ILO-en-strap
NORMLEX
Information System on International Labour Standards
NORMLEX Page d'accueil > Profils par pays >  > Commentaires

Observation (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949 - Jordanie (Ratification: 1968)

Autre commentaire sur C098

Demande directe
  1. 1999
  2. 1997

Afficher en : Anglais - EspagnolTout voir

Articles 1 à 6 de la convention. Champ d’application de la convention. Travailleurs étrangers. Dans ses commentaires précédents, la commission a noté que les entraves juridiques à la liberté syndicale des travailleurs étrangers, auxquelles s’ajoute l’existence d’un monopole syndical, ont largement contribué à une situation dans laquelle, dans de nombreux secteurs, tout accès à la négociation collective leur est fermé, tandis que dans d’autres, leur pouvoir de négociation est largement restreint dans la pratique. Ainsi, la commission a instamment prié le gouvernement d’abroger l’article 98(e)(1) du Code du travail (en vertu duquel les travailleurs étrangers n’ont pas le droit de constituer un syndicat) et l’article 7(a) de la loi sur l’Association des enseignants jordaniens (en vertu duquel les travailleurs étrangers ne peuvent pas s’affilier à l’Association des enseignants jordaniens) et l’a prié de promouvoir la négociation collective dans les secteurs où les travailleurs étrangers constituent la majeure partie de la main-d’œuvre. La commission note que le gouvernement réitère qu’en vertu des articles 98(e) et (f) du Code du travail, s’ils peuvent s’affilier à des syndicats, les travailleurs étrangers n’ont pas le droit d’en constituer et la modification de l’article 98(e) contreviendrait à la Constitution qui n’accorde le droit de créer des syndicats qu’aux Jordaniens. S’agissant de l’article 7(a) de la loi sur l’Association des enseignants jordaniens, le gouvernement réitère que, conformément à l’article 19(d) de la loi sur l’Association des enseignants jordaniens, les propositions de modification de la loi ne peuvent être faites que par le conseil d’administration du syndicat à l’autorité centrale de l’association, avant d’être soumises au ministre qui prendra les mesures juridiques nécessaires. La commission note également que, d’après le gouvernement, les conventions collectives conclues (46 en 2023 et 16 au premier semestre 2024) couvrent les Jordaniens et les étrangers. Notant les arguments répétés du gouvernement au sujet de la révision de la législation en ce qui concerne ces dispositions, la commission rappelle de nouveau que les États sont tenus de prendre des mesures efficaces en droit et dans la pratique pour donner effet aux conventions qu’ils ont ratifiées. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger les dispositions juridiques qui excluent les travailleurs étrangers du droit de participer directement à la négociation collective, en particulier l’article 98(e)(1) du Code du travail et l’article 7(a) de la loi sur l’Association des enseignants jordaniens. Elle prie également le gouvernement de promouvoir la négociation collective dans tous les secteurs où les travailleurs étrangers sont fortement représentés et de fournir des informations détaillées sur les conventions collectives qui y sont conclues, en indiquant en particulier le nombre de travailleurs migrants couverts.
Travailleurs domestiques. La commission note que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur les mesures prises pour modifier le Code du travail ou le règlement no 90 de 2009, tel que modifié par le règlement no 64 de 2020 sur le travail domestique qui, comme précédemment noté, n’accorde pas aux travailleurs domestiques le droit de s’organiser et de négocier collectivement. Elle note que l’indication du gouvernement qu’aucun travailleur domestique ne s’est affilié au syndicat sectoriel existant, appelé l’Union des services généraux et professions libres, auquel les travailleurs domestiques ont le droit de s’affilier, en vertu de l’arrêté no 2022/45 du 18 juillet 2022 du ministre du Travail. La commission prie donc de nouveau instamment le gouvernement de prendre des mesures appropriées pour réviser le Code du travail ou le règlement sur le travail domestique en vue de reconnaître expressément le droit des travailleurs domestiques de s’organiser et de négocier collectivement. Elle prie de nouveau le gouvernement de promouvoir la négociation collective dans le secteur du travail domestique et de fournir des informations sur toutes mesures prises à cet égard.
Travailleurs agricoles. En ce qui concerne la demande de la commission relative aux mesures prises pour promouvoir la négociation collective dans le secteur agricole, la commission note que le gouvernement réitère sa référence aux activités menées par le syndicat sectoriel existant, l’Union des services généraux et professions libres, dans l’objectif d’organiser les travailleurs agricoles et les former aux rudiments de l’activité syndicale. Dans ce contexte, la commission note avec intérêt que le gouvernement dit que le premier contrat collectif de travail dans le secteur agricole a été déposé en mars 2024. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur la promotion de la négociation collective dans le secteur agricole, de communiquer des informations sur le nombre de travailleurs couverts par cette convention collective et de transmettre copie du texte.
Travailleurs âgés de 16 à 18 ans. Dans ses commentaires précédents, la commission avait observé que les mineurs âgés de 16 à 18 ans ont accès à l’emploi mais qu’ils n’ont pas le droit de s’affilier à un syndicat, en vertu de l’article 98(f) du Code du travail, et prié le gouvernement de modifier la loi à cet égard. Notant que le gouvernement réitère ses indications précédentes concernant les questions de responsabilité juridique inhérentes à l’exercice d’un mandat syndical ou à la constitution d’un syndicat, la commission souligne que les mineurs qui ont l’âge minimum d’admission à l’emploi, aussi bien en tant que travailleurs ou qu’apprentis, devraient pouvoir s’affilier à des syndicats et exercer leurs droits de négociation collective. La commission note avec regret qu’il n’y a eu aucun progrès à cet égard. La commission prie donc de nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier l’article 98(f) du Code du travail afin d’octroyer les droits visés par la convention à tous les travailleurs ayant atteint l’âge légal d’admission au travail. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées à cet égard.
Travailleurs du secteur de l’éducation. Dans ses commentaires précédents, la commission a constaté que les membres de l’Association des enseignants jordaniens, y compris les enseignants du secteur public (qui représentent la majorité de ses membres et sont régis par la loi sur l’Association des enseignants jordaniens, qui ne prévoit pas de droits de négociation collective) et les enseignants du secteur privé (qui représentent une minorité de membres), ne semblaient pas jouir du droit de négociation collective. Elle a également noté qu’au moins deux affaires concernant des membres et des dirigeants de l’Association des enseignants jordaniens étaient pendantes devant les tribunaux: i) l’affaire concernant la dissolution par décision judiciaire du conseil exécutif de l’association; et ii) une affaire pénale impliquant des accusations d’incitation à la haine, de troubles dans une institution d’enseignement, d’instigation à un rassemblement illégal, d’abus de pouvoir et de gaspillage de fonds publics. La commission a également pris note des observations la CSI alléguant des persécutions à l’endroit des membres de l’association par les autorités, ainsi que l’arrestation et la détention de 14 de ses dirigeants. Elle a également noté que la CSI dit que, même si l’organisation a repris ses activités, sa direction a été remplacée et ses membres ne peuvent pas librement organiser d’actions collectives.
Rappelant que le droit de négociation collective doit être garanti aux travailleurs des établissements d’enseignement public et privé, la commission note avec un profond regret que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur toutes mesures prises à cet égard pour les membres de l’Association des enseignants jordaniens, y compris toute nouvelle information sur les affaires susmentionnées devant les tribunaux. Bien qu’elle note que le gouvernement mentionne une réponse par lettre, en novembre 2023, aux observations de la CSI, cette lettre n’était pas jointe au rapport du gouvernement. La commission prie donc de nouveau instamment le gouvernement de: i) prendre toutes les mesures nécessaires, y compris par voie législative, pour garantir que le droit à la négociation collective des membres de l’Association des enseignants jordaniens et de tous les travailleurs des établissements d’enseignement public et privé est explicitement reconnu par la loi et effectivement respecté dans la pratique; et ii) fournir des informations sur toutes les affaires pénales et civiles pendantes contre l’Association des enseignants jordaniens et ses membres, y compris l’identité et la fonction syndicale des membres poursuivis et les actes concrets qui ont donné lieu aux accusations portées contre eux. En dernier lieu, la commission prie de nouveau le gouvernement de faire part de ses commentaires sur les observations de la CSI.
Travailleurs non inclus dans les 17 secteurs reconnus par le gouvernement. Dans ses commentaires précédents, la commission a noté que l’article 98(d) du Code du travail, qui prescrit une liste limitative des industries et des activités économiques dans lesquelles un syndicat par secteur peut se créer, est incompatible avec les principes de la convention, car il a inévitablement pour effet d’exclure des catégories entières de travailleurs du droit de constituer des organisations et de s’y affilier et, par conséquent, d’exercer le droit de négociation collective.
La commission note avec regret que le gouvernement n’a pas fourni d’informations sur tout progrès accompli en réponse à sa demande relative à la révision et à l’abrogation de l’article 98(d) et à l’adoption de mesures visant à garantir que les travailleurs dans tous les secteurs couverts par la convention ont le droit de s’organiser et de négocier collectivement. La commission rappelle que l’établissement d’une liste limitative des professions en vue de reconnaître le droit de s’organiser librement est contraire au droit des travailleurs sans distinction d’aucune sorte de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier. La commission prie donc de nouveau instamment le gouvernement de régler cette question déjà ancienne en abrogeant l’article 98(d) du Code du travail et en prenant des mesures efficaces sans autre délai pour faire en sorte que les travailleurs de tous les secteurs sans distinction d’aucune sorte puissent exercer leur droit d’organisation et de négociation collective par l’intermédiaire de l’organisation de leur choix. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Article 2. Protection adéquate contre les actes d’ingérence. La commission avait noté que, comme suite aux modifications apportées à l’article 139 du Code du travail, en 2023, les amendes encourues par les employeurs en cas d’infraction au droit du travail, y compris les actes d’ingérence, sont passées à 1 000 dinars jordaniens (1 410 dollars É.-U.). Elle a noté que ces amendes, qui ne peuvent être ni ajustées à l’inflation ni adaptées à la taille de l’entreprise, risquent de ne pas être suffisamment dissuasives à long terme et dans les cas où l’employeur fautif dispose de ressources financières considérables.
La commission note que le gouvernement répète simplement sa réponse précédente et qu’il renvoie à l’augmentation susmentionnée des amendes par les modifications législatives de 2023. La commission prie donc de nouveau le gouvernement de réviser l’article 139 du Code du travail, en consultation avec les partenaires sociaux, en vue de renforcer efficacement les sanctions encourues en cas d’actes d’ingérence pour qu’elles soient suffisamment dissuasives, et de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Articles 4 et 6. Droit de négociation collective. Monopole syndical. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté qu’il existe une situation de monopole syndical en Jordanie où 17 syndicats sectoriels, tous affiliés à une confédération unique, sont les seules organisations de travailleurs reconnues. Elle a noté que cette situation est fondée sur les articles 98(d) et 102(c) du Code du travail et l’arrêté no 2022/45 du ministre du Travail portant classification des industries et des activités économiques dans lesquelles des syndicats peuvent être constitués.
La commission note que le gouvernement réitère que cette classification des secteurs reconnus et la non-reconnaissance de nouveaux syndicats dans les secteurs où il y a déjà un syndicat visent à éviter d’exposer le secteur à la fragmentation et aux conflits d’intérêt. La commission note avec regret l’absence de progrès sur cette question de grande importance et de longue date et rappelle que le droit des travailleurs à la négociation collective libre et volontaire doit comporter le droit d’être représentés dans la négociation collective par l’organisation de leur choix. Par conséquent, la commission prie de nouveau instamment le gouvernement d’éliminer les obstacles au pluralisme syndical ou au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de s’y affilier: i) en abrogeant l’article 98(d) du Code du travail et l’arrêté no 2022/45 du ministre du Travail; et ii) en prenant des mesures efficaces pour promouvoir le pluralisme syndical, la liberté syndicale et le droit de négociation collective à tous les travailleurs. Elle prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises à cet égard.
Négociation collective dans le secteur public. Fonctionnaires non commis à l’administration de l’État. Dans ses commentaires précédents, la commission a pris note de l’absence de cadre juridique reconnaissant expressément le droit de négociation collective des travailleurs du secteur public non commis à l’administration de l’État. Elle a également noté que, d’après le gouvernement, les employés de l’État peuvent constituer des syndicats pour défendre leurs intérêts, pour autant qu’ils soient constitués en vertu de lois spéciales; or, aucune loi spéciale n’a été adoptée, outre la loi sur l’Association des enseignants jordaniens.
En réponse à la demande de la commission concernant des mesures législatives à prendre à ce sujet, la commission note avec regret que le gouvernement n’a pas fourni d’informations ni transmis de copie de toute réglementation ou loi spéciale adoptée pour la création de syndicats d’agents du secteur public. Rappelant qu’il est nécessaire de prendre des mesures pour garantir le droit d’organisation et de négociation collective pour tous les travailleurs du secteur public, à l’exception de ceux commis à l’administration de l’État, la commission prie de nouveau instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour: i) adopter une législation permettant aux fonctionnaires non commis à l’administration de l’État de créer des organisations pour défendre leurs intérêts; et ii) garantir que tous les fonctionnaires non commis à l’administration de l’État disposent d’un cadre efficace dans lequel ils peuvent engager des négociations collectives sur leurs conditions de travail et d’emploi par l’intermédiaire du syndicat de leur choix, par exemple, en révisant le règlement de la fonction publique no 9 de 2020, ou en étendant le champ d’application du Code du travail. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tous faits nouveaux à cet égard.
La commission rappelle au gouvernement qu’il peut se prévaloir de l’assistance technique du BIT, en ce qui concerne les questions soulevées dans le présent commentaire.
[ Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2025. ]
© Copyright and permissions 1996-2024 International Labour Organization (ILO) | Privacy policy | Disclaimer