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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2011, Publication : 100ème session CIT (2011)

Convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958 - Fidji (Ratification: 2002)

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Un représentant gouvernemental a indiqué qu’en 2008 le Conseil national pour l’avenir de Fidji (NCBBF) a adopté la Charte des peuples pour le changement, la paix et le progrès, qui vise à bâtir une société fondée sur l’égalité de chances et la paix pour tous les citoyens des Fidji. Cette charte, qui a été élaborée sur la base des conclusions et recommandations contenues dans le Rapport sur l’état de la nation et de l’économie (rapport SNE), prévoit les mesures essentielles à prendre, telles que la promulgation d’une loi antidiscrimination, le développement de l’éducation, de la formation professionnelle et du placement dans l’emploi, la promotion d’une éducation multiculturelle et la suppression progressive des désignations institutionnelles à connotation raciale, l’élimination de toute catégorisation raciale inappropriée, de même que les distinctions de cet ordre dans les documents publics. Il est également prévu, entres autres mesures, d’accroître la participation des femmes à tous les niveaux de prise de décisions, d’adopter un code de conduite des fonctionnaires et autres personnes dépositaires de l’autorité publique, de réformer le secteur public, notamment en éliminant les ingérences politiques et en assurant la formation obligatoire des fonctionnaires, en renforçant la coopération entre l’Etat et le secteur privé et en instaurant un salaire minimum national. La charte prévoit également des mesures spécifiques concernant les peuples autochtones et leurs institutions. L’application des mesures envisagées par la charte comprend: une nouvelle Constitution interdisant la discrimination fondée sur la race, qui garantit le système «une personne, une voix»; des campagnes de sensibilisation du public en vue de la promotion de l’identité nationale; un hymne national et des cérémonies patriotiques que les écoles et les principaux organismes nationaux de la fonction publique doivent observer afin de promouvoir l’identité nationale; l’élimination des noms d’écoles primaires et secondaires ayant des connotations raciales; l’utilisation du nom commun «Fidjiens» pour tous les citoyens des Fidji, quelque soit leur origine ethnique.

Des mesures concrètes ont été prises par le gouvernement pour faire progresser ces stratégies. Il s’agit notamment des mesures suivantes: rebaptiser le pays en lui donnant le nom de «Fidji» et en veillant à ce que le nom de «Fidjiens» soit utilisé pour tous les citoyens des Fidji et pas seulement pour les peuples autochtones; éliminer toute catégorisation raciale inappropriée dans les états et les registres du gouvernement, par exemple, les formulaires demandant aux personnes d’origine indienne d’indiquer le nom de leur père ont été retirés; encourager la célébration de la Journée nationale des Fidji, qui est devenue un évènement important célébré chaque année. La plupart des écoles et des organismes du pays organisent aujourd’hui des cérémonies pendant lesquelles le drapeau des Fidji est hissé et l’hymne national proclamé. Le ministère de l’Education, de la Culture, de l’Art et du Patrimoine a fait avancer bon nombre des stratégies en faveur de l’identité nationale et de la cohésion sociale, grâce à des mesures telles que l’élaboration de programmes d’études constructifs, l’encouragement de l’enseignement des langues vernaculaires, des études comparées des religions et la création d’écoles et d’institutions spécialisées, notamment pour le renforcement de l’éducation et de la formation technique et professionnelle. Un nouveau plan d’études intitulé «Vie saine et éducation physique», destiné aux classes 3 et 4, a été mis au point. Il comprend les sujets suivants: Croissance et développement de l’homme, Mise en place de relations saines, Sécurité, Santé de la personne et de la communauté, et Education physique. La politique d’éducation inclusive offre également une éducation aux élèves handicapés. Le ministère pratique une politique de tolérance zéro en matière d’abus d’enfants et fait des établissements scolaires des zones exemptes de drogue. La mixité des races et des religions dans les écoles est encouragée. Une loi antidiscrimination sera promulguée. L’enseignement des deux langues vernaculaires devrait être inscrit au programme scolaire. Il est également prévu, d’une part, d’encourager et de promouvoir la liberté et l’entente religieuses dans les écoles et dans la société et, d’autre part, d’introduire dans le programme scolaire des études multiculturelles et de comparaison des religions.

En ce qui concerne la politique nationale sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, qui a été élaborée en 2008 en consultation avec les partenaires sociaux, à ce jour seuls deux cas de harcèlement sexuel ont été signalés au Tribunal des relations pour l’emploi, et quatre cas ont été résolus en 2011 par le Service de médiation. Cette politique sur le harcèlement sexuel étant plus reconnue, on s’attend à ce que le nombre des plaintes augmente. Pour ce qui est des nombreuses mesures que propose la Charte des peuples afin de promouvoir l’égalité de l’accès à l’éducation et à la formation, le gouvernement a l’intention de présenter aux cours des deux prochaines années des réformes intensives du système d’éducation. Il s’agit notamment d’examiner toutes les lois annexes, y compris le règlement de 1966 sur l’éducation (création et enregistrement des établissements scolaires) qui prévoit encore d’accorder, dans le processus d’admission, la priorité aux élèves d’une race ou d’une croyance spécifique. Le ministère de l’Education a mis en place une série de programmes d’enseignement dans le cadre de programmes de justice sociale et d’action positive, visant à améliorer l’accès à la scolarité et le maintien des élèves à l’école, à promouvoir l’identité et la citoyenneté nationales et culturelles, à élaborer des directives en vue de la mise au point de programmes d’études et à renforcer l’évaluation de l’apprentissage afin d’améliorer les résultats des étudiants, à accroître les programmes d’éducation rurale et à améliorer la qualité des programmes d’éducation et de formation technique et professionnelle.

