré la responsabilité de l’esclavage moderne et de la traite des personnes du ministre de la Protection au ministre des Migrations. Elle exprime également sa préoccupation face au fait que le gouvernement accorde la priorité aux questions de migration irrégulière au détriment de la lutte contre la traite des personnes en tant que telle.
La commission prend dûment note des efforts continus que le gouvernement déploie pour revoir sa politique nationale et le cadre institutionnel de lutte contre le travail forcé et l’encourage à continuer à prendre des mesures en vue de donner suite aux recommandations de la Commission des affaires intérieures, y compris la révision de la stratégie de lutte contre l’esclavage moderne de 2014. Elle le prie de fournir des informations sur les mesures prises pour que les autorités chargées de la migration, du travail et de la justice pénale adoptent une approche coordonnée. Enfin, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les activités entreprises par la nouvelle commissaire indépendante chargée de la lutte contre l’esclavage, y compris toute recommandation faite aux organes compétents en matière de travail forcé.
Article 25 de la convention, et article 1, paragraphe 3, du protocole. Application de la législation. La commission rappelle que le travail forcé (y compris sous la forme de l’esclavage et de la traite des personnes) constitue une infraction pénale en vertu de la loi de 2015 sur l’esclavage moderne, de la loi de 2015 sur la traite et l’exploitation des êtres humains (Écosse) et de la loi de 2015 sur la traite et l’exploitation des êtres humains (justice pénale et soutien aux victimes) (Irlande du Nord). En outre, la loi de 2014 sur l’octroi des licences aux entrepreneurs de main-d’œuvre interdit à quiconque d’exercer en tant que tel, c’est-à-dire en tant que personne qui fournit des travailleurs à un tiers, sans disposer d’une licence. La loi interdit également de conclure des accords avec un fournisseur de main-d’œuvre qui ne disposerait pas d’une licence (toute violation de cette interdiction est punie d’une peine de prison). La commission note qu’en Angleterre et au Pays de Galles, le nombre de poursuites conclues liées au travail forcé est passé de 332 en 2020-2021 à 506 en 2021-2022; en Irlande du Nord, 45 enquêtes ont été menées par la police entre 2020 et 2023; et, en Écosse, entre 2015 et mars 2021, la police a ouvert 61 enquêtes liées à la traite des personnes et à l’exploitation.
La commission note l’indication du gouvernement selon laquelle l’Agence responsable des entrepreneurs de main-d’œuvre et de la lutte contre les pratiques de travail abusives (Gangmasters and Labour Abuse Authority, GLAA) est chargée de contrôler les activités des personnes qui agissent en tant qu’entrepreneurs de main-d’œuvre dans des secteurs à haut risque, comme la récolte ou la cueillette de produits agricoles, la cueillette de coquillages, ou la transformation et le conditionnement de produits agricoles récoltés. Le gouvernement ajoute que la loi de 2016 sur l’immigration a étendu les pouvoirs de la GLAA pour prévenir, détecter et investiguer tout cas grave d’exploitation au travail dans tous les secteurs de l’économique. La GLAA peut aussi demander l’aide de l’Agence nationale de lutte contre la criminalité pour enquêter sur certains délits (article 13).
Par ailleurs, la commission note que l’article 1 de la loi sur l’immigration définit le rôle du Directeur de la surveillance du marché du travail, qui est chargé de préparer une stratégie annuelle d’application de la législation du travail dans laquelle il expose l’ampleur et la nature du non-respect des normes sur le marché du travail et définit les priorités des trois principaux organes responsables du contrôle de l’application de la loi: le Service d’inspection des bureaux de placement, la GLAA et l’Équipe nationale chargée du salaire minimum de l’Administration des recettes et des douanes. Le gouvernement indique que, conformément à l’article 15 de la loi sur l’immigration, les trois organismes précités peuvent délivrer des engagements à respecter la loi sur le marché du travail (Labour Market Enforcement Undertakings, LMEU) aux personnes ou aux entreprises qui commettent des infractions sur le marché du travail. Si l’entité contrevenante ne s’y conforme pas, l’autorité chargée de l’application de la loi peut émettre un ordre l’intimant à respecter la loi (Labour Market Enforcement Order, LMEO). Le non-respect d’un tel ordre constitue une infraction pénale passible d’une peine d’emprisonnement (article 27 de la loi de 2016 sur l’immigration).
