National Legislation on Labour and Social Rights
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Employment protection legislation database
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Un représentant gouvernemental a fait part de son appréciation des efforts de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale pour évaluer le respect des conventions et recommandations de l’OIT permettant ainsi aux législations nationales du travail de se perfectionner. Le gouvernement prend bonne note des observations formulées par la commission d’experts concernant l’application de la convention no 87. Cependant, il tient à souligner avoir fourni toutes les observations demandées dans les délais requis. Il faut rappeler qu’aujourd’hui 94 organisations syndicales sont actives en Algérie, dans tous les secteurs d’activités, tant dans la fonction publique que dans le secteur privé. La législation algérienne en matière de relations de travail consacre le dialogue social et la négociation collective comme fondements essentiels sur lesquels reposent les rapports entre les partenaires sur les lieux de travail. Ce principe a permis la signature de plus de 3 000 conventions collectives d’entreprises, 80 conventions collectives de branche, plus de 16 000 accords collectifs d’entreprises et 156 accords collectifs de branche. Au niveau national, un pacte national économique et social a été signé en 2006 et reconduit en février 2014, lors de la 16e réunion tripartite, sous la forme d’un pacte économique et social de croissance. L’expérience algérienne en matière de dialogue social a fait l’objet d’une présentation détaillée devant la 309e session du Conseil d’administration du BIT en novembre 2010, expérience qui a d’ailleurs été unanimement saluée. Concernant les observations formulées par la commission d’experts relatives à l’enregistrement des syndicats, le gouvernement indique que, après la mise en conformité de ses statuts avec la législation nationale, le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (SNAPEST) a été enregistré et qu’il exerce ses activités dans le cadre réglementaire sans aucune difficulté. S’agissant du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (SNAPAP), ce dernier exerce ses activités conformément à la législation et la réglementation en vigueur. Le conflit interne au sein du syndicat est dépassé dans la mesure où il a fait l’objet d’une décision de la Cour suprême. Dans cette affaire, le gouvernement a adopté une position neutre, conformément aux recommandations du Comité de la liberté syndicale. Par ailleurs, le Directeur général du BIT a eu l’occasion de s’entretenir, à Alger, avec la direction du SNAPAP ainsi qu’avec la partie contestataire, lors d’une visite officielle en avril 2013. Ce cas étant résolu depuis la décision de la plus haute instance judiciaire du pays, le gouvernement demande la clôture du cas devant le Comité de la liberté syndicale. Par ailleurs, la commission d’experts a noté avec satisfaction l’enregistrement du Syndicat national des travailleurs de la formation professionnelle (SNTFP). Il en est ainsi lorsque les demandes d’enregistrement sont conformes aux prescriptions de la loi. Les retards constatés dans l’enregistrement de certains syndicats ne sauraient être interprétés comme une entrave à l’exercice du droit syndical mais découlent de la nécessité de mise en conformité des statuts des organisations concernées avec les exigences de la loi. A cet égard, une dizaine de syndicats ont été enregistrés depuis 2012.
Concernant les allégations relatives aux actes d’intimidation ou de menaces de mort qui auraient été proférées à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, délit puni par le Code pénal en Algérie, le gouvernement observe qu’aucune plainte pour menace de mort n’a été déposée auprès des juridictions compétentes. Par ailleurs, les allégations ne sont étayées d’aucune preuve concrète. En ce qui concerne la mise en œuvre de l’article 6 de la loi no 90-14 relative aux modalités d’exercice du droit syndical, le gouvernement a déjà indiqué que les travailleurs étrangers peuvent adhérer librement à une organisation syndicale, et la nationalité ne constitue donc pas un obstacle à la syndicalisation des travailleurs étrangers qui bénéficient des mêmes droits et de la même protection que les travailleurs nationaux. Toutefois, en ce qui concerne le critère de la nationalité pour constituer une organisation syndicale, la question est en cours d’examen dans le cadre de la finalisation du projet de Code du travail. En ce qui concerne l’application de l’article 4 de la loi no 90-14, qui porte sur les modalités de constitution, par les organisations de travailleurs, quel que soit le secteur auquel elles appartiennent, de fédérations et de confédérations de leurs choix, les critères entourant la création de fédérations et de confédérations syndicales seront également précisés dans le cadre de la finalisation du Code du travail en question. Enfin, pour ce qui est de la mise en œuvre de l’article 43 de la loi no 90-02, relative à la prévention et au règlement des conflits collectifs de travail et à l’exercice du droit de grève, le gouvernement observe que la convention no 87 ne traite en aucune manière du droit de grève. Néanmoins, le droit de grève est un droit constitutionnel transcrit dans la loi et qui obéit à des procédures légales en matière de prévention, de conciliation, de médiation et d’arbitrage. Le nombre de grèves enregistrées annuellement montre la réalité du libre exercice du droit de grève par les organisations syndicales. La dernière en date étant la grève déclenchée par les syndicats du secteur de l’éducation nationale et qui a connu un dénouement suite aux négociations avec les pouvoirs publics, négociations qui se sont soldées par la satisfaction des revendications des travailleurs. L’Algérie a ratifié 59 conventions de l’OIT, dont les huit conventions fondamentales ainsi que trois conventions de gouvernance. Elle figure parmi les pays ayant ratifié le plus grand nombre de conventions internationales du travail. Le monde du travail évolue sans cesse pour s’adapter aux nouveaux contextes économiques et sociaux. Dans ce contexte, le gouvernement est sensible à toute recommandation ou observation pouvant contribuer à l’amélioration de la législation du travail et à l’instauration d’un climat social apaisé.