Pour parler plus particulièrement de l’éducation professionnelle et de la formation, l’orateur a indiqué qu’en 2010 un total de 69 centres de formation ont reçu l’aide du gouvernement sous la forme de subventions, et 2 712 étudiants ont pu en bénéficier, contre 2 302 en 2009. Le nombre d’inscriptions d’étudiants ayant des besoins particuliers a lui aussi augmenté. Le nombre total d’étudiants inscrits dans l’ensemble des écoles, de la petite enfance au troisième cycle, est passé de 1 144 en 2009 à 1 182 en 2010. Le ministère de l’Education a supprimé en 2011 tous les examens externes des écoles primaires, jusqu’au niveau 4 (équivalent de la classe 10), ce qui devrait réduire considérablement le taux d’abandon scolaire et encouragera, pour la première fois dans l’histoire du pays, le suivi total de l’enseignement primaire et secondaire. Outre la gratuité de la scolarité, accompagnée d’un programme de gratuité des transports et des fournitures scolaires que le gouvernement a instauré en 2011, cette réforme devrait favoriser de manière significative l’accès des garçons et des filles au système scolaire. Pour compléter ces initiatives, Fidji a récemment mis en application le projet de lutte contre le travail des enfants du BIT, intitulé «TACKLE», qui a permis, entre autres, l’élimination du travail des enfants sur tous les lieux de travail. Cette initiative a été complétée par le projet du ministère de l’Education visant à encourager l’éducation des enfants, ainsi que par un projet actif de prévention de l’exploitation des enfants à des fins sexuelles dans l’ensemble de la communauté. Des consultations ont lieu également en permanence au sujet des améliorations à apporter aux programmes de formation professionnelle offerts aux écoles spécialisées. Le nombre d’élèves inscrits dans des programmes de formation professionnelle est passé de 201 en 2008 à 262 en 2010. Enfin, une politique d’éducation inclusive a été approuvée par le gouvernement dans le but d’assurer et de renforcer une éducation de qualité pour les étudiants ayant des handicaps et de satisfaire la demande des élèves ayant des besoins particuliers dans les écoles situées dans l’ensemble du pays. L’instauration d’une nouvelle politique incluse doit débuter cette année par le biais des mesures ci-après, telles que préconisées par le ministère de l’Education: améliorer les services de rééducation et de formation professionnelle fournis, de manière à répondre aux besoins des personnes handicapées; fournir des mesures d’incitation destinées aux employeurs pour les encourager à employer des personnes handicapées; mettre en place un plan d’action national de cinq ans en faveur des personnes handicapées; et mettre au point et appliquer une politique en faveur des personnes handicapées, y compris un règlement exigeant l’accès approprié des handicapés à tous les bâtiments et lieux publics.

Les membres travailleurs ont rappelé que le gouvernement a ratifié la convention en 2002. Pour la première fois, il doit s’expliquer devant la commission sur la manière dont il l’applique. Il s’agit d’un cas pour lequel la commission d’experts a noté un progrès, notamment en ce qui concerne: i) l’adoption, le 15 décembre 2008, par le NCBBF de la Charte des peuples, dont l’objectif est de bâtir une société fondée sur l’égalité des chances et la paix pour tous les citoyens des Fidji; et ii) la mise en place d’une politique nationale sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, élaborée en consultation avec les partenaires sociaux. La commission d’experts fait également mention de la question de l’égalité d’accès à l’éducation et à la formation professionnelle, qui rentrent dans la définition de la discrimination en matière d’emploi et de profession contenue à l’article 1, paragraphe 3, de la convention. La commission d’experts a formulé des doutes sur la mise en oeuvre des principes contenus dans la Charte des peuples, qui ne semble pas avoir encore débouché sur la réforme du système éducatif préconisée dans le rapport SNE. Le système éducatif en place depuis le règlement de 1966 n’a pas encore été modifié, de sorte que l’on peut penser que la priorité accordée aux élèves d’une race ou d’une croyance spécifique lors des inscriptions persiste encore. Constatant que, dans l’ensemble, la situation décrite semble rassurante si l’on s’en tenait au rapport de la commission d’experts, les membres travailleurs ont tenu à souligner que la réalité en est loin. Si la Charte des peuples existe, sous bien des aspects elle n’est qu’apparence et a pour principal objectif de donner une bonne image du pays devant la communauté internationale. La situation décrite dans le rapport de la commission contraste avec les actions menées depuis 2006 par le régime militaire en place qui n’a de cesse d’écarter tous les opposants. Le pays est actuellement soumis à un régime d’état d’urgence dans lequel tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains du Président, qui s’est octroyé les pleins pouvoirs sous prétexte de maintenir l’ordre public. Les décrets présidentiels qui font l’objet de révisions mensuelles ne sont donc soumis à aucun contrôle de la part des tribunaux en ce qui concerne leur légalité ou leur constitutionalité.