La commission note que la Commission des affaires intérieures souligne dans son rapport sur la traite des personnes de 2023 que l’attention que le gouvernement porte à la migration plutôt qu’à la traite des personnes se reflète dans ses priorités en matière d’application de la loi. Elle constate aussi que la GLAA mène rarement des inspections inopinées et que l’on attend des travailleurs eux-mêmes qu’ils dénoncent les possibles cas d’exploitation au travail. La commission note aussi que, dans ses observations, le TUC indique que: i) le fait que les organismes chargés de la surveillance du marché du travail mènent des opérations conjointes avec les services de contrôle de l’immigration sape la confiance des travailleurs migrants dans les mécanismes d’application de la loi qui, souvent, ne signalent pas les violations, craignant d’être licenciés et expulsés; et ii) la GLAA manque considérablement de fonds et dépend des signalements des travailleurs indiquant qu’ils sont victimes d’exploitation.
La commission reconnaît les mesures prises pour établir un cadre institutionnel consolidé afin de détecter et d’investiguer des situations de travail forcé dans tout le pays et encourage le gouvernement à continuer à prendre de telles mesures pour veiller à ce que les différents organes chargés du contrôle de l’application de la loi puissent mener des inspections préventivement et de manière coordonnée, et identifier les cas potentiels de travail forcé et enquêter à leur sujet, même sans signalement de situation d’exploitation de la part de travailleurs. À cet égard, la commission prie le gouvernement d’indiquer: i) le nombre de cas d’exploitation au travail détectés par l’Agence responsable des entrepreneurs de main-d’œuvre et de la lutte contre les pratiques de travail abusives (GLAA); ii) le nombre d’ordres à respecter la loi (LMEO) que le Directeur de la surveillance du marché du travail a émis pour des violations liées à des situations d’exploitation au travail; iii) le nombre de cas renvoyés aux autorités judiciaires pour qu’elles enquêtent et entament des poursuites; et iv) le nombre de condamnations prononcées et de sanctions imposées aux contrevenants.
Article 2 du protocole. Prévention. Alinéa d) Protection des travailleurs migrants contre d’éventuelles pratiques abusives ou frauduleuses. Le gouvernement indique qu’en 2019, un programme pour les travailleurs saisonniers a été mis en place pour permettre aux travailleurs étrangers de venir au Royaume-Uni pour travailler dans les secteurs de l’horticulture et de la volaille. Dans le cadre de ce programme, les travailleurs migrants peuvent obtenir un visa pour une période de six mois pour travailler dans le secteur horticole, et d’octobre à décembre dans l’industrie de la volaille. Le quota de travailleurs saisonniers a été fixé à 57 000 travailleurs pour 2024. Conformément aux lignes directrices émises par le ministère de l’Intérieur pour le parrainage de travailleurs temporaires, seules les entités autorisées par la GLAA (appelées les «exploitations du programme») peuvent parrainer des personnes qui cherchent à obtenir un visa de travailleur saisonnier. Les demandeurs doivent payer les frais liés à la demande ainsi que les coûts de leur voyage, et doivent prouver qu’ils disposent de suffisamment de fonds pour subvenir à leurs besoins au RoyaumeUni, à moins que l’entité qui les parraine soit disposée à assumer ces frais (voir les orientations du ministère de l’Intérieur pour l’obtention d’un visa de travailleur saisonnier). L’employeur doit verser au travailleur au moins le salaire minimum et veiller à ce qu’il bénéficie de périodes de repos et d’un accès aux soins de santé. Le ministère de l’Intérieur peut mener des contrôles de conformité avec la GLAA ou l’Administration des recettes et des douanes, notamment en se rendant dans des exploitations agricoles et en interrogeant les travailleurs.