Les membres travailleurs ont observé que les questions soulevées dans le présent cas concernent pour l’essentiel le secteur public, à savoir des travailleurs dont l’employeur est l’Etat. Cela n’exclut pas le secteur privé qui rencontre les mêmes problèmes. Dans sa réponse, le gouvernement n’a pas répondu aux accusations d’actes d’intimidation et de menaces, y compris des menaces de mort, formulées par la Confédération syndicale internationale et par plusieurs syndicats algériens dans la fonction publique. Des intervenants prendront la parole pour témoigner de la réalité des problèmes allégués. Le gouvernement n’a pas non plus répondu aux observations de la commission d’experts concernant la mise en conformité de la loi avec les normes de l’OIT. A cet égard, il est rappelé que la loi algérienne réserve le droit de créer des organisations syndicales aux personnes qui possèdent la nationalité algérienne de naissance ou depuis dix ans au moins; que les organisations syndicales sont limitées dans leur possibilité de constituer des fédérations ou des confédérations de leur choix. A cet égard, s’il est admis qu’une législation nationale peut obliger les fondateurs d’une organisation syndicale à respecter certaines prescriptions de publicité et autres dispositions analogues, ces prescriptions ne devraient pas s’apparenter à une autorisation préalable ou être telles qu’elles reviennent à interdire en fait la création d’une organisation. Dans un cas examiné par le Comité de la liberté syndicale en mars 2013 (cas no 2944), ce dernier a demandé au gouvernement d’indiquer si, en définitive, les deux organisations syndicales plaignantes, nommément le Syndicat des enseignants du supérieur (SESS) et le Syndicat national autonome des postiers (SNAP), ont obtenu leur enregistrement. Les membres travailleurs croient pouvoir dire que ces organisations ne sont toujours pas enregistrées aujourd’hui.
Les organisations syndicales subissent diverses limitations dans leur droit d’exercer librement leurs activités et de formuler leurs programmes d’action. Il ne s’agit pas ici d’un simple problème relatif au contenu du droit de grève. Selon la loi algérienne, la grève est interdite lorsqu’elle est susceptible de provoquer une «crise économique grave». Le gouvernement affirme que cette notion est substantiellement identique à l’expression «crise nationale aiguë», habituellement utilisée par la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale. Néanmoins, ces derniers demandent au gouvernement de préciser le contenu de cette notion en l’étayant par des exemples. En réalité, tous les préavis de grève déposés au cours des dernières années dans le secteur public ont fait l’objet par les autorités d’une procédure en référé devant le tribunal administratif et, dans tous les cas, la grève a été déclarée illégale. Cette procédure est unilatérale car les organisations syndicales concernées n’y sont pas invitées pour faire valoir leur point de vue. L’ordonnance rendue n’est pas motivée et n’est susceptible de recours que devant le Conseil d’Etat qui rend ses décisions dans un délai moyen de deux ans. Les membres travailleurs rappellent que, selon la jurisprudence constante du Comité de la liberté syndicale, la décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance. Or, à partir du moment où une proportion aussi démesurée de grèves sont déclarées illégales, à la seule requête des pouvoirs publics parties au conflit, sans aucune motivation, sans que les parties intéressées aient l’occasion de développer leur point de vue, on peut s’interroger sur l’indépendance de la justice en Algérie et se demander si elle peut prétendre à la confiance des parties. Par ailleurs, la commission d’experts fait aussi allusion à l’existence d’une commission nationale d’arbitrage, qui peut être saisie par le gouvernement en vue d’intervenir dans les conflits collectifs. Les membres travailleurs s’interrogent sur la composition d’un tel organe en l’absence d’élections syndicales ou d’un comptage indépendant des affiliations en Algérie. Cela revient donc à s’interroger sur l’indépendance de cette commission d’arbitrage et la confiance qu’elle peut susciter chez les parties. En réalité, les activités syndicales, comme la tenue de congrès ou de réunions de formation, sont soumises à une autorisation du ministère de l’Intérieur, et la procédure donne presque systématiquement lieu à des intimidations, des retards et des tracasseries diverses.
Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour ses réponses très constructives et son attitude positive face aux commentaires de la commission d’experts sur la façon d’améliorer ses relations de travail et la législation. Les membres employeurs ont apprécié que le gouvernement reconnaisse que le dialogue social et la négociation collective sont des piliers essentiels, ainsi que les informations fournies concernant la négociation et la consultation avec les partenaires sociaux. Deux grands thèmes semblent avoir été retenus par la commission d’experts au titre de l’application de la convention. La première question, soulevée dans les commentaires précédents de la commission d’experts, concerne l’article 6 de la loi no 90-14 de 1990 qui limite le droit de constituer une organisation syndicale aux personnes de nationalité algérienne d’origine ou acquise depuis au moins dix ans. La commission d’experts avait rappelé que le droit syndical doit être garanti aux travailleurs et aux employeurs sans distinction de nationalité. Egalement dans ses commentaires précédents, la commission d’experts avait demandé à plusieurs reprises au gouvernement de modifier en conséquence les dispositions législatives pour remédier à ce problème et d’informer sur les mesures prises à cet effet. En outre, dans ses commentaires précédents, la commission d’experts avait demandé à plusieurs reprises au gouvernement de modifier sa législation pour supprimer tous les obstacles qui empêchent les travailleurs de constituer des fédérations de leur choix. La commission avait noté les explications du gouvernement selon lesquelles la nationalité n’était pas un obstacle à l’enregistrement. Pour autant, cela pèse sur leur capacité à constituer des syndicats. Croyant comprendre que les commentaires de la commission d’experts seront pris en compte dans le cadre de la révision en cours du Code du travail, les membres employeurs encouragent le gouvernement à fournir davantage d’informations à ce sujet. La deuxième question constitue un motif de préoccupation pour les membres employeurs. La commission d’experts, dans ses commentaires des dernières années, s’est référée à l’article 43 de la loi no 90-02, en vertu duquel le recours à la grève est interdit dans les services essentiels lorsque cette grève «est susceptible d’entraîner par ses effets une crise économique grave». La commission d’experts avait non seulement demandé au gouvernement de modifier le libellé de la loi, mais avait aussi proposé un projet de texte à cet effet. En outre, la commission d’experts avait demandé des exemples de cas concrets dans lesquels, en raison de ce libellé, le recours à la grève a été interdit sur le fondement de ses effets potentiels. Selon les membres employeurs, cela pose problème car la commission d’experts a outrepassé son mandat à cet égard. Il est important que le droit de grève ne soit pas traité dans les conclusions de la Commission de la Conférence car il n’y a pas de consensus tripartite sur le fait qu’il soit traité dans la convention. Dans ses réponses, le gouvernement était aussi d’avis que la convention ne traite pas du droit de grève. Les membres employeurs concluent en déclarant que le gouvernement a fait preuve d’un esprit très constructif et l’ont encouragé à fournir les informations demandées par la commission d’experts. Il faut saluer la réceptivité du gouvernement qui a bien accueilli les commentaires de la commission d’experts pour améliorer les relations de travail au sein du pays, ainsi que les efforts qu’il a déjà accomplis et qu’il doit poursuivre.
Le membre travailleur de l’Algérie a observé que, malgré la situation particulière que vit l’Algérie depuis quelques années, cela n’a pas empêché le développement d’un pluralisme syndical, du moins dans certains secteurs. Les grandes centrales syndicales ont dû faire face ces dernières années à de nouveaux choix politiques guidés par la situation économique et sociale. Il s’est déclaré solidaire des difficultés rencontrées par les syndicalistes dans son pays. Les difficultés sont indéniables mais elles peuvent être réglées dans le cadre d’un dialogue social national. Faisant état de la situation des travailleurs et du syndicalisme dans la région, il souligne que l’évolution de la situation nécessite de l’écoute, de la conciliation et de franchir certaines étapes.
