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Observation (CEACR) - adoptée 2024, publiée 113ème session CIT (2025)

Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930 - Qatar (Ratification: 1998)

Autre commentaire sur C029

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La commission note que le programme de coopération technique entre le gouvernement du Qatar et le BIT se poursuit. À cet égard, la commission prend note des rapports de situation sur le programme que le bureau de projet de l’OIT pour l’État du Qatar publie tous les ans et en particulier des rapports publiés ces trois dernières années (2021, 2022 et 2023). En outre, dans le cadre du programme de coopération technique, le ministère du Travail et l’OIT ont lancé une étude pour évaluer les effets des réformes relatives au système de la kafala; celle-ci devrait s’achever en 2024. La commission prie le gouvernement de communiquer les résultats de l’évaluation de 2024 sur les effets des réformes relatives au système de la kafala et de fournir des informations sur toute autre politique ou mesure adoptée en conséquence.
Articles 1, paragraphe 1, et article 2, paragraphe 1, de la convention. 1. Vulnérabilité des travailleurs migrants face à l’imposition de travail forcé. i) Système de contrats de travail remplaçant le système de la kafala. Travailleurs dans le secteur privé. La commission rappelle que le décret no 19 et l’arrêté ministériel no 51 de 2020 ont supprimé l’obligation d’obtenir un certificat de non-objection pour changer d’emploi pour tous les travailleurs migrants. De plus, le décret no 18 de 2020 contient de nouvelles dispositions légales prévoyant que la cessation de la relation de travail ne s’opère plus que moyennant un préavis dont la durée – un ou deux mois – dépend du moment où survient la cessation (pendant ou après la période d’essai) et du nombre d’années d’emploi. À cet égard, la commission prend note de l’information communiquée par le gouvernement dans son rapport selon laquelle, pour mettre en œuvre ces changements, le ministère du Travail a créé un système de notification électronique, une plateforme pour le changement d’emploi qui devient entièrement automatisée pour minimiser les interférences.
À la lecture du rapport de situation de 2023, la commission note en outre, que, de septembre 2020 à octobre 2023, le ministère du Travail a reçu 1 037 644 demandes de changement d’emploi, en a approuvé 669 198 et en a rejeté 364 053. Les refus étaient principalement dus à la non-conformité des nouveaux employeurs, à des erreurs de soumission ou à l’annulation des demandes par les travailleurs. En 2023, 167 048 hommes et 25 295 femmes ont vu leur demande approuvée, et les changements les plus nombreux se sont produits dans le secteur de la construction. La proportion de changements d’emploi pour les femmes correspond à leur proportion dans la main-d’œuvre, à savoir 15 pour cent.
Néanmoins, la commission prend note de la préoccupation exprimée par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies dans ses observations finales du 2023, qui fait écho aux inquiétudes formulées dans les rapports de situation de 2022 et 2023, face à la situation des travailleurs migrants, en particulier ceux qui perçoivent de bas salaires dans les secteurs de la construction, des services et du travail domestique, qui continuent de rencontrer des difficultés lorsqu’ils tentent de changer d’emploi (E/C.12/QAT/CO/1). Selon les rapports de situation, ces difficultés sont notamment les suivantes:
  • représailles des employeurs à l’encontre des travailleurs qui souhaitent changer d’emploi, et qui annulent les permis de séjour des travailleurs ou les accusent erronément d’avoir pris la fuite: le gouvernement a pris des mesures pour régler ce problème en reliant les systèmes électroniques du ministère du Travail et du ministère de l’Intérieur pour empêcher les employeurs d’agir de la sorte après la soumission d’une demande de la part d’un travailleur par le biais du système électronique du ministère du Travail ou si une plainte du travailleur est en cours auprès du ministère du Travail. La procédure de réactivation du permis de séjour d’un travailleur est également en cours de révision pour la rendre plus accessible et efficace pour les travailleurs, et empêcher toute annulation du permis pendant six mois après sa réactivation. En outre, pour limiter l’utilisation abusive du système de signalement des travailleurs en fuite, le ministère de l’Intérieur a modifié les procédures et un employeur qui signale un travailleur en fuite doit désormais fournir des données supplémentaires et précises, sous peine de sanctions;
  • discours prédominant encore chez les travailleurs et les employeurs sur la nécessité d’un certificat de non-objection: même si cela n’est pas exigé par la loi ni par la plateforme pour le changement d’emploi, un certificat de nonobjection est toujours requis dans la pratique pour postuler à de nombreuses offres d’emploi. À cet égard, du matériel de communication sur la législation relative à la mobilité de la main-d’œuvre a été produit dans 12 langues et diffusé par différents canaux.