Les membres travailleurs ont indiqué que les syndicats du secteur public se sont vu retirer la possibilité de représenter ou défendre leurs membres dans des situations de discrimination, car ils sont désormais exclus du champ d’application de la promulgation sur les relations d’emploi. Il n’existe donc aucune possibilité de recours contre les cas de discrimination, de harcèlement sexuel ou pour exiger la protection de la maternité. Une telle exclusion est visée à l’article 1, paragraphe 1 b), de la convention, dans la mesure où les travailleurs du secteur public se voient dénier le droit à un traitement égal en matière d’emploi et profession. De plus, leur droit à être défendus leur est aussi dénié, de sorte qu’il est ainsi indirectement porté atteinte aux droits syndicaux dans le pays. Les membres travailleurs dénoncent l’adoption du décret no 21 du 16 mai 2011 portant révision de la promulgation de 2007 sur les relations d’emploi. Le décret no 21 s’applique de façon générale aux employeurs et aux travailleurs, y compris les travailleurs des pouvoirs locaux, des autorités centrales et de l’industrie du sucre, mais exclut de son champ d’application le gouvernement, certaines catégories telles que la police et l’armée. Mais, de façon générale, il s’agit bien d’un décret d’exclusion car il a pour effet d’exclure notamment 15 000 travailleurs du service public du champ du droit du travail. En effet, suite à l’introduction du nouvel article 266 de la promulgation de 2007, ces derniers ne disposent plus d’aucune base légale pour revendiquer leurs droits devant la justice. De plus, l’action du gouvernement a aussi eu comme effet de retirer certains domaines du champ de compétence des tribunaux. La protection contre la discrimination est un droit fondamental de l’homme qui est aujourd’hui dénié aux travailleurs du secteur public. Rappelant que, selon l’OIT, «la discrimination crée et renforce les inégalités. Au mépris de leurs aptitudes, elle entrave la liberté des êtres humains d’exploiter pleinement leur potentiel et de suivre la voie professionnelle et personnelle de leur choix. Dans l’impossibilité de développer leurs compétences et privées des satisfactions professionnelles, ces personnes sont peu à peu gagnées par l’humiliation, la frustration et le sentiment d’impuissance», les membres travailleurs attendent du gouvernement qu’il recherche une solution concertée afin de rendre la pratique conforme aux prescriptions de la convention car manifestement la situation ne correspond plus à celle décrite dans le rapport de la commission d’experts.

Les membres employeurs ont indiqué que le cas est discuté pour la première fois au sein de la commission, alors que la commission d’experts a formulé des observations sur l’application de cette convention par Fidji en 2007, 2010 et 2011, et se sont félicités de l’adoption, en décembre 2008, de la Charte des peuples, instrument qui vise à bâtir une société fondée sur l’égalité des chances entre tous les citoyens fidjiens. Ayant pris note des informations présentées par le gouvernement sur la teneur de la charte, les membres employeurs se félicitent de l’adoption de cet instrument et encouragent le gouvernement à fournir au BIT des informations à la fois sur la mise en oeuvre des mesures envisagées dans ce cadre afin d’interdire la discrimination et promouvoir l’égalité des chances dans l’accès à l’éducation, à la formation professionnelle et à l’emploi, et sur les effets produits par ces mesures dans la pratique. Les membres employeurs ont pris note avec intérêt de l’adoption par le gouvernement de la Politique nationale de 2008 concernant le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Se félicitant des informations présentées par le gouvernement au sujet de la mise en oeuvre de cette politique dans la pratique, les membres employeurs se réjouissent de ce que le gouvernement communiquera prochainement des informations complémentaires à ce sujet. En outre, s’agissant des mesures prévues par la Charte des peuples en vue d’assurer l’accès de tous à l’éducation, s’il est vrai que le gouvernement indique que les écoles dont l’accès est réservé en fonction de la race n’existent plus, le règlement de 1966 sur l’éducation prévoit toujours – en droit – un processus d’admission qui permet d’accorder la préférence à une catégorie d’élèves d’une race ou d’une croyance donnée. Le gouvernement a certes déclaré qu’un tel système n’a pas cours dans la pratique, mais les membres employeurs encouragent le gouvernement à garantir que, dans le cadre des réformes envisagées de l’éducation, l’égalité d’accès à l’éducation et à la formation professionnelle soit reconnue aux hommes et aux femmes de toutes origines ethniques et que la réglementation susvisée soit abrogée par suite. Le gouvernement est encouragé à communiquer des informations complémentaires au BIT à cet égard.

Les membres employeurs ont également regretté que, comme relevé par la commission d’experts, un recensement de 2007 révèle que la part représentée par les hommes dans la population active est bien plus élevée que celle des femmes, et que le taux de chômage des femmes est le double de celui des hommes. Ils regrettent également que le gouvernement n’ait apparemment pas répondu aux demandes d’information de la commission d’experts sur les mesures concrètement prises pour promouvoir l’égalité entre hommes et femmes dans l’emploi et la profession. De plus, le représentant gouvernemental n’ayant pas abordé cette question devant la présente commission, les membres employeurs ont demandé au gouvernement de fournir une réponse à la commission d’experts. Les membres employeurs se sont félicités de l’adoption, en avril 2007, de la promulgation sur les relations d’emploi, instrument qui interdit toute discrimination directe ou indirecte dans l’emploi et la profession. Ils ont également accueilli favorablement les informations présentées par le gouvernement sur les initiatives prises en 2008 et 2009 en matière de formation professionnelle et de sensibilisation, en application de la promulgation, et ils ont exprimé l’espoir que le gouvernement continuera de fournir des informations sur la mise en oeuvre de cette législation afin que la situation – en droit et dans la pratique – puisse continuer à être examinée périodiquement afin d’en assurer la conformité avec la convention. Notant, en ce qui concerne l’emploi dans le secteur public, que le gouvernement n’a fourni aucun complément d’information à la commission, mis à part la déclaration selon laquelle tous les nationaux fidjiens jouissent de l’égalité de chances dans l’accès à la fonction publique, et la sélection se fonde sur le mérite, les membres employeurs demandent au gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises afin d’assurer l’égalité de chances et de traitement dans l’accès à la fonction publique entre les hommes et les femmes de tous les groupes ethniques, afin de permettre une meilleure compréhension quant à la conformité avec la convention.

La membre travailleuse du Royaume-Uni a relevé que la situation à Fidji s’était considérablement détériorée depuis le dernier examen du présent cas par la commission d’experts. Aucune mesure n’a été prise pour faire disparaître la discrimination fondée sur la race, la croyance ou le sexe en matière d’accès à l’éducation et à la formation, comme l’avait demandé la commission. Au contraire, l’égalité d’accès est désormais moins probable, puisqu’en raison de l’augmentation des frais de scolarité de nombreux enfants n’ont pas accès à l’éducation. Un grand nombre d’enfants, notamment d’enfants issus des minorités ethniques, doivent quitter l’école et travailler. Outre la discrimination en matière d’accès à l’éducation, l’absence de protection juridique des travailleurs des Fidji est regrettable. Les travailleurs de la fonction publique ne peuvent plus saisir les tribunaux de plaintes liées à la discrimination, au harcèlement et à d’autres questions relatives à l’emploi, et se voient également refuser l’accès aux forums indépendants du Tribunal des relations professionnelles. Il s’agit là d’un effet du décret no 21 de 2011, lequel interdit purement et simplement les plaintes qui contestent les décisions du gouvernement ou de la fonction publique et rend nulles les décisions de justice défavorables aux organes publics. Les fonctionnaires ont subitement été privés de la possibilité de porter plainte pour discrimination ou pour d’autres abus concernant leurs conditions de travail, et ceux qui avaient prouvé le bien-fondé de leur recours ont été privés des mesures correctives. En outre, du fait de l’action du gouvernement, les travaux de la Commission des droits de l’homme sont au point mort. Il est regrettable que le gouvernement n’ait pris aucune initiative pour mettre en oeuvre les principales mesures proposées dans la Charte des peuples. Aucune loi antidiscrimination n’a été promulguée, il n’y a pas eu de progrès en matière d’éducation et de formation professionnelle, et les catégorisations et distinctions inappropriées d’ordre racial ou autre n’ont pas été supprimées. En revanche, les libertés fondamentales des travailleurs ont été restreintes. L’oratrice s’est dite préoccupée par le fait que, comme d’autres syndicalistes, ses collègues affiliés aux deux syndicats d’enseignants font constamment l’objet de discriminations et de harcèlement, alors qu’ils cherchent à travailler au sein d’un système éducatif fondé sur les principes d’égalité et de respect des droits de l’homme, de la dignité et de l’équité pour tous. La suspension puis le licenciement de M. Tevita Koroi, président de l’Association des enseignants des Fidji, qui n’a aucun espoir d’intenter un recours en raison du décret no 21, en sont un exemple. Il a par ailleurs été arrêté et menacé de violences, et les autorisations requises pour les réunions syndicales ayant été refusées ou délivrées trop tard, les responsables syndicaux n’ont pas pu voyager pour assister à ces réunions. L’oratrice a souligné que les ingérences dans les organisations de travailleurs étaient monnaie courante dans plusieurs secteurs, notamment dans l’industrie sucrière; elles prennent souvent la forme d’interventions militaires, d’intimidations et de violences.

S’agissant de l’adoption de la politique nationale sur le harcèlement sexuel de 2008, le Congrès des syndicats des Fidji n’a connaissance d’aucune affaire de harcèlement sexuel ayant fait l’objet de poursuites en application de la politique. Cela montre qu’absolument aucune mesure n’est mise en oeuvre pour permettre le dépôt de plaintes. De plus, les discriminations en matière de rémunération existent toujours et, pour les enseignants, l’écart salarial s’est même creusé car, l’accord conclu après l’initiative d’évaluation des emplois de 2003 n’ayant pas été appliqué, les indemnités n’ont pas pu être ajustées dans les zones rurales. Pour conclure, il convient de souligner que l’égalité sur le lieu de travail ne pourra commencer à exister que dans des conditions de dignité et de garantie des libertés et que, si le droit des travailleurs de porter plainte à propos de leurs conditions de travail ou de s’organiser autour de questions qui les intéressent n’est pas respecté, Fidji ne pourra pas mener d’action véritable en vue d’élaborer des mesures de lutte contre la discrimination.

Une observatrice représentant l’Internationale des services publics (ISP) s’est référée au décret no 21 qui exclut 15 000 fonctionnaires travaillant dans les ministères fidjiens de bénéficier des prestations et des droits prévus dans la promulgation sur les relations d’emploi de 2007 et, en particulier, des droits et prestations prévus dans la Charte des peuples. Conformément au décret no 21, les fonctionnaires ne bénéficieront plus du droit à l’égalité des possibilités d’emploi, du droit à la liberté d’association ni du droit à la négociation collective. La promulgation de 2007 visant à éliminer la discrimination pour des raisons d’origine ethnique, de genre, de religion, d’âge, d’handicap, d’infection comme le VIH et le sida ou d’orientation sexuelle et à interdire également le harcèlement sexuel, à promouvoir l’égalité de rémunération, à garantir la protection de la maternité et des salaires minimums ne s’appliquera plus aux fonctionnaires. Ce groupe a, par le biais de leurs syndicats, joué un rôle déterminant dans l’élaboration de la politique nationale de 2008 sur le harcèlement sexuel, et c’est à cet égard ironique qu’ils en soient exclus. En outre, le décret no 21 empêche également les fonctionnaires et leurs syndicats de toute mesure, revendication, différend ou conflit à l’encontre du gouvernement, les privant ainsi d’avoir recours au Tribunal sur les relations d’emploi, à la Cour sur les relations d’emploi ou à tout autre organisme de règlement. Toute plainte ou revendication en cours au moment de la promulgation du décret no 21 prendrait fin. Les employés du service public se voyaient donc refuser tout mécanisme permettant de résoudre leurs conflits à l’égard de décisions des autorités publiques étant donné que l’on ne pouvait pas dire que le Tribunal disciplinaire du service public fournisse un tel mécanisme, puisque son rôle est limité à revoir les mesures disciplinaires prises à l’encontre des employés. L’Etat, qui devrait établir la norme d’égalité pour tous les autres employeurs, a donc décidé effectivement de faire de la discrimination contre ses propres employés. L’adoption du décret no 21 contredit le rôle essentiel que les syndicats jouent dans la promotion de l’égalité. En l’absence de législation, ce sont les syndicats, par le dialogue social et la négociation collective, qui avaient acquis des résultats au plan de l’égalité; par la négociation collective, ils sont parvenus à l’égalité de salaires et surtout ceux qui sont contenus dans la législation, et ils représentent ceux qui font appliquer la législation et les accords visant à parvenir à l’égalité. De plus, l’orateur a rappelé que le Fonds national de prévoyance des Fidji était le seul fonds de sécurité sociale pour les travailleurs. Dans le cadre des propositions actuelles, le taux d’annuité du fonds de 15 pour cent passera à 9 pour cent. Cette réduction spectaculaire représentera une grande injustice pour les travailleurs, qui ont contribué au fonds pendant des années dans l’espoir de recevoir une pension appropriée lors du départ à la retraite et de vivre leur vieillesse dans la dignité. La proposition doit être examinée également dans le contexte de la section 15 du décret no 6 de 2009, qui fixe à 55 ans l’âge obligatoire de départ à la retraite pour les fonctionnaires. Les deux mesures associées feront que la majorité des retraités prendront leur retraite en étant pauvres. Il est regrettable de noter que 65 pour cent des travailleurs employés à plein temps gagnent des sommes inférieures à la ligne de pauvreté et que 15 pour cent de la population vivent dans des habitats précaires. En conclusion, alors que l’OIT a reconnu depuis longtemps les principes de la liberté d’association et de la négociation collective comme étant fondamentaux à l’élaboration de tout autre droit du travail, les amendements à la promulgation de 2007 introduits par le décret no 21 contrastent fortement avec ces principes.

La membre travailleuse de l’Australie s’est associée aux préoccupations exprimées par les membres travailleurs concernant le non-respect de la convention par les autorités. Quant aux questions soulevées par la commission d’experts à propos de l’adoption de la Charte des peuples, il convient de relever que peu d’initiatives ont été prises pour la mettre en oeuvre, en droit comme dans la pratique. Cela vaut aussi pour la politique nationale sur le harcèlement sexuel de 2008. La commission d’experts et le Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes se sont dits préoccupés par l’absence de dispositions juridiques spécifiques donnant effet à cette politique, et par l’absence de mesures concrètes destinées à lutter contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. S’agissant de la nécessité de garantir l’accès à des mécanismes de plainte en matière de harcèlement sexuel, la Commission des droits de l’homme des Fidji avait été créée en vertu de la Constitution de 1997 pour assurer la surveillance et la protection des droits de l’homme dans le pays. Depuis l’abrogation de la Constitution, intervenue en 2009, et même si ladite commission a été recréée par décret présidentiel, elle n’a plus la même légitimité, ni la même autorité, pour promouvoir ou protéger les droits de l’homme dans le pays, notamment le droit de ne pas subir de discrimination en matière d’emploi et de profession. En outre, l’oratrice a déploré l’existence d’une discrimination antisyndicale et d’une discrimination fondée sur l’opinion politique. Ces deux types de discrimination, souvent intimement liés, sont répandus et prennent actuellement une importance accrue. Les travailleurs sont souvent contraints de faire un choix: exercer leur emploi ou jouer un rôle au sein d’un syndicat, et tout syndicaliste qui critique le régime en public risque de perdre son travail et, partant, de ne plus pouvoir exercer son métier ou d’être privé de revenu décent pour vivre ou faire vivre sa famille. Compte tenu de cette évolution, il est très difficile d’imaginer comment les autorités des Fidji pourraient véritablement élaborer et mettre en oeuvre des mesures de lutte contre la discrimination en matière d’emploi et de profession, et comment elles pourraient participer au dialogue social pour les projets de loi et de politiques relatifs à la convention. Il est également difficile de considérer que des consultations sont menées de bonne foi dans un pays où l’ingérence dans les organisations et les activités syndicales est de plus en plus fréquente, et où les personnes qui cherchent à représenter les travailleurs font l’objet d’intimidations et craignent pour leur sécurité et celle de leur famille. On peut se demander dans quelle mesure il est possible de reconnaître et de protéger véritablement les droits des travailleurs comme le prévoit la convention dans un pays où la primauté du droit est précaire, où le gouvernement provisoire a suspendu l’application de la Constitution et gouverne au moyen de décrets, où les tribunaux se voient empêchés d’exercer leur compétence pour de nombreuses questions, où la confiance dans l’indépendance et l’intégrité du système judiciaire s’érode jour après jour, où les médias ne jouissent d’aucune liberté et où le droit des travailleurs d’accéder à des mécanismes de règlement des différends efficaces et impartiaux, notamment pour déposer des plaintes concernant la discrimination, et d’être représentés par les organisations de leur choix a été considérablement restreint. Pour conclure, s’il convient d’admettre que le gouvernement a pris des initiatives pour améliorer la conformité du droit national avec la convention – adoption de la Charte des peuples et de la politique nationale sur le harcèlement sexuel –, compte tenu du climat politique actuel, on peut douter de la capacité des autorités à lutter contre la discrimination fondée sur les sept motifs énoncés dans la convention en matière d’emploi et de profession.

Un observateur de la Confédération syndicale internationale (CSI) s’est concentré sur les réalités pratiques et les difficultés que rencontrent les syndicats pour traiter de façon efficace des questions de la discrimination et du traitement inéquitable des travailleurs. Si les partenaires sociaux ont entrepris de réviser diverses dispositions de la promulgation de 2007 sur les relations d’emploi, comme l’a demandé la commission d’experts, le gouvernement a imposé le décret no 21 de 2011 qui exclut les travailleurs du secteur public des dispositions de la promulgation sur les relations d’emploi, les privant ainsi de tous droits au titre de cet instrument, y compris le droit à l’égalité de rémunération et des possibilités d’emploi égales, ainsi que la protection contre toute forme de discrimination. Les travailleurs ou leur syndicat dans le secteur public n’ont plus le droit de remettre en question toute décision du gouvernement devant quelque tribunal que ce soit, même s’ils ont pu-être l’objet de discrimination ou d’un traitement inéquitable. Les consultations tripartites ont été compromises ou sont au point mort alors que le gouvernement publie unilatéralement et impose des décrets qui ne sont pas conformes aux normes fondamentales du travail ou aux droits fondamentaux. De même, les décrets nos 6, 9, 10 et 25 de 2009 n’autorisent pas les syndicats ou les travailleurs dans le secteur public, y compris les organismes détenus par l’Etat et l’industrie sucrière, à remettre en question toute décision de gestion au titre de laquelle des mesures ont été prises sous le prétexte d’une restructuration. Cela porte encore sur des cas de discrimination, des possibilités d’emploi inégales ou injustes, des licenciements et le refus de l’égalité de salaire. Tous ces décrets mettent fin sommairement à tout litige en suspens au tribunal d’arbitrage ou au tribunal du travail. Les règlements d’urgence d’ordre public en vigueur depuis les derniers vingt-sept mois limitent le droit des travailleurs et de leur syndicat, et dans certains cas les empêchent d’organiser des réunions pour discuter de ces questions et les résoudre. Ces règlements privent les travailleurs du droit de liberté de parole, de réunion et de toute forme d’action de revendication. Les médias se voient également refuser la liberté d’expression. Toute infraction aux règlements d’urgence d’ordre public exposera le syndicat et ses membres à des poursuites ou à la persécution. Eu égard aux observations de la commission d’experts sur le harcèlement sexuel et la mise en oeuvre des dispositions de la loi sur les relations d’emploi, l’orateur a indiqué que le gouvernement a exclu totalement l’ensemble des travailleurs du secteur public de ces dispositions par le biais des décrets susmentionnés. En conséquence, la question de la mise en oeuvre soulevée par la commission est redondante. Les travailleurs ne jouissent plus de cette protection dans le secteur public. Dans le secteur privé, ces droits continuent d’exister pour le moment dans les statuts mais, dans la pratique, un petit nombre de cas isolés, s’il en existe, pour lesquels une sentence de harcèlement sexuel a été prononcée, l’application des politiques demeure un rêve lointain. Le fait est que les travailleurs font face à l’insécurité de l’emploi simplement parce que leurs droits fondamentaux ont été supprimés et il est donc peu probable qu’ils soulèvent des plaintes avec leurs employeurs ou leurs syndicats par peur de représailles, notamment l’intimidation et la cessation de l’emploi. Il est impossible de parler de non-discrimination et d’égalité dans un tel contexte. Les nobles principes proclamés dans la Charte des peuples sont simplement de belles paroles destinées à tromper la communauté internationale. L’orateur a affirmé que de nombreux citoyens qui ont osé critiquer les politiques du gouvernement, y compris lui-même, ont été l’objet d’arrestations arbitraires de la part des militaires, de tortures et de coups dans les camps militaires. Le peuple vit dans la peur et n’a pas son mot à dire contre de telles atrocités, ou contre toute forme de discrimination ou de possibilité injuste ou inégale. Enfin, l’orateur a indiqué que les postes vacants du secteur public sont souvent pourvus sur la base de critères politiques et non en fonction du mérite, et cela explique qu’un grand nombre de membres des forces armées occupent des positions gouvernementales importantes.

Le représentant gouvernemental a indiqué qu’il ressort clairement de la discussion que certains orateurs s’intéressent davantage aux questions de politique régionale qu’aux mesures prises par le gouvernement en conformité avec la convention. Il répondra par conséquent sur seulement certains points. Les déclarations qui ont été faites sur l’état d’urgence dans le pays ne sont pas exactes. Un règlement d’urgence d’ordre public est resté en vigueur pendant trente jours d’affilée, après quoi il a été conseillé au Président de décider si cet état d’urgence devait être maintenu ou non, selon l’évolution de la situation en matière de sécurité. Actuellement, l’état d’urgence est en vigueur et, par conséquent, certains droits, comme la liberté d’association, sont restreints. S’agissant du règlement de 1966 sur l’éducation (création et enregistrement des établissements scolaires), qui prévoit d’accorder une priorité, dans le processus d’admission, aux élèves d’une race ou d’une croyance spécifique, son gouvernement a conscience que cet instrument doit être modifié dans le cadre de la réforme de plus grande envergure du système éducatif. Le gouvernement entend s’employer à prévenir la discrimination pour quelque motif que ce soit. Le ministère de l’Education s’emploie résolument à ce qu’aucune école n’applique les dispositions du règlement et veille à ce qu’aucun établissement ne le fasse. S’agissant des dispositions du décret no 21, cet amendement n’a pas d’incidence sur le fonctionnement des tribunaux disciplinaires du service public, créés en 2008 pour traiter des questions concernant les travailleurs du secteur public, et maintient les voies de recours telles que la cour d’appel et la Cour suprême. Cet amendement évite en revanche que les parties lésées ne recommencent à engager une action devant les juridictions du travail, et ce afin d’éviter toute duplication des procédures. Le problème de la pauvreté, soulevé par certains orateurs, n’est pas propre à Fidji qui est un pays en développement et qui s’efforce d’éliminer la pauvreté grâce, notamment, à la distribution gratuite de manuels scolaires aux élèves, plus particulièrement dans les zones rurales, en vue de promouvoir l’égalité d’accès à l’éducation. S’agissant du cas de M. Tevita Koroi, le gouvernement a déjà répondu par écrit au Comité de la liberté syndicale dans le cadre du cas no 2723 et ne reviendra pas en détail sur cette question. Quant aux commentaires faits sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, ces allégations sont dénuées de fondement et sans rapport avec la discussion. Bien que de telles allégations soient régulièrement faites, elles ne sont jamais accompagnées d’exemples concrets.

Les membres employeurs ont souligné que, si l’adoption de la Charte des peuples en 2008 avait été bien accueillie, le gouvernement est maintenant appelé à fournir des informations sur la mise en oeuvre des mesures requises par la charte, comme l’adoption d’une loi antidiscrimination, afin que la commission d’experts puisse examiner la manière dont le gouvernement applique effectivement la convention. Bien que le gouvernement ait fourni à cette commission des informations sur l’impact du décret no 21, les membres employeurs ont instamment prié le gouvernement de prendre des mesures pour favoriser tant l’égalité dans l’emploi et la profession pour les personnes de toutes origines ethniques que l’égalité entre les sexes. Les membres employeurs demeurent préoccupés par l’impact du décret no 21 sur la protection prévue dans la promulgation sur les relations de travail et encouragent le gouvernement à fournir au BIT des informations complémentaires concernant ledit décret et son impact sur l’égalité des chances et de traitement dans l’emploi dans le secteur public, de sorte que le respect de la convention puisse être évalué.

Les membres travailleurs ont rappelé que le présent cas illustre comment la situation d’un pays telle que décrite dans un rapport peut se révéler dépassée en quelques mois du fait d’un régime autoritaire en place. Cependant, dans l’intérêt des travailleurs, une solution concertée devrait être recherchée pour envisager une révision de la législation, incluant la possibilité de revenir au texte initial de la promulgation de 2007. La Charte des peuples, qui a comme objectif de bâtir une société fondée sur l’égalité des chances et la paix pour tous les citoyens des Fidji, constitue une base de travail appropriée dans l’atteinte de cet objectif, comme l’indique le rapport de la commission d’experts. Il reste à transposer les principes contenus dans la charte dans la réalité de la vie quotidienne des travailleurs. Le gouvernement devrait accepter d’engager un dialogue tripartite avec l’assistance du BIT afin d’abroger les décrets présidentiels en vue d’assurer le respect de la convention mais aussi de la législation relative à la liberté syndicale et au droit de négociation collective. Le gouvernement devrait garantir l’accès à la justice à tous les travailleurs des secteurs public et privé afin qu’ils puissent faire valoir leurs droits, cela de manière rétroactive afin de neutraliser les effets du décret no 21. Enfin, le gouvernement est requis de fournir toutes les informations demandées par la commission d’experts pour sa prochaine réunion de novembre/décembre 2011. Ces informations devraient inclure la manière dont la politique nationale sur le harcèlement sexuel est mise en oeuvre sur le lieu de travail et la mise en oeuvre de la réforme du système éducatif, en particulier sur les mesures visant à garantir l’égalité d’accès des garçons et des filles, des hommes et des femmes, de tous les groupes ethniques à l’éducation et à la formation professionnelle, et sur les résultats de ces mesures.

Conclusions

La commission a pris note des informations communiquées oralement par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

Elle a observé que la commission d’experts a pris note avec intérêt de l’adoption, en 2008, de la Charte des peuples pour le changement, la paix et le progrès et de la politique nationale sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. La commission a également pris note des mesures proposées pour assurer l’accès à l’éducation pour tous et du fait que le système éducatif va faire l’objet d’une réforme de grande ampleur. Dans ce contexte, la commission d’experts avait demandé des éclaircissements sur la question de savoir si le système instauré par le règlement de 1966 sur l’éducation (Création et enregistrement des établissements scolaires), qui prévoit d’accorder une priorité, dans le processus d’admission, aux élèves d’une race ou d’une croyance spécifique, était toujours en vigueur.

La commission a pris note des informations fournies par le gouvernement mettant en lumière les stratégies et les mesures concrètes prises ou envisagées, telles que la suppression de toute catégorisation raciale et inappropriée, de même que les distinctions de cet ordre dans les documents publics. A cet égard, la commission a pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle les formulaires qui exigeaient des personnes d’ascendance indienne qu’elles indiquent le nom de leur père ont été supprimés. La commission a en outre pris note de la déclaration du gouvernement selon laquelle la réforme du système d’éducation comportera une révision de toutes les lois auxiliaires, dont le règlement de 1966 sur l’éducation (Création et enregistrement des établissements scolaires). Le gouvernement a déclaré qu’il met en oeuvre un éventail de programmes destinés à améliorer le système éducatif, notamment pour les personnes handicapées, et la qualité de l’enseignement technique et professionnel, notamment dans le but de relever le taux de scolarisation des garçons et des filles. S’agissant de la mise en oeuvre de la politique nationale sur le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, la commission a pris note des informations relatives à deux cas de harcèlement sexuel portés devant le tribunal des relations d’emploi et de quatre cas tranchés par le service de médiation en 2011.

Tout en notant que la Charte des peuples constitue une bonne base pour la poursuite de l’action de promotion de l’égalité de chances et de traitement dans l’emploi et la profession, la commission a instamment prié le gouvernement de faire en sorte que les principes qu’elle énonce débouchent sur des actions concrètes. A ce propos, elle a invité le gouvernement à modifier ou abroger l’ensemble des lois et règlements discriminatoires sur le plan racial, y compris le règlement de 1966 sur l’éducation (Création et enregistrement des établissements scolaires); à s’attaquer efficacement aux pratiques discriminatoires; et à garantir l’égalité dans l’emploi, la formation et l’éducation pour toutes les personnes de tous les groupes ethniques.

La commission a également pris note du récent amendement de la promulgation no 37 sur les relations d’emploi de 2007 par le décret (amendement) sur les relations d’emploi de 2011 (décret no 21 de 2011), dont copie a été fournie par le gouvernement, et qui exclut les agents de l’Etat, dont les enseignants, du champ d’application de la promulgation sur les relations d’emploi et, par conséquent, de ses dispositions antidiscriminatoires (article 2). La commission a fait part de sa préoccupation devant le fait que cette exclusion pourrait avoir une incidence négative sur le droit à la non-discrimination et à l’égalité de chances et de traitement des agents de l’Etat, en particulier dans le contexte des difficultés auxquelles se heurte actuellement l’exercice du droit à la liberté syndicale. La commission a en outre pris note du fait que l’article 3 du décret no 21 interdit toute action, procédure, recours ou plainte «qui vise ou visait à contester, ou implique le gouvernement…, tout ministre ou la Commission de la fonction publique… qui a été introduite en application ou dans le cadre de (la promulgation sur les relations d’emploi)», et a dûment pris note des explications du gouvernement à cet égard. La commission a instamment prié le gouvernement de faire en sorte que les agents de l’Etat aient les mêmes droits à la non-discrimination et à l’égalité dans l’emploi et la profession que les autres travailleurs couverts par la promulgation sur les relations d’emploi et aient accès à des instances judiciaires compétentes pour faire valoir leurs droits et obtenir une réparation adéquate. La commission a demandé en particulier que l’impact du décret no 21 soit réexaminé dans ce contexte.

Prenant note du faible taux de participation des femmes dans la population active et de leur taux de chômage élevé, la commission a prié le gouvernement de prendre des mesures concrètes afin de promouvoir l’égalité entre hommes et femmes dans les secteurs public et privé.

La commission a prié instamment le gouvernement de fournir des informations détaillées sur les mesures prises pour mettre en oeuvre la Charte des peuples et la politique nationale sur le harcèlement sexuel, et sur les résultats obtenus par le biais de cette action dans les secteurs public et privé. La commission a prié instamment le gouvernement de prendre de telles mesures en consultations avec les partenaires sociaux. Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle une loi antidiscrimination allait être adoptée, elle a prié le gouvernement de fournir des informations à cet égard, de telle sorte que la commission d’experts puisse examiner sa conformité avec la convention. La commission a également pris note des préoccupations relatives à la difficulté de l’exercice du droit à la liberté syndicale dans le pays et a appelé le gouvernement à mettre en place, avec l’assistance du BIT, les conditions nécessaires à un véritable dialogue tripartite en vue de résoudre les questions liées à l’application de la convention.

La commission a prié le gouvernement d’inclure dans son rapport à la commission d’experts dû en 2011 des informations complètes sur tous les points soulevés par la commission et la commission d’experts, afin de permettre à la commission d’évaluer à sa prochaine réunion, en 2012, si des progrès ont été réalisés.

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