Une observatrice représentant la Confédération syndicale internationale (CSI) a rappelé qu’à la suite des événements d’octobre 1989 le pouvoir, sous la contrainte de la révolte populaire, a cédé de petites réformes sur le pluralisme syndical, cependant limitées aux syndicats sectoriels. C’est ainsi que le SNAPAP a été enregistré en 1990. Cependant, 90 pour cent des syndicats sectoriels enregistrés pendant cette période de révolte ont été dissous suite à l’arrêt du processus électoral en 1992. Les syndicats épargnés demeurent la cible constante d’un pouvoir qui cherche à les contrôler ou à les neutraliser. L’Algérie a ratifié la convention no 87 en 1962 mais le pluralisme syndical n’a été inscrit dans la Constitution nationale qu’en 1989. Même si l’article 132 de cette Constitution dispose que les conventions ratifiées sont supérieures aux lois nationales, le contenu de la convention ne peut être revendiqué devant les tribunaux en matière de libre exercice du droit syndical. En ce qui concerne les suspensions et licenciements de syndicalistes, en septembre 2013, neuf membres du bureau fédéral du secteur des travaux publics ont été suspendus pendant un mois suite à une grève. Aujourd’hui, 137 syndicalistes, en majorité des femmes, sont toujours suspendus, suite à une grève générale déclenchée en avril 2012. En ce qui concerne l’interdiction de manifestation et la répression physique et judiciaire, des centaines de manifestants et de grévistes ont fait l’objet de violence physique et ont été arrêtés en 2012, notamment MM. Abdel Khader Kherba et Tahar Bel Abes, du comité des chômeurs du SNAPAP, et M. Yacine Zaïd, représentant de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA). En février 2013, les forces de l’ordre ont encerclé la maison des syndicats pour empêcher la tenue du Forum maghrébin des diplômés chômeurs, puis ont arrêté et expulsé les délégations du Maroc, de la Mauritanie et de la Tunisie qui devaient y participer. En mars 2013, la police des frontières a empêché une délégation de 100 personnes du SNAPAP de se rendre en Tunisie pour le Forum social mondial. Concernant l’ingérence dans les affaires internes des syndicats et leur «clonage», qui constituent des pratiques courantes de la part des autorités, ces derniers ont décidé de créer un syndicat «clone» du SNAPAP en 2001, dirigé par un député à la retraite. Ce clonage avait pour objectif de discréditer le SNAPAP auprès de l’OIT. Les congrès syndicaux régionaux ou nationaux se font sous ordonnance du tribunal, or on peut s’étonner que le ministère du Travail refuse de considérer les dossiers résultant de ces congrès concernant le SNAPAP. Par ailleurs, les services des renseignements généraux ont convoqué les fondateurs du Syndicat des enseignants du supérieur solidaires dans le but de faire pression sur les travailleurs et en même temps de chercher à identifier les personnes susceptibles d’aider l’administration à créer une organisation «clone». En ce qui concerne le refus d’enregistrement de syndicats autonomes ou d’une organisation faîtière, le refus d’enregistrer des syndicats ou des confédérations est une décision discrétionnaire fondée sur aucun texte réglementaire. Les demandes d’enregistrement de nouveau syndicat demeurent sans suite durant des années dans le but de dissuader toute nouvelle constitution de syndicat. Les demandes d’autorisation du ministère de l’Intérieur pour l’organisation de réunions, de rencontres, de séminaires de formation ou de congrès syndicaux sont systématiquement refusées. En réalité, il y a une absence totale de dialogue social. Lorsqu’un syndicat est enfin enregistré, l’employeur peut refuser de le reconnaître ou encore harceler son dirigeant, comme c’est le cas du Syndicat des travailleurs de SONELGAZ (secteur de l’électricité et du gaz). En conclusion, le SNAPAP a déjà déposé plusieurs plaintes auprès du Comité de la liberté syndicale. Ces dernières ont donné lieu à des recommandations qui sont ignorées par le gouvernement. La répression à l’encontre des membres du SNAPAP s’est même accrue. L’assistance technique du BIT n’a pas donné de résultat. La gravité de la situation mériterait que l’on considère les autres options envisageables dans le cadre de la Constitution de l’OIT.