La commission salue les efforts déployés par le gouvernement et le prie de continuer à prendre des mesures pour assurer la mise en œuvre effective des droits des travailleurs migrants de changer d’emploi ou de quitter leur emploi moyennant un préavis. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations ventilées sur le nombre de transferts d’emploi et de cessations de contrat de travail qui ont eu lieu, ainsi que sur le nombre de demandes de transfert qui ont été refusées et sur les motifs de ces refus.
Elle prie également le gouvernement de continuer à fournir des informations sur les mesures prises pour remédier aux difficultés particulières auxquelles sont toujours confrontés les travailleurs migrants pour changer d’emploi, y compris sur: i) les cas de représailles et l’exigence de certificats de non-objection de la part des employeurs, et ii) les cas dans lesquels les employeurs ont été sanctionnés pour faux signalements de travailleurs en fuite.
ii) Procédure de délivrance des visas de sortie. Suite à ses précédents commentaires, la commission note, d’après le rapport de situation de 2023, qu’en application de la loi no 13 de 2018 et de la décision ministérielle no 95 de 2019, accordant le droit aux travailleurs migrants de quitter le pays sans autorisation préalable de leur employeur, il y a eu 45 690 demandes de visa de sortie au 15 octobre 2022, et 13 282 demandes de visa de sortie entre le 1er janvier et le 31 octobre 2023.
La commission prie le gouvernement d’indiquer combien de demandes de visa de sortie ont été effectivement accordées, en précisant le nombre et la catégorie de travailleurs, y compris le nombre de visas de sortie accordés à des travailleurs domestiques.
iii) Processus de recrutement et substitution de contrats. La commission a précédemment pris note de la création du système de gestion électronique des contrats pour tous les travailleurs migrants, y compris les travailleurs domestiques. Les travailleurs migrants doivent signer leur contrat électroniquement dans un centre de traitement des demandes de visas du Qatar dans le pays d’origine avant de voyager, ce qui permet au travailleur de lire le contrat dans sa langue maternelle et lui donne ainsi une plus grande chance de le comprendre et d’en négocier les conditions si elles ne le satisfont pas. La commission prend note des informations détaillées communiquées par le gouvernement sur les mesures prises pour améliorer encore les pratiques en matière d’emploi et de recrutement à travers les réformes législatives et les initiatives visant à éviter tout frais de recrutement et à réglementer les agences de recrutement, de sorte que le recrutement s’effectue par l’intermédiaire d’entreprises agréées qui protègent les droits de tous les travailleurs migrants. Par exemple, en 2021, l’OIT, le ministère du Travail et le ministère de l’Intérieur ont organisé trois sessions de formation de deux jours sur les droits des travailleurs à l’intention du personnel de 14 centres de traitement des demandes de visa. La commission prend également note des programmes de formation sur le travail décent des travailleurs domestiques destinés aux agences de recrutement agréées qui ont été élaborés en coordination avec le Bureau du travail pour les travailleurs à l’étranger des Philippines, la Fédération internationale des travailleurs domestiques (IDWF) et l’OIT, En outre, le gouvernement a pris des mesures pour concevoir des outils et pour sensibiliser dans les secteurs de la construction et de l’hôtellerie, et il a notamment mis en œuvre une stratégie de renforcement des capacités en faisant participer des groupes de travailleurs et le ministère du Travail pour partager des connaissances, définir de meilleures pratiques et publier une nouvelle directive sur le recrutement et l’emploi pour le secteur hôtelier du Qatar.
En outre, selon les rapports de situation, le ministère du Travail a révoqué les licences de 54 agences de recrutement en 2022 et de quatre en 2023. La commission note à cet égard que le ministère du Travail et l’OIT ont achevé une évaluation du système d’octroi des licences et de contrôle des agences de recrutement en juillet 2023. Cet examen a porté sur les politiques, les procédures opérationnelles et les mécanismes de contrôle. La troisième phase du programme de coopération technique poursuivra l’élaboration d’un cadre d’inspection complet avec des lignes directrices et des outils normalisés, et se concentrera aussi sur le renforcement des capacités des inspecteurs.