Selon l’examen du programme pour les travailleurs saisonniers, effectué en 2024 par le Comité consultatif sur la migration de main-d’œuvre du ministère de l’Intérieur, le gouvernement a rendu obligatoire le versement d’un salaire pour un minimum de 32 heures chaque semaine du séjour d’un travailleur saisonnier dans le pays, même s’ils ne peuvent travailler en raison du mauvais temps. Toutefois, selon l’examen, il est toujours possible de licencier les travailleurs à cause de leur manque d’efficacité et, dans la pratique, les transferts sont impossibles parce qu’il n’y a pas de postes vacants ou parce que la date d’expiration du visa ne permet pas à un travailleur de suivre une formation suffisante.
La commission note également que l’Inspecteur en chef indépendant des frontières et de l’immigration a souligné, dans son rapport 2022 sur l’inspection du système d’immigration dans le secteur agricole, que le ministère de l’Intérieur n’avait pas démontré qu’il disposait des mécanismes pour s’assurer que les exploitations du programme respectaient les prescriptions en matière de conformité et, lorsque des travailleurs ont exprimé de sérieuses inquiétudes, il n’a pas réagi rapidement.
Selon l’examen du Comité consultatif sur la migration de main-d’œuvre, au cours de l’année 2023, 125 exploitations agricoles sur environ 500 (soit environ 25 pour cent) ont été visitées par des équipes chargées du contrôle du Service britannique des visas et de l’immigration (UK Visa and Immigration, UKVI) du ministère de l’Intérieur, et 1 116 migrants ont été interrogés (soit environ 3,4 pour cent des travailleurs saisonniers). Lors de certaines de ces inspections, le personnel de l’UKVI était accompagné par des membres de la GLAA. Les visites ont lieu immédiatement, si des violations graves des règles du programme sont signalées ou elles sont programmées en fonction de la fréquence des parrainages, de la localisation ou du nombre de travailleurs parrainés. En outre, le Comité consultatif sur la migration de main-d’œuvre a souligné que les travailleurs saisonniers sont particulièrement exposés au risque d’exploitation en raison de la nature de leur travail dans des zones rurales souvent isolées, de la crainte de perdre leur visa et leurs revenus s’ils déposent plainte, et du fait qu’ils parlent peu ou pas l’anglais. Il indique également que, dans certains cas, des migrants ont payé des frais importants à l’étranger à des agents non officiels ou ont contracté des emprunts.
Dans ses observations, le TUC note que les saisonniers agricoles travaillent dans des conditions fortement abusives et sont mis en demeure de payer des frais de recrutement, ce qui peut les conduire à une situation de servitude pour dettes. Le TUC ajoute que, même si les travailleurs saisonniers peuvent changer d’employeur, beaucoup d’entre eux ont indiqué que cela leur était refusé ou qu’ils devaient payer des frais pour le faire.
La commission prend note de ces informations et rappelle que les travailleurs migrants saisonniers peuvent être particulièrement vulnérables aux pratiques abusives qui sont susceptibles de les faire tomber dans le travail forcé, surtout lorsqu’ils ne connaissent pas leurs droits ou ne les exercent pas par crainte de représailles. La commission reconnaît les mesures prises par le gouvernement pour revoir de manière exhaustive son programme pour les travailleurs saisonniers et veut croire que le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour:
  • éviter que les travailleurs saisonniers agricoles ne soient piégés dans une situation de servitude pour dettes à travers l’imposition de frais de recrutement ou d’autres frais qui ne sont pas autorisés par la loi, y compris en veillant à ce que les exploitations du programme n’aient pas recours aux agents de recrutement à l’étranger qui imposent illégalement des frais de recrutement aux travailleurs;
  • fournir aux travailleurs saisonniers migrants des informations sur leurs droits avant leur recrutement et leur placement, ainsi que sur les mécanismes juridiques auxquels ils peuvent recourir en cas de violation de ces droits;
  • garantir que la GLAA et d’autres autorités compétentes mènent régulièrement des inspections, surtout dans les régions isolées.
La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur toute révision du programme actuel pour les travailleurs saisonniers sur la base des conclusions du Comité consultatif sur la migration de main-d’œuvre, ainsi que des informations sur le nombre de travailleurs migrants participant au programme pour les travailleurs saisonniers.