Le membre gouvernemental de l’Egypte a salué les efforts déployés par le gouvernement dans l’élaboration d’un projet de Code du travail qui prend en compte les observations de la commission d’experts, en particulier pour ce qui concerne la possibilité de créer librement des organisations syndicales, des fédérations et confédérations dans tous les secteurs d’activités et vis-à-vis des droits syndicaux reconnus aux travailleurs étrangers. De même, des mesures ont été prises pour renforcer le dialogue avec les partenaires sociaux et des consultations sont menées sur tous les aspects de l’activité syndicale. Par ailleurs, le droit de grève est reconnu par la Constitution nationale, la grève n’étant donc pas interdite mais simplement réglementée. Quant au système judiciaire, il prend en compte les conventions de l’OIT et son fonctionnement mérite d’être respecté. Les réformes profondes qu’a entreprises l’Algérie se poursuivent et elles ne sont pas exemptes de difficultés et de défis. Le peuple y est pleinement partie prenante et, en ce sens, l’Algérie constitue un gardien des droits humains fondamentaux, de la bonne gouvernance et du pluralisme syndical.
Une observatrice représentant l’Internationale de l’éducation (IE) a dénoncé la précarisation des contrats de travail dans l’éducation, laquelle ne permet pas de créer le climat social favorable à la syndicalisation qui est préconisé par la convention. Depuis 2006, la Fédération algérienne de l’éducation du SNAPAP revendique des contrats de travail permanents pour des dizaines de milliers d’enseignants et enseignantes précaires. Leur mouvement est réprimé. Plus de 7 000 enseignants précaires protestataires ont été arrêtés et 5 000 ont été verbalisés comme des criminels puis licenciés parfois après plus de dix ans de carrière. Ces travailleurs, principalement des femmes, sont maintenant sans ressources, et plusieurs déclarent avoir été passées à tabac par les forces de l’ordre. Cependant, l’avènement du Printemps arabe et la crainte que les protestations ne prennent de l’ampleur ont ouvert un espace et 35 000 enseignants ont été titularisés par instruction présidentielle. Cette régularisation n’ayant pas été négociée avec les syndicats, 30 000 autres enseignants sont restés dans une situation précaire. Depuis 2011, ces enseignants continuent de revendiquer un contrat de travail permanent avec l’appui du SNAPAP. Le bras de fer continue, de même que les harcèlements, les arrestations et les ruptures de contrat. A la rentrée 2013, plus de mille contrats temporaires d’enseignants n’ont pas été renouvelés. Il se trouve que toutes ces personnes étaient syndiquées.
La membre gouvernementale de la République bolivarienne du Venezuela a souligné que la commission d’experts a pris note avec satisfaction des progrès réalisés dans le pays en matière de liberté syndicale, en particulier concernant l’enregistrement de syndicats. Les progrès accomplis par le gouvernement grâce à un large dialogue social doivent être soulignés. En témoignent la signature d’un grand nombre de conventions collectives et la reconduction en février 2014 du Pacte national économique et social. La bonne volonté du gouvernement est illustrée par sa prise en compte, dans le projet de Code du travail, des recommandations de la commission d’experts. De plus, il convient de souligner que le gouvernement nie catégoriquement les prétendus actes d’intimidation et les menaces à l’encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, qu’aucune plainte n’a été déposée devant les organes compétents à ce sujet et qu’aucune preuve n’existe à ce sujet. Il ne fait aucun doute que le gouvernement poursuivra ses efforts et ses progrès dans ce domaine, en garantissant pleinement la liberté syndicale. Par conséquent, les conclusions de la commission doivent reconnaître et souligner les progrès accomplis par le gouvernement, ainsi que ses engagements et sa bonne volonté à l’égard de l’application de la convention.