La commission salue ces mesures, mais note que des difficultés subsistent en ce qui concerne les pratiques de recrutement. Selon une étude que la Confédération syndicale internationale a menée en 2023 sur le recrutement de travailleurs népalais, les travailleurs continuent de payer des frais de recrutement élevés (99 pour cent des travailleurs interrogés avaient payé des frais de recrutement pour travailler au Qatar) et, malgré les progrès réalisés, les travailleurs migrants continuent d’être trompés au sujet de leur emploi et de leur salaire. En outre, si 82 pour cent des travailleurs interrogés ont indiqué qu’ils travailleraient à nouveau au Qatar, moins d’un tiers d’entre eux ont déclaré qu’ils utiliseraient la même agence pour de futurs recrutements, tandis que 72 pour cent ont indiqué qu’ils n’auraient plus recours à la même agence.
Par conséquent, la commission prie le gouvernement de poursuivre et d’intensifier ses efforts pour que les travailleurs migrants n’aient pas à payer des frais de recrutement. Elle le prie également de continuer à prendre des mesures pour assurer la mise en œuvre effective du système de gestion électronique des contrats pour que les travailleurs migrants soient recrutés selon des pratiques équitables et décentes et, par conséquent, ne soient pas trompés sur leur emploi et leur salaire une fois arrivés au Qatar. À cette fin, la commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le contrôle des agences de recrutement, y compris sur les mesures prises pour renforcer l’inspection des agences, sur le nombre de violations commises par des agences dans le cadre de leurs pratiques de recrutement et les sanctions imposées en conséquence. Elle le prie aussi de communiquer les résultats de l’évaluation de 2023 du système d’octroi des licences et de contrôle des agences de recrutement.
iv) Paiement tardif ou non-paiement des salaires. La commission salue l’adoption, en mars 2021, du premier salaire minimum non discriminatoire au Qatar qui s’applique à tous les travailleurs, indépendamment de leur nationalité et de leur profession, y compris aux travailleurs domestiques. En outre, la commission prend note de l’information du gouvernement selon laquelle le ministère du Travail continue de veiller à la mise en œuvre du système de protection des salaires, dans lequel plus de 1,66 million de travailleurs sont enregistrés. Le système inclut désormais les indemnités pour la nourriture et le logement, et la rémunération des heures supplémentaires, ce qui améliore la clarté et la transparence dans le calcul des salaires et permet de détecter les paiements inférieurs au salaire minimum. Le gouvernement indique aussi que, pour compléter une initiative du ministère du Travail et de la Banque centrale du Qatar visant à faciliter l’ouverture de comptes bancaires pour les travailleurs domestiques, un processus pour mettre en place un système similaire au système de protection des salaires est envisagé pour les travailleurs domestiques.
Par ailleurs, la commission note la préoccupation exprimée par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies dans ses observations finales de 2023 face à la situation des travailleurs migrants qui subissent fréquemment des défauts ou des retards de rémunération (E/C.12/QAT/CO/1). À cet égard, la commission observe que, à la lecture du rapport de situation de 2023, l’entreprise concernée est automatiquement bloquée lorsque le système de protection des salaires détecte qu’un travailleur n’a pas été payé ou a été payé à un taux inférieur au salaire minimum, et le ministère du Travail prend alors contact avec l’entreprise pour obtenir des informations supplémentaires. Si l’infraction est confirmée et n’est pas immédiatement corrigée, un avis d’infraction est émis. C’est ainsi que 3 102 avis de violation ont été émis en 2021, 7 769 en 2022 et 2 927 jusqu’en août 2023. En outre, selon le rapport de situation de 2023, un amendement législatif est en cours d’examen pour que des amendes soient automatiquement émises en cas de défaut de paiement des salaires. Cependant, la commission observe que, selon les rapports d’activité de 2021 et de 2022, les plaintes sont principalement liées au non-paiement des salaires et des indemnités de fin de service.