Alinéa e) Appui à la diligence raisonnable pour prévenir les risques de travail forcé et y faire face. La commission rappelle que l’article 54 de la loi de 2015 sur l’esclavage moderne exige d’une entité commerciale ayant atteint un chiffre d’affaires déterminé par règlement qu’elle prépare, chaque année, une déclaration sur l’esclavage et la traite des êtres humains en y indiquant les mesures prises pour garantir que ces phénomènes n’ont pas cours dans ses chaînes d’approvisionnement ni dans aucun secteur de son activité. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, pour accroître la compréhension de l’ article 54 et en améliorer le respect, une formation en ligne pour les entreprises a été lancée pour les conseiller sur les actions pratiques qu’elles peuvent entreprendre pour identifier, atténuer et prévenir le travail forcé. Le gouvernement fait aussi référence à la publication d’un guide sur la lutte contre l’esclavage moderne dans les chaînes d’approvisionnement du gouvernement, qui vise à aider les entités publiques à gérer les risques d’esclavage moderne à la fois lors de nouvelles opérations d’achat et dans les contrats déjà conclus. Depuis mars 2021, plus de 10 600 déclarations ont été consignées dans le registre en ligne et concernaient plus de 35 800 entités. De plus, le gouvernement indique qu’en janvier 2023, 3 462 évaluations ont été menées grâce à un outil d’évaluation de l’esclavage moderne qui a été conçu pour aider les entreprises à identifier les éléments qu’un fournisseur ou une entreprise peut améliorer, et de quelle manière, pour lutter contre les risques d’esclavage moderne dans ses chaînes d’approvisionnement. En 2018, les autorités écossaises ont également publié des orientations pour aider les entreprises à identifier et prévenir les situations de traite et d’exploitation des personnes dans leurs activités et ont soutenu la création d’une initiative, Scotland Against Modern Slavery (SAMS), visant à informer le monde de l’entreprise en Écosse et à diffuser des informations sur les meilleures pratiques. Les autorités d’Irlande du Nord se sont engagées avec le secteur agroalimentaire à améliorer la transparence des obligations des chaînes d’approvisionnement de ce secteur.
La commission salue les mesures prises par le gouvernement pour appuyer les acteurs des secteurs privé et public à se conformer à leurs obligations de diligence raisonnable au titre de l’article 54 de la loi sur l’esclavage moderne et l’encourage à continuer à prendre des mesures pour assurer le respect de ces obligations et partager les bonnes pratiques, et à fournir des informations à cet égard.
Article 3 du protocole. i) Identification et protection des victimes. Dans ses commentaires précédents, la commission a pris note de la création du mécanisme national d’orientation (NRM) en tant que principal cadre d’identification des victimes de l’esclavage moderne au Royaume-Uni et principal canal d’assistance et de protection des victimes. Selon le guide sur le NRM que le ministère de l’Intérieur a adopté, les victimes du travail forcé ne peuvent être orientées vers ce dispositif qu’avec leur consentement et par l’intermédiaire d’un organisme de première ligne. Une fois qu’il a été procédé à l’orientation, une autorité compétente du ministère de l’Intérieur doit déterminer s’il existe des «motifs raisonnables» de considérer la personne orientée vers le NRM comme une victime d’esclavage moderne. Les directives officielles sur l’esclavage moderne pour l’Angleterre et le Pays de Galles et les directives non réglementaires pour l’Irlande du Nord et l’Écosse contiennent une liste d’indicateurs généraux pour aider l’autorité compétente à procéder à une première évaluation. Les «décisions fondées sur des motifs raisonnables» doivent être prises dans un délai de cinq jours ouvrables dans la mesure du possible et, dans un deuxième temps, une «décision fondée sur des motifs concluants» doit être prise pour reconnaître officiellement une personne en tant que victime.
Le gouvernement indique qu’environ 17 000 décisions fondées sur des motifs raisonnables ont été prises en 2022, dont 12 pour cent de négatives, et 3 528 l’ont été au cours des trois premiers mois de 2023, dont 42 pour cent de négatives. En ce qui concerne les décisions fondées sur des motifs concluants, plus de 6 000 ont été prises en 2022, dont 11 pour cent de négatives, et 2 275 l’ont été au cours des trois premiers mois de 2023, dont 25 pour cent de négatives.