La membre travailleuse des Etats-Unis, s’exprimant également au nom des membres travailleurs du Canada, de l’Espagne et de la Suisse, a signalé diverses formes d’intimidation auxquelles sont soumis les syndicalistes algériens depuis de nombreuses années – entre autres, le «clonage» de syndicats de la part du gouvernement, licenciements, violences et menaces physiques, emprisonnement pour des motifs infondés et restrictions à la liberté de mouvement. Les tentatives d’intimidation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes sont flagrantes et incessantes. L’oratrice s’est référée en particulier aux menaces de mort qui ont visé le président du SNAPAP en 2011 – après avoir rencontré le Rapporteur spécial des Nations Unies sur le logement convenable –, à son licenciement pour «absence illégale de son poste» en 2013 et à la décision arbitraire d’annuler le congé syndical qui lui était accordé depuis dix ans. Le plus alarmant reste toutefois l’assassinat en avril 2011 du professeur Ahmed Kerroumi, militant de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (organisation constituée avec l’appui du SNAPAP), après la rencontre de ce dernier avec le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression. Le gouvernement n’a pas diligenté d’enquête officielle sur ce meurtre. L’oratrice a également donné des exemples d’accusations et de condamnations sans fondement à des peines d’emprisonnement à l’encontre de syndicalistes pour divers motifs: organisation d’une grève à laquelle ont participé des greffiers et des fonctionnaires du pouvoir judiciaire, participation à des réunions ou à des grèves de la faim ou, récemment, en avril 2014, distribution de prospectus susceptibles de nuire à l’intérêt national. En ce qui concerne les restrictions à la liberté des syndicalistes de se déplacer, en 2009, le président du SNAPAP a été arbitrairement privé de son passeport alors qu’il s’apprêtait à se rendre en France et il lui a été interdit de se déplacer pendant un mois. Un autre syndicaliste avait été arrêté en 2012 puis incarcéré alors qu’il allait se déplacer pour organiser des travailleurs. Récemment, il a été arrêté lorsqu’il était sur le point de prendre un vol pour assister à la plate-forme de Dublin pour les défenseurs des droits humains. En juillet 2013, les autorités n’ont pas autorisé la délégation du SNAPAP à se rendre au Forum social mondial de Tunis. En outre, des travailleurs ont subi les lourdes conséquences de leur participation à des grèves ou des manifestations pacifiques, y compris en février 2014 – arrestations, agressions physiques, non-paiement de salaires et suppression de prestations de santé et de sécurité sociale. Le droit des syndicats d’exercer librement leurs activités a été également restreint, comme il ressort des nombreux actes de harcèlement et agressions commis contre la Maison des syndicats du SNAPAP ces cinq dernières années. Ce ne sont là que quelques-uns des nombreux exemples qui montrent que les actes de répression dont sont victimes les syndicalistes en Algérie sont graves et fréquents. Le gouvernement doit donc effectuer de profondes réformes pour remplir son obligation de garantir la liberté syndicale, comme l’exige la convention.
Le membre gouvernemental de l’Angola a indiqué soutenir l’intervention du gouvernement qui a fait des progrès significatifs dans la mise en œuvre des conventions ratifiées. La liberté syndicale dans le pays est respectée puisque des organisations syndicales sont créées et des conventions collectives sont signées, en particulier le Pacte national économique et social. Le droit de grève est également respecté et il apparaît que le gouvernement a répondu aux questions posées quant à l’application de la convention dans le pays.
Une observatrice représentant l’Internationale des services publics (ISP) a indiqué que, bien que l’Algérie ait ratifié 53 conventions de l’OIT, dont la convention no 87, la liberté syndicale est constamment entravée par des pratiques abusives de l’administration. Les délégués syndicaux dans de nombreux secteurs d’activité ont subi des violations de leurs droits, notamment des interdictions de se livrer à des activités syndicales, le refus de permettre aux affiliés de tenir des assemblées générales, le «clonage» de syndicats, la suspension et radiation de membres et dirigeants syndicaux, l’interdiction de détachement des syndicalistes même avec un mandat national. Selon la loi, pour être considéré comme représentatif, un syndicat doit regrouper au moins 20 pour cent de l’effectif total de l’entreprise. Cependant, dans les faits, c’est l’employeur qui apprécie la représentativité des syndicats, empêchant leur reconnaissance et l’exercice de leur droit à la négociation collective. Par ailleurs, les syndicalistes sont victimes de menaces, de suspensions, de licenciements arbitraires, de harcèlement judiciaire, de violence policière, d’entrave à la liberté de circulation, et les procédures devant les tribunaux pour dénoncer ces faits restent sans effet. La situation sociale des femmes syndicalistes se dégrade également puisque celles qui ont participé à la grève d’avril 2012 ont fait l’objet de mesures conservatoires depuis lors. Enfin, en mai 2013, un syndicaliste de l’Université de formation continue a été licencié à cause de son activité syndicale et de son engagement pour la défense des droits humains. La convention doit être pleinement appliquée et l’assistance technique fournie doit être étendue avec la participation du SNAPAP et de la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA).
La membre gouvernementale du Cameroun a indiqué que les informations fournies attestent que l’Algérie prend véritablement au sérieux les observations formulées par la commission d’experts. Il convient de préciser que la révision des lois sociales en Afrique suit un processus complexe puisque les réformes doivent passer par différentes commissions consultatives avant d’être transmises au Parlement. Il faut donc laisser du temps au gouvernement pour mettre en œuvre la réforme demandée. Cependant, le gouvernement affirme sa réelle volonté de répondre aux préoccupations exprimées par la commission d’experts dans le cadre de la révision du Code du travail qui est en cours de finalisation. Il existe dans le pays une multitude de syndicats au point qu’il serait possible de reprocher au gouvernement de favoriser l’émiettement syndical mais en aucune façon d’entraver la liberté syndicale quand l’exercice de celle-ci s’avère si évident. Il convient d’encourager le gouvernement à accélérer le processus de révision du Code du travail en tenant compte des observations de la commission d’experts.