La commission prie le gouvernement de redoubler d’efforts pour garantir le paiement en temps voulu des salaires aux travailleurs migrants et remédier rapidement à toute violation détectée, en veillant à ce que les travailleurs concernés reçoivent sans délai les salaires qui leur sont dus. La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour appliquer efficacement le système de protection des salaires et à imposer des sanctions appropriées aux entreprises qui retardent ou omettent de payer les salaires et les cotisations des travailleurs.
v) Inspection du travail. La commission note, d’après les rapports de situation de 2022 et de 2023, qu’entre octobre 2021 et octobre 2022, 19 978 lieux de travail ou installations et 3 406 unités résidentielles ont été inspectés, ce qui a conduit à la détection de 7 389 violations sur les lieux de travail et de 1 427 violations dans les unités résidentielles. Jusqu’en septembre 2023, le Département de l’inspection du travail du ministère du Travail a contrôlé 22 770 entreprises, 2 493 logements et 14 795 lieux de travail. La commission note que le programme de coopération technique a continué à soutenir le programme de formation pour le Département de l’inspection du travail du ministère du Travail.
Tout en prenant note des mesures prises par le gouvernement, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur le nombre et la nature des cas dans lesquels le Département de l’inspection du travail a identifié des violations qui pourraient constituer des situations de travail forcé, et qui ont ensuite été transmises aux autorités compétentes chargées du contrôle de l’application de la loi. Elle prie également le gouvernement de communiquer des informations sur toute formation dispensée au Département de l’inspection du travail concernant la détection de situations de travail forcé et leur renvoi aux autorités compétentes.
vi) Accès à la justice. Faisant suite à ses commentaires précédents, la commission prend note des informations détaillées transmises dans le rapport du gouvernement sur les mesures prises pour améliorer le mécanisme de traitement des plaintes et de règlement des conflits du travail. Il s’agit notamment de faciliter le dépôt de plaintes en utilisant des moyens accessibles, tels que la ligne d’assistance 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, et d’autres applications intelligentes, comme l’application mobile «Amerni». Le ministère du Travail a également lancé récemment une «plateforme unifiée pour les plaintes et les dénonciations» permettant aux employés et aux travailleurs du secteur privé, ainsi qu’aux travailleurs domestiques, de déposer des plaintes par voie électronique.
Le gouvernement prend également des mesures pour améliorer l’efficacité du processus de règlement des plaintes et des différends. Outre le vaste plan de transformation numérique du ministère du Travail, le gouvernement indique que le ministère a créé un nouveau département chargé d’examiner les plaintes qui passent du stade du règlement à celui du litige, afin de garantir que toutes les affaires en suspens sont traitées. Le ministère du Travail s’efforce également d’établir davantage de commissions de règlement des conflits du travail pour faire face à l’augmentation du nombre de conflits du travail, garantir la facilité d’accès des travailleurs à leurs droits et accélérer les procédures. Selon le rapport de situation de 2023, le nombre de commissions de règlement des conflits du travail est passé de trois à cinq en octobre 2022. En outre, le ministère du Travail procède régulièrement à des évaluations complètes des mécanismes de plainte en matière de travail, du processus de règlement et des commissions de règlement des conflits du travail.
La commission note, d’après le rapport de situation de 2023, que 31 549 plaintes ont été déposées en 2022 et 24 862 jusqu’au 31 octobre 2023. En 2022, 227 plaintes anonymes ont également été déposées par le biais du canal prévu à cet effet. La commission prend en outre note des statistiques transmises par le gouvernement selon lesquelles, entre le 1er janvier 2020 et le 31 août 2023, 24 618 cas ont été soumis aux commissions de règlement des conflits du travail, lesquelles ont rendu 12 122 décisions alors que 17 914 décisions sont en cours de traitement. En ce qui concerne la mise en œuvre de ces décisions, la commission note qu’un bureau chargé de l’exécution des décisions des commissions de règlement des conflits du travail a été créé au siège du ministère pour accélérer et compléter sur place les formalités judiciaires et assurer l’application rapide des décisions communiquées par voie électronique, comme la saisie des biens et des avoirs de l’entreprise.
La commission encourage le gouvernement à poursuivre ses efforts pour faciliter l’accès des travailleurs migrants aux commissions de règlement des conflits du travail. Elle prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le nombre et la nature des plaintes déposées par les travailleurs migrants auprès des commissions de règlement des conflits du travail, sur leurs résultats en termes de sanctions et de réparations, y compris dans les cas de saisie des biens et des avoirs de l’entreprise. En outre, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur: i) le délai moyen écoulé entre le dépôt d’une plainte et le prononcé de la décision par la commission de règlement des conflits du travail; et ii) l’efficacité du contrôle et du suivi de l’exécution des décisions de conciliation et des décisions des commissions de règlement des conflits du travail.
2. Travailleurs domestiques migrants. Faisant suite à ses précédents commentaires sur la loi no 15 de 2017 sur les travailleurs domestiques migrants et le contrat type approuvé par le ministère du Travail en septembre 2017, la commission note que le ministère a révisé et adopté un nouveau contrat de travail type pour les travailleurs domestiques en 2021. Ce nouveau contrat aligne les droits des travailleurs domestiques sur ceux des autres travailleurs employés dans le secteur privé en ce qui concerne les heures supplémentaires, le licenciement et les congés de maladie. La commission note que, d’après le rapport de situation de 2023, les centres de traitement des demandes de visas du Qatar basés au Bangladesh, en Inde, au Népal au Pakistan, aux Philippines et au Sri Lanka traitent désormais les demandes des travailleurs domestiques migrants qui se rendent au Qatar en utilisant le contrat de travail standard de 2021. En outre, le système de certification numérique des contrats, approuvé par le ministère du Travail, sera élargi pour pouvoir obtenir une certification numérique des nouveaux contrats de travail pour les travailleurs domestiques. La commission prend note à cet égard de l’indication du gouvernement selon laquelle 117 435 travailleurs domestiques ont été enregistrés dans le système de gestion électronique des contrats.
La commission prend également note des informations détaillées du gouvernement sur les mesures qu’il continue de prendre pour faciliter l’accès des travailleurs domestiques au mécanisme de traitement de plaintes et pour que ces derniers aient connaissance de l’existence de ce mécanisme (voir ci-dessous). Par exemple, plus de 20 sessions d’information et ateliers pour les travailleurs domestiques ont été organisés spécialement sur la loi no 15 de 2017, le contrat de travail type, les mécanismes de plainte, le changement d’emploi, et la sécurité et la santé au travail. Plusieurs tables rondes ont aussi été organisées avec des parties prenantes, comme des représentants des travailleurs domestiques, de la Fédération internationale des travailleurs domestiques (IDWF), du ministère du Travail et du ministère de l’Intérieur, pour insister sur les effets des réformes de la législation du travail sur les travailleurs domestiques et le rôle des employeurs dans la promotion du travail décent pour cette catégorie de travailleurs. En partenariat avec des organisations non gouvernementales, deux brochures ont été publiées à l’intention respectivement des travailleurs domestiques (dans 12 langues différentes) et des employeurs (dans deux langues) pour les informer sur leurs obligations et droits respectifs en vertu de la loi.
La commission note aussi qu’outre la «plateforme unifiée pour les plaintes et les dénonciations», également accessible aux travailleurs domestiques par voie électronique, le ministère du Travail a créé un département spécial chargé de recevoir les plaintes des travailleurs domestiques et de les régler. La commission note à cet égard les statistiques transmises par le gouvernement concernant le nombre de plaintes reçues émanant de travailleurs domestiques entre 2021 à août 2023 (2 571 en tout), le nombre de cas réglés (2 169) et le nombre de cas qui étaient en cours d’examen (145). Selon les statistiques incluses dans le rapport de situation de 2023, entre 2021 et octobre 2023, 2 666 plaintes ont été déposées. En 2021, 83 pour cent des plaintes ont été réglées et 16 pour cent ont été transmises à des commissions de règlement des conflits du travail. En 2022, 89 pour cent des plaintes ont été réglées et 9 pour cent ont été transmises à des commissions de règlement des conflits du travail; et en 2023, 82,4 pour cent des plaintes ont été réglées et 6,8 pour cent ont été transmises à des commissions de règlement des conflits du travail du travail.
Par ailleurs, la commission prend note des inquiétudes exprimées par le Comité des droits de l’homme des Nations Unies dans ses observations finales de 2022, face aux informations selon lesquelles les cas de mauvais traitements à l’égard des travailleurs migrants, en particulier les travailleurs domestiques, ne sont pas toujours signalés parce que les intéressés craignent de subir des représailles de la part de leur employeur et d’être accusés d’avoir quitté leur lieu de travail sans autorisation («travailleurs en fuite»), ce qui leur vaudrait d’être détenus ou expulsés (CCPR/C/QAT/C0/1). En outre, dans ses conclusions de 2023, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies s’est déclaré particulièrement préoccupé par les informations selon lesquelles de nombreux travailleurs domestiques continuent d’être soumis à des conditions de travail abusives, qui comprennent des horaires de travail excessifs sans pauses ni jours de congé, la confiscation des passeports et des téléphones portables et, parfois, des agressions physiques, verbales ou sexuelles (E/C.12/QAT/CO/1).
Tout en notant les mesures prises par le gouvernement, la commission le prie de poursuivre ses efforts pour protéger les travailleurs domestiques migrants contre des conditions de travail abusives qui peuvent parfois constituer du travail forcé. À cet égard, la commission prie le gouvernement de: i) veiller à la mise en œuvre effective du contrat de travail type de 2021 et à l’identification des cas d’exploitation grâce à un contrôle efficace, notamment par l’inspection du travail; et ii) poursuivre ses mesures visant à faciliter l’accès des travailleurs domestiques migrants aux mécanismes de plainte et s’assurer que leurs plaintes sont traitées promptement. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations à cet égard, ainsi que sur le nombre de travailleurs domestiques migrants enregistrés dans le système de gestion électronique des contrats. La commission prie le gouvernement de continuer à fournir des informations sur le nombre et la nature des plaintes déposées par des travailleurs domestiques migrants et sur leur issue, y compris les sanctions appliquées aux employeurs. Elle le prie également d’indiquer les mesures prises ou envisagées pour assurer la protection des travailleurs domestiques migrants contre les représailles des employeurs ou les fausses accusations de fuite.
Article 25.Application de sanctions. Dans ses précédents commentaires, la commission a noté que l’article 322 du Code pénal prévoyait une amende ou une peine maximale de six mois de prison pour le fait de contraindre quiconque à travailler, avec ou sans salaire. Elle a également noté le nombre de cas de confiscation de passeport et de non-paiement des salaires qui avaient fait l’objet de poursuites en vertu de cette disposition, mais a observé que les sanctions imposées consistaient uniquement en des amendes.
La commission note que le gouvernement indique que le Comité national de lutte contre la traite des êtres humains s’efforce d’augmenter le nombre d’enquêtes menées sur des cas de travail forcé, et de condamnations de trafiquants de maind’œuvre par rapport aux années précédentes à travers l’application effective des dispositions de la loi no 15 de 2011 sur la lutte contre la traite des êtres humains (telle que modifiée par la loi no 5 de 2020). La commission observe toutefois avec regret que le gouvernement ne fournit aucune information sur ces enquêtes et condamnations, que ce soit en ce qui concerne les violations telles que la confiscation des passeports ou le défaut de paiement des salaires ou en ce qui concerne les cas qui ont été identifiés et poursuivis comme des cas de travail forcé, autres que ceux liés à la traite des personnes.
La commission rappelle une nouvelle fois au gouvernement que, conformément à l’article 25 de la convention, le fait d’exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire doit être passible de sanctions pénales et les sanctions imposées par la loi doivent être réellement efficaces et strictement appliquées. La commission prie à nouveau instamment le gouvernement de s’assurer que des enquêtes proactives sont menées et des poursuites sont entamées à l’encontre des personnes soupçonnées d’exploitation relevant du travail forcé et que, conformément à l’article 25 de la convention, des sanctions dissuasives sont effectivement appliquées aux personnes qui imposent du travail forcé à des travailleurs migrants. À cet égard, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour renforcer les capacités des organes chargés de l’application de la loi à identifier et mener des enquêtes dans les cas détectés de défaut de paiement des salaires, de salaires insuffisants ou de versement tardif des salaires; de confiscation de passeports; ou de frais de recrutement imputés au travailleur afin de déterminer si la situation constitue du travail forcé. Elle le prie à nouveau de continuer à fournir des informations sur les procédures judiciaires intentées, le nombre de jugements rendus à cet égard et la nature des sanctions imposées.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.
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