La commission note que selon le premier rapport sur la traite des êtres humains de la Commission des affaires intérieures de la Chambre des communes 2023-2024, la procédure de prise de décisions du NRM est extrêmement lente et, au troisième trimestre 2023, le délai moyen pour parvenir à une décision fondée sur des motifs concluants était de 530 jours. En réponse au rapport de la Commission des affaires intérieures, le gouvernement indique qu’il y a eu une augmentation sans précédent du volume des orientations vers le NRM, à savoir une augmentation de 625 pour cent entre 2014 et 2022, ce qui a présenté d’importantes difficultés en matière de ressources et de flux de travail. Selon le gouvernement, les délais pour prendre une décision sont aussi tributaires du temps nécessaire pour recueillir un nombre suffisant de preuves, ce qui peut s’avérer difficile. Il ajoute qu’il a alloué des fonds pour recruter de nouveaux membres du personnel.
Dans ses observations, le TUC indique que les failles dans le fonctionnement du NRM persistent malgré de précédentes réformes, qu’il n’existe pas de procédure d’appel officielle et que les autorités n’adoptent pas les décisions en temps voulu. En outre, le TUC souligne qu’il y a une forte augmentation du nombre de victimes potentielles qui ne souhaitent pas être orientées vers ce dispositif, souvent par craintes légitimes de représailles, d’être arrêtés ou expulsés du pays.
La commission encourage le gouvernement à continuer à prendre les mesures nécessaires pour répondre aux faiblesses actuelles dans le fonctionnement du mécanisme national d’orientation (NRM), notamment en ce qui concerne: i) la garantie que les victimes potentielles de travail forcé sont informées des avantages à être orientées vers le NRM; ii) la réduction du temps de prise de décision; et iii) la poursuite du renforcement des capacités du NRM à évaluer les preuves de cas présumés de travail forcé. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de cas soumis au NRM en Angleterre et au Pays de Galles, en Écosse et en Irlande du Nord; sur le nombre de décisions fondées sur des motifs concluants positives et sur le nombre de refus. Enfin, la commission prie le gouvernement de préciser si les refus d’accorder le statut de victime de travail forcé à une personne peuvent faire l’objet d’un réexamen.
ii) Protection et assistance. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, en Angleterre et au pays de Galles, les personnes qui ont obtenu une décision fondée sur des motifs raisonnables positive peuvent bénéficier d’un soutien dans le cadre du contrat de prise en charge des victimes d’esclavage moderne, financé par le gouvernement pour les aider à se reconstruire, à entamer des poursuites dans le système de justice pénale et à se réinsérer dans la communauté. Ce contrat peut également aider les victimes à obtenir une assistance financière, un hébergement sûr et un accès aux services de santé. Ces mesures de protection sont prises pour 45 jours ou jusqu’à l’adoption d’une décision fondée sur des motifs concluants. Au-delà de cette période, une évaluation des besoins basée sur le rétablissement des victimes est menée pour établir un plan de transition et de soutien spécifique et sortir du contrat de prise en charge des victimes d’esclavage moderne. En Écosse, les règles de protection des victimes du travail forcé sont définies dans la partie 2 de la loi de 2015 sur la traite et l’exploitation des êtres humains (Écosse) et dans les règlements de 2018 sur la traite et l’exploitation des êtres humains (Écosse) (soutien aux victimes). L’article 9 de la loi prévoit que le soutien et l’assistance nécessaires sont apportés aux personnes considérées comme victimes de la traite des êtres humains pendant 90 jours. En ce qui concerne l’Irlande du Nord, l’article 18 de la loi de 2015 sur la traite et l’exploitation des êtres humains (justice pénale et soutien aux victimes) (Irlande du Nord) prévoit que les personnes sont prises en charge par le NRM tant que la détermination du statut de victime par l’autorité compétente est en cours. L’assistance et le soutien seront prolongés de 45 jours s’il est établi qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la personne est effectivement une victime.
Par ailleurs, la commission note que l’article 65 de la loi de 2022 sur la nationalité et les frontières prévoit un permis de séjour temporaire pour les victimes de l’esclavage ou de la traite des personnes qui ont obtenu une décision fondée sur des motifs concluants positive (à des fins de rétablissement, de demande d’indemnisation et de coopération avec les autorités). Le permis ne peut pas être accordé si le besoin d’assistance de la personne peut être satisfait dans le pays d’origine et il peut être révoqué lorsque la personne représente une menace pour l’ordre public, ou si la personne s’est déclarée victime de mauvaise foi (articles 54 4) et 65 6)). La commission observe également que le gouvernement se réfère à la loi de 2023 sur les migrations illégales, en vertu de laquelle les victimes d’esclavage moderne peuvent être privées de permis temporaire si elles sont entrées illégalement dans le pays (article 1 1) et article 5 1) c)), sauf si la victime coopère avec les autorités publiques concernant une enquête ou une procédure pénale (article 22).
La commission note que, dans ses observations, le TUC souligne que la loi sur les migrations illégales empêchera des victimes du travail forcé en situation irrégulière de demander à bénéficier du mécanisme d’aide existant, ce qui augmente le risque d’une exploitation accrue. Dans ses observations finales de 2024, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a fait part de son inquiétude face à la loi sur les migrations illégales en vertu de laquelle certaines protections pour les victimes potentielles du travail forcé ont été supprimées. En particulier, le comité est préoccupé par le fait que la nouvelle législation alourdit la charge de la preuve lors de la saisine du mécanisme national d’orientation (CCPR/C/GBR/CO/8).
La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de victimes du travail forcé qui ont bénéficié d’une protection et d’une assistance en Angleterre et au Pays de Galles (par le biais du contrat de prise en charge des victimes d’esclavage moderne), en Écosse et en Irlande du Nord. Elle le prie également d’indiquer combien de victimes du travail forcé ont bénéficié d’un permis temporaire au titre de l’article 65 de la loi de 2022 sur la nationalité et les frontières. À cet égard, la commission prie le gouvernement d’indiquer les mesures prises pour protéger de toutes représailles les victimes qui décident de collaborer avec les autorités judiciaires. Enfin, la commission prie le gouvernement d’indiquer le type d’assistance fournie aux victimes qui retournent dans leur pays d’origine.
Article 4, paragraphe 1. Accès à des mécanismes de recours, tels que l’indemnisation. Le gouvernement indique que les victimes du travail forcé peuvent avoir accès à une indemnisation et à d’autres voies de recours, tant sur le plan civil que pénal. En outre, les victimes de la traite des personnes peuvent bénéficier d’une indemnisation au titre du Programme d’indemnisation des victimes d’infractions pénales de 2012 (modifié) dans les cas identifiés par le NRM. Selon l’article 30, les types de prestations qui peuvent être versés aux victimes dans le cadre de ce régime comprennent, entre autres: des indemnités en cas de lésions, des indemnités pour perte de gains et des indemnités pour dépendance. La commission note en outre qu’en cas de non-respect du salaire minimum national, le ministère public peut engager des poursuites pénales en vertu de la loi de 2015 sur l’esclavage moderne pour à la fois recouvrer les montants et engager des poursuites pénales. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre de victimes de traite des personnes qui ont bénéficié d’une indemnisation au titre du Programme d’indemnisation des victimes d’infractions pénales de 2012 (modifié). À cet égard, elle le prie également de préciser si le droit de la victime à recevoir une indemnisation dépend de sa coopération avec les autorités.
Article 2, paragraphe 2, c) de la convention. Sanction assortie d’une obligation d’effectuer un travail non rémunéré. Depuis de nombreuses années, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les détenus soumis à une obligation de travailler ne le fassent pas au profit d’entités privées, sauf s’ils ont donné leur consentement formel et éclairé. Dans son dernier commentaire, la commission saluait la déclaration du gouvernement à la Chambre des communes selon laquelle, à partir de juin 2021, il ne serait plus fait appel à des entités privées pour placer des délinquants condamnés auprès de fournisseurs de services pour accomplir un travail d’intérêt général. La commission note avec intérêt qu’à partir du 26 juin 2021, en Angleterre et au Pays de Galles, le service de probation (un service public de justice pénale qui supervise les délinquants purgeant des peines de travail d’intérêt général) ne confie plus aucune prestation de travail non rémunéré à un sous-traitant. À cet égard, la commission note d’après les informations du gouvernement qu’en Écosse et en Irlande du Nord, aucune entité privée ne bénéficie du travail non rémunéré des détenus.
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