La membre travailleuse de la Libye, s’exprimant également au nom des membres travailleurs de Bahreïn, de l’Egypte, de la Mauritanie, du Maroc, de la Tunisie et du Yémen, a déclaré que le système judiciaire algérien n’est pas indépendant. Lorsque des membres du SNAPAP et du SNAPEST ont saisi le Conseil supérieur de la magistrature et le Conseil d’Etat, leurs cas sont restés en suspens pendant des années sans aucun résultat. Des syndicats ont engagé des poursuites contre le ministre du Travail en 2005 au sujet d’un appui financier public qui avait abouti à la création d’un syndicat parallèle par le gouvernement, qui s’était vu attribuer le même numéro d’enregistrement que le syndicat original. En outre, le gouvernement a transféré les cotisations syndicales des travailleurs du syndicat original vers le syndicat parallèle. De nombreuses conventions internationales du travail ratifiées par l’Algérie n’ont pas été publiées au Journal officiel, ce qui prive les travailleurs de la possibilité d’utiliser ces conventions dans les procédures judiciaires. Les membres des syndicats d’enseignants sont confrontés à des situations de harcèlement, d’intimidation, de non-paiement des salaires et à des arrestations arbitraires. Dans ce contexte, les membres des syndicats d’enseignants n’ont pas eu d’autre choix que de recourir à une grève en 2012, qui a été suivie par 95 pour cent des travailleurs du secteur. Certains membres ayant participé à la grève continuent de subir le même genre de représailles pendant que le gouvernement ne mène aucune enquête appropriée. En outre, l’oratrice accuse le gouvernement d’avoir tenté d’assassiner le président d’une organisation syndicale, et l’auteur présumé de cet acte criminel n’a nullement été poursuivi par le système judiciaire. Le silence de l’appareil judiciaire dans ces affaires suffit à lui seul à comprendre qu’il est dépourvu de tout pouvoir en Algérie. Le gouvernement a réprimé les syndicalistes et éliminé les syndicats indépendants. L’oratrice a indiqué que, dans ces conditions, il n’y a pas d’autre choix que de se tourner vers cette honorable commission pour demander justice.
Le membre travailleur de Bahreïn a pris note des observations formulées par l’observateur représentant la CSI, qui attestent que l’Algérie connaît des difficultés économiques et que des solutions internes doivent être recherchées en collaboration avec tous les partenaires sociaux. Dans le contexte actuel, la situation des organisations syndicales en Algérie ne requiert pas d’intervention de la part de la commission, et la CSI a adopté une position plutôt radicale concernant ce cas. Certaines parties semblent exploiter l’OIT pour affaiblir le rôle de syndicats arabes. La situation en Algérie devrait être examinée de façon équitable à la vue des faits objectifs.
Le représentant gouvernemental a indiqué qu’il entendait répondre avec sérénité et confiance aux accusations portées à l’encontre de son pays. L’Algérie a reconquis et préservé sa stabilité au prix d’énormes sacrifices. Il s’agit aujourd’hui d’une terre d’accueil où il n’y a ni restriction ni menaces de mort, ni entrave à l’organisation d’événements à caractère national ou international dès lors que la législation et les procédures sont respectées, tel que l’a démontré la récente organisation à Alger de la Conférence des ministres des affaires étrangères des pays non alignés. Il est nécessaire de relever que les personnes se prétendant menacées sont présentes dans la salle. Si ces menaces étaient réelles, il conviendrait de s’interroger alors sur comment ces personnes ont pu sortir du territoire pour participer à une conférence internationale. La discussion de ce cas contient donc de faux débats basés sur des accusations infondées qui risquent de porter préjudice à l’OIT et de déboucher sur des dérives aux conséquences imprévisibles. L’Algérie est un pays respectueux des droits humains et des normes internationales de l’OIT, comme l’atteste le nombre de conventions ratifiées. Quant aux droits syndicaux, tel qu’exposé de manière détaillée lors de l’intervention d’ouverture de ce cas, leur respect est pleinement assuré. Il n’est pas concevable d’accuser l’Algérie d’entraves à l’exercice du droit syndical quand on connaît le nombre d’organisations syndicales actives sur le terrain, tout comme il n’est pas concevable de l’accuser d’entrave à l’exercice du droit de grève quand on connaît le nombre de grèves qui y sont déclenchées chaque année. Tout pays a besoin de lois devant être respectées par tous afin d’éviter l’anarchie. Dans ce sens, il ne peut pas être reproché aux employeurs de recourir à la justice lorsque des grèves sont déclenchées en totale violation des procédures légales en vigueur. Il ne saurait être toléré de diktat ni des employeurs ni des travailleurs et, à ce titre, toute la législation sociale du pays est bâtie sur le dialogue et la concertation entre les parties dans la prise en charge de leurs différends. Concernant un forum maghrébin dont l’organisation aurait été empêchée, il convient de rappeler qu’aucun pays au monde ne saurait tolérer l’organisation d’une rencontre internationale sur son territoire national en violation de sa législation. La CSI en a été informée par le biais du BIT à travers un rapport datant du 8 mai 2013. Quant au cas de la CGATA qui aurait subi des entraves à sa constitution, elle n’a, depuis plus d’un an, toujours pas apporté de réponses aux observations formulées par le gouvernement sur la base de la législation en vigueur sur ses statuts et son dossier administratif. Concernant les allégations de clonage syndical formulées par la CSI, il convient de relever que les syndicalistes algériens ignorent tout de cette supposée pratique. Quant à l’absence de participation de certains syndicats à des rencontres tripartites, elle résulte uniquement de la reconnaissance de certaines prérogatives aux syndicats les plus représentatifs conformément aux normes internationales pertinentes. Les syndicats à caractère sectoriel participent pleinement aux discussions relatives à leur champ d’activité et sont consultés pour toutes questions touchant aux intérêts matériels et moraux des travailleurs concernés. Concernant les syndicalistes qui auraient été licenciés abusivement, la législation nationale leur assure une totale protection et leur donne la possibilité de se pourvoir en justice pour faire valoir leurs droits. Il est du devoir de tous de préserver la crédibilité de la commission en veillant à ce que les griefs examinés soient effectivement fondés. L’Algérie réaffirme sa totale disponibilité à collaborer avec la commission afin d’améliorer sa législation, ce qui constitue un processus de longue haleine.
Les membres travailleurs ont relevé que les organisations au sujet desquelles le Comité de la liberté syndicale s’était déjà prononcé en 2013 n’ont toujours pas été enregistrées plus d’un an après. Les organisations syndicales subissent diverses restrictions dans leurs activités qui vont au-delà des limites à l’exercice du droit de grève pour des motifs qui ne semblent pas juridiquement plausibles et qui ne sont pas conformes aux normes de l’OIT. Les instances appelées à se prononcer sur la légalité des actions syndicales ne correspondent pas non plus aux exigences découlant de ces normes. Leur indépendance est fortement sujette à caution, elles ne recueillent pas la confiance des parties intéressées et les procédures qu’elles appliquent ne respectent pas les critères d’un procès équitable. Pour toutes ces raisons, il est nécessaire de demander au gouvernement d’accueillir une mission de contacts directs afin de vérifier, en concertation avec les parties concernées, la conformité de la législation et des pratiques administratives aux normes internationales.
Les membres employeurs ont remercié le gouvernement pour ses propositions et l’ont félicité pour sa volonté de coopérer avec la commission et avec le BIT en vue d’améliorer la législation et la pratique nationale en matière de liberté syndicale. Il semble exister un consensus pour encourager le gouvernement à faire rapport sur les mesures prises en matière de liberté syndicale, en incluant notamment les informations sur la réforme du Code du travail, ainsi que les mesures relatives à la formation des syndicats, leur enregistrement et le dialogue social en général. Cette information doit être reproduite dans les conclusions de la présente discussion. A la lumière des discussions et des propositions des membres travailleurs et des membres employeurs ainsi que de celle du gouvernement concernant le champ d’application de la convention, les conclusions devraient également faire état du fait que la commission n’a pas abordé le droit de grève dans ce cas, les employeurs n’étant pas d’accord avec le fait que la convention no 87 reconnaisse le droit de grève. Elles devraient également indiquer qu’il n’existe pas de consensus entre les groupes sur l’inclusion du droit de grève dans la convention no 87. En outre, il convient d’éviter toute proposition de conclusions demandant au gouvernement d’assurer la conformité de leurs lois et pratiques nationales avec les principes fixés par la commission d’experts en matière de droit de grève.