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Demande directe (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Maroc (Ratification: 1963)

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Article 1, paragraphe 1, alinéa a), de la convention. Discrimination fondée sur le sexe. Harcèlement sexuel. La commission prend note de l’indication du gouvernement dans son rapport, en réponse à son précédent commentaire, selon laquelle le Code du travail prévoit que le harcèlement sexuel commis par l’employeur, le chef d’entreprise ou d’établissement à l’encontre du salarié est une faute grave, et que le fait pour le salarié de quitter l’entreprise pour cette raison est assimilé à un licenciement abusif (article 40 du Code du travail). Le gouvernement rapporte également que la refonte du Code du travail et la révision du statut général de la fonction publique figurent parmi les points de l’accord social intervenu entre le gouvernement et les partenaires sociaux le 30 avril 2022 et que des discussions relatives à l’inclusion de dispositions définissant et interdisant le harcèlement sexuel seront ouvertes dans ce cadre. La commission note à nouveau que, selon les articles 503-1-1 et 503-1-2 du Code pénal, l’auteur doit «persister à harceler» pour que l’infraction soit constituée. À ce sujet, la commission souligne que l’expression «harcèlement» inclue des comportements et des pratiques qui peuvent ne se produire qu’à une seule occasion (comme, par exemple, un attouchement non sollicité (environnement de travail hostile), ou un chantage (harcèlement de contrepartie ou quid pro quo)). Les législations qui ne répriment que les actes répétés de harcèlement sexuel peuvent avoir pour effet de limiter la protection accordée aux travailleurs. Par ailleurs, les dispositions légales sur le harcèlement sexuel doivent couvrir le harcèlement commis par une personne exerçant l’autorité, un collègue, un subordonné ou une personne avec laquelle les travailleurs sont en contact dans le cadre de leur travail (client, fournisseur, etc) (voir Étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 789, et voir Étude d’ensemble de 2023 sur l’égalité de genres au travail, paragraphes 115 et 116). S’agissant des actions de sensibilisation menées, le gouvernement indique aussi avoir signé un protocole d’accord avec la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et l’Union nationale des femmes du Maroc (UNFM) pour mener des actions de prévention et de prise en charge des femmes victimes de violences et de harcèlement sur les lieux de travail, ainsi qu’un protocole avec ONU femmes Maroc prévoyant la conduite d’une étude sur la violence et le harcèlement au travail et l’élaboration d’un guide à destination des inspecteurs du travail. La commission note aussi qu’à la suite de l’entrée en vigueur de la loi 103.13 relative à la lutte contre les violences faites aux femmes (promulguée par le Dahir no 1.18.19 du 22 février 2018), l’Observatoire national de la violence à l’égard des femmes (ONVEF) a été remplacé par la Commission nationale pour la prise en charge des femmes victimes de violence (CNPEVFVV) et des mécanismes de coordination régionaux et locaux ont été institués, avec des attributions similaires à celles de l’ONVEF. Depuis sa création, la CNPEVFVV a œuvré à la mise en place des commissions régionales et locales et au renforcement des compétences de leurs membres. La commission prie le gouvernement d’évaluer la possibilité de modifier sa législation pénale sur le harcèlement sexuel pour qu’elle puisse aussi porter sur des comportements qui ne sont pas nécessairement répétés. Elle prie aussi à nouveau le gouvernement d’examiner la possibilité d’inclure dans la législation du travail et de la fonction publique des dispositions définissant et interdisant le harcèlement sexuel sous toutes ses formes (harcèlement sexuel quid pro quo (chantage) et par création d’un environnement hostile), et couvrant l’ensemble des personnes avec lesquelles les travailleurs sont en contact dans le cadre de leur travail. Elle prie enfin le gouvernement de lui fournir des informations détaillées sur les activités concrètes de la Commission nationale pour la prise en charge des femmes victimes de violence (CNPEVFVV) et des commissions locales et régionales en matière de lutte contre le harcèlement au travail, ainsi que des informations sur le nombre de cas dénoncés à l’inspection du travail et/ou aux autorités judiciaires, ainsi que sur le suivi donné à ces dénonciations (y compris des informations sur les sanctions prononcées et les réparations octroyées).
Article 1. Protection contre la discrimination. Travailleurs et travailleuses domestiques. La commission note une nouvelle fois que, si la loi no 19-12 fixant les conditions de travail et d’emploi des travailleuses et travailleurs domestiques met à la charge de l’employeur une obligation générale de prévention en matière de sécurité, santé et «dignité» des travailleurs et travailleuses domestiques (article 12), elle n’interdit toujours pas explicitement la discrimination y compris le harcèlement sexuel à leur encontre. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle, dans le cadre de la coordination entre le parquet et l’inspection du travail, des commissions régionales et provinciales ont été mises en place pour assurer un suivi de la situation des travailleurs et travailleuses domestiques et que des campagnes de préventions sont menées par les associations partenaires en charge de la lutte contre le travail domestique des enfants. La commission demande à nouveau au gouvernement de prendre des mesures: i) pour que les travailleurs et travailleuses domestiques soient protégés en droit comme dans la pratique contre toute forme de discrimination (y compris le harcèlement sexuel); et ii) pour faire connaître aux travailleuses et aux travailleurs domestiques et à leurs employeurs leurs droits et obligations en vertu de la loi. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur les activités des commissions régionales et provinciales chargées du suivi de la situation des travailleurs et travailleuses domestiques, ainsi que sur la mise en place et le fonctionnement du mécanisme de règlement des différends entre employeurs et travailleurs domestiques, en particulier des données sur la nature et l’issue des cas de discrimination traités dans ce cadre.
Article 2. Égalité de chances et de traitement en ce qui concerne l’origine ethnique. Suite à son précédent commentaire, la commission prend note des informations générales fournies par le gouvernement concernant les efforts déployés pour promouvoir l’utilisation de la langue amazighe dans l’éducation, les médias, et les services ministériaux centraux et régionaux. Elle note toutefois que dans ses observations finales de 2023, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD), tout en relevant les mesures prises pour améliorer les conditions de vies des populations amazighes, s’est dit préoccupé par le manque de statistiques relatives à la représentation des Amazighs, en particulier des femmes, aux postes de décisions, ainsi que par la pauvreté qui touche particulièrement les régions habitées principalement par les Amazighs et la persistance de la discrimination raciale dont ils sont victimes, notamment dans l’accès à l’emploi, à l’éducation et aux services de santé, surtout lorsqu’ils ne s’expriment pas en arabe. Plus généralement, le CERD a noté avec préoccupation que certaines communautés, en particulier les Amazighs, les Sahraouis, ainsi que les ressortissants et non-ressortissants noirs, notamment les migrants, demandeurs d’asile et réfugiés provenant de pays subsahariens, sont confrontées à des situations de discrimination raciale, y compris indirecte, ce qui limite la pleine jouissance de leurs droits dans des conditions d’égalité et de non-discrimination (CERD/C/MAR/CO/19-21, 21 décembre 2023, paragraphes 21 et 23). Dès lors, la commission prie le gouvernement de fournir: i) des informations sur les résultats obtenus en terme d’amélioration de l’accès de ces personnes à l’éducation, la formation et l’emploi dans les secteurs publics et privés; ii) des informations sur les mesures prises pour promouvoir l’égalité de chances et de traitement à l’égard de la population amazighe – et de toute autre minorité ethnique – en ce qui concerne l’accès à l’éducation, notamment à la formation linguistique et à la formation professionnelle, ainsi que l’accès à l’emploi et à la profession; et iii) des statistiques (ventilées par sexe) illustrant la participation des minorités ethniques au marché du travail, y compris aux différents niveaux de la fonction publique.
Article 3, alinéa a). Collaboration avec les organisations d’employeurs et de travailleurs. La commission note que, en réponse à sa demande d’informations sur ce point, le gouvernement indique que les entreprises labellisées «Responsabilité sociale de l’entreprise» (RSE) par la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) s’engagent dans la lutte contre la discrimination et la promotion de l’égalité à travers l’adoption de codes éthiques et de procédures de dénonciation et de sanctions en cas de harcèlement au travail. La CGEM a par ailleurs entrepris des actions de formation et de sensibilisation sur ces thématiques. Les représentants des travailleurs ont aussi formé une coalition visant à la ratification de la convention (no 190) sur la violence et le harcèlement au travail, 2019, dans le cadre de laquelle un programme de formation destiné aux travailleurs et travailleuses sur ces thématiques a été mis en place. La commission prie le gouvernement de lui fournir des informations sur les autres mesures adoptées en vue d’obtenir la collaboration des organisations d’employeurs et de travailleurs dans la lutte contre la discrimination et la promotion de l’égalité, en lui fournissant en particulier des informations sur les activités de ces organisations sur les questions de non-discrimination et d’égalité dans l’emploi et la profession en lien, non seulement avec le harcèlement sexuel, mais aussi avec d’autres thématiques (accès à l’emploi, égalité des chances, lutte contre la discrimination raciale, etc.).
Inspection du travail et statistiques. La commission prend note des indications du gouvernement selon lesquelles les inspecteurs du travail veillent au contrôle de l’application effective de la législation du travail relative à l’égalité et la non-discrimination et sensibilisent les employeurs sur ces questions. De janvier à août 2023, les inspecteurs du travail ont réalisé 31 134 visites de contrôle à l’issue desquelles 257 813 observations ont été émises dont 1 033 ont concerné les conditions de travail des femmes. La commission prend également note des données statistiques provenant de l’enquête d’emploi annuelle du Haut-Commissariat au Plan (HCP) 2021-22, selon lesquelles le taux d’occupation a baissé de 1,1 points pour les femmes, s’établissant à 19,8 pour cent, et de 0,8 point pour les hommes, s’établissant à 69,6 pour cent. Le taux d’emploi, lui, a baissé d’un point pour les femmes et de 0,3 point pour les hommes. La commission relève que ces chiffres montrent que les taux d’occupation et d’emploi des femmes ont baissé de manière plus conséquente que ceux des hommes pour la même période. La commission prie le gouvernement de préciser le nombre d’observations des inspecteurs du travail émises en lien avec le non-respect des dispositions législatives relatives à la non-discrimination et l’égalité dans l’emploi et la profession, ainsi que les critères de discrimination concernés (race, couleur, sexe, religion, opinion politique, ascendance nationale ou origine sociale, ou autres critères), ainsi que des informations sur le suivi donné à ces observations (mesures administratives correctives, sanctions, etc.). Elle prie également le gouvernement de lui fournir des informations sur les mesures prises pour favoriser l’occupation et l’emploi des femmes, ainsi que des informations statistiques détaillées sur la participation des femmes et des hommes au marché du travail, ventilées par sexe, par niveau de postes, et par secteur économique, afin d’être en mesure d’évaluer le niveau de ségrégation professionnelle horizontale et verticale dans les secteurs public et privé